II. RAPPORT ASSEMBLÉE NATIONALE N°3805 XIIIÈME LÉGISLATURE PREMIÈRE LECTURE

Observations et décision de la Commission :

Le présent article modifie les dispositions relatives aux taxes sur les titres de séjour délivrés aux étrangers figurant à l'article L. 311-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA). Il prévoit une augmentation des tarifs applicables à la délivrance de certains de ces titres, dans une logique d'harmonisation et de responsabilisation des demandeurs. Il supprime également la série spéciale de timbres fiscaux propres à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) et modifie les règles d'affectation du produit de ces taxes.

Par ailleurs, le présent article prévoit une modification des règles de communication des procès-verbaux d'infraction aux règles de l'emploi des étrangers, afin d'assurer un meilleur recouvrement de la contribution spéciale due par les employeurs n'ayant pas respecté ces règles.

1.- L'augmentation des tarifs applicables à certains titres de séjour

a) La suppression du régime fiscal dérogatoire de l'immigration professionnelle

Le 2° du A du I du présent article propose de supprimer l'application d'un droit réduit, pour la première délivrance d'une carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle et portant la mention « salarié » ou « salarié en mission ». Ce droit, qui doit être compris dans une fourchette de 55 à 70 euros, s'élève aujourd'hui à 70 euros.

En vertu de la modification proposée pour le premier alinéa du A de l'article L. 311-13 du CESEDA, ces titres donneraient désormais lieu à la perception d'une taxe pour un montant fixé par décret entre 200 et 385 euros. La logique retenue étant d'appliquer le même traitement au titre de séjour des salariés et au titre de séjour de droit commun, le tarif devrait s'élever à 340 euros.

Cette modification du régime fiscal dérogatoire qui est jusqu'à présent appliqué à l'immigration professionnelle préserve le régime particulier qui a été instauré par la loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité en faveur des titulaires de la carte bleue européenne : ces étrangers titulaires d'un contrat de travail d'une durée supérieure à un an pour un emploi dont la rémunération annuelle est au moins égale à 1,5 fois le salaire moyen de référence et titulaires d'un diplôme correspondant à au moins trois années d'études supérieures bénéficieront de la gratuité de la délivrance de leur titre de séjour.

Par ailleurs, le montant de la taxe à acquitter demeurera réduit en ce qui concerne la première délivrance d'une carte de séjour temporaire à un étudiant, à un stagiaire, à un titulaire d'une rente d'accident du travail ou de maladie professionnelle servie par un organisme français ou à ses ayants droit.

Le gain résultant de cette majoration de la taxe sur le premier titre de séjour délivré aux salariés est chiffré à 4,05 millions d'euros par an.

b) L'acquittement de la taxe dès le dépôt de la demande de visa de long séjour

Le 3° du A du I du présent article propose d'exiger l'acquittement de la taxe correspondant au titre de séjour dès que la demande de visa de long séjour équivalant à un titre de séjour est déposée, et non plus lors de sa délivrance.

Cette modification aura pour conséquence que cette taxe sera acquittée par l'ensemble des demandeurs, et non plus par les seuls demandeurs obtenant effectivement leur visa de long séjour, comme le précise le 4° du A du I du présent article qui prévoit une absence de remboursement de la taxe en cas de rejet de la demande.

Conformément à ce que prévoit le V du présent article, un décret devra fixer les modalités d'application de cette nouvelle disposition.

Cette disposition devrait dégager des recettes en trésorerie, en 2012, car seront dans le même temps perçues des taxes sur les titres délivrés et des taxes sur les titres demandés. Le gain en trésorerie est chiffré à 3,1 millions d'euros pour 2012. En outre, l'absence de remboursement de la taxe acquittée lors de la demande même en cas de rejet aura pour conséquence un surcroît de recettes pérenne, de l'ordre de 1,7 million d'euros par an.

Par coordination avec l'introduction d'une taxe exigible dès le dépôt de la demande, le II du présent article prévoit de modifier l'article L. 311-14 du CESEDA, afin d'y faire la mention de cette possibilité d'application des dispositions fiscales à la demande d'un visa de long séjour.

c) La majoration de certains renouvellements de titre de séjour

Le B de l'article L. 311-13 du CESEDA prévoit que le renouvellement des titres de séjour et la fourniture de duplicata donnent lieu à la perception d'une taxe d'un montant compris entre 55 et 220 euros selon la nature et la durée du titre.

