M. Francis DELATTRE, rapporteur spécial


LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Première partie - Mission « Régimes sociaux et de retraite »

1. Les crédits inscrits dans la mission « Régimes sociaux et de retraite » s'élèvent pour 2014 à 6,53 milliards d'euros en AE et en CP. Le plafond de crédits de 6,75 milliards d'euros fixé par la loi de programmation des finances publiques pour la période 2012-2017 est ainsi respecté .

2. Pour la première fois depuis la création de la mission, les crédits diminuent de 1,6 % par rapport à l'année précédente , en « neutralisant » les effets de la diminution des produits exceptionnels issus des cessions immobilières, dont a bénéficié le régime minier. Cette baisse des subventions d'équilibre s'explique par la moindre revalorisation des pensions de retraite en 2013 et en 2014, liée au ralentissement de l'inflation , et par le report de date de revalorisation de six mois en 2014, prévu par le projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites.

3. Le taux global d'évolution des crédits masque une évolution contrastée des subventions d'équilibre versées à chacun des régime s : les dotations aux régimes de retraite de la RATP, des mines et de la SEITA augmentent, tandis que celles versées aux autres régimes diminuent. En particulier, la subvention d'équilibre versée au régime de retraite du personnel de la SNCF diminue de 1,3 % en raison de la baisse du nombre de retraités.

4. Compte tenu des résultats peu concluants de la réforme des régimes spéciaux de 2008 et de l'application différée - à partir de 2017 - de la réforme des retraites de 2010 aux ressortissants de ces régimes, votre rapporteur spécial regrette que la question des régimes spéciaux n'ait pas été attentivement examinée dans le cadre du projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites .

5. Certaines des recommandations formulées par votre rapporteur spécial lors de sa mission de contrôle budgétaire sur le régime de retraite et de sécurité sociale des marins ont été prises en compte, comme l'extension au régime des marins des dispositions relatives à la faute inexcusable de l'employeur, inscrite dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014. S'agissant des différents dispositifs d'exonération de charges sociales dont bénéficient les secteurs maritimes, votre rapporteur spécial soutient le lancement d'une évaluation de leur efficience.

Deuxième partie - Compte d'affectation spéciale « Pensions »

1. Les dépenses du compte d'affectation spéciale ( CAS ) « Pensions » s'élèveront à 56,5 milliards d'euros en 2014 , ce qui correspond à une progression de 0,7 % par rapport aux montants inscrits en loi de finances initiale pour 2013. Le moindre dynamisme des dépenses de pensions des fonctionnaires par rapport aux années précédentes (+ 4,6 % en moyenne entre 1990 et 2012) s'explique par la diminution du nombre de départs à la retraite, le ralentissement de l'inflation et le report de la date de revalorisation des pensions du 1 er avril au 1 er octobre en 2014.

2. Les contributions de l'État au CAS « Pensions » s'élèveront à 45,4 milliards d'euros , respectant ainsi la programmation triennale 2013-2015. Pour la première fois depuis la création du CAS, les taux des contributions employeurs de l'État demeureront stables (environ 74 % au titre des pensions civiles et 126 % au titre des pensions militaires). Ces taux ont progressé d'environ 25 points entre 2006 et 2013.

3. Un excédent de 769 millions d'euros permettra de préserver le fonds de roulement du CAS à un niveau proche de 1 milliard d'euros . Toutefois, afin de ne pas fragiliser la trésorerie du compte, il demeure souhaitable de publier dans les meilleurs délais le décret prévoyant des majorations de retard en cas de non-versement dans les délais des contributions des ministères employeurs.

4. Le dispositif de mesure de la performance est modifié, dans un sens conforme aux recommandations antérieures de votre rapporteur spécial . En particulier, l'indicateur mesurant le coût unitaire d'une primo-liquidation est remplacé par un indicateur mesurant le coût de gestion complet d'un ressortissant du régime des pensions civiles et militaires de retraite .

5. La réforme des retraites de 2010 , en particulier les mesures relatives à l'âge de départ à la retraite, aurait un impact financier positif de l'ordre de 1,3 milliard d'euros en 2014 sur le régime de la fonction publique d'État. L'impact sur ce régime de la réforme présentée à l'automne par le Gouvernement demeure, quant à lui, imprécis.

6. En vertu du dispositif de « neutralisation » des conséquences des transferts de personnel de l'État vers les collectivités territoriales, le CAS « Pensions » retrace des flux financiers entre l'État et la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales ( CNRACL ). Depuis 2010, ce mécanisme se traduit par une charge nette pour la caisse, ce qui participe à la fragilisation de sa situation financière. Cette tendance ne s'inverserait qu'en 2023. En 2014, la charge nette pour la CNRACL au titre du remboursement des cotisations des agents transférés s'élèvera à 360 millions d'euros.

Les délais limites de réponse des ministères aux questionnaires budgétaires de votre rapporteur spécial étaient fixés au 10 octobre 2013 par l'article 49 de la LOLF. À cette date, seulement 72 % des réponses avaient été transmises pour le questionnaire relatif au compte d'affectation spéciale « Pensions » et 95 % des réponses avaient été transmises s'agissant de la mission « Régimes sociaux et de retraite ».

PREMIÈRE PARTIE
MISSION « RÉGIMES SOCIAUX ET DE RETRAITE »

La mission « Régimes sociaux et de retraite » retrace les subventions d'équilibre versées par l'État à certains régimes spéciaux. Elle est composée de trois programmes :

- le programme 198 « Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres », qui reçoit principalement les crédits destinés à assurer l'équilibre des caisses autonomes de retraite de la société nationale des chemins de fer français (SNCF) et de la régie autonome des transports parisiens (RATP) ;

- le programme 197 « Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins », qui vise à financer, via l'établissement national des invalides de la marine (ENIM), le régime spécial de sécurité sociale des marins (pensions de retraite et mesures d'action sociale et sanitaire) ;

- le programme 195 « Régimes de retraite des mines, de la société d'exploitation industrielle des tabacs et des allumettes ( SEITA ) et divers », qui regroupe plusieurs régimes en rapide déclin démographique (caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines, régimes de retraite de la SEITA, de l'Imprimerie nationale, des régies ferroviaires d'outre-mer et de l'Office de radiodiffusion et télévision française).

Graphique n° 1 : Répartition des crédits de la mission en 2014

Source : commission des finances du Sénat (d'après les données du projet annuel de performances de la présente mission pour 2014)

Les régimes spéciaux dont il est question dans la présente mission sont pour la plupart très anciens et se caractérisent par un fort déséquilibre entre, d'une part, le nombre de cotisants et d'autre part, le nombre de pensionnés. Ce déséquilibre est maximal pour les régimes dits « fermés » 1 ( * ) , comme celui des mines ou de la SEITA. Il est très important pour les régimes des marins, de la SNCF et de la RATP.

Le tableau ci-après présente les effectifs de pensionnés et de cotisants ainsi que les ratios démographiques des principaux régimes de la mission 2 ( * ) .

Tableau n° 2 : Effectifs et ratio démographique des principaux régimes en 2013

Nombre de cotisants

Nombre de pensionnés*

Ratio

cotisants / pensionnés

SNCF

155 467

272 375

0,58

RATP

42 408

48 975

0,87

Marins

26 280

116 761

0,23

Mines

3 409

306 265

0,01

SEITA

165

9 605

0,02

* Bénéficiaires vieillesse de droit direct et de droit dérivé.

Source : commission des finances du Sénat (d'après les données de la commission des comptes de la sécurité sociale - 2013)

Cette spécificité conduit l'État, dans une logique de solidarité nationale, à verser à ces régimes une subvention d'équilibre destinée à combler l'écart entre, d'une part, les prestations servies et , d'autre part , les produits reçus par ces derniers.

I. UNE DIMINUTION GLOBALE DES CRÉDITS DE LA MISSION

Le montant global des crédits inscrits dans la présente mission pour 2014 est de 6,53 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), répartis comme indiqués dans le tableau ci-après.

Au regard de ces données, les crédits de la mission diminueraient de 0,1 % par rapport à 2013, ce qui représente environ 9 millions d'euros. Toutefois, il convient de neutraliser une mesure de périmètre intervenue entre la loi de finances (LFI) pour 2013 et le présent projet de loi de finances (PLF) : la diminution des produits exceptionnels issus des cessions immobilières dont a bénéficié le régime de retraite des mines. Ceux-ci se sont élevés à 118 millions d'euros en 2013 mais ne devraient plus représenter que 19 millions d'euros en 2014.

En « neutralisant » cet élément, les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » diminuent de 1,6 % entre 2013 et 2014 . Il s'agit d'un infléchissement de tendance significatif par rapport aux années précédentes.

Par ailleurs, une modification de la maquette de la mission est à signaler : les deux actions « Pensions de retraite des marins » et « Action sanitaire et sociale » du programme 197 « Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins » ont été fusionnées. Ce changement n'a pas d'impact sur le périmètre de la mission. Toutefois, votre rapporteur spécial considère que cette fusion nuit à la transparence du programme . Même s'il s'agit dans les deux cas de dépenses d'intervention, les dépenses de pension et d'action sanitaire et sociale sont de nature différente.

Tableau n° 3 : Répartition des crédits* par programme et action

(en euros)

Intitulé du programme et de l'action

Crédits de paiement

Exécution 2012

Ouverts en LFI pour 2013

Demandés pour 2014

Variation 2013/2014

Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres

4 030 663 659

4 184 360 969

4 152 039 599

- 0,8 %

Régime de retraite du personnel de la SNCF

3 307 400 000

3 408 820 790

3 362 550 568

- 1,3 %

Régime de retraite du personnel de la RATP

575 300 000

614 570 179

634 140 000

+ 3,1 %

Autres régimes 3 ( * )

147 962 659

160 970 000

155 349 031

- 3,5 %

Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins

856 456 092

840 000 000

825 497 543

- 1,7 %

Pensions de retraite des marins

849 278 092

833 840 000

825 497 543

- 1,7 %

Action sanitaire et sociale des marins

7 178 000

6 160 000

-

-

Régimes de retraite des mines, de la SEITA et divers

1 823 912 188

1 518 927 830

1 556 752 232

+ 2,5 %

Versements au Fonds spécial de retraite de la caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines

1 371 580 000

1 348 927 830

1 384 849 057

+ 2,7 %

Régime de retraite de la SEITA

57 360 000

165 510 000

168 017 175

+ 1,5 %

Caisse des retraites de l'imprimerie nationale

70 000

70 000

26 000

- 62,9 %

Caisse des retraites des régies ferroviaires d'outre-mer

3 567 055

3 900 000

3 400 000

- 12,8 %

Versements liés à la liquidation de l'ORTF

482 000

520 000

460 000

- 11,5 %

Contributions exceptionnelles au compte d'affectation spéciale « Pensions »

376 353 133

-

-

-

Caisse de retraite des fonctionnaires de Mayotte

14 570 000

-

-

-

Total

6 711 031 939

6 543 288 799

6 534 289 374

- 0,1 %

Neutralisation des produits exceptionnels dont a bénéficié le régime des mines en 2013

6 642 288 799

6 534 289 374

+ 1,6 %

* Les montants des crédits en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP) sont identiques.

