Mercredi 11 octobre 2006

- Présidence de M. Nicolas About, président. -

Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 - Audition de MM. Jean-Louis Buhl, président du conseil d'administration, et Jacques Lenain, directeur du Fonds de solidarité vieillesse (FSV)

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a procédé à une série d'auditions sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.

La commission a tout d'abord entendu MM. Jean-Louis Buhl, président du conseil d'administration, et Jacques Lenain, directeur du Fonds de solidarité vieillesse (FSV).

En introduction, M. Jean-Louis Buhl a rappelé qu'il a succédé voici quelques mois à M. Michel Laroque qui avait quitté la présidence du FSV pour protester contre le refus de l'Etat d'assurer l'équilibre budgétaire de ce fonds. S'il a lui-même accepté d'assurer la présidence du FSV, c'est précisément parce qu'il ne partage pas toutes les analyses de son prédécesseur, notamment en ce qui concerne les difficultés financières du fonds. L'équilibre du FSV en particulier doit être apprécié sur plusieurs années et non exercice par exercice. Sur la base de cette interprétation plus nuancée, le FSV peut parfaitement connaître des déficits temporaires, dans la mesure où ils sont rééquilibrés les années suivantes par des excédents.

Dans ces conditions, la question importante est celle de la dette accumulée depuis le début des années 2000. Incontestablement, la situation ainsi créée ne peut pas perdurer. Les constats effectués en 2006 et les perspectives pour l'année 2007 apportent cependant une note d'espoir avec une bonne progression des recettes et une évolution moins rapide des dépenses du fait du reflux du chômage. Aussi, un retour à l'équilibre annuel du FSV en flux est envisageable pour 2009 ou 2010 à droits constants. A partir de cette date, le fonds pourra ainsi commencer à rembourser sa dette.

En ce qui concerne le retour à l'équilibre des comptes, M. Jacques Lenain a souligné à son tour le fait que la période 2006-2007 apparaît plus favorable que la période 2002-2005.

Fin 2005, le déficit annuel s'élevait à 2 milliards d'euros et le déficit cumulé à 3,7 milliards d'euros. A fin 2006, le déficit annuel devrait redescendre à 1,2 milliard d'euros grâce à une conjoncture économique plus favorable. En recette, la contribution sociale généralisée (CSG) bénéficie en effet d'un taux de progression rapide, en partie grâce à la taxation des plans d'épargne logement de plus de dix ans. En dépense, on assiste à une stabilisation des cotisations au titre des périodes de chômage, du fait de l'amélioration de la situation de l'emploi.

En s'appuyant sur les perspectives macroéconomiques définies par le Gouvernement, soit une progression du produit intérieur brut (PIB) de 2,5 % par an et une croissance de la masse salariale annuelle comprise entre 4 % et 4,5 %, le déficit du FSV pour l'exercice 2007 devrait même être ramené à 600 millions d'euros et le retour à l'équilibre est envisageable pour 2009 à droits constants.

La dette cumulée passerait à 5,5 milliards d'euros à fin 2007 et atteindrait son point haut, à 6 milliards d'euros, en 2008. La décrue pourrait être entamée à partir de 2009 et un apurement complet de la dette est possible à l'horizon 2013 ou 2014, sur le fondement des mêmes données macroéconomiques.

Le FSV n'ayant pas la faculté d'emprunter, le poids du déficit en gestion est reporté sur la caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav) et accessoirement sur la caisse centrale de mutualité sociale agricole (CCMSA).

Sur ce point, M. Jean-Louis Buhl a précisé que le déficit en trésorerie du FSV, porté essentiellement par la Cnav, se traduit dans ses comptes par un produit à recevoir et ne pèse donc pas sur son déficit comptable.

M. Nicolas About, président, a évoqué la position de la Cour des comptes qui propose, dans son dernier rapport sur la sécurité sociale, de supprimer le FSV s'il n'est pas possible de prévoir un retour à l'équilibre de ses comptes.

M. Jean-Louis Buhl a rappelé que le FSV a été créé en 1993 pour mettre un terme au débat sur les charges indues, en finançant par des ressources fiscales les mesures de solidarité ne relevant pas de la logique d'assurance. Cette logique demeure valable. Si on décide de supprimer le FSV, et donc de noyer ses dépenses dans celles de la Cnav, le risque est grand de réintroduire le flou auquel la réforme de 1993 a voulu mettre un terme. L'existence d'une situation financière préoccupante ne suffit pas à remettre en cause le principe même du FSV.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux, a indiqué que s'il rejoint le jugement sévère de la Cour des comptes sur la situation inacceptable du FSV, il partage avec M. Jean-Louis Buhl l'analyse suivant laquelle il est sain de séparer ce qui relève du contributif et du non-contributif parmi les charges de l'assurance vieillesse.

Il a ensuite estimé que le déficit du FSV n'est qu'un élément de la situation financière globalement désastreuse de la protection sociale. Selon les projections de la Cour des comptes, si aucune mesure n'est prise, le déficit global des caisses et des fonds atteindra, fin 2009, 37 milliards d'euros, soit un montant similaire à celui constaté en 2003 au moment de la suppression du Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (Forec).

Puis M. Alain Vasselle, rapporteur, a contesté la présentation selon laquelle le déficit de l'Etat et celui de la sécurité sociale seraient un seul et même ensemble. Sur la base de cette fongibilité supposée, en effet, l'Etat a trop souvent tendance à utiliser le budget de la sécurité sociale comme sa variable d'ajustement, se réservant le bénéfice de la croissance des ressources dans les périodes d'amélioration de la situation économique. Il a également mis en doute la fiabilité des hypothèses macroéconomiques retenues pour les projections relatives au FSV. Enfin il a rappelé le caractère, hasardeux à ses yeux, du pari, fait par la loi Fillon sur les retraites de 2003, d'un basculement à terme des cotisations chômage sur les cotisations vieillesse.

Se déclarant en parfait accord avec les propos de M. Alain Vasselle, M. Nicolas About, président, a demandé si le report sur l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) des charges de trésorerie résultant des déficits des caisses de sécurité sociale et du FSV n'aurait pas en définitive un effet déresponsabilisant pour ces structures qui n'ont ainsi pas à subir les conséquences de leur propre gestion.

Rappelant qu'il a lui-même été précédemment directeur de l'Acoss, M. Jean-Louis Buhl a estimé que la gestion commune de la trésorerie des caisses de sécurité sociale par l'Acoss n'est pas une source d'opacité et que la mutualisation est un avantage, puisqu'elle permet de faire des économies. Sous sa direction, l'Acoss a fait des efforts pour opposer à chacune des caisses les frais financiers correspondant à ses déficits. Les frais financiers imputables au déficit du FSV peuvent ainsi être isolés et leur montant est connu. Mais il est vrai qu'à ce stade, le FSV n'est pas comptable des frais financiers entraînés par sa gestion et que ceux-ci sont imputés à la seule Cnav.

Il a également indiqué qu'il a, en sa qualité de président du FSV, envoyé une lettre aux ministres de tutelle signalant que la situation n'est pas tenable et que la Cnav doit supporter des frais financiers injustifiés en raison du déficit accumulé par le fonds.

M. Jaques Lenain a toutefois fait valoir que, depuis l'apparition des déficits de trésorerie du FSV, la Cnav n'a jamais établi de demande de prise en charge des frais financiers correspondants, alors qu'elle aurait très bien pu le faire. Ainsi lors de la réunion de son conseil d'administration du 4 octobre dernier, la caisse s'est contentée de déplorer la situation qu'elle subit sans faire demander expressément la prise en charge des frais financiers liés aux retards de paiement du FSV. Pourtant une telle requête pourrait facilement être présentée lors de la signature de l'avenant négocié annuellement entre le FSV et la Cnav sur les modalités de versement des acomptes au titre des cotisations des chômeurs.

Le montant des frais financiers imputables au déficit du FSV est de l'ordre de 150 à 200 millions d'euros par an. Cependant, le préjudice ainsi infligé à la Cnav doit être relativisé, dans la mesure où les flux financiers, exprimés en droits constatés, du FSV vers la Cnav au titre des cotisations vieillesse des chômeurs ont fortement augmenté ces dernières années, passant de 5,5 milliards d'euros en 2000 et 2001 à 8 milliards d'euros en 2005.

M. Guy Fischer s'est étonné des projections favorables annonçant le retour à meilleure fortune du FSV à l'horizon 2009. Il a fustigé les attaques sans précédent menées par le Gouvernement au cours des dernières semaines contre les régimes spéciaux de retraite. Il s'est déclaré en accord avec M. Alain Vasselle qui se dit opposé à la suppression du FSV, contrairement à ce que propose la Cour des comptes dans son rapport.

M. Guy Fischer s'est ensuite interrogé sur l'écart existant entre les projections de la Cour des comptes, selon lesquelles le déficit cumulé du FSV atteindrait 8,25 milliards d'euros à fin 2009, et les perspectives que les responsables du fonds ont soutenues devant la commission, qui tablent sur 6 milliards d'euros de déficits cumulés à la même date. Enfin, il a souhaité savoir si de nouvelles ressources peuvent être dégagées pour permettre la réduction du déficit du FSV.

M. Claude Domeizel a demandé à connaître les raisons pour lesquelles la Cnav n'a pas jugé bon jusqu'à présent de réclamer le remboursement des frais financiers entraînés par les déficits cumulés du FSV. Il a également souhaité des éclaircissements sur l'origine de l'écart entre les projections de la Cour des comptes et celles de la direction du fonds au sujet du montant des déficits cumulés prévisibles à fin 2009. Enfin, il a voulu savoir comment le déficit prévisionnel annuel du FSV, initialement fixé à 1,5 milliard d'euros en 2006, a pu être ramené à 1,2 milliard d'euros dans les dernières projections disponibles.

M. François Autain s'est dit plutôt favorable à la suppression du FSV car, à son sens, l'existence d'une structure distincte a en réalité pour résultat de minimiser le déficit réel de la sécurité sociale. En additionnant les déficits des caisses et ceux des fonds concourant à la protection sociale, il apparaît en effet que le déficit global des finances sociales est en progression, et non pas en diminution, comme l'affirme le Gouvernement.

M. Jean-Louis Buhl a déclaré n'avoir pas voulu prétendre que la situation du FSV soit idéale. D'ailleurs, il n'existe pas de désaccord entre ses analyses et celles de la Cour des comptes sur l'appréciation de la situation présente et passée du fonds.

En ce qui concerne les prévisions à l'horizon 2009, la différence entre ses propres projections et celles de la Cour tient au fait que celle-ci a élaboré les siennes à partir des comptes de 2005. Or, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 est bâti sur les observations faites en cours d'année 2006 qui ont révélé une forte dynamique de la CSG, ainsi qu'une amélioration de la situation de l'emploi. Ces constats conduisent à afficher un déficit pour 2006 moins élevé que les prévisions figurant dans le rapport de la Cour des comptes.

Sur la question des frais financiers, il a indiqué qu'à ses yeux l'Etat devrait au minimum les prendre en charge et qu'il pourrait également faire un effort pour permettre au FSV d'accélérer ses remboursements et la diminution de sa dette.

Revenant sur les différentes prévisions relatives au FSV, M. Jacques Lenain a rappelé que le projet de loi de financement de la sécurité sociale contient, depuis l'an dernier, une annexe B consacrée à des projections quadriennales sur les soldes des caisses et des fonds concourant à la protection sociale.

L'écart de 2 milliards d'euros constaté pour 2009 entre les chiffres établis aujourd'hui par le FSV et ceux figurant dans le rapport de la Cour des comptes provient de ce que la Cour a fondé ses propres prévisions sur les projections quadriennales inscrites à l'annexe B de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, élaborée fin 2005, voici un an.

