Mardi 3 mars 2009

- Présidence de M. Jean-Jacques Hyest, président -

Loi pénitentiaire - Audition de Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord entendu Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, sur le texte n° 202 (2008-2009), proposé par la commission sur le projet de loi pénitentiaire n° 495 (2007-2008).

M. Jean-Jacques Hyest, président, a indiqué que, après que la garde des sceaux a été entendue au mois de décembre 2008, afin de présenter le projet de loi pénitentiaire, une seconde audition était organisée pour lui permettre d'exprimer la position et de défendre les amendements du Gouvernement sur le texte élaboré par la commission.

Mme Marie-Hélène des Esgaulx s'est félicitée de l'application par le Sénat, à compter du 1er mars 2009, de la nouvelle procédure législative prévue par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.

Observant que le Gouvernement avait déclaré l'urgence sur le projet de loi pénitentiaire, M. Alain Anziani a souhaité savoir si celle-ci serait maintenue.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a indiqué qu'il lui était impossible de répondre à cette question à ce stade et a proposé à la commission de confirmer, après l'audition de la ministre, le texte élaboré par la commission au mois de février, afin de prévenir tout risque d'inconstitutionnalité.

Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, a remercié la commission de la mettre en mesure de faire connaître le point de vue du Gouvernement sur le texte issu des travaux de la commission.

Elle a précisé que, au moment de sa première audition par la commission, le 10 décembre 2008, le projet de loi pénitentiaire devait être inscrit à l'ordre du jour du Sénat avant le 1er mars, ce qui eût impliqué la discussion en séance publique sur la base du texte du Gouvernement. Elle a indiqué que, compte tenu du retard pris dans cette inscription à l'ordre du jour, la discussion porterait sur le texte modifié par la commission. Elle a ajouté que, au jour de cette seconde audition, dans la mesure où le projet loi organique relatif à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution n'était pas encore définitivement adopté ni le règlement du Sénat modifié, l'organisation des débats serait celle d'avant la révision constitutionnelle, ce qui lui permettait de venir exposer les amendements du Gouvernement et les points auxquels il tient tout particulièrement mais non d'être présente au moment du vote de la commission sur ces amendements.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a souligné que la révision constitutionnelle était applicable à compter du 1er mars 2009 et rappelé que la ministre avait déjà été entendue au mois de décembre 2008.

Evoquant le premier des points importants pour le Gouvernement, Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, a observé que la commission avait introduit un article 4 quater visant à reconnaître les droits d'expression et de manifestation des personnels des services déconcentrés de l'administration pénitentiaire par référence au statut général de la fonction publique.

Elle a rappelé que, à l'instar des policiers, ces personnels étaient soumis, en raison des missions de sécurité qui leur sont confiées, à un statut spécial fixé par une ordonnance du 6 août 1958, dérogatoire au statut général de la fonction publique et prévoyant des contraintes et des garanties particulières.

Elle a indiqué que le Gouvernement souhaitait maintenir l'équilibre de ce statut, essentiel au bon fonctionnement de l'administration pénitentiaire, en supprimant du texte de la commission toute référence au statut général de la fonction publique. Elle a ajouté qu'il en allait de la sécurité des établissements.

Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, a ensuite observé que la commission des lois avait confié à la réserve civile pénitentiaire une mission supplémentaire de contrôle de l'exécution de mesures de surveillance électronique des personnes placées sous main de justice.

Elle a indiqué qu'une expérimentation préalable au dépôt du projet de loi avait été conduite pour confier à des personnels retraités de l'administration pénitentiaire des missions de renforcement de la sécurité des tribunaux.

Elle a jugé nécessaire la création d'une réserve civile pénitentiaire par un texte de loi, sur le modèle des dispositions prises pour la police nationale.

Elle a considéré en revanche que le contrôle de l'exécution de mesures de surveillance électronique des personnes placées sous main de justice constituait une mission régalienne devant être exercée par des personnels en activité et non par des réservistes. La vulnérabilité d'agents pénitentiaires retraités, a-t-elle déclaré, peut en effet constituer un risque que l'administration pénitentiaire ne peut prendre dans le cadre de la surveillance des personnes sous écrou. Elle a également exprimé la crainte que l'octroi à la réserve civile pénitentiaire de la mission de contrôle de l'exécution de mesures de surveillance électronique des personnes placées sous main de justice n'ouvre la voie à une privatisation ultérieure de cette mission, à laquelle elle s'est déclarée résolument hostile.

Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, a ensuite indiqué que le Gouvernement avait présenté trois amendements relatifs à la question de l'encellulement individuel des prévenus et des condamnés.

Elle a exposé que le premier de ces amendements visait à remplacer le principe de l'encellulement individuel obligatoire pour les prévenus par celui de l'encellulement individuel garanti à tout prévenu qui le demande, en rétablissant le texte initial du projet de loi.

A l'appui de cet amendement, elle a souligné en premier lieu que l'exigence d'un encellulement individuel ne pourrait être satisfaite, pas même en 2012 lors de l'achèvement du programme de construction de 13 000 places lancé par la loi d'orientation et de programmation pour la justice. Elle a déclaré que ce programme, comme les précédents, avait prévu la construction de cellules individuelles et collectives et que, en conséquence, les 63 000 places disponibles en 2012 ne correspondraient pas à 63 000 cellules individuelles. Elle a estimé que, même en stabilisant le nombre des détenus grâce à la politique d'aménagement des peines, il serait durablement impossible de réserver une cellule à chacune des personnes détenues.

Elle a souligné en second lieu que, selon le Gouvernement, l'encellulement individuel pour tous ne devait plus être considéré comme un objectif à atteindre absolument. Un certain nombre de détenus, a-t-elle exposé, ne doivent pas être laissés seuls en cellule, pour leur sécurité, et beaucoup ne le souhaitent pas, notamment dans les maisons d'arrêt où les périodes d'incarcération sont courtes et anxiogènes.

Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, a indiqué que, pour ces raisons, les nouveaux établissements comportaient ou comporteraient 20 % de leurs places en cellules collectives.

Elle a fait observer que cette situation était en cohérence avec celle des autres pays européens, notamment des Pays-Bas, ainsi qu'avec les règles pénitentiaires européennes.

Elle a indiqué que le Gouvernement jugeait en conséquence préférable d'adopter le principe « un homme, une place », qui était celui du projet de loi initial, et de prévoir, d'une part, que les personnes mises en examen, prévenus et accusés soumis à la détention provisoire, sont placées soit en cellule individuelle, soit en cellule collective, d'autre part, que la possibilité d'un placement en cellule collective s'accompagne de la garantie qu'il ne pourra avoir lieu que si cette cellule est adaptée au nombre de détenus et si ces derniers ont été reconnus aptes à cohabiter.

Elle a souligné que le texte de l'amendement garantissait le droit des détenus, conformément aux règles pénitentiaires européennes : si un prévenu demandait à être placé seul en cellule individuelle, l'administration pénitentiaire devrait lui donner satisfaction dès lors que sa personnalité ou encore les nécessités liées à l'organisation du travail ou de la formation professionnelle ou scolaire n'y feraient pas obstacle.

Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, a ajouté que le deuxième amendement tendait, pour des motifs similaires, à permettre de déroger au principe de l'encellulement individuel des condamnés dans trois hypothèses : si les intéressés en font la demande, si leur personnalité justifie que, dans leur intérêt, ils ne soient pas laissés seuls ou encore, et conformément à l'actuel article 717-2 du code de procédure pénale, « en raison de la distribution intérieure des locaux de détention ou de leur encombrement temporaire ».

Enfin, elle a indiqué que le troisième amendement du Gouvernement visait à adapter le moratoire du texte de la commission des lois afin de tirer la conséquence des deux précédents amendements.

Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, a ensuite évoqué l'article 51 du projet, relatif à la différenciation des régimes de détention, en expliquant que cette différenciation consistait à instaurer soit un régime de « portes fermées », soit un régime de « portes ouvertes ».

Elle a indiqué que le Gouvernement souhaitait supprimer du texte de la commission la mention selon laquelle « le placement d'une personne détenue sous un régime de détention plus sévère doit être spécialement motivé » au motif que cette exigence alourdirait inutilement les procédures, risquait de pénaliser les détenus et que l'article 49 A prévoyait des règlements intérieurs-types permettant de porter à la connaissance des détenus la différenciation des régimes de détention.

S'agissant du régime disciplinaire des personnes détenues, Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, a estimé qu'il convenait, pour que le placement en cellule disciplinaire demeure suffisamment dissuasif, de maintenir sa durée à un niveau suffisamment élevé pour les fautes les plus graves, en particulier pour les violences physiques dont peuvent être victimes aussi bien les personnels pénitentiaires que les détenus, voire des bénévoles comme les aumôniers.

Après avoir rappelé que 512 agressions contre les personnels et 644 entre détenus avaient été déplorées en 2008, elle a indiqué que le Gouvernement souhaitait le maintien à 40 jours du plafond de la durée de placement en cellule disciplinaire.

Enfin, Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, a indiqué que le Gouvernement souhaitait la suppression des dispositions de l'article 53 bis du texte de la commission selon lesquelles, lorsqu'un détenu placé à l'isolement saisit le juge administratif en référé, la condition d'urgence nécessaire à la recevabilité de ce recours est présumée.

Après avoir rappelé que le Gouvernement avait profondément réformé le régime de l'isolement par deux décrets de 2006 et que le nombre des décisions de placement à l'isolement avait chuté de 602 en 2005 à 399 en 2008, elle a fait valoir que la situation des détenus placés sous ce régime ne relevait pas nécessairement de l'urgence : par exemple, a-t-elle indiqué, un détenu peut être placé à l'isolement en raison d'un risque d'agression contre l'un de ses codétenus, ou parce qu'il est incapable de se conformer aux exigences de la vie en collectivité. Elle a estimé, en tout état de cause, que l'urgence devait être appréciée en tenant compte de la situation globale, y compris des risques pour les tiers, et pas seulement de la situation personnelle de l'intéressé et qu'il convenait de laisser au juge un pouvoir d'appréciation.

En conclusion et en réponse à une question de M. Jean-Jacques Hyest, président, Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, a indiqué que les autres dispositions du texte de la commission recevaient l'accord du Gouvernement et a salué les avancées qu'elles permettaient.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a estimé que la question de l'encellulement individuel des détenus était avant tout une question de principe. Il a fait observer que les conditions de détention n'étaient pas les mêmes en France que dans d'autres pays européens, notamment les Pays-Bas où elles s'avèrent moins dures. Il a estimé que le développement des alternatives à l'incarcération devrait permettre de réduire la surpopulation carcérale et d'assurer plus facilement le respect du principe de l'encellulement individuel.

La différenciation des régimes de détention lui a semblé utile pour tenir compte du fait qu'un grand nombre de détenus ne posaient pas de difficultés pendant la durée de leur incarcération tandis qu'un petit nombre nécessitait une surveillance accrue.

Enfin, il a souligné les difficultés liées à la présence en prison d'un grand nombre de personnes atteintes de troubles mentaux, en déplorant les effets pervers de la réforme de l'article 64 devenu l'article 122-1 du Code pénal : faute d'établissements spécialisés dans la prise en charge de ces personnes et contrairement au souhait du législateur, a-t-il constaté, l'altération du discernement est devenue une circonstance aggravante et non une circonstance atténuante de la responsabilité pénale des auteurs d'infraction.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a marqué son profond désaccord avec nombre des amendements présentés par le Gouvernement.

Evoquant la différenciation des régimes de détention, il a estimé que le texte de la commission, prévoyant l'exigence d'une motivation spéciale en cas de soumission d'un détenu à un régime plus sévère, ne risquait nullement de pénaliser les détenus.

A propos de la question du maintien du principe de l'encellulement individuel des détenus, il a souligné l'évidence des inconvénients de l'encellulement collectif et la difficulté d'en trouver à l'encellulement individuel.

Il a espéré que l'adoption de la loi pénitentiaire, conjuguée à l'achèvement du programme de construction de nouveaux établissements pénitentiaires permette, conformément aux objectifs affichés par le Gouvernement et grâce au développement des mesures alternatives à l'incarcération, de réduire effectivement la surpopulation carcérale.

Il a également formé le voeu d'une réforme prochaine des conditions de l'article 122-1 du code pénal et des conditions de prise en charge des auteurs d'infraction atteints de troubles mentaux.

S'agissant du régime disciplinaire des détenus, M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a indiqué avoir récemment visité l'établissement pénitentiaire de Loos-Lille en compagnie du président du Sénat, M. Gérard Larcher, et observé qu'aucun des surveillants rencontrés sur place n'avait marqué une quelconque hostilité à la perspective de la réduction à 30 jours de la durée maximale du placement en cellule disciplinaire susceptible d'être infligé en cas d'agression. Il a exposé que ces agents avaient en effet pleinement conscience, d'une part, que les détenus auteurs d'agressions font systématiquement l'objet de poursuites pénales, d'autre part, qu'un placement de longue durée dans une cellule disciplinaire accroît les risques de violences du détenu contre les autres et contre lui-même.

Souscrivant aux propos du rapporteur, M. Hugues Portelli a déclaré ne pas comprendre les raisons pour lesquelles le Gouvernement avait déclaré l'urgence sur le projet de loi pénitentiaire. Il a souligné la nécessité d'une loi de programmation qui compléterait les dispositions de ce projet de loi, consacrées au droit en prison - droits des personnes détenues et des personnels pénitentiaires -, par des dispositions relatives à la santé, au travail et au logement.

S'il a déclaré comprendre les difficultés matérielles rencontrées par l'administration pénitentiaire pour assurer un encellulement individuel des personnes détenues, il a également souligné qu'un grand nombre d'entre elles n'avaient pas leur place en prison, soit qu'elles puissent bénéficier de mesures alternatives à l'incarcération, soit qu'elles soient atteintes de troubles mentaux.

