Travaux de la commission des affaires économiques



Mardi 23 novembre 2004

- Présidence de M. Jean-Paul Emorine, président. -

PJLF pour 2005 - Audition de M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales et de M. Nicolas Forissier, Secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales

La commission a, tout d'abord, procédé à l'audition de M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, sur le projet de loi de finances pour 2005.

Après que M. Jean-Paul Emorine, président, lui eut souhaité la bienvenue et l'eut remercié de sa présence, M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, a voulu replacer le projet de budget de son ministère pour 2005 dans le contexte international, s'agissant plus particulièrement des négociations menées au sein de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Il a rappelé que le cycle du développement avait été lancé à Doha en novembre 2001 et s'était poursuivi par l'échec de la conférence de Cancùn en septembre 2003, n'empêchant finalement pas la conclusion d'un accord intermédiaire à Genève le 1er août de cette année, qui devrait être suivi en décembre 2005 à Hong-Kong de la sixième conférence ministérielle de l'OMC. Jugeant favorablement l'accord de Genève, il a indiqué qu'il permettait à la fois de légitimer la dernière réforme de la politique agricole commune (PAC), de poser le principe d'un parallélisme des règles entre l'Union européenne et les Etats-Unis dans l'élimination des subventions à l'exportation et d'autoriser le maintien d'une liste de produits dits « sensibles ». Indiquant que deux sujets seraient prioritaires d'ici la fin de l'année prochaine, il a fait référence au rythme d'élimination des subventions à l'exportation à l'horizon 2015-2017, ainsi qu'à la détermination de la liste des produits « sensibles ».

Evoquant ensuite le contexte européen, il a rappelé l'importance des sources de financement communautaires, qui représentent aujourd'hui les deux tiers du montant total des crédits destinés à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Rappelant que le financement européen du premier pilier de la PAC avait été stabilisé en octobre 2002 pour une période d'une dizaine d'années courant jusqu'à 2013, il a indiqué que le plan de développement rural national (PDRN) serait redéfini à l'horizon 2007, ce qui donnerait lieu à une renégociation des enveloppes budgétaires. Jugeant satisfaisantes les propositions faites par la Commission à ce sujet, il s'est par ailleurs félicité de ce que la France, après avoir été condamnée pour non-consommation des crédits, était à présent en mesure de les utiliser entièrement.

Rappelant qu'aucun outil de gestion des crises conjoncturelles n'était disponible au niveau européen, malgré les réformes de la PAC de 1992, 1999 et 2003, ce qui ne permettait pas de venir en aide à des secteurs tels que le porc, la volaille ou les fruits et les légumes, il a précisé que la dernière révision de la PAC comportait une annexe enjoignant à la Commission européenne de faire des propositions à ce sujet d'ici le mois de décembre prochain et que la France avait transmis à Bruxelles un mémorandum.

En ce qui concerne la réforme de l'organisation commune de marché (OCM) « sucre », il a annoncé qu'elle serait sans doute retardée. Rappelant que l'actuelle OCM prendrait fin le 30 juin 2006, il a estimé que les négociations au sujet de la suivante ne débuteraient pas avant la fin du premier semestre 2005, dans l'attente des résultats du panel formé contre l'Union européenne à l'OMC. Il a par ailleurs fait état des objectifs de la France en la matière, citant le maintien de sa compétitivité, la prise en compte de la spécificité des départements d'Outre-Mer et le traitement différencié de la zone Afrique-Caraïbes-Pacifique (ACP).

S'agissant du dossier de la banane, il a rappelé que le système de quotas serait remplacé au niveau communautaire par un système uniquement tarifaire au 1er janvier 2006, ajoutant que la France devrait veiller à ce que soit maintenu un niveau de protection suffisant.

S'intéressant ensuite plus spécialement aux crédits de son ministère, il a d'abord rappelé que le budget global de l'agriculture était constitué de fonds nationaux -Etat et collectivités territoriales- et de fonds communautaires. Soulignant que la France, qui avait versé en 2003 15,1 milliards d'euros au budget communautaire et avait reçu en retour 13,1 milliards d'euros, était structurellement contributrice, il a précisé qu'elle bénéficiait environ du quart du budget agricole de l'Union européenne. Indiquant que ce dernier représentait environ la moitié du budget communautaire, il a estimé que cela n'avait rien d'excessif s'il était rapporté à l'ensemble des dépenses et recettes consolidées des Etats membres, puisqu'il représentait alors environ 1,5 % de ce total.

Indiquant que le budget public de l'agriculture français s'élevait pour 2005 à 29,7 milliards d'euros, il en a détaillé les diverses composantes que sont le budget communautaire (10,5 milliards d'euros), la protection sociale agricole (12,5), le budget du ministère (4,88 dont 3,6 destinés à l'agriculture, la pêche, les affaires rurales, l'alimentation et la sécurité sanitaire, et 1,2 destiné à l'enseignement et la recherche agricoles), les autres ministères (0,6) et les collectivités territoriales (0,9).

Précisant qu'il résultait des chiffres précédents que le financement du budget public de l'agriculture français était financé à 42,5 % par la protection sociale agricole, à 35,8 % par des fonds communautaires et à 21,7 % par des fonds nationaux, il en a détaillé l'utilisation hors protection sociale, distinguant les interventions et aides publiques (82,3 %), l'enseignement et la recherche (9,2 %) et l'administration du ministère et de son personnel (8,6 %).

Considérant qu'il disposait d'un budget stable du fait des reports de crédits prévus, il en a développé les quatre mesures prioritaires :

- s'agissant du lancement de l'assurance récolte, il a rappelé qu'il intervenait après la parution de deux rapports - l'un de Christian Babusiaux, l'autre de Christian Ménard - et la mise en oeuvre d'une expérimentation par Groupama. Indiquant que l'enveloppe de 10 millions d'euros prévue dans le projet de loi de finances initiale permettrait d'amorcer le dispositif, il a précisé qu'elle serait complétée au besoin par des versements supplémentaires en loi de finances rectificative, après accord avec les organismes bancaires, les sociétés d'assurance et les organisations agricoles. Il a considéré qu'était légitime l'interrogation des différents acteurs sur l'opportunité d'une révision de la loi du 10 juillet 1964 instaurant un régime de garantie contre les calamités agricoles, ajoutant que le dispositif avait fonctionné de façon satisfaisante suite au gel et à la sécheresse de l'année 2003. Après avoir précisé que le nouveau dispositif envisagé ne concernerait que les cultures de vente, et non les cultures fourragères, pour lesquelles la loi de 1964 continuerait de s'appliquer tant qu'un produit assurantiel n'aurait pas été mis au point, il a indiqué que sa mise en oeuvre serait progressive entre 2005 et 2010, que l'objectif était d'atteindre à terme un taux de 70 % d'assurés chez les exploitants agricoles, que l'Etat s'engageait à financer le dispositif à hauteur de 130 millions d'euros par an jusqu'à 2010, qu'il s'accompagnerait d'une franchise de 25 % et qu'il avait pour but de couvrir l'intégralité des dommages agricoles là où le régime issu de la loi de 1964 n'en couvrait qu'un tiers. Rapportant que le ministère en charge de l'économie s'était engagé à réexaminer en 2007 les conditions de réassurance, il a indiqué n'avoir reçu pour l'instant que deux propositions de la part des organismes bancaires et assurantiels, l'une de Groupama à caractère mutualiste et orientée vers la polyculture, l'autre du Crédit agricole orientée vers des productions plus spécialisées ;

- en ce qui concerne la création d'un fonds unique « bâtiments d'élevage », dont il a souligné qu'il permettrait d'améliorer les conditions de travail et de vie des agriculteurs, il a précisé que les crédits destinés à ces dossiers passaient de 30-35 millions d'euros par an jusqu'à présent à 80 millions d'euros par an dans le projet de loi de finances pour 2005 -y compris les fonds européens- et à 120 millions d'euros par an à partir de 2007, avant d'ajouter que l'instauration au sein des DDA de guichets uniques ne remettait pas en cause la gestion technique des dossiers par l'OFIVAL ;

- pour ce qui est de l'engagement d'une politique volontariste dans le domaine phytosanitaire, il a mentionné l'augmentation importante des crédits et la création à venir d'une agence de sécurité sanitaire des végétaux ;

- s'agissant du renforcement de l'enseignement supérieur et de la recherche agricoles, il a laissé le soin à M. Nicolas Forissier d'en détailler les mesures ultérieurement.

Puis il a fait référence aux quatre missions - « agriculture, pêche et affaires rurales », « sécurité sanitaire », « enseignement scolaire » et « recherche et enseignement supérieur » - ainsi qu'aux sept programmes - « gestion durable de l'agriculture, de la pêche et du développement rural », « valorisation des produits, orientation et régulation des marchés », « forêt », « soutien des politiques de l'agriculture », « enseignement technique agricole », « enseignement supérieur et recherche agricoles » et « sécurité et qualité sanitaire de l'alimentation » - concernant son ministère dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF).

Après avoir précisé que pour 2005, le versement compensateur de l'ONF étant rétabli à son niveau d'origine, ce sujet n'aurait donc pas à être traité en loi de finances rectificative, il a souhaité développer plus longuement la partie « sociale » de son budget. Rappelant que le budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA) n'existait plus désormais, il a souligné qu'il constituait en réalité un faux budget annexe, dans la mesure où l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances réservait un tel instrument aux seules opérations industrielles et commerciales, auxquelles ne pouvaient être assimilées des dépenses de protection sociale. Convenant toutefois que l'objectif recherché était à l'époque l'individualisation de la protection sociale agricole, il a constaté que la suppression du BAPSA s'expliquait par son incompatibilité avec la LOLF. Détaillant le nouveau dispositif lui succédant, il a indiqué que la Mutualité sociale agricole (MSA) était maintenue, tandis qu'était créé un établissement public - le Fonds de financement des prestations sociales agricoles (FFIPSA) - chargé de retracer les dépenses et recettes de la protection sociale agricole. Rappelant que la recette provenant d'un prélèvement sur la « TVA » avait été remplacée par une part de la taxe sur le tabac en 2004, il a indiqué que le déficit du régime social agricole, qui s'élevait à 600 millions d'euros en 2004, serait multiplié par deux en 2005, ajoutant qu'il convenait plutôt de faire référence à un « besoin de financement » qu'à un « déficit » du fait qu'il n'y avait pas d'augmentation brutale des dépenses d'assurance maladie. Soulignant qu'était attendue d'ici le 15 janvier 2005 la remise au Premier ministre d'un rapport élaboré par une mission interministérielle chargée d'étudier les possibilités d'un financement stable, s'agissant notamment de la partie « retraite » du régime, il a assuré que le service et le montant des prestations sociales agricoles seraient en tout état de cause maintenus.

En ce qui concerne les retraites, il a rappelé qu'un dispositif de retraite complémentaire agricole avait été mis en place il y a deux ans, que la mensualisation des pensions était désormais mise en oeuvre et qu'allaient être étudiées la revalorisation des petites retraites agricoles et la situation du conjoint survivant.

M. Jean-Paul Emorine, président, a insisté sur l'importance, dans la présentation du budget consacré à l'agriculture, des crédits provenant de l'Union européenne, avant de souhaiter la bienvenue à M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales, et de le féliciter pour sa prestation lors de l'examen en première lecture du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux.

Souhaitant revenir sur les crédits consacrés à l'enseignement supérieur, la recherche et l'enseignement technique agricoles, M. Nicolas Forissier a d'abord souligné leur importance en rappelant qu'ils s'élevaient globalement à 1,2 milliard d'euros et représentaient le quart du budget total du ministère. S'agissant du volet « enseignement supérieur et recherche agricoles », il a précisé que les crédits correspondants augmentaient globalement de 7 %, soit une hausse de 5,4 % pour l'enseignement supérieur et de 12 % pour la recherche, dont 30 % seraient affectés à la recherche appliquée. Soulignant que l'enseignement technique agricole - dont les crédits sont en hausse de 2,3 % - se trouvait renforcé, il a estimé plus généralement que les moyens dégagés permettraient d'accompagner le projet de réforme des 26 établissements d'enseignement agricole, de financer les 1.145 assistants d'éducation et maîtres d'internat/surveillants d'externat et de résoudre le contentieux opposant depuis plusieurs années l'Etat à l'enseignement agricole privé, avant d'ajouter que le projet de loi de finances rectificative ouvrirait 20 millions d'euros supplémentaires pour l'enseignement technique agricole et 5 millions d'euros supplémentaires pour la rénovation immobilière de l'enseignement supérieur agricole.

M. Gérard César, rapporteur pour avis des crédits consacrés à l'agriculture, a ensuite interrogé le ministre sur les moyens mis en oeuvre par le Gouvernement pour venir en aide au secteur des fruits et légumes et, plus particulièrement, sur les perspectives de réforme de l'OCM correspondante, ainsi que sur le rapprochement attendu entre l'Office national interprofessionnel des fruits, des légumes et de l'horticulture (ONIFLHOR) et l'Office national interprofessionnel des vins (ONIVINS). Se réjouissant de la mise en place d'un dispositif d'assurance récolte, il s'est enquis de son calendrier de mise en oeuvre. Après avoir également interrogé le ministre sur l'état de préparation du projet de loi de modernisation agricole, il l'a questionné sur l'existence d'objectifs ou d'indicateurs permettant, dans le cadre de la LOLF, d'évaluer la rapidité et l'efficacité des mesures règlementaires d'application des lois en matière agricole.