Or, les prévisions concernant le FSV sont fragiles et sujettes à des évolutions très rapides, dans la mesure où les recettes du fonds sont constituées à 80 % par la CSG et où 60 % de ses dépenses sont destinées à la couverture des cotisations d'assurance vieillesse des chômeurs. L'amélioration de la situation économique constatée en 2006 justifie cet écart, incontestablement élevé, de 2 milliards d'euros.

M. Alain Vasselle a souhaité disposer d'une évaluation du montant cumulé des frais financiers qui seront au total imputés à la Cnav en conséquence des déficits du FSV à fin 2009.

M. Jacques Lenain a souligné les problèmes méthodologiques liés aux différentes façons de calculer ces frais. Il a toutefois confirmé le montant de 150 à 200 millions d'euros par an, ce qui aboutit à une masse cumulée d'au moins un demi-milliard d'euros à fin 2009. Revenant sur les propos de M. Nicolas About, président, relatifs à la déresponsabilisation des caisses de sécurité sociale qui, ne gérant pas leur trésorerie, ne subissent pas directement les conséquences de leurs déficits, il a souligné que les frais financiers correspondant à ces déficits sont bien inscrits en droits constatés dans les comptes des caisses. Celles-ci ne peuvent donc ignorer leur montant.

Enfin, en réponse à une question de M. Nicolas About, président, M. Jacques Lenain a fourni les modalités du calcul forfaitaire des cotisations d'assurance vieillesse versées par le FSV à la Cnav : le nombre de chômeurs retenu est égal à la totalité des chômeurs indemnisés, à laquelle sont ajoutés 29 % des chômeurs non indemnisés. Le total est multiplié par une cotisation de référence égale à 90 % du salaire minimum de croissance (Smic).

Application des lois de financement de la sécurité sociale - Audition de MM. Philippe Seguin, Premier président de la Cour des comptes, Michel Cretin, président de la 6e chambre, Michel Braunstein et Jean-Philippe Vachia, conseillers maîtres

Puis la commission a entendu MM. Philippe Seguin, Premier président de la Cour des comptes, Michel Cretin, président de la 6e chambre, Michel Braunstein et Jean-Philippe Vachia, conseillers maîtres, sur le rapport annuel de la Cour consacré à l'application des lois de financement de la sécurité sociale.

M. Philippe Seguin, Premier président de la Cour des comptes, a d'abord indiqué que le rapport de la Cour sur la sécurité sociale de cette année est marqué par deux innovations. La première est une conséquence de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale qui a prévu la certification des comptes de la sécurité sociale à partir de l'exercice 2006, ce qui a entraîné l'élaboration d'un rapport particulier sur l'état des travaux préparatoires à cette certification. A partir de 2007, on respectera deux rendez-vous annuels dans le domaine de la sécurité sociale : le premier en juin, pour le rapport de certification des comptes, le second en septembre, pour l'analyse financière de la sécurité sociale. La deuxième innovation se rapporte à l'accent mis sur le suivi des recommandations de la Cour, puisqu'un chapitre de son rapport leur est exclusivement consacré.

Puis il a présenté les résultats des comptes de la sécurité sociale pour 2005. Le déficit de l'ensemble des régimes de base, 11 milliards d'euros, est moins élevé qu'en 2004, mais cette amélioration est relative puisqu'en réalité, tous régimes et fonds confondus, il s'élève à 14,4 milliards d'euros en 2005, contre 14,2 milliards d'euros en 2004. Le déficit de l'assurance maladie, qui en est la principale composante, se réduit, revenant de 12,3 milliards d'euros en 2004 à 8 milliards d'euros en 2005. En outre, pour la première fois depuis sa création en 1997, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) a été respecté en montant, notamment grâce à une modération des dépenses de soins de ville, ce qui constitue un réel progrès. Néanmoins, dans une mise en perspective de long terme, le déficit de l'assurance maladie de 2005 est le troisième plus important enregistré depuis 1945.

Le dépassement d'environ 800 millions d'euros des dépenses des établissements de santé, qui crée un report de charges pour l'avenir et entraîne une réelle incertitude sur le respect de l'Ondam hospitalier en 2006, est une source d'inquiétude. On constate en effet dans le secteur hospitalier l'échec des mécanismes de régulation professionnelle et des dépenses. Par ailleurs, il est temps de mettre un terme à l'exception française du mécanisme de rétrocession des médicaments. Cette pratique a en effet beaucoup augmenté au cours des dernières années, le montant des médicaments rétrocédés étant passé de 660 millions d'euros en 2000 à 1,4 milliard d'euros en 2004. Des mesures ont été prises pour réduire cette somme en définissant une liste limitative de médicaments susceptibles d'être rétrocédés, mais les objectifs fixés n'ont pas été atteints.

Pour les branches retraite et famille, les déficits observés pourraient désormais s'avérer structurels. La branche retraite connaît un déficit de 2 milliards d'euros en 2005, dû pour l'essentiel à une augmentation de 8 % des prestations avec un très fort accroissement des retraites anticipées pour carrière longue. La branche famille voit ses dépenses augmenter nettement plus vite que les recettes sous l'effet d'une très mauvaise estimation du surcoût de la prestation d'accueil du jeune enfant (Paje) et d'une rapide progression des dépenses d'action sociale.

M. Philippe Seguin, Premier président de la Cour des comptes, a insisté sur la bonne tenue des recettes du régime général en 2005, avec une progression de 5,1 %, ce qui prouve d'ailleurs que l'essentiel du problème de la sécurité sociale résulte aujourd'hui de l'augmentation des dépenses.

Puis il a présenté la situation lourdement déficitaire du fonds de solidarité vieillesse (FSV) (- 2 milliards d'euros en 2005) et du fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles (Ffipsa) (- 1,4 milliard d'euros en 2005). Comme l'année dernière, l'Etat ne semble pas prendre la mesure de la situation, qui se traduira par un déficit cumulé pour les deux fonds de 17 milliards d'euros en 2009. En outre, le Gouvernement table sur une hypothèse optimiste, pour ne pas dire irréaliste, d'un retour à l'équilibre du FSV en 2009. Dans ces conditions, la Cour demande que des décisions rapides soient prises. Constatant qu'aucune mesure de redressement ne figure dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, elle estime que la question de la légitimité, voire de l'opportunité, du maintien de ces fonds est posée, car ceux-ci ne remplissent plus leurs fonctions. Au moment de la certification des comptes, les créances qu'ils détiennent devront être impérativement provisionnées.

Au total, le déficit cumulé non financé de la sécurité sociale s'élèvera à 16 milliards d'euros en 2006, auxquels il faudra ajouter 21 milliards d'euros de déficits supplémentaires d'ici à 2009. Aussi, même si la nouvelle projection quadriennale annexée au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 envisage un besoin de financement total légèrement inférieur, l'évolution de la situation financière de la sécurité sociale va nécessiter de nouvelles et profondes réformes.

M. Philippe Seguin, Premier président de la Cour des comptes, a ensuite présenté les enquêtes thématiques figurant dans la deuxième partie du rapport de la Cour.

S'agissant du pilotage de la politique hospitalière et de la mise en place de la tarification à l'activité (T2A), la Cour des comptes partage sans réserve les objectifs de la réforme et le souhait d'une mise en oeuvre rapide. Toutefois, la T2A souffre de défauts qu'il convient de corriger : des modalités de pilotage complexes, un manque de transparence, un dispositif tarifaire trop sophistiqué et un risque de contournement par le biais des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (Migac).

La convergence intersectorielle des tarifs, entre le secteur public et le secteur privé, est en cours et doit s'achever en 2012. Néanmoins, pour parvenir à cet objectif, des conditions préalables, actuellement non réunies, s'imposent : la convergence doit être mise en place à partir des établissements les plus efficients, à partir de coûts complets incluant les honoraires des professionnels de santé et à partir de groupes de dépenses homogènes. Un consensus préalable sur le constat des disparités est également indispensable, par exemple en matière de permanence des soins ou de prise en charge des plus démunis par l'hôpital public.

Le rapport de juillet 2006 de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) de l'Assemblée nationale souhaite le maintien du calendrier prévu pour la mise en oeuvre de la T2A. Cela ne pourra se faire que si les trois conditions préalablement exposées sont remplies. Or, celles-ci exigent des réformes considérables qu'il faudra pouvoir mettre en oeuvre sans démobiliser les acteurs qui aujourd'hui, dans leur grande majorité, ont accepté la T2A.

La deuxième enquête de la Cour a porté sur l'action sociale des caisses de la sécurité sociale. Celle-ci, en principe facultative et subsidiaire, est destinée à régler des cas individuels et à corriger des inégalités. C'est d'ailleurs bien ainsi qu'elle intervient dans le domaine de l'assurance maladie et de la retraite. Mais il en est autrement dans la branche famille : 3,4 milliards d'euros sont consacrés à l'action sociale, mais 89 % de cette somme servent à financer des structures, et non à compenser le faible ciblage des autres prestations accordées par la branche. Ainsi, le défaut de pilotage et de sélectivité dans les dépenses conduit à de très grandes inégalités. Par exemple, les contrats enfance représentent une somme annuelle pouvant varier de 30 euros par enfant à plus de 330 euros par enfant selon les caisses d'allocations familiales (Caf). Des dispositions ont certes été prises pour réorienter ces aides, mais elles l'ont été sous la contrainte financière et sans réelle réflexion préalable. Il convient donc aujourd'hui d'orienter ces dépenses vers une meilleure correction des inégalités et non vers un accompagnement ou une aggravation de celles-ci.

La troisième enquête a trait aux régimes spéciaux. La Cour des comptes constate que leurs déficits futurs seront financés soit par le budget de l'Etat, comme pour la Régie autonome des transports parisiens (Ratp) ou la Société nationale des chemins de fer français (SNCF), soit par une taxe sur la consommation, c'est-à-dire sur les usagers, pour les industries électrique et gazière. Or, la réforme des retraites de 2003 ne suffira pas pour assurer le financement des retraites : l'augmentation de la durée des cotisations à quarante et une annuités en 2012 devra être revue et de nouvelles mesures de sauvegarde seront nécessaires. Ce contexte rend inenvisageable le maintien du statu quo pour les trois régimes spéciaux examinés par la Cour. Leur alignement sur les conditions applicables aux retraites du secteur privé dans le cadre de la loi de 2003 ne peut donc être éludé.

Le quatrième sujet, sur lequel la Cour des comptes s'est penchée, concerne la participation des mutuelles et assurances au régime obligatoire, pour laquelle ces organisations reçoivent une rémunération de 550 millions d'euros par an. La Cour estime que des gains de productivité sont possibles, notamment par une remise à plat de ces multiples structures. D'une façon générale, elle considère nécessaire de réfléchir à un mode d'organisation plus rationnel et à des mécanismes de rémunération plus conformes à la réalité.

Enfin, la Cour des comptes a analysé la situation de la couverture maladie universelle complémentaire (CMUC). Elle estime regrettable l'extrême complexité du mécanisme, ainsi que la dispersion des organismes chargés de la mise en oeuvre de cette prestation. Dans les faits, les organismes complémentaires représentent moins de 15 % des organismes gestionnaires de la CMUC. Le système pourrait sans doute être très fortement simplifié en confiant aux caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) la gestion exclusive de la CMUC.

M. Philippe Seguin, Premier président de la Cour des comptes, a ensuite dressé un bilan de l'avancement des travaux nécessaires à la certification des comptes de la sécurité sociale en 2007. Il a insisté sur deux points : tout d'abord, la mise en oeuvre du mécanisme de validation mis en place dans les organismes nationaux ne sera pas encore pleinement opérationnelle cette année, malgré la qualité et l'importance des travaux menés au sein de chaque branche en 2005 et 2006 ; par ailleurs, des lacunes très profondes sont constatées dans la qualité des états financiers qui devront être annexés aux comptes.

