M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL


• La mission « Sécurité » est dotée de 16,818 milliards d'euros en autorisations d'engagement (+ 1,1 % par rapport à 2010) et de 16,819 milliards d'euros de crédits de paiement (hors fonds de concours), soit une augmentation de 2,7 % par rapport à l'exercice précédent.


Les dépenses en personnel constituent l'essentiel de ses moyens , soit 14,621 milliards d'euros (86,9 % des crédits de la mission).


• Depuis 2009, la mission est marquée par une évolution notable : le rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l'intérieur , de l'outre-mer et des collectivités territoriales.


• Ce rattachement ne remet pas en cause le statut militaire de la gendarmerie ni le dualisme « policier », mais consiste en un rattachement organique et opérationnel en vue d'améliorer l'efficacité de la politique de sécurité.


• Comme au cours des deux derniers exercices, le budget pour 2011 de la mission « Sécurité » est adossé à la future loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI 2). Toutefois, les différences entre la programmation triennale et la LOPPSI 2 appellent inévitablement une remise en cohérence de la part du Gouvernement afin de sortir de l'incertitude actuelle, préjudiciable à la bonne lisibilité des crédits consacrés à la sécurité intérieure au cours des trois prochaines années.


• La baisse de la délinquance, sous toutes ses formes, est le premier objectif de la mission « Sécurité ». De ce point de vue, si la délinquance constatée en matière d'atteintes aux biens a reculé de 15 849 faits entre 2008 et 2009, celle concernant les atteintes à l'intégrité physique des personnes a augmenté de 12 240 faits .


• Elément à part entière de la diplomatie, la coopération internationale en matière de sécurité permet non seulement un retour en sécurité intérieure, mais aussi de créer ou d'entretenir des relations avec des pays demandeurs d'une telle collaboration et pour autant restant à la marge des relations internationales. La création, le 1 er septembre 2010, de la direction de la coopération internationale (DCI) doit permettre d'amplifier encore ces retombées positives.

Au 10 octobre 2010, date limite, en application de l'article 49 de la LOLF, pour le retour des réponses du Gouvernement aux questionnaires budgétaires concernant le présent projet de loi de finances, 100 % des réponses portant sur la mission « Sécurité » étaient parvenues à votre rapporteur spécial.

I. PRÉSENTATION GÉNÉRALE DE LA MISSION

A. L'ÉQUILIBRE ENTRE DEUX PROGRAMMES DE « POIDS » ÉGAL : 9 MILLIARDS DE CRÉDITS DE PAIEMENT POUR LA POLICE NATIONALE ET 7,7 MILLIARDS POUR LA GENDARMERIE NATIONALE

La mission « Sécurité » est dotée de 16,818 milliards d'euros en autorisations d'engagement (+ 1,1 % par rapport à 2010) et de 16,819 milliards d'euros de crédits de paiement (hors fonds de concours), soit une augmentation de 2,7 % par rapport à l'exercice précédent.

Avec 9,088 milliards d'euros de crédits de paiement (hors fonds de concours), le programme « Police nationale » comporte 54 % des moyens financiers de la mission. Son plafond d'emploi est fixé pour 2010 à 145 504 emplois équivalent temps plein travaillé (ETPT), soit 60 % des emplois de la mission.

Pour sa part, le programme « Gendarmerie nationale » est doté (hors fonds de concours) de 7,731 milliards d'euros de crédits de paiement (soit 46 % des crédits de la mission) et de 97 198 ETPT , soit 40 % des ETPT de la mission.

Les dépenses en personnel constituent l'essentiel des moyens de la mission, soit 14,621 milliards d'euros ( 86,9 % des crédits de la mission ). Elles représentent 89,3 % du programme « Police nationale » et 84,1 % du programme « Gendarmerie nationale ».

L'évolution des crédits de la mission est récapitulée dans le tableau ci-dessous.