M. Alain Gérard, rapporteur pour avis des crédits consacrés à la pêche, a interrogé à son tour le ministre sur les mesures prises par le Gouvernement pour aider les pêcheurs à faire face à l'augmentation très importante du prix du carburant, s'agissant notamment de l'aménagement du régime fiscal des pêcheurs de haute mer. Il l'a également questionné sur les possibilités d'intervention publiques au-delà du 1er janvier 2007, date à laquelle seront interdites tant les aides à la construction qu'à la modernisation des navires, ainsi que sur les mesures prises en vue d'assurer la sécurité des pêcheurs après la survenance d'accidents ayant été largement couverts par les médias.

M. Bernard Dussaut, rapporteur pour avis des crédits destinés aux industries agroalimentaires, a interrogé le ministre sur la réaction du Gouvernement face à la perte progressive par la France de parts de marché dans le secteur agricole et alimentaire, eu égard notamment à la publication récente d'un rapport sénatorial stigmatisant les limites du système de promotion des produits agroalimentaires reposant sur la Société pour l'expansion des ventes de produits agricoles et alimentaires (SOPEXA). Il l'a également questionné sur le bilan du programme national nutrition santé (PNNS) et les priorités du ministère en ce domaine, ainsi que sur les implications concrètes du plan biocarburants pour les agriculteurs français.

M. Gérard Delfau, rapporteur pour avis des crédits destinés au développement rural, a interrogé le ministre sur le dispositif des contrats territoriaux d'exploitation (CTE) et des contrats d'agriculture durable (CAD), dont il a constaté que l'enveloppe financière était en baisse de 20 %. Il l'a aussi questionné sur les crédits consacrés à la forêt, dont il a souligné qu'ils faisaient l'objet d'un programme expérimental dans le cadre de la LOLF et diminuaient de 6 %.

En réponse aux questions des quatre rapporteurs pour avis, M. Hervé Gaymard a apporté les éléments de précision suivants :

- s'agissant de la crise du secteur des fruits et légumes, il a souligné qu'elle était de nature tant conjoncturelle que structurelle et que le ministère avait pris des mesures sous ce double aspect. Sur le plan conjoncturel, il a rappelé qu'avait été annoncée le 7 octobre l'ouverture d'une enveloppe de 10 millions d'euros en vue de financer des facilités de trésorerie, de 50 millions d'euros pour la conclusion de prêts de consolidation et d'un million d'euros pour l'étalement des cotisations à la MSA. Souhaitant que les premiers paiements aient lieu avant la fin de l'année, il a ajouté que les actions d'ordre plus structurel décidées par le Gouvernement consistaient en la mobilisation d'une enveloppe de 10 millions d'euros au profit de l'ONIFLHOR en vue de la modernisation des exploitations et de l'adaptation des filières, en la mise en place d'une mission interministérielle chargée d'étudier les distorsions de concurrence dans les domaines fiscal et social, et en un projet de mise au point d'un dispositif de gestion des crises sur lequel la Commission européenne devrait prochainement publier un rapport. S'agissant de la réforme de l'OCM, dont il a attribué à la complexité l'une des causes de l'actuelle crise du secteur, il a insisté sur la nécessité d'une clarification prochaine, ajoutant que la France avait déposé auprès de la Commission européenne en 2002 un mémorandum en ce sens qui n'avait pas fait l'objet de suites. Evoquant le rapprochement ONIFLHOR-ONIVINS, il a élargi le sujet à la réforme des offices, dont il a précisé qu'elle se traduirait notamment par leur regroupement sur un site commun et par la création d'une agence unique de paiement qui ne s'accompagneraient pas d'une fusion des conseils de direction ;

- concernant l'assurance récolte, il a indiqué que les propositions de l'Etat fixaient un cadre à partir duquel les banques et groupes d'assurance devraient faire des propositions, souhaitant qu'un accord entre les différents acteurs soit trouvé rapidement afin que le dispositif puisse entrer en application dès que possible ;

- s'agissant de la loi de modernisation agricole (LMA), il a rappelé que les forums régionaux qui se tenaient actuellement laisseraient place dès la fin de l'année à la phase d'élaboration du texte, puis à son arbitrage interministériel au printemps 2005 et à son examen parlementaire. A cet égard, il a souhaité que soit noué entre son ministère et la commission des affaires économiques et du plan un contact dès le mois de janvier 2005 afin de débattre des principales orientations du texte ;

- s'agissant de l'exécution des lois en matière agricole, il a indiqué que les indicateurs élaborés dans le cadre de la LOLF seraient orientés vers la mesure de l'efficacité des textes intervenant dans le domaine agricole, ajoutant qu'ils seraient complétés par la mise en place récente d'un contrôle de gestion ;

- en ce qui concerne le dispositif d'aide aux pêcheurs du fait de l'augmentation du prix du fuel, il a rappelé que le Gouvernement avait décidé le report du paiement des charges fiscales, la prise en charge des intérêts des annuités des emprunts conclus par les pêcheurs endettés et la création d'un fonds de prévention des aléas de la pêche, cette dernière mesure faisant l'objet d'une avance remboursable de l'Etat à hauteur de 15 millions d'euros et permettant aux pêcheurs adhérant au fonds d'acheter leur carburant sur les marchés à terme au prix de 27 centimes d'euro par litre. S'agissant plus particulièrement des pêcheurs en haute mer, il a précisé qu'ils bénéficieraient d'une exonération partielle de l'impôt sur le revenu s'élevant à 60 % pour les navires de pêche au large et à 40 % pour les autres types de navires ;

- sur la possibilité de maintenir des aides publiques aux pêcheurs après le 1er janvier 2007, il a indiqué qu'il s'agissait d'un sujet qu'il avait très récemment abordé au niveau européen et qui ferait l'objet de négociations, ajoutant qu'une divergence d'appréciation existait avec la Commission quant à la définition des aides éligibles ;

- concernant les accidents mettant en danger des pêcheurs, il a rappelé que le Gouvernement avait élaboré un plan destiné à renforcer leur sécurité en mer à travers des mesures telles que l'équipement des marins en tenues de sauvetage, l'équipement des petits navires en radeaux de survie et autres matériels de sauvetage, ou encore la formation et la sensibilisation des marins ;

- s'agissant des biocarburants, il a indiqué que le plan annoncé par le Premier ministre se traduirait par le triplement de la production nationale d'ici 2007, ce qui requerrait la construction d'au moins quatre nouvelles usines pour lesquelles des appels d'offre seraient lancés au premier semestre 2005 ;

- en ce qui concerne le PNNS, il a souligné que nombre d'actions diverses avaient été menées par l'Etat, telles que la publication de guides alimentaires, le lancement d'une campagne d'information sur l'intérêt nutritionnel des fruits et légumes ou encore la mise à disposition des professionnels de différents outils.

Reconnaissant que les exportations françaises dans le secteur de l'agroalimentaire étaient en recul depuis le début de l'année, M. Nicolas Forissier a souligné à cet égard la nécessité de mettre en oeuvre un programme de soutien de nos produits à l'international, rappelant que le Président de la République avait souhaité un doublement des crédits y étant consacrés. Insistant sur l'importance du secteur de la transformation pour l'agriculture et l'économie française, il a indiqué que les premières mesures du partenariat national pour le développement des industries agroalimentaires, annoncées au salon international de l'alimentation (SIAL), telles que la clarification du dispositif public d'appui à l'export, étaient presque entièrement mises en oeuvre. Expliquant qu'un volet de ce partenariat consacré à la « conquête des marchés extérieurs » intéressait directement la SOPEXA, il a indiqué que le Gouvernement partageait tant le constat dressé par le rapport sénatorial sur le sujet que les mesures préconisées, consistant à réviser le cahier des charges de la société et à clarifier ses sources de financement tout en maintenant son statut d'organisme public. Soulignant que l'effort budgétaire en faveur de la SOPEXA était reconduit pour 2005 à hauteur de 18 millions d'euros, il a indiqué qu'étaient en cours d'achèvement la redéfinition de son périmètre d'action par rapport à UBIFRANCE, ainsi que la réduction de la participation de l'Etat à une partie minimale de son capital.

Revenant sur l'évolution du dispositif CTE/CAD, M. Hervé Gaymard a observé que l'enveloppe budgétaire correspondante, s'élevant en 2001 à 60 millions d'euros, avait été portée successivement, après adoption de lois de finances rectificatives, à 200 millions d'euros en 2002, allant jusqu'à 300 millions d'euros en 2003 avec les reports, 235 millions d'euros en 2004 et 232 millions d'euros en 2005. Faisant remarquer que l'emballement de la dépense avait abouti à son quadruplement, il a indiqué que le Gouvernement précédent avait rehaussé l'enveloppe moyenne par agriculteur de 22 000 euros à 44 000 euros, ce qui s'avérait problématique en termes de financement du fait qu'en outre, le produit de la modulation de l'Union européenne était alors gelé, estimant par ailleurs que les modalités de répartition géographique adoptées ne privilégiaient pas les départements les plus défavorisés. Se prononçant en faveur de procédures contractuelles, il a considéré qu'il était normal toutefois que les premières années de mise en oeuvre du dispositif soient les plus coûteuses. A cet égard, faisant observer que certains de ses éléments ne seraient bientôt plus justifiés, il a fait référence aux CTE herbagers dont il a indiqué que le maintien ne serait plus indispensable du fait de l'augmentation de 70 % de la prime herbagère agro-environnementale. Prévoyant la conclusion d'une dizaine de milliers de CAD chaque année, il a souligné que ce dispositif n'était pour son ministère qu'un instrument parmi d'autres, contrairement au précédent Gouvernement dont il a jugé qu'il constituait quasiment le seul outil en matière d'action agro-environnemental.

Evoquant le secteur de la forêt, il a fait remarquer que les crédits prévus permettraient de tenir les engagements pris par le gouvernement de Lionel Jospin suite à la grande tempête de 1999. Notant qu'ils étaient à présent essentiellement utilisés pour des replantations, il en a déduit que des marges financières seraient dégagées en raison de la réduction de certaines actions, telles que le déblaiement des troncs d'arbres arrachés. S'agissant de l'ONF, il a précisé que les crédits lui étant destinés pour le versement compensateur étaient augmentés de 20 millions d'euros en loi de finances initiale et seraient abondés de 5 millions d'euros supplémentaires en loi de finances rectificative.

Après que M. Jean-Paul Emorine eut signifié au ministre qu'il avait pris note de son souhait d'une concertation avec la commission en vue de la préparation du projet de loi de modernisation agricole, M. Charles Revet a interrogé M. Hervé Gaymard sur deux points. Après avoir fait part des difficultés rencontrées par les agriculteurs de son département, tant sur un plan technique que financier, pour mettre aux normes leurs bâtiments d'élevage tout en limitant leur consommation d'eau dans des volumes raisonnables, il a souhaité savoir quel serait le calendrier de mise en oeuvre du plan prévu en ce domaine par le ministère. Constatant que les prairies permanentes étaient un moyen efficace de prévenir les conséquences d'inondations fréquentes dans son département, il a par ailleurs questionné le ministre sur la possibilité d'obtenir de l'Union européenne des aides à l'herbe équivalentes à celles prévues pour le maïs.

Après avoir félicité le ministre et le secrétaire d'Etat pour l'efficacité de leur action, M. Marcel Deneux a estimé qu'il fallait demeurer vigilant sur la suite des négociations au sein de l'OMC, que les chiffres relatifs aux dispositifs d'assurance récolte et de CTE/CAD devaient être relativisés et qu'il était nécessaire de renforcer le transfert de technologies dans le secteur de l'agroalimentaire. S'agissant des biocarburants, il a indiqué successivement que le secteur se trouvait confronté à des difficultés liées à la concurrence internationale, que le Gouvernement ne devrait pas utiliser le plan annoncé à des fins d'aménagement du territoire et que les efforts en matière d'exploitation de la biomasse devraient être accrus. Puis il a questionné le ministre sur l'existence d'un parallélisme de traitement entre les organismes génétiquement modifiés (OGM) alimentaires et non alimentaires, sur les rapprochements entre certains services des directions départementales de l'agriculture (DDA) et des directions départementales de l'équipement (DDE) et sur les aides fournies par les collectivités territoriales à l'agriculture.

M. Daniel Dubois s'est interrogé sur les conséquences du cofinancement national et européen des primes aux vaches allaitantes sur leur calendrier de paiement. Il a également questionné le ministre sur une éventuelle revalorisation des retraites agricoles, expliquant que le niveau de 75 % du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) qui avait été fixé prenait comme référence un SMIC non harmonisé.

S'associant aux félicitations adressées au ministre et au secrétaire d'Etat, M. Dominique Braye a fait part de ses inquiétudes quant aux crédits consacrés aux vétérinaires, observant qu'ils se situaient à un niveau insuffisant pour une profession effectuant des missions de service public à l'utilité et l'efficacité reconnues.

