MM. Philippe ADNOT et Michel BERSON, rapporteurs spéciaux

DEUXIÈME PARTIE
L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Les programmes 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » et 231 « Vie étudiante » relèvent actuellement du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

A l'occasion du changement de gouvernement en juin 2014, Manuel Valls, Premier ministre, a relégué l'enseignement supérieur et la recherche au niveau d'un secrétariat d'État . Votre rapporteur regrette ce choix , considérant que le domaine de l'enseignement supérieur et de la recherche , pourtant présenté comme prioritaire par le Gouvernement, devait conserver un ministère qui lui soit propre .

Quoi qu'il en soit, l'enseignement supérieur bénéficie d'un budget préservé , avec :

- 15,2 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE), correspondant à une augmentation de 1,4 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2014 ;

- 15,3 milliards d'euros en crédits de paiement (CP), soit une enveloppe stable (+ 0,2 %) par rapport à l'année passée.

3,8 milliards d'euros sont toutefois spécifiquement attribués à la recherche universitaire au sein du programme 150.

À ce titre, il convient de signaler qu'une nouvelle action « recherche » regroupe désormais les crédits auparavant dispersés dans sept actions reprenant les grands domaines de la recherche universitaire 6 ( * ) .

Le programme 150 compte donc 9 actions désormais, contre 15 auparavant.

Les autres crédits consacrés à l'enseignement supérieur et relevant d'autres ministères correspondent à :

- 297,8 millions d'euros en AE et 294,3 millions d'euros en CP pour l'enseignement supérieur agricole (programme 142), ces enveloppes étant en hausse respectivement de 7,8 % et 6,6 % comparé à 2014 ;

- 308,7 millions d'euros en AE=CP pour les organismes de formation supérieure et de recherche en matière économique et industrielle, soit une augmentation de 1 % par rapport à 2014.

Au total, l'enseignement supérieur bénéficie donc de 15,8 milliards d'euros en AE (contre 15,6 milliards d'euros en 2014) et 15,9 milliards d'euros en CP (identique en 2014) .

I. LE PROGRAMME 150 « FORMATIONS SUPÉRIEURES ET RECHERCHE UNIVERSITAIRE »

A. LA « SANCTUARISATION » DES CRÉDITS CONSACRÉS À L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

1. Les principaux chiffres

Le programme 150, qui représente à lui seul près de la moitié du budget de la mission , bénéficie d'une hausse de 1,2 % de ses autorisations d'engagement pour 2015, tandis que ses crédits de paiement sont stables.

Confirmant l'objectif de favoriser la réussite des étudiants en licence, la principale augmentation des crédits de paiement concerne l'action 01 « formation initiale et continue du baccalauréat à la licence », avec près de 40 millions d'euros supplémentaires en autorisations d'engagement et crédits de paiement représentant une hausse de 1,4 %.

Les crédits de paiement consacrés à l'immobilier diminuent quant à eux de 5,9 % (environ 79 millions d'euros) tandis que les autorisations d'engagement augmentent de 7,4 % avec le début des nouveaux contrats de plan État-régions 2015-2020 (avec 720 millions d'euros sur le programme 150 pour l'ensemble de la période, dont 119,9 millions d'euros pour la seule année 2015).

Les économies réalisées sur certaines opérations immobilières , à savoir la fin du désamiantage de Jussieu (- 92 millions d'euros) ainsi que celle de diverses opérations issues des contrats de projets État-régions 2007-2013 (- 19 millions d'euros en 2015) permettent de compenser les besoins de crédits supplémentaires par ailleurs nécessaires , en particulier les subventions pour charges de service public des établissements publics de l'enseignement supérieur, opérateurs du présent programme.

Enfin, le Gouvernement indique que 100 millions d'euros d'économies sont prévus, par une « optimisation de la gestion financière de l'enseignement supérieur ». Cela constitue la contribution des établissements de l'enseignement supérieur à l'effort de redressement des comptes publics.

Présentation par action de l'évolution des crédits demandés entre 2014 et 2015

(en euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Intitulé

2014

2015

%

2014

2015

%

Formation initiale et continue du baccalauréat à la licence

2 842 803 786

2 882 344 011

1,4

2 842 803 786

2 882 344 011

1,4

Formation initiale et continue de niveau master

2 375 790 047

2 381 144 391

0,2

2 375 790 047

2 381 144 391

0,2

Formation initiale et continue de niveau doctorat

353 674 136

351 647 169

- 0,6

353 674 136

351 647 169

- 0,6

Établissements d'enseignement privés

79 665 852

78 895 852

- 1

79 665 852

78 895 852

- 1

Bibliothèques et documentation

433 532 960

431 549 636

- 0,5

433 532 960

431 549 636

- 0,5

Diffusion des savoirs et musées

107 955 691

106 364 231

- 1,5

107 955 691

106 364 231

- 1,5

Immobilier

1 079 144 924

1 159 007 003

7,4

1 323 466 591

1 244 881 167

- 5,9

Pilotage et support du programme

1 496 155 135

1 512 741 627

1,1

1 496 155 135

1 512 741 627

1,1

Recherche*

3 780 064 234

3 798 175 392

0,5

3 780 064 234

3 798 175 392

0,5

Total

12 548 786 765

12 701 869 312

1,2

12 793 108 432

12 787 743 476

- 0,1

* Pour 2014, le montant regroupe les crédits des sept actions qui ont été fusionnées au sein d'une seule et même action dans le projet de loi de finances pour 2015

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données du projet annuel de performances (PAP) pour 2015

2. Des dépenses de personnel du titre 2 qui ne couvrent plus qu'une très faible part des emplois de la mission

Compte tenu du passage à l'autonomie des établissements d'enseignement supérieur, les dépenses de personnel ont, pour la plupart d'entre elles, été transférées du titre 2 au titre 3 au cours des dernières années.