B. LE RATTACHEMENT DEPUIS 2009 DE LA GENDARMERIE NATIONALE AU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Depuis 2009, la mission « Sécurité » est marquée par une évolution notable : le rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

Le principe de ce rattachement avait été annoncé par le Président de la République, le 29 novembre 2007. Une première étape a été franchie le 1 er janvier 2009 par le rattachement du budget de la gendarmerie nationale au budget du ministère de l'intérieur , de l'outre-mer et des collectivités territoriales au sein de la présente mission. Concrètement, la préparation du budget de la gendarmerie s'effectue désormais au ministère de l'intérieur. De même, le recrutement des personnels civils est, depuis cette date, assuré par le ministère de l'intérieur.

Une deuxième étape a été franchie par l'adoption de la loi n° 2009-971 du 3 août 2009 relative à la gendarmerie nationale qui consacre le rattachement effectif de la gendarmerie au ministère de l'intérieur et précise l'étendue de ce rattachement ainsi que son articulation avec le ministère de la défense. La loi précise notamment que « sans préjudice des attributions de l'autorité judiciaire pour l'exercice de ses missions judiciaires, la gendarmerie est placée sous l'autorité du ministre de l'intérieur, responsable de son organisation, de sa gestion, de sa mise en condition d'emploi et de l'infrastructure militaire qui lui est nécessaire », tandis que « le ministère de la défense participe (...) à la gestion des ressources humaines et exerce à l'égard des personnels militaires de la gendarmerie nationale les attributions en matière de discipline » 1 ( * ) .

En outre, cette loi réaffirme la nature militaire de la gendarmerie nationale et son ancrage au sein des forces armées, avec les valeurs propres à cette institution. Le dualisme entre les deux forces de sécurité relevant de l'Etat (la police et la gendarmerie nationales) est donc maintenu , chacune conservant son identité et son statut.

Enfin, la loi prévoit, tous les deux ans, un rapport évaluant les modalités concrètes du rattachement et les éléments relatifs à l'obtention d'une parité globale entre les personnels de la police et de la gendarmerie nationales.

Sur le plan matériel, le changement le plus symbolique est l'installation du cabinet du directeur général de la gendarmerie nationale sur le site du ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, place Beauvau.

C. LE CADRE PLURIANNUEL FIXÉ PAR LA FUTURE LOI D'ORIENTATION ET DE PROGRAMMATION POUR LA PERFORMANCE DE LA SÉCURITE INTÉRIEURE (LOPPSI 2)

Comme au cours des deux derniers exercices, le budget pour 2011 de la mission « Sécurité » est adossé à la future loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI 2) . Adopté le 10 septembre 2010 en première lecture par le Sénat, ce texte est désormais en attente d'inscription à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, pour une seconde lecture.

D'un point de vue budgétaire et juridique, votre rapporteur spécial s'interroge toutefois sur cet adossement de la mission « Sécurité » à un texte sur lequel le Parlement ne s'est pas encore définitivement prononcé. Il souhaite qu'il soit désormais rapidement mis un terme à cette « incongruité législative » qui contribue à brouiller la bonne lisibilité de la trajectoire des budgets des deux programmes composant la présente mission.

Au-delà de cette remarque importante de forme, il faut rappeler que la LOPPSI 2 vise à la modernisation de la police et de la gendarmerie jusqu'en 2013. Elle tend à répondre à deux objectifs principaux :

- améliorer la performance de la sécurité intérieure par une modernisation technologique favorisant les capacités d'investigation, un renforcement de l'équipement ainsi que de la protection des personnels, et une approche valorisant l'accompagnement social ;

- financer les projets de mutualisation favorisés par le rapprochement entre la police et la gendarmerie , dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP).

1. Une programmation budgétaire à stabiliser définitivement

Le rapport annexé au projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI 2) retrace, notamment, l'évolution du budget de la mission « Sécurité » au cours de la période 2009-2013 2 ( * ) . La programmation ne concerne donc pas seulement les moyens supplémentaires destinés à financer les priorités de la LOPPSI 2 mais l'ensemble des crédits affectés à la mission .

Le tableau ci-dessous indique l'évolution programmée par la LOPPSI 2.

Les crédits de paiement, hors pensions, dédiés à la mission « Sécurité »
selon la LOPPSI 2

(en millions d'euros)

2009

2010

2011

2012

2013

11 456

11 438

11 452

11 554

11 766

Source : d'après le projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure

Au regard de cette programmation prévue par la LOPPSI 2, il convient tout d'abord de rappeler que celle-ci est effectuée au niveau de la mission « Sécurité » mais qu' elle n'est pas déclinée par le projet de loi à raison de chacun des deux programmes composant la mission .

