Travaux de la commission des affaires sociales



Mardi 11 mai 2004

- Présidence de M. Nicolas About, président -

Assistants maternels et assistants familiaux - Examen du rapport

La commission a procédé à l'examen du rapport de M. Jean-Pierre Fourcade, sur le projet de loi n° 201 (2003-2004) relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux.

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur, a indiqué que le projet de loi traitait du statut de deux professions en pratique bien distinctes, mais longtemps confondues sur le plan juridique : les assistants maternels et les assistants familiaux, et qui se trouvent aujourd'hui confrontées à un besoin identique de revalorisation et de professionnalisation, pour répondre à la demande croissante de garde d'enfants.

S'agissant des assistants maternels, il a rappelé qu'ils constituent le mode de prise en charge privilégié par les familles puisqu'il concerne près de 20 % des 2,3 millions d'enfants de moins de trois ans indiquant à cet égard que plus de 480.000 d'entre eux sont gardés, à temps plein ou à temps partiel, par 265.000 assistants maternels travaillant à domicile et par 25.600 employés au sein d'une crèche familiale, tous agréés par le service départemental de la protection maternelle et infantile (PMI).

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur, a fait valoir que la création de la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE) par la dernière loi de financement de la sécurité sociale a rendu moins coûteux ce mode de garde pour les familles, lequel présente en outre l'avantage de s'adapter aux horaires de travail des parents, en forte mutation ces dernières années.

Il a constaté que, face à la demande des familles, l'offre de garde par un assistant maternel est aujourd'hui largement insuffisante dans certaines régions, le sud-est ou la région parisienne par exemple, notamment en raison de la rigidité de l'agrément qui n'autorise à garder qu'un maximum de trois enfants, quelle que soit la durée effective de l'accueil. Il a toutefois rappelé la souplesse introduite par la loi du 2 janvier 2004 relative à l'accueil et à la protection de l'enfance qui a porté la capacité d'accueil des assistants maternels à trois enfants gardés simultanément.

S'agissant des assistants familiaux, M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur, a indiqué qu'ils sont employés soit directement par le département, soit par des personnes morales de droit privé, associations ou fondations, habilitées à cet effet, pour accueillir des enfants ayant fait l'objet d'une décision de placement.

Il a précisé que 46.800 assistants familiaux sont en activité auprès de 65.000 enfants, placés dans 90 % des cas sur décision de justice, et que ce mode d'accueil représente 55 % des placements d'enfants. Il a fait observer que les difficultés croissantes de ces enfants conduisent à une situation paradoxale : désormais, les assistants familiaux se voient confier les « cas » que les établissements spécialisés refusent de garder.

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur, a reconnu que ce métier comporte des contraintes et des risques croissants qui découragent de nombreux candidats, ce qui justifie une revalorisation urgente de leur statut.

Pour tous ces motifs, le projet de loi propose d'introduire une dénomination distincte pour les professions d'assistant maternel et d'assistant familial et de prévoir des dispositions particulières aux assistants familiaux en matière de durée de validité de leur agrément, de droit à l'information sur l'état de santé de l'enfant confié et de participation aux travaux de l'équipe pluridisciplinaire chargée de son suivi.

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur, a ensuite abordé le thème de la formation professionnelle, en indiquant que le projet de loi se situe dans le prolongement de la loi de juillet 1992, qui avait mis en place une formation minimale de 60 heures pour les assistants maternels et de 120 heures pour les assistants familiaux. Il est ici proposé de doubler ces durées et d'accroître la formation initiale des professionnels, pour offrir une meilleure qualité de l'accueil.

Il a rappelé que ces mesures s'ajoutent à l'ouverture d'un droit à la formation continue pour les assistants maternels employés par des particuliers à laquelle la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 a déjà affecté 10 millions d'euros, au titre de la prise en charge, par la branche famille, des cotisations employeurs.

Il a ajouté que la professionnalisation par la formation serait, en outre, renforcée grâce à la validation des acquis de l'expérience (VAE) mise en oeuvre par la loi du 17 janvier 2002.

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur, a ensuite abordé le troisième volet du texte qui rapproche le statut juridique des assistants maternels et familiaux de celui des personnes relevant du droit commun du code du travail. Il a souligné que cette harmonisation ne pouvait qu'être partielle, compte tenu des spécificités des deux professions en matière d'horaires de travail, mais qu'elle serait effective dans quatre domaines :

-  l'obligation d'établir un contrat de travail écrit ;

- la procédure de licenciement pour motif réel et sérieux, ainsi que le formalisme en cas de rupture du contrat de travail par l'une ou l'autre partie ;

- la limitation, pour la première fois, de la durée du travail des assistants maternels, avec la mise en place d'un repos quotidien de onze heures consécutives, d'un repos hebdomadaire de vingt-quatre heures minimum et l'impossibilité, pour un employeur, de faire travailler sans son accord un assistant maternel plus de quarante-huit heures par semaine ;

- enfin, la prise des congés.

Il a estimé que ce rapprochement répondait à trois préoccupations complémentaires : rendre les statuts de ces personnels plus attractifs pour combattre la pénurie d'offre ; mettre un terme à des sources d'abus en matière de droit du travail ; enfin, prévenir et circonscrire le développement des contentieux grâce à une meilleure définition des droits et devoirs des employeurs et des employés.

Concluant sa présentation du texte, M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur, a rappelé qu'il avait fait l'objet de longues discussions entre le Gouvernement et les principales organisations professionnelles et familiales concernées et a estimé que les dispositions proposées semblaient consensuelles. Il a toutefois proposé d'y apporter quelques précisions et modifications.