En effet, toutes les universités ont accédé aux responsabilités et compétences élargies (RCE) au 1 er janvier 2013 conformément aux dispositions de la loi n° 2007-1199 du 10 août 2007 relative aux libertés et aux responsabilités des universités (LRU). D'autres établissements d'enseignement supérieur disposent également de ce statut.

Les dépenses de personnel ne correspondent ainsi plus qu'à 573,07 millions d'euros en AE=CP, soit 4,5 % des crédits de paiement du programme 150. 182,79 millions d'euros sont consacrés au CAS « pensions ».

Le plafond d'emplois est fixé à 9 272 équivalents temps plein travaillés (ETPT) , contre 9 377 ETPT dans le projet de loi de finances pour 2014, soit une baisse de 105 ETPT issue de plusieurs transferts dont notamment :

- 179 ETPT transférés du titre 2 au titre 3 du fait de l'accession à l'autonomie de certains établissements ;

- la création de 72 ETPT, issus des 1 000 emplois créés par an et destinés, compte tenu de la répartition effective de ces emplois, à des opérateurs dont les personnels demeurent rémunérés directement par l'État ;

- le transfert de 3 ETPT du programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » vers le programme 150.

L'enveloppe dédiée aux crédits du titre 2 de la mission a été construite en prenant l'hypothèse d'un glissement-vieillesse-technicité (GVT)  nul, considérant que le GVT positif serait compensé par l'effet des entrées et sorties.

3. Les dépenses de fonctionnement : une nouvelle hausse des subventions pour charges de service public versées aux opérateurs du programme

Représentant plus de 90 % des crédits du programme, les crédits de fonctionnement sont portés à 11,8 milliards d'euros en AE et CP au titre du projet de loi de finances pour 2015, correspondant à une hausse de près de 80 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2014.

Ils correspondent, pour la quasi-totalité, aux subventions pour charges de service public versées aux opérateurs d'enseignement supérieur et de recherche du programme 150 qui enregistrent une hausse de 78 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2014.

Pour les seules universités et établissements assimilés , les subventions pour charges de service public s'élèvent à 10,42 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement au titre du seul programme 150 7 ( * ) .

Les crédits consacrés à la masse salariale des établissements d'enseignement supérieur ayant accédé aux responsabilités et compétences élargies (RCE) s'élèvent quant à eux à 9,22 milliards d'euros pour 2015 , soit une hausse de 1,5 % par rapport au projet de loi de finances pour 2014 et 154 millions d'euros supplémentaires .

Un transfert de 13,5 millions d'euros doit tout d'abord être opéré du titre 2 vers le titre 3, en raison du passage aux RCE d'établissements d'enseignement supérieur en 2014 et des réajustements nécessaires pour tenir compte de l'exécution réelle constatée l'année précédente.

Ensuite, environ 89 millions d'euros supplémentaires tendent à couvrir tout ou partie du coût de certaines mesures prises par le Gouvernement en faveur de certains agents de la fonction publique.

Ainsi en est-il de la mise en oeuvre de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emplois des agents contractuels dans la fonction publique, qui prévoit la titularisation de certains agents contractuels. 25 millions d'euros constituent ainsi une provision « destinée exclusivement au paiement des contributions au CAS pensions consécutives à ces titularisations qui intègre une économie prévisionnelle sur les cotisations sociales ».

20,5 millions d'euros sont également prévus pour tenir compte des mesures prises dans le cadre de l'organisation des carrières des fonctionnaires de catégorie B et C de la fonction publique de l'État.

Le reste des 89 millions d'euros doit notamment permettre de tenir compte, pour la première fois dans la dotation initiale des établissements d'enseignement supérieur, des effets du glissement-vieillesse-technicité (GVT).

Enfin, le Gouvernement poursuit son engagement de création de 1 000 emplois par an dans le domaine de l'enseignement supérieur au cours du quinquennat, correspondant à une hausse d'environ 58 millions d'euros, dont 52 millions d'euros pour les établissements d'enseignement supérieur ayant accédé aux RCE 8 ( * ) .

Selon le schéma d'emplois , la répartition indicative de ces 1 000 emplois est la suivante :

- 585 emplois d'enseignants chercheurs ;

- 85 emplois de professeurs agrégés ;

- 330 emplois de personnels administratifs.

Le plafond d'emplois des opérateurs relevant du programme 150 s'élève à 161 228 ETP , contre 160 140 ETP en 2014, sous le double effet de la création des 1 000 emplois et divers transferts entre le titre 2 et le titre 3.

Les emplois « hors plafond d'État » connaissent quant à eux une prévision de 24 639 ETP, contre 23 922 ETP en loi de finances initiale pour 2014.

Compte tenu des 9 272 ETP relevant du titre 2 du présent programme, le nombre total d'emplois sous plafond du programme 150 s'élève à 170 500 emplois , contre 169 517 en 2014.

4. Les dépenses relatives à l'immobilier : entre poursuite des opérations et les CPER 2015-2020

L'action 14 « Immobilier », qui regroupe l'ensemble des crédits budgétaires alloués à la politique immobilière de l'État dans le domaine de l'enseignement supérieur, dispose d'une enveloppe de 1,16 milliard d'euros en AE et 1,24 milliard d'euros en CP pour 2015, à laquelle s'ajoutent respectivement 30 millions d'euros et 41,9 millions d'euros de fonds de concours.

