II. RAPPORT ASSEMBLÉE NATIONALE N°3805 XIIIÈME LÉGISLATURE PREMIÈRE LECTURE

Observations et décision de la Commission :

I.- LA REDEVANCE POUR CONTRÔLE VÉTÉRINAIRE

A.- LE DROIT EXISTANT

La certification préalable aux échanges intra-communautaires et à l'export d'animaux et produits animaux est opérée aujourd'hui uniquement par des vétérinaires placés auprès des directions départementales chargées de la protection des populations. Elle peut cependant faire intervenir des vétérinaires libéraux titulaires d'un mandat sanitaire pour la réalisation des inspections physiques préalables à la certification. À ce jour, celle-ci est gratuite pour les opérateurs bénéficiaires. Seule la visite sanitaire préalable fait l'objet d'une tarification libérale, payée par le négociant ou l'éleveur au vétérinaire sanitaire. Ce système est complété depuis 1997 par une procédure dite de « co-certification », qui fait intervenir des vétérinaires sanitaires libéraux dans l'établissement des certificats eux-mêmes.

L'article L. 236-2 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction actuelle, prévoit la perception d'une redevance pour assurer le financement des contrôles nécessaires à l'établissement des certificats sanitaires et autres documents attestant que les animaux vivants, les produits et sous-produits d'origine animale ainsi que les aliments pour animaux sont conformes aux exigences sanitaires dans le cadre de l'expédition de ces marchandises hors du territoire national. Le fait générateur de la redevance est constitué par la délivrance des certificats ou documents précités. L'article L. 236-2 du code rural a été modifié en dernier lieu par la loi n° 2009-1674 du 30 décembre 2009 de finances rectificative pour 2009 pour définir les opérations de contrôle qui donnent lieu à redevance, et déterminer les modalités de calcul de cette redevance.

Le dispositif actuel pose deux problèmes : le système de « co-certification » opéré par des vétérinaires libéraux sous mandat sanitaire ne garantit pas suffisamment l'indépendance des vétérinaires certificateurs vis-à-vis des opérateurs qui les rémunèrent, et le champ des opérations sur lesquelles porte la redevance est trop étroit au regard de la réalité des charges que représentent les contrôles et la délivrance des certificats.

B.- MODIFICATION DE L'ASSIETTE, DU CALCUL ET DE L'AFFECTATION DE LA REDEVANCE

Le I du présent article prévoit de mettre fin au système de « co-certification » opéré par des vétérinaires libéraux sous mandat sanitaire, qui seront désormais rémunérés directement par FranceAgriMer pour l'exercice de leurs missions de certification, d'affecter en conséquence le produit de la redevance à cet opérateur, et d'ajuster ses modalités de calcul. Ce faisant, la législation française respectera la réglementation européenne 1 ( * ) . Cette réforme met en oeuvre des recommandations issues de la communication du ministre chargé de l'Agriculture du 30 juin 2010 sur la rénovation de la politique de sécurité sanitaire dans les domaines de l'élevage et des végétaux, faisant suite aux États généraux du sanitaire. Le I du présent article modifie l'article L. 236-2 du code rural et de la pêche maritime, au chapitre VI (importations, échanges intracommunautaires et exportations) du titre III du livre II consacré à la « Qualité nutritionnelle et sécurité sanitaire des aliments ».

? Objet de la redevance

La redevance pour contrôle vétérinaire ne porte actuellement que sur les opérations relatives à la délivrance des certificats et documents nécessaires à l'expédition des marchandises (forfaits pondérables selon le nombre de certificats et le nombre de lots ou d'animaux contrôlés). Elle ne porte pas sur les visites sanitaires préalables à l'établissement des certificats, qui font pourtant partie intégrante de la mission de certification officielle, ni sur l'établissement des certificats et documents nécessaires aux échanges et exportations, qui représente une charge importante pour les services de l'État et, à terme, pour les vétérinaires certificateurs.