Concernant l'agrément, il a souhaité reprendre la proposition faite par M. Jean-Louis Lorrain et Mme Annick Bocandé, lors du débat sur la loi relative à l'accueil et à la protection de l'enfance, de plafonner à six l'effectif maximal pouvant être accueilli par un même assistant maternel, dans la limite de trois enfants gardés simultanément, des dérogations pouvant toutefois être prévues pour répondre aux besoins, notamment en matière d'accueil périscolaire ou de garde de fratries.

Il a également estimé préférable de mieux encadrer la possibilité d'accorder aux assistants familiaux un agrément sans limitation de durée, en imposant une condition d'obtention d'une qualification après la période de formation initiale et en conservant à la PMI sa mission de contrôle.

Il lui a, en outre, semblé opportun d'aménager les délais actuels de notification de la décision du président du conseil général en matière de demande d'agrément, actuellement de trois mois pour les assistants maternels et de six mois pour les assistants familiaux. Le projet de loi proposant de les ramener aux délais de droit commun de deux mois qui s'appliquent aux notifications de décisions administratives, il a estimé ce laps de temps trop bref pour une instruction sérieuse et a proposé de retenir une solution de compromis de trois mois pour l'agrément des assistants maternels et de quatre mois pour celui des assistants familiaux.

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur, a également jugé indispensable d'introduire une priorité, pour les assistants maternels et familiaux, dans l'attribution des logements sociaux. Il a rappelé, à cet égard, que la définition des critères appliqués au logement pour l'obtention de l'agrément relevait de la libre appréciation des services départementaux, ce qui était source potentielle d'inégalités. Certaines exigences constituaient souvent, en effet, une difficulté insoluble pour un ménage souhaitant devenir famille d'accueil dans une zone fortement urbanisée.

Il a ensuite proposé de favoriser l'accompagnement et le soutien des assistants maternels et familiaux, parfois confrontés à des réalités familiales et humaines douloureuses.

S'agissant des assistants maternels, il a souhaité la reconnaissance légale des relais assistants maternels (RAM) qui assurent, dans les communes où ils sont implantés, une mission d'information des assistants maternels sur leurs droits et leurs obligations, de formation et de conseil pour l'exercice de leur métier et de mise en relation et de médiation entre les professionnels et les employeurs. Il a considéré qu'il serait opportun d'en permettre aussi l'accès aux employés qui gardent les enfants au domicile de leurs parents. S'agissant des assistants familiaux, il a proposé de renforcer leur place au sein de l'équipe pluridisciplinaire qui suit l'enfant confié, afin qu'ils y trouvent un soutien dans l'exercice de leur profession.

Abordant le volet relatif à l'application du droit du travail aux assistants familiaux, M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur, a rappelé que la France est le seul pays d'Europe à avoir fait entrer ces professionnels dans un véritable statut de salariat, en dépit de la mission très spécifique qu'ils remplissent et du fait qu'il est, par nature, impossible de calculer leur pression horaire.

Concernant la durée du temps de travail des assistants maternels, il a considéré que les limitations envisagées par le projet de loi semblaient trop rigides et que, sans accroître le volume global d'heures travaillées, il serait possible d'en assouplir le calcul en créant un forfait annuel de 2.250 heures de travail et en appréciant la limite de 48 heures de travail par semaine en moyenne sur douze mois.

S'agissant des congés, que les assistants familiaux se trouvent, en pratique, souvent conduits à passer avec les enfants confiés, il a souhaité mettre en place un système de compte épargne-temps correspondant aux congés pris en présence des enfants ou à l'absence de congés, à utiliser ultérieurement ou lors de la liquidation de la pension de retraite.

Il a, en outre, estimé légitime qu'il soit fait mention de la convention collective, actuellement en cours d'adoption, dans le corps même du texte de loi.

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur, s'est enfin préoccupé de la revalorisation des salaires des assistants, qui n'est qu'indirectement abordée par le texte sous l'angle des indemnités applicables en cas d'absence ou d'attente entre deux enfants à garder. Les niveaux actuels de rémunération des assistants maternels et familiaux posent en effet un triple problème : leur faiblesse, en cas de travail à temps partiel notamment, l'existence de disparités entre les départements, enfin, le développement, sur une partie du territoire national, d'une « crise des vocations » pour les assistants familiaux.

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur, a donc appelé de ses voeux une revalorisation progressive des rémunérations, rappelant toutefois qu'elle résultera pour partie du processus d'harmonisation des SMIC, qui allait augmenter mécaniquement leur salaire de 11,4 % d'ici au 1er juillet 2005. Il a estimé prioritaire de privilégier des règles souples aisément applicables afin de lutter contre le travail clandestin, évalué à 100.000 personnes non déclarées gardant une population d'environ 200.000 enfants en bas âge.

En conclusion, il a rappelé que ce projet de loi, qui constitue le prolongement des lois de 1977 et 1992, offre à ces deux professions un statut et une chance de professionnalisation et qu'il apporte des améliorations tangibles en matière d'accueil du jeune enfant et de prise en charge des mineurs en difficulté. Il a estimé qu'il répond, en outre, au souci constant de la commission de promouvoir la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale et s'est prononcé en faveur d'une adoption du texte, sous réserve des amendements qu'il présenterait.

M. Alain Gournac a souligné l'intérêt de développer la profession d'assistant maternel, compte tenu du nombre insuffisant de places en crèche, d'autant plus que le degré d'exigence des normes de sécurité décourage parfois les collectivités locales d'en créer sur leur territoire. Tout en approuvant les orientations générales du texte, il a regretté que la lutte contre le travail clandestin ne soit pas davantage abordée et s'est inquiété du caractère parfois arbitraire de certaines décisions d'agrément. Il a insisté sur la nécessité de proposer de vastes logements aux assistants maternels.