S'agissant des dépenses d'investissement du programme 150, qui se concentrent uniquement sur cette action, il convient de noter que sont inscrits 47,97 millions d'euros en AE alors qu'aucun crédit n'était prévu en 2014, et 81,35 millions d'euros en CP, contre 111,12 millions d'euros en 2014.

Hors titre 2, la dépense immobilière s'élève à 1,11 milliard d'euros en AE et 1,2 milliard d'euros en CP, ainsi répartis :

Ventilation de la dépense immobilière

(en millions d'euros)

PLF 2014

PLF 2015

AE

CP

AE

CP

Opérations CPER

0,00

215,00

119,93

195,99

Opérations hors CPER hors PPP

17,80

26,26

19,72

29,82

Partenariat public privé (PPP)

96,14

27,67

72,55

56,17

Constructions-restructuration

113,94

268,93

212,20

281,98

Masse salariale RCE

391,81

391,81

393,28

393,28

Maintenance et logistique

434,14

434,14

433,97

433,97

Travaux de mise en sécurité

89,89

179,22

71,13

87,22

Total

1 029,78

1 274,10

1 110,58

1 196,45

Source : d'après les données du PAP 2014 et du PAP 2015 relatifs à la présente mission

Le présent projet de budget pour 2015 prévoit notamment 119,93 millions d'euros en AE et 12 millions d'euros en CP au titre des contrats de plan État-régions 2015-2020 (CPER 2015-2020) sur le programme 150.

Ces contrats de plan disposent, en effet, d'une enveloppe globale de 840 millions d'euros consacrés à l'immobilier universitaire, avec 720 millions d'euros sur le programme 150 et 120 millions d'euros sur le programme 231 « Vie étudiante ».

Selon le projet annuel de performances, les priorités fixées par le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sont les suivantes :

- soutenir la compétitivité et l'attractivité des territoires ;

- offrir des campus « attractifs et fonctionnels, par une politique volontariste en matière de logements étudiants, de réhabilitation/restructuration et mise aux normes énergétiques, et d'investissement numérique » ;

- soutenir une « politique de site dynamique et cohérente » afin d'optimiser les moyens et mutualiser les ressources.

Bilan de la mise en oeuvre des précédents contrats de plan État-régions 2000-2006 et contrats de projets État-régions 2007-2013


• CPER 2000-2006

La couverture des autorisations d'engagement en crédits de paiement a été soldée en 2014 s'agissant des CPER 2000-2006, avec 14,4 millions d'euros inscrits en loi de finances initiale pour 2014.

Le taux global d'exécution des CPER s'était élevé à 78 % à sa clôture le 31 décembre 2006, avec 1 150 opérations de construction, restructuration ou extension inscrites pour l'enseignement supérieur et la recherche.


• CPER 2007-2013

À la clôture des CPER 2007-2013 (soit au 31 décembre 2014 compte tenu de leur prolongation d'une année), le taux global d'exécution devrait s'élever à 78 %, y compris le logement étudiant.

191,8 millions d'euros de crédits de paiement sont prévus dans le projet de loi de finances pour 2015, dont 184 millions d'euros sur le programme 150 (et 7,8 millions d'euros sur le programme 231), soit un taux de couverture des autorisations d'engagement de 88 %.

Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire

S'agissant du Plan Campus 9 ( * ) , l'enveloppe de 1,3 milliard d'euros est entièrement engagée au titre du programme d'investissement d'avenir et couvre 24 projets sélectionnés, pour 73 millions d'euros de décaissements et 40 millions d'euros de contractualisation au 30 juin 2014.

Le Plateau de Saclay , qui dispose d'une enveloppe spécifique de 1 milliard d'euros, comprend quant à lui 17 projets sélectionnés pour 769 millions d'euros engagés et 49 millions d'euros décaissés au 30 juin 2014. S'y ajoutent 736 millions d'euros au titre de la contractualisation.

Des crédits budgétaires sont également alloués pour certaines opérations du Plan Campus. Pour 2015, le programme 150 prévoit ainsi 58,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et 36,4 millions d'euros en crédits de paiement. D'après le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, ce montant devrait principalement servir au financement des opérations de Nantes et de Valenciennes.

Financement du Plan Campus par le programme 150

(en millions d'euros)

2010 et années antérieures

2011

2012

2013

2014

2015

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

1,42

0,75

3,36

0,44

204,3

2,66

135,24

4,32

28,81

6,57

58,3

36,4

Source : réponse au questionnaire budgétaire

5. Les dépenses d'intervention : une hausse des crédits qui cache une nouvelle baisse de 1 % de la dotation allouée à l'enseignement supérieur privé

Les dépenses d'intervention du programme 150 connaissent une hausse de 3,6 % en AE et CP par rapport à 2014, pour s'établir à 97,6 millions d'euros. Cette évolution s'explique par 4,3 millions d'euros transférés à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) dans le cadre de la mise en oeuvre du régime spécifique des jeunes entreprises universitaires.

Représentant plus de 80 % des dépenses d'intervention du programme 150, la dotation allouée à l'enseignement supérieur privé, qui s'élève à 78,9 millions d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement pour 2015, connait une nouvelle baisse de 1 % par rapport à 2014, équivalant à 770 000 euros . Elle fait suite à la diminution de ces crédits de 11 % entre 2012 et 2014.

Environ 10 millions d'euros sont consacrés à la formation initiale des enseignants des établissements d'enseignement privés sous contrat du premier et du second degrés. Quatre associations sont ainsi financées.