En conclusion, M. Philippe Seguin, Premier président de la Cour des comptes, a soulevé la question du positionnement et du rôle des travaux de la commission des comptes de la sécurité sociale, dès lors que la Cour des comptes présentera un rapport sur la certification des comptes des organismes de sécurité sociale avant le 30 juin. Cela nécessitera une remise à plat du calendrier puisque la commission des comptes doit rendre son rapport au plus tard le 15 juin, ainsi qu'une réflexion sur la nature même des travaux de cette commission.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a souhaité savoir si l'inscription des provisions relatives aux créances du FSV et du Ffipsa, préconisée par la Cour, constituerait une condition déterminante pour la certification des comptes de la sécurité sociale et si la présentation des comptes de l'ensemble des régimes pour 2007 par la commission des comptes de la sécurité sociale avec un déficit du Ffipsa « hors produits à recevoir », paraît satisfaisante pour la Cour. Il a estimé indispensable de maintenir les deux fonds pour conserver une transparence des comptes et interdire un retour aux pratiques antérieures de mise en place de « tuyauteries » entre les finances de l'Etat et les finances sociales. Enfin, il a demandé à la Cour si elle envisage de s'intéresser à l'application du principe de neutralité dans l'adossement des régimes spéciaux sur le régime général et si, dans ces opérations d'adossement, il ne serait pas nécessaire de prévoir une clause de rendez-vous.

M. Michel Braunstein, conseiller maître, a confirmé que l'inscription d'une provision relative à la créance FSV sera déterminante au moment de la certification des comptes, étant donné l'importance des montants en jeu. La Cour des comptes estime la suppression du Ffipsa prioritaire sur celle du FSV, ce dernier étant un véritable établissement public administratif alors que le Ffipsa, de création très récente, est un établissement public fictif implanté au ministère de l'agriculture et géré par un bureau de l'administration centrale. Les dettes du Ffipsa devront figurer dans le bilan d'ouverture de l'Etat au 1er janvier 2006. Celui-ci n'est pas encore établi, mais il devrait en principe être achevé au début de 2007.

M. Michel Cretin, président de la 6e chambre, a indiqué que, dans son enquête sur l'adossement du régime des industries électrique et gazière (IEG), la Cour des comptes a pris acte de l'existence de la soulte et de la nature des droits transférés au régime général, mais qu'elle n'a pas effectué de travaux d'évaluation sur le montant de la soulte et des droits transférés. Pour 2007, elle envisage un examen du principe de neutralité financière des adossements. Elle s'attachera à vérifier que toutes les informations nécessaires figurent dans les documents financiers annexés aux comptes de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav).

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a interrogé la Cour sur les liens financiers entre le FSV et la Cnav et en particulier sur la mise en évidence des frais financiers engendrés par la dette du FSV vis-à-vis de la Cnav.

M. Michel Braunstein a indiqué que la Cnav calcule les frais financiers qui résultent pour elle des retards de versement du FSV, mais qu'elle ne les met pas à la charge de ce dernier organisme.

M. Jean-Philippe Vachia, conseiller maître, a souligné qu'au moment de la certification des comptes, il faudra apprécier la valeur de ces créances de la Cnav et leur degré de « recouvrabilité », celui-ci devant être exposé et argumenté dans l'annexe aux comptes de la caisse. Il a toutefois reconnu que l'inscription d'une provision dans les comptes de la Cnav conduira à un creusement de son déficit.

En réponse à M. Alain Vasselle, qui voulait savoir si l'hypothèse d'une non-certification de certains comptes serait envisageable, M. Philippe Seguin, Premier président de la Cour des comptes, a précisé qu'entre la certification et le refus de certifier, de nombreuses possibilités sont ouvertes à la Cour, en particulier l'expression de réserves.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a demandé des précisions sur la fiabilité des états comptables des mutuelles lorsque ceux-ci doivent être inclus dans les comptes de l'assurance maladie.

M. Jean-Philippe Vachia a indiqué que 5 milliards de prestations maladie sont liquidés par les mutuelles et intégrés chaque année dans les comptes de l'assurance maladie. Pour permettre une certification des comptes de la branche maladie, l'agent comptable national de la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) doit pouvoir s'appuyer sur un rapport d'audit particulier effectué par les comptables des mutuelles. Des mesures devront donc être prises pour s'assurer que les contrôles internes soient correctement effectués dans les mutuelles.

M. Guy Fischer a souhaité savoir si la Cour craint l'existence de surfacturations.

M. Michel Cretin a indiqué qu'à ce stade, la seule préoccupation de la Cour est d'obtenir davantage d'éléments d'audit sur les comptes des mutuelles.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a interrogé la Cour sur son appréciation des moyens mis en oeuvre dans les caisses pour assurer les nouveaux travaux comptables et de contrôle. Il a également regretté que les moyens du ministère de la santé pour l'élaboration du projet de loi de financement de la sécurité sociale et de son suivi soient très inférieurs à ceux dont dispose le ministère des finances pour le budget de l'Etat.

M. Jean-Philippe Vachia a souligné qu'un véritable effort a été mené à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), où désormais les moyens affectés à l'audit interne sont satisfaisants. En revanche, dans les trois caisses nationales, les effectifs restent nettement insuffisants, ce qui constitue un sujet d'extrême préoccupation pour la Cour.

M. Philippe Seguin, Premier président de la Cour des comptes, a constaté que l'Etat ne s'est pas mobilisé de la même façon pour la mise en oeuvre de la certification des comptes de l'Etat et pour celle des comptes de la sécurité sociale.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a demandé à la Cour ses préconisations pour améliorer la situation budgétaire et comptable des hôpitaux, son appréciation du traitement de la question des dettes anciennes dues à l'Acoss par l'Etat et sa définition idéale du fait générateur des impôts et taxes recouvrés par l'Etat pour la sécurité sociale.

M. Jean-Philippe Vachia a rappelé que les créances de la sécurité sociale sur l'Etat constituent un ensemble composite, au sein duquel les dettes anciennes représentent 1,3 milliard d'euros. La réponse du ministre des finances à la Cour sur cette question ne permet aucune interprétation, ni dans le sens de la reconnaissance ni dans le sens de la non-reconnaissance de ces dettes. Toutefois, la question devra être tranchée dans le bilan d'ouverture de l'Etat. Si ces dettes y sont inscrites, la question du délai d'apurement se posera ; si ces dettes n'y sont pas inscrites, elles devront être provisionnées dans les comptes de l'Acoss et des différentes branches.

S'agissant des dépenses hospitalières, la Cour se félicite du fait que la Cnam ait enfin reconnu sa dette de 1983. Pour l'avenir, le problème essentiel concerne le calcul des provisions comptables des sommes dues aux hôpitaux et aux cliniques, sur lesquelles de véritables inquiétudes existent et nécessiteront sans doute des mesures administratives de gestion.

Sur la correcte définition du fait générateur des impôts et taxes, la date retenue aujourd'hui est celle à laquelle le montant est notifié aux régimes, ce qui autorise des pratiques très évolutives. Aussi, la Cour souhaiterait que le fait générateur de ces impôts et taxes pour la sécurité sociale soit celui de l'impôt ou de la taxe eux-mêmes, ce qui éviterait les mouvements constatés par exemple cette année sur les droits assis sur le tabac, dont quatorze mois de perception ont été rattachés aux comptes de la sécurité sociale.

M. Guy Fischer a rappelé que la Cour avait eu un avis plus critique sur la T2A dans un rapport précédent en y dénonçant notamment sa tendance inflationniste en matière de dépenses. Il a insisté sur les effets pervers du système, puisque certaines entreprises du secteur privé sont en train de s'adapter aux modalités de la T2A en abandonnant des secteurs jugés non rentables et en concentrant leurs activités sur d'autres domaines considérés comme plus rentables. Il a souligné le mécontentement des personnels du secteur hospitalier public, en particulier sur leurs conditions de travail. Si le Ffipsa est supprimé, il a souhaité savoir qui sera l'interlocuteur des agriculteurs, la Mutualité sociale agricole (Msa) ou les CPAM. Enfin, en matière de CMUC, il a affirmé son souhait très clair d'une gestion entièrement prise en charge par les CPAM.

M. François Autain a souhaité savoir si les conditions définies par la Cour pour une mise en oeuvre efficace de la T2A sont vraiment réalistes et pourraient être satisfaites. Il s'est interrogé sur la possibilité pour le Parlement de prendre une initiative en matière de rétrocession des médicaments.

M. Nicolas About, président, a estimé indispensable de réaliser la convergence à l'intérieur même du secteur public avant de mettre en oeuvre la convergence intersectorielle, entre le public et le privé. Il a souligné l'importance de prendre pour base les établissements les plus efficients et la nécessité de mettre de l'ordre dans les Migac.

M. Philippe Seguin, Premier président de la Cour des comptes, a indiqué que les observations émises en 2005 par la Cour sur l'hôpital n'ont pas été modifiées, mais que cette année, l'accent a été mis sur la pertinence du calendrier prévu pour la convergence.

M. Michel Braunstein a précisé que les différences entre le secteur public et le secteur privé existaient déjà avant la T2A, l'essentiel de la médecine relevant de l'hôpital public, alors qu'une majorité des actes chirurgicaux est effectuée dans le secteur privé. Il a insisté sur le caractère non légitime du mécanisme de la rétrocession, qu'une simple mesure administrative pourrait facilement remettre en cause.

Loi de finances pour 2007 - Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » - Audition de M. Hamlaoui Mekachera, ministre délégué aux anciens combattants

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'audition de M. Hamlaoui Mekachera, ministre délégué aux anciens combattants, sur le projet de loi de finances pour 2007 (mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation »).

M. Hamlaoui Mekachera, ministre délégué aux anciens combattants, a souligné d'emblée que, pour la cinquième année consécutive, les droits de chaque ancien combattant seront en hausse dans le budget de 2007. La progression moyenne s'élèvera en effet cette année à 2,25 %.

Il a ensuite évoqué l'achèvement de la décristallisation des prestations servies aux ressortissants des pays placés antérieurement sous la souveraineté française et résidant hors de France, qui ne figure pas dans le projet de budget, mais sera proposée par un amendement du Gouvernement. Il a rappelé que l'instauration de la parité de pouvoir d'achat en 2002 avait rétabli l'équité, mais qu'un sentiment d'injustice persistait néanmoins dans l'esprit des anciens combattants. A partir du 1er janvier 2007, la retraite du combattant et les pensions militaires d'invalidité servies à l'ensemble des anciens combattants de l'armée française seront donc fixées en euros à un niveau identique. Le coût annuel de cette mesure emblématique s'élève à 110 millions d'euros.

M. Hamlaoui Mekachera, ministre délégué aux anciens combattants, a mentionné par ailleurs l'augmentation de deux points de la retraite du combattant à compter du 1er janvier 2007. Cette hausse suit une précédente augmentation de deux points, le 1er juillet 2006, la première effectuée depuis 1978. Un montant supplémentaire de 116 millions d'euros sera ainsi consacré à la retraite du combattant en 2007.

Le projet de budget comporte aussi une mesure nouvelle de 635.000 euros destinée à améliorer la prise en charge de l'appareillage des mutilés.

De plus, pour la troisième année consécutive, les crédits sociaux de l'Office national des anciens combattants (Onac) vont être augmentés de 500.000 euros et portés à 13,6 millions d'euros afin de développer les aides en faveur des veuves en situation de détresse matérielle.

M. Hamlaoui Mekachera a enfin confirmé la pérennisation de l'Onac, dont le contrat d'objectifs et de moyens entre dans sa cinquième année d'exécution, et a estimé que le projet de budget permet de maintenir l'Institution nationale des invalides (INI) à son excellent niveau actuel.