M. André Lardeux a approuvé la distinction introduite dans le texte entre assistants maternels et familiaux, qui exercent effectivement deux métiers différents. Il a demandé s'il existait une évaluation du coût global résultant de l'application des mesures contenues dans le projet de loi. S'appuyant sur son expérience d'élu local, il a approuvé les propositions du rapporteur en matière de délai pour la délivrance de l'agrément. Il a toutefois émis un doute quant à l'impact des dispositions du projet de loi sur le travail au noir, le renchérissement du coût de l'embauche d'un assistant maternel étant susceptible d'inciter à l'emploi de travailleurs non déclarés.

Mme Gisèle Printz a rappelé que les professionnels souhaitaient une harmonisation de leurs rémunérations, qui sont très variables selon les départements. Elle a dénoncé les comportements parfois abusifs de certains conseils généraux employeurs d'assistants maternels ou familiaux.

M. Jean Chérioux a approuvé la proposition du rapporteur de maintenir les exemptions fiscales dont bénéficient ces professionnels. Il a souhaité savoir si leurs employeurs étaient assujettis à la taxe sur les salaires.

M. Guy Fischer a rappelé que ce projet de loi faisait partie, avec la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE), des mesures annoncées par le Gouvernement lors de la dernière conférence de la famille. Tout en reconnaissant le caractère positif de certaines des mesures proposées, il a noté que leur portée réelle, en matière de rémunération notamment, dépendrait beaucoup du contenu des décrets qui seront pris par la suite. C'est pourquoi le groupe communiste républicain et citoyen (CRC) envisage de s'abstenir sur ce texte.

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur, a répondu à M. Alain Gournac que la France était le seul pays d'Europe où les assistants maternels et familiaux étaient salariés, les autres pays ayant fait le choix de leur accorder le statut de travailleur indépendant. Il a indiqué que la création de la PAJE participait de l'effort de revalorisation de leurs métiers et a estimé que l'allocation de garde d'enfant à domicile (AGED) pouvait être considérée comme l'un des instruments les plus performants pour lutter contre le travail clandestin en matière de garde d'enfants. Il a affirmé sa confiance dans la qualité du travail des services de protection maternelle et infantile qui délivrent les agréments. En matière de logement, il a souhaité que les préfets tiennent compte des besoins des assistants maternels et familiaux pour l'attribution des logements prévus dans leur contingent.

En réponse à M. André Lardeux, il a cité les évaluations chiffrées fournies par les services du ministère : le supplément de formation dispensé aux assistants maternels devrait entraîner un surcoût de 2 millions d'euros, celui dispensé aux assistants familiaux de 5,5 millions d'euros, mais il n'existe pas d'évaluation globale du coût de l'ensemble des mesures prévues dans le projet de loi. Il a indiqué que, dans le souci de contrôler la dépense, il proposerait à la commission de supprimer l'obligation nouvelle faite aux employeurs de prendre en charge les frais de soutien psychologique des assistants maternels et familiaux dont l'agrément est suspendu.

A Mme Gisèle Printz, il a répondu que l'harmonisation des salaires de ces professionnels sur l'ensemble du territoire conduirait à rapprocher leur statut de celui de la fonction publique territoriale, ce qui rendrait impossible le maintien de leur avantage fiscal. Il est convenu que les diverses indemnités que leur destine le projet de loi devront être précisément définies par voie réglementaire.

A M. Jean Chérioux, M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur, a précisé que l'activité des assistants maternels et familiaux était, depuis l'origine, exonérée de la taxe sur les salaires et qu'aucune évaluation chiffrée du coût de l'avantage fiscal dont ils bénéficient n'est actuellement disponible.

A l'intention de M. Guy Fischer, il a rappelé le rôle positif joué par la PAJE pour améliorer les conditions de prise en charge des frais de garde par les familles. Il a indiqué que la rémunération des assistants familiaux avait augmenté ces dernières années, pour se situer à un niveau le plus souvent supérieur au salaire minimum de croissance (SMIC). En revanche, la rémunération des assistants maternels reste faible : elle représente en moyenne les deux tiers du SMIC. Le présent projet de loi devrait contribuer à améliorer leur situation financière et des garanties supplémentaires seront vraisemblablement apportées par la convention collective en cours de négociation.

M. Alain Vasselle a approuvé les orientations du rapporteur en matière de logement et a souhaité un effort budgétaire supplémentaire dans ce domaine. Il a souligné l'impossibilité d'appliquer aux assistants familiaux les règles habituelles en matière de durée du travail. Il a également demandé s'il était envisageable d'introduire dans le texte un amendement relatif aux compensations financières entre communes permettant de tenir compte de la présence d'assistants maternels sur le territoire de certaines d'entre elles et du service que ceux-ci peuvent rendre comme alternative à l'installation d'une cantine scolaire.

Mme Janine Rozier a souhaité avoir des précisions sur les conséquences d'un retrait d'agrément.

M. Gérard Dériot s'est déclaré convaincu que l'offre en matière de garde à domicile augmenterait si des logements plus spacieux étaient mis à la disposition des professionnels comme le suggère le rapporteur.

En réponse à M. Alain Vasselle, M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur, a indiqué que les moyens financiers de l'État ne lui permettraient probablement pas d'augmenter le budget consacré au logement, mais qu'il souhaitait une mobilisation des communes et des offices HLM pour améliorer les conditions de logement des assistants maternels et familiaux. Il a précisé qu'il présenterait un amendement pour modifier le mode de calcul de la durée du travail des assistants maternels afin de mieux tenir compte des spécificités de leur profession. La création d'un compte épargne-temps qu'il propose répond au même souci de souplesse et permettrait aux assistants familiaux, qui ne peuvent prendre leurs congés, de bénéficier d'une nouvelle forme de compensation.