Le reste de l'enveloppe couvre les subventions annuelles de fonctionnement attribuées à chacun des 57 établissements d'enseignement supérieur privés ayant conclu des contrats pluriannuels avec l'État, dans le cadre de la contractualisation mise en place depuis 2010. 79 257 étudiants suivaient leur formation dans ces établissements à la rentrée universitaire 2013, représentant 3,3 % du nombre total d'étudiants.

Il convient de noter que le financement de l'État sera désormais réservé aux établissements ayant la qualité d'établissement d'enseignement supérieur privé d'intérêt général (EESPIG), en vertu de l'article 70 de la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche.

Les établissements d'enseignement supérieur privés d'intérêt général (EESPIG)

Des établissements d'enseignement supérieur privés à but non lucratif, concourant aux missions de service public de l'enseignement supérieur, peuvent demander à être reconnus par l'État en tant qu'établissements d'enseignement supérieur privés d'intérêt général, par arrêté du ministre chargé de l'enseignement supérieur et après avis du comité consultatif pour l'enseignement supérieur privé. Ils doivent également avoir été créés par des associations ou fondations, reconnues d'utilité publique, ou encore par des syndicats professionnels.

Un contrat pluriannuel doit être conclu avec l'État et définir les conditions dans lesquelles l'établissement exerce les missions de service public de l'enseignement supérieur, dans le cadre d'une « gestion désintéressée ». Ainsi, il détermine notamment, « sous réserve du respect des lois de finances », les modalités de soutien de l'État et, en contrepartie, les engagements pris par l'établissement.

Source : commission des finances du Sénat

Votre rapporteur spécial reviendra plus longuement sur le financement de ces établissements dans la suite du présent rapport, considérant que l'enseignement supérieur privé constitue un atout pour les étudiants ainsi qu'une solution à la fois peu coûteuse pour l'État et qui lui permet d'offrir un enseignement de qualité .

B. LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Une situation financière des universités globalement plus saine

À la suite de la mise en oeuvre du principe de l'autonomie financière des universités et de leur passage aux responsabilités et compétences élargies (RCE), plusieurs établissements ont rencontré des difficultés financières dont les causes ont déjà fait l'objet d'importants commentaires de la part de votre rapporteur spécial 10 ( * ) .

La situation semble désormais globalement s'améliorer même si certaines universités font encore l'objet d'une attention toute particulière compte tenu de l'importance des difficultés rencontrées.

Ainsi, selon les chiffres recueillis par votre rapporteur spécial auprès du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche 11 ( * ) , alors qu'en 2013, vingt-et-une universités avaient approuvé un budget prévisionnel en déficit, elles n'étaient plus que dix en 2014 .

En outre, seules sept universités ont finalement constaté un déficit en 2013 , dont quatre avaient déjà voté un budget prévisionnel en déficit.

Votre rapporteur spécial relève donc que le nombre d'universités en déficit constaté à la fin de l'exercice est nettement plus bas que ce que prévoient les établissements dans leurs budgets et qu'il tend à se réduire puisqu'il passe de seize en 2012 à sept en 2013 .

Parmi ces sept universités, trois d'entre elles sont en double déficit 2012-2013, contre cinq en 2012 (pour un double déficit 2011-2012).

Votre rapporteur spécial prend acte de cette réalité tout en demeurant préoccupé par le bon fonctionnement des universités pour lesquelles l'équilibre se fait parfois au prix d'économies considérables.

Pour l'élaboration du budget 2014, quatre universités se sont vues appliquer la règle dite du « double déficit » qui revient sur le principe de l'autonomie financière des établissements publics de l'enseignement supérieur, en impliquant le recteur d'académie dans la procédure budgétaire.

Un décret du 6 juin 2014 12 ( * ) a d'ailleurs modifié le dispositif proposé par l'article R. 719-109 du code de l'éducation, afin d'accompagner, de façon graduée, les établissements en difficulté sans toutefois leur ôter toute initiative en matière budgétaire.

Ainsi, alors qu'auparavant, le recteur d'académie devait établir le budget suivant la constatation des déficits, le président ou le directeur de l'établissement reste désormais compétent pour élaborer un plan de rétablissement de l'équilibre financier qui fait ensuite l'objet d'un vote par le conseil d'administration après avis conforme du recteur d'académie.

Si le budget initial ou les budgets rectificatifs votés par le conseil d'administration ne sont pas conformes à ce plan de redressement, le recteur les arrête lui-même.

En outre, le recteur peut décider de prolonger cette procédure, bien qu'un résultat excédentaire ait été constaté suite à la mise en oeuvre du plan de redressement, s'il considère que « la situation de l'établissement n'est pas durablement assainie ».

Votre rapporteur spécial se félicite de cette nouvelle procédure qui, tout en encadrant l'action de l'établissement par l'implication du recteur d'académie, afin d'éviter un dérapage plus important, maintient la compétence budgétaire du conseil d'administration qui reste, de ce fait, responsabilisé.

Par ailleurs, dans le cadre de la mise en oeuvre du « dispositif de suivi, d'alerte et d'accompagnement » 13 ( * ) instauré en 2012, 34 missions ont été réalisées auprès des établissements d'enseignement supérieur, ainsi réparties :

- 19 diagnostics flash ;

- 9 audits approfondis 14 ( * ) ;

- 6 diagnostics économiques et stratégiques 15 ( * ) .

En outre, une nouvelle version du « tableau de bord financier » devait être mise en place à l'automne 2014, en intégrant à la fois de nouveaux éléments budgétaires désormais comparables à l'exécution, des notifications de crédits et d'emplois ainsi que des données relatives aux ressources humaines, en particulier l'évolution de la pyramide des emplois.