Il a considéré que le texte de la commission des lois, « minimum minimorum », pouvait encore être amélioré sur bien des points, notamment par la prohibition des fouilles corporelles internes.

M. Alain Anziani a déclaré que la commission avait sensiblement amélioré le texte, décevant, du projet de loi initial, même si elle était restée en retrait par rapport à de nombreuses règles pénitentiaires européennes. Aussi s'est-il montré très déçu par les amendements présentés par le Gouvernement, auxquels il s'est déclaré défavorable.

Evoquant la question de la motivation spéciale de la soumission d'une personne détenue à un régime différencié plus sévère, Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, a estimé qu'une décision ne devait être spécialement motivée qu'en cas d'atteinte à un droit fondamental, par exemple la privation du droit à recevoir une visite dans un parloir ou de téléphoner. Or, a-t-elle réaffirmé, la différenciation des régimes de détention consiste à instaurer soit un régime de « portes fermées », soit un régime de « portes ouvertes », et ne porte donc pas atteinte à un droit fondamental. Elle a exprimé la crainte que le texte de la commission ait pour conséquence de faire du régime « portes ouvertes » l'exception.

Tout en convenant de l'existence d'une forte proportion de personnes détenues atteintes de troubles mentaux, Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, a cependant observé que toutes ces personnes avaient été déclarées, par des décisions de justice, coupables et responsables pénalement des infractions qui leur étaient reprochées. Elle a indiqué que 60 places seraient créées pour leur prise en charge au sein d'unités hospitalières spécialement aménagées en 2009 et que ce nombre serait porté à 712 en 2012.

A propos des alternatives à l'incarcération, Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, a mis en exergue la baisse significative du nombre des personnes placées en détention provisoire (16 000 pour environ 64 000 détenus au total) et fait part de son espoir que les dispositions du projet de loi prévoyant l'assimilation de l'assignation à résidence avec surveillance électronique à une détention provisoire pour son imputation sur une peine privative de liberté contribue à faire baisser davantage encore ce nombre.

Elle a cependant estimé que le développement des alternatives à l'incarcération permis par le projet de loi ne permettrait pas à l'administration pénitentiaire d'assurer l'encellulement individuel de tous les détenus. Aussi lui a-t-il semblé préférable de faire preuve de souplesse et de prévoir que seuls les détenus qui en font la demande sont placés en cellule individuelle, sous réserve de certaines exceptions, en soulignant que cette possibilité avait déjà été instaurée par décret en 2008.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a indiqué que sa visite du centre de détention de Muret (Haute-Garonne) l'inclinait à penser que la différenciation des régimes de détention allait au-delà de la simple distinction entre un régime de « portes fermées » et un régime de « portes ouvertes ». Ce centre, a-t-il observé, comprend notamment une unité d'observation approfondie pour les détenus considérés comme les plus difficiles (régime de portes fermées, exclusion du travail en ateliers) ; un bâtiment (H) où sont affectés les détenus présentant une bonne conduite et qui ne sont pas ou ne sont plus sous le coup d'une période de sûreté (régime de « portes ouvertes » de 7 h 15 à 23 h) et un bâtiment (S) dit de « confiance », au régime de détention encore plus libéral et réservé aux détenus ayant un reliquat de peine inférieur ou égal à trois ans, désireux de se mobiliser sur un projet de sortie.

Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, lui a répondu que les régimes de détention mis en place au centre de détention de Muret avaient constitué une expérimentation ponctuelle mais que la différenciation des régimes de détention prévue par le projet de loi consistait uniquement en une distinction entre un régime de « portes fermées » et un régime de « portes ouvertes ».

Evoquant la question du régime disciplinaire des détenus, elle a fait observer que sur les 115 suicides déplorés en prison en 2008, 10 seulement avaient eu lieu dans une cellule disciplinaire.

En réponse aux propos de M. Hugues Portelli, elle a souligné que le projet de loi constituait un texte global, citant notamment en exemple les dispositions prévoyant de confier à titre expérimental aux régions la responsabilité de la formation professionnelle des détenus. A cet égard, elle a déploré que quatre régions seulement aient déclaré être prêtes à mener cette expérimentation.

M. Alain Anziani a indiqué que cette frilosité tenait sans doute à l'absence de garanties sur la compensation financière par l'État des charges transférées aux collectivités territoriales.

Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, a indiqué que plusieurs régions avaient marqué leur opposition de principe à assumer la responsabilité de la formation professionnelle des détenus, au motif qu'elle ne relevait pas de leur domaine de compétence.

M. Alain Anziani a indiqué que telle n'était pas la conception de la région Aquitaine, candidate à cette expérimentation.

Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, a ajouté que ces réticences tenaient sans doute à l'existence de cultures extrêmement différentes entre administrations, source de difficultés, en dépit d'une réelle bonne volonté, pour garantir une coopération toujours efficace entre l'administration pénitentiaire et celles qui sont chargées de la santé, du logement ou encore de la formation professionnelle.

A cet égard, elle a regretté qu'il soit nécessaire de passer par la loi pour obtenir des résultats, faisant par exemple observer que le projet de loi prévoyait ainsi l'accès des détenus aux dispositifs d'insertion par l'activité économique.

Marquant à nouveau l'opposition du Gouvernement à l'extension des missions de la réserve civile pénitentiaire au contrôle de l'exécution de mesures de surveillance électronique des personnes placées sous main de justice, Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice, a souligné que les personnes bénéficiant de telles mesures étaient parfois dangereuses, notamment les pédophiles, et que leur surveillance devait donc être confiée à des personnels en activité, et non à des agents retraités plus vulnérables.

Après avoir rappelé que les personnels de la réserve civile pénitentiaire feraient l'objet d'une sélection stricte, M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a estimé, d'une part, qu'il serait regrettable de les cantonner à des missions de renforcement de la sécurité des bâtiments du ministère de la justice, d'autre part, que le contrôle de l'exécution de mesures de surveillance électronique des personnes placées sous main de justice ne consistait pas uniquement en des tâches régaliennes, les réservistes pouvant se contenter de surveiller le déclenchement des dispositifs d'alerte, enfin, que l'octroi d'une telle mission à ces agents permettrait aux personnels en activité de se consacrer à d'autres tâches.

Mme Jacqueline Gourault a souligné que la moralité d'un agent ne dépendait pas du fait qu'il soit en activité ou à la retraite.

Observant que la réserve civile pénitentiaire serait composée de volontaires remplissant des conditions d'aptitude, Mme Marie-Hélène des Esgaulx a ajouté que ces réservistes mériteraient considération et confiance.

Loi pénitentiaire - Examen des amendements

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a poursuivi l'examen des amendements sur le texte n° 202 (2008-2009), proposé par la commission sur le projet de loi pénitentiaire n° 495 (2007-2008).