Il a répondu à Mme Janine Rozier que, lorsque des comportements anormaux sont suspectés, l'agrément est suspendu le temps de procéder aux contrôles nécessaires et les professionnels ne peuvent plus alors accueillir d'enfant. Si les fautes sont ensuite avérées, l'agrément est retiré et l'enfant définitivement confié à une autre structure. Il a toutefois indiqué qu'il n'était pas rare que ces professionnels soient victimes de dénonciations calomnieuses.

La commission a ensuite examiné les articles et les amendements présentés par le rapporteur.

Avant l'article premier, la commission a adopté un amendement visant à introduire dans la loi un article additionnel pour faire mention de l'existence et des missions des relais assistants maternels.

A l'article premier (rôle de la commission départementale de l'accueil des jeunes enfants), elle a adopté un amendement ayant pour objet d'intégrer les représentants des particuliers employeurs dans la commission départementale de l'accueil des jeunes enfants.

A l'article 2 (projet de service de l'aide sociale à l'enfance), elle a adopté un amendement visant à préciser que les assistants familiaux sont membres à part entière de l'équipe pluridisciplinaire chargée du suivi des placements d'enfants.

Elle a adopté sans modification les articles 3 (modification d'intitulé de titre et renumérotation d'articles du code) et 4 (définition du métier d'assistant maternel).

A l'article 5 (définition du métier d'assistant familial et dispositions relatives à l'agrément des assistants maternels et des assistants familiaux), elle a adopté deux amendements visant à limiter à six le nombre total de mineurs pouvant être accueillis par un assistant maternel y compris en cas de dérogation du président du conseil général. Elle a également adopté un amendement encadrant la possibilité de conférer aux assistants familiaux un agrément sans limitation de durée et un amendement précisant qu'il peut être dérogé à la limite de trois enfants accueillis simultanément pour l'accueil périscolaire.

A l'article 6 (dispositions relatives à la notification et à la motivation des décisions d'agréments, aux conditions de logement et à l'assurance des assistants maternels et familiaux), elle a adopté un amendement modifiant les délais applicables à la notification de la décision du président du conseil général en réponse à une demande d'agrément.

Elle a adopté les articles 7 (formation des assistants maternels et des assistants familiaux), 8 (contenu du contrat d'accueil et définition de l'accueil continu par un assistant familial), 9 (coordination) et 10 (rôle du service départemental de la protection maternelle infantile auprès des assistants maternels et des assistants familiaux) sans modification.

Après l'article 10, elle a adopté un amendement portant division additionnelle et créant un titre nouveau dans le projet de loi consacré aux dispositions modifiant le code de la construction et de l'habitation, puis un amendement portant article additionnel dans cette nouvelle division, visant à rendre prioritaires les assistants maternels et familiaux pour l'attribution des logements sociaux.

Elle a adopté sans modification les articles 11 (restructuration du titre VII du livre VII du code du travail), 12 (coordination dans le code du travail), 13 (obligation d'un contrat de travail écrit entre un assistant maternel ou familial et son employeur) et 14 (décret relatif aux indemnités d'entretien et aux fournitures et rémunération des assistants maternels ou des assistants familiaux pendant leur période de formation).

A l'article 15 (définition par voie réglementaire des mentions du contrat de travail), elle a adopté un amendement visant à prendre en compte, dans le texte de la loi, la négociation collective en cours.

Elle a adopté les articles 16 (définition par voie réglementaire des mentions du contrat de travail) et 17 (rémunération de l'assistant maternel en cas d'absence de l'enfant) sans modification.

A l'article 18 (limitation du temps de travail des assistants maternels), elle a adopté deux amendements visant respectivement à assouplir la limitation du temps de travail quotidien et à instaurer la possibilité de calculer la durée du travail selon un forfait d'heures annuel.

A l'article 19 (rupture du contrat de travail des assistants maternels employés par des particuliers), elle a adopté un amendement rétablissant le droit à dommages et intérêts de l'employeur en cas de rupture abusive du contrat de travail par un assistant maternel, afin d'assurer le parallélisme des obligations respectives des parties.

Elle a adopté les articles 20 (fixation des congés des assistants maternels employés par des particuliers), 21 (coordination), 22 (exercice des mandats de délégué syndical, de représentant syndical ou de représentant du personnel) et 23 (licenciement pour motif réel et sérieux des assistants maternels et familiaux employés par des personnes morales de droit privé) sans modification.

A l'article 24 (devenir du contrat de travail en cas de suspension d'agrément), la commission a adopté un amendement de suppression du dispositif d'accompagnement psychologique prévu en cas de suspension de l'agrément.

Elle a adopté sans modification les articles 25 (précisions rédactionnelles), 26 (régime de l'attente applicable aux assistants maternels employés par des personnes morales de droit privé) et 27 (nouvelle structure de rémunération et renforcement du régime de l'attente des assistants familiaux employés par des personnes morales de droit privé).

A l'article 28 (droit aux congés des assistants familiaux employés par des personnes morales de droit privé), elle a adopté un amendement visant à créer un dispositif de compte épargne-temps pour compenser la difficulté pratique que rencontrent les assistants familiaux pour prendre leurs congés sans les enfants confiés.

Elle a adopté l'article 29 (cumul d'activité) sans modification.

Avant l'article 30, elle a adopté un amendement portant article additionnel visant à prévoir la compensation, pour les collectivités territoriales, des dépenses supplémentaires mises à leur charge par l'État dans le cadre de ce projet de loi.

Elle a enfin adopté sans modification les articles 30 (dispositions diverses et financement de la formation professionnelle continue), 31 (harmonisation rédactionnelle dans le code de l'action sociale et des familles et le code général des impôts), 32 (dispositions transitoires relatives aux indemnités d'entretien et aux fournitures), 33 (dispositions transitoires en matière de formation des assistants maternels), 34 (dispositions transitoires en matière de formation des assistants familiaux) et 35 (dispositions transitoires applicables aux modalités de calcul du nombre d'enfants accueillis par un assistant maternel).