Se déclarant sceptique sur la possibilité de financer les quatre priorités fixées par le ministère au moyen de crédits en baisse globale de 1,8 %, M. Bernard Piras a interrogé le ministre sur le calendrier de mise en place du dispositif d'assurance agricole, sur le degré de sensibilisation des différents acteurs à son égard et sur le financement du Fonds national de garantie des calamités agricoles (FNGCA). Se disant favorable au programme de financement des bâtiments d'élevage -dont il a tenu à relativiser le montant des crédits- et à la mobilisation de crédits importants en matière de sécurité sanitaire et d'enseignement supérieur agricoles, il s'est en revanche déclaré inquiet s'agissant de l'enseignement secondaire et du secteur des fruits et légumes, demandant par ailleurs au ministre si un dispositif de retraite complémentaire serait élaboré comme prévu.

Insistant sur l'ampleur de la crise à laquelle se trouvait confronté le secteur viticole, M. René Beaumont s'est demandé dans quelle mesure permettrait d'y remédier l'augmentation des moyens de prospection sur les marchés extérieurs les plus dynamiques, ajoutant que les pays producteurs du Nouveau Monde subventionnaient largement leurs viticulteurs. Il a également évoqué le problème des farines animales, se demandant dans quelle mesure il serait possible de les utiliser plutôt que de les détruire systématiquement.

Répondant successivement aux divers intervenants, M. Hervé Gaymard a apporté les éléments de précision suivants :

- s'agissant de la distinction entre le programme de modernisation des bâtiments d'élevage et le second programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole (PMPOA), il a expliqué que leur financement relevait à présent du même chapitre budgétaire mais de deux circuits de paiement différents. Rappelant la situation antérieure, où l'Office national interprofessionnel des viandes, de l'élevage et de l'aviculture (OFIVAL) bénéficiait d'une enveloppe budgétaire de 20 millions d'euros, contre 18 millions d'euros pour les bâtiments d'élevage situés en zone de montagne, il a indiqué que l'ensemble de ces crédits se trouvait intégré dans le budget du ministère de l'agriculture, ce qui conduisait à la fois à une baisse apparente du budget de l'OFIVAL et à une augmentation globale des crédits, qui passaient de 55 à 80 millions d'euros du fait de l'abondement de 25 millions d'euros provenant de l'Union européenne. Déclarant que les crédits destinés au second PMPOA, de l'ordre de 70 millions d'euros dans le budget de l'Etat, pourraient être portés à 110 millions d'euros en moyens d'engagement, il a précisé à cet égard que le 31 décembre 2006 constituait pour les zones sensibles une date de fin d'engagement des opérations, et non de fin des opérations, reconnaissant toutefois que certains cas particuliers devraient être examinés ;

- en ce qui concerne la distinction entre les aides à l'herbe et celles au maïs, il a indiqué que l'Union européenne ne reconnaissait pas les premières comme les secondes, malgré les progrès réalisés à travers le « crédit carbone » prévu dans la dernière réforme de la PAC ;

- pour ce qui est du traitement des OGM alimentaires et non alimentaires, il a précisé qu'il était identique, ces deux types de produits étant examinés par la Commission du génie biomoléculaire ;

- s'agissant du rapprochement entre DDA et DDE, il a fait remarquer que les services extérieurs de son ministère étaient les moins concernés par les transferts de compétences dans le cadre de la décentralisation, sauf en ce qui concernait la gestion de certaines primes. Rappelant que le Premier ministre avait chargé les préfets de faire des propositions sur la modification des services départementaux, il a estimé que pourrait être évoquée dans ce cadre la création de pôles d'ingénierie publique regroupant certains des services des DDA et des DDE ;

- en ce qui concerne la coopération agricole, il a indiqué que le rapport instruit actuellement par François Guillaume -au sujet duquel il s'est dit désireux d'obtenir les commentaires des sénateurs- donnerait lieu à un travail interministériel susceptible d'aboutir éventuellement à l'intégration de dispositions au sein du projet de loi de modernisation agricole ;

- sur les aides des collectivités territoriales au secteur agricole, il a précisé qu'elles s'élevaient à près d'un milliard d'euros, tout en soulignant l'importance de ce montant ;

- s'agissant de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes (PMTVA), il a indiqué que les difficultés d'exécution budgétaire provenaient du fait que les campagnes avaient pour base des exercices budgétaires national et européen ne débutant pas aux mêmes dates, ce qui rendait nécessaire une programmation de la dépense sur deux exercices budgétaires nationaux. Il s'est félicité de la plus grande rapidité constatée dans le dépôt des dossiers cette année, l'attribuant au fait que ces derniers étaient désormais prérenseignés ;

- s'agissant des relations entre retraites agricoles et SMIC, il a reconnu qu'aucun crédit n'était prévu pour porter le niveau des pensions à 75 % du SMIC reconstitué, ajoutant que les pensionnés mensualisés en 2004 ne paieraient bien leur impôt sur le revenu que sur la base de douze mois ;

- en ce qui concerne le système de sécurité sanitaire, dont il a souligné l'importance, il a indiqué que sa gestion en autorisations de programme et crédits de paiement permettrait de résoudre certains problèmes, que la mise en place de ce nouveau système de gestion permettrait une immédiateté des règlements et que les crédits de fonctionnement seraient reconduits ;

- s'agissant de l'évolution globale du budget du ministère, il a estimé qu'il se trouvait reconduit compte tenu des reports de crédits prévus et qu'il permettait de financer de nombreuses actions. Souhaitant ne pas rentrer dans une polémique sur l'évolution de chiffres dont il a considéré que la présentation était toujours susceptible d'être remise en cause, il a jugé que l'augmentation importante des crédits du ministère en charge de l'agriculture sous le gouvernement de Lionel Jospin tenait essentiellement aux besoins de financement résultant du traitement de l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB). Observant que ces derniers n'étaient plus aussi élevés à présent, il a indiqué que cela ouvrait des marges de manoeuvre financières ;

- en ce qui concerne le dispositif de financement des calamités agricoles, il a rappelé qu'aucun crédit n'était jamais prévu en loi de finances initiale pour faire face à d'éventuels besoins de ce type, ajoutant qu'ils se trouvaient couverts, le cas échéant, par des ouvertures de crédits en loi de finances rectificative ou en décrets d'avance, comme cela s'était produit l'année passée du fait de la canicule et de la sécheresse. Rappelant que les propositions des pouvoirs publics en matière d'assurance agricole attendaient une réaction de la part des différents acteurs, il a estimé que la gestion de ce dossier requerrait une grande prudence ;

- s'agissant des problèmes liés à la sharka, il a indiqué que le rapport de M. Dominique Derrien était attendu d'ici la fin de l'année ;

- pour ce qui est des farines animales, il a indiqué que leur flux était désormais éliminé intégralement au fur et à mesure de sa production. Quant au stock, il a annoncé que son élimination totale serait réalisée à l'horizon 2007. M. Daniel Reiner ayant souhaité savoir si ces éléments impliquaient la mise en place de nouveaux sites de stockage et de traitement des farines, M. Hervé Gaymard a répondu par la négative ;

- concernant l'effort de recherche des industries agroalimentaires, M. Nicolas Forissier a regretté son niveau trop faible, puisque celui-ci était de 1,6 % du chiffre d'affaires contre 6 % en moyenne dans l'industrie française. Il a indiqué que les services du ministère travaillaient en collaboration avec l'Agence nationale de valorisation de la recherche (ANVAR) sur cet aspect. Il a estimé enfin que l'enseignement agricole devait avoir sa part dans l'incitation à la recherche ;

- s'agissant de la situation de l'enseignement secondaire agricole, il a estimé qu'elle n'était pas alarmante et rappelé que le seuil de fermeture des classes se situait à huit élèves, soit un niveau supérieur à celui ayant cours dans l'enseignement secondaire général. Mettant en avant l'augmentation de 2,4 % de leurs crédits, il en a conclu que les établissements secondaires agricoles étaient traités avec équité ;

- concernant la promotion des produits agricoles et notamment celle du vin, il a rappelé les efforts de clarification de l'offre des vins français - élément souligné lors de la table ronde de l'été 2004 - et l'engagement de M. Hervé Gaymard d'augmenter de 50 % en deux ans les crédits de promotion du vin français à l'international.

M. Gérard Le Cam a regretté la disparition du débat budgétaire sur les prestations sociales agricoles, dans le cadre de la mise en oeuvre de la LOLF. Il a souligné les difficultés résultant de la démographie agricole. Il a souhaité que le niveau des retraites complémentaires versées au conjoint, qui n'avait pas évolué sous l'actuel Gouvernement, soit rehaussé. Il a enfin suggéré que la bonification par enfant des pensions soit établie sur une base forfaitaire. En réponse, M. Hervé Gaymard a indiqué qu'il serait très favorable à ce que le Parlement prît l'initiative d'un débat sur les prestations sociales agricoles. Quant à la question de fond de la pérennité des financements de la protection sociale agricole, il a jugé que les difficultés se posaient dans le cadre plus général de la protection sociale de l'ensemble des Français. Il a en effet estimé que les problèmes spécifiques à la protection sociale agricole retenaient l'attention du fait de la visibilité des instruments qu'étaient le BAPSA ou, aujourd'hui, le FFIPSA. Il a souligné que les dépenses maladie du régime social agricole ne connaissaient pas de dérives, à la différence de ce qui s'observait pour le régime général de sécurité sociale. Quant au régime de retraite agricole, il était inévitable qu'il soit déficitaire du fait même de la démographie agricole. Abordant la question de la revalorisation des petites retraites agricoles, il a rappelé que celles-ci avaient progressé de 93 % en dix ans, tout en concédant que cet effort de la nation devait encore être poursuivi.

Insistant sur l'importance de l'installation de jeunes agriculteurs, M. Gérard Bailly a fait part de l'inquiétude des organisations agricoles quant aux stages de six mois. Il a ensuite fait valoir que le coût des services de remplacement était trop élevé pour les éleveurs. Il a également souhaité obtenir des précisions sur les conditions de la modulation des aides prévues dans le cadre de la PAC. Enfin, il s'est inquiété de la progression des scolytes et de leur impact sur les revenus de communes forestières. En réponse, M. Hervé Gaymard a précisé que les crédits nécessaires aux stages de six mois étaient bien en place. Sur la question de l'accès aux services de remplacement, il a estimé qu'il s'agissait d'une question très importante et fait part de son souhait que l'examen du projet de loi de modernisation agricole soit l'occasion, pour le Sénat, de proposer des innovations quant aux conditions de vie et de travail des agriculteurs. Concernant les conditions de la modulation, il a indiqué que celle-ci monterait en puissance en passant progressivement de 3 à 5 %. Après avoir précisé que la répartition de ce produit n'était pas encore déterminée, il a rappelé que les accords de Luxembourg ne faisaient que limiter à un point les crédits pouvant être affectés à la gestion des crises. Quant aux scolytes, il a reconnu la gravité du problème et estimé que l'on assistait à une recrudescence des attaques virales et parasitaires aboutissant à des dommages agricoles graves. Il s'est interrogé sur les modalités que pourrait prendre un mécanisme assuranciel de protection de ces risques.

M. Jean Boyer, après s'être félicité de la mise en place de la mensualisation, a souhaité savoir sur quelle durée le lissage de l'impact fiscal du changement de mode de calcul s'effectuerait. Il a également souhaité connaître la date d'entrée en vigueur des nouvelles mesures visant les bâtiments d'élevage. Sur le premier point, M. Hervé Gaymard a fait valoir que l'article 6 du projet de loi de finances pour 2005 assurait la neutralité de la mensualisation. Sur le second, il a précisé que dès le 1er janvier 2005, les directions départementales de l'agriculture (DDA) seraient le guichet unique du nouveau plan bâtiment.

M. Claude Biwer a regretté que les agriculteurs ne bénéficient pas d'une progression de leurs revenus garantis, sur le modèle du SMIC. Il a également déploré l'insuffisante coordination entre les DDA et les DDE, et souhaité qu'une coopération efficace soit définie au niveau national entre ces services déconcentrés. Concernant la coopération entre les DDA et les DDE, M. Hervé Gaymard a rappelé que celle-ci incombait aux préfets. Plus généralement il a appelé de ses voeux un changement de la culture administrative où l'identification des besoins des agriculteurs conditionnerait l'organisation des services chargés d'y répondre.

M. Pierre-Yvon Trémel a fait part de la forte tension liée à l'évolution du marché des légumes en Bretagne. Il a souhaité obtenir des précisions sur les prochaines échéances dans ce dossier, en particulier concernant les résultats de la mission interministérielle sur les distorsions de main-d'oeuvre que M. Hervé Gaymard avait appelée de ses voeux. Quant au système de gestion et d'anticipation des crises que M. Hervé Gaymard avait mis en place, il a vivement regretté son rejet par la Commission européenne et souhaité savoir quelles évolutions connaîtrait ce dossier. M. Hervé Gaymard a indiqué tout d'abord que les mesures générales concernant le marché des légumes seraient prêtes dès janvier 2005, ce qui garantirait le paiement des crédits dès la fin de l'instruction des dossiers. Il a fait part de son intention de mener un véritable travail structurel en collaboration avec les producteurs de choux-fleurs bretons. Aussi bien -a-t-il ajouté- les réflexions s'étaient-elles orientées, d'une part, vers la stabilisation des surfaces plantées et, d'autre part, vers la mise en place d'un système d'ajustement sur les quantités congelées à destination des industries agroalimentaires. Il a vivement déploré que la Commission européenne soit revenue sur l'accord qu'elle avait donné dans un premier temps. Quant aux distorsions de main-d'oeuvre, il a fait part de sa détermination à obtenir des éléments clairs d'appréciation sur ce dossier, en particulier dans le cas de la main-d'oeuvre polonaise travaillant en Allemagne.