Le Gouvernement l'ayant informé que ces amendements seraient rectifiés, M. Jean-Jacques Hyest, président, a proposé que soit réservé l'examen des amendements, présentés par le Gouvernement, n°s 282 à l'article 49 (principe de l'encellulement individuel pour les condamnés), 284 à l'article 52 (principe de l'encellulement individuel pour les condamnés) et 287 à l'article 59 (moratoire de cinq ans pour l'application des dispositions relatives à l'encellulement individuel des détenus) relatifs aux conditions d'encellulement des détenus ainsi que l'amendement n° 283 à l'article 51 (différenciation des régimes de détention) supprimant l'exigence d'une motivation spéciale proposée par le texte de la commission pour le placement d'une personne détenue sous un régime de détention plus sévère.

La commission a alors examiné l'amendement n° 288 présenté par le Gouvernement à l'article 4 quater (droits d'expression et de manifestation des personnels pénitentiaires), tendant à supprimer toute référence au statut général de la fonction publique pour la reconnaissance des droits d'expression et de manifestation des personnels des services déconcentrés de l'administration pénitentiaire.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a rappelé que l'article 1er de l'ordonnance du 6 août 1958 relative au statut spécial des fonctionnaires des services déconcentrés de l'administration pénitentiaire permettait au Gouvernement de déroger par décret au statut général de la fonction publique.

Il a également rappelé que l'introduction du droit commun dans les établissements pénitentiaires, au profit des détenus comme des personnels de l'administration pénitentiaire, avait constitué l'un des fils directeurs des travaux de la commission des lois.

Il a estimé que l'article 4 quater du texte adopté par la commission présentait un double intérêt symbolique et juridique.

Sur le plan symbolique, il a fait valoir que les dispositions proposées consacraient dans la loi la soumission au droit commun des droits d'expression et de manifestation des personnels des services déconcentrés de l'administration pénitentiaire, sous réserve du maintien, d'une part, de la prohibition de toute cessation concertée du service et de tout acte collectif d'indiscipline caractérisée, d'autre part, de la possibilité de sanctionner ces faits en dehors des garanties disciplinaires lorsqu'ils sont susceptibles de porter atteinte à l'ordre public. A cet égard, a-t-il rappelé, le statut général de la fonction publique s'applique aux personnels de l'administration pénitentiaire, sans qu'il soit besoin de le préciser, dans la mesure où il n'y est pas dérogé, étant précisé qu'il en va de même de tous les fonctionnaires soumis à un statut spécial.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a indiqué que le texte de la commission présentait néanmoins un intérêt juridique dans la mesure où il interdisait au pouvoir réglementaire d'apporter d'autres restrictions aux droits d'expression et de manifestation des personnels que celles prévues par l'ordonnance.

Il a observé que l'amendement du Gouvernement faisait perdre à l'article 4 quater cet intérêt, non négligeable en droit même si, dans les faits, le décret de 1966 ne prévoyait pas de restrictions supplémentaires significatives. Il a néanmoins observé que les droits d'expression et de manifestation resteraient inscrits dans la loi.

Aussi a-t-il proposé à la commission de s'en remettre à la sagesse du Sénat.

M. Alain Anziani a rappelé que les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, souhaitaient la suppression de toute possibilité de sanctionner les personnels pénitentiaires en dehors des garanties disciplinaires prévues par le statut général de la fonction publique.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a rappelé que les contraintes du statut spécial de ces agents avaient pour corollaire des avantages en termes de retraite et de traitement qu'un alignement sur le statut général de la fonction publique supposerait, selon lui, de remettre en cause.

MM. Richard Yung et Hugues Portelli ont marqué leur préférence pour la rédaction du texte de la commission plutôt que pour celle de l'amendement présenté par le Gouvernement.

La commission a décidé de s'en remettre à la sagesse du Sénat sur cet amendement.

A l'article 6 (réserve civile pénitentiaire), elle a examiné un amendement présenté par le rapporteur tendant à soumettre les réservistes au code de déontologie du service public pénitentiaire, ainsi qu'un amendement n° 281 présenté par le Gouvernement tendant à supprimer l'extension des missions de la réserve civile pénitentiaire au contrôle de l'exécution des mesures de surveillance électronique des personnes placées sous main de justice.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a indiqué que son amendement était destiné à répondre aux craintes exprimées par la ministre de la justice lors de sa seconde audition devant la commission. Il a rappelé par ailleurs que la réserve civile pénitentiaire serait composée exclusivement de volontaires, que ces volontaires feraient l'objet d'une sélection stricte puisqu'ils devraient remplir des conditions d'aptitude précisées par décret en Conseil d'Etat et que, en tout état de cause, aucun agent ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire pour un motif incompatible avec l'exercice des missions de la réserve ne pourrait être engagé.

Soutenant le texte de la commission, M. Pierre Fauchon a estimé qu'il convenait de valoriser le rôle de la réserve civile pénitentiaire.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a rappelé que les réservistes de la police nationale ne pouvaient exercer aucune prérogative de puissance publique.

Observant que les membres de l'opposition étaient hostiles au principe même de l'institution d'une réserve civile pénitentiaire et que la majorité sénatoriale était divisée sur la question de l'extension de ses missions, M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a proposé à la commission de s'en remettre à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 281 présenté par le Gouvernement.

La commission a alors adopté l'amendement présenté par le rapporteur et décidé de s'en remettre à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 281.

Elle a ensuite examiné l'amendement n° 286 présenté par le Gouvernement à l'article 53 (régime disciplinaire), tendant à fixer à quarante jours la durée maximale du placement en cellule disciplinaire en cas de violences contre les personnes.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a rappelé que la commission avait proposé de ramener à trente jours cette durée que le projet de loi initial du Gouvernement avait fixée à quarante jours alors qu'en l'état du droit elle était de quarante-cinq jours. Il a souligné que les pays européens retenaient une durée généralement beaucoup plus courte comprise entre trois jours pour l'Irlande et vingt-huit jours pour l'Allemagne. Il a indiqué que les faits susceptibles de donner lieu à un placement en quartier disciplinaire étaient également constitutifs d'infractions pénales pour lesquelles le parquet engageait systématiquement des poursuites. Il a relevé que le placement en cellule disciplinaire pour une longue durée ne constituait pas toujours une réponse adaptée et qu'il était parfois générateur de violences. Il a noté en outre que les médecins mettaient souvent un terme à ce régime afin de ne prendre aucun risque vis-à-vis de détenus qui menaçaient de se suicider.

La commission a donné un avis défavorable à cet amendement.

La commission a ensuite examiné l'amendement n° 285 du Gouvernement à l'article 53 bis (isolement administratif), tendant à supprimer la levée de la condition d'urgence requise pour permettre au juge administratif, saisi en référé par un détenu placé à l'isolement, de suspendre cette mesure.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a estimé que l'initiative prise par la commission en prévoyant cette levée de l'urgence constituait en effet une innovation juridique qui limitait la liberté d'appréciation du juge administratif et mettait en cause une jurisprudence bien établie.