Les montants présentés sont cohérents avec les plafonds prévus par l'article 6 de la loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation pour les finances publiques pour les années 2009-2012 . Ils sont également en adéquation avec les dotations votées dans les lois n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 et n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 3 ( * ) .

En revanche, ainsi que l'avait souligné votre rapporteur spécial dans son avis sur la LOPPSI 4 ( * ) , cette programmation doit également respecter les orientations budgétaires décidées pour la période 2011-2013 .

Ainsi, François Fillon a-t-il annoncé, le 6 mai 2010, un gel des dépenses de l'Etat, en valeur, de 2011 à 2013, hors pensions et charge de la dette . Le Premier ministre a, par ailleurs, précisé que « les dépenses de fonctionnement courant (...) diminueront de 10 % en trois ans, avec une baisse de 5 % dès 2011 ».

Plus encore, la programmation prévue par la LOPPSI 2 sur la période 2011-2013 doit être conforme à celle présentée par le Gouvernement dans le cadre du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 , examiné le 3 novembre 2010 par le Sénat en première lecture. Pour la mission « Sécurité », cette programmation est présentée dans le tableau ci-dessous.

La programmation prévue par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014

(en milliards d'euros)

Autorisations d'engagement (AE)

Crédits de paiement

(CP)

Dont contribution au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions »

2011

2012

2013

2011

2012

2013

2011

2012

2013

16,83

16,92

17,3

16,83

17,01

17,27

5,29

5,53

5,82

Source : d'après le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014

Or, comme l'avait remarqué votre rapporteur pour avis lors de l'examen par le Sénat de la LOPPSI 2, « les différences entre la programmation triennale et la LOPPSI 2 appellent inévitablement une remise en cohérence de la part du Gouvernement afin de sortir de l'incertitude actuelle, préjudiciable à la bonne lisibilité des crédits consacrés à la sécurité intérieure au cours des trois prochaines années » 5 ( * ) .

Les écarts entre les crédits de paiement prévues par la LOPPSI 2 et ceux proposés par la programmation triennale (hors pensions)

(en milliards d'euros)

2011

2012

2013

LOPPSI 2 (a)

11,452

11,554

11,766

Programmation triennale (b)

11,54

11,48

11,45

Ecart (a-b)

- 0,088

+ 0,074

+ 0,316

Source : d'après le projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure et le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014

Un rapprochement entre la programmation triennale prévue par le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, d'une part, et celle fournie par le projet annuel de performance pour 2011 de la mission « Sécurité », d'autre part, fait, lui aussi, apparaître certains écarts.

Les écarts entre le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 et le projet annuel de performance pour 2011 de la mission « Sécurité »

(en milliards d'euros)

Autorisations d'engagement (AE)

Crédits de paiement

(CP)

2011

2012

2013

2011

2012

2013

Programmation triennale (a)

16,83

16,92

17,3

16,83

17,01

17,27

Projet annuel de performance (b)

16,818

16,91

17,287

16,819

17,001

17,259

Ecart (a-b)

+ 0,012

+ 0,01

+ 0,013

+ 0,011

- 0,001

+ 0,011

Source : d'après le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 et le projet annuel de performance pour 2011 de la mission « Sécurité »

A ce stade et dans l'attente de cette mise en cohérence, on peut toutefois observer qu'entre 2009 et 2013 les crédits de la mission « Sécurité », hors pension, devraient en l'état et selon la LOPPSI 2 augmenter de 310 millions d'euros, soit 2,7 % . Cette progression peut être qualifiée de modeste, d'autant plus qu'elle demeure inférieure à l'inflation attendue sur la période. Il faut voir là la contribution de la mission « Sécurité » à l'effort de diminution des dépenses publiques, dans le cadre de la RGPP.