Revenant ensuite sur l'action menée depuis 2002, il a rappelé l'indemnisation, décidée en 2004, des orphelins de déportés résistants, de fusillés et de massacrés ; l'harmonisation, en faveur des anciens combattants d'Afrique du Nord, des conditions d'attribution de la carte du combattant ; le remboursement des cures thermales jusqu'à cinq fois le taux de la sécurité sociale ; l'augmentation en 2003 du plafond majorable de la retraite mutualiste, cette mesure n'ayant pas connu de prolongement entre-temps, car elle ne figure pas dans la liste des priorités retenues par le monde combattant lui-même ; la réforme du rapport constant ; l'augmentation des pensions de veuves ; l'égalité entre les hommes et les femmes dans le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre.

Puis M. Hamlaoui Mekachera, ministre délégué aux anciens combattants, a évoqué la politique de mémoire, pour laquelle l'objectif est de maintenir un cap ambitieux. A cet égard, il a annoncé la tenue à l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco), les 26 et 27 octobre prochains, des premières rencontres internationales sur la mémoire partagée. Elles vont réunir, à l'instigation de la France, les représentants de vingt-cinq pays. Cette initiative lancée en 2002 permettra à d'anciens adversaires et alliés d'échanger leurs expériences et préoccupations dans le domaine de la mémoire combattante, dans un esprit de meilleure compréhension entre les peuples.

Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis, a souhaité connaître le détail des modalités, du coût et de l'échéancier de la décristallisation des prestations versées aux ressortissants des pays placés antérieurement sous la souveraineté française.

M. Hamlaoui Mekachera a confirmé que le coût annuel de la mesure sera de 110 millions d'euros : 58.000 retraites du combattant et 27.000 pensions d'invalidité en bénéficieront à partir du 1er janvier prochain. Dans certains pays, les pensions augmenteront de 1.300 % à 1.400 %.

Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis, ayant ensuite souhaité savoir s'il est envisageable d'étendre à de nouvelles catégories d'orphelins ou aux pupilles de la nation certaines réparations servies dans le cadre du programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale », le ministre délégué a indiqué que les pupilles de la nation ne rentrent pas dans le cadre de ce programme, qui concerne les victimes de la barbarie nazie.

Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis, rappelant que la commission des affaires sociales avait préconisé l'an dernier l'ouverture d'une négociation entre les associations intéressées par le dossier de l'indemnisation des incorporés de force dans les formations paramilitaires allemandes n'ayant pas participé à des combats, a demandé si des initiatives ont été prises dans ce sens.

M. Hamlaoui Mekachera, ministre délégué aux anciens combattants, a rappelé que le Gouvernement n'a pas ménagé ses efforts pour régler ce dossier. L'Etat a ainsi proposé de prendre en charge la moitié des réparations qui seraient versées par la Fondation « Entente franco-allemande ». Cependant, la Fondation n'est pas revenue sur son opposition de principe, ce qui a pour effet de figer la situation.

Mme Gisèle Printz a alors regretté l'immobilisme de la Fondation, qui dispose pourtant des fonds nécessaires pour financer une part des indemnisations demandées, évoquant par contraste les résultats heureux de la récente médiatisation du dossier de la décristallisation.

M. Hamlaoui Mekachera, ministre délégué aux anciens combattants, a précisé à ce sujet que la décristallisation n'a pas été décidée inopinément dans le contexte de la projection du film « Indigènes », mais avait déjà été annoncée par le Président de la République dans son allocution du 14 juillet dernier.

Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis, a enfin souhaité savoir s'il est envisageable de substituer aux secours ponctuels de l'Onac une allocation destinée aux veuves dont les ressources sont inférieures au salaire minimum de croissance (Smic), et dans quelle direction s'orientent les réflexions du groupe de travail constitué afin d'étudier cette question dans la perspective du budget pour 2007.

M. Hamlaoui Mekachera a indiqué que le groupe de travail n'a pas encore rendu ses conclusions.

M. Jacques Baudot, rapporteur spécial de la commission des finances pour la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation », a crédité le ministre délégué de la qualité de ministre de l'équité, rappelant les nombreuses avancées opérées depuis 2002 et jugeant très positif le projet de budget pour 2007. Il a cependant estimé peu satisfaisantes les conditions dans lesquelles la décristallisation a été annoncée, regrettant que les parlementaires aient proposé cette réforme depuis de nombreuses années sans être entendus. Il a rappelé par ailleurs qu'un projet de loi a été déposé à l'Assemblée nationale en vue d'accorder aux pupilles de la nation une réparation équivalente à celle obtenue par les orphelins, et a estimé opportun de former un groupe de travail pour étudier ce dossier. Il a estimé que l'octroi du bénéfice de la campagne double aux agents publics ayant servi en Afrique du Nord reste un dossier sensible. Il a enfin évoqué le très mauvais état des cimetières civils en Algérie, se félicitant en revanche des efforts consentis par les soldats français de la Kafor afin d'entretenir les cimetières français de Macédoine.

Mme Sylvie Desmarescaux a demandé s'il est possible d'évaluer de façon précise le nombre des pupilles de la nation et a souhaité savoir comment cette qualité est accordée.

M. Hamlaoui Mekachera, ministre délégué aux anciens combattants, a indiqué que la qualité de pupille de la nation est délivrée par une commission en fonction des critères fixés par la loi. Les pupilles sont actuellement au nombre de 246.700, dont 5.700 au titre de la guerre de 1914-1918, 198.600 au titre de la guerre de 1939-1945, 25.100 au titre des guerres d'Indochine et de Corée, 16.000 au titre de l'Afrique du Nord et 1.300 au titre des théâtres d'opérations extérieures (Opex) ou à d'autres titres.

Mme Gisèle Printz a demandé qui seront les bénéficiaires de la décristallisation et si une disposition particulière est prévue en faveur des veuves les plus démunies. Elle a aussi souhaité qu'une Journée nationale de la Résistance puisse être instituée le 27 mai, notamment pour sensibiliser les jeunes générations.

M. Hamlaoui Mekachera a répondu que l'ensemble des ayants droit bénéficiera de la décristallisation. Il a indiqué par ailleurs que l'Etat accorde à l'Onac une contribution de 13,6 millions d'euros destinée au financement de son action sociale et a confirmé que le groupe de travail sur la situation des veuves d'anciens combattants, mis en place au printemps 2006, n'a pas encore rendu ses conclusions. Il a enfin relevé le grand nombre des journées d'ores et déjà consacrées à la commémoration.

M. Guy Fischer a contesté la qualité du projet de budget, notant que celui-ci diminue globalement de 130 millions d'euros, avant de citer les progrès qu'il aurait été possible de financer avec cette somme en plus de la décristallisation : l'augmentation du plafond des rentes mutualistes du combattant, la campagne double des fonctionnaires ayant combattu en Afrique du Nord, l'allocation différentielle en faveur des veuves. Il s'est réjoui que l'augmentation de la retraite du combattant ait lieu en début d'année, et non en juillet, comme cela fut le cas en 2006, et a demandé que l'objectif de la fixation de l'indice à quarante-huit points ne soit pas perdu de vue. Il a souhaité qu'un geste soit fait en faveur des veuves, s'est étonné que le rapport Gal sur la campagne double n'ait pas été transmis au Conseil d'Etat comme annoncé et a regretté que la revalorisation des pensions militaires d'invalidité au titre du rapport constant prenne du retard dans un certain nombre de cas. Il a aussi déploré l'absence de mesures en faveur des anciens combattants des Opex, des victimes de troubles psychosomatiques liés à des opérations militaires, ainsi que des irradiés des essais nucléaires, quarante ans après la première explosion nucléaire en Polynésie.

M. Hamlaoui Mekachera, ministre délégué aux anciens combattants, a fait valoir qu'en ce qui concerne la décristallisation, l'important est que la bonne décision ait été prise. Cela n'allait pas de soi pour l'ancienne majorité, comme en témoigne un procès-verbal du conseil d'administration de l'Onac établi voici quelques années et qui manifestait l'opposition du représentant du gouvernement d'alors à tout alignement sur les taux français des pensions servies aux ressortissants des anciens territoires sous souveraineté française.

Il a par ailleurs indiqué que, calculé en termes de dotation moyenne par ressortissant, le budget des anciens combattants est bien en hausse de 2,25 %, que le rapport Gal a été dûment envoyé au secrétariat général du Gouvernement pour transmission au Conseil d'Etat et que le rythme de mise en oeuvre du rapport constant fera l'objet d'une évaluation.

Enfin, il a précisé que les conséquences médicales des essais nucléaires n'entrent pas dans le champ de compétences du ministère délégué, mais dans celui du ministère de la défense.

Jeudi 12 octobre 2006

- Présidence de M. Nicolas About, président.-

Entreprises - Développement de la participation et de l'actionnariat salarié - Première table ronde

La commission a tenu une première table ronde sur le projet de loi n° 15 (2006-2007), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié, dont Mme Isabelle Debré est le rapporteur.

Elle a entendu M. Pierre-Yves Chanu, conseiller confédéral, et Mme Isabelle Depuydt, conseillère confédérale de la Confédération générale du travail (CGT), M. Joseph Thouvenel, secrétaire général adjoint de la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC), M. Michel Lamy, secrétaire national, et Mme Anne Bernard, conseillère technique, de la Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres (CFE-CGC).

A titre liminaire, M. Pierre-Yves Chanu, conseiller confédéral de la CGT, s'est félicité que le sujet crucial de la participation et de l'intéressement fasse l'objet d'un texte spécifique, tout en regrettant qu'aient été ajoutées diverses mesures d'ordre économique et social sans lien direct avec le thème central du projet de loi.

M. Joseph Thouvenel, secrétaire général adjoint de la CFTC, a confirmé cette analyse.

Mme Isabelle Debré, rapporteur, a souhaité connaître le point de vue des organisations syndicales sur les modifications qui ont été apportées au texte par l'Assemblée nationale.

M. Pierre-Yves Chanu a rappelé que la CGT était historiquement défavorable au dispositif d'intéressement et de participation, considérant qu'il perturbe la négociation collective globale sur la rémunération. Il a souhaité que soit privilégiée une approche non idéologique et que le seul objectif soit d'améliorer les dispositifs existants dans un sens favorable aux salariés.

A cet égard, deux problèmes majeurs subsistent : d'une part, la croissance de l'épargne salariale se fait au détriment de celle de la masse salariale ; d'autre part, l'intéressement représente un manque à gagner pour la protection sociale, le supplément versé au titre de l'intéressement ou de la participation ne donnant pas lieu au versement de cotisations sociales.

En ce qui concerne le mode de calcul de la participation, la CGT est favorable à une réforme globale de la formule légale et préférerait un retour à la rédaction initiale de l'article 6 du projet de loi. La confédération est également favorable au développement de l'intéressement de projet et soutient la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale permettant de choisir, par la voie de la négociation collective, de placer les fruits de la participation dans un plan d'épargne entreprise (PEE) ou un compte courant bloqué.

En revanche, il s'est déclaré opposé au transfert des droits accumulés dans un compte épargne-temps (CET) vers un plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco). Il s'est dit également critique sur les dispositions qui prévoient une négociation obligatoire sur le Perco ainsi que sur celles, figurant à l'article 14 quater, relatives à la consultation du comité d'entreprise, qui se révèlent être en contradiction avec le discours du président de la République devant le conseil économique et social sur le dialogue social.

Mme Isabelle Depuydt, conseillère confédérale de la CGT, a confirmé que l'ajout du chapitre IV bouleverse les équilibres à l'intérieur de l'entreprise entre le comité d'entreprise et la direction, notamment l'article 14 quater qui prévoit une réunion annuelle d'information sur les orientations de l'entreprise alors que sa fréquence actuelle est trimestrielle.