Selon M. Hugues Portelli, la juridiction administrative considère que le placement à l'isolement ne constitue pas une situation d'urgence et, dès lors, elle n'examine pas l'autre condition permettant la suspension d'une mesure administrative en référé, à savoir un moyen propre à soulever un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée. Il a regretté que, dans ces conditions, le juge administratif ne se prononce sur une telle mesure que dans le cadre d'un recours pour excès de pouvoir au terme de délais excessifs alors même que, dans l'intervalle, la personne aura subi une mesure très attentatoire à ses droits.

A l'invitation de M. Jean-René Lecerf, rapporteur, la commission a alors donné un avis défavorable à cet amendement.

A l'article 24 (fouilles), la commission a donné un avis favorable à l'amendement n° 206 présenté par M. Nicolas About au nom de la commission des affaires sociales interdisant que les fouilles corporelles internes soient faites par un médecin travaillant en milieu pénitentiaire.

A l'article 58 A (obligation de proposer des travaux d'intérêt général aux personnes condamnées pour être éligible au fonds interministériel de prévention de la délinquance), elle a décidé de s'en remettre à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 1, présenté par Mme Catherine Troendle, tendant à subordonner l'éligibilité des communes et établissements publics de coopération intercommunale de moins de 10 000 habitants au fonds interministériel de prévention de la délinquance à la mise en oeuvre de travaux d'intérêt général destinés aux personnes condamnées.

Sur proposition de M. Jean-Jacques Hyest, président, la commission a confirmé que le texte de la commission soumis au Sénat était celui qui avait été adopté le 4 février 2009.

Mercredi 4 mars 2009

- Présidence de M. Jean-Jacques Hyest, président -

Nomination d'un rapporteur

La commission a tout d'abord nommé Mme Catherine Troendle rapporteur sur la proposition de loi n° 378 (2007-2008) présentée par M. Nicolas About, tendant à supprimer le retrait de points du permis de conduire en cas de petits excès de vitesse.

Développement économique de l'outre-mer - Examen du rapport pour avis

La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Jean-Paul Virapoullé sur le projet de loi n° 496 (2007-2008) pour le développement économique de l'outre-mer, dans le texte n° 233 (2008-2009) adopté par la commission des finances le 19 février 2009.

M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis, a indiqué que le projet de loi, déposé en juillet 2008, avait été pensé avant le début de la crise économique et a marqué que ce changement de conjoncture économique allié à la grave crise sociale que traversent les Antilles devait conduire à modifier ce texte afin d'apporter un soutien renforcé aux départements d'outre-mer, collectivités d'outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie. Il a estimé qu'il était utile d'examiner aujourd'hui ce projet de loi, sans attendre la mise en place d'états généraux de l'outre-mer, annoncée par le Président de la République, devant déboucher à terme sur de nouvelles mesures législatives de nature structurelle.

M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis, a souligné que, depuis 1986, le législateur avait choisi comme outils de développement de l'outre-mer des instruments tendant à abaisser le coût du travail et à favoriser l'investissement. Il a considéré que cette stratégie avait permis à l'ensemble de l'outre-mer d'exercer un rattrapage remarquable par rapport à la métropole, les collectivités ultramarines ayant connu une croissance nettement supérieure à la métropole depuis une dizaine d'années.

Il a indiqué qu'il convenait de dépasser cette seule logique de rattrapage pour mettre en oeuvre une logique de développement endogène et pérenne en valorisant davantage les atouts de l'outre-mer reconnus, en particulier, par la Commission européenne qui a considéré, dans une communication du 17 octobre 2008, que les régions ultrapériphériques -dont font partie les quatre départements d'outre-mer- constituaient un atout pour l'Union européenne à l'heure de la mondialisation.

Il a salué les effets bénéfiques pour l'économie des collectivités ultramarines de la mise en place de zones franches globales d'activités qui permettrait de favoriser le développement de secteurs porteurs de l'économie, tels que les nouvelles technologies de l'information, l'environnement, les énergies renouvelables, le tourisme et l'agro-nutrition.

Il a toutefois regretté que les dispositions du projet de loi relatives au logement restent en-deçà des besoins des départements d'outre-mer. Il a jugé indispensable de renforcer les dispositifs en faveur du logement social et intermédiaire et du secteur de la construction faute de quoi le risque d'une explosion sociale dans certaines collectivités, à commencer par La Réunion, pourrait se concrétiser.

M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis, a souligné que le projet de loi tendait à favoriser l'égalité de traitement entre l'outre-mer et la métropole, insistant sur les mesures destinées à assurer la continuité territoriale. Rappelant que des efforts importants avaient été faits en 2003 avec l'institution de dispositifs de mobilité en faveur des jeunes et de la dotation de continuité territoriale, il a précisé que le projet de loi allait plus loin, d'une part, en réformant les mesures relatives à la mobilité géographique des ultramarins et, d'autre part, en instituant une aide destinée à compenser le coût du fret.

Il a ajouté qu'il convenait également d'assurer la continuité numérique de l'outre-mer par rapport à la métropole, en développant les infrastructures destinées à renforcer le poids des nouvelles technologies dans ces territoires.

Plus généralement, il a évoqué l'existence outre-mer de situations de position dominante conduisant à un renchérissement indu de certains prix à la consommation, évoquant en particulier le prix des carburants qui fait l'objet d'ententes entre plusieurs compagnies pétrolières. Il a salué l'initiative de la commission des finances qui, dans son texte, a repris une proposition de loi qu'il avait lui-même déposée afin de réglementer, dans les départements d'outre-mer, le prix de cent produits de première nécessité.

Il a estimé que les états généraux de l'outre-mer seraient l'occasion de faire sauter certains verrous entravant le développement économique des collectivités territoriales d'outre-mer, constitués en particulier par certains groupes de pression économiques influents.

M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis, a rappelé que la commission des lois ne s'était saisie que des dispositions du projet de loi relevant de sa compétence, à savoir celles qui accompagnaient les mesures destinées au développement économique et social de l'outre-mer en favorisant l'offre locative et la constitution de titres de propriété fiables, en donnant aux collectivités publiques des moyens d'intervention renforcés, en renforçant les sanctions en matière d'orpaillage illégal et en procédant à de nouvelles habilitations concernant Mayotte. Il a précisé qu'il présenterait dix amendements à la commission.

M. Jean-Pierre Sueur a estimé que la complexité de la situation dans les Antilles, la date déjà ancienne du dépôt du projet de loi, le changement du contexte économique ainsi que le choix fait par le Gouvernement d'engager la procédure d'urgence devaient conduire à différer la discussion du texte, qui n'était plus adapté aux circonstances.

Il a jugé que le Gouvernement n'avait pas réagi assez vite et avec assez d'ampleur aux problèmes rencontrés aux Antilles et que, depuis plusieurs années, le pouvoir politique avait trop souvent cédé le pas au pouvoir financier. Il a estimé que la crise actuelle devrait permettre de trouver désormais un juste équilibre entre les nécessités économiques et la volonté politique. Il a ajouté que les états généraux devaient constituer à l'avenir le cadre d'examen de toute nouvelle mesure en faveur de l'outre-mer, sans qu'il faille attendre la discussion d'un nouveau projet de loi.