2. La LOPPSI 2 pour le programme « Police nationale »

Les crédits de la LOPPSI 2 dédiés à la police s'élèvent pour 2011 à 147,1 millions d'euros en autorisations d'engagement (contre 279,6 millions d'euros en 2010) et à 146,9 millions d'euros en crédits de paiement (contre 127,5 millions d'euros en 2010) 6 ( * ) .

a) La modernisation technologique

La modernisation technologique se voit consacrer, au titre de la LOPPSI 2 en 2011, 78,3 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 58,6 millions d'euros en crédits de paiement (CP), en vue de l'acquisition de matériels permettant le déploiement des projets suivants :

- l'équipement de véhicules de patrouilles avec le système de lecture automatique des plaques d'immatriculation (LAPI) 7 ( * ) ;

- l'acquisition d'outils dédiés à la lutte anti-terrorisme, dont la plateforme rénovée de traitement des données d'interception ;

- le développement de la vidéo-protection et de son exploitation 8 ( * ) ;

- le renforcement des moyens d'investigation technique et de lutte contre la cybercriminalité ;

- la radiolocalisation des véhicules, articulée à la modernisation des centres d'information et de commandement. A cet égard, votre rapporteur spécial rappelle que, dans leur rapport « Vers une plus grande efficacité du service public de sécurité au quotidien », Michel Gaudin et Alain Bauer estimaient que « la géolocalisation est (donc) une source potentielle de progrès majeurs dans l'efficacité policière. Selon les données disponibles à ce jour, il est parfaitement réaliste d'escompter un gain de 15 % en disponibilité opérationnelle globale » 9 ( * ) ;

- l'affirmation d'une police scientifique et technique grâce, d'une part, à la modernisation du fichier national automatisé des empreintes digitales (FNAED) et du fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG), afin notamment de les rendre interopérables avec les autres fichiers européens, et, d'autre part, au renforcement des moyens de recueil des traces sur les scènes de crime ;

- la dématérialisation et l'optimisation des ressources de la police en tirant profit des nouvelles technologies de l'information et de la communication. Il s'agit là en particulier de deux projets majeurs : la nouvelle main-courante informatisée et la dématérialisation du courrier administratif.

b) L'amélioration de l'équipement et de la protection des fonctionnaires

L'amélioration de l'équipement et de la protection des fonctionnaires pourra compter, en 2011, sur 25,9 millions d'euros en AE et en CP.

Un montant de 15,9 millions d'euros sera consacré au renouvellement d'une partie du parc de véhicules légers . Environ 900 véhicules pourront ainsi être renouvelés.

Parallèlement, 10 millions d'euros seront utilisés pour le renouvellement d'une partie du parc automobile lourd : 120 fourgons de reconnaissance et 40 camions de transport de matériels pour les compagnies républicaines de sécurité (CRS), ainsi que 10 fourgons de reconnaissance de la préfecture de police de Paris. Ces matériels, qui datent des années 2001 et 2002, feront ainsi l'objet d'un remplacement indispensable.

c) Les projets immobiliers

Les projets immobiliers de la LOPPSI 2 reposent sur 42,9 millions d'euros en AE et 62,4 millions d'euros en CP.

Cette ouverture de crédits doit permettre :

- la rénovation du patrimoine immobilier des CRS , dans le cadre d'une rationalisation de l'implantation des structures correspondant aux besoins opérationnels, ainsi que la construction de nouveaux cantonnements en Ile-de-France afin de réduire les coûts d'hébergement des unités ;

- la restructuration de la formation des agents, avec la fermeture de plusieurs sites de formation et la réalisation des travaux préalables au transfert à Lognes de l'Institut national de la formation des personnels administratifs, techniques et scientifiques (INFPATS) ;

- la modernisation et le développement des capacités des laboratoires de police technique et scientifique ;

- l'amélioration de l'immobilier de la préfecture de police de Paris ;

- la poursuite de la modernisation des locaux de garde à vue ;

- la réorganisation des filières « logistiques » de la police, notamment au travers des travaux sur les sites du secrétariat général pour l'administration de la police (SGAP) de Lille Five et de l'établissement central logistique de la police nationale à Limoges, et grâce également au développement d'actions de mutualisation avec la gendarmerie nationale, par exemple la mutualisation des garages automobiles chargés d'équiper et d'entretenir les véhicules .