La commission a enfin adopté le projet de loi ainsi amendé.

Mercredi 12 mai 2004

- Présidence de M. Nicolas About, président -

Réforme de l'assurance maladie - Auditions

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, sous la présidence de M. Nicolas About, président, la commission a poursuivi ses auditions en vue de préparer la future réforme de l'assurance maladie.

Audition de M. Jean-Louis Deroussen, secrétaire général adjoint, chargé de la protection sociale, de la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC)

La commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Jean-Louis Deroussen, secrétaire général adjoint, chargé de la protection sociale, de la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC).

En préambule, M. Jean-Louis Deroussen a souligné que la concertation entre le Gouvernement et les partenaires sociaux se déroulait sur une période très brève. Il a indiqué à la commission que le calendrier prévisionnel communiqué à son organisation prévoyait la poursuite des discussions jusqu'au 25 mai et la consultation des conseils d'administration des caisses d'assurance maladie [(Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), Mutualité sociale agricole (MSA), Caisse nationale d'assurance maladie des professions indépendantes (CANAM)], vers le 28 mai, en vue d'une présentation du projet de loi au conseil des ministres du 16 juin.

Il a précisé que cette concertation était structurée par des fiches thématiques et regroupée autour de trois thèmes : « gouvernance », « organisation et offre de soins » et « assainissement financier ».

Rappelant qu'il partageait pleinement le diagnostic établi par le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie,M. Jean-Louis Deroussen a considéré qu'il était plus adapté de parler d'une « modernisation » du système d'assurance maladie que de sa réforme, en raison de la charge d'inquiétude dont est porteur ce terme. Il s'est déclaré soucieux de trouver un nouvel équilibre entre les contraintes propres à la qualité des soins et l'équilibre financier du système.

Observant que la croissance des dépenses de santé se poursuivra sous l'effet du vieillissement de la population et du progrès technique, qui viendront s'ajouter à d'éventuels gaspillages, et surtout aux dépenses indues provoquées par les dysfonctionnements du système, M. Jean-Louis Deroussen a estimé qu'il était impératif de restructurer le système de santé, dans le respect des principes de solidarité et d'égal accès aux soins.

Il a jugé que les dépenses hospitalières devaient également être examinées dans le cadre de la future réforme afin d'apprécier leur pertinence, les travaux complémentaires menés par le Haut Conseil sur ce thème pouvant constituer le socle de la concertation entre les différents acteurs du système.

M. Nicolas About, président, s'est interrogé sur les moyens à mettre en oeuvre en faveur de la responsabilisation des assurés et sur l'instauration éventuelle d'un dossier médical partagé.

M. Jean-Louis Deroussen s'est dit convaincu que la hausse de la consommation médicale des assurés, qui se traduit parfois par un certain nomadisme médical, pourrait être endiguée grâce à une meilleure accessibilité de l'information. Dans cette perspective, le rôle des médecins est primordial et leur participation indispensable, car la tenue du dossier médical informatisé est non seulement une source d'économies, mais également une garantie de qualité des soins.

M. Nicolas About, président, a fait observer que, sur la base des travaux du Haut conseil, évoquant la nécessité d'établir des relations rénovées entre les acteurs, il était envisagé la création de structures et la définition d'une nouvelle délégation de gestion. Il a voulu savoir si, dans ce cadre, les partenaires sociaux devaient être responsables de la gestion du système et de son équilibre financier et quel devait être le rôle réservé à l'État.

M. Jean-Louis Deroussen a estimé que, à son sens, le conseil d'administration des caisses devait être l'élément central de la gestion du système. Il serait tenu de respecter les orientations définies par l'État, dans l'enveloppe budgétaire votée par le Parlement, ce qui devrait conduire à rendre impératif, et non plus indicatif, l'objectif national des dépenses de santé. Sur le fondement d'une délégation de gestion, il lui appartiendrait alors de travailler avec l'ensemble des acteurs du système de santé, professionnels, régimes complémentaires, mutuelles, institutions d'assurance et de prévoyance...

Dans ce cadre, il a considéré comme indispensable la création d'une Haute autorité de santé et d'un institut national des données de santé, chargés d'apporter une expertise scientifique indépendante et opposable aux parties. Il a précisé que ce schéma semblait compatible avec celui proposé par le Gouvernement.

M. Nicolas About, président, a voulu connaître les propositions de la CFTC sur le financement du système d'assurance maladie et l'apurement de la dette actuelle.

M. Jean-Louis Deroussen a considéré que la question du financement devait être traitée dans un cadre général, dont la première étape était la définition de priorités sanitaires, annuelles ou pluriannuelles, intégrant le domaine de la prévention.

Il s'est dit convaincu que certaines mesures pouvaient être mises en oeuvre rapidement et permettre de vraies économies, comme le dossier médical partagé, qui pourrait apporter un gain de 5 à 7 milliards d'euros.

Concernant l'augmentation éventuelle des recettes, il a estimé que les assurés n'étaient pas hostiles à une contribution financière supplémentaire, sous réserve du maintien de la qualité des soins et d'un partage de cet effort, afin qu'il ne repose pas uniquement sur les patients. Le risque principal serait plutôt de vouloir ajuster les dépenses sur les recettes actuelles.

M. André Lardeux s'est interrogé sur ce que pouvait être une juste répartition des interventions respectives du régime obligatoire et des régimes complémentaires. Il s'est en outre inquiété des effets négatifs, sur la croissance et sur la consommation, qui pourraient résulter d'une majoration d'un point du taux de contribution sociale généralisée (CSG), si telle devait être la solution de mise en oeuvre.