M. Dominique Mortemousque a estimé que l'information des agriculteurs sur la réforme de la PAC était insuffisante et qu'il convenait que les DDA améliorent sensiblement leur action sur ce point. M. Hervé Gaymard a jugé, en réponse, que sa volonté de mener la réforme de la PAC dans la transparence avait comme conséquence logique une diffusion progressive des informations, au fur et à mesure de l'avancement du dossier. Il a annoncé que tous les agriculteurs recevraient avant le 15 décembre un document clair présentant les éléments d'information concernant la question des bonnes pratiques environnementales. Quant à la question des aides, elle ferait -a-t-il précisé- l'objet de toute l'information nécessaire au cours de l'année 2005.

Contrôle de l'application des lois relevant du ministère de l'agriculture - Audition de M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales

M. Jean-Paul Émorine, président, a souhaité connaître les conditions de financement des préretraites agricoles et le niveau d'avancement de la publication des textes d'application des lois agricoles suivies par la commission. Il a demandé si M. Hervé Gaymard envisagerait, comme l'avait fait son collègue M. Gilles de Robien, d'informer la commission au fur et à mesure de l'avancement des projets de décrets. En réponse à sa première question, M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales a indiqué que tous les dossiers de préretraites agricoles seraient payés. Quant à l'application des lois, il a déclaré qu'il communiquerait à la commission un document exhaustif sur cette question. Il a fait valoir que les retards de publication des textes d'application naissaient, d'une part, de la nécessité fréquente de consulter les institutions européennes avant leur publication et, d'autre part, dans certains cas, d'une rédaction insuffisamment précise des textes législatifs, ce qui imposait de nouvelles consultations avant leur entrée en vigueur. Il a souligné que, dans le cas du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, il avait fait procéder à l'élaboration des textes réglementaires simultanément au processus législatif, ce qui devrait permettre la transmission au Conseil d'Etat de projets de décrets dans le mois qui suivrait la promulgation de la loi. Il a conclu en acceptant la demande qui lui était faite d'informer la commission en amont de la publication des textes réglementaires.

PJLF pour 2005 - Aviation civile et transport aérien - Examen du rapport pour avis

La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Jean-François Le Grand sur les crédits consacrés à l'aviation civile et au transport aérien dans le projet de loi de finances pour 2005.

M. Yannick Texier a présenté ce rapport en remplacement de M. Jean-François Le Grand, empêché. Il a observé qu'après une année 2003 médiocre, 2004 aurait dû être l'année du redressement du transport aérien. Si le premier semestre avait pu confirmer ces anticipations, puisqu'il avait marqué un véritable rattrapage du trafic passager, le renchérissement du coût du pétrole avait ensuite eu un effet très négatif sur le secteur, et le bilan du second semestre serait vraisemblablement nettement moins bon que celui du premier.

Citant l'exemple des compagnies américaines, qui avaient perdu 23 milliards de dollars en trois ans, il a indiqué que l'objectif d'un retour de ces compagnies à l'équilibre en 2004 paraissait aujourd'hui hors d'atteinte. Il a souligné le contraste qu'offrait la situation d'Air France-KLM, dont le chiffre d'affaires pour le premier semestre 2004 avait progressé de plus de 9 %, à 9,59 milliards d'euros. Il en a conclu qu'on ne pouvait que se féliciter que le Gouvernement et le Parlement aient donné à l'entreprise les moyens de son développement.

Il a observé que le budget annexe de l'aviation civile (BAAC) était en progression de 2,9 %. Il était en effet assis sur une prévision de progression modérée, mais réelle, du trafic en 2005, ce qui constituait une approche prudente, ce dont il s'est félicité.

Il a indiqué que le projet de loi de finances prévoyait que les crédits du Fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien (FIATA), qui constituaient jusqu'à maintenant un compte d'affectation spéciale, seraient intégrés dans le budget général de l'Etat. Le Gouvernement considérait en effet d'une part que la mission d'aménagement du territoire devait peser sur l'ensemble de la collectivité nationale, et non sur les seuls usagers du transport aérien ; et d'autre part que le financement par la taxe d'aviation civile (TAC) du FIATA était source d'effets procycliques.

Abordant les crédits de la construction aéronautique, il a noté que ceux-ci étaient en baisse de 7,5 %, à 272 millions d'euros, cette baisse s'expliquant en partie par la fin des programmes d'avances remboursables dans le domaine des moteurs et des avions d'affaires.

Il a ensuite abordé le volet thématique du rapport, consacré cette année à la formation des pilotes de ligne. Il a jugé que ce dossier soulevait deux questions : le coût de la formation et l'adéquation de l'offre de travail à la demande du marché du transport aérien. Il a indiqué que ce coût pouvait s'estimer, en France, à 150.000 euros en moyenne. Relevant que certains élèves faisaient le choix de suivre une formation à l'étranger, en particulier aux Etats-Unis, où la formation reposait plus sur l'expérience pratique du pilotage, il a souligné que, si cette option pouvait constituer une solution du point de vue financier, elle n'apportait pas de réponse au problème des débouchés.

Quant à l'effectif des pilotes, il diminuait en France depuis 2001, où il avait culminé à 7.200 personnes. En 2003, ce chiffre était revenu à 7.030 pilotes professionnels, dont 52 % étaient titulaires d'une licence de pilote de ligne. Il a regretté que les comparaisons internationales globales fussent très difficiles, mais a indiqué qu'on recensait, pour la même année 2003, 121.000 pilotes commerciaux pour les seuls Etats-Unis.

Il a souligné le fait que, malgré cette diminution du nombre de pilotes de ligne, la disparition de compagnies européennes et l'évolution du secteur faisaient que le nombre de pilotes en recherche d'emploi croissait en France. En 2003, l'ANPE en recensait 1.430. Les deux tiers d'entre eux ayant moins de 50 ans, il ne s'agissait donc pas seulement de pilotes qualifiés sur des machines anciennes qui n'auraient pas la possibilité de voler dans des compagnies aux flottes modernes, mais d'un réel déséquilibre du marché du travail.

Il a émis le souhait que l'information destinée aux étudiants attirés par cette voie leur permette de prendre pleinement conscience de cette difficulté. De ce point de vue, la réduction du nombre d'élèves-pilotes formés par l'Ecole nationale de l'aviation civile (ENAC) de 51 en 2001 à 45 depuis 2002 pouvait constituer un signe avant-coureur de tensions sur ce secteur.

Puis la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de l'aviation civile et du transport aérien, le groupe socialiste s'abstenant et le groupe communiste républicain et citoyen votant contre.

Mercredi 24 novembre 2004

- Présidence de M. Jean-Paul Emorine, président. -

PJLF pour 2005 - Recherche - Examen du rapport pour avis

La commission a tout d'abord examiné le rapport pour avis de M. Henri Revol sur les crédits consacrés à la recherche dans le projet de loi de finances pour 2005.

M. Henri Revol, rapporteur pour avis, a commencé par rappeler que l'année 2004 avait été marquée par une prise de conscience nouvelle à l'occasion du mouvement des chercheurs du mois de mars et que l'année 2005 s'annonçait comme une année de construction législative et de relance budgétaire.

S'agissant de l'activité législative, il a précisé que la loi d'orientation et de programmation devrait être présentée au Parlement au premier semestre 2005. Il a souhaité que ce texte soit effectivement l'occasion d'un débat stratégique sur les objectifs, les moyens et l'organisation de la recherche française à l'horizon de cinq ou dix ans.

Il a estimé que la commission devrait jouer un rôle majeur dans ce débat, comme le voeu en a déjà été exprimé, entre autres, par M. Daniel Raoul.

S'agissant de la relance budgétaire, M. Henri Revol, rapporteur pour avis, a souligné que le Gouvernement avait d'ores et déjà fait de la recherche une priorité budgétaire absolue, non seulement pour 2005 avec un milliard d'euros supplémentaire, mais aussi pour 2006 avec un effet similaire et pour 2007 avec un troisième milliard supplémentaire.

Il a rappelé que cet accroissement cumulatif de l'effort de recherche à hauteur d'un milliard d'euros par an était à la fois sans précédent et indispensable pour atteindre l'objectif des 3 % du PIB consacrés à la recherche et développement en 2010, fixé au Conseil européen de Barcelone.

Il a ensuite indiqué que le milliard d'euros supplémentaire prévu pour 2005 se décomposait en trois parts, qu'il a présentées successivement.

Il a tout d'abord décrit la première part, qui consiste en une augmentation des crédits du budget civil de recherche et développement d'un montant de 356 millions (ce qui le porte à 9,285 milliards d'euros) et a souligné qu'il s'agissait de la plus forte hausse en volume depuis dix ans. Il a précisé que 97 % de l'augmentation bénéficiaient directement aux EPST, aux EPIC et à la recherche universitaire, tant au profit des personnels (par la pérennisation de 550 emplois statutaires, la création de 200 postes d'accueil internationaux de haut niveau ainsi qu'un très gros effort en faveur de la formation à la recherche et par la recherche) que des moyens des laboratoires (+31,6 % pour les EPST, +21,6 % pour les EPIC, et +11,2 % pour la recherche universitaire).

Il a ensuite souhaité rappeler que, bien qu'intervenant après deux années (2003 et 2004) financièrement très contraintes, l'effort consenti cette année allait au-delà d'un simple rattrapage, puisque l'augmentation totale des crédits de 2003 à 2005 dépassait de 38 % celle enregistrée en 2000, 2001 et 2002.

Il a ensuite présenté la deuxième part de l'effort supplémentaire consenti en 2005 qui consiste en l'affectation de 350 millions de produits des privatisations à la nouvelle agence nationale pour la recherche (l'ANR). Il a souligné que le ministre s'était engagé sur un financement de l'agence à hauteur de 350 millions d'euros par an jusqu'en 2007.

M. Henri Revol, rapporteur pour avis, a indiqué que, sans attendre la loi d'orientation, l'agence aurait, dès le 1er janvier 2005, pour mission, de sélectionner, de financer puis d'évaluer les meilleurs projets de recherche correspondant à des thématiques définies comme prioritaires par le Gouvernement. Il a précisé que ces thèmes devraient concerner, entre autres, la santé, les technologies de l'information et le développement durable.

Puis il a présenté la troisième part de l'augmentation qui correspond à un renforcement à hauteur de 300 millions d'euros des mesures fiscales de soutien à l'innovation et à la recherche des entreprises privées.

A ce titre, il a rappelé la création d'un nouveau contrat d'assurance-vie davantage orienté vers le financement de l'innovation, ainsi que l'effort fiscal en faveur des projets de recherche des entreprises au sein des pôles de compétitivité (30 millions d'euros en année pleine). Mais il a surtout mis en avant la montée en puissance du crédit impôt recherche (augmentation de l'assiette et relèvement du plafond), qui représente, à elle seule une dépense fiscale supplémentaire évaluée à 235 millions d'euros.

Après cette présentation du projet de loi de finances 2005, il a tenu à présenter à la commission les réflexions plus spécifiques qu'il a menées cette année sur le crédit impôt recherche. Il a estimé que cette mesure était une bonne réponse au besoin de rattrapage de la recherche privée qui ne représente que 55 % de la recherche et développement française, contre les deux tiers dans les autres pays européens, ce qui handicape la France dans la progression vers l'objectif des 3 % fixé au Conseil européen de Barcelone.

Il a considéré que l'indispensable sursaut de la recherche et développement (R&D) privée ne pouvait majoritairement provenir que des petites et moyennes entreprises industrielles disposant d'une marge importante de progression par rapport aux 3 % de leur chiffre d'affaires actuellement consacrés à la recherche et développement (R&D), alors que les services limitent en moyenne leur R&D à 1 % de leur chiffre d'affaires et que les grandes industries se maintiennent autour de l'objectif de 7 % du chiffre d'affaires. Il a ensuite présenté le crédit impôt recherche comme un levier possible de l'effort de R&D à la différence des dispositifs d'aides directes à l'innovation, trop nombreux, généralement sous consommés et profitant surtout aux grandes entreprises industrielles (91 % des aides pour 75 % de l'effort de R&D).

Il a toutefois estimé que le crédit impôt recherche ne pourrait jouer ce rôle qu'à condition de voir ses règles réorientées en faveur des PMI. A cette fin, il a formulé trois propositions :

- l'élargissement de l'assiette des dépenses éligibles en direction des dépenses d'innovation (par exemple essais ou mise au point d'un prototype), c'est-à-dire au-delà de la recherche stricto sensu ;

- la création de règles spécifiques plus favorables pour les petites et moyennes entreprises (par exemple en augmentant la part de la R&D en volume de 5 à 20 %) en prenant exemple sur le cas espagnol et les évolutions actuellement à l'étude au Royaume-Uni ;

- la simplification des règles de fonctionnement du dispositif, telles qu'elles résultent de l'actuelle instruction fiscale d'application, trop longue et trop complexe.

M. Henri Revol, rapporteur pour avis, a précisé qu'il n'avait pas souhaité traduire ces propositions en amendements au PLF dans la mesure où il estimait nécessaire d'observer les effets de la réforme (articulée avec les pôles de compétitivité) d'ores et déjà inscrite dans le PLF 2005 et où il estimait plus opportun d'intégrer ses réflexions dans le débat prochain sur la loi d'orientation.