M. Pierre-Yves Collombat a estimé que ni le texte adopté par la commission des finances, ni le projet de loi initial ne comportaient de dispositions ayant pour effet de mettre fin aux abus de positions dominantes existants.

Mme Catherine Troendle s'est interrogée sur la nécessité de modifier les règles de l'indivision, dont le régime a été récemment réformé à l'occasion de la loi du 23 juin 2006 portant réforme des successions et libéralités.

Après que M. Elie Brun eut indiqué que le projet de loi ne semblait pas apporter une réelle réponse à la crise de l'emploi dans les collectivités d'outre-mer, M. Jean-Jacques Hyest, président, a souligné que plusieurs dispositions du texte avaient cette vocation mais que, ne rentrant pas dans le champ de compétence de la commission, cette dernière ne s'en était pas saisie.

M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis, a indiqué que l'objet même du projet de loi était le développement de l'économie des collectivités territoriales d'outre-mer, cette dernière ne pouvant avoir qu'un effet d'entraînement sur l'emploi. Il a rappelé :

- que la réglementation des prix autorisée par l'article premier A du projet de loi ne pourrait qu'améliorer le pouvoir d'achat des salariés ;

- que, dans les zones franches globales d'activités, les entreprises bénéficieraient de réductions, pouvant aller jusqu'à 80 % dans certains secteurs, du montant de l'impôt sur les sociétés ou de l'impôt sur les revenus, de la taxe professionnelle et de la taxe foncière sur les propriétés bâties ;

- que les entreprises d'outre-mer bénéficieraient de mesures d'allègement de charges sociales sur une partie des salaires.

Il a constaté que l'ensemble de ces mesures ne pourrait que favoriser l'emploi.

Il a fait remarquer que le texte ne comportait pas de dispositif spécifique concernant les emplois aidés, dont il a considéré qu'ils ne constituaient pas une véritable solution au problème du chômage outre-mer.

Puis la commission a examiné les amendements proposés par le rapporteur pour avis.

A l'article 16 (fonds exceptionnel d'investissement outre-mer), le rapporteur pour avis a présenté un amendement tendant à réserver une quote-part égale à 10 % du fonds exceptionnel d'investissement à des équipements publics collectifs destinés à favoriser le développement des technologies de l'information et de la communication, insistant sur le fait qu'il s'agissait d'un axe de développement essentiel pour l'outre-mer.

Après que M. Jean-Jacques Hyest, président, eut précisé que la quote-part de 10 % constituait un minimum et que M. Jean-Pierre Sueur eut suggéré que cette quote-part soit fixée à au moins 10 %, la commission a adopté cet amendement ainsi rédigé.

A l'article 18 (prérogatives d'un co-indivisaire pour la remise sur le marché locatif des biens à usage d'habitation inoccupés), la commission a examiné un amendement tendant à étendre à St-Martin et à St-Barthélemy ainsi qu'aux locaux à usage mixte d'habitation et professionnel le bénéfice du régime dérogatoire pour la gestion de biens indivis afin de favoriser l'offre locative, tout en exigeant un délai de vacance de deux années civiles et une inoccupation effective des locaux.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a rappelé que la proposition de loi de simplification et de clarification du droit, adoptée par la commission des lois du Sénat, avait déjà prévu un aménagement au régime de l'indivision concernant la vente des biens indivis mais non leur mise en location.

M. Jacques Mézard ayant demandé si, dans le cadre de la procédure envisagée, l'un des indivisaires pouvait obtenir un bail d'habitation à son profit sur le bien indivis, M. François Pillet a indiqué que le droit commun de l'indivision trouverait à s'appliquer, M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis, précisant que rien n'empêchait cette éventualité, le juge exerçant en tout état de cause son contrôle sur la procédure.

M. Alain Anziani a estimé qu'il serait préférable d'éviter une telle situation, M. Laurent Béteille indiquant, pour sa part, qu'il n'estimait pas celle-ci gênante.

Remarquant que le dispositif envisagé ne concerne que l'outre-mer, Mme Catherine Troendle a estimé que cette mesure pourrait être étendue à l'ensemble du territoire français, M. Jean-Jacques Hyest, président, soulignant néanmoins que la situation de l'indivision dans les départements d'outre-mer était très particulière compte tenu de leur fréquence et du nombre très important des indivisaires.

La commission a adopté cet amendement.

A l'article 19 (autorisation de création d'un groupement d'intérêt public chargé de reconstituer les titres de propriété dans les départements d'outre-mer), la commission a adopté un amendement tendant à créer deux groupements d'intérêt public chargés de rassembler les éléments propres à reconstituer les titres de propriété des biens immobiliers, qui seraient compétents, l'un, dans la région Antilles-Guyane, l'autre, dans l'Océan indien.

A l'article 22 (déclassement de terrains situés dans la zone des cinquante pas géométriques pour cession à titre onéreux), elle a adopté un amendement prévoyant une mise en demeure adressée par l'autorité administrative aux personnes ayant la possibilité d'acquérir à titre gratuit des terrains situés dans la zone des cinquante pas géométriques en Guadeloupe et en Martinique, afin d'accélérer les possibilités de cession à titre onéreux de certaines parcelles à toute personne physique ou morale.

A l'article 26 (fonds de continuité territoriale), elle a adopté un amendement de précision, M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis, soulignant que le Gouvernement envisageait le dépôt d'un amendement ayant pour objet de réécrire l'ensemble de cet article, ce qui pourrait avoir pour effet de faire tomber cet amendement.

A l'article 29 (répression de l'orpaillage illégal), la commission a examiné un amendement visant tout d'abord à donner un caractère limitatif à l'énumération des atteintes à l'environnement justifiant une peine de cinq ans d'emprisonnement ou de 75 000 euros d'amende en cas d'orpaillage illégal.

Après avoir indiqué que cet amendement avait également pour objet de préciser les conditions du prononcé de la peine complémentaire de restauration du milieu aquatique, M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis, a souligné qu'il avait enfin pour but de clarifier le champ d'application du mécanisme de report du début de la garde à vue pendant la durée du transfert de la personne interpellée dans la forêt guyanaise jusqu'aux locaux de la garde à vue. Il a précisé que cette faculté visait à prendre en considération la situation géographique de la Guyane et consacrait une jurisprudence de la Cour de cassation qui avait validé la consignation de personnes à bord d'un navire, pendant plusieurs jours, avant leur présentation à un juge dans un port français.

M. François Zocchetto a demandé si une telle mesure avait déjà des précédents et si les autres règles de la procédure pénale s'appliqueraient aux personnes faisant l'objet de cette mesure de report.

Après que M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis, eut indiqué que les règles de procédure pénale étaient d'application générale, M. Jean-Jacques Hyest, président, a constaté qu'une garde à vue qui commencerait dès l'interpellation au milieu de la forêt guyanaise, ne pourrait en tout état de cause pas permettre à la personne gardée à vue d'exercer matériellement ses droits élémentaires de voir un avocat ou un médecin.