M. Michel Lamy, secrétaire national de la CFE-CGC, a regretté que le consensus obtenu dans le cadre du conseil supérieur de la participation (CSP) n'ait pas constitué la base de référence pour la rédaction de ce texte. En effet, certains principes fondamentaux définis par le CSP ont été remis en cause :

- la notion, introduite par l'Assemblée nationale, de « dividende du travail » risque de créer une confusion en laissant penser qu'il constitue une partie variable du salaire. En outre, il ne donne pas lieu au versement de cotisations sociales, ce qui fragilise le financement des systèmes de protection sociale ;

- concernant l'information délivrée au comité d'entreprise, une réunion annuelle paraît insuffisante pour que les salariés appréhendent pleinement les enjeux économiques et sociaux qui déterminent la stratégie de leur entreprise ;

- enfin, la CFE-CGC est réservée sur les nouvelles modalités de calcul de la participation à partir du bénéfice fiscal, qui posent des problèmes d'équité.

M. Joseph Thouvenel s'est dit déçu par le texte si on se rapporte aux déclarations du Premier ministre actuel et du précédent, qui évoquaient un « grand projet de loi avec beaucoup de souffle ». Selon la CFTC, la participation comprend trois dimensions : la participation aux résultats, au capital et à la gestion de l'entreprise. Or, si le texte améliore le premier volet, il concerne à peine le deuxième et pas du tout le dernier. La CFTC a toujours été favorable à l'esprit de la participation qui consiste à associer la force du travail à la contribution du capital, ce qui permet de réduire les oppositions entre salariés et classe dirigeante. C'est de plus une exigence mentionnée dans le préambule de la Constitution de 1946.

Concernant le supplément d'intéressement ou de participation, M. Nicolas About, président, a demandé si les organisations syndicales craignent que son versement ne se substitue à des hausses de salaires soumises à cotisations, faisant référence notamment à la notion de « dividende du travail » introduite dans le texte par l'Assemblée nationale.

M. Pierre-Yves Chanu s'est inquiété du déplacement des éléments de la rémunération vers l'intéressement. La nouvelle rédaction de l'Assemblée nationale pour l'article premier A fait apparaître cette notion de « dividende du travail » qui a, à son sens, une connotation idéologique regrettable. Mais le problème principal réside dans l'absence de règles précises sur les modalités de répartition du supplément d'intéressement et de participation. L'idée avancée d'une contribution patronale généralisée, permettant de pallier l'absence de contribution sociale sur ces dispositifs, n'a pas été retenue laissant sans réponse la question qui se pose sur le financement de la protection sociale.

Concernant le mode de calcul de ce supplément, il a estimé nécessaire de procéder à une réforme globale de la formule, en révisant chacun des paramètres. A cet égard, il s'est dit opposé à l'existence d'accords dérogatoires, par la voie de la négociation collective, sur le mode de calcul.

M. Michel Lamy a rappelé que le CSP avait conclu de manière consensuelle à la nécessité de retirer la notion de « dividende du travail », qui concourt à sa banalisation dans le cadre des négociations salariales.

M. Joseph Thouvenel a également exprimé son inquiétude sur les risques d'une substitution de la participation et de l'intéressement à la rémunération salariale. Il a souhaité que tout accord de participation ou d'intéressement soit précédé dans les trois ans d'un accord salarial et que les dispositifs d'intéressement ou de participation soient simples et compréhensibles par les salariés. Il a estimé que l'expression « dividende du travail » n'est pas adaptée.

M. Nicolas About, président, a souhaité connaître le point de vue des organisations syndicales sur la négociation d'accords de branches pour favoriser le développement de la participation, de l'intéressement et de l'épargne salariale dans les très petites à moyennes entreprises.

M. Joseph Thouvenel a rappelé que l'enjeu principal est de permettre la mise en oeuvre du dispositif d'intéressement et de participation dans les plus petites entreprises. Il a proposé la suppression du seuil de cinquante salariés malgré les réticences exprimées par le Mouvement des entreprises de France (Medef). Les résistances à son application observées dans les PME et TPE sont, à son sens, davantage psychologiques que fondées sur des obstacles objectifs. Or, le caractère facultatif des accords de branches risque de rendre inopérant le dispositif d'intéressement et de participation dans les entreprises concernées. A titre d'illustration, lorsque le seuil a été ramené de cent à cinquante salariés, la mise en oeuvre des dispositifs n'a été effective qu'à partir du moment où le dispositif a été obligatoire.

M. Michel Lamy s'est dit réservé sur cette question, rappelant que le bénéfice des TPE permet souvent de rémunérer le dirigeant. Sans proposer de solution technique définitive, il a souhaité qu'une réflexion soit engagée pour déterminer le seuil d'effectifs en deçà duquel on observerait un impact sur la rémunération « normale » du dirigeant. Il a proposé que le seuil soit abaissé dans un premier temps à vingt salariés afin que l'application des dispositifs d'intéressement et de participation soit obligatoire pour le plus grand nombre d'entreprises. Par ailleurs, il a déploré que les entreprises de plus de cinquante salariés ne respectent pas l'obligation de mettre en oeuvre des dispositifs de participation et d'intéressement, ainsi que le confirment des statistiques communiquées au CSP. C'est pourquoi il a proposé qu'un livret d'information soit distribué à tous les salariés concernés afin qu'ils puissent se mobiliser pour réclamer l'application de ces dispositifs dans leur entreprise.

Globalement en accord avec les deux interventions précédentes, M. Pierre-Yves Chanu s'est dit favorable à l'abaissement du seuil du nombre de salariés en tenant compte de l'importance du chiffre d'affaires et des bénéfices pour les plus petites entreprises. Il a estimé que l'obligation de négocier des accords de participation au niveau des branches risque fort de rester lettre-morte, du fait de la multiplication des thèmes devant désormais faire l'objet de ces accords.

Mme Isabelle Debré, rapporteur, a indiqué n'être pas toujours favorable aux obligations systématiques pour permettre l'application des dispositions existantes. Elle a souhaité connaître l'avis des représentants syndicaux sur la rédaction de l'article 6, relatif aux modalités de calcul de la réserve spéciale de participation.

M. Pierre-Yves Chanu a demandé un retour à la rédaction initiale du texte, prévoyant, pour ce calcul, la prise en compte du bénéfice fiscal sans report des déficits antérieurs, quel que soit le nombre d'années déficitaires.

M. Michel Lamy a approuvé cette position, jugeant qu'il serait illogique que l'on puisse verser des dividendes aux actionnaires, mais pas de participation aux salariés.

M. Joseph Thouvenel a proposé la double prise en compte du bénéfice comptable et du bénéfice fiscal, souhaitant que la solution la plus avantageuse pour les salariés soit retenue.

Mme Isabelle Debré, rapporteur, a souhaité savoir si les représentants syndicaux sont favorables à l'article 10, visant à rendre obligatoire le placement des sommes versées au titre de la participation sur un PEE et à l'assouplissement introduit par l'Assemblée nationale

M. Pierre-Yves Chanu s'est dit satisfait par la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale, de même que M. Michel Lamy. Ce dernier a toutefois émis des réserves quant à la possibilité pour les salariés d'effectuer des versements sur un compte courant bloqué destiné à financer le développement de l'entreprise. En effet, en cas de départ d'un salarié de l'entreprise, le versement des sommes qui lui sont dues pénalise les autres salariés détenteurs de parts du fonds. Il s'est également opposé au versement, dans le Perco, des droits inscrits dans le compte épargne-temps.

Mme Isabelle Debré, rapporteur, a souligné que cet abondement est volontaire et non obligatoire.

M. Joseph Thouvenel a estimé que l'immobilisation, dans le Perco, des droits inscrits dans le compte épargne-temps, constitué sur la base d'heures supplémentaires effectuées et dont la valeur n'est pas majorée, constitue une économie pour l'entreprise et un frein à l'embauche et à la croissance, le supplément de revenu qui aurait pu être ainsi réinjecté dans l'économie n'étant finalement pas distribué.

Mme Isabelle Debré, rapporteur, a demandé si les syndicats approuvent l'article 15, rendant obligatoire la représentation des salariés actionnaires au conseil d'administration des sociétés, lorsqu'ils détiennent au moins 3 % du capital. Elle a souhaité qu'ils précisent quelles pourraient être les modalités de leur désignation.

M. Joseph Thouvenel a rappelé que le fondement de la participation, dans son esprit gaullien, réside en premier lieu dans la consultation des salariés pour la définition des orientations stratégiques de l'entreprise, ce qui ne doit être confondu ni avec l'autogestion, ni avec la cogestion. A cet égard, il a suggéré que la part des salariés dans le conseil de surveillance et dans le directoire soit portée à un tiers, ce qui leur permettrait ainsi de participer davantage au contrôle et à l'orientation de la société pour laquelle ils travaillent. Les représentants des salariés, présentés par les syndicats, seraient élus par leurs collègues.

Mme Isabelle Debré, rapporteur, a souhaité savoir si les salariés actionnaires pourraient être élus quel que soit le pourcentage d'actions qu'ils détiennent.

M. Joseph Thouvenel a fait observer que la participation des salariés actionnaires n'est pas exclusive de celle des représentants des salariés non actionnaires.

M. Michel Lamy a rappelé que la participation des salariés au conseil de surveillance et au directoire est rendue obligatoire par une disposition de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002. Cette mesure, restée longtemps sans effet, faute de décret d'application, devrait être réactivée. Il serait également opportun que les représentants des salariés actionnaires soient élus parmi une liste de personnes proposées par les organisations syndicales sur le fondement de leurs compétences et de leur ancienneté - au moins cinq ans - dans l'entreprise. Enfin il serait souhaitable que le président du directoire soit davantage à l'écoute du conseil de surveillance pour la définition des orientations stratégiques de l'entreprise. Par ailleurs, il s'est dit réservé sur la participation de salariés retraités actionnaires dont l'approche est davantage focalisée sur l'évolution des titres qu'ils détiennent que sur les intérêts des salariés en activité.

Mme Isabelle Debré, rapporteur, a interrogé les syndicats sur la pertinence du seuil de détention d'actions de 3 % retenu par le texte pour la participation des salariés actionnaires aux instances représentatives des entreprises.

M. Michel Lamy a considéré que la définition d'un seuil ne constitue pas l'enjeu majeur. Le syndicat qu'il représente souhaite prioritairement que soit effective la présence des salariés non actionnaires au sein des instances représentatives.

Bien que réservé sur la solution technique retenue par le texte, M. Pierre-Yves Chanu a jugé acceptable le seuil de 3 %, précisant que les représentants devront être élus par l'ensemble des salariés actionnaires. Une disposition similaire existe dans la loi du 19 février 2001 sur l'épargne salariale, mais elle n'a, à ce jour, pas été appliquée. Proposant que les salariés actionnaires soient élus, il s'est dit favorable à ce que les candidats soient détenteurs d'au moins 3 % du capital de l'entreprise, qu'elle soit cotée ou non.

M. Jean-Pierre Godefroy s'est demandé s'il est pertinent d'ajouter une condition d'ancienneté de cinq ans dans l'entreprise.

M. Joseph Thouvenel est convenu qu'une durée minimale de cinq ans est peut-être excessive, mais il a souhaité que les représentants possèdent déjà une certaine expérience dans l'entreprise.

M. Pierre-Yves Chanu a estimé qu'il n'est pas indispensable de fixer une durée d'ancienneté minimale.

Mme Isabelle Debré, rapporteur, a souhaité savoir si certaines solutions avancées puis écartées dans la rédaction finale du projet de loi ont suscité les regrets des organisations syndicales.