Le 1° du I du présent article prévoit que la redevance pour contrôle vétérinaire acquittée par l'expéditeur des marchandises n'assure plus le financement du contrôle nécessaire à l'établissement des certificats mais celui des opérations nécessaires à leur délivrance.

En conséquence, le 4° du I du présent article prévoit que le fait générateur de la redevance n'est plus constitué par la délivrance des certificats ou documents précités mais par la réalisation des contrôles nécessaires à leur établissement.

? Modification de son calcul

La redevance pour contrôle vétérinaire équivaut actuellement au coût de la délivrance des certificats et autres documents émis par les vétérinaires. Selon le 2° du I, elle sera désormais équivalente au coût des opérations de contrôle nécessaires à la délivrance des certificats et autres documents ainsi qu'au coût d'établissement et de délivrance de ces certificats et documents, sur la base d'un prix fondé sur un forfait de visite.

Le prix reste pondéré en fonction du nombre de certificats émis et du nombre d'animaux ou de lots inspectés.

La redevance correspond actuellement à la formule suivante :

R = x × nombre de certificats + y × nombre d'animaux ou de lots.

Le montant de x ne peut excéder 30 euros et celui de y 80 centimes d'euros.

Le montant du forfait visite (V) s'ajoutera à cette formule, V ne pouvant excéder 60 euros : R = V + x * nombre de certificats + y * nombre d'animaux ou de lots.

Enfin, le contenu de l'arrêté conjoint des ministres chargés de l'agriculture et du budget fixant les tarifs de la redevance est précisé : les tarifs seront fonction de la nature des marchandises et, le cas échéant, des espèces animales.

L'application de la redevance au nouveau périmètre, pour les échanges intracommunautaires, doit permettre de collecter annuellement environ 2,6 millions d'euros. Ce montant repose sur les hypothèses suivantes, selon l'évaluation préalable jointe au projet de loi :

- un forfait visite de 30 euros, un certificat sanitaire de 10 euros et un forfait par animal certifié de 0,15 euro à 0,50 euro selon l'espèce considérée ;

- la participation des vétérinaires dans les opérations de certification (visites sanitaires et établissement des certificats) dans 80 % des cas dans la filière bovine et 50 % dans les autres filières, ainsi que la réalisation par ces mêmes vétérinaires de 20 % des visites sanitaires dans la filière bovine et de 50 % dans les autres filières.

Pour l'État, la mise en place de cette réforme n'entraîne pas de coût lié à la délivrance des certificats, puisque cette mission est déjà assurée, mais il prendra à sa charge la formation des vétérinaires certificateurs, estimée à 0,3 million d'euros pour 2011 et 2012. La réforme de la mission de certification, prévue par la révision générale des politiques publiques, doit se traduire par une hausse de la productivité et une réduction de 70 ETP sur la période 2011-2013.

? Affectation de la redevance à l'opérateur FranceAgriMer

Le 5° du I du présent article affecte le produit de la redevance à l'Établissement national des produits de l'agriculture et de la mer mentionné à l'article L. 621-1 du code rural, FranceAgriMer, qui assurera la rémunération des vétérinaires certificateurs, dans le cadre de ses missions de renforcement de la qualité des filières, prévues par l'article L. 621-3 du même code, et comme il l'a déjà fait par exemple dans le cadre de la lutte contre la fièvre catarrhale ovine.

Les conditions de constat et de recouvrement de la redevance, suivant les mêmes règles et sous les mêmes garanties, privilèges et sanctions qu'en matière de taxe sur la valeur ajoutée, ne sont pas modifiées. Un décret fixe les conditions d'acquittement de la redevance.

II.- LA REDEVANCE PHYTOSANITAIRE À LA CIRCULATION INTRACOMMUNAUTAIRE ET À L'EXPORT

Le II du présent article donne une base législative à la redevance phytosanitaire à la circulation intracommunautaire et à l'export.