Source : d'après le rapport annuel de performances pour 2012 et le projet annuel de performances pour 2014

A. LE RESPECT DU PLAFOND DE LA PROGRAMMATION TRIENNALE

La programmation triennale 2013-2015, fixée par la loi n° 2012-1558 de programmation des finances publiques, fixe le plafond des crédits de la mission à 6,75 millions d'euros pour 2014 . Le niveau de ce plafond autorisait une progression des crédits de la mission de 3,2 % entre 2013 et 2014. Toutefois, le présent projet de loi de finances propose un plafond de crédits de paiement nettement en deçà du plafond de la programmation pluriannuelle.

Tableau n° 4 : Dépassement et respect des dernières lois de programmation

(en millions d'euros)

2010

2011

2012

2013

2014

Triennal 2009-2012

5 450

5 750

Triennal 2011-2014

6 030

6 239

6 525

Triennal 2013-2015

6 543

6 755

Exécution 2010

5 616

Exécution 2011

6 360

Exécution 2012

6 711

PLF 2013

6 543

PLF 2014

6 534

Source : commission des finances du Sénat (d'après les données du RAP 2012 et du PAP 2014)

Les plafonds de crédits fixés à la présente mission par les deux précédentes lois de programmation pluriannuelle 4 ( * ) n'avaient jamais été respectés . Le fait que la loi de finances pour 2014 se conforme à la programmation pluriannuelle constitue donc une amélioration notable.

L'écart entre le plafond inscrit dans la programmation triennale et le montant proposé par le présent projet de loi de finances est principalement dû à la révision à la baisse de la prévision d'inflation pour 2013, de 1,3 % à 0,8 %, qui conditionne la revalorisation annuelle des pensions. Cela signifie qu'un ajustement à la baisse sur la revalorisation des pensions sera effectué en 2014 afin de compenser la surévaluation de la revalorisation effectuée le 1 er avril 2013.

De plus, la mesure de report de la date de revalorisation des pensions de retraite du 1 er avril au 1 er octobre - inscrite dans le projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites actuellement en cours d'examen par le Parlement - contribue à limiter la progression des crédits de la présente mission pour 2014.

B. POUR LA PREMIÈRE FOIS DEPUIS LA CRÉATION DE LA MISSION, UNE DIMINUTION RÉELLE DES CRÉDITS

Les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » se caractérisent par un très fort dynamisme. Entre 2006 et 2012, ces derniers ont augmenté de 47 % , soit 2,13 milliards d'euros .

La forte progression des subventions d'équilibre versées aux régimes de retraite entre 2006 et 2012 s'explique par différents facteurs :

- l' augmentation des prestations vieillesse versées par les régimes, à l'exception du régime des mines ;

- le faible dynamisme des cotisations , en raison de la baisse tendancielle du nombre de cotisants, en particulier pour les régimes fermés tel que le régime de retraite des mines ;

- la fin, en 2012, du dispositif de surcompensation spécifique aux régimes spéciaux de retraite. Ce mécanisme, instauré par la loi de finances n° 85-1403 du 30 décembre 1985, mettait principalement à contribution la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) et le régime des fonctionnaires civils de l'État. Il bénéficiait essentiellement aux régimes de la SNCF et des mines. Compte tenu des transferts trop importants entre régimes, la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites a prévu la disparition progressive de la surcompensation et son arrêt définitif au 1 er janvier 2012.

Graphique n° 5 : Évolution des crédits de la mission
« Régimes sociaux et de retraite » ouverts en LFI depuis 2006

Source : commission des finances du Sénat (d'après les données des PAP 2007 à 2014 de la présente mission)

La diminution des crédits en 2013 n'était qu'apparente car certaines mesures ont affecté le périmètre de la mission entre 2012 et 2013, en particulier la suppression des contributions exceptionnelles au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » 5 ( * ) et la fin de l'utilisation temporaire de la mission pour assurer le versement des pensions des retraités de la caisse de retraite des fonctionnaires de la collectivité de Mayotte (CRFM).

En 2014, même sans tenir compte de la diminution des produits exceptionnels de la caisse autonome de sécurité sociale dans les mines (CANSSM), les crédits de la mission diminuent bel et bien par rapport à 2013. Comme indiqué ci-dessus, cette baisse des subventions d'équilibre s'explique par la moindre revalorisation attendue des pensions de retraite, liée au ralentissement de l'inflation, et par le report de la date de revalorisation de six mois en 2014.

II. UNE ÉVOLUTION TOUJOURS CONTRASTÉE DES DIFFÉRENTES SUBVENTIONS D'ÉQUILIBRE

Comme indiqué ci-dessus, les crédits de la mission, après neutralisation d'une mesure de périmètre, diminuent de 1,6 % entre 2013 et 2014. Ce taux global d'évolution masque néanmoins des évolutions très différentes des dotations versées à chacun des régimes . Toutefois, la majorité des subventions d'équilibre de la mission sera en baisse en 2014.

A. UNE AUGMENTATION DES SUBVENTIONS D'ÉQUILIBRE DES RÉGIMES DE RETRAITE DE LA RATP, DES MINES ET DE LA SEITA

Comme l'illustre le tableau n° 3, trois régimes spéciaux - représentant 33,5 % des crédits de la mission - voient leur subvention d'équilibre augmenter entre 2013 et 2014 :

- la subvention versée au régime de retraite du personnel de la RATP enregistre une hausse de 3,1 % ;

- celle accordée au régime de retraite des mines connaît une progression de 2,7 % ;

- quant à la subvention dont bénéficie le régime de retraite de la SEITA , elle augmente de 1,5 %.

La progression de la subvention d'équilibre au régime de retraite du personnel de la RATP est principalement liée à la hausse des dépenses de prestations vieillesse (+ 2,5 % prévus en 2014). Votre rapporteur spécial note cependant un ralentissement de l'évolution des dépenses de pensions par rapport aux années précédentes (+ 5,8 % en 2012 et + 5,3 % en 2013). La réforme des régimes spéciaux des transports terrestres de 2008 avait en effet entraîné un surcroît de départs à la retraite en 2012.

S'agissant du régime de retraite des mines , l'augmentation de la subvention d'équilibre en 2014 n'est pas liée à l'évolution du coût des pensions - qui baisserait de 47 millions d'euros - mais à la fin du programme de cessions immobilières de la caisse nationale de sécurité sociale des mines (CANSSM). À partir de 2015, la trajectoire de la subvention d'équilibre sera totalement corrélée à l'évolution démographique du régime.

B. UNE DIMINUTION DES AUTRES DOTATIONS, DONT CELLE VERSÉE AU RÉGIME DE RETRAITE DE LA SNCF

En revanche , les subventions d'équilibre versées aux autres régimes de la mission enregistrent une baisse . Il en est ainsi pour :

- le régime de retraite des marins 6 ( * ) (- 1,7 %) ;

- la caisse des retraites des régies ferroviaires d'outre-mer (- 12,8 %) ;

- le régime de l' ORTF (- 11,5 %) ;

- le régime de retraite du personnel de la SNCF (- 0,8 %).

Pour la première fois depuis 2006, la subvention d'équilibre versée à la caisse de retraite et de prévoyance du personnel de la SNCF diminuerait en 2014 . Cette inversion de tendance résulte de la baisse des effectifs de pensionnés. Selon les données recueillies par la commission des comptes de la sécurité sociale, le régime compterait environ 269 000 bénéficiaires vieillesse en 2014 contre 284 000 en 2010. De plus, votre rapporteur spécial note la sous-consommation, de l'ordre de 1,5 %, de la dotation versée à la caisse au titre de l'exercice 2012.

S'agissant du régime des marins, comme en 2013, votre rapporteur spécial relève que la subvention d'équilibre de 2014 (825 millions d'euros) ne compensera que partiellement le déséquilibre entre les charges et les produits prévisionnels de l'établissement national des invalides de la marine (ENIM), ce qui conduira ce dernier à mobiliser son fonds de roulement à hauteur de 51 millions d'euros 7 ( * ) . Le montant des réserves de l'établissement (estimé à 125 millions d'euros au 31 décembre 2012) permettrait de faire face à cette opération. De plus, celle-ci est conforme au principe de contribution des opérateurs au redressement des comptes publics. Toutefois, les prévisions d'évolution du fonds de roulement de l'établissement indiquent que le niveau de trésorerie (72 millions d'euros fin 2014) se rapproche de son niveau « plancher ».

C. UN POIDS IMPORTANT DANS LES RECETTES DES RÉGIMES SPÉCIAUX

En dépit de l'évolution à la baisse de la majorité des subventions d'équilibre versées par l'État en 2014, ces dernières représenteraient encore une part substantielle des ressources des différents régimes : environ 60 % des budgets de la caisse autonome de la RATP et de la caisse autonome de la SNCF, les trois-quarts des produits de la branche vieillesse du régime des marins et 80 % des produits du régime des mines. Enfin, la subvention versée au régime de la SEITA représentera la quasi-totalité des ressources du régime.

Tableau n° 6 : Part de la subvention de l'État dans le budget des principales caisses de retraite relevant de la mission « Régimes sociaux et de retraites »

(en millions d'euros)

Subvention de l'État

Total des produits

Part de la subvention de l'État

Caisse autonome de la SNCF

3 362

5 364

62,7 %

Caisse autonome de la RATP

634

1 064

59,6 %

Régime de retraite des marins*

825

1 122

73,5 %

Fonds de retraite des mines

1 384

1 709

80,9 %

Retraités de la SEITA

168

169

99,4 %

* Total des recettes de la seule « section » vieillesse et action sanitaire et sociale de l'ENIM

Source : d'après les données du PAP 2014 de la présente mission

III. LA RÉFORME DES RETRAITES DE 2013 : UNE OCCASION MANQUÉE

Comme les années passées, votre rapporteur spécial s'est intéressé à l'impact des réformes des retraites de 2008 et de 2010 sur l'évolution des subventions d'équilibre versées par l'État aux principaux régimes spéciaux de la mission. Les informations qui lui ont été transmises confirment le constat dressé l'an passé d' un effet incertain et limité de ces deux réformes sur les besoins de financement des régimes spéciaux , en particulier des régimes de la SNCF et de la RATP.

Au vu des craintes exprimées à plusieurs reprises par votre rapporteur spécial et du bilan globalement négatif de la réforme de 2008 établi par la Cour des comptes dans son rapport sur la sécurité sociale de 2012, il est regrettable que la question des régimes spéciaux n'ait pas été attentivement examinée dans le cadre de la réforme des retraites actuellement en cours d'examen par le Parlement.