M. Michel Lamy a souhaité que la durée d'indisponibilité des droits acquis au titre de la participation ne soit pas réduite en deçà de cinq ans et que la formule de calcul de la participation ne prenne plus en compte les déficits antérieurs. Il a enfin rappelé sa préférence pour un seuil d'application du dispositif abaissé à vingt salariés.

M. Joseph Thouvenel a proposé que la durée d'indisponibilité des droits acquis soit maintenue à cinq ans et que des déblocages soient possibles en cas d'absence pour longue maladie ou lors de l'arrivée du premier enfant.

M. Nicolas About, président, a suggéré que ce déblocage, prévu actuellement lors de la naissance du troisième enfant, puisse dans un premier temps être autorisé à l'occasion d'une seconde naissance.

M. Pierre-Yves Chanu est convenu de la nécessité de maintenir une durée d'immobilisation d'au moins cinq ans. Il a souhaité que les déblocages soient limités à un nombre de cas restreints, prévus par décret et non via la négociation collective : naissance du second enfant, longue maladie ou prévention des situations de surendettement, grâce à un dispositif d'avance remboursable.

Concernant les modalités de calcul de la formule légale de la participation, il a souhaité que soient reconsidérés les coefficients affectés à chaque paramètre en tenant compte notamment des évolutions fiscales et légales récentes.

M. Jean-Pierre Godefroy s'est demandé si la perte d'emploi du conjoint ne pourrait pas constituer un autre cas de déblocage anticipé des sommes immobilisées au titre de la participation.

M. Michel Lamy, admettant la pertinence de cette proposition, a cependant recommandé de ne pas multiplier les dérogations et de les encadrer strictement, le cas échéant.

M. Jean-Pierre Godefroy a souligné que la perte d'emploi du conjoint peut aboutir à une situation d'endettement qu'il est souhaitable de prévenir, ce dont M. Michel Lamy est convenu.

En réponse à Mme Isabelle Debré, rapporteur, l'ensemble des représentants syndicaux se sont opposés à la possibilité d'un déblocage des sommes immobilisées lors du dix-huitième anniversaire d'un enfant.

Mme Isabelle Debré, rapporteur, a sollicité l'avis des organisations syndicales sur le contrat de transition professionnelle (CTP) et la création du congé de mobilité.

M. Pierre-Yves Chanu a proposé que les délais appliqués au rescrit social soient portés de quatre à six mois.

Mme Isabelle Depuydt a fait observer que la période d'évaluation du CTP n'étant pas arrivée à son terme, le recul n'était pas suffisant pour en apprécier l'efficacité. Elle a déploré que les TPE l'appliquent insuffisamment et qu'ils ne soient pas systématiquement proposés par les antennes locales des Assedic. A cet égard, elle a souhaité que la contribution d'un mois soit augmentée afin qu'elle ait un effet plus dissuasif pour les entreprises. Toutefois, les modifications apportées par l'Assemblée nationale ont amélioré le dispositif de reclassement tandis que la rédaction actuelle de l'article relatif au congé de mobilité comporte des contradictions. Des dispositions permettent en effet au salarié d'effectuer ce congé au sein de l'entreprise et de signer un nouveau contrat de travail avec le même employeur, ce qui peut paraître contraire à l'esprit de ce dispositif.

M. Michel Lamy a indiqué qu'il transmettrait une contribution écrite en réponse aux questions posées par le rapporteur relatives à la sécurisation des parcours professionnels et à la simplification du code du travail.

Si la philosophie générale des dispositifs de sécurisation du parcours professionnel est globalement satisfaisante, M. Joseph Thouvenel est convenu qu'il est trop tôt pour en faire le bilan. Il a souhaité que le congé de mobilité soit encadré afin d'éviter les « fausses sous-traitances ».

M. Nicolas About, président, a souhaité connaître la position des syndicats sur la réforme du régime des stock-options proposée par M. Edouard Balladur.

M. Joseph Thouvenel s'est dit favorable à la mise en place d'un système de réciprocité qui permettrait une attribution des stock-options aux dirigeants après la signature d'un accord d'intéressement. Il a également suggéré que la levée des stock-options soit conditionnée à la conclusion d'un accord salarial de moins de deux ans et de la garantie d'une transparence sur les résultats et les orientations stratégiques de l'entreprise.

M. Michel Lamy a proposé la suppression des stock-options considérant qu'elles donnent trop d'importance à la valeur de l'action dans la rémunération du dirigeant, ce qui est générateur d'effets pervers dans la gestion. En contrepartie, il a exposé les principes d'une refonte de la rémunération des dirigeants qui serait assise à parts égales sur la valeur de l'action, sur la croissance des investissements et de la recherche, sur le développement du chiffre d'affaires et sur l'augmentation de la masse salariale. Cela permettrait de maintenir un équilibre indispensable entre salariés, actionnaires et clients, tout en garantissant la pérennité de l'entreprise.

M. Pierre-Yves Chanu s'est dit également favorable à la suppression des stock-options estimant qu'elles sont contraires à la logique de développement à long terme de l'entreprise. Il a jugé opportun de réfléchir aux modalités d'une rémunération variable des dirigeants qui soit fiscalement équitable.

Mme Isabelle Debré, rapporteur, a souhaité connaître l'avis des organisations syndicales sur la création du nouveau dispositif de chèque-transport.

Mme Isabelle Depuydt a déploré l'absence de dialogue social sur ce thème, ainsi que le caractère non obligatoire du dispositif. Elle a émis des réserves sur la présentation qui en a été faite par le Gouvernement comme une compensation de la perte de pouvoir d'achat qui résulterait de l'augmentation du coût des transports. Elle a jugé opportun que soit mieux pris en compte l'éloignement du logement par rapport au lieu de travail.

M. Michel Lamy s'est dit favorable au dispositif dans la mesure où il permet de rétablir l'égalité de traitement entre les parisiens et les provinciaux. Il a en revanche critiqué la complexité du dispositif, son caractère non obligatoire et sa création sans concertation. Il a souhaité que soient mieux pris en compte les frais de déplacement en voiture lorsque le logement est éloigné du lieu de travail et qu'il n'existe pas de liaison de transport public adaptée.

M. Joseph Thouvenel a salué cette réforme qu'il estime positive même si elle comporte certaines insuffisances qu'il serait nécessaire de corriger : prise en compte des horaires atypiques, carence des transports publics, etc. Il s'est enfin inquiété du fait que ce chèque ne pourrait se substituer à une véritable politique de revalorisation salariale.

Mme Isabelle Debré, rapporteur, a demandé aux syndicats de préciser leur point de vue sur la recodification du code du travail.

Mme Isabelle Depuydt a fait part de ses réticences sur la mise en oeuvre de cette réforme qui semble avoir pris du retard et qui ne pourra être achevée dans les délais.

M. Joseph Thouvenel a confirmé que les délais ne pourront vraisemblablement pas être tenus.

Mme Isabelle Debré, rapporteur, a interrogé les syndicats sur les articles du projet de loi supprimés par l'Assemblée nationale qu'ils souhaiteraient voir rétablis.

Mme Isabelle Depuydt a demandé la réintégration, dans le texte, de l'article 31, relatif aux listes électorales prud'homales, ces mesures devant être prises avant la fin de l'année 2007.

M. Michel Lamy a indiqué qu'il communiquerait sur ce point au rapporteur une réponse écrite.

M. Joseph Thouvenel a confirmé la nécessité d'adopter rapidement les dispositions relatives à la tenue des élections prud'homales en 2008.

Mme Isabelle Debré, rapporteur, a souhaité connaître l'avis des syndicats sur les dispositions ajoutées par l'Assemblée nationale sur le crédit d'impôt et l'épargne salariale.

M. Pierre-Yves Chanu s'est dit favorable à l'amélioration de la formation des salariés sur l'épargne salariale afin de garantir la pérennité des fonds, notamment des fonds multi-entreprises. Il a toutefois déploré le recours systématique au crédit d'impôt au profit des entreprises.

M. Michel Lamy, en accord avec M. Pierre-Yves Chanu, a souhaité qu'une évaluation précise des aides accordées aux entreprises sous forme de crédit d'impôt soit réalisée. Selon lui, ces aides s'élèvent à plus de 60 milliards d'euros.

M. Joseph Thouvenel est convenu de la nécessité d'une évaluation des dispositifs de crédit d'impôt accordés aux entreprises.

M. Guy Fischer a souhaité obtenir des précisions sur l'étude évoquée par M. Michel Lamy relative aux aides accordées aux entreprises.

M. Michel Lamy a indiqué qu'il s'agit d'une étude réalisée par l'école des Ponts et Chaussées qu'il se propose de transmettre à la commission.

M. Jean-Pierre Michel s'est interrogé sur la présence incongrue, dans le texte du projet de loi, de dispositions relatives aux clubs de football, indiquant qu'elles feront l'objet d'un recours devant le conseil constitutionnel de la part de son groupe.

Entreprises - Développement de la participation et de l'actionnariat salarié - Seconde table ronde

Puis la commission a organisé une seconde table ronde réunissant MM. Denis Gautier-Sauvagnac, président de la commission relations du travail et politiques de l'emploi, et Guillaume Ressot, chargé des relations avec le Parlement du Mouvement des entreprises de France (Medef), MM. Jean-François Veysset, vice-président chargé des affaires sociales, et Stéphane Huillet, membre de la commission sociale de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME), et Patrick Liebus de l'Union professionnelle artisanale (UPA).

Après avoir souligné l'unité des organisations patronales en ce qui concerne l'intéressement et la participation des salariés, et rappelé leur position de principe favorable sur l'intérêt de développer ces mécanismes dans les entreprises, M. Denis Gautier-Sauvagnac, président de la commission relations du travail et politiques de l'emploi du Medef, a considéré que la notion de « dividende du travail », introduite dans le texte par l'Assemblée nationale, recouvre une dimension essentiellement symbolique.

Au-delà des objectifs généraux qu'il vise, sur lesquels existe un large consensus, le texte voté par l'Assemblée nationale comporte toutefois certaines dispositions complexes ou susceptibles de perturber de façon substantielle la vie des entreprises. Les réserves formulées par le Medef portent sur la nouvelle rédaction de plusieurs articles, notamment celui tendant à limiter le report des déficits dans le temps, alors que ce n'était pas le cas jusqu'à présent. L'obligation de placer les sommes versées au titre de la participation sur un plan d'épargne entreprise (PEE) n'est pas non plus exempte d'effets pervers, car elle tend à remettre en cause l'alimentation des comptes courants bloqués. En effet, dans de nombreuses entreprises, les salariés bénéficient aujourd'hui, grâce à ce dispositif, d'un taux de rémunération souvent très avantageux, voire nettement supérieur à celui du marché monétaire. En contrepartie, les chefs d'entreprise disposent d'une source de financement leur évitant de recourir aux intermédiaires financiers. Après avoir déploré que le projet de loi initial ait proposé la suppression pure et simple de ce mécanisme juridique et financier, pourtant très souple d'utilisation et mutuellement avantageux, M. Denis Gautier-Sauvagnac a constaté que l'Assemblée nationale n'a proposé son rétablissement que de façon essentiellement formelle.