Par ailleurs, une enveloppe de 10 millions d'euros sera consacrée à des opérations de maintenance lourde au profit de vingt commissariats .

En dépit de cet effort financier significatif, votre rapporteur spécial insiste toutefois sur la nécessité de l'entretien, du maintien en l'état et également de la modernisation du parc immobilier de la police. Les commissariats souffrent en effet trop souvent d'un état de vétusté avancé ainsi que de l'exiguïté de leurs locaux. Ce dernier point pourrait d'ailleurs poser problème dans le cadre de la future réforme de la garde à vue annoncée par le Gouvernement, avec la présence de l'avocat éventuellement dès la première heure de détention.

3. La LOPPSI 2 pour le programme « Gendarmerie nationale »

Au titre de la LOPPSI 2, le programme « Gendarmerie nationale » disposera en 2011 de 129,4 millions d'euros en AE et de 132,2 millions d'euros en CP 10 ( * ) .

a) Le saut technologique

Le saut technologique sera financé à hauteur de 12,4 millions d'euros en AE et de 53,8 millions d'euros en CP.

L'accent sera mis sur le développement des capacités d'investigation, de rapprochement et d'analyse par l'utilisation des nouvelles technologies (videoprotection, géolocalisation et analyse des données informatiques et de téléphones portables), sur les équipements de la police scientifique et technique ainsi que sur l'équipement des personnels (nouvelles tenues pour les motocyclistes et de maintien de l'ordre).

b) Les projets immobiliers

L'effort immobilier de la gendarmerie nationale s'appuiera sur des montages classiques en maîtrise d'ouvrage publique et sur des montages innovants suivant la procédure « d'autorisation d'occupation temporaire - location avec option d'achat » (AOT-LOA). Il reposera sur une enveloppe LOPPSI 2 de 67 millions d'euros en AE et de 23,4 millions d'euros en CP.

S'agissant des AE en particulier, 55 millions seront dédiées à la réalisation de nouvelles constructions domaniales, dont notamment le pôle judiciaire de Pontoise . La maintenance lourde domaniale se verra, elle, accordée un budget de 12 millions d'euros.

Le déménagement du siège de la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) à Issy-les-Moulineaux 11 ( * ) n'induira en 2011 qu'une charge très limitée (un million d'euros en AE et CP). Pour autant, financé par une AOT-LOA, il impactera à terme grandement le poste des dépenses immobilières du programme « Gendarmerie national ». Mis à disposition en octobre 2011, le nouveau siège fait en effet l'objet d'un contrat de conception, de financement, de construction, d'entretien et de maintenance, courant sur une durée de 32 ans et 4 mois. Le coût total de cette opération est chiffré à 455,4 millions d'euros.

c) Le fonctionnement courant

La LOPPSI 2 finance, enfin, un effort de mise à niveau des dépenses de fonctionnement courant de la gendarmerie pour une enveloppe totale de 50 millions d'euros en AE et en CP.

Cette enveloppe vise, notamment, à couvrir des loyers, des dépenses de fluides et d'entretien courant de l'immobilier, des équipements individuels, le carburant et l'entretien de certains matériels de transport, le fonctionnement de systèmes d'information, et du fonctionnement courant.

D. LES AMÉLIORATIONS APPORTÉES À LA MESURE DE LA PERFORMANCE

Face au grand nombre d'indicateurs caractérisant les deux programmes de la mission, votre rapporteur spécial, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2007 12 ( * ) , avait exprimé ses craintes devant les « études et rapports complémentaires que la construction puis l'alimentation régulière de ces indicateurs paraissent susceptibles de générer, avec leurs conséquences en termes d'efficacité et, peut-être, d'emplois publics ».

Dans le projet annuel de performance (PAP) pour 2010, le nombre des indicateurs de performance était de 17 (contre 18 en 2009 et 19 en 2008) pour le programme « Police nationale » et de 20 (20 en 2009 et 21 en 2008) pour le programme « Gendarmerie nationale » .

La réforme des statistiques de la délinquance, intervenue dans le courant de l'année 2010, a été prise en compte dans le PAP pour 2011 13 ( * ) . Elle s'est traduite par une refonte d'une partie des indicateurs . Le PAP comprend désormais 5 objectifs et 17 indicateurs pour la police, 7 objectifs et 21 indicateurs pour la gendarmerie.