Lors de son entretien avec votre rapporteur spécial, Geneviève Fioraso, secrétaire d'État chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche, a indiqué que les établissements avaient bénéficié d'un nombre important de formations, notamment en comptabilité ou en management, afin d'améliorer leurs compétences pour l'exercice de leur autonomie financière.

Un suivi spécifique est également assuré pour les universités rencontrant des difficultés très importantes, à l'instar de l'université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines qui a même bénéficié d'avances de trésorerie.

Votre rapporteur spécial considère qu' il convient de rester attentif à la situation financière des établissements d'enseignement supérieur, même s'ils semblent désormais davantage capables d'exercer leurs compétences, tant dans le domaine budgétaire que dans la gestion des ressources humaines . Il rappelle, par ailleurs, que la Cour des comptes devrait rendre, au cours du printemps 2015, une enquête demandée par votre commission des finances, au titre de l'article 58-2 de la LOLF 16 ( * ) , sur le bilan de l'autonomie financière des universités.

2. Quelle réalité derrière la création des 1 000 emplois ?

Le Gouvernement s'est engagé à créer 5 000 emplois dans l'enseignement supérieur entre 2013 et 2017, soit 1 000 emplois par an . Ceux-ci ont effectivement été budgétés en 2013 et en 2014, sont prévus pour 2015 et figurent dans le schéma d'emplois de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». Environ 60 000 euros sont attribués par emploi chaque année.

Ces emplois doivent être principalement fléchés pour la réussite en licence , dans le cadre des actions suivantes : orientation, accompagnement des étudiants, innovation pédagogique, développements numériques, maîtrise des langues vivantes et entrepreneuriat étudiant.

Selon les informations communiquées à votre rapporteur par le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, 1 101 emplois auraient ainsi été créés en 2013 et 2014, selon une enquête menée auprès des établissements concernés.

Bilan de l'enquête déclarative réalisée auprès des établissements ayant bénéficié de la création d'emplois en 2013 et 2014

71 % environ des établissements ont répondu. Sont concernés 1 314 emplois sur 2013 et 2014, la totalité de ceux prévus au titre du schéma 2014 n'ayant pas encore été notifiée.

Dans ce cadre, 1 101 emplois ont été créés, ce qui correspond à 84 % du total. 157 recrutements ont été reportés et 56 emplois ne sont pas encore spécifiquement dédiés à l'une ou l'autre des actions prévues.

Ces emplois se répartissent en fonction de six orientations :

- amélioration de l'encadrement des étudiants 32,2 % ;

- maîtrise des langues étrangères 11,7 % ;

- amélioration de l'orientation des étudiants 11 % ;

- innovation pédagogique 10,4 % ;

- développements numériques 10,4 %

- entrepreneuriat étudiant 1,3 % ;

- autres missions 23 %.

La répartition entre catégories d'emplois est la suivante :

- 53 % (583,5 emplois) pour des emplois de « bibliothèques, ingénieurs, administratifs, techniciens, de service et de santé » (BIATSS), pour moitié de catégorie A et l'autre moitié de catégories B et C ;

- 47 % (517,5 emplois) pour des emplois d'enseignants, avec 279 emplois d'enseignants chercheurs et le reste de professeurs agrégés.

Source : commission des finances d'après la réponse au questionnaire budgétaire

Pour 2015, 529 emplois devraient être créés pour rééquilibrer les dotations, 451 emplois devraient l'être au titre des contrats et des politiques de sites, et le reste devrait être destiné à l'enseignement supérieur agricole.

Plus globalement, sur la période 2013-2017, il a été décidé que la répartition serait la suivante : deux tiers des créations d'emplois affectés au rééquilibrage des dotations entre établissements, le tiers restant étant confié selon les contrats de sites.

Toutefois, votre rapporteur spécial s'interroge sur la réalité de la création de ces 1 000 emplois par an et plus largement de l'usage qui est véritablement fait des crédits attribués à ce titre aux établissements d'enseignement supérieur.

En effet, alors que le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche affirme que ces postes seraient effectivement créés, les universités semblent confrontées à des situations très contrastées .

Ainsi, certaines d'entre elles pourraient uniquement se servir de cette dotation complémentaire pour combler leur déficit et garantir le fonctionnement de leurs universités, sans recruter davantage de personnels . L'enveloppe supplémentaire permettrait ainsi de garantir pour certains le retour à l'équilibre de leur budget.

D'autres mettent en évidence l'incongruité de la situation consistant pour certains établissements à ouvrir effectivement les postes créés mais à en geler d'autres parallèlement.

Les crédits peuvent également conduire à « déprécariser » certains personnels en leur offrant un emploi stable plutôt qu'un poste de contractuel. Pour autant, cela n'augmente pas le nombre de professeurs ou de personnels administratifs.

Interrogé sur ce point par votre rapporteur spécial, Geneviève Fioraso, secrétaire d'État chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche, a assuré que la totalité des 1 000 emplois par an serait ouverts et créés par les établissements.

Enfin, il ne semble pas non plus acquis que la répartition annoncée dans les projets annuels de performances entre les enseignants/enseignants-chercheurs et les personnels administratifs et techniques soit respectée . En effet, les 2 000 emplois créés sur 2013 et 2014 devaient représenter pour 65 % des postes d'enseignants-chercheurs ou d'enseignants et pour 35 % de postes de personnels administratifs et techniques 17 ( * ) . Or, d'après l'enquête déclarative réalisée par le Gouvernement, 53 % des 1 101 postes créés constituent des emplois administratifs ou techniques.