Enfin, il a indiqué que l'effort substantiel prévu en faveur de la recherche en 2005 le conduisait à recommander un avis favorable à la commission.

Ensuite, M. Daniel Raoul a souhaité présenter plusieurs observations. En premier lieu, il a fait remarquer que la défense de ce budget de la recherche pour 2005 était sans doute moins difficile au rapporteur pour avis que lors des deux années précédentes. Au-delà des chiffres, il a salué le développement d'un système de financement des projets de recherches par thématiques transversales via la création de l'agence nationale pour la recherche, même si les moyens de cette dernière sont sans commune mesure avec la NSF américaine. Il a ensuite rappelé ses réserves de principe quant au fait d'assimiler à des dépenses réelles les non-recettes correspondant aux dépenses fiscales. Il a regretté que la LOLF ne donne pas une vision globale des crédits consacrés à la recherche. Il a aussi fait part de son étonnement quant à la comparaison des évolutions budgétaires entre les périodes 2000-2002 et 2003-2005 présentée par le rapporteur pour avis. Sur ce point, M. Henri Revol, rapporteur pour avis, lui a assuré que les chiffres avancés correspondaient bien au budget effectif (après régulation budgétaire).

Cette précision lui ayant été faite, M. Daniel Raoul a avancé plusieurs pistes de priorités pour l'effort de recherche : les nano-biotechnologies qu'il a estimé être un enjeu mondial aux fortes implications sociétales, l'incitation à la mise en commun de l'effort d'innovation des petites entreprises et le développement de la recherche dans les services notamment s'agissant des services à la personne affectés par le vieillissement de la population.

M. Christian Gaudin a tenu lui aussi à insister sur le rôle que doivent jouer les petites et moyennes entreprises via différents dispositifs (crédit impôt recherche, CIFRE). A ce titre, il a estimé que le budget 2005 était particulièrement favorable car, aux moyens nouveaux, il associait un esprit nouveau notamment au travers des pôles de compétitivité et des pôles d'excellence régionale.

M. François Fortassin a tenu à faire part de son étonnement quant aux décalages entre les évolutions budgétaires annoncées en commission à l'occasion de plusieurs avis budgétaires et la réalité observée sur le terrain d'une délégation tardive et incomplète des crédits aux préfets.

M. Henri Revol, rapporteur pour avis, a répondu à cette remarque que les mesures de régulation budgétaire n'avaient pas affecté la recherche en 2004, ce qui lui a donné l'occasion de rappeler les événements relatifs au budget de la recherche au cours de cette année, qu'il s'agisse de la décision mal comprise du gouvernement de transformation de 550 postes statutaires en emplois contractuels, des propositions du comité dirigé par les professeurs Brezin et Beaulieu et organisateurs des récentes assises de Grenoble, ou encore de la préparation actuelle de la loi d'orientation où il a souhaité que la commission joue tout son rôle.

Enfin, M. Bernard Piras a estimé que l'émergence d'une véritable Europe de la recherche était indispensable dans la compétition internationale, notamment face aux Etats-Unis.

La commission a ensuite donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la recherche pour 2005, les groupes socialiste, communiste républicain et citoyen et le groupe du rassemblement démocratique et social européen s'abstenant.

PJLF pour 2005 - Energie - Examen du rapport pour avis

La commission a ensuite examiné le rapport pour avis de M. Roland Courteau sur les crédits consacrés à l'énergie dans le projet de loi de finances pour 2005.

M. Roland Courteau, rapporteur pour avis, a indiqué en préambule que l'actualité législative de l'année 2004 dans le domaine de l'énergie avait été particulièrement intense, le Parlement ayant voté la loi du 9 août 2004, qui transforme EDF et GDF en sociétés anonymes, et adopté en première lecture le projet de loi d'orientation sur l'énergie.

S'agissant de la loi du 9 août 2004, il a rappelé son opposition, à titre personnel, au processus d'ouverture du capital de ces deux entreprises. Après avoir relevé que le Sénat serait prochainement saisi du projet de loi d'orientation sur l'énergie en deuxième lecture, il a insisté sur le fait que ce texte définissait les grands principes de la politique énergétique au cours des décennies à venir. Notant que les thèmes abordés par le projet, tels que la limitation des gaz à effet de serre ou la diversification du bouquet énergétique, auraient dû permettre de parvenir à un consensus, il a considéré, à titre personnel, que malgré des avancées introduites tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, comme la promotion des biocarburants ou les incitations en faveur de l'énergie solaire, ce texte faisait l'impasse sur certains grands enjeux et qu'il donnait, de fait, une priorité à la poursuite du programme nucléaire, au détriment d'un rééquilibrage des différentes sources d'énergie. Il a ainsi jugé que le projet de loi ne portait pas de véritable inflexion pour limiter le recours aux transports routiers, qui représentent pourtant 30 % de la consommation énergétique et 33 % des émissions de gaz à effet de serre, qui menacent notre indépendance énergétique et aggravent le réchauffement climatique.

Après avoir indiqué que la Commission européenne avait présenté une proposition de directive visant à garantir la sécurité de l'approvisionnement en électricité et les investissements dans les infrastructures, M. Roland Courteau, rapporteur pour avis, a fait part de sa satisfaction quant à cette initiative, jugeant nécessaire de définir des règles au niveau communautaire en la matière.

Abordant l'avenir de l'entreprise EDF, il a souligné que l'opérateur historique s'était, en 2003 et 2004, lancé dans une politique de désendettement, devenue indispensable au regard de l'importance de ses acquisitions à l'étranger. Il a ensuite noté que la commission « Roulet », chargée d'examiner les perspectives économiques et financières d'EDF, dont avait été membre M. Henri Revol, avait conclu à la nécessité pour EDF de renforcer ses fonds propres à hauteur de 8 à 11 milliards d'euros. Toutefois, il a jugé que les développements du rapport de la commission concluaient, sans l'exprimer, à la nécessité d'ouvrir le capital de l'entreprise et a déploré, en conséquence, le fait que la commission ne tire pas pleinement les conclusions de son analyse.

Relevant que le conseil d'administration d'EDF avait décidé, le 21 octobre dernier, de lancer, à Flamanville, dans la Manche, la construction d'un réacteur tête de série EPR, il a rappelé que la commission des affaires économiques était favorable à cette décision. Il a néanmoins indiqué qu'il restait réservé sur cette initiative et qu'il souhaitait toujours obtenir des compléments d'études sur l'opportunité de construire ce réacteur, dont la réalisation allait nécessiter plus de trois milliards d'euros.

Évoquant la libéralisation des marchés électriques et gaziers, il a noté que depuis le 1er juillet dernier les marchés énergétiques étaient plus largement ouverts à la concurrence et que le nombre de clients éligibles était passé de 3.500 à 3 millions pour l'électricité et de 1.200 à 530.000 pour le gaz. M. Roland Courteau, rapporteur pour avis, a ensuite constaté que, sur le volume total du marché ouvert à la concurrence, EDF avait perdu des clients, mais que ces pertes avaient été partiellement compensées par la conquête de nouveaux marchés en Europe. Soulignant que les enchères électriques organisées par EDF avaient permis de faire progresser d'un tiers l'activité de ses concurrents, il a attiré l'attention de la commission sur le fait que ces derniers avaient principalement revendu cette électricité dans des pays où son prix était plus élevé. A titre personnel, il a estimé que cette évolution constituait une conséquence inéluctable du processus de libéralisation, les opérateurs privés tirant pleinement partie des différences de prix entre les pays européens dans leur décision de vente, ce qui amenait à faire supporter à la France la très grande partie de la charge des investissements. Enfin, après avoir observé que l'effet de la libéralisation sur l'évolution des prix de l'énergie restait toujours controversé, les prix de gros de l'électricité ayant augmenté, en 2003, de 38 % et ceux du gaz de 16 %, il a considéré que cette évolution fragilisait la compétitivité des industries électro-intensives.

S'exprimant sur les enjeux environnementaux de la politique énergétique, M. Roland Courteau, rapporteur pour avis, a constaté que les textes européens fixaient à la France un objectif de 21 % en 2010 pour la part de la consommation électrique venant d'énergies renouvelables (ENR) et que notre pays se situait à un peu plus de 15 % en 2003. Il a déploré, à titre personnel, le vote, dans la loi du 9 août 2004, d'un amendement interdisant le renouvellement des contrats d'obligation d'achat dont bénéficient les producteurs d'ENR. Après avoir souligné que cette restriction allait créer de graves difficultés pour les producteurs d'énergies vertes, il s'est interrogé sur les justifications de cette réforme, présentée comme nécessaire au regard du droit communautaire, alors que la directive 2001/77 autorisait les Etats membres à appliquer un régime de soutien direct des prix pour promouvoir les ENR. Il a ainsi souhaité que ce point soit réexaminé lors de la prochaine lecture du projet de loi d'orientation. Rappelant qu'il avait plaidé, l'an dernier, pour que la pose de capteurs solaires soit rendue obligatoire pour les nouvelles constructions dans certaines régions françaises, il a fait valoir que l'Espagne envisageait d'instituer une telle obligation.

Il a ensuite présenté le plan « Climat 2004 », rendu public en juillet dernier, qui prévoit de réduire les émissions de CO2 de 72 millions de tonnes par an. Après s'être réjoui de cette initiative, il a néanmoins considéré que ce plan reprenait à son compte un grand nombre de mesures déjà prévues dans le projet de loi d'orientation sur l'énergie et que le Gouvernement n'avait toujours pas formulé de propositions concrètes pour créer un dispositif de bonus-malus environnemental visant à inciter les particuliers à acquérir des véhicules moins polluants.

M. Roland Courteau, rapporteur pour avis, a présenté, pour terminer, la partie thématique de son rapport consacrée à l'évolution du marché international du pétrole. Rappelant que les deux principaux cours du baril de pétrole, cotés à Londres et à New-York, avaient franchi à la fin du mois d'octobre 2004 le seuil psychologique des 50 dollars, il a fait part de ses préoccupations quant aux conséquences de cette hausse sur l'économie française et internationale. Il a ainsi expliqué que cette envolée résultait d'un déséquilibre entre l'offre et la demande pétrolière, en raison notamment de la vigueur de la croissance internationale au cours de l'année 2004, que ce soit en Europe, aux Etats-Unis ou en Asie, et plus particulièrement en Chine. Après avoir précisé que la Chine était devenue le second importateur mondial de brut, il a souligné que le parc automobile chinois avait crû de 50 % depuis l'année 2000 et que d'ici 2025 les besoins pétroliers chinois passeraient de 5,5 millions de barils par jour à 11 millions. S'agissant des capacités de production, il a noté que les pays de l'OPEP ne disposaient plus de surcapacités leur permettant de réguler le marché et que les infrastructures de production dans ces pays nécessiteraient des investissements massifs pour les moderniser.

Il a ensuite relevé que plusieurs aléas économiques et politiques avaient obéré la production pétrolière en 2004, évoquant les grèves en Norvège, les conflits sociaux au Nigeria, la situation de chaos en Irak et les menaces d'attentat en Arabie Saoudite, le passage du cyclone Ivan dans le Golfe du Mexique et les incertitudes sur la production russe résultant du contentieux juridique et fiscal entre l'Etat russe et la compagnie Youkos.

Puis il s'est inquiété des conséquences de la hausse des prix du pétrole sur le pouvoir d'achat des ménages, relevant que le fioul domestique, utilisé pour le chauffage dans un tiers des foyers français, avait vu son prix augmenter de 32 % par rapport à l'an dernier et que les prix de l'essence à la pompe avaient également suivi la hausse des cours du pétrole. Affirmant que la France était devenue moins sensible à la variation des prix du brut en raison d'une politique de maîtrise de la demande d'énergie et de diversification des sources d'approvisionnement énergétique, M. Roland Courteau, rapporteur pour avis, a présenté les résultats de certaines simulations démontrant qu'une hausse durable du prix du pétrole pourrait peser lourdement sur la croissance et l'inflation française et noté que la Commission européenne avait réduit ses prévisions de croissance pour 2005. En conséquence, il s'est interrogé, à titre personnel, sur la pertinence de la prévision de croissance sur laquelle est assise le projet de budget.

Il a conclu sa présentation en indiquant que les réserves pétrolières mondiales prouvées représentaient, à un rythme de consommation mondiale stable, encore 40 années de consommation. Il a néanmoins observé qu'il convenait d'y ajouter les réserves restant à découvrir qui, de l'avis des spécialistes, représentaient également 40 années. Enfin, la hausse des prix du pétrole, qui rentabilise l'exploitation de nouveaux gisements, ou de nouvelles techniques, comme la liquéfaction du gaz ou du charbon, offre, selon les experts, de l'ordre de vingt années de consommation supplémentaires.