La présentation des objectifs et leur libellé sont systématiquement harmonisés entre les deux programmes , sauf en ce qui concerne les missions militaires exercées par la gendarmerie (soit quatre indicateurs).

Par ailleurs, quatre indicateurs communs aux deux programmes ont été retenus pour être présentés comme indicateurs emblématiques des priorités de l'action du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales en matière de sécurité :

- l'évolution du nombre de crimes et délits en matière d'atteintes aux biens ;

- l'évolution du nombre de crimes et délits en matière d'atteintes volontaires à l'intégrité physique ;

- le taux d'élucidation ;

- le nombre d'accidents, de tués et de blessés sur la route.

Il convient de remarquer que, pour les deux programmes, l'objectif et les deux indicateurs liés à la lutte contre l'immigration irrégulière nombre d'éloignements effectifs » et « nombre d'interpellations d'aidant ») ont été transférés, en 2009, au programme 303 « Immigration et asile » de la mission « Immigration, intégration et asile ».

Votre rapporteur spécial se félicite de l'effort d'harmonisation et de maîtrise du nombre des indicateurs. Il rappelle que la mesure de la performance ne doit pas déboucher sur un accroissement disproportionné des travaux administratifs accomplis par les forces de sécurité mais n'ayant pas de lien direct avec leur mission centrale de sécurité .

E. LA PERFORMANCE EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ

1. Le débat récurrent autour de la mesure statistique de la délinquance

Les moyens supplémentaires ou la réorganisation des forces sur le terrain ne constituent pas une fin en soi . Ils ne se conçoivent pas sans l'optimisation des effectifs, des équipements et des locaux disponibles.

Dans cette perspective, le premier indice de performance de la présente mission réside dans la baisse de la délinquance , qui représente l'objectif stratégique majeur de chacun des deux programmes de la mission interministérielle.

Les statistiques sur la délinquance prêtent souvent à discussion. En particulier, une modification des bases de référence peut gêner les comparaisons. De même, le comportement des victimes peut induire un biais plus ou moins fort, par exemple selon qu'elles décident de porter plainte ou pas.

Votre rapporteur spécial relève, toutefois, que l'état 4001 utilisé depuis 1972 pour assurer le suivi des statistiques de la délinquance a le mérite de garantir une certaine stabilité dans les comparaisons .

Dans cette perspective, il précise que la réforme des statistiques de la délinquance, intervenue en 2010, n'a pas eu d'incidence sur les séries historiques suivies. En effet, ces séries sont toujours issues des 36 index de l'état 4001. Aucun biais statistique n'a donc été introduit par la réforme évoquée.

2. Les résultats de la lutte contre la délinquance

La baisse de la délinquance, sous toutes ses formes, est le premier objectif de la mission « Sécurité » . La performance en l'espèce est mesurée par l'évolution du nombre de crimes et délits constatés, tant en zone police qu'en zone gendarmerie.

En 2009, la délinquance constatée en matière d'atteintes aux biens a reculé de 0,5 % en zone police et est resté quasi stable en zone gendarmerie (+ 0,1 %). Au total, le nombre de crimes et délits constatés est passé de 2 243 498 en 2008 à 2 227 649 en 2009, soit une baisse de 15 849 faits constatés .

Dans le domaine des atteintes volontaires à l'intégrité physique des personnes , les zones police et gendarmerie enregistrent pour 2009, respectivement, une augmentation de 3,24 % et de 1 % de la délinquance constatée. Au total, le nombre de crimes et délits constatés est passé de 443 671 à 455 911 en 2009, soit une hausse de 12 240 faits constatés .

Parallèlement, le taux d'élucidation a connu une évolution globalement favorable entre 2008 et 2009. En zone police, il atteint 14,25 % pour les atteintes aux biens (contre 13,87 % en 2008), 57,2 % pour les atteintes à l'intégrité physique des personnes (contre 56,95 % en 2008) et 45,78 % pour les escroqueries et les infractions économiques et financières (contre 45,65 % en 2008). En zone gendarmerie, les résultats sont un peu plus contrastés : 17,05 % pour les atteintes aux biens (contre 17,48 % en 2008), 81,17 % pour les atteintes à l'intégrité physique des personnes (contre 79,89 % en 2008) et 66,7 % pour les escroqueries et les infractions économiques et financières (contre 69,3 % en 2008) .