A. LES RÉSULTATS PEU CONCLUANTS DE LA RÉFORME DES RÉGIMES SPÉCIAUX DE 2008

Dans le cadre de son examen des régimes de retraite du personnel de la SNCF et de la RATP, la Cour des comptes a recommandé de « transmettre au Parlement des informations annuelles détaillées et actualisées sur la montée en charge des réformes des régimes de la SNCF et de la RATP » 8 ( * ) .

Les principes de la réforme des régimes spéciaux de 2008

Les régimes spéciaux de retraite de la SNCF, de la RATP, de l'Opéra de Paris, de la Comédie française, des industries électriques et gazières, des clercs et employés de notaires ont été réformés en 2008, dans le sens d'une harmonisation avec le régime de la fonction publique d'État .

Les principaux paramètres de convergence de ces régimes avec ceux de la fonction publique sont les suivants :

- le passage de 37,5 à 40 ans (en 2012), puis à 41 ans (en 2016) de la durée d'assurance pour bénéficier d'une retraite à taux plein ;

- l' indexation des pensions sur les prix (et non plus sur les salaires) à compter de 2009 ;

- l'introduction d'une décote et d'une surcote ;

- la suppression des bonifications (validations gratuites de trimestres) pour les nouveaux recrutements ;

- la suppression des « clauses-couperets », c'est-à-dire de la mise à la retraite automatique des agents atteignant leur âge d'ouverture des droits à la retraite.

Parallèlement à ces mesures, des dispositifs d'accompagnement ont été adoptés par la RATP et la SNCF. Celles-ci ont notamment pris la forme de création d'échelons supplémentaire, attribués de façon automatique, afin de majorer le salaire de fin de carrière, de l'intégration des primes pour le calcul de la retraite ou diverses mesures de majorations salariales en fin de carrière.

Votre rapporteur spécial a pu constater l' amélioration de la qualité des informations transmises par les caisses de retraite de la SNCF et de la RATP sur l'impact de la réforme de 2008.

Selon les projections réalisées par la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF ( cf . graphique ci-après), les mesures prises dans le cadre de la réforme de 2008 permettraient à l'État de verser une subvention d'équilibre inférieure d'environ 400 millions d'euros à celle qu'il aurait dû verser en l'absence de réforme . Toutefois la réforme n'a pas empêché la dotation de l'État de progresser de 12 % entre 2009 et 2013. Ce n'est qu'à partir de 2017, date à laquelle les mesures d'âge de la réforme de 2010 s'appliqueront aux régimes spéciaux, que la subvention d'équilibre diminuerait de façon significative.

Graphique n° 7 : Projection d'évolution des moyens d'équilibre du régime de retraite du personnel de la SNCF

Source : Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF (2013)

De plus, il convient de tenir compte des surcoûts de la réforme liés aux diverses mesures d'accompagnement prises en 2008. La SNCF évalue ces surcoûts à environ 418 millions d'euros en 2012 , en considérant à la fois les mesures salariales d'accompagnement et l'effet démographique lié à la suppression de la retraite d'office. Malheureusement, aucune estimation pour les années 2013 et suivantes n'a été transmise à votre rapporteur spécial.

S'agissant du régime de la RATP , la caisse de retraite du personnel de cette entreprise estime que la réforme de 2008 ne devrait produire ses premiers effets sur le montant des prestations versées qu'à compter de 2015 . De plus, ces effets seraient très limités - de l'ordre de quelques millions d'euros - sur la diminution du montant des prestations versées. Enfin, les mesures salariales d'accompagnement - dont la dernière entrera en vigueur le 1 er janvier 2014 9 ( * ) - entraîneraient un surcoût d'environ 14 millions d'euros par an pour la RATP à compter de 2014.

La réforme des régimes spéciaux de 2008 marque une première étape dans le processus de convergence des différents régimes de retraite. Celle-ci est nécessaire afin de renforcer l'équité et la soutenabilité du système de retraites. Pour autant, cette réforme s'est traduite par un coût conséquent pour la SNCF et la RATP, sans alléger le poids des subventions versées à ces régimes dans le budget de l'État.

B. UNE APPLICATION DE LA RÉFORME DE 2010 SEULEMENT À COMPTER DE 2017

La loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites a été transposée par voie réglementaire aux régimes spéciaux . Ainsi, ces régimes sont concernés par le relèvement de deux ans de l'âge légal de départ à la retraite (62 ans au lieu de 60 ans) et de l'âge de départ à taux plein (67 ans au lieu de 65 ans) prévu par cette réforme.

Néanmoins, ces mesures ne prendront effet qu'à partir de 2017 , afin de respecter le rythme de montée en charge de la réforme de 2008. Les accords conclus dans le cadre de la réforme des régimes spéciaux prévoient en effet que les mesures de rapprochement vers le régime de la fonction publique ne seront effectives qu'en 2016.

Ainsi, la caisse de retraite du personnel de la RATP estime que la réforme de 2010 ne devrait entraîner une baisse du montant global des prestations versées qu'à partir de 2019 .

Dans le contexte actuel des finances publiques, les effets des réformes de 2008 et de 2010 apparaissent à la fois trop longs à se produire et insuffisants.

C. LES RÉGIMES SPÉCIAUX : UNE QUESTION ÉLUDÉE PAR LA RÉFORME DE 2013

Le projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites, présenté par le Gouvernement le 18 septembre 2013, aurait pu constituer l'occasion d'aménager la réforme des régimes spéciaux de 2008 ou bien d'anticiper l'entrée en vigueur de certaines mesures , en particulier les mesures d'âges.

Sans pour autant exclure les régimes spéciaux de la réforme - les mesures générales de hausse du taux de cotisation d'assurance vieillesse et de report de la date de revalorisation des pensions s'appliqueront à ces régimes - ce projet de loi ne traite pas la question des inégalités persistantes entre assurés de différents régimes de retraite . Diverses dispositions demeurent plus favorables dans ces régimes par rapport au régime de la fonction publique et au régime général, par exemple en matière de modalités de calcul de la décote et d'avantages familiaux de retraite.

Enfin, votre rapporteur spécial regrette que l'étude d'impact du projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites ne contienne pas d'évaluation concernant les principaux régimes spéciaux . Seule une estimation globale de l'impact de la réforme sur les régimes spéciaux et sur le régime de la fonction publique est fournie. Selon ces données, la réforme permettrait de diminuer le déficit global de l'ensemble de ces régimes de 300 millions d'euros en 2014 et de 800 millions d'euros en 2020.

IV. LES SUITES DONNÉES À LA MISSION DE CONTRÔLE SUR LE RÉGIME DE RETRAITE ET DE SÉCURITÉ SOCIALE DES MARINS

Durant le premier semestre 2013, votre rapporteur spécial a conduit, en application de l'article 57 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), une mission de contrôle budgétaire sur le régime de retraite et de sécurité sociale des marins 10 ( * ) .

Ces travaux ont notamment permis de constater :

- le résultat globalement satisfaisant de la réforme de 2010 de l'Etablissement national des invalides de la marine ( ENIM ). Auparavant direction d'administration centrale, celui-ci est devenu un établissement public administratif de l'État. En tant qu'opérateur, l'établissement se conforme effectivement aux exigences en matière de maîtrise des dépenses de fonctionnement et des effectifs. Ce constat se confirme pour 2014 puisque le plafond d'emplois de l'ENIM serait à nouveau diminué de vingt équivalents temps plein (ETP) ;

- la nécessité de réduire la complexité et la rigidité des règles du régime - en particulier en matière de calcul des cotisations sociales - afin de rendre le régime plus efficient et les professions qui y sont affiliées plus attractives ;

- la persistance de certaines inégalités entre les assurés du régime spécial des marins et ceux des autres régimes (par exemple en matière de couverture des accidents du travail ou de protection des femmes enceintes) et au sein du régime des marins, en raison des conditions de travail et de la pénibilité, variables d'une profession maritime à l'autre.

A l'issue de cette mission, votre rapporteur spécial a formulé dix recommandations, qui, en application de l'article 60 de la LOLF, ont été adressées aux trois ministres de tutelle 11 ( * ) de l'ENIM.

Votre rapporteur spécial se félicite que l'une de ces recommandations , concernant la modernisation de la couverture des accidents du travail et des maladies professionnelles, ait d'ores-et-déjà été prise en compte dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 . L'article 53 du projet de loi de financement prévoit en effet l'extension au régime des marins des dispositions relatives à la faute inexcusable de l'employeur, conformément à la décision du Conseil constitutionnel du 6 mai 2011 12 ( * ) .

Concernant le partage des tâches entre l'ENIM et les services de l'État chargés de la mer - principalement les délégations à la mer et au littoral ( DML ) - les ministres ont répondu à votre rapporteur spécial qu'une nouvelle convention entre l'ENIM et les DML serait prochainement signée afin de « rénover le partenariat » entre ces entités. A ce stade, il n'est toutefois pas précisé si les DML effectueront un moins grand nombre de tâches pour le compte de l'ENIM. Votre rapporteur spécial suivra avec attention l'évolution des relations entre l'ENIM et les services de l'État ; celles-ci sont en effet cruciales pour le bon fonctionnement du régime et pour les professionnels du secteur maritime.

Les recommandations concernant la simplification des règles du régime - en particulier la réforme de la grille de salaires forfaitaires, la réduction du nombre de taux de cotisations patronales et la rationalisation des différents dispositifs d'exonération de charges sociales - devraient être plus difficilement suivies. Il a été répondu à votre rapporteur spécial qu'une modification de la grille de salaires forfaitaires devrait, en tout état de cause, être précédée par une phase de concertation avec les professionnels. Toutefois, rien n'indique qu'une telle concertation serait prochainement mise en place.

Enfin, les ministres ont déclaré partager le souci de simplification du nombre de taux de contributions patronales et des divers dispositifs d'exonération de charges sociales, exprimé par votre rapporteur spécial. Plus précisément, ils ont indiqué être « favorables à ce que l'efficacité des exonérations appliquées par le régime puisse être examinée au regard de leur nombre et de leur complexité ». Votre rapporteur spécial soutient le lancement d'une d'évaluation des allègements de charges spécifiques dont bénéficient les différents secteurs maritimes .

DEUXIÈME PARTIE
COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « PENSIONS »

Le compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » retrace les opérations relatives aux pensions civiles et militaires de retraite des agents de l'État et leurs avantages accessoires . Le CAS retrace également la contribution employeur invalidité et le versement des allocations temporaires d'invalidité (ATI). Il est structuré en trois programmes, représentant chacun une section du compte spécial :

- le programme 741 « Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d'invalidité » est consacré aux régimes de retraite et d'invalidité des fonctionnaires civils et militaires de l'État, gérés par le service des retraites de l'État (SRE), créé en 2009. Il représente près de 93 % des crédits du CAS ;

- le programme 742 « Ouvriers des établissements industriels de l'État » retrace les opérations du fonds spécial des pensions des établissements industriels de l'État (FSPOEIE) et du fonds gérant les rentes d'accident du travail des ouvriers civils des établissements militaires (RATOCEM). Ces deux fonds sont gérés par la Caisse des dépôts et consignations. Ils représentent seulement 3 % des crédits du CAS ;

- le programme 743 « Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et autres pensions » regroupe les pensions dues au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre (PMIVG) ainsi que des pensions financées par l'État au titre d'engagements historiques et de reconnaissance de la Nation. Sa part dans les crédits du CAS « Pensions » est en légère diminution, de 4,3 % en 2013 à 4 % en 2014.