Il s'est également déclaré défavorable aux dispositions de l'article 15 rendant obligatoire la représentation des salariés actionnaires dans les conseils d'administration des sociétés. A première vue, cette mesure peut sembler séduisante sur le plan des principes, mais à l'analyse, ce dispositif rigide apparaît incohérent, et sans doute même contreproductif. N'est-il pas singulier d'imposer aux entreprises la nomination d'un représentant du personnel au sein de leur conseil d'administration dès que l'ensemble des salariés détient au minimum 3 % de son capital, alors qu'aucune obligation similaire n'est prévue pour les actionnaires individuels plus importants qui possèdent, parfois à eux seuls, 10 % ou 25 % ? Le texte, tel qu'il a été voté, pose en l'espèce un problème d'égalité devant la loi. Il conviendrait à tout le moins de modifier ces dispositions en les rendant facultatives et en confiant à l'assemblée générale le soin de trancher cette question. A défaut, le risque serait grand que, dans de nombreuses entreprises, le conseil d'administration se transforme en une simple chambre d'enregistrement avalisant les décisions prises dans une nouvelle enceinte informelle spécialement créée pour débattre des questions stratégiques en l'absence des représentants des salariés. Il n'est d'ailleurs pas forcément opportun, à son sens, de généraliser à l'ensemble de l'économie française le modèle de certaines entreprises ayant fait le choix d'organiser la représentation des salariés dans leur conseil d'administration.

Mme Isabelle Debré, rapporteur, a souhaité savoir si les réserves formulées par le Medef portent sur le seuil de 3 % proposé dans le projet de loi, ou sur l'opportunité même de cette mesure.

M. Denis Gautier-Sauvagnac a précisé que ce seuil de 3 % ne constitue pas en tant que tel le véritable problème, mais qu'il faut surtout éviter d'imposer de nouvelles obligations aux entreprises. Il a pris l'exemple de la tentative d'offre publique d'achat (OPA) de la Banque nationale de Paris (BNP) sur la Société générale, dans laquelle les salariés de cette dernière banque ont joué un rôle décisif sur l'issue de l'opération, sans pour autant s'appuyer sur des dispositions législatives spécifiques. Cette double préoccupation de simplicité et de souplesse pour les entreprises fonde d'autres réserves du Medef sur les dispositions du texte, comme par exemple sur l'instauration d'un livret d'épargne salariale faisant largement double emploi avec les supports d'information existants.

Il a également jugé incompréhensible le refus du Gouvernement de permettre aux groupements d'intérêt économique (GIE) de faire bénéficier leurs salariés de la participation, tout comme d'ailleurs son opposition à un amendement débattu en séance publique à l'Assemblée nationale, tendant à donner aux organismes paritaires de gestion agréés (OPCA), la possibilité de gérer les comptes épargne-temps. Le recours aux OPCA aurait pourtant offert des garanties supplémentaires aux salariés, tout en répondant à l'obligation d'externaliser les comptes épargne-temps en dehors des entreprises.

M. Denis Gautier-Sauvagnac a également estimé que les initiatives prises par les pouvoirs publics au cours des dernières années afin d'autoriser ponctuellement les entreprises à distribuer jusqu'à 1.000 euros d'épargne salariale par personne, et ce en franchise de cotisations sociales, créent des risques de perturbations. Au-delà des bonnes intentions affichées et des avantages apportés à court terme aux salariés, ces mesures peuvent dans certains secteurs d'activité relancer des débats idéologiques que l'on croyait clos, aussi bien sur l'opportunité même de la participation que sur l'incompatibilité supposée entre l'épargne salariale et la croissance de la masse salariale.

Il s'est félicité en revanche des dispositions du projet de loi créant la possibilité d'organiser des mécanismes de participation en utilisant des accords de branche. Certaines entreprises, dépourvues de structure de dialogue social, peuvent avoir intérêt à disposer en ces matières d'un cadre juridique faisant office de boîte à idées.

Après avoir souligné l'intérêt du développement de la participation, M. Patrick Liebus, représentant de l'UPA, a estimé qu'il convient d'aborder cette question avec la double préoccupation de garantir la cohérence des mécanismes proposés et de faciliter les rapports entre les salariés et le chef d'entreprise. Or, le projet de loi risque de se heurter à deux écueils principaux : l'absence de direction des ressources humaines dans les petites entreprises et le risque d'accroître les disparités entre les PME et les grandes entreprises.

Il a souligné l'intérêt de recourir au plan d'épargne interentreprises, dans la mesure où ce dispositif constitue une perspective de simplification appréciable pour les chefs d'entreprise. Il en va de même de la possibilité d'organiser la participation dans les entreprises sur la base d'accords de branches.

Il a fait part en revanche de ses réserves sur l'obligation de placer sur un PEE les sommes versées au titre de la participation, ainsi que sur d'autres pistes de réflexions envisagées pendant la phase d'élaboration du projet de loi et finalement écartées. Il s'agit en particulier de l'idée d'une remise en cause du principe ou de la durée d'indisponibilité des droits acquis au titre de la participation, de la perspective d'une réforme de la formule de calcul de la participation ou de l'hypothèse d'un abaissement du seuil de cinquante salariés.

M. Denis Gautier-Sauvagnac a indiqué qu'il ne regrette pas non plus que ces idées ne figurent pas dans la version finale du projet de loi.

Après avoir précisé que, s'agissant des PME, la mesure prévue à l'article 15 visant à rendre obligatoire la participation des salariés actionnaires n'aurait que des effets très limités, M. Patrick Liebus s'est déclaré convaincu que le développement de l'épargne salariale ne peut être assuré que sur la base de mécanismes simples et incitatifs pour les entreprises.

M. Jean-François Veysset, vice-président chargé des affaires sociales, a indiqué que son organisation est défavorable à l'idée d'une fusion des mécanismes d'intéressement et de participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés. Une telle mesure apparaîtrait d'autant plus dommageable que les PME, et notamment celles ayant un effectif inférieur à dix personnes, ont puissamment contribué, sur une base volontaire et incitative, au succès de l'épargne salariale.

Reprenant les principales dispositions du projet de loi, M. Stéphane Huillet, membre de la commission sociale de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME), a estimé que le versement d'un supplément d'intéressement ou de participation n'entraîne pas de risque particulier de substitution à des hausses de salaire soumises à cotisations. Cette mesure présente même, à l'inverse, l'avantage de sensibiliser les salariés à l'évolution des performances de l'entreprise. Il a également jugé utile l'article du projet de loi tendant à organiser la négociation d'accords de participation au niveau des branches professionnelles.

En revanche, les dispositions de l'article 10, prévoyant de rendre obligatoire le placement sur un PEE des sommes versées au titre de la participation, suscitent davantage de réserves. Pour certains secteurs économiques, en effet, la rémunération des avoirs des salariés dans les comptes courants d'associés atteint 6 %, voire 10 à 11 % par an, et représente ainsi un élément fondamental de la culture d'entreprise. Il serait particulièrement dommageable de priver ces personnes du bénéfice de ce dispositif avantageux.

De même, les dispositions de l'article 15 visant à rendre obligatoire la représentation des salariés actionnaires dans le conseil d'administration des sociétés ne se justifient pas. Le seuil de 3 % retenu par le texte risque, en pratique, de limiter à 2,99 % la part maximum du capital de la société détenue par le personnel.

Il a indiqué par ailleurs qu'il ne regrette pas plus que MM. Denis Gautier-Sauvagnac et Patrick Liebus que les pistes de réflexions initialement envisagées par le Gouvernement aient été abandonnées.

En marge des dispositions de ce texte, il a enfin attiré l'attention sur le caractère dommageable de la suppression récente du groupe de travail sur les PME, qui avait été constitué de longue date au sein du conseil supérieur de la participation. S'agissant enfin de l'accès des dirigeants d'entreprises de moins de cent salariés à l'intéressement, il a regretté que seuls les dirigeants d'entreprises assujetties à l'impôt sur les sociétés en bénéficient et non ceux qui dirigent des entreprises assujetties à l'impôt sur le revenu.

Interrogé sur le contrat de transition professionnelle (CTP), M. Jean-François Veysset a déclaré que la CGPME avait été surprise par le dispositif proposé, alors que les partenaires sociaux débutaient tout juste la mise en place des conventions de reclassement personnalisées (CRP). Il a estimé qu'en tout état de cause, il convient de mener à bien l'expérimentation en cours sur les CTP avant d'envisager tout élargissement du dispositif et ce, d'autant plus que leur financement doit encore faire l'objet de précisions.

S'agissant de la recodification du code du travail, il a craint que le code n'apparaisse au terme de ce processus encore plus épais et plus « nébuleux » qu'auparavant.

Sur la création d'un chèque-transport, M. Jean-François Veysset a indiqué que la CGPME est favorable à un élargissement des possibilités de recours au dispositif proposé par le Gouvernement, notamment dans les zones où les transports en commun ne sont pas adaptés aux besoins des salariés, soit parce que ces derniers travaillent selon des horaires décalés, soit parce que leurs domiciles sont éloignés des premières stations de desserte. Toutefois, il ne faudrait pas que le chèque-transport vienne perturber des dispositifs qui ont déjà fait leurs preuves, notamment le remboursement par l'employeur de la moitié du coût de la carte Orange ou Intégrale en Ile-de-France.

M. Denis Gautier-Sauvagnac a indiqué qu'il n'approuve pas la philosophie des contrats de transition professionnelle et qu'il est, à l'instar de la position défendue par la CGPME, opposé à un élargissement du dispositif avant qu'un bilan n'en ait été dressé.

Sur le congé de mobilité, il n'éprouve pas d'hostilité à son égard, mais il s'interroge sur l'articulation de cette mesure avec les congés de reclassement.

Sur la recodification du code du travail, il a déclaré y être favorable si elle conduit à une simplification, bien qu'on puisse en douter lorsqu'on observe que le code du travail a gagné en moyenne quarante pages par an au cours des vingt dernières années.

Pour le chèque-transport, il a estimé que les employeurs vont devoir payer trois fois pour le même objet : premièrement, en prenant leur part de la hausse du coût de l'énergie, ensuite avec le maintien de la participation au financement de 50 % de la carte orange en Ile-de-France, enfin avec le nouveau dispositif de chèque-transport. Il a donc souhaité que le Parlement s'en tienne strictement au texte voté par l'Assemblée nationale qui réserve ce dispositif aux seules entreprises volontaires pour l'appliquer. Cette restriction n'empêchera d'ailleurs pas que des pressions s'exercent, au sein des entreprises, en faveur de sa mise en place. Il s'est sur ce point interrogé sur le coût du dispositif pour les finances publiques.

En ce qui concerne l'article additionnel relatif aux conditions d'exercice des stock-options, adopté par voie d'amendement à l'Assemblée nationale, il a souhaité que le Parlement s'en tienne strictement au texte proposé par M. Edouard Balladur, sous réserve d'aménagements mineurs destinés à régler un problème de rétroactivité sur la distribution d'actions gratuites.

M. Denis Gautier-Sauvagnac a conclu en se disant scandalisé par la suppression de l'article 32 du projet de loi, dont l'adoption aurait permis de mettre un terme à la situation aberrante créée par l'arrêt de la Cour de cassation du 26 mai 2004. Cet arrêt a eu pour effet d'inclure dans les effectifs des entreprises non seulement les salariés inscrits sur le livre de paie, mais aussi ceux intervenant dans l'entreprise en exécution d'un contrat de sous-traitance, de maintenance ou de prestation de services. Il en résulte que ces derniers salariés sont comptabilisés deux fois pour les structures de représentation du personnel : au titre de l'entreprise qui verse leur salaire et au titre de l'entreprise dans les locaux desquelles ils interviennent. Il a rappelé que le Sénat, avec le soutien du Gouvernement, avait adopté, dans le projet de loi pour l'égalité des chances, un dispositif purgeant cette difficulté en excluant des effectifs de l'entreprise les salariés qui y interviennent dans le cadre d'un contrat de sous-traitance ou de prestation de services. Or, ce dispositif avait été censuré par le Conseil constitutionnel non pour des motifs de fond, mais parce qu'il constituait un « cavalier législatif ». Il convient donc de le rétablir, puisque l'objet du présent projet de loi s'y prête.