Ces résultats probants en matière de taux d'élucidation tiennent notamment à la montée en puissance de la police technique et scientifique , via le FNAED et le FNAEG, qui interviennent en appui du travail d'investigation des services de police.

3. Le bilan de la lutte contre l'insécurité routière

L'exercice 2009 enregistre des résultats satisfaisants en matière de sécurité routière. En zone police , le nombre d'accidents a reculé de 9,38 % (50 781 accidents), tandis que le nombre de tués a fléchi de 2,25 % (1 129 tués).

En zone gendarmerie , le nombre d'accidents a lui aussi baissé : - 3,8 % (pour un nombre total de 19 917 accidents). Toutefois, les accidents y sont plus mortels qu'en 2008, avec un nombre de tués passant de 3 281 en 2008 à 3 305 en 2009 (+ 0,7 %).

En réponse aux bilans de l'accidentalité dans sa zone de compétence, la gendarmerie concentre ses efforts sur trois principaux leviers : la lutte contre les conduites addictives (alcool et stupéfiants) , le respect des limitations de la vitesse ainsi que le comportement des jeunes conducteurs et des utilisateurs de deux-roues motorisées.

F. LES RETOMBÉES BÉNÉFIQUES DE LA COOPÉRATION INTERNATIONALE ENTRE LES POLICES

La dimension internationale de la présente mission ne doit pas être occultée. Votre rapporteur spécial souligne d'ailleurs qu'il s'agit là de l'un des aspects importants de la mission « Sécurité » .

Le savoir-faire, l'expérience et la maîtrise technologique des forces de sécurité françaises constituent, en effet, un atout à valoriser dans le contexte international. Elément de la diplomatie, la coopération en matière de sécurité permet non seulement un retour en sécurité intérieure, mais aussi de créer ou d'entretenir des relations avec des pays demandeurs d'une telle collaboration et pour autant restant à la marge des relations internationales . Dans cette perspective, la coopération institutionnelle et technique sert de support efficace à un renforcement de la coopération opérationnelle.

En matière de sécurité intérieure, votre rapporteur spécial souligne, également, que l'effort budgétaire consenti dans le cadre du volet international de la mission « Sécurité » débouche sur des économies indirectes mais substantielles, du fait du traitement en amont des risques et des menaces pesant sur notre territoire.

En matière de coopération internationale, le service de coopération technique internationale de police (SCTIP) a longtemps joué un rôle central, en assurant la coordination de la plupart des actions menées en ce domaine. Créée le 1 er septembre 2010, la direction de la coopération internationale (DCI), première direction active commune à la police et à la gendarmerie nationales, a repris les attributions du SCTIP et de la sous-direction de la coopération internationale (SDCI) de la gendarmerie nationale . D'autres attributions ont également été transférées à la DCI : le suivi des accords de sécurité intérieure et des groupes de haut niveau, les travaux relatifs au collège européen de police (CEPOL), la sécurité diplomatique et la gestion des crises extérieures.

La DCI participe ainsi, à titre principal, à l'application de la stratégie internationale du ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales et à la mise en oeuvre de la politique étrangère de la France en matière de sécurité intérieure. Elle anime et coordonne les coopérations opérationnelles, techniques et institutionnelles de la police et de la gendarmerie nationales à travers le réseau des attachés de sécurité intérieure (ASI) implantés dans 93 pays et couvrant 156 Etats 14 ( * ) .

Grâce à ce maillage très dense, composé de 251 policiers et gendarmes de tous grades placés sous l'autorité du directeur de la DCI, le ministère dispose aujourd'hui du premier réseau mondial de coopération en matière de sécurité intérieure .

L'action de la DCI en 2011

La coopération policière internationale doit pouvoir s'appuyer sur un service moderne (intégrant policiers et gendarmes) et toujours plus efficace.