M. Jean-Louis Deroussen a rappelé que 92 % des assurés disposaient déjà d'une couverture complémentaire, quelle que soit la forme retenue. Il a désapprouvé toute idée de désengagement du régime obligatoire et a plaidé en faveur d'une définition claire et incontestable des soins remboursés déterminés non par les gestionnaires du système, mais par une autorité indépendante.

M. Nicolas About, président, a demandé comment devait être défini le « reste à charge », payé par l'assuré, et quel était le périmètre d'intervention des assureurs complémentaires.

Prenant l'exemple du système en vigueur en Alsace-Moselle, M. Jean-Louis Deroussen a plaidé pour un remboursement à 90 % (70 % assurés par le régime obligatoire et 20 % en part complémentaire obligatoire), soit un reste à charge de 10 % des dépenses de santé pour les assurés.

Il a estimé qu'un recours à la contribution sociale généralisée (CSG), sans aucune mesure de réorganisation du système de santé, ne saurait constituer qu'une solution de facilité pour faire face à des difficultés susceptibles de se reproduire.

M. Louis Souvet s'est interrogé sur l'ampleur de la fraude à la carte vitale, sur la pertinence d'une assurance complémentaire obligatoire qui ne soit pas intégrée au régime de base et sur la « responsabilité que la CFTC serait prête à assumer pour parvenir à un équilibre financier du système ».

M. Jean-Louis Deroussen a précisé qu'il relevait de la responsabilité de l'assurance maladie de s'assurer de la fiabilité du système d'organiser le retour des cartes vitales périmées, sur le modèle des cartes de crédit. Il a rappelé les principes du régime complémentaire obligatoire d'Alsace-Moselle, qui repose sur une cotisation salariale et sur une mutualisation des risques entre actifs et retraités.

M. Gilbert Chabroux a insisté sur la responsabilisation, en évoquant à la fois celle des assurés et celle des professions de santé. Il a appelé de ses voeux une participation accrue des entreprises au financement du système de santé. Il s'est également soucié de la place de la couverture maladie universelle (CMU) dans le nouveau système d'assurance maladie.

M. Jean-Louis Deroussen a observé que la responsabilisation des professions de santé pouvait prendre plusieurs formes et qu'une réflexion sur la répartition de l'offre de soins était inévitable, tant pour le secteur ambulatoire que pour l'hôpital. Il a considéré que les mesures de responsabilisation des acteurs ne devaient pas se limiter aux seuls patients.

Il a précisé que la remise en cause de la CMU n'était pas à l'ordre du jour et que les effets de seuils provoqués par les règles d'accès à la couverture maladie universelle complémentaire (CMUC) devaient être gommés par la mise en oeuvre d'une aide à l'acquisition d'une assurance complémentaire.

M. Guy Fischer a déploré la brièveté des délais accordés pour l'examen de mesures qui constituaient, à son sens, la réforme de la sécurité sociale la plus importante depuis sa création en 1945. Il s'est interrogé sur le possible maintien du mode de gestion de l'assurance maladie par les partenaires sociaux et sur les modalités de détermination du panier de biens et services remboursables.

M. Alain Gournac a insisté sur la nécessité d'intégrer l'hôpital à la réforme du système de santé et s'est interrogé sur les moyens de responsabiliser les assurés, notamment au regard de la surconsommation de médicaments.

En réponse aux différents orateurs, M. Jean-Louis Deroussen a estimé que les organisations syndicales étaient prêtes à assumer leurs responsabilités de gestionnaires du système, mais reconnaissaient que le paritarisme devait être désormais aménagé.

Il a approuvé la nécessité d'une réflexion sur les modalités de prescription des médicaments et sur la place de l'hôpital dans le système de santé.

Audition de M. Gaby Bonnand, secrétaire national de la confédération française démocratique du travail (CFDT)

La commission a ensuite procédé à l'audition de M. Gaby Bonnand, secrétaire national de la confédération française démocratique du travail (CFDT).

M. Gaby Bonnand a rappelé que l'assurance maladie est un indéniable succès collectif, qui a joué un rôle positif sur le plan sanitaire et sur celui de la cohésion sociale de la société française. Malgré ce bilan positif, la réforme de l'assurance maladie s'avère nécessaire et doit parvenir à la réorganisation du système de soins. L'enjeu de cette réforme est de réussir le passage d'un système de distribution de la santé à un système de prise en charge du parcours de santé et de suivi sanitaire. Il a estimé que les questions financières ne sont qu'une conséquence de la transformation du système et qu'en faire la priorité de la réforme conduirait à retomber dans les schémas d'ajustements antérieurs préconisant des mesures de déremboursements des soins et de prélèvement de nouvelles recettes.

Il a considéré que l'objectif principal de la réforme est d'établir un système de santé plus performant au service des usagers et assorti d'un niveau de remboursement élevé, qui oblige à une réflexion sur la répartition géographique de l'offre de soins, aujourd'hui fortement déséquilibrée.

M. Gaby Bonnand a estimé, par ailleurs, indispensable de définir une nouvelle relation entre les soins ambulatoires et hospitaliers. Cette réforme passe par le développement d'une véritable politique de prévention et la construction d'un parcours de santé pertinent et adapté à chaque usager. Le dossier médical partagé est, dans ce cadre, un outil indispensable, tant pour l'assuré que pour le médecin, sous réserve qu'il ne soit pas un simple relevé des actes accomplis. L'objectif est de mettre en place un système de santé organisé autour d'un médecin référent, qui peut être le généraliste, et qui sera responsable de l'orientation des patients dans le système de santé.

Il a estimé que l'assurance maladie n'a pas vocation à prendre en charge tous les médicaments disponibles sur le marché et qu'en conséquence, le périmètre des biens remboursables doit être redéfini en collaboration avec les différents acteurs.

Il a indiqué que le rôle de l'État sera alors d'assurer un cadrage pluriannuel des objectifs, qui sera mis en oeuvre par l'assurance maladie dans le cadre de sa délégation de gestion.