Ainsi, le décret n° 2011-163 du 9 février 2011 a fixé le montant de cette taxe de renouvellement à 30 euros pour un titre de séjour étudiant valable un an, à 55 euros pour un titre de séjour étudiant valable plus d'un an et pour un titre de séjour d'un stagiaire, d'un titulaire d'une rente d'accident du travail ou de maladie ou de ses ayants droit, à 85 euros pour les cartes de séjour temporaire valables à un an, à 110 euros pour les cartes de séjour temporaires valables plus d'un an et à 140 euros pour la carte de résident, la carte de résident permanent et la carte de séjour retraité.

En outre, une majoration de 15 euros est applicable à ces différents tarifs en cas de non-présentation du titre en vue de son renouvellement ou en cas de renouvellement alors que la demande en a été faite après l'expiration de la durée de validité du titre initial.

Le 2° du B du I du présent article propose de compléter le B de l'article L. 311-13 du CESEDA par un nouvel alinéa, destiné à prévoir l'application du tarif correspondant à une première demande de titre de séjour lorsqu'un étranger titulaire d'une carte de séjour étudiant ou stagiaire obtient la délivrance d'une carte de séjour à un autre titre. Jusqu'à présent, l'étranger titulaire d'une carte d'étudiant ou de stagiaire qui, à l'occasion d'une nouvelle délivrance d'un titre de séjour, obtenait un titre relevant d'une autre catégorie, n'était tenu que d'acquitter la taxe due en cas de renouvellement du titre de séjour. Désormais, il ne bénéficierait plus de l'effet d'aubaine lié à l'obtention préalable d'un titre de séjour étudiant ou stagiaire.

Le gain résultant de cette majoration de la taxe de renouvellement devrait être de l'ordre de 1,275 million d'euros par an.

d) La majoration du visa de régularisation

Le D de l'article L. 311-13 du CESEDA prévoit un droit de visa de régularisation, d'un montant forfaitaire de 220 euros, qui a été introduit en loi de finances pour 2011 afin de remplacer le double droit de chancellerie acquitté à l'occasion d'une régularisation.

Ce droit doit être acquitté par l'étranger qui n'est pas entré en France muni des documents et visas exigés par les conventions ou qui, après l'expiration d'un délai de trois mois depuis son entrée en France, n'a pas été muni d'une carte de séjour.

Le 2° du D du présent article propose de modifier le premier alinéa du D de l'article L. 311-13 du CESEDA, afin de porter le montant du droit de visa de régularisation de 220 à 340 euros et de prévoir qu'une fraction de ce droit (110 euros) sera perçue lors de la demande du titre, sans pouvoir être remboursable si la délivrance du titre est refusée.

L'augmentation du droit de régularisation devrait générer des recettes supplémentaires chiffrées à 5,4 millions d'euros par an. En outre, l'instauration d'une exigibilité partielle de ce droit lors de la demande du titre devrait générer des recettes supplémentaires chiffrées à 1,1 million d'euros par an.

2.- Le plafonnement de l'affectation des recettes au profit de l'OFII

Il est proposé, dans le 1° du E du I du présent article, de supprimer l'exigence d'un acquittement des taxes sur les titres de séjour au moyen de timbres fiscaux d'un modèle spécial à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). Par conséquent, les droits pourront être acquittés en utilisant la série ordinaire des timbres fiscaux, ce qui devrait être une source de simplification.

Dans le même temps, l'affectation générale des recettes provenant des taxes sur les titres de séjour au profit de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) est supprimée (1° du A du I, 1° du B du I, C du I, 1° du D du I du présent article), au profit d'une affectation plafonnée prévue par le 2° du E du I du présent article.

D'après l'évaluation préalable du présent article, les recettes prévisionnelles des taxes affectées à l'OFII s'élèvent, pour 2011, à 112 millions d'euros. Les recettes supplémentaires devraient être de l'ordre de 16,6 millions d'euros en 2012, puis, après la disparition du gain de trésorerie en 2012, de l'ordre de 13,5 millions d'euros à compter de 2013.