Soulignant que les réserves pétrolières mondiales risquaient d'être diminuées par le développement économique de pays comme l'Inde ou la Chine, M. Roland Courteau, rapporteur pour avis, a estimé qu'il était nécessaire de préparer, dès aujourd'hui, l'économie de « l'après-pétrole », en intensifiant les recherches sur la pile à combustible ou en développant les ENR, comme les biocarburants. A ce sujet, il a fait part de sa volonté d'interroger le Gouvernement sur l'opportunité d'introduire plus massivement en France les véhicules dotés de moteurs « flex-fuel », fonctionnant soit à l'essence, soit à l'éthanol, soit avec les deux. Il a indiqué que, selon les informations dont il disposait, 32 % des voitures vendues au Brésil en septembre 2004 utilisaient cette technologie, contre moins de 4 % en 2003. Soulignant qu'un grand nombre de constructeurs automobiles, notamment français, avaient développé ces moteurs au Brésil, il s'est interrogé sur les raisons de la faible utilisation de ce type de véhicules en Europe et en France. Il a néanmoins observé que la production nationale d'éthanol n'était que de 1,2 million d'hectolitres, contre 140 millions au Brésil, et que l'émergence d'un marché européen des véhicules « flex-fuel » nécessitait de consommer plus massivement de l'essence incorporant déjà 10 à 15 % d'éthanol.

Au total, il a proposé à la commission d'émettre un avis défavorable à l'adoption de ces crédits, en raison des conséquences négatives prévisibles de la transformation d'EDF et GDF en sociétés anonymes, de la poursuite du mouvement de libéralisation des marchés énergétiques et du manque d'ambitions environnementales de la politique énergétique. Toutefois, il a indiqué que si la commission des affaires économiques émettait un avis favorable, il se ferait l'interprète fidèle de sa décision.

M. Jean-Paul Emorine, président, a rappelé que le programme électro-nucléaire français avait été lancé dans les années 1970 et que cette décision avait permis de renforcer l'indépendance énergétique française. Il a jugé, à ce titre, que le lancement du réacteur EPR était de nature à renforcer cette orientation.

Après avoir félicité le rapporteur pour la qualité de sa présentation, M. Marcel Deneux a indiqué que les choix énergétiques conditionnaient le développement de nos sociétés pendant plusieurs décennies. Il a toutefois estimé que l'essor économique de certains pays, comme la Chine, n'impliquait pas nécessairement une croissance de la consommation pétrolière et qu'il était indispensable de parvenir à de nouveaux équilibres énergétiques, à l'image de la France qui avait réduit sa dépendance au pétrole. Évoquant la directive européenne relative à la promotion des énergies renouvelables, il a souligné que l'un des problèmes posés par ce texte concernait la non-intégration des biocarburants dans l'objectif des 21 %, et que, pour atteindre ce dernier, il serait nécessaire de faire des efforts importants, l'hydraulique et l'éolien n'offrant pas de marges de développement suffisantes. Après avoir indiqué que les tarifs de rachat de l'électricité d'origine éolienne étaient vraisemblablement surévalués, il a soulevé l'insuffisance des interconnexions électriques entre les différents pays européens.

Constatant les limites du ferroutage et la perspective lointaine de la mise en service du canal Seine-Nord, M. Marcel Deneux a jugé que l'analyse présentée par le rapporteur pour avis sur la primauté donnée aux transports terrestres pêchait par manque de propositions alternatives. Il a ainsi estimé indispensable de tirer profit des potentialités offertes dans notre pays par la biomasse et par le bois-énergie, soulignant que la France était en retard sur ce point. Il s'est enfin interrogé sur les perspectives d'entrée en bourse des sociétés anonymes EDF et GDF.

M. Charles Revet s'est interrogé sur les évaluations des réserves pétrolières mondiales présentées par le rapporteur pour avis, soulignant que, selon certains spécialistes, ces réserves s'établissaient à un maximum de 60 années de consommation. Il a ensuite appuyé les propos de M. Roland Courteau sur la nécessité de développer en France le marché des voitures fonctionnant à l'éthanol. Soulignant que la France disposait d'un potentiel de production considérable en matière de biocarburants, dont le développement contribuerait fortement à l'aménagement du territoire, il a relevé les réticences émises par les compagnies pétrolières à l'introduction massive de cette source d'énergie en France, tout en rappelant qu'il était indispensable que les pouvoirs publics donnent une impulsion forte en faveur de la promotion des carburants renouvelables. Il s'est enfin réjoui de la construction prévue du réacteur EPR qui permettra de redonner un élan au programme électronucléaire français.

M. Marcel Deneux a attiré l'attention de la commission sur le fait que l'introduction massive des véhicules « flex-fuel » posait des problèmes techniques et que les moteurs étaient actuellement conçus selon des procédés rendant impossible tout transfert technologique.

Après avoir félicité le rapporteur pour avis pour la qualité de son exposé, M. Henri Revol a rendu compte des travaux de la commission présidée par M. Marcel Roulet, chargé d'examiner les perspectives industrielles et financières de l'entreprise EDF. Rappelant qu'il avait remplacé dans cette commission M. Ladislas Poniatowski, il s'est ému du fait que, sur les cinq parlementaires désignés pour siéger dans cette commission, seul, un sénateur ait été retenu. Il a ensuite indiqué que la commission avait constaté la dégradation de la rentabilité de l'entreprise depuis dix ans, son endettement important, mais également la bonne tenue de sa trésorerie, et qu'avaient été envisagés les problèmes liés au financement des retraites des agents d'EDF et aux prises de participation de l'opérateur historique dans des électriciens étrangers, notamment en Amérique latine.

Il a ensuite observé que la commission avait envisagé deux scénarios de développement, le premier dit de repli sur la France, impliquant l'abandon des participations de l'entreprise dans les sociétés étrangères et le second, retenu par la majorité des membres de la commission, visant au développement européen de la société qui nécessitera huit à onze milliards d'euros de fonds propres supplémentaires. Il a ainsi indiqué que le Gouvernement, en liaison avec le conseil d'administration d'EDF, devrait prendre les décisions nécessaires pour renforcer ces fonds propres, relevant au passage que les syndicalistes représentés dans la commission avaient plaidé en faveur d'un endettement accru. M. Henri Revol a conclu en constatant que les évolutions actuelles de l'entreprise, transformation d'EDF en société anonyme et éventuelle ouverture de capital, critiquées par le rapporteur pour avis, concordaient avec les conclusions de la commission d'enquête que le Sénat avait créée en 1998 sur la politique énergétique.

En réponse à ces différentes interventions, M. Roland Courteau, rapporteur pour avis, a apporté les précisions suivantes.

Il a déclaré avoir bien entendu les préoccupations exprimées par les différents intervenants sur la nécessité de rééquilibrer le bouquet énergétique et indiqué partager les interventions relatives à la nécessité de développer les énergies renouvelables, comme la biomasse ou le bois. Concernant le rééquilibrage des modes de transport, il a reconnu l'absence, dans son rapport, de contre-propositions. Il a également confirmé les réticences exprimées par les constructeurs à l'égard du développement des biocarburants.

Il a ensuite indiqué que la hausse du prix du pétrole rendait rentables de nouveaux gisements et que les nouvelles technologies permettraient, à l'avenir, d'extraire une plus grande quantité d'huile des gisements, dans la mesure où, aujourd'hui, seul, le tiers du pétrole en était extrait. Même s'il est possible de disposer d'un siècle de réserves, il est nécessaire de préparer l'avenir dès aujourd'hui, notamment avec le développement des biocarburants a-t-il considéré. Il a enfin remercié Henri Revol pour les informations portées à la connaissance des commissaires sur les travaux de la commission « Roulet ».

M. Gérard Delfau a félicité le rapporteur pour avis d'avoir couvert, dans son rapport, l'ensemble des sources énergétiques et a ensuite souligné que la France était en retard tant en matière d'économies d'énergie que d'exploitation du bois-énergie. Il a ainsi considéré que les réseaux de chaleur fonctionnant au bois pouvaient fortement contribuer à la diversification du bouquet énergétique français, mais que le développement de cette technique restait entravé par un taux de TVA de 19,6 %, alors que les autres types de réseaux de chaleur bénéficiaient d'un taux de TVA réduit de 5,5 %. Il a fait part, en conclusion, de sa volonté d'interroger le Gouvernement sur ce point.

M. Daniel Raoul, évoquant la proposition de directive relative à la sécurité d'approvisionnement en électricité, a exprimé ses craintes quant à la transformation de RTE en filiale d'une société anonyme, qui posait un problème de sécurité d'approvisionnement à notre pays. Après s'être interrogé sur le mode de calcul de l'objectif des 21 % d'ENR, il a considéré que notre pays devait amplifier ses politiques en faveur de la maîtrise de la demande d'énergie et qu'il était souhaitable de procéder à un bilan environnemental global des biocarburants.

M. Jean Pépin, soulignant qu'il avait apprécié la présentation du rapporteur pour avis sans pour autant partager ses conclusions, a noté l'urgence de mettre en perspective l'avenir énergétique de notre pays. Constatant que des grands pays, comme les Etats-Unis ou la Chine, se préparaient à dominer le secteur énergétique, il a insisté sur le caractère impératif du renforcement de notre indépendance énergétique. Après s'être félicité de la décision de construire un réacteur EPR, qui donne des perspectives et un avenir à la filière nucléaire française, il s'est interrogé sur le comportement de certaines associations écologistes. Il a enfin exprimé ses préoccupations relatives au développement des économies d'énergie et des énergies renouvelables.

M. Gérard Bailly s'est interrogé sur la sous-utilisation des céréales pour le chauffage, tout en rappelant qu'il était paradoxal de ne pas exploiter un potentiel pourtant vaste, alors que de nombreuses terres agricoles étaient laissées en friche. Après avoir souligné que le bois-énergie présentait des coûts d'exploitation élevés, il a estimé que l'absence d'une TVA à taux réduit obérait l'expansion de cette source énergétique. Il s'est enfin inquiété des contraintes environnementales qui pourraient résulter du projet de loi sur l'eau et de leurs conséquences sur le développement de l'hydroélectricité en France.

En réponse, M. Roland Courteau, rapporteur pour avis, a indiqué qu'il avait noté les préoccupations de ses collègues sur la nécessité de diversifier les sources d'approvisionnement énergétique, tout en soulignant qu'il partageait l'analyse de M. Gérard Delfau quant aux problèmes posés par l'absence d'une TVA à taux réduit pour les réseaux de chaleur fonctionnant au bois. S'agissant de la sécurité d'approvisionnement, il a pris bonne note des craintes exprimées par M. Daniel Raoul, après avoir précisé que l'objectif des 21 % était calculé en fonction de la consommation électrique. Il a relevé que le taux d'indépendance énergétique français se situait à 50,5 % et que la loi Bataille impliquait de légiférer en 2006 sur le mode de traitement des déchets nucléaires. Enfin, il a reconnu que le potentiel énergétique des céréales était sous-utilisé et qu'il examinerait la question des liens entre la loi sur l'eau et l'hydroélectricité au moment de sa discussion.

Puis contrairement à ce que lui proposait son rapporteur pour avis, la commission a émis, à la majorité des voix, un avis favorable à l'adoption des crédits du budget de l'énergie dans le projet de loi de finances pour 2005.

PJLF pour 2005 - Transports terrestres - Examen du rapport pour avis

La commission a ensuite examiné le rapport pour avis de M. Daniel Soulage sur les crédits consacrés aux transports terrestres dans le projet de loi de finances pour 2005.

M. Daniel Soulage, rapporteur pour avis, a déclaré que le budget des transports terrestres inscrit dans le projet de loi de finances pour 2005 s'élèverait à 7,6 milliards d'euros en moyens de paiement (dépenses ordinaires + crédits de paiement), soit une augmentation de 1,13 % par rapport à 2004.

Les moyens d'engagement, c'est-à-dire les dépenses ordinaires ajoutées aux autorisations de programme, devraient s'établir à un montant comparable, soit 7,7 milliards d'euros, en diminution légère de 0,25 % par rapport à l'année dernière.

M. Daniel Soulage, rapporteur pour avis, a souligné que le budget « actif » des transports terrestres représentait environ un tiers du montant total, tandis que les deux autres tiers étaient constitués de dotations « captives » : un tiers étant consacré au régime de retraite de la SNCF et un autre tiers aux charges d'exploitation et de désendettement du ferroviaire.

Il a évoqué ensuite la création de l'agence de financement des infrastructures de transport en France (AFITF), qui témoigne de la priorité que le Gouvernement entend donner à l'investissement dans le domaine des transports terrestres, conformément à l' « initiative en faveur de la croissance » approuvée par le Conseil européen du mois de décembre 2003.

Le rapporteur pour avis a précisé que l'AFITF serait chargée de financer les contributions publiques de l'Etat pour un certain nombre d'opérations prévues notamment par le comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire (CIADT) du 18 décembre 2003 qui, dans le domaine ferroviaire, par exemple, a confirmé plusieurs projets : la deuxième phase du TGV-Est ainsi que les lignes à grande vitesse Nîmes-Montpellier, Rhin-Rhône, Sud Europe Atlantique et Bretagne, auxquelles il convient d'ajouter des études concernant la liaison Lyon-Turin.

M. Daniel Soulage, rapporteur pour avis, a déclaré que l'article 41 du projet de loi de finances prévoyait pour l'agence en 2005 :

- une dotation en capital de 200 millions d'euros ;

- un montant de dividendes versés par les sociétés d'autoroutes à hauteur de 280 millions d'euros ;

- un montant de redevance domaniale versée par les sociétés d'autoroutes à hauteur de 155 millions d'euros.

Le rapporteur pour avis a rappelé que la commission s'était élevée avec vigueur contre la suppression du fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables (FITTVN) qui avait une finalité comparable à l'AFITF.

Evoquant le plan fret de la SNCF, le rapporteur pour avis a souligné que le volume du transport de marchandises par la SNCF avait baissé de 6,4 % entre 2002 et 2003, en revenant de 50 à 46,8 milliards de tonnes-kilomètre.