M. Gaby Bonnand a estimé qu'il était également nécessaire de mettre en place un nouveau mode de collaboration entre le régime obligatoire et les régimes complémentaires, qui coexistent sous trois formes : mutuelles, assurances ou institutions de prévoyance. Ceux-ci fonctionnent sur un mode concurrentiel, sans régulation commune, ni outil de coordination, ce qui produit l'effet de « tirer la dépense vers le haut », y compris la dépense publique. En conséquence, une coopération doit être organisée, fondée sur un cahier des charges et sur le respect d'un périmètre des soins remboursables déterminé par le régime obligatoire, en y associant, le cas échéant, les assureurs complémentaires.

Il a illustré la nécessité de cette coordination par deux exemples : celui de l'accord conventionnel relatif aux visites médicales à domicile, dont l'intérêt est de ne rembourser que celles médicalement justifiées et qui perdrait de sa pertinence si les régimes complémentaires assuraient la prise en charge du dépassement d'honoraires ; celui des soins dentaires, que 40 % des régimes complémentaires prennent en charge dans des conditions moins favorables que celles prévues dans le cadre de la CMUC.

Abordant la question du financement, M. Gaby Bonnand a estimé que les dépenses de santé continueront à croître dans les années à venir et qu'il importe de rendre le système plus efficace afin de dégager des économies, tout en maintenant l'impératif de solidarité qui n'est pas incompatible avec une augmentation des prélèvements. Sur ce point, il s'est déclaré favorable au maintien du principe de proportionnalité propre à la CSG, ainsi qu'à une contribution plus importante des entreprises, assise sur leurs bénéfices. Ces mesures doivent, bien entendu, être accompagnées d'une clarification du financement et de la compensation, par l'État, des exonérations de charges qu'il concède.

M. Gaby Bonnand a conclu en exposant le rôle qui pourrait être attribué à chacun des acteurs. L'État définit la politique de santé publique et détermine le périmètre du panier de biens et services remboursables. L'assurance maladie reçoit une délégation de gestion et prend en charge la politique conventionnelle. Une telle répartition des rôles tient compte de l'évolution du rôle de l'assurance maladie de 1945 à nos jours, laquelle est passée de la sécurité des travailleurs - les indemnités journalières constituaient alors 40 % des dépenses - à la gestion du système de santé ; désormais, les indemnités journalières n'en représentent plus que 5,7 %.

M. Alain Vasselle s'est félicité que des points de consensus existent entre les différents partenaires au débat, notamment sur les gisements d'économies que pourrait exploiter une meilleure efficacité du système de santé. Il a souhaité connaître le chiffrage de ces économies potentielles, l'évaluation des nouvelles recettes dont le système pourrait avoir besoin et les modalités possibles de prise en charge de la dette sociale.

M. Gaby Bonnand a considéré qu'il est indispensable d'accentuer la médicalisation des dépenses et a rappelé que la plupart des experts considèrent qu'une économie de 2 milliards d'euros peut être obtenue par la rationalisation de la politique du médicament. Cette politique doit comporter une action sur les prix et une meilleure information des médecins, notamment pour limiter le volume des prescriptions. Outre leur gain financier, de telles mesures permettront de réduire les accidents provoqués par les interactions médicamenteuses. L'objectif est de mettre tous les acteurs du système de santé en situation de responsabilité.

Poursuivant sur les questions de financement, il a exprimé son opposition au principe d'une franchise qui lui semble être une mesure aveugle, susceptible de créer des effets d'éviction pour les plus pauvres. Il s'est déclaré favorable à toute mesure de responsabilisation des assurés à travers leur parcours dans le système de santé, relevant que ceux-ci gardaient déjà à leur charge environ 10 % des dépenses.

M. Louis Souvet a demandé quels étaient le périmètre de la responsabilité des partenaires sociaux dans la gestion de l'assurance maladie, le rôle des assureurs complémentaires et les fraudes à l'utilisation de la carte vitale.

M. Gilbert Chabroux a réfuté une approche limitée aux questions financières pour privilégier une réflexion globale sur la qualité et l'égalité d'accès aux soins sur l'ensemble du territoire. Il s'est enquis d'éventuelles propositions pour corriger les inégalités géographiques et sociales et assurer l'apurement de la dette.

M. Guy Fischer s'est déclaré convaincu qu'in fine, le coût de la réforme sera supporté par les assurés sociaux. Il s'est interrogé sur la possibilité d'élargir la composition du conseil d'administration des caisses à d'autres acteurs que les seuls partenaires sociaux.

M. Alain Gournac s'est déclaré favorable à la formation professionnelle des médecins et à l'instauration d'une haute autorité indépendante apportant son expertise scientifique à l'assurance maladie. Il a également dénoncé les gaspillages résultant d'une surconsommation médicale, et notamment l'importance des stocks de médicaments inutilisés dans les foyers français. Il a souhaité la responsabilisation de tous les acteurs et la prise en compte de l'hôpital dans la future réforme.

M. André Lardeux s'est interrogé sur l'équilibre qui pourrait être établi entre les interventions respectives du régime obligatoire et des assureurs complémentaires. Il s'est en outre inquiété des effets négatifs sur la croissance et sur la consommation pouvant résulter d'une éventuelle majoration d'un point du taux de contribution sociale généralisée (CSG).

M. Bernard Cazeau a demandé si le principe de la médecine libérale pouvait être pérennisé dans le cadre de notre système de santé.

En réponse, M. Gaby Bonnand s'est prononcé en faveur d'une généralisation de l'accès aux assurances complémentaires et pour une meilleure articulation de ces dernières avec le régime obligatoire. Il a rappelé que la carte vitale n'était pas une carte de paiement, mais un outil de transmission des données, et qu'elle n'avait pas créé le régime de tiers payant, qui existait depuis longtemps.