Le plafonnement de l'affectation des recettes qui est proposé devrait conduire à verser un reliquat du produit des droits liés aux titres de séjour à l'État. En effet, la nouvelle rédaction introduite dans le E de l'article L. 311-13 du CESEDA prévoit que le produit des taxes est affecté à l'OFII dans la limite de 122 millions d'euros par an, le surplus de recettes devant donc être de l'ordre de 6,6 millions d'euros en 2012 puis de 3,5 millions d'euros en 2013.

3.- La modification des règles relatives à la législation sur le travail des étrangers

Le IV du présent article prévoit de modifier les dispositions du code du travail relatives à la communication des procès-verbaux relevant des infractions constitutives de travail illégal. En vertu de l'article L. 8211-1 du code du travail, les infractions constitutives de travail illégal sont au nombre de six, au titre desquelles figure l'emploi d'étranger sans titre de travail.

Le A du IV du présent article crée un nouvel article L. 8271-1-3 dans le code du travail, afin d'exiger que le représentant de l'État dans le département reçoive copie des procès-verbaux relevant les infractions constitutives de travail illégal.

Cette transmission devrait ainsi permettre à l'autorité administrative de mettre en oeuvre les sanctions administratives prévues par le chapitre II du titre VII du livre II de la huitième partie du code du travail, qui ont été significativement enrichies par la loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité :

- le refus d'accorder, pendant une durée maximale de cinq ans, certaines aides publiques en matière d'emploi, de formation professionnelle et de culture et le remboursement de tout ou partie de ces aides perçues dans les douze mois précédant l'établissement du procès-verbal d'infraction (article L. 8272-1 du code du travail) ;

- la fermeture de l'établissement ayant servi à commettre l'infraction, à titre provisoire et pour une durée ne pouvant excéder trois mois (article L. 8272-2 du code du travail) ;

- l'exclusion des contrats administratifs, pour une durée ne pouvant excéder trois mois (article L. 8272-4 du code du travail).

Dans la mesure où ces trois types de sanctions administratives peuvent être décidés en cas d'emploi d'étrangers sans titre de travail, il serait plus précis, dans la rédaction du nouvel article L. 8271-1-3 du code du travail, de mentionner la mise en oeuvre de ces trois types de sanctions, et non uniquement de celles prévues par l'article L. 8272-1.

Le B du IV du présent article prévoit de compléter l'article L. 8271-17 du code du travail pour prévoir qu'une copie des procès-verbaux relatifs aux infractions relatives à l'emploi d'un étranger sans titre de travail devra être transmise au directeur général de l'OFII. La transmission des copies des procès-verbaux établis par les inspecteurs du travail, les agents et officiers de police judiciaire et les agents de la direction générale des douanes permettra au directeur général de l'OFII d'assurer la liquidation des deux amendes administratives sanctionnant l'employeur qui aura occupé un étranger sans titre de travail :

- la contribution spéciale prévue par l'article L. 8253-1 du code du travail ;

- lorsque l'employeur aura occupé un travailleur en situation de séjour irrégulier, la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine prévue par l'article L. 626-1 du CESEDA.

L'objet des modifications proposées par le IV du présent article n'est pas directement fiscal. Néanmoins, les modifications proposées par le B du IV sont susceptibles de faciliter le recouvrement de ces contributions par le Trésor public pour le compte de l'OFII.

Enfin, le III du présent article procède à des corrections de références dans l'article L. 626-1 du CESEDA, afin de tenir compte des modifications intervenues dans la codification des dispositions relatives aux peines applicables en cas d'emploi d'un étranger non muni d'un titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France

4.- L'application outre-mer

Les départements d'outre-mer, régis par le principe d'identité législative, verront la nouvelle législation relative aux taxes sur les titres de séjour s'appliquer sans qu'il soit nécessaire de le préciser dans le texte du présent article.

En revanche, en ce qui concerne Saint-Barthélemy et Saint-Martin, les articles L.O. 6213-1 et L.O. 6313-1 du code général des collectivités territoriales prévoient que les lois et règlements relatifs à l'entrée et au séjour des étrangers ainsi qu'au droit d'asile ne sont applicables à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin que sur mention expresse. Par conséquent, afin d'assurer une application des nouvelles dispositions relatives aux taxes perçues sur les titres de séjour dans ces deux collectivités d'outre-mer, il est nécessaire de mentionner expressément que les dispositions des I à III du présent article seront applicables à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin.

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La Commission adopte l'article 28 sans modification .