En 2011, l'action de la DCI s'inscrira dans le cadre d'orientations visant à :

- maintenir une action internationale fondée sur les priorités opérationnelles telles que le terrorisme, la criminalité organisée et l'immigration irrégulière ;

- redimensionner le réseau des ASI en fonction de l'évolution prévisible des risques et des menaces : un effort de rationalisation est mené pour identifier les personnels et les moyens susceptibles, à dimensionnement constant, d'être redéployés vers les pays identifiés comme prioritaires ;

- participer au renforcement du rôle du ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales dans la gestion des crises à l'étranger ;

- développer l'influence du ministère, au sein des organisations internationales, en renforçant la présence des policiers et des gendarmes dans les postes stratégiques ;

- inscrire l'action de coopération policière dans le cadre de l'Union européenne (UE) : le processus de mutualisation engagé avec les autres Etats membres permet de mieux couvrir les pays identifiés comme sources potentielles de menaces criminelles pour l'UE, d'éviter les doublons en matière de formation et d'améliorer le partage de l'information sur les grands trafics.

Source : ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

Votre rapporteur spécial tient à souligner que cette dimension internationale de la mission « Sécurité » débouche sur une contribution importante à la politique d'influence et de rayonnement de la France dans des pays étrangers selon les critères suivants : la recherche du retour en sécurité intérieure, la proximité géographique ou culturelle, la valorisation du modèle français, la conduite d'une coopération spécifique ou la recherche de savoir-faire.


* 1 Le ministre de la défense conserve certaines attributions, notamment celles qui s'attachent au statut et aux missions militaires (en particulier extérieures) de la gendarmerie. Il continue d'assurer certains soutiens, comme la solde, le service social ou le maintien en condition de certains équipements.

* 2 L'évolution du budget de la mission « Sécurité civile », sur la même période, est également prévue dans ce rapport annexé.

* 3 Des différences marginales s'expliquent par des changements de périmètre.

* 4 Sénat, rapport pour avis n° 575 (2009-2010) sur le projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure.

* 5 Cf . rapport pour avis précité.

* 6 Ces montants sont ici présentés sous réserve de l'ajustement devant avoir lieu entre la programmation prévue par la LOPPSI 2 et celle résultant de la programmation triennale.

* 7 Ce dispositif permet de lire les plaques à l'arrêt ou en mouvement, avec une grande fiabilité, et de vérifier immédiatement si l'immatriculation figure au fichier des véhicules volés (FVV). Le programme LAPI doit permettre d'empêcher les criminels de se « fondre dans la masse » en systématisant les vérifications au FVV et en permettant, dans des délais conformes à la loi, de remonter le fil des événements après la commission d'actes terroristes ou de gravité similaire. Les contrôles systématiques des véhicules dans une zone donnée doivent, en outre, permettre d'entraver le développement des trafics de véhicules volés.

* 8 En particulier, le projet « 1 000 caméras à Paris » se concrétisera avec les premières mises en service à l'automne 2011.

* 9 Rapport « Vers une plus grande efficacité du service public de sécurité au quotidien », remis au Président de la République le 21 mars 2007.

* 10 Ces montants sont ici présentés sous réserve de l'ajustement devant avoir lieu entre la programmation prévue par la LOPPSI 2 et celle résultant de la programmation triennale.

* 11 Le siège de la DGGN est actuellement situé à Paris (16 ème ).

* 12 Rapport spécial n° 78 (2006-2007), tome III - annexe 26 : « Sécurité ».

* 13 Cf. infra.

* 14 Chaque délégation est dirigée par un attaché de sécurité intérieure (ASI) qui dispose d'un statut diplomatique. Il s'agit soit d'un commissaire ou d'un officier de la police nationale, soit d'un officier de la gendarmerie nationale. Conseiller de l'ambassadeur, il représente à l'étranger la direction générale de la police nationale (DGPN) et la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) et, en tant que de besoin, est le correspondant des autres services rattachés au ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Il est l'interlocuteur des autorités locales en charge de la sécurité. L'ASI peut être assisté par des officiers de liaison spécialisés dans une thématique particulière (immigration, terrorisme, stupéfiants, crime organisé...) et des assistants techniques, qui mènent des actions de formation pour les polices et les gendarmeries locales.