Il a proposé la création de schémas régionaux d'organisation sanitaire (SROS) qui établiraient un système de répartition comprenant à la fois un volet hospitalier et un volet ambulatoire.

Il s'est déclaré favorable à l'association d'autres acteurs à la gestion de l'assurance maladie, y compris des confédérations d'usagers et les régimes complémentaires, et partisan d'une Haute autorité de santé indépendante.

Il a rappelé la nécessité d'intégrer l'hôpital dans la réforme et a considéré que la facturation à l'activité constituait une avancée positive.

En conclusion, il a rappelé que la CFDT avait toujours assumé ses responsabilités de gestionnaire et que l'aspect financier n'était pas le premier des objectifs de la réforme. La dette de l'assurance maladie est certes importante, mais elle doit être rapprochée de la dette globale nationale.

Audition de MM. Jacques Creyssel, directeur général, et Bernard Caron, directeur de la protection sociale du mouvement des entreprises de France (MEDEF)

La commission a ensuite procédé à l'audition de MM. Jacques Creyssel, directeur général, et Bernard Caron, directeur de la protection sociale du mouvement des entreprises de France (MEDEF).

Rappelant que le déficit de l'assurance maladie s'élèverait à 15 milliards d'euros et que son déficit cumulé atteindrait 35 milliards d'euros, soit 2 % du PIB français, à la fin de l'année 2004, M. Jacques Creyssel a qualifié la situation financière de l'assurance maladie de dramatique et a considéré que sa réforme était d'une urgence absolue, pour retrouver les conditions d'un équilibre financier durable et d'une gouvernance plus efficace du système. Estimant que cette aggravation des comptes était inimaginable il y a encore quelques années, il a préconisé d'organiser de façon cohérente les trois composantes que sont les soins de ville, le médicament et l'hôpital, qui constitue un point essentiel du système de soins.

Concernant le financement de l'assurance maladie, il s'est élevé contre toute solution de facilité, comme le relèvement des prélèvements obligatoires, compte tenu de ses effets préjudiciables à la croissance et à l'emploi. A l'inverse, il s'est prononcé pour une responsabilisation accrue des professionnels de santé et des assurés.

Concernant la gestion de l'assurance maladie, M. Jacques Creyssel a jugé que le système paritaire issu de l'après-guerre était aujourd'hui dépassé. Il a demandé que l'État et le Parlement prennent enfin leurs responsabilités en arrêtant, à partir des éléments de diagnostic connus depuis plusieurs années, les modalités précises de la réforme, considérant qu'il n'appartenait pas aux partenaires sociaux de décider des orientations de santé publique, telles que la politique de remboursement des médicaments ou encore l'opportunité de fermer ou non les hôpitaux.

Selon lui, la participation des partenaires sociaux ne s'exerce jamais mieux que dans le cadre d'un paritarisme strict, comme l'a montré leur gestion efficace des risques professionnels. Il a déclaré que le MEDEF était disposé, aux côtés d'autres acteurs de la société civile, à participer à la surveillance du futur système, d'autant qu'il est directement concerné par les questions d'accidents du travail, de maladies professionnelles et d'indemnités journalières.

Concernant la répartition des compétences, M. Jacques Creyssel a proposé la mise en place d'une nouvelle gouvernance organisée autour de trois pôles : l'État, responsable de la politique générale de santé publique après consultation d'un haut comité d'experts ; le Parlement qui détermine le montant limitatif, et non indicatif, des dépenses d'assurance maladie ; une agence de santé, pour remplacer les caisses, chargée de conclure des conventions d'application de la politique de santé avec les autres acteurs du système (mutuelles, caisses de prévoyance..). Cette agence serait composée d'un directoire inamovible, à qui serait confié un pouvoir général de gestion des dépenses de santé en matière de soins ambulatoires, hospitaliers et de médicaments d'une part, et d'un conseil de surveillance d'autre part, chargé de nommer les membres du directoire et de contrôler et d'évaluer les décisions de ce dernier.

Il a conclu que, si l'on voulait rassurer les acteurs du système et redresser durablement les comptes de la sécurité sociale, il était nécessaire d'aboutir à une vraie réforme, et non à un compromis précaire.

M. Alain Vasselle, rapporteur du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l'assurance maladie, a souhaité savoir si le directoire, que le MEDEF appelle de ses voeux, aurait, face à l'interventionnisme fréquent des gouvernements, des marges d'action suffisantes pour assurer l'équilibre des comptes de l'assurance maladie. Il a demandé quelles mesures prendre pour responsabiliser davantage les usagers et les professionnels de santé. Enfin, il s'est interrogé sur le meilleur moyen de réduire le déficit de l'assurance maladie et sur l'opportunité d'une réouverture de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES).

Concernant les missions qui pouvaient être confiées au directoire, M. Jacques Creyssel a rappelé que, du côté des recettes, la Constitution ne lui permettait pas de fixer le montant de contributions, telles que la CSG, ce pouvoir relevant du Parlement. En revanche, du côté des dépenses, le directoire disposerait de marges de manoeuvre plus larges. Afin que la réforme soit cohérente, il a ajouté que le rétablissement des comptes était un préalable nécessaire, avant d'entreprendre des innovations comme l'introduction d'un régime complémentaire obligatoire pour les dépenses de santé, susceptible d'ailleurs d'aggraver encore les déficits. Concernant la responsabilisation des acteurs, il a indiqué que, même s'il entendait donner son avis sur les différentes pistes de réforme, le MEDEF ne souhaitait pas faire de propositions plus précises, n'ayant ni la légitimité, ni la compétence pour le faire.

Observant que le MEDEF se défaussait du problème, M. Guy Fischer s'est étonné de son refus de prendre des engagements en matière d'assurance maladie au nom d