Puis la commission a adopté cet amendement.

A l'article 31 (ratification d'ordonnances) la commission a adopté un amendement tendant à supprimer des dispositions relatives au code de l'organisation judiciaire, en contradiction avec l'article 9 de la proposition de loi relative à l'exécution des décisions de justice et aux conditions d'exercice des professions réglementées, adoptée par le Sénat le 11 février 2009. M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur, a précisé qu'il s'agissait de permettre l'application à Mayotte des dispositions du code de l'organisation judiciaire relatives au juge des tutelles.

Au même article, la commission a ensuite adopté un amendement tendant à reporter du 31 décembre 2008 au 31 décembre 2010 la date jusqu'à laquelle les Mahorais relevant du statut civil de droit local, nés avant le 8 mars 2000, peuvent saisir la Commission de révision de l'état civil (CREC). M. Jean-Jacques Hyest, président, a rappelé que la mission d'information de la commission des lois sur la départementalisation de Mayotte avait conclu à la nécessité de proroger ce délai, tout en incitant les Mahorais à saisir la CREC. Il a expliqué que si les Mahorais souhaitant obtenir des documents d'identité, par exemple pour avoir la possibilité de voyager, étaient rapidement conduits à saisir la CREC, un délai de saisine devait être maintenu, afin d'assurer l'achèvement de la révision de l'état civil dans les meilleurs délais. Il a souligné que cet achèvement constituait une étape essentielle pour l'accès de Mayotte au statut de département d'outre-mer.

Mme Catherine Troendle a estimé que le délai au cours duquel les Mahorais doivent saisir la CREC n'était qu'un aspect de la révision de l'état civil à Mayotte et que les conditions de fonctionnement de la CREC devaient être améliorées.

M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur, a relevé que si le délai devait inciter les Mahorais à saisir rapidement la CREC, les services publics devaient également sensibiliser la population à la nécessité d'effectuer cette démarche. Il a rappelé que près de 15.000 dossiers étaient en instance devant la CREC, dépourvue de magistrat président depuis plus de huit mois.

A l'article 32 (habilitations à adapter et actualiser le droit applicable outre-mer), la commission des lois a adopté un amendement tendant à :

- supprimer les habilitations à prendre des ordonnances pour « toiletter » le droit de l'outre-mer, d'une part, et étendre des dispositions de droit civil, d'autre part ; M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur, a précisé que, dans ces deux domaines, le Gouvernement recourait habituellement à l'habilitation permanente de l'article 74-1 de la Constitution, ou à des habilitations par matière, plus précises ;

- préciser que l'habilitation relative à l'organisation juridictionnelle de Mayotte et au statut civil de droit personnel, vise à assurer le respect des principes constitutionnels et des droits fondamentaux ;

- renforcer l'intelligibilité de l'habilitation à prendre par ordonnance des mesures permettant d'expulser les personnes occupant des constructions illégales et de détruire ces constructions, l'amendement étendant en outre cette habilitation à la Guyane, à Mayotte et à Saint-Martin, collectivités les plus touchées par l'immigration irrégulière et les constructions illégales qui en résultent.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a rappelé que lors de son audition, le 17 février 2009, par les commissions saisies au fond et pour avis du projet de loi, M. Yves Jégo, secrétaire d'État chargé de l'outre-mer, avait évoqué la possibilité de supprimer l'habilitation relative à l'organisation juridictionnelle de Mayotte et à l'actualisation du statut civil de droit personnel, ces dispositions pouvant être insérées dans le projet de loi relatif à la départementalisation de Mayotte. Il a souligné que le rapport d'information de la commission des lois sur la départementalisation de Mayotte relevait la nécessité de supprimer les fonctions juridictionnelles des cadis et de modifier le statut personnel pour assurer l'égalité des droits entre les femmes et les hommes. Il a estimé que, dans l'attente du calendrier d'examen des projets de loi organique et ordinaire relatifs à la départementalisation, l'habilitation à procéder par ordonnance devait être maintenue, afin d'assurer, en toute hypothèse, une mise en oeuvre rapide de ces réformes.

A l'article 33 (commission nationale d'évaluation des politiques de l'Etat outre-mer), la commission a adopté un amendement prévoyant que le rapport établi par la commission nationale d'évaluation des politiques de l'Etat outre-mer portera sur l'ensemble des rémunérations et non sur les seules rémunérations des fonctionnaires de l'Etat.

Sous réserve de ses amendements, la commission a donné un avis favorable à l'adoption du projet de loi dans le texte adopté par la commission des finances.

Loi pénitentiaire - Examen des amendements

Enfin, la commission a procédé à l'examen des quatre amendements rectifiés du Gouvernement au texte n° 202 (2008-2009), adopté par la commission sur le projet de loi pénitentiaire n° 495 (2007-2008).

Elle a d'abord débattu de l'amendement n° 290 à l'article 49 (principe de l'encellulement individuel pour les prévenus), tendant à prévoir que les personnes prévenues sont placées, selon leur libre choix, soit en cellule individuelle soit en cellule collective, cette demande étant satisfaite sauf si leur personnalité y fait obstacle.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a souligné que si cette rédaction marquait un progrès significatif par rapport à la première version de cet amendement déposée par le Gouvernement - qui aurait pu avoir pour effet de faire de l'encellulement collectif le principe et de l'encellulement individuel l'exception - elle ne pouvait néanmoins retenir son adhésion. Il a craint, en premier lieu, qu'en mettant sur le même plan le placement en cellule individuelle et en cellule collective, cette disposition ne remette en cause le principe de l'encellulement individuel affirmé dans notre droit depuis 1875. Il a craint également qu'une telle évolution ne soit interprétée comme la renonciation à un objectif pourtant essentiel de la politique pénitentiaire et conduise à oblitérer les différents aspects positifs d'une réforme qui se veut ambitieuse, à juste titre.

Il a souligné ensuite que le dispositif proposé par le Gouvernement pourrait entraîner de réelles difficultés à l'issue du moratoire de cinq ans prévu par l'article 59 du projet de loi dès lors que les personnes détenues auraient le libre choix entre cellule individuelle ou collective et que n'était pas retenue dans la rédaction de l'amendement la dérogation figurant dans le texte de la commission et reprise du droit en vigueur, permettant un encellulement collectif lorsque les détenus ont été autorisés à travailler ou à suivre une formation professionnelle ou scolaire et que les nécessités d'organisation l'imposent. Il a conclu que, malgré ses efforts pour envisager d'autres formulations, il lui était apparu que la rédaction retenue par la commission présentait l'avantage de conserver le principe fondamental de l'encellulement individuel tout en ménageant la souplesse nécessaire.