3. Malgré les efforts budgétaires sur le programme 150, les acteurs de l'enseignement supérieur rencontrent des difficultés de financement
a) Les nécessaires ressources complémentaires

Outre les crédits budgétaires et extrabudgétaires alloués par l'État, les établissements de l'enseignement supérieur doivent diversifier leurs ressources afin d'assurer l'équilibre de leur budget et le financement de leurs formations.

À l'occasion des auditions menées pour la préparation du présent rapport, votre rapporteur spécial a notamment pu mesurer la perte considérable de ressources induite par la récente réforme de la taxe d'apprentissage pour certains établissements .

La nouvelle réglementation applicable est issue à la fois de la loi du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 18 ( * ) , de la loi du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013 19 ( * ) et de la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale 20 ( * ) .

Interrogés sur ce point par votre rapporteur spécial, les représentants de la Conférence des grandes écoles ont estimé qu'alors que les ressources issues de la taxe d'apprentissage pouvaient représenter de 2 % à 30 % du budget des écoles , le montant collecté au titre du barème pourrait être jusqu'à divisé par deux à l'avenir , compte tenu de cette réforme.

Les fédérations représentant les établissements de l'enseignement supérieur privé ont également mis en évidence cette baisse de recettes issues de la taxe d'apprentissage 21 ( * ) .

Votre rapporteur spécial considère que le système des fondations devrait également être développé . S'il ne peut évidemment constituer une source de financement principale, il est susceptible de constituer un apport non négligeable pour certains établissements. Il en est de même des procédures de levée de fonds et de prises de participation .

Il souhaite également rappeler que d'importantes marges de manoeuvre existent, en particulier pour les universités, s'agissant des frais de scolarité versés par les étudiants qui pourraient être augmentés 22 ( * ) .

En revanche, une hausse des frais d'inscription serait certainement plus difficile pour les grandes écoles qui pratiquent déjà des tarifs élevés et doivent pouvoir maintenir un accès à leurs formations à un nombre suffisamment important d'étudiants et garantir la mixité sociale.

b) Toujours en attente de la réforme du modèle de répartition « SYMPA »

Le SYstème de répartition des Moyens à la Performance et à l'Activité (dit « SYMPA ») est un modèle critérisé de répartition des moyens accordés aux universités . Comme votre rapporteur spécial l'a mis en évidence dans plusieurs de ses rapports 23 ( * ) , ce modèle d'allocation des moyens doit être amélioré pour être plus juste , notamment en offrant une meilleure redistribution et en intégrant la masse salariale.

Conscient des limites du modèle actuel, le Gouvernement a mis en place un comité de pilotage avec la Conférence des présidents d'universités et la Conférence des directeurs des écoles françaises d'ingénieurs. Depuis lors, les travaux du ministère se poursuivent ainsi que la concertation avec l'ensemble des acteurs.

Les objectifs fixés par le Gouvernement pour le nouveau dispositif

Le système devra avoir pour objectif :

- d'articuler plusieurs dimensions - aussi bien en termes de territoires, de structures, de modes de financement - au service des missions de l'enseignement supérieur et de la recherche, de la manière la plus équitable et efficace possible. Dans un contexte d'opérateurs autonomes, il s'agit d'inciter les établissements à déployer leurs stratégies et leurs engagements contractuels, en cohérence avec la stratégie nationale.

- de permettre à l'État de piloter et de réguler le système d'enseignement supérieur et de recherche sur des critères partagés et objectifs. Il doit avoir un caractère incitatif pour les établissements en prenant en compte la dimension de la performance et de la modernisation de l'action publique.

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Selon les informations recueillies par votre rapporteur spécial, le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche procède actuellement à des travaux de calibrage et la question de l'intégration de la masse salariale dans le modèle reste encore en discussion .

Le modèle SYMPA devrait avoir évolué d'ici la fin de l'année afin que sa nouvelle version puisse allouer les moyens aux établissements concernés pour 2015 . Il a été indiqué à votre rapporteur spécial que le nouveau paramétrage doit être testé avec prudence. Si des écarts trop importants entre l'ancien et le nouveau système sont constatés, ils devront être lissés sur plusieurs années.

Votre rapporteur spécial suivra tout particulièrement l'achèvement de ce chantier d'ici à la fin de l'année.

c) L'enseignement supérieur privé, une alternative nécessaire qui doit être soutenue

Sans reprendre l'intégralité des arguments présentés dans ses précédents rapports 24 ( * ) , votre rapporteur spécial souhaite rappeler que les établissements d'enseignement supérieur privés ont , compte tenu de la baisse massive de leurs subventions, considérablement participé au redressement des finances publiques et que leur financement ne doit pas être sacrifié au regard des avantages que ce système procure.

Ainsi, comme indiqué précédemment, l'enseignement supérieur privé connait une nouvelle baisse de 1 % de sa dotation par rapport à la loi de finances initiale pour 2014, pour s'établir à 78,9 millions d'euros. Elle fait suite à une baisse de 5,5 % entre 2012 et 2013, et de 6 % entre 2013 et 2014.

Les établissements d'enseignement supérieur privé auront donc subi une perte de leur dotation prévue par l'État de 10,5 millions d'euros entre 2012 et 2015, soit environ 12 % de la dotation versée en 2012.

Cette tendance à la baisse est encore plus marquée en exécution puisqu'alors que l'enseignement supérieur privé avait pu bénéficier de 94,2 millions d'euros en 2011, soit près de 10 millions d'euros supplémentaires par rapport à ce qui avait été budgété, il n'a obtenu qu'un peu plus de 81 millions d'euros en 2013, soit une baisse de 13 % de l'enveloppe en deux ans. Compte tenu de la réserve de précaution appliquée au programme 150, la dotation pour 2014 ne s'est d'ailleurs élevée qu'à 74 millions d'euros.