M. Patrick Liebus a souligné lui aussi l'étonnement de l'UPA sur la mise en place des contrats de transition professionnelle au moment où le dispositif précédent atteint sa vitesse de croisière. Il a indiqué que les artisans ne sont pas concernés par le congé de mobilité qui touche les entreprises de plus de mille salariés, ni par l'amendement Balladur sur les stock-options. Il a jugé que l'opération de recodification du code du travail n'a de sens que si elle doit aboutir à une simplification. Il s'est déclaré réservé sur le dispositif du chèque-transport, estimant qu'il convient d'en laisser la définition des modalités à la discrétion des employeurs. Enfin, s'agissant de la partie du projet de loi relative à l'emploi des seniors, il s'est déclaré favorable à la suppression de la contribution « Delalande » et au renforcement des procédures de tutorat. Il a par ailleurs souhaité le rétablissement des dispositions relatives aux conseils de prud'hommes, supprimées par l'Assemblée nationale.

M. Denis Gautier-Sauvagnac a regretté le refus de l'Assemblée nationale d'adopter un amendement qui aurait permis de régler les cas d'appartenance aux deux collèges de prud'hommes, lorsqu'un salarié est aussi employeur, par exemple d'une aide à domicile. Il serait légitime de prévoir dans ce cas que l'inscription sur les listes électorales prud'homales s'effectue dans le collège correspondant à l'activité principale de l'électeur. Il a souhaité le vote de cette disposition par le Sénat.

Interrogé par Mme Isabelle Debré, rapporteur, sur les dispositions de l'article 14 quater (adaptation par accord collectif de travail des modalités d'information du comité d'entreprise et des salariés), il s'est déclaré d'une façon générale favorable à ce que les décisions soient prises le plus près possible du terrain. Il fournira des réponses écrites à la commission sur le fond du dispositif.

M. Jean-Pierre Godefroy a demandé l'avis des intervenants sur la possibilité d'instaurer, au bénéfice des salariés dont le conjoint perd son emploi, une dérogation à la règle du blocage sur cinq ans de la participation. Une telle situation peut en effet avoir des conséquences sur l'endettement du couple et justifier le déblocage de la participation.

M. Jean-François Veysset a exprimé ses très fortes réserves, rappelant que les couples qui empruntent des sommes importantes souscrivent en principe à une assurance leur permettant de faire face aux conséquences d'une perte d'emploi. La suppression du principe du blocage de la participation peut être un lourd handicap pour l'entreprise. Dans le même sens, M. Stéphane Huillet n'a pas souhaité la multiplication des cas de déblocage de la participation, car cette contrainte est le seul moyen d'obliger les salariés modestes à placer de l'argent de côté ; sans blocage, il n'y a plus de participation. M. Denis Gautier-Sauvagnac a soutenu cette justification du blocage de la participation.

Nomination de rapporteur

La commission a ensuite désigné M. André Lardeux, rapporteur, sur la proposition de loi n° 483 (2005-2006), présentée par M. Michel Dreyfus-Schmidt, relative aux droits des parents séparés en cas de garde alternée des enfants.

Garde alternée des enfants - Examen du rapport

Enfin, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. André Lardeux, rapporteur, sur la proposition de loi n° 483 (2005-2006), présentée par M. Michel Dreyfus-Schmidt, relative aux droits des parents séparés en cas de garde alternée des enfants

M. André Lardeux, rapporteur, a déclaré que la proposition de loi de M. Michel Dreyfus-Schmidt a pour objet de permettre un partage des prestations familiales entre les deux parents, en cas de résidence alternée de leurs enfants. Ce mode d'organisation a été reconnu officiellement par la loi du 4 mars 2002 relative à l'autorité parentale. Il concerne aujourd'hui environ 10 % des 70.000 divorces impliquant des enfants mineurs qui sont prononcés chaque année en France.

Bien que ce ne soit pas directement l'objet du texte, il a souhaité indiquer que la garde alternée fait aujourd'hui l'objet de critiques, en raison de l'effet néfaste qu'elle peut produire pour l'enfant sur le plan psychologique, notamment lorsqu'il est très jeune, car elle ne répond pas à ses besoins de stabilité et de repères. Il s'agit en outre d'un mode d'organisation contraignant et coûteux, chaque parent devant être en mesure de loger ses enfants dans des conditions permettant une scolarisation continue. La garde alternée suppose donc des revenus suffisants et une collaboration constante entre les parents, parfois difficile à nouer en cas de séparation très conflictuelle. Elle implique notamment que les parents respectent une répartition équitable des charges liées à l'entretien de l'enfant, en tenant compte des avantages, fiscaux et sociaux, qui viennent atténuer ces charges.

Depuis la loi de finances rectificative pour 2002, les avantages fiscaux peuvent être répartis entre les parents grâce au partage du quotient familial se rapportant aux enfants. En revanche, les prestations familiales restent attribuées en intégralité à l'un des deux parents. Le choix de l'allocataire est normalement effectué d'un commun accord entre eux, mais si cet accord s'avère impossible, les caisses d'allocations familiales versent les prestations à celui des deux ex-conjoints qui avait la qualité d'allocataire avant le divorce.

M. André Lardeux, rapporteur, est convenu que le droit de la sécurité sociale ne s'est pas adapté à l'évolution du droit de la famille et n'a pas tiré les conséquences de la reconnaissance de la résidence alternée. Pour y remédier, la proposition de loi propose un partage des prestations familiales en deux parts égales en cas de résidence alternée, sauf si la convention homologuée par le juge, par laquelle les parents règlent les questions relatives à l'autorité parentale, ou la décision du juge lui-même en décident autrement.

Cette proposition s'appuie sur un avis de la Cour de cassation du 26 juin dernier, qui estime qu'en cas de résidence alternée, les enfants peuvent être considérés comme à charge des deux parents et, de ce fait, ouvrir droit aux prestations familiales au titre de l'un comme de l'autre.

Il a cependant considéré que la solution proposée va beaucoup plus loin que ne l'exige en réalité la jurisprudence de la Cour. Le texte prévoit en effet un partage des prestations familiales quel que soit le type de résidence alternée, c'est-à-dire que celle-ci soit ou non « égalitaire » ; or, la Cour précise que la résidence alternée doit être effective et équivalente pour que l'enfant puisse être considéré comme à charge de ses deux parents au sens du code de la sécurité sociale et elle écarte a contrario tout partage quand la charge de l'enfant n'est pas répartie de façon équitable entre eux. En outre, la proposition de loi impose un partage systématique par moitié de toutes les prestations familiales, alors que la Cour encadre ce partage, en le subordonnant à des adaptations « en fonction de la situation des parents et des règles particulières à chaque prestation ».

A l'appui de sa démonstration, M. André Lardeux, rapporteur, a cité l'exemple de l'allocation de parent isolé, qu'il serait singulier de diviser entre les deux parents, sans considération du fait que l'un d'entre eux pourrait en réalité ne pas remplir la condition d'isolement qui conduit à son attribution. De même, les prestations sous condition de ressources soulèvent un grand nombre de difficultés dans la mesure où, dans la majorité des cas, les ressources des deux parents ne seront pas équivalentes et n'ouvriront pas forcément droit aux mêmes prestations ou pas au même montant. En outre, un problème spécifique se pose pour l'allocation de logement familial, dont l'attribution est non seulement soumise à une condition de ressources, mais encore subordonnée à des critères liés au logement alors que, par définition, des parents séparés n'occupent pas le même logement.

M. André Lardeux, rapporteur, a estimé que si une solution doit être apportée au vide juridique créé, pour l'attribution des prestations familiales, par le développement de la résidence alternée, le dispositif doit impérativement être adapté à chaque prestation.

Il a rappelé que, conscient de ce problème, le Gouvernement a mis en place un groupe de travail chargé d'étudier les prestations familiales pouvant faire l'objet d'un partage entre des parents séparés et d'identifier les difficultés juridiques et de gestion par les caisses d'allocations familiales en proposant des règles de partage équitables et neutres. Ces travaux ont d'ailleurs été traduits dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, récemment déposé, qui propose une rédaction plus satisfaisante que celle de la proposition de loi : en effet, elle fait référence à une mise en oeuvre « effective et équivalente » de la résidence alternée et organise les modalités de répartition des parts ouvrant droit au bénéfice des allocations familiales, notamment dans le cas des familles recomposées.

En conclusion, M. André Lardeux, rapporteur, a proposé, pour l'ensemble des raisons exposées précédemment, de rejeter l'ensemble de la proposition de loi.

M. Guy Fischer s'est déclaré disposé à réfléchir aux conclusions du rapporteur, estimant que les dispositions de la proposition de loi posent effectivement des difficultés certaines d'application.

M. Nicolas About, président, a rappelé qu'il avait fait part de ces difficultés techniques à la conférence des présidents, tout en s'engageant devant elle à ce que la commission des affaires sociales rapporte le texte dans les délais impartis s'il devait être inscrit à l'ordre du jour du Sénat. Il a considéré que le partage strictement égal de toutes les prestations familiales entre les deux parents serait source d'iniquité et compliquerait sensiblement la gestion de ces prestations par les caisses d'allocations familiales, si la proposition de loi devait être adoptée dans ses termes actuels.

M. Jean-Pierre Godefroy a indiqué qu'il rendra compte à M. Michel Dreyfus-Schmidt, auteur de la proposition de loi, des conclusions du rapporteur. Il a reconnu que le texte soulève en l'état des questions sur lesquelles il convient de se pencher plus avant.

M. Guy Fischer a estimé que si la garde alternée pose un réel problème de partage des prestations familiales entre les deux parents, il est aujourd'hui prématuré d'étudier la proposition de loi telle qu'elle est rédigée. Il a regretté, à cet égard, l'urgence avec laquelle ce texte a été inscrit à l'ordre du jour, empêchant son expertise préalable.

M. Nicolas About, président, a confirmé avoir demandé que la commission commence à travailler sur ce sujet dès que la conférence des présidents a évoqué l'éventualité de son inscription à l'ordre du jour. Il a considéré, en tant que président de la commission et président du conseil de surveillance de la Caisse nationale d'allocations familiales (Cnaf), que le dispositif proposé par le texte pour le partage des prestations familiales n'est pas satisfaisant. D'ailleurs, le dispositif envisagé par le PLFSS, bien que moins extrême, pose également à son sens des problèmes techniques de mise en oeuvre pour les caisses d'allocations familiales. Il a rappelé que, lorsque le juge aux affaires familiales se prononce sur le montant de la prestation compensatoire et de la pension alimentaire, il tient déjà compte des prestations familiales reçues par chaque conjoint.

M. Guy Fischer a regretté, à cet égard, que la modification de la prestation compensatoire n'ait pas abouti lors de la dernière réforme.

M. Nicolas About, président, en est convenu, notamment pour ce qui concerne le délicat problème de la transmission aux héritiers de la charge de cette prestation. Il a ensuite indiqué que la proposition de loi fera l'objet d'un examen en séance publique sur la base du texte voté par la commission. En conséquence, conformément à son règlement, le Sénat sera invité à se prononcer sur les conclusions négatives de la commission.

M. André Lardeux, rapporteur, a estimé qu'au-delà du texte de la proposition de loi, il serait opportun d'évaluer les conséquences de la résidence alternée sur les enfants puisque l'on dispose désormais d'un recul de près de cinq ans sur sa mise en oeuvre pratique.

M. Nicolas About, président, a reconnu l'utilité de mettre en place un groupe de travail sur ce sujet. Il a rappelé que, chaque année, environ 12.000 enfants supplémentaires, dont l'âge moyen est de sept ans, sont concernés par ce dispositif qui doit, en tout état de cause, être évalué à l'aune de l'intérêt supérieur de l'enfant.

Puis la commission a rejeté l'ensemble de la proposition de loi.