A.- LE DROIT EXISTANT

Les agents des services régionaux de l'alimentation ou, sur délégation, les fédérations régionales de défense contre les organismes nuisibles (FREDON) opèrent un contrôle phytosanitaire des végétaux, produits végétaux et autres objets mentionnés à l'article L. 201-2 du code rural (c'est-à-dire ceux qui sont de nature à constituer des vecteurs de contagion, de contamination ou d'infestation des végétaux ou produits de végétaux, tels que les supports de culture, les moyens de transport des végétaux ou produits de végétaux ou les emballages de végétaux ou produits de végétaux). Ils délivrent en outre des documents administratifs, au bénéfice de personnes privées ou publiques autres que l'État qui souhaitent expédier des végétaux au sein des États membres de l'Union européenne ou vers des pays tiers. Les redevances phytosanitaires à la circulation intracommunautaire et à l'export sont prévues par l'arrêté du 5 août 1992, pris en application du décret n° 83-615 du 7 juillet 1983, abrogé par le décret n° 2006-1240 du 10 octobre 2006 relatif à la rémunération de certains services rendus par le ministère de l'agriculture et de la pêche.

Dès lors que l'objet de la redevance poursuit essentiellement un objectif d'intérêt général, elle peut être assimilée à une imposition de toute nature. La réforme proposée poursuit donc un double objectif : créer, dans le code rural et de la pêche maritime, une base législative de perception de cette redevance, dans le but de sécuriser le dispositif juridique nécessaire à sa collecte, et assurer ainsi son recouvrement intégral. L'écart entre le produit théorique et le produit réel des redevances a été estimé à 0,7 million d'euros pour l'année 2008, alors que le produit de la redevance phytosanitaire relative à la circulation intracommunautaire est évalué à 122 000 euros et celui de la redevance à l'export à 439 000 euros en 2008.

Si la directive n° 2000/29/CE concernant les mesures de protection contre l'introduction dans la Communauté d'organismes nuisibles aux végétaux et l'article L. 251-17 du code rural et de la pêche maritime encadrent la perception d'une redevance phytosanitaire à l'importation de végétaux, produits et matières susceptibles d'introduire en France des organismes nuisibles, aucune disposition européenne n'est prévue s'agissant du contrôle phytosanitaire des végétaux destinés à la circulation intracommunautaire et à l'export.

B.- LA MESURE PROPOSÉE : UNE VÉRITABLE BASE LÉGISLATIVE

Le II du présent article insère donc un nouvel article L. 251-17-1 au sein de la section du code rural et de la pêche maritime consacrée au contrôle sanitaire des végétaux.

? L'assiette de la redevance

Devront donner lieu au paiement d'une redevance à l'État la délivrance de documents administratifs et la mise en oeuvre des contrôles liés à la circulation intracommunautaire et à l'exportation vers des pays extérieurs à l'Union européenne des végétaux et produits végétaux et des autres objets précités.

Les contrôles doivent être réalisés par les agents mentionnés à l'article L. 250-2 du code rural (ingénieurs ayant la qualité d'agents du ministère chargé de l'agriculture, techniciens des services du ministère, inspecteurs de la santé publique vétérinaire, fonctionnaires ou agents contractuels de l'État, lorsqu'ils répondent à des conditions de qualification fixées par décret) ou par les groupements communaux ou intercommunaux de défense contre les organismes nuisibles, mentionnés à l'article L. 252-1 du même code.

? Le calcul de la redevance

La redevance est calculée à partir d'un montant de base N de 15 euros.

Lorsque les produits végétaux et objets assimilés sont destinés à l'exportation vers des pays extérieurs à l'Union européenne, chaque délivrance de document administratif donne lieu au paiement d'une redevance équivalente à N.

Lorsqu'ils sont destinés à la circulation intracommunautaire, la délivrance des documents administratifs donne lieu au paiement d'une redevance annuelle équivalente à N.

Les opérations de contrôle physique sur le lieu de production ou de détention de végétaux donnent lieu au paiement d'une redevance dont le calcul est plus complexe.

Le montant de base N est affecté d'un coefficient variant de 1 à 5 en fonction de la nature et de l'importance des contrôles selon la nature des végétaux, produits végétaux et autres objets contrôlés.