Pour l'année 2004, l'opérateur ferroviaire prévoit un trafic de 46 milliards de tonnes-kilomètre et envisage, pour 2005, 44 milliards de tonnes-kilomètre.

Le plan « fret », a-t-il ajouté, comporte quatre orientations :

- la refonte de l'outil de production, qui serait désormais centré sur cinq axes de fret ;

- une amélioration de la productivité, grâce à des investissements de rationalisation d'un montant de l'ordre de 600 millions d'euros ;

- une politique commerciale plus stricte s'efforçant de mieux rentabiliser les trafics ;

- une offre internationale élargie impliquant des alliances avec d'autres opérateurs.

Le rapporteur pour avis a souligné que le coût du plan « fret » serait de 1,5 milliard d'euros, dont 800 millions d'euros à la charge de l'Etat et 700 millions d'euros à la charge de la SNCF.

Il a indiqué que le volet financier du plan faisait actuellement l'objet d'une enquête approfondie de la part des services de la concurrence de la Commission européenne.

Si cette situation devait perdurer, a-t-il poursuivi, elle coûterait environ 40 millions d'euros de frais financiers à la SNCF.

Évoquant enfin le financement du secteur ferroviaire, M. Daniel Soulage, rapporteur pour avis, a rappelé tout d'abord quelques données lui apparaissant comme fondamentales.

L'Etat versera, en 2005, à la SNCF, un montant de 3,301 milliards d'euros qui se décomposera de la manière suivante : 109 millions d'euros au titre des tarifs sociaux, 677 millions d'euros au titre du service annexe d'amortissement de la dette (SAAD) et 2,515 milliards d'euros au titre des charges de retraite.

L'Etat versera, en 2005, à Réseau ferré de France (RFF) un montant comparable d'un peu plus de 3 milliards d'euros.

Par ailleurs, deux flux financiers en sens contraire et d'un montant comparable financent RFF par la SNCF, d'une part, au travers de péages d'infrastructures soit 2,932 milliards d'euros prévus en 2005, et la SNCF par RFF, d'autre part, au titre de la « convention de gestion » qui finance la gestion déléguée du réseau par la SNCF, pour un montant prévu de 2,524 milliards d'euros en 2005.

Il a encore signalé que la précédente loi de finances pour 2004 avait créé deux nouvelles dotations : la contribution de l'Etat au désendettement de RFF (800 M€) et la subvention à la régénération du réseau de RFF (900 M€).

La première a remplacé les dotations annuelles en capital dont le montant cumulé s'élevait à 8,9 milliards au 31 décembre 2002 ; la seconde a permis de prendre en charge des investissements (renouvellement et sécurité des réseaux) qui n'avaient jusque là pour moyens de financement que l'augmentation de l'endettement de RFF.

Le rapporteur pour avis a encore mis l'accent sur certaines données structurelles :

- le seul pôle rentable de la SNCF est celui des trains à grande vitesse ;

- le pôle des trains classiques dits « Corail » perd chaque année de l'argent : environ 150 millions d'euros en 2004 dont 50 millions de pertes pour les seules lignes Bordeaux-Lyon, Nantes-Lyon, Quimper-Bordeaux et Lille-Strasbourg ;

- le fret pouvait être considéré -avant le lancement du « plan fret »- comme en « quasi-faillite » en enregistrant par exemple, en 2003, une perte de 451 millions d'euros soit 20 % du chiffre d'affaires global du fret.

Ces constats, a-t-il ajouté, montrent l'importance des deux orientations stratégiques de la politique de l'opérateur ferroviaire pour les années à venir :

- la réorganisation du pôle fret ;

- une demande de prise en charge partielle des lignes interrégionales classiques par les régions.

S'agissant de la RATP, le rapporteur pour avis a indiqué que la RATP avait enregistré, en 2003, un résultat courant bénéficiaire de 10,2 millions d'euros, en baisse de 10 millions d'euros par rapport à 2002, en raison des grèves des mois de mai et juin 2003 qui ont suscité une réduction importante de recettes de voyageurs.

En 2003, les recettes de la RATP se sont établies à 3,6 milliards d'euros, dont 54 % au titre de la subvention versée par le Syndicat des transports d'Île-de-France (STIF), qui exerce une responsabilité directe dans l'exploitation des transports collectifs en Ile-de-France.

Il a rappelé que le contrat, signé le 12 juillet 2000 entre le STIF et la RATP, avait eu pour objectif d'améliorer la qualité du service rendu aux voyageurs et d'assurer une meilleure responsabilisation de l'entreprise sur la maîtrise de ses charges.

M. Daniel Soulage, rapporteur pour avis, a encore précisé que la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales avait prévu, s'agissant du STIF, trois innovations :

- le désengagement de l'Etat dès lors que le syndicat devient un établissement public territorial présidé par le président du conseil régional ou son représentant ;

- un élargissement des compétences du STIF appelé à devenir une véritable autorité organisatrice de transport chargée notamment de l'élaboration et de la révision du plan de déplacements urbains (PDU) ;

- la simplification des conditions de la délégation par le STIF de certaines de ses compétences à de futures autorités organisatrices de proximité.

En conclusion, M. Daniel Soulage, rapporteur pour avis, a estimé que l'effort accompli par les pouvoirs publics dans le domaine des investissements devait être salué dans l'actuel contexte de rigueur budgétaire.

Au demeurant, a-t-il ajouté, les choix opérés par le CIADT du 18 décembre 2003, de même que la création de l'AFITF afin de sécuriser et de pérenniser le financement d'un certain nombre de grands projets, constituent des orientations qui vont dans le sens des souhaits maintes fois réaffirmés par la commission.

Le rapporteur pour avis a donc proposé à la commission d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits du budget des transports terrestres dans le projet de loi de finances pour 2005.

M. Gérard Bailly a indiqué qu'à titre personnel, il ne voterait pas les crédits du budget des transports terrestres dans le projet de loi de finances pour 2005, dès lors que le Gouvernement n'aurait toujours pas trouvé de solution au problème de la suppression de la dotation qui était, jusqu'en 2001, versée aux départements qui ont été contraints de mettre en place un service de transport routier de voyageurs à la suite de la fermeture de lignes ferroviaires.

M. Michel Bécot a jugé inacceptable que le secteur fret de la SNCF enregistre un tel déficit. Il s'est interrogé sur les raisons qui empêchent l'opérateur de s'adapter aux nouvelles conditions du marché avant de plaider pour une véritable évaluation de la politique conduite par la SNCF.

M. Roland Ries a évoqué la suppression de l'aide de l'Etat aux transports collectifs urbains hors région Île-de-France. Il s'est interrogé sur la répartition de l'enveloppe subsistante de 65 millions d'euros en autorisations de programme résultant de la loi de finances rectificative pour 2003, au bénéfice des transports en commun en site propre.

M. Gérard Delfau a posé la même question au rapporteur pour avis en évoquant plus particulièrement le cas de Montpellier.

En réponse aux orateurs, M. Daniel Soulage, rapporteur pour avis, a déclaré qu'il partageait pleinement les préoccupations exprimées par M. Gérard Bailly. Il a ensuite évoqué les mesures prises par la SNCF pour réorganiser son pôle fret.

S'agissant des transports en commun en site propre des régions, il a enfin précisé que la répartition de l'enveloppe subsistante de 65 millions d'euros devrait être la suivante :

- Saint-Etienne : 10 millions d'euros (tramway) ;

- Strasbourg : 15 millions d'euros (tramway) ;

- Marseille : 10 millions d'euros (tramway) ;

- Clermont-Ferrand : 6 millions d'euros (tramway sur pneus) ;

- Toulon : 10 millions d'euros (tramway) ;

- Bordeaux : 13 millions d'euros (prolongation du tramway) ;

- Lorient : 2 millions d'euros (site propre bus).

M. Jean-Paul Emorine, président, a souligné que de nombreuses entreprises de transport routier étaient désormais conscientes de la nécessité d'encourager le ferroutage pour limiter la congestion routière sur un certain nombre d'axes.

Puis sur proposition du rapporteur, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits des transports terrestres dans le projet de loi de finances pour 2005, les groupes socialiste, communiste républicain et citoyen et du rassemblement démocratique et social européen votant contre.

Accueil d'une délégation de l'Organisation des transporteurs routiers européens - Communication

M. Gérard Cornu a tout d'abord expliqué que sa communication, au nom du président de la commission des affaires économiques, faisait suite à un entretien avec une délégation de l'Organisation des transporteurs routiers européens (O.T.R.E.), qu'il avait reçue, alors que celle-ci manifestait devant le Sénat dans le cadre d'une journée de protestation à Paris.

Il a indiqué que cette délégation, conduite par M. Jean-Pierre Morlin, président de l'OTRE, lui avait fait part des graves problèmes rencontrés par sa profession et l'avait alerté sur les conséquences que la perpétuation de cette situation pourrait avoir non seulement sur l'emploi, mais aussi en termes d'aménagement du territoire.

Après avoir fait état des documents qui lui avaient été remis lors de l'entretien, il a rappelé que ce syndicat était né en 2000 d'une scission au sein de la Fédération nationale des transporteurs routiers. L'OTRE, a-t-il précisé, regroupe pour l'essentiel des entreprises familiales de transport, comprenant aussi bien de très petites entreprises que des PME employant jusqu'à 250 chauffeurs.

Se référant aux propos de ses interlocuteurs, M. Gérard Cornu a souligné que le secteur du transport routier traversait en France une crise de compétitivité liée au développement du cabotage routier à l'échelle européenne, dans un environnement marqué par l'absence d'harmonisation sociale et fiscale des règles applicables. Dans ce contexte, a-t-il constaté, la crise pétrolière et l'augmentation des coûts du gazole resserrent, de manière parfois dramatique, l'étau économique dans lequel se trouve enfermée cette profession. Il a ainsi fait observer que les entreprises fragilisées étaient contraintes d'écraser leurs marges pour maintenir leurs prix dans la moyenne du marché, de sorte que les bénéfices de l'année 2003 avaient été quasiment nuls, et que, dans ce contexte, l'augmentation des prix à la pompe les conduisait à une véritable « asphyxie financière ». Il a indiqué que les transporteurs routiers demandaient à l'Etat d'organiser pour leur profession un environnement qui ne lui soit pas défavorable au regard de celui que connaissent leurs concurrents européens, soulignant qu'ils ne se déclaraient pas opposés à la construction de « l'Europe du transport », mais souhaitaient une meilleure harmonisation des règles entre les pays membres. Il a insisté sur les risques que l'absence de soutien public à ces entreprises pourrait représenter pour l'emploi et pour la desserte des zones enclavées du territoire français. En effet, a-t-il fait valoir, s'ils ne peuvent conserver une part significative du marché des grands axes, ils n'auront plus les moyens d'assurer les dessertes des petites agglomérations.

Enfin, il a fait savoir qu'il s'était engagé à informer la commission de son entretien et qu'il avait fait savoir à ses interlocuteurs que si la commission le décidait elle pourrait faire part des difficultés des transporteurs routiers au ministre lors de l'examen du budget des transports pour 2005 en séance publique, notamment à l'occasion de la présentation du rapport pour avis consacré aux routes et voies navigables.

M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis du budget des routes et voies navigables, a reconnu que la situation du transport routier de marchandises en France était effectivement préoccupante, constatant que les transporteurs routiers subissaient de plein fouet la hausse des prix du gazole, dans un contexte marqué par l'importance de la pression concurrentielle à l'échelle européenne. Il a souligné que cette concurrence s'était accrue depuis le printemps dernier avec l'arrivée de nouveaux Etats membres où les coûts de main-d'oeuvre sont particulièrement bas. Il a, en outre, relevé que si un tiers des entreprises françaises (15.000 sur 42.000) était composé d'entreprises individuelles dépourvues de salariés, les enjeux en termes d'emploi n'étaient pourtant pas des moindres, puisque le secteur dans son ensemble occupait en France quelque 330.000 personnes.

Rappelant que plusieurs dossiers préoccupaient actuellement les transporteurs routiers, notamment dans le domaine social, il a souhaité revenir sur la hausse du coût du gazole, indiquant que celle-ci avait pris cette année des proportions inédites (+ 30 % hors taxes entre le 1er janvier et le 31 août 2004). Il a estimé que les conséquences pour les routiers étaient dramatiques dès lors que le carburant représentait en moyenne 20 % de leurs coûts d'exploitation. Il a ajouté que les entreprises du secteur routier se voyaient, en outre, imposer au 1er janvier 2005, conformément à la directive européenne sur la taxation de l'énergie du 27 octobre 2003, une diminution (de 3,69 à 2,5 euros par hectolitre) du remboursement partiel de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) qui leur est accordé depuis 1999, sans que cette réduction soit tout à fait compensée par les mesures prévues par le projet de loi de finances pour 2005 en leur faveur, à savoir la suppression du plafonnement de cette ristourne et le renforcement de leur régime d'exonération de taxe professionnelle.