Graphique n° 8 : Répartition des crédits du CAS « Pensions » en 2014

Source : commission des finances du Sénat (d'après les données du projet annuel de performances du CAS « Pensions » pour 2014)

Conformément à l'article 21 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), « le total des dépenses engagées ou ordonnancées au titre d'un compte d'affectation spéciale ne peut excéder le total des recettes constatées ». Ainsi, les dépenses du CAS « Pensions » doivent être strictement équilibrées par des recettes provenant des cotisations des salariés et des ministères employeurs, des transferts entre administrations publiques et régimes de retraite, ainsi que des versement réalisés par les agents au titre, par exemple, des validations de service ou de la prise en compte des périodes d'études.

Lors d'une précédente mission de contrôle budgétaire 13 ( * ) , votre rapporteur spécial a constaté que la création du CAS « Pensions » a marqué une étape importante vers une meilleure transparence des dépenses de pensions de l'État . Dans le cadre de l'examen du présent projet de loi de finances, votre rapporteur spécial a porté une attention particulière au perfectionnement de cet outil.

I. LE POIDS DES PENSIONS DANS LE BUDGET DE L'ÉTAT

A. UN RALENTISSEMENT DE LA PROGRESSION DES CHARGES DE PENSIONS EN 2014

Au total, les crédits du CAS « Pensions » augmentent en 2014 d'environ 382 millions d'euros, pour s'établir à 56,5 milliards d'euros , soit une hausse de 0,7 % .

Cette progression est moins importante que les années passées : en 2013 et 2012, les dépenses de pensions retracées dans le CAS avaient augmenté respectivement de 2,7 % et de 3,9 %. En moyenne, entre 1990 et 2012, les dépenses de pensions des fonctionnaires civils et militaires de l'État ont augmenté de 4,6 % par an en raison du rythme soutenu de progression de la pension moyenne (+ 2,7 % par an) et de celui des effectifs de retraités (+ 1,8 % par an).

Ainsi, on peut évaluer qu' entre 2006 et 2012, 26 % de la progression des dépenses du budget général de l'État est dû à l'accroissement du besoin de financement des pensions des fonctionnaires de l'État (soit 7 milliards d'euros).

Graphique n° 9 : Évolution des dépenses de pensions de la fonction publique d'État entre 1990 et 2012

(base 100 en 1990)

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexé au projet de loi de finances pour 2014

Le moindre dynamisme des dépenses de pensions en 2014 s'explique à la fois par la diminution du nombre de départs à la retraite et par la révision à la baisse de l'hypothèse d'inflation pour 2013, en fonction de laquelle sont revalorisées les pensions ( cf. infra ).

Malgré ce ralentissement, les dépenses de pensions continuent de représenter une part substantielle du budget de l'État (15 % en 2014) et ont une dynamique spontanée qu'il convient de compenser par des économies sur les autres dépenses . En effet, la norme « zéro valeur » ne s'applique pas aux charges de la dette et aux pensions.

B. UNE CONTRIBUTION DE L'ÉTAT AU CAS « PENSIONS » CONFORME À LA PROGRAMMATION TRIENNALE 2013-2015

Dans le présent projet de loi de finances, la contribution du budget général au CAS « Pensions » s'établit à 45,4 milliards d'euros , en hausse de 0,4 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2013 (au format du projet de loi de finances pour 2014).

Ce montant de contributions au CAS respecte la programmation fixée par la loi de programmation des finances publiques pour la période 2012-2017 14 ( * ) .

Tableau n° 10 : Évolution des contributions de l'État * au CAS « Pensions »

(en milliards d'euros)

2012

2013

2014

2015

Progression 2012-2015

LPFP 2012-2017

42,28

45,2

46,4

48,3

14,2 %

LFI

37,7

45,2

45,4

-

-

* Au titre des pensions des fonctionnaires de l'État et de ses opérateurs.

Source : commission des finances (d'après le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 et le présent projet de loi de finances)

La programmation triennale 2013-2015 prévoit en effet une évolution très dynamique de la contribution de l'État au CAS « Pensions », de l'ordre de 14,2 % entre 2012 et 2015 . Toutefois, cette estimation a été réalisée selon une hypothèse de progression de l'inflation de 1,75 % par an. Or, en 2013, l'inflation effective devrait être nettement inférieure (de l'ordre de + 0,8 %), tandis que la prévision d'inflation retenue par le présent projet de loi de finances pour 2014 s'établit à + 1,3 % 15 ( * ) . Par conséquent, les dépenses de pensions et les contributions de l'État au CAS devraient croître à un rythme moins soutenu qu'initialement prévu en 2014.

C. DES ENGAGEMENTS DE RETRAITE EN HAUSSE MAIS UNE DIMINUTION DU BESOIN DE FINANCEMENT ACTUALISÉ

1. Les engagements de l'État au titre des retraites

Le calcul des engagements de retraite portés par l'État est un moyen d'estimer l'effort financier de long terme que l'État devra supporter en matière de retraites , en évaluant la valeur actualisée des pensions qui seront versées aux actuels retraités et aux actifs. Les pensions futures des actifs sont évaluées sur la base de leur évolution de carrière probable, au prorata des années de services effectuées à la date de l'évaluation sur le nombre d'années de service au moment du départ à la retraite.

Au 31 décembre 2012, les engagements de retraite des fonctionnaires civils de l'État et des militaires se situaient dans une fourchette de 1 097 milliards d'euros à 1 498 milliards d'euros , selon le taux d'actualisation 16 ( * ) retenu. Les engagements de retraite des ouvriers des établissements industriels de l'État se situaient quant à eux entre 30,9 milliards d'euros et 39,2 milliards d'euros .

Tableau n° 11 : Montant des engagements de retraite en fonction du taux d'actualisation retenu au 31 décembre 2012

(en milliards d'euros 2012)

Taux d'actualisation

0,35 %

1,00 %

2,00 %

Engagements de retraite au titre des fonctionnaires de l'État

Dont retraités

961

867

750

Dont actifs

537

449

347

Total

1 498

1 316

1 097

Engagements de retraite au titre des ouvriers de l'État

Dont retraités

27

25

22

Dont actifs

12

11

9

Total

39

36

31

Total fonctionnaires de l'État et ouvriers

1 537

1 352

1 128

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexé au projet de loi de finances pour 2014

Il est important de noter la forte baisse du taux d'actualisation , en raison de la baisse des taux de rendement obligataires. En retenant le taux d'actualisation de 0,35 %, le montant total des engagements directs de retraite de l'État pour les fonctionnaires civils et militaires s'élève à 1 498 milliards d'euros fin 2012. Ceci correspond à une augmentation de 306 milliards d'euros par rapport à fin 2011 . Néanmoins, à taux d'actualisation inchangé - c'est-à-dire 1,62 % - le montant des engagements de retraite au titre des fonctionnaires de l'État diminuerait de 19 milliards d'euros.

2. Le besoin de financement à long terme

Le « besoin de financement actualisé » mesure les réserves qui seraient en théorie nécessaires aujourd'hui , en étant placés au taux d'intérêt du marché, pour faire face à l'ensemble des décaissements nécessaires pour combler les déficits anticipés . Il permet ainsi d'appréhender les efforts supplémentaires à réaliser pour faire revenir le régime à l'équilibre.

Les hypothèses de calcul sont similaires à celles utilisées par le Conseil d'orientation des retraites (COR) ; elles se fondent sur la masse des prestations et des cotisations anticipées à législation constante, sur la base de taux de cotisations inchangés. Néanmoins, l'exercice de projection impose de choisir un ensemble d'hypothèses démographiques et macroéconomiques nécessairement sujettes à incertitude.

Comme dans le cas des engagements de l'État, la valeur du « besoin de financement actualisé » du régime des fonctionnaires de l'État est très sensible au taux d'actualisation retenu, comme le montre le tableau ci-après.

Tableau n° 12 : Évaluation du besoin de financement actualisé
du régime de la fonction publique d'État

(en milliards d'euros 2012)

Taux d'actualisation

0,35 %

1,00 %

2,00 %

Horizon 2112

Horizon 2050

Horizon 2112

Horizon 2050

Horizon 2112

Horizon 2050

Fonctionnaires de l'État

431

190

322

166

219

137

Ouvriers des établissements industriels de l'État

-

44

-

39

-

33

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexé au projet de loi de finances pour 2014

Sur la base d'un taux d'actualisation médian de 0,35 %, le besoin de financement, actualisé à cent ans 17 ( * ) , s'élève à 431 milliards d'euros au 31 décembre 2012 , en diminution de 74 milliards d'euros par rapport au besoin de financement actualisé au 31 décembre 2011 , lequel s'élevait à 505 milliards d'euros. La révision à la baisse du besoin de financement s'explique par l'augmentation du taux de la contribution employeur de l'État, de 68,59 % en 2012 à 74,28 % en 2013 . En effet, le dernier taux de contribution employeur est utilisé pour toute la durée de projection.

Pour le régime spécial des ouvriers d'État, le besoin de financement actualisé s'élève à 44 milliards d'euros à l'horizon 2050, sur la base d'un taux d'actualisation de 0,35 %.

Le graphique ci-après illustre l'évolution annuelle de la masse des prestations, pour le régime des fonctionnaires civils et militaires de l'État , et décompose son financement entre les cotisations salariales et les contributions des employeurs, à droit constant, ainsi que le besoin supplémentaire de financement annuel. Il indique également le besoin de financement actualisé cumulé sur la période de projection 2013-2112. Les effets de la hausse du taux de contribution employeur de l'État sont nettement visibles. Tandis que la projection du besoin de financement effectuée l'année passée indiquait un montant de contribution employeur fluctuant autour de 35 milliards d'euros, celui-ci dépasse désormais les 40 milliards d'euros.

Tableau n° 13 : Besoin de financement actualisé des retraites du régime des fonctionnaires civils et militaires de l'État

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexé au projet de loi de finances pour 2014

II. LA JUSTIFICATION DES CRÉDITS PAR PROGRAMME

Tous programmes confondus, les crédits du CAS « Pensions » progresseraient de 0,7 % en 2014. L'évolution par programme est cependant contrastée . Ainsi seuls les crédits destinés aux pensions civiles et militaires de retraite progresseraient en 2014 (de l'ordre de 1,0 %), tandis que les crédits des programmes 742 « Ouvriers des établissements industriels de l'État » et 743 « Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et autres pensions » diminueraient, comme l'indique le tableau ci-après.

Tableau n° 14 : Évolution du coût des pensions civiles et militaires de retraite

et montant des crédits du compte spécial « Pensions »

(en millions d'euros)

Intitulé du programme ou de l'action

Crédits de paiement

Part des crédits de la mission

Exécution 2012

Ouverts en LFI pour 2013

Demandés pour 2014

Variation 2013/2014

Programme 741 « Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d'invalidité »

50 115,45

51 799,00

52 302,50

+ 1,0 %

92,6 %

Action 1 « Fonctionnaires civils relevant du code des pensions civiles et militaires »

40 179,37

41 635,00

42 051,10

+ 1,0 %

74,4 %

Action 2 « Militaires relevant du code des pensions civiles et militaires de retraite »

9 793,40

10 020,00

10 107,40

+ 0,9 %

17,9 %

Action 3 « Allocations temporaires d'invalidité »

142,69

144,00

144,00

0,0 %

0,3 %

Programme 742 « Ouvriers des établissements industriels de l'État »

1 878,21

1 915,23

1 905,20

- 0,5 %

3,4 %

Action 1 « Prestation vieillesse et invalidité »

1 809,11

1 844,87

1 836,50

- 0,5 %

3,3 %

Action 2 « Cessations anticipées d'activité »

0,00

0,00

0,00

0,0 %

0,0 %

Action 3 « Autres dépenses spécifiques »

1,16

1,25

1,60

+ 28,0 %

0,0 %

Action 4 « Gestion du régime »

8,21

8,11

8,20

+ 1,1 %

0,0 %

Action 5 « Rentes accidents du travail des ouvriers civils des établissements militaires »

59,73

61,00

58,90

- 3,4 %

0,1 %

Programme 743 « Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et autres pensions »

2 437,61

2 391,44

2 280,53

- 4,6 %

4,0 %

Action 1 « Reconnaissance de la Nation »

818,61

839,76

808,70

- 3,7 %

1,4 %

Action 2 « Réparation »

1 573,07

1 504,00

1 426,03

- 5,2 %

2,5 %

Action 3 « Pensions d'Alsace-Lorraine »

15,37

16,70

15,90

- 4,8 %

0,0 %

Action 4 « Allocation de reconnaissance des anciens supplétifs »

17,28

17,50

16,20

- 7,4 %

0,0 %

Action 5 « Pensions des anciens agents du chemin de fer franco-éthiopien »

0,07

0,06

0,06

0,0 %

0,0 %

Action 6 « Pensions des sapeurs-pompiers et anciens agents de la défense passive victimes d'accidents »

12,74

12,89

13,17

+ 2,2 %

0,0 %

Action 7 « Pensions de l'ORTF »

0,47

0,52

0,46

- 11,5 %

0,0 %

Total du CAS « Pensions »

54 431,27

56 105,67

56 488,22

+ 0,7 %

100,0 %

Source : rapport annuel de performance (RAP) annexé au projet de loi de règlement pour 2012 projet annuel de performances (PAP) annexé au projet de loi de finances pour 2014

A. UNE MOINDRE PROGRESSION DES CRÉDITS DESTINÉS AUX PENSIONS CIVILES ET MILITAIRES (PROGRAMME 741)

Comme indiqué précédemment, la hausse des crédits destinés au financement des pensions civiles et militaires et des allocations temporaires d'invalidité serait moins importante en 2014 que les années précédentes. Cette plus faible progression des dépenses de pensions, qui s'explique en partie par les effets de la réforme des retraites de 2010, permettra de stabiliser les taux de contribution employeur de l'État, sans fragiliser le fonds de roulement du CAS.

1. La stabilisation des taux de contributions employeurs de l'État

Dans un contexte de forte augmentation des dépenses de pensions ces dernières années ( cf . supra), les taux des contributions employeurs de l'État ont nettement progressé afin d'assurer l'équilibre du CAS « Pensions ». Pour les fonctionnaires civils, le taux de la contribution versée par l'État a progressé de 2,9 points par an en moyenne entre 2006 et 2014, tandis que le taux de la contribution au titre des pensions militaires a augmenté de 3,2 points en moyenne par an au cours de cette même période.

Tableau n° 15 : Évolution des taux des contributions employeurs de l'État

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Au titre des pensions civiles

49,90 %

50,74 %

55,71 %

58,47 %

62,14 %

65,39 %

68,59 %

74,28 %

74,28 %

Au titre des pensions militaires

100,00 %

101,05 %

103,50 %

108,39 %

108,63 %

114,14 %

121,55 %

126,07 %

126,07 %

Au titre des ATI*

0,30 %

0,31 %

0,31 %

0,32 %

0,33 %

0,33 %

0,33 %

0,32 %

0,32 %

* ATI : allocations temporaires d'invalidité

Source : PAP 2014

Pour la première fois depuis 2006, le présent projet de loi de finances prévoit une stabilisation des taux des contributions employeurs, aussi bien pour les militaires (au taux de 126,07 %) que pour les fonctionnaires civils (au taux de 74,28 %) . Cette interruption dans la progression des taux de contributions employeurs de l'État est rendue possible à la fois par la moindre progression des dépenses - dont les principaux facteurs d'explication sont développés ci-après - ainsi que par les hausses prévues du taux des cotisations salariales versées par les fonctionnaires .

Dans le cadre de la réforme des retraites de 2010, un alignement progressif du taux de cotisation salariale des fonctionnaires sur celui des salariés du secteur privé a été prévu. Ainsi, entre 2012 et 2020, le taux de cotisation acquitté par les fonctionnaires est relevé de 0,27 point chaque année afin d'atteindre le taux en vigueur pour les régimes de droit commun.

En outre, la hausse de cotisations salariales prévue par le décret n° 2012-847 du 2 juillet 2012 relatif à l'âge d'ouverture du droit à pension vieillesse (dit décret « carrières longues ») concerne également les agents de la fonction publique et les militaires. Aussi, à la hausse des taux prévue par le décret n° 2010-1749 du 30 décembre 2010, s'ajoute une augmentation de 0,25 point à raison de 0,10 point dès le 1 er novembre 2012, puis de 0,05 point par an. Le taux de cotisation salariale des fonctionnaires atteint ainsi 8,76 % en 2013 (contre 10,80 % pour les salariés du secteur privé affiliés au régime général).

Tableau n° 16 : Évolution du taux de cotisation vieillesse acquitté par les fonctionnaires civils et militaires de l'État

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2020

Taux de cotisations salariales hors augmentation

7,85%

7,85%

7,85%

7,85%

7,85%

7,85%

7,85%

7,85%

7,85%

Taux de cotisations salariales suite au décret du 30 décembre 2010

7,85%

8,12%

8,39%

8,66%

8,93%

9,20%

9,47%

9,74%

10,55%

Incidence financière de l'augmentation du taux de cotisation salariale de la réforme 2010 (hors effet du décret du 2 juillet 2012) (en Md€)

-

0,17

0,33

0,49

0,66

0,82

0,99

1,15

1,65

Taux de cotisations salariales suite aux décrets du 30 décembre 2010 et du 2 juillet 2012

7,85%

8,12%

8,41%

8,76%

9,08%

9,40%

9,72%

9,99%

10,80%

Incidence financière des augmentations de taux de la réforme 2010 et du décret du 2 juillet 2012 (en Md€)

-

0,17

0,34

0,55

0,75

0,94

1,14

1,30

1,80

Source : service des retraites de l'État (réponse au questionnaire budgétaire pour 2014 adressé par votre rapporteur spécial)

Enfin, le Gouvernement a annoncé, dans le cadre de la réforme du système de retraites, une hausse du taux des parts salariales et patronales des cotisations d'assurance vieillesse de 0,3 point chacune d'ici 2017. Cette mesure sera aménagée de façon spécifique pour la fonction publique : d'une part, l'État ne sera pas concerné par cette hausse dans la mesure où il verse une contribution d'équilibre, qui n'est pas assimilable à une cotisation, d'autre part, la hausse des cotisations salariales sera lissée différemment dans le temps pour les fonctionnaires civils et militaires ( cf . encadré). Au final, en tenant compte des diverses hausses prévues , le taux de cotisation vieillesse acquittée par les fonctionnaires civils et militaires atteindra 9,14 % en 2014 .

L'application de la hausse des cotisations salariales prévue par la réforme des retraites de 2013 dans la fonction publique

Comme les salariés du secteur privé, les fonctionnaires et les assurés des régimes spéciaux verront leurs cotisations vieillesse augmenter de 0,3 % d'ici 2017 mais selon des modalités différentes.

S'agissant des fonctionnaires, la hausse de cotisation salariale sera échelonnée différemment dans le temps. En application de la loi portant réforme des retraites de 2010, il est prévu que les taux de cotisation vieillesse des fonctionnaires augmentent en effet chaque année de 0,27 % par an jusqu'en 2020. De plus, les fonctionnaires sont concernés par l'augmentation de 0,25 % entre 2012 et 2016, prévue par le décret du 2 juillet 2012 instaurant la retraite à 60 ans au titre des carrières longues.

Afin de lisser l'impact cumulé de ces augmentations de cotisation sur le pouvoir d'achat des fonctionnaires, le Gouvernement a indiqué que la hausse de 0,3 % entre 2014 et 2017 se décomposerait de la façon suivante pour les fonctionnaires :

- une hausse de 0,06 % en 2014 ;

- des hausses de 0,08 % les trois années suivantes .

Ainsi, le taux de cotisation salariale des fonctionnaires sera de 9,14 % en 2014 et atteindra 11,10 % en 2020 , soit un niveau équivalent à celui des salariés du secteur privé (en tenant compte des cotisations au régime de base et au régime complémentaire obligatoire).

2. La préservation du fonds de roulement du CAS « Pensions »

Lors d'une audition 18 ( * ) devant nos collègues de l'Assemblée nationale, le ministre de l'économie et des finances, Pierre Moscovici, a indiqué que la stabilisation des taux des contributions employeurs de l'État en 2014 ne devrait pas empêcher le maintien du solde cumulé du CAS « Pensions » au-dessus de 1 milliard d'euros .

Afin de couvrir les aléas de prévision liés au comportement de départ à la retraite des agents, ainsi que le décalage des encaissements et des décaissements, le CAS « Pensions » a été doté à sa création d'un fonds de roulement de 1 milliard d'euros (correspondant à environ une semaine de dépenses). Les déséquilibres infra-annuels du CAS pouvant atteindre 700 millions d'euros en exécution, 1 milliard d'euros semble en effet constituer un niveau minimum , pour faire face aux délais d'encaissements et aux éventuels retards de versement des ministères .

À l'issue de la mission de contrôle budgétaire précitée relative au CAS « Pensions », votre rapporteur spécial s'était alarmé du faible niveau prévisionnel du solde cumulé du CAS fin 2012 (586 millions d'euros). Grâce à la hausse des taux de contributions employeurs de l'État, le fonds de roulement s'est finalement établi à 777 millions d'euros en fin d'exercice 2012 . Il devrait atteindre environ 1 milliard d'euros à la fin de l'exercice 2013 .

Le présent projet de loi de finances prévoit quant à lui un excédent de 769 millions d'euros du CAS « Pensions » au titre de l'exercice 2014. Ainsi, le fonds de roulement du compte devrait se maintenir aux alentours de 1 milliard d'euros, comme préconisé par votre rapporteur spécial.

Tableau n° 17 : Évolution du solde cumulé du CAS « Pensions » en fin d'année

(en milliards d'euros)

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013 (p)

2014

(p)

Solde cumulé du CAS Pensions

1,231

0,426

0,800

1,146

1,253

1,012

0,777

= 1,0

= 1,0

Source : service des retraites de l'État (réponse au questionnaire budgétaire pour 2014 adressé par votre rapporteur spécial)

Enfin, votre rapporteur spécial appelle à nouveau l'attention du Gouvernement sur la nécessité d'adopter rapidement les décrets prévoyant des majorations de retard en cas de non-versement dans les délais des contributions au CAS . Même si aucun retard dans le paiement par les ministères des contributions mensuelles n'a été constaté en 2013, l'adoption de ces décrets - en cours d'examen au niveau interministériel depuis le début de l'année 2013 - demeure nécessaire ; ces retards de versement, s'ils se produisaient, pourraient en effet affecter le fonds de roulement du CAS.

3. Les effets des dernières réformes sur le régime de retraite de la fonction publique d'État
a) La réforme des retraites de 2010 : un impact financier estimé à 1,3 milliard d'euros en 2014

La loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites a conduit à l'introduction de nouveaux paramètres dans le régime de retraite des fonctionnaires de l'État :

- le relèvement progressif de l'âge légal de départ à la retraite de 60 ans à 62 ans et de l'âge de départ à taux plein (c'est-à-dire sans décote sur le montant de la pension) de 65 ans à 67 ans ;

- des mesures spécifiques de convergence vers le régime général, avec notamment la mise en extinction progressive du départ anticipé des fonctionnaires parents de trois enfants après quinze années de carrière et la hausse du taux de cotisation salariale ( cf. supra ).

Immédiatement après son adoption, la réforme avait provoqué une augmentation du nombre de départs à la retraite (15 000 départs anticipés de fonctionnaires parents de trois enfants ou plus enregistrés en 2011). Toutefois, depuis 2012, les prévisions de départ à la retraite sont revues à la baisse. En 2013, parmi les fonctionnaires civils, 54 500 devraient avoir lieu contre 61 800 initialement prévus. En 2014, 52 500 départs sont attendus , soit 5 000 de moins que les prévisions réalisées un an plus tôt.

S'agissant de l' âge moyen de départ à la retraite - correspondant à l'âge de radiation des cadres pour les fonctionnaires - celui-ci a augmenté en 2012. Pour les fonctionnaires civils de l'État - sans tenir compte des fonctionnaires de La Poste et de France Télécom - il atteint 60 ans et 8 mois en 2012 , ce qui correspond à une différence d'environ quinze mois avec l'âge moyen de départ des salariés du secteur privé. Cet écart est principalement dû aux départs avant 60 ans des agents issus des « catégories actives » de la fonction publique d'État 19 ( * ) . Pour les personnels militaires, l'âge moyen de départ à la retraite reste stable aux alentours de 46 ans et 6 mois.

Comme l'illustre le tableau ci-après, le recul de l'âge d'ouverture des droits à la retraite et de l'âge d'annulation de la décote devrait avoir un impact financier significatif sur le régime en 2014 et les années suivantes . Les économies liées aux mesures d'âge s'élèveraient à 790 millions d'euros en 2014 et à plus d'1 milliard d'euros en 2015. Le coût des mesures de convergence public-privé devrait quant à lui peu à peu se réduire pour atteindre 40 millions d'euros en 2015.

Tableau n° 18 : Impact financier de la réforme de 2010 sur le régime de retraite des fonctionnaires civils et militaires de l'État

(en milliards d'euros courants)

Réalisé

Projections actualisées

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Impacts en dépense

0,11

-0,08

-0,37

-0,67

-1,01

-1,36

Mesure d'âge

(accélérée par la LFSS 2012)

-0,05

-0,33

-0,56

-0,79

-1,05

-1,31

Mesures de convergence public-privé

0,17

0,24

0,18

0,12

0,04

-0,05

Impacts en recette

0,16

0,32

0,48

0,65

0,81

0,97

Alignement taux de cotisation

0,16

0,32

0,48

0,65

0,81

0,97

Total FPE

0,05

0,40

0,85

1,32

1,81

2,32

Lecture : pour 2011, la réforme a contribué à la situation financière du régime pour + 0,05 milliard d'euros, dont + 0,16 milliard d'euros de recettes supplémentaires et - 0,11 milliard d'euros lié à des dépenses supplémentaires.

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexé au projet de loi de finances pour 2014

Au total, pour le seul régime des fonctionnaires de l'État, le gain net lié à la réforme de 2010 devrait atteindre 1,32 milliard d'euros en 2014 et 1,81 milliard d'euros en 2015 .

Par ailleurs, votre rapporteur spécial souligne que l'élargissement du dispositif de retraite anticipée pour carrière longue , décidé par le Gouvernement en juillet 2012, représentera un coût de 85 millions d'euros pour le régime de la fonction publique d'État en 2014 (pour 1 300 bénéficiaires). Le coût de cette mesure se stabiliserait aux alentours de 200 millions d'euros par an en 2017. Cette dépense est entièrement financée par la hausse des cotisations vieillesse prévue par le décret du 2 juillet 2012 20 ( * ) .

b) L'estimation de l'impact de la réforme de 2013 sur le régime de retraite de la fonction publique d'État

Le projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites, en cours d'examen par le Parlement, prévoit un certain nombre de mesures générales s'appliquant au régime de retraite des fonctionnaires civils et militaires de l'État. Il en est ainsi de la hausse du taux de cotisation d'assurance vieillesse (uniquement pour la part salariale), du report de la date de revalorisation des pensions du 1 er avril au 1 er octobre et de l' allongement de la durée d'assurance à compter de 2020 .

Votre rapporteur spécial réitère le constat dressé dans le cadre de l'examen de la mission « Régimes sociaux et de retraite » : l'étude d'impact du projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites ne distingue pas l'impact financier de la réforme selon les différents régimes spéciaux. Elle fournit uniquement une évaluation globale pour l'ensemble des régimes subventionnés par l'État . Ainsi, le déficit global du régime de la fonction publique d'État, de la RATP, de la SNCF, des mines et des marins serait réduit de 300 millions d'euros en 2014 et de 800 millions d'euros à l'horizon 2020 .

Tableau n° 19 : Impact financier de la réforme de 2013 sur les régimes spéciaux *

(en milliards d'euros 2011)

2014

2020

2030

2040

Solde « apparent » avant réforme

- 5,9

- 8,7

- 7,7

- 4,4

Solde « apparent » après réforme

- 5,6

- 7,9

- 6,3

- 2,1

Équilibrage par contributions et subventions de l'État

+ 5,6

+ 7,9

+ 6,3

+ 2,1

* Régimes de la fonction publique d'État, de la RATP, de la SNCF et des mines.

Source : étude d'impact du projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites

Tout en étant conscient de la montée en charge progressive, jusqu'en 2020, des mesures de convergence entre secteur public et secteur privé, votre rapporteur spécial déplore que la situation spécifique du régime de retraite des fonctionnaires de l'État n'ait pas été prise en compte dans le projet de loi portant réforme des retraites proposé par le Gouvernement le 18 septembre 2013.

B. LA STABILISATION DES CRÉDITS DESTINÉES AU RÉGIME SPÉCIAL DES OUVRIERS D'ÉTAT (PROGRAMME 742)

Le programme 742 « Ouvriers des établissements industriels de l'État » retrace les dépenses et recettes du Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'État (FSPOEIE) et du fonds des rentes d'accidents du travail des ouvriers civils des établissements militaires (RATOCEM). Toutefois, 96 % des crédits du programme concernent les dépenses de pensions des ouvriers d'État .

Alors que la prévision du nombre total de pensionnés s'élève à 103 284 au 31 décembre 2014, le FSPOEIE est caractérisé par un déficit démographique important , le ratio étant de 0,39 cotisant pour un pensionné . Cette situation explique que les cotisations des salariés et des employeurs ne suffisent pas à équilibrer les charges de pensions.

Le montant des dépenses du FSPOEIE, soit 1,84 milliard d'euros , est en très légère baisse par rapport à la loi de finances initiale pour 2013 (- 0,5 %), en raison de deux principaux facteurs :

- une prévision d'exécution des dépenses en 2013 plus faible que prévu en loi de finances initiale. Il apparaît donc que la hausse des crédits destinés au FSPOEIE en 2013 (+ 4,8 % par rapport à 2012) a été surestimée. Les effectifs de pensionnés sont en effet moins importants que prévus dans la budgétisation 2013 ;

- de la moindre revalorisation des pensions prévue en 2014 (+ 0,9 %), en raison du ralentissement de l'inflation, et des effets du report de la date de revalorisation des pensions du 1 er avril au 1 er octobre 2014.

Afin de contenir la hausse de la subvention de l'État, le taux de la cotisation employeur au titre des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'État a régulièrement augmenté . Le taux a ainsi été porté à 30 % en 2010, 33 % en 2011 et sera légèrement augmenté à 33,87 % à compter du 1 er novembre 2014 (en tenant compte de la hausse de cotisation vieillesse prévue dans le cadre de la réforme des retraites de 2013). Au total, le montant des contributions patronales s'élèverait à 387 millions d'euros en 2014, soit une légère diminution par rapport à 2013. Cette baisse est due à l'érosion des effectifs de cotisants du régime : depuis 1990 ces derniers ont diminué en moyenne de 3,8 % par an, avec une accélération depuis 2009 à 5,4 % de cotisants en moins par an.

Tableau n° 20 : Évolution de la subvention d'équilibre du budget général et du taux de la contribution employeur au FSPOEIE

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données du PAP 2014)

Compte tenu de l'évolution démographique du régime, conduisant à l'érosion de son assiette de cotisations, la subvention d'équilibre de l'État continuera de constituer la principale ressource du régime des ouvriers d'État. Elle s'élèvera à 1,25 milliard d'euros en 2014 , soit une baisse de 67 millions d'euros par rapport au montant inscrit en la loi de finances initiale pour 2013.

C. DES CRÉDITS DE PENSIONS MILITAIRES D'INVALIDITÉ ET DES VICTIMES DE GUERRE EN DIMINUTION CONSTANTE (PROGRAMME 743)

Par rapport aux deux autres programmes du CAS « Pensions », le programme 743 présente une particularité. Ses dépenses ne sont équilibrées par aucune cotisation dans la mesure où il finance :

- des régimes « éteints » sur le plan démographique, c'est-à-dire qui ne comptent plus aucun actif (pensions des ministres des cultes d'Alsace Moselle, régime des chemins de fer franco-éthiopiens, ORTF) ;

- des prestations ne donnant lieu à aucune cotisation (pensions d'anciens combattants, traitements attachés à la Légion d'honneur et à la médaille militaire, pensions de victimes de guerre ou d'actes de terrorisme).

Ainsi, les dépenses prévues pour 2014 sont intégralement compensées par la subvention d'équilibre de l'État qui s'élève à 2,28 milliards d'euros , soit une baisse de 11 millions d'euros par rapport à 2013.

Le financement de ces pensions et allocations provient de versements de différents programmes du budget général 21 ( * ) , tels que le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » ou le programme 195 « Régimes de retraite des mines, de la SEITA et divers ». Les crédits versés s'inscrivent dans les objectifs et les indicateurs du programme d'où ils proviennent ; il n'existe donc pas d'objectifs et d'indicateurs spécifiques au programme 743.

L'action la plus importante du programme concerne les réparations dues au titre du code des pensions militaires d'invalidité et victimes de guerre pour un montant de 1,4 milliard d'euros , répartis entre environ 280 000 pensionnés 22 ( * ) . La diminution progressive du nombre de pensionnés conduit à une baisse d'environ 80 millions d'euros des dépenses en 2014 (- 5,2 %).

Tableau n° 21 : Évolution des crédits de l'action « Réparation » ouverts en LFI destinés au financement des pensions militaires et d'invalidité

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données des PAP 2008 à 2014)

S'agissant de l'action retraçant les dépenses relatives à la retraite du combattant et aux traitements attachés à la Légion d'honneur et à la médaille militaire , ses crédits sont en baisse de 3,7 % par rapport à 2013. Comme pour les autres actions du programme, cette diminution s'explique par l'évolution démographique des bénéficiaires.

Les crédits dédiés au financement des traitements des membres de la Légion d'honneur et des personnes décorées de la Médaille militaire demeurent stables (763 000 euros). Lors de la mission de contrôle budgétaire précitée relative au CAS « Pensions », votre rapporteur spécial avait constaté que le coût de gestion des dossiers pour ces traitements était aujourd'hui supérieur aux sommes versées 23 ( * ) . Votre rapporteur spécial regrette qu'aucune suite n'ait été donnée à ses propositions de réforme, notamment en ce qui concerne l'affectation de la totalité de ces traitements à la société d'entraide des membres de la Légion d'honneur et à la société nationale d'entraide de la médaille militaire.

D. UN NOUVEAU DISPOSITIF DE MESURE DE LA PERFORMANCE

Le dispositif de performance des programmes 741 « Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d'invalidité » et 742 « Ouvriers des établissements industriels de l'État » est modifié dans le projet de loi de finances pour 2014.

Tout d'abord, l'indicateur « coût unitaire d'une primo-liquidation », rattaché aux dépenses de pensions civiles et militaires, est remplacé par un nouvel indicateur intitulé « coût de gestion d'un ressortissant du régime des pensions civiles et militaires de retraite ». Cet indicateur rapporte, pour une année considérée, le coût complet de gestion du régime des pensions civiles et militaires de retraites au nombre de ses ressortissants. Il consolide ainsi les données du service des retraites de l'État (SRE) - chargé de l'enregistrement des droits à pension, de leur contrôle et de leur liquidation - et les données relatives aux coûts supportés par les centres de gestion des retraites, qui sont en charge du paiement des pensions.

Votre rapporteur spécial se félicite de la mise en place de ce nouvel indicateur, qui correspond à l'une des recommandations formulées dans le cadre de la mission de contrôle budgétaire précitée sur le CAS « Pensions ». Après plusieurs années de travaux, cet indicateur devrait permettre de disposer d'une vision plus large de l'efficience du régime, sans être influencé par les évolutions des comportements de départ à la retraite.

En effet, l'un des principaux défauts de l'indicateur « coût unitaire d'une primo-liquidation » résidait dans le fait qu'il était fortement influencé par le nombre de départs en retraite. Si le nouvel indicateur doit être salué, il est regrettable qu'il n'inclue pas le coût d'intervention, en amont, des ministères employeurs . Votre rapporteur spécial espère que les difficultés méthodologiques pour inclure ces coûts seront prochainement surmontées. Le tableau ci-après présente le résultat pour 2012 et les prévisions concernant ce nouvel indicateur ; ainsi la cible fixée pour 2014 est un coût moyen de gestion par ressortissant de 15,20 euros.

Tableau n° 22 : coût de gestion d'un ressortissant du régime des pensions civiles et militaires de retraite (PCMR)

(en euros)

2012 Réalisation

2013 Prévision actualisée

2014 Prévision

Coût de gestion d'un ressortissant du régime PCMR

15,4

15,3

15,2

Source : PAP 2014

Les autres modifications du dispositif de performance proposées dans le cadre du présent projet de loi de finances sont les suivantes :

- pour les programmes 741 et 742, les indicateurs relatifs à l'âge moyen à la date de radiation des cadres, à la durée moyenne de cotisation et à la part des agents concernés par la décote et la surcote sont supprimés en tant qu'indicateurs de performance . Le motif invoqué est le fait que ces indicateurs ne reflètent pas le résultat d'actions menées par le responsable de programme ; celui-ci ne dispose en effet d'aucun levier pour influer sur leur évolution. Les informations fournies par ces indicateurs demeurent toutefois renseignées dans les documents budgétaires en tant qu' « indicateurs de contexte ». Votre rapporteur spécial souligne l'importance de continuer de faire figurer ces informations dans les documents budgétaires , compte tenu de leur importance pour mesurer les effets des réformes des retraites ;

- pour le programme 742, l'indicateur « dépenses de gestion pour 1 euro de pension » est renommé « dépenses de gestion pour 100 euros de pension ». Cette nouvelle dénomination permet une lecture plus claire de l'indicateur.

III. LES RELATIONS ENTRE L'ÉTAT ET LA CNRACL

Le programme 741 « Pensions civiles et militaires de retraite » du CAS « Pensions » retrace les flux financiers entre l'État et la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), au tire de la neutralisation des conséquences financières du transfert de postes de fonctionnaires de l'État vers les collectivités territoriales , dans le cadre de l'acte II de la décentralisation.

Dans le contexte de dégradation de la situation financière de la CNRACL depuis 2010, votre rapporteur spécial a souhaité analyser les conséquences du dispositif de neutralisation mis en place en 2010 pour cette caisse et pour l'État.

A. LA FRAGILISATION DE LA SITUATION FINANCIÈRE DE LA CNRACL

Autrefois excédentaire, la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) - qui gère le régime d'assurance vieillesse et invalidité des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers - est en situation de déficit depuis 2010 .

En 2012, une nouvelle dégradation du solde de la caisse a pu être évitée uniquement grâce au transfert de 690 millions d'euros, prélevés sur les réserves du fonds relatif à l'allocation temporaire d'invalidité (ATIACL) et du fonds de compensation de la cessation progressive d'activité (FCCPA), aux hausses de cotisations prévues dans le cadre de la réforme des retraites de 2010 et de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.

Malgré tout, le déficit de la CNRACL devrait atteindre 420 millions d'euros en 2013 .

Tableau n° 23 : Évolution du déficit de la branche vieillesse de la CNRACL

(en millions d'euros)

2010

2011

2012

2013

2014 (p)

- 491

- 375

- 14

- 420

- 205

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de la commission des comptes de la sécurité sociale)

Les raisons de la dégradation des résultats de la CNRACL sont multiples.

La première d'entre elles réside dans la dégradation du ratio démographique , entre le nombre de cotisants et le nombre de pensionnés du régime. Celui-ci est passé de 4,5 en 1990, à 2,5 en 2003, puis 2,16 en 2012. En effet, l'effectif de cotisants a progressé d'environ 20 % entre 2003 et 2012 alors que sur la même période, celui des pensionnés a augmenté de plus de 46 %. Dès lors, l'évolution des ressources de la CNRACL est moins dynamique que celle de ses dépenses, conduisant à une dégradation de sa situation financière. À titre d'illustration, en 2012, les cotisations reçues par la CNRACL ont connu une hausse de 2,8 % alors que le montant des prestations servies s'est accru de 6,1 %. Malgré tout, la caisse bénéficie d'une situation démographique relativement favorable en comparaison aux autres régimes . Son ratio démographique (2,16 en 2012) reste en effet supérieur à celui du régime général, proche de 1,40.

Le deuxième facteur expliquant la situation déficitaire de la CNRACL est le poids des transferts réalisés au titre de la solidarité, au profit d'autres régimes de retraite dont la situation démographique est plus dégradée 24 ( * ) . La CNRACL compte parmi les principaux régimes débiteurs en ce qui concerne l'assurance vieillesse. Elle a versé 2,2 milliards d'euros au titre de la compensation inter-régimes en 2010 et 1,4 milliard d'euros en 2012, soit 15 % des contributions prévues au titre de la solidarité inter-régimes. Le régime des agents des collectivités territoriales et hospitalières est le deuxième contributeur après le régime général (67 %). Selon le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2013, cette contribution devrait s'élever à 1,4 milliard d'euros en 2013 et 1,5 milliard d'euros en 2014.

Enfin, le troisième facteur expliquant le creusement des déficits de la CNRACL est le dispositif de neutralisation des conséquences financières de l'acte II de la décentralisation, au titre des pensions de fonctionnaires transférés de l'État vers les collectivités territoriales . Sur les 130 000 postes de fonctionnaires transférés par la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales, 85 000 personnes ont opté pour l'intégration dans la fonction publique territoriale .

Du point de vue des pensions de retraite, ce droit d'option a eu les conséquences suivantes :

- les fonctionnaires de l'État ayant opté pour le statut de fonctionnaire territorial ont été affiliés à la CNRACL , à compter de la date de leur intégration dans un cadre d'emploi. Les collectivités territoriales ont, depuis lors, versé la contribution employeur due à la CNRACL, cette dernière versant la pension des intéressés pour la totalité de leur carrière dans la fonction publique ;

- les fonctionnaires de l'État ayant opté pour le maintien de leur statut sont restés affiliés au régime des pensions des fonctionnaires de l'État . La pension des intéressés est versée par le budget de l'État pour la totalité de leur carrière, les collectivités territoriales devant, quant à elles, s'acquitter de la contribution employeur due en cas de détachement.

Cette opération a eu pour conséquence un surcroît de cotisations pour la CNRACL du fait de l'intégration des fonctionnaires décentralisés aux cotisants. S'agissant du régime de retraite des fonctionnaires de l'État, celui-ci a accusé une perte de cotisations immédiate alors qu'il doit toujours assurer le paiement des pensions déjà liquidées (y compris celles versées aux fonctionnaires retraités qui occupaient des emplois aujourd'hui décentralisés).

Ainsi, un mécanisme de compensation spécifique entre l'État et la CNRACL a été mis en place. Toutefois, depuis sa mise en place, il se traduit par une charge nette conséquente pour la CNRACL : 434 millions d'euros en 2010, 352 millions d'euros en 2012 et 335 millions d'euros en 2013 .

B. LES FLUX FINANCIERS ENTRE L'ÉTAT ET LA CNRACL

L'article 59 de la loi de finances pour 2010 a instauré un mécanisme visant à neutraliser, chaque année, l'impact des transferts pour l'État et la CNRACL :

- en premier lieu, l'État rembourse les pensions versées par la CNRACL pour les agents ayant effectué une partie de leur carrière pour l'État . Il rembourse également une part de la compensation démographique correspondant à ces agents ;

- réciproquement, la CNRACL reverse à l'État les cotisations et contributions assises sur les traitements de ces agents , qui seraient revenues à l'État si ces agents n'avaient pas été transférés.

Ce dispositif donne lieu à un système d'acomptes et de régularisations 25 ( * ) , retracées dans le programme 741 « Pensions civiles et militaires de retraite » du CAS « Pensions ».

Actuellement, le montant versé par la CNRACL à l'État, pour compenser la perte de cotisations de ce dernier, est supérieur au transfert réalisé par l'Etat pour rembourser la part des pensions servies aux agents territoriaux, au titre de leur carrière dans la fonction publique d'État. Selon les prévisions disponibles, ce mécanisme de neutralisation conduira à ce que la CNRACL supporte une charge nette jusqu'en 2022 . Ce n'est qu'à compter de 2023 que cette charge s'inversera au détriment de l'État, qui deviendra contributeur net à l'égard de la CNRACL.

Graphique n° 24 : Transferts financiers entre l'État et la CNRACL au titre des agents décentralisés

(en millions d'euros)

Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique, annexé au projet de loi de finances pour 2014

En 2013, la charge nette pour la CNRACL devrait s'élever à 335 millions d'euros 26 ( * ) . Au titre de l'exercice 2014, le présent projet de loi de finances prévoit :

- un versement de 562 millions d'euros de la CNRACL à l'État , au titre des cotisations perçues. En dépit de l'érosion de l'assiette des cotisations de la CNRACL, cette somme est en augmentation par rapport aux années précédentes en raison d'une régularisation au titre de l'exercice 2013 et de l'augmentation des taux de cotisation salariale (9,04 % contre 8,41 % en 2012) et employeur (30,25 % contre 27,32 % en 2012) ;

- un transfert de 202 millions d'euros de l'État vers la CNRACL afin de rembourser les dépenses de pensions et de compensation démographique des agents de l'État transférés.

Ainsi, en 2014, la CNRACL devrait supporter une charge nette de 360 millions d'euros au titre du mécanisme de neutralisation mis en place en 2010.

En conclusion, les transferts nets au titre du dispositif de neutralisation financière du coût des personnels de l'État intégrés dans la fonction publique territoriale ont représenté un total d'environ 1,15 milliard d'euros entre 2010 et 2013 , expliquant en partie la situation déficitaire de la CNRACL. Dès lors, le mécanisme mis en place n'est pas tout à fait neutre pour la CNRACL à court et moyen termes. Votre rapporteur spécial suivra avec attention l'évolution de ces transferts dans les années à venir, au vu de la situation financière de la CNRACL.

ANNEXE
CONTRIBUTIONS AU CAS « PENSIONS » PAR MISSION ET PAR MINISTÈRE

(en millions d'euros)

Ministères (périmètre de la LFI 2013)

Exec 2012

LFI 2013

PLF 2014

Missions (périmètre de la LFI 2013)

Total Affaires étrangères

158

169

173

Action extérieure de l'État

136

144

148

Aide publique au développement

22

25

25

Total Affaires sociales et santé

191

225

220

Solidarité, insertion et égalité des chances

191

225

220

Total Agriculture, agroalimentaire et forêt

492

522

536

Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales

246

260

266

Enseignement scolaire

187

198

207

Recherche et enseignement supérieur

59

63

63

Total Culture et communication

181

200

200

Culture

181

200

200

Total Défense

7.736

8.045

7.893

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

272

303

291

Défense

7.464

7.742

7.603

Total Ecologie, développement durable et énergie

950

721

669

Écologie, développement et aménagement durables

950

721

669

Total Economie et finances

3.136

3.017

2.974

Économie

228

244

244

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

2.531

2.773

2.730

Régimes sociaux et de retraite

376

0

0

Total Education nationale

16.586

18.114

18.292

Enseignement scolaire

16.586

18.114

18.292

Total Egalité des territoires et logement

228

228

Égalité des territoires, logement et ville

228

228

Total Enseignement supérieur et recherche

359

222

185

Recherche et enseignement supérieur

359

222

185

Total Intérieur

6.132

6.568

6.659

Administration générale et territoriale de l'État

534

583

597

Sécurité

5.598

5.985

6.062

Total Justice

1.360

1.498

1.536

Justice

1.360

1.498

1.536

Total Outre-mers

41

49

49

Outre-mer

41

49

49

Total Redressement productif

26

29

29

Recherche et enseignement supérieur

26

29

29

Total Réforme de l'Etat, décentralisation, fonction publique

0

0

0

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

0

0

0

Total Services du Premier ministre

172

200

205

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

0

0

0

Conseil et contrôle de l'État

118

134

137

Direction de l'action du Gouvernement

53

65

66

Politique des territoires

1

2

2

Total Travail, emploi formation professionnelle et dialogue social

167

191

192

Travail et emploi

167

191

192

Total

37.688

39.998

40.040

Source : direction du budget.

LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Aucune modification des crédits n'a été adoptée.


* 1 Les pensions de retraite continuent d'être servies mais il n'est plus possible de s'affilier à ces régimes.

* 2 S'agissant des régimes de retraite de l'Imprimerie nationale, de la caisse de retraite des régies ferroviaires d'outre-mer et de l'Office de radiodiffusion et télévision française (ORTF), ils sont quant à eux, considérés comme quasiment « éteints » puisqu'ils n'enregistrent que quelques centaines, voire quelques dizaines, de bénéficiaires (on compterait ainsi, en 2014, 173 bénéficiaires de la caisse de retraite des régies ferroviaires d'outre-mer et 186 bénéficiaires du régime de l'ORTF).

* 3 Il s'agit des congés de fin d'activité et des compléments de retraite dans le secteur du transport routier ainsi que des pensions des anciens agents des chemins de fer d'Afrique du Nord et d'Outre-mer.

* 4 Loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012, loi n° 2010-1645 du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014.

* 5 En 2011 et 2012, des contributions exceptionnelles ont été versées à partir de la mission « Régimes sociaux et de retraite » vers le CAS « Pensions ». Votre rapporteur spécial avait critiqué ce dispositif, utilisé comme une commodité technique pour pallier un éventuel manque de recettes de cotisations au CAS.

* 6 Dépenses de pensions et action sanitaire et sociale confondus.

* 7 En 2013, le fonds de roulement de l'ENIM a été mobilisé à hauteur de 47 millions d'euros.

* 8 Cour des comptes, rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, 2012.

* 9 La réforme de 2008 s'est traduite, pour le régime de la RATP, par la création de deux échelons supplémentaires en 2012 et en 2014. Ceux-ci sont attribués de façon automatique, sous seule condition d'ancienneté, et se traduisent par une majoration de salaire. Le second échelon entrera en vigueur le 1 er janvier 2014. De plus, à compter de cette même date, des points de retraite supplémentaires seront attribués à compter de vingt-huit ans d'ancienneté.

* 10 Rapport d'information n° 707 (2012-2013) sur le régime de retraite et de sécurité sociale des marins, fait par Francis Delattre au nom de la commission des finances du Sénat.

* 11 La ministre des affaires sociales et de la santé, le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget et le ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

* 12 Décision QPC 2011-125 du 6 mai 2011 du Conseil constitutionnel.

* 13 Rapport d'information n° 652 (2011-2012) sur le compte d'affectation spéciale « Pensions » fait par Francis Delattre au nom de la commission des finances du Sénat.

* 14 Loi n° 2012-1558 du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour la période 2012-2017.

* 15 La revalorisation des pensions pour 2014 est prévue à + 0,9 %, correspondant à + 1,3 % de prévision d'inflation pour 2014 et - 0,4 % de rattrapage au titre de la surévaluation de la revalorisation effectuée eu 1 er avril 2013.

* 16 Le taux d'actualisation est utilisé pour déprécier des flux futurs et déterminer leur valeur actuelle.

* 17 Par hypothèse, l'horizon de l'évaluation découle de la date maximale présumée au décès du plus jeune ayant cause participant au système actuel (100 ans).

* 18 Assemblée nationale, commission élargie du 4 novembre 2013 : « Gestion des finances publiques et des ressources humaines, Provisions, Régimes sociaux et de retraite, Gestion du patrimoine immobilier de l'État (compte spécial), Pensions (compte spécial) ».

* 19 Certaines professions de la fonction publique sont classées en « catégorie active » en raison du « risque particulier ou des fatigues exceptionnelles » qu'elles présentent. Pour ces professions, comme par exemple le personnel actif de la police nationale, les ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne ou encore le personnel de la surveillance des douanes, l'âge d'ouverture des droits à la retraite peut être porté à 55 ans, voire 52 ans pour certaines catégories.

* 20 Décret n° 2012-847 du 2 juillet 2012 relatif à l'âge d'ouverture du droit à pension de vieillesse.

* 21 Les programmes concernés sont les programmes 128, 129, 169, 195, 198 et 216.

* 22 Au 31 décembre 2012.

* 23 Pour les traitements attachés à la Légion d'honneur, les traitements annuels s'élèvent à 36,59 euros pour un grand-croix, 24,39 euros pour un grand officier, 12,20 euros pour un commandeur, 9,15 euros pour un officier et 6,10 euros pour un chevalier. Le montant annuel du traitement d'un médaillé militaire est de 4,57 euros.

* 24 Les principaux bénéficiaires du mécanisme de compensation démographique sont les régimes des exploitants et des salariés agricoles, le régime des mines, le régime des indépendants et le régime de la SNCF.

* 25 Les montants et la périodicité de ces transferts sont fixés par arrêté conjoint des ministres chargés du budget et de la sécurité sociale.

* 26 Au titre de l'exercice 2013, la CNRACL a effectué un transfert de 526 millions d'euros de cotisations à l'État, tandis que l'État lui a transféré 119 millions d'euros pour le remboursement des pensions versées et 72 millions d'euros au titre de la compensation démographique vieillesse.