Le montant de redevance ainsi obtenu varie lui-même en fonction du volume et des quantités de produits mis en circulation ou expédiés, dans la limite d'un plafond global, par contrôle, de 100 N.

Le montant de la redevance applicable dans chaque cas est déterminé par une grille de tarification fixée par arrêté du ministre chargé de l'agriculture. Cette grille peut inclure des modalités de tarification dégressives lorsque sont réalisés des contrôles en grand nombre, portant sur des quantités ou volumes importants de produits.

Lorsque des examens ou des analyses de laboratoire sont réalisés dans le cadre de ces contrôles par le laboratoire national de référence ou par un laboratoire agréé dans le domaine de la santé des végétaux, une redevance forfaitaire équivalente à trois N est due afin de couvrir les frais.

? Modalités de recouvrement

La redevance est due par l'opérateur en charge des végétaux, produits végétaux et autres objets mis en circulation ou expédiés. Elle est solidairement due par son représentant lorsque celui-ci agit dans le cadre d'un mandat de représentation indirecte.

Comme la redevance pour contrôle vétérinaire, elle est constatée, recouvrée et contrôlée suivant les mêmes règles, sous les mêmes garanties, privilèges et sanctions qu'en matière de taxe sur la valeur ajoutée. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe. Un décret fixe les conditions d'acquittement de la redevance.

III.- L'IMPUTATION DES FRAIS LIÉS AUX MESURES SPÉCIFIQUES À DESTINATION

L'article L. 236-4 du code rural et de la pêche maritime précise que le contrôle vétérinaire, sanitaire, qualitatif, zootechnique ou ayant trait à la protection des animaux, qu'il soit systématique ou non, est réalisé aux frais des importateurs au moment de leur entrée sur le territoire métropolitain ou dans les départements d'outre-mer, aux postes d'inspection frontaliers. Le champ du contrôle est très large, puisque sont visés tous les animaux vivants, les produits et sous-produits d'origine animale et les aliments pour animaux. Les frais inhérents à des mesures sanctionnant une non-conformité aux conditions d'importation sont aussi à la charge de l'importateur, en application des articles L. 236-9 et L. 236-10 du même code : quarantaine, abattage, réexpédition, etc.

Il n'en va pas de même pour les mesures spécifiques dites « à destination », justifiées par une obligation réglementaire. En conséquence, le coût de ces mesures spécifiques (prélèvements et analyses en laboratoire), nécessaires à la mise en libre pratique vétérinaire des marchandises, est supporté par l'État. La réglementation européenne prévoit dans certains cas l'acquittement par l'importateur ou le destinataire final de la marchandise des frais inhérents à ces mesures spécifiques, mais elle ne couvre pas l'ensemble des animaux. C'est le cas pour les oiseaux de volière par exemple, mais pas pour les abeilles.

Le III du présent article vise à faire supporter le coût des mesures spécifiques à destination par les importateurs des marchandises qui feraient l'objet de telles mesures, en lieu et place de l'État. L'économie pour le budget de l'État n'est pas déterminée avec précision. Toutefois, pour les essaims d'abeilles, qui constituent la principale marchandise concernée, le coût des frais d'analyse en 2010 a été estimé, hors coût de personnel, à 100 000 euros.

L'ensemble des trois mesures proposées par le présent article doit entrer en vigueur au 1 er janvier 2012.

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La Commission adopte l'article 25 sans modification .


* 1 Règlement n° 882/2004/CE relatif aux contrôles officiels effectués pour s'assurer de la conformité avec la législation sur les aliments pour animaux et les denrées alimentaires et directives n° 90/425/CEE relative aux contrôles vétérinaires et zootechniques applicables dans les échanges intracommunautaires, n° 64-432/CE relative à des problèmes de police sanitaire en matière d'échanges intracommunautaires d'animaux des espèces bovine et porcine et n° 96/93/CE concernant la certification des animaux et des produits animaux.