Ayant relevé que certaines organisations professionnelles du secteur réclamaient un mécanisme d'indexation des prix du transport routier sur l'évolution du coût du carburant dans les contrats liant les transporteurs aux chargeurs, il a considéré qu'un tel dispositif se heurtait en pratique au caractère très concurrentiel du secteur, soulignant que le Gouvernement avait cependant annoncé le mois dernier qu'un « indice gazole » devrait être pris en compte à l'avenir dans les contrats-types. Il a, par ailleurs, rappelé que les routiers en appelaient maintenant à une harmonisation européenne du prix du gazole professionnel ce qui, a-t-il constaté, implique la conduite de négociations au niveau européen. Pour conclure, il a insisté sur le fait que les difficultés concernaient avant tout les petites entreprises, les plus importantes pouvant, selon lui, trouver des solutions pour maintenir leur compétitivité, en particulier grâce à leur implantation dans plusieurs pays européens.

PJLF pour 2005 - PME, commerce et artisanat - Additif à l'examen du rapport pour avis

Puis M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis des crédits consacrés aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat pour 2005, est intervenu pour présenter à la commission unarticle 73 sexies rattaché au budget du ministère délégué aux PME, inséré par l'Assemblée nationale dans le projet de loi de finances pour 2005 lors de l'examen des articles de la deuxième partie, le vendredi 19 novembre 2004, et tendant :

- à majorer de 2 €, pour le porter à 95,50 €, le montant du plafond du droit fixe des chambres de métiers de métropole, cette revalorisation de 2,14 % devant permettre au réseau d'assurer dans la continuité ses missions de service public auprès des artisans ;

- à majorer de 7 €, pour le porter à 102,50 €, celui des chambres des quatre départements d'outre-mer (Guadeloupe, Martinique, Guyane et La Réunion), lesquelles exercent des missions dévolues en métropole aux chambres régionales de métiers ;

- et, pour toutes les chambres, à majorer ce montant maximum de manière exceptionnelle, pour 2005 uniquement, de 1 € supplémentaire afin de permettre le financement de l'organisation des élections aux chambres, qui auront lieu au cours du premier trimestre 2005.

Sur la proposition de M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis, la commission a donné un avis favorable à l'article 73 sexies rattaché pour que le réseau consulaire dispose d'un financement plus adapté au mouvement de modernisation engagé depuis quelques années, et assuré par deux récents décrets du 2 novembre 2004 qui, notamment, modifient le fonctionnement des chambres de métiers. A cet égard, le rapporteur pour avis a estimé que si ces mesures réglementaires étaient opportunes, elles n'en rendaient pas moins nécessaire une réforme législative pour achever l'adaptation du réseau aux enjeux actuels, réforme qui devrait être initiée après les prochaines élections consulaires.

PJLF pour 2005 - Développement rural - Examen du rapport pour avis

La commission a enfin examiné le rapport pour avis de M. Gérard Delfau sur les crédits consacrés au développement rural.

M. Gérard Delfau, rapporteur pour avis, a estimé, en préambule, que le projet de loi de finances pour 2005 s'inscrivait dans une période charnière pour le développement rural, dans la mesure où celui-ci connaissait de façon concomitante des évolutions sur les plans législatif, budgétaire et administratif.

Il a rappelé que, sur le plan législatif, l'année 2004 avait été largement consacrée à l'examen du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, que le Sénat devait examiner en seconde lecture au cours du mois de janvier 2005. Il a exprimé, à cette occasion et à titre personnel, sa déception quant au contenu de ce projet de loi.

Il a observé que l'achèvement de ce vaste chantier devait être suivi rapidement par l'ouverture de celui de la loi de modernisation agricole, qui comprendrait également de nombreux aspects relatifs au développement rural. Il a fait valoir que le ministre de l'agriculture renvoyait, du reste, à ce second texte pour les questions dont le traitement n'aurait pas été satisfaisant dans le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux.

Il a jugé que, sur le plan budgétaire, le projet de loi de finances permettait de commencer à évaluer le bouleversement complet de la nomenclature budgétaire qu'entraînait la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances. Il a précisé que cette évolution rendait très difficile, sur certains points, la comparaison des crédits d'un exercice sur l'autre.

Notant la baisse de 1,8 % des crédits proposés pour le budget du ministère de l'agriculture, à 4,88 milliards d'euros, il a pris acte de la position du Gouvernement selon laquelle le budget du ministère de l'agriculture serait globalement stable, du fait d'un report de crédits de 90 millions d'euros en 2005. Il a observé, qu'en tout état de cause, il s'agissait d'une stabilité en volume et donc d'une érosion en valeur.

Il en a conclu que le projet de budget n'offrait pas de marges financières pour les politiques agricole et de développement rural. Les variations de crédits au sein de ces politiques étaient donc le fait de réaffectations à enveloppes constantes ou légèrement négatives. Il a déclaré vouloir s'attacher, dans ces conditions, à souligner l'ordre de hiérarchie du Gouvernement sous-tendant ces réaffectations.

Il a indiqué que les actions de la politique de développement rural se retrouvaient dans deux des quatre programmes envisagés par le Gouvernement pour la nouvelle nomenclature du budget de l'agriculture.

Abordant tout d'abord le programme « gestion durable de l'agriculture, de la pêche et développement rural », il a précisé que celui-ci représenterait 1,53 milliard d'euros pour 2005, pour un périmètre qui regroupait 1,61 milliard en 2004, soit une baisse de 5 %.

Il a souhaité insister sur trois points. En premier lieu, il a remarqué que les crédits consacrés aux contrats territoriaux d'exploitation (CTE) et aux contrats d'agriculture durable (CAD) étaient en recul de plus de 9 %, à 231 millions d'euros, contre 254 millions d'euros en 2004. Le Gouvernement justifiait cette baisse au motif que les CTE les plus anciens arrivaient en fin de contrat. Il convenait d'ajouter que les CTE les plus récents faisaient l'objet d'un financement moindre que ceux qui s'achevaient désormais. Enfin, le dispositif des CAD, qui remplaçait celui des CTE, montait en puissance à un rythme plus lent que prévu. M. Gérard Delfau, rapporteur pour avis, a rappelé, en outre, que le ministre de l'agriculture avait déclaré devant la commission que, dans la mesure où les CAD avaient un champ plus restreint que les CTE, une partie des crédits consacrés aux mesures agro-environnementales se retrouvait désormais sur d'autres lignes budgétaires.

Concernant, en second lieu, les indemnités compensatrices de handicap naturel (ICHN), celles-ci étant reconduites à 235 millions d'euros, il a observé que cette stabilité des crédits ne permettait pas d'envisager la poursuite du mouvement de revalorisation des ICHN que le Gouvernement avait annoncée.

Enfin, il a indiqué que la politique du cheval s'inscrivait dans la moyenne des crédits du ministère, en baisse de 1,8 % à 63 millions d'euros.

Abordant le programme « Forêt », il a souligné qu'avec 325 millions d'euros, ses crédits étaient en recul de 6,5 %. Il a détaillé les crédits évaluatifs des quatre actions du programme :

- l'action « gestion du patrimoine forestier public » était en recul de 4,5 %. Il a regretté, à titre personnel, le fait que l'ensemble du cadre budgétaire de la forêt publique soit fortement contraint ;

- l'action « forêt privée » était en recul de 11 %, alors même que les conséquences des tempêtes de 1999 n'étaient pas encore effacées ;

- l'action « développement économique de la filière forêt-bois » voyait ses crédits diminuer de 8 %, ce qu'il trouvait particulièrement dommage, à un moment où la hausse du coût des matières premières redonnait tout son attrait au bois-matériau. Il a également souhaité insister sur l'importance du bois de chauffage, en regrettant que celui-ci se voit appliquer un taux de TVA normal, ce qui le désavantageait par rapport à d'autres sources d'énergie. Il a donc souhaité intervenir au nom de la commission, sur ce point, à l'occasion de l'examen en séance publique des crédits de l'agriculture ;

- enfin, il a noté que l'action « prévention des risques et protection de la forêt » était en baisse de 2 %.

Après avoir rappelé que ces montants étaient en euros courants, et qu'il convenait d'ajouter à ces baisses l'effet de l'érosion monétaire, il en a conclu qu'il ne pouvait, à titre personnel, qu'être défavorable à l'adoption des crédits du développement rural.

Il a ensuite abordé le volet thématique de son rapport pour avis, consacré, cette année, au réseau de découverte de l'espace rural.

Rappelant qu'il s'agissait là d'un thème de réflexion important, qui le préoccupait depuis plusieurs années, il s'est interrogé sur les conditions de répartition équitable des charges d'entretien de ces réseaux. Il a rappelé, à ce titre, que ces charges incombaient largement aux collectivités territoriales rurales, alors même que les principaux usagers de ces réseaux étaient des urbains.

Il a déploré que les réponses apportées sur ce point par les services du ministère de l'agriculture à son questionnaire budgétaire, ne lui aient pas permis de faire progresser sa réflexion. Il s'est d'autant plus félicité de la qualité de l'étude réalisée, sur cette question, à la demande du président Jean-Paul Emorine, par le service des collectivités territoriales du Sénat.

Renvoyant à son rapport écrit pour le détail de cette étude, il a néanmoins indiqué quelques éléments chiffrés d'évaluation de ces réseaux. On recensait, ainsi en France :

- 800.000 km de chemins et sentiers, dont 180.000 km balisés. On comptait, en particulier, 50.000 km en réseaux de grande randonnée, ce qui constituait un potentiel remarquable ;

- 160.000 km de sentiers équestres balisés ;

- 7.000 km de « vélos-routes » ;

- 8.500 km de voies navigables et 125.000 km de cours d'eau accessibles en canoë-kayak.

Il a précisé qu'on estimait que la part de l'espace rural en termes de consommation touristique représentait environ 20 milliards d'euros, c'est-à-dire 20 % de la consommation touristique en France.

Concernant la question délicate du financement de l'équipement en réseaux de découverte de l'espace rural, il a indiqué qu'il n'y avait pas de chiffres synthétiques permettant d'évaluer précisément l'effort de la collectivité et les nécessaires péréquations entre les différents territoires. Bien entendu, on distinguait des instruments comme la dotation de solidarité rurale (DSR), qui représentait 407 millions d'euros en 2003, ou la taxe départementale des espaces naturels sensibles (TDENS), qui représentait 80 millions d'euros par an. Il a également rappelé que le projet de loi de finances serait l'occasion d'une évolution de la dotation globale de fonctionnement des communes, qui intégrerait désormais, pour près de 170 millions d'euros, la surface des communes, ce qui pouvait être de nature à atténuer certains déséquilibres territoriaux.

Il a estimé, en conclusion, que le potentiel touristique de l'espace rural était en pleine expansion, ce dont on pouvait se réjouir dès lors que cette évolution respectait le lien indissoluble à l'agriculture de ces territoires.

M. Jean-Paul Emorine, président, après s'être félicité de la qualité des informations fournies au rapporteur pour avis par le service des collectivités territoriales du Sénat, a rappelé les améliorations budgétaires à destination des zones rurales contenues dans le projet de loi de finances pour 2005. Il a souligné l'extension à 64 départements de dispositifs d'aide qui n'en visaient auparavant que 24, ainsi que l'augmentation de 20 % de la DSR.

M. Michel Bécot a souligné les disparités de traitement entre les zones urbaines et les zones rurales, au détriment de ces dernières. Il a souhaité que ces disparités puissent être réduites par une action à long terme.

M. Gérard Bailly, après avoir abondé dans le sens de M. Michel Bécot, a fait valoir la nécessité pour certaines petites communes rurales de surdimensionner leurs équipements en prévision de quarante journées estivales d'affluence. Il a émis le souhait que le Sénat puisse consacrer une de ses séances à réfléchir sur la ruralité dans la France de demain. Il a estimé, pour sa part, que les zones rurales ne pouvaient se résumer à des espaces de loisirs.

M. Georges Gruillot a approuvé pleinement ce propos et souhaité que la commission se saisisse de ce dossier.

M. François Fortassin a regretté que la solidarité territoriale soit beaucoup moins développée en France que la solidarité sociale, ce qui se reflétait même dans l'organisation administrative.

M. Yannick Texier a déploré que cette insuffisante solidarité s'exprime parfois même entre les différents niveaux de collectivités territoriales.

M. Gérard Delfau, rapporteur pour avis, a fait part de son plein accord avec les différents intervenants. Il a résumé la position de la commission, à savoir que l'essor des activités touristiques ne pouvait se concevoir comme antagoniste de la principale activité rurale, l'agriculture. Il a estimé que les activités touristiques pouvaient générer de l'emploi pour les zones rurales, à condition que leur développement soit bien structuré, ce qui posait la question de la maîtrise et de l'impulsion de ce développement par les collectivités publiques.

Il a enfin ajouté qu'au cours des vingt dernières années, les besoins de la population des territoires ruraux avaient crû plus rapidement que les ressources des collectivités, ce qui devait nécessairement conduire à un effort de la nation pour réduire les disparités entre les différents territoires.

Après l'intervention de M. Gérard Delfau, rapporteur pour avis, qui a indiqué qu'à titre personnel il émettrait un vote défavorable tout en se faisant le loyal interprète des décisions de la commission, celle-ci a émis un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés au développement rural, le groupe socialiste, le groupe du rassemblement démocratique et social européen et le groupe communiste républicain et citoyen votant contre.

Puis après que M. Jean-Paul Emorine, président, eut annoncé qu'un poste de membre titulaire du Conseil supérieur de l'information statistique serait à pourvoir, en remplacement de M. Hilaire Flandre, M. Yannick Texier s'est porté candidat et la commission a enregistré cette candidature.