M. François Zocchetto a indiqué qu'il partageait l'analyse du rapporteur et qu'il doutait que la notion de libre choix puisse avoir un sens en détention compte tenu, d'une part, de l'état psychologique de la personne au début de son incarcération et, d'autre part, du rapport de force qui prévaut entre l'administration pénitentiaire et la personne détenue. Il a souligné que l'encellulement individuel était une question de principe qu'il convenait de maintenir et d'affirmer dans notre droit.

M. Alain Anziani s'est étonné et inquiété de l'obstination du Gouvernement à remettre en cause les dispositions actuelles du code de procédure pénale confirmées par le texte de la commission. Il a noté que la rédaction proposée par le Gouvernement ne pourrait être reprise que sur le point de la référence à la dignité des personnes détenues.

M. Patrice Gélard a craint que le Gouvernement ne soit pas en mesure de respecter les dispositions relatives à l'encellulement individuel telles que proposées par la commission et que, en conséquence, la France ne soit condamnée par la Cour européenne des Droits de l'Homme.

M. Pierre Fauchon a souligné que le débat sur l'encellulement avait une forte portée symbolique. Il a souhaité en rester au principe fondamental affirmé dans la législation depuis plus d'un siècle. Toute remise en cause des dispositions actuelles serait mal comprise et interprétée comme une renonciation au principe de l'encellulement individuel.

M. Hugues Portelli a marqué sa préférence pour le texte de la commission afin que l'objectif de l'encellulement individuel, ainsi maintenu dans le droit, puisse être applicable.

M. Jacques Mézard a estimé que la remise en cause du droit à l'encellulement individuel altérerait les aspects positifs du projet de loi pénitentiaire. Il a contesté qu'une liberté de choix puisse réellement s'exercer en détention. Il a ajouté que, si l'option du détenu pour l'encellulement individuel se traduisait par un transfert vers un établissement éloigné du lieu où il possède ses attaches familiales, le bénéfice attendu de la disposition proposée par le Gouvernement serait largement illusoire.

M. Elie Brun a indiqué qu'il soutiendrait l'amendement du Gouvernement qui lui paraissait constituer un dispositif pragmatique.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a observé que l'encellulement individuel, affirmé dans le droit français depuis 1875, n'avait jamais été appliqué en pratique. Il a estimé que l'encellulement collectif pouvait être admis dès lors que la cellule était adaptée en conséquence. Il a constaté, à cet égard, que l'amendement du Gouvernement prévoyait que les conditions de cette adaptation seraient définies par décret. Selon lui, le législateur ne pouvait néanmoins se satisfaire de prendre acte de la situation très préoccupante des maisons d'arrêt confrontées à la surpopulation pénale. Il a jugé, de ce point de vue, que le texte proposé par la commission qui maintenait le principe de l'encellulement individuel tout en permettant certaines dérogations apparaissait plus satisfaisant que l'amendement du Gouvernement. Il a ajouté que la remise en cause du principe de l'encellulement individuel constituerait un signal négatif alors même que l'effort considérable engagé pour développer le parc pénitentiaire ainsi que le renforcement des mesures d'aménagement de peine permettaient de penser que l'objectif fixé par l'article 716 du code de procédure pénale n'était plus hors d'atteinte.

M. Laurent Béteille a estimé que l'amendement du Gouvernement serait acceptable s'il était précisé qu'une cellule collective ne peut accueillir plus de deux personnes.

M. François Pillet a estimé que les objectifs visés par la rédaction de la commission et par celle de l'amendement du Gouvernement n'étaient pas si éloignés mais que, néanmoins, la version adoptée par la commission, plus claire et plus protectrice du droit des personnes détenues, était préférable. Il a noté que les détenus devraient être informés des conditions dans lesquelles ils pourraient être placés dans une cellule collective, en soulignant que cette information, comme l'avait prévu la commission à l'article 10 bis du projet de loi, serait donnée dès l'accueil de la personne détenue.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a indiqué à l'attention de M. Patrice Gélard qu'il serait sans doute plus difficile pour le Gouvernement, à l'échéance du moratoire de cinq ans sur l'encellulement individuel prévu par l'article 59 du projet de loi, d'appliquer les dispositions résultant de l'amendement proposé que celles adoptées par la commission. Il a rappelé que, dans le cadre des états généraux sur la condition pénitentiaire organisés en 2006, plus de 70 % des détenus interrogés avaient manifesté leur préférence pour une cellule individuelle. Il a observé à cet égard qu'il était utile, comme le prévoyait la commission, de conserver la dérogation tenant aux nécessités d'organisation pour les détenus autorisés à travailler. Il a ajouté qu'il ne pouvait pas se rallier à la proposition de M. Laurent Béteille qui, d'une part, ne prenait pas en compte la réalité des cellules collectives de nombreux établissements pénitentiaires et, d'autre part, entérinait la remise en cause de l'objectif de l'encellulement individuel.

La commission a alors donné un avis défavorable à cet amendement ainsi que, en conséquence, aux amendements n° 292 à l'article 52 (principe de l'encellulement individuel pour les condamnés) et n° 293 à l'article 59 (moratoire de cinq ans pour l'application des dispositions relatives à l'encellulement individuel des détenus).

La commission a ensuite débattu de l'amendement n° 291 présenté par le Gouvernement, à l'article 51 (différenciation des régimes de détention), afin de supprimer l'obligation de motivation spéciale prévue par la commission en cas de placement sous un régime de détention plus sévère et de prévoir, en contrepartie, qu'un tel placement ne saurait porter atteinte aux droits des détenus visés par l'article 10 du projet de loi pénitentiaire.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a constaté que cette proposition ne correspondait pas aux précisions apportées par la garde des sceaux, ministre de la justice, lors de son audition et qu'il n'y était donc pas favorable. Il a suggéré en revanche à la commission d'adopter un amendement plus conforme aux propos tenus par Mme Rachida Dati, spécifiant que la différenciation des conditions de détention ne pouvait concerner que la liberté de circulation à l'exclusion de toute autre restriction.

M. Alain Anziani a jugé excellente la suggestion du rapporteur. Il a cependant rappelé qu'un régime de détention différencié, contrairement aux explications apportées par la ministre, portait sur d'autres aspects que le seul système d'un régime de portes ouvertes ou fermées pour les détenus. Il a souhaité par ailleurs que soit maintenue l'exigence d'une motivation spéciale pour le placement sous un tel régime.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a observé que tel qu'il était défini par l'amendement qu'il soumettait à la commission, le régime différencié apparaissait strictement encadré et que l'obligation d'une motivation spéciale était dès lors moins nécessaire.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a observé que compte tenu du nombre de décisions prises par l'administration pénitentiaire en cette matière, l'obligation de motiver spécialement chacune d'entre elles pourrait s'avérer excessivement lourde.

M. Pierre-Yves Collombat a souhaité que la notion de dangerosité prévue par l'amendement du rapporteur soit précisée afin de viser spécifiquement la dangerosité en détention. M. Jean-René Lecerf, rapporteur, lui a indiqué que tel serait bien le cas en pratique.

La commission a adopté l'amendement proposé par le rapporteur et donné un avis défavorable à l'amendement n° 291 du Gouvernement.