Les subventions représenteraient en moyenne 10 % à 12 % des budgets de ces établissements , selon les chiffres fournis par les fédérations représentant l'enseignement supérieur privé.

Comme le rappelle le Gouvernement dans sa réponse à l'une des questions posées par votre rapporteur spécial, les établissements d'enseignement supérieur privé ont effectivement bénéficié d'un effort financier de l'État de 65 % entre 2004 et 2014. Toutefois, le nombre d'étudiants s'est accru, dans le même temps, de 46 100 étudiants à 79 275 étudiants inscrits, soit une augmentation de 72 %.

Selon les représentants des fédérations d'établissements supérieurs privés, certaines écoles ont connu une baisse significative du ratio entre le montant alloué par l'État et le nombre d'étudiants accueillis au cours des dernières années. La part moyenne de la subvention de fonctionnement accordée par l'État s'établit ainsi à 816 euros par étudiant en 2014, alors qu'elle était encore à plus de 1 000 euros en 2013 .

Il a également été indiqué à votre rapporteur spécial que les modalités d'attribution de la subvention pouvaient s'avérer particulièrement opaques , bien qu'elles doivent en principe s'appuyer sur la mesure de la performance telle que définie dans le contrat pluriannuel. Votre rapporteur a été particulièrement sensible à cette remarque, considérant que la répartition des moyens devait reposer sur des éléments objectifs et connus des intéressés.

Les fédérations représentant l'enseignement supérieur privé ont également mis en évidence les difficultés financières rencontrées par certains établissements , lesquelles ressentent très directement la baisse de subvention de l'État.

À ce titre, votre rapporteur spécial souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur la nécessité d'assurer le versement des subventions alloués aux échéances prévues . En effet, certains établissements auraient été contraints de souscrire des prêts-relais au cours du printemps dernier, afin de pouvoir continuer à honorer leurs factures, dans l'attente de la participation de l'État. Si ces situations sont exactes, elles ne doivent pas se reproduire. Elles mettent en évidence la situation financière parfois très dégradée de ces écoles .

En outre, les besoins de financement sont d'autant plus importants que les recettes issues de la taxe d'apprentissage seraient considérablement réduites du fait de la récente réforme, avec une baisse estimée à près de 30 % par les représentants de l'enseignement supérieur privé.

Les autres moyens de financement offerts à ces établissements doivent également être développés , en particulier le recours aux fondations qui ne semblent pas obtenir de grands résultats jusqu'à présent.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, votre rapporteur spécial considère qu'un ajustement doit être opéré en faveur des établissements de l'enseignement supérieur privés , les efforts pour le redressement des finances publiques devant être portés équitablement. Comme lors de l'examen des deux projets de loi de finances précédents, il vous propose donc un amendement tendant à porter la dotation de l'État à l'enseignement supérieur privé à environ 80,5 millions d'euros , soit la dotation initiale de 2014 majorée de 1 %.

4. Les regroupements : source de complexification et de coûts supplémentaires de fonctionnement ?

En vertu de l'article L. 718-2 du code de l'éducation tel qu'issu de l'article 62 de la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche, les établissements publics d'enseignement supérieur et les organismes de recherche partenaires doivent procéder à des regroupements afin de coordonner leur offre de formation et leur stratégie de recherche et de transfert . Ils peuvent s'opérer au niveau académique ou interacadémique.

Ces nouvelles entités mettent ainsi en oeuvre les compétences qui leur sont transférées par leurs membres.

Trois formes de regroupements leur sont offertes par l'article L. 718-3 du code de l'éducation :

- la fusion , qui constitue la forme de regroupement la plus avancée puisqu'elle implique la création d'un nouvel établissement d'enseignement supérieur ;

- la communauté d'universités et d'établissements (COMUE) . Établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel, elle se voit transférer des compétences par chaque établissement qui y participe et conduit ensuite sa politique déterminée par son conseil d'administration ;

- l' association « d'établissements ou d'organismes publics ou privés concourant aux missions du service public de l'enseignement supérieur ou de la recherche à un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel ». Cette forme de regroupement est donc la plus souple et la moins engageante pour ceux qui font ce choix.

D'après les informations recueillies auprès du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, quatre fusions ont d'ores et déjà été réalisées et cinq seraient en cours, vingt-et-une COMUE sont annoncées, dont deux au niveau interrégional, et cinq associations ont été formées.

État d'avancement de la mutualisation des établissements publics d'enseignement supérieur et des organismes de recherche partenaires


Les fusions d'établissements :

- quatre fusions réalisées : université de Strasbourg (anciennes universités de Strasbourg I, II et III), université d'Aix-Marseille (anciennes universités d'Aix-Marseille I, II et III), université de Lorraine (anciennes universités de Metz, de Nancy I et II et de l'institut de polytechnique de Lorraine) et université de Bordeaux (fusion des universités de Bordeaux I, II et IV) ;

- cinq fusions à venir : universités de Montpellier I et II, universités de Rennes I et II, universités de Clermont I et II, universités de Paris XII et de Marne-la-Vallée et universités de Lille I, II et III ;


Les 21 COMUE : la Communauté d'université et établissements d'Aquitaine, la Communauté d'universités et établissements « Languedoc - Roussillon », la Communauté d'universités et établissements « Lille Nord de France », Hautes études Sorbonne arts et métiers université (HeSam université), l'Institut polytechnique du Grand Paris, Normandie Université, Université de Bourgogne Franche-Comté, Université de Champagne, Université Côte d'Azur, Université fédérale de Toulouse Midi-Pyrénées, Université Grenoble Alpes, Université de Lyon, Université Paris-Est, Université Paris Lumières, Université Paris-Saclay, Université de recherche Paris Sciences et Lettres, Université Paris Seine, Université Sorbonne Paris Cité, Sorbonne universités, ainsi que l'Université de Bretagne Loire et la Communauté d'université et établissements « Centre Limousin Poitou Charentes » qui constituent des COMUE interrégionales ;


Cinq associations sont par ailleurs prévues en Alsace, Lorraine, Picardie, Auvergne et à Aix-Marseille.

Source : d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Votre rapporteur spécial ne remet pas en cause l'intérêt pour les universités et les autres établissements d'enseignement supérieur de renforcer leurs coopérations et les mutualisations de moyens. Il s'interroge toutefois sur l'efficacité de certaines d'entre elles , au regard de l'organisation retenue, et des coûts susceptibles d'être induits par ces nouvelles structures .

En effet, lors des auditions qu'il a menées, votre rapporteur spécial a appris que certaines COMUE prévoyaient des conseils d'administration pléthoriques, où siègeraient jusqu'à 80 personnes. De véritables structures administratives, distinctes de celles des établissements qui forment ces regroupements, pourraient également voir le jour. Reste à savoir si celles des universités et autres établissements seraient alors réduites, au moins à due concurrence...

Votre rapporteur spécial restera très attentif quant à la mise en place de ces regroupements et aux éventuelles dépenses supplémentaires qu'ils entraîneraient.

Il espère également que l'obligation de regroupement ne risquera pas de porter atteinte à l'excellence de certains établissements qui se trouveraient contraints de créer une COMUE avec d'autres entités dont les caractéristiques et les intérêts seraient très divergents.

Enfin, les COMUE ne devront pas non plus conduire l'État à réduire l'attribution de moyens à certains établissements dont la représentation pourrait être limitée compte tenu de leur taille . Ainsi, selon certains acteurs de l'enseignement supérieur, des instructions auraient été données aux préfets de région pour que les contrats de plan État-régions 2015-2020 soient établis au niveau des COMUE. Dès lors, il est à craindre que les priorités soient établies quasi exclusivement au profit des universités, sans tenir compte des autres établissements constituant la communauté. Votre rapporteur spécial ne manquera pas d'interroger la ministre sur ce sujet .


* 6 Recherche universitaire en sciences de la vie, biotechnologies et santé ; recherche universitaire en mathématiques, sciences et techniques de l'information et de la communication, micro et nanotechnologies ; recherche universitaire en physique, chimie et sciences pour l'ingénieur ; recherche universitaire en physique nucléaire et des hautes énergies ; recherche universitaire en sciences de la terre, de l'univers et de l'environnement ; recherche universitaire en sciences de l'homme et de la société ; recherche universitaire interdisciplinaire et transversale.

* 7 Les universités devraient par ailleurs bénéficier de 21,2 millions d'euros au titre du programme 231 « vie étudiante ».

* 8 5,8 millions d'euros, correspondant à 92 ETPT, sont transférés du titre 3 au titre 2 « afin de tenir compte de la répartition effective des emplois créés entre les opérateurs et du transfert de 20 ETPT au ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt. »

* 9 Programme d'investissement d'avenir ayant pour opérateur l'Agence nationale de la recherche.

* 10 Cf . en particulier le rapport de votre rapporteur spécial n° 148 (2012-2013)-tome III-Annexe 22 et le rapport d'information n° 547 (2012-2013) établi par Philippe Adnot et Dominique Gillot, au nom de la commission des finances et de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, sur le bilan consolidé des sources de financement des universités, « Financement des universités : l'équité au service de la réussite de tous ».

* 11 Ces chiffres sont issus d'une enquête conduite auprès des rectorats sur les budgets et les comptes financiers des 74 universités. Les résultats ne concernent toutefois que 73 universités, l'université Antilles-Guyane n'ayant pas encore voté son compte financier 2013 lorsqu'ils nous sont parvenus.

* 12 Décret n° 2014-604 du 6 juin 2014 relatif au budget et au régime financier des établissements publics d'enseignement supérieur et de recherche.

* 13 Pour une présentation détaillée de ce dispositif, voir le rapport de votre rapporteur spécial n° 156 (2013-2014)-tome III-Annexe 22.

* 14 Les diagnostics flash ou les audits approfondis sont effectués systématiquement en cas de double déficit ou d'une alerte lancée par un recteur.

* 15 Les diagnostics économiques et stratégiques concernent les établissements dont la situation financière est fragile mais qui n'ont pas nécessairement constaté deux années de déficit budgétaire.

* 16 Loi n° 2001-692 du 1 août 2001 relative aux lois de finances.

* 17 Dans le projet annuel de performances pour 2013, la répartition était la suivante : 450 enseignants-chercheurs, 230 professeurs agrégés et 320 personnels administratifs et techniques. Et dans le projet annuel de performances pour 2014 : 570 enseignants-chercheurs, 50 professeurs agrégés et 380 personnels administratifs et techniques.

* 18 Loi n° 2014-1978 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

* 19 Loi n° 2014-1979 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013.

* 20 Loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale.

* 21 Cf. le c) du présent 3.

* 22 Pour le détail des propositions formulées à ce titre par votre rapporteur spécial, voir le rapport précité n° 148 (2012-2013)-tome III-Annexe 22 et le rapport d'information précité n° 547 (2012-2013).

* 23 Cf. en particulier le rapport d'information précité n° 547 (2012-2013).

* 24 Cf . en particulier le rapport de votre rapporteur spécial précité n° 148 (2012-2013)-tome III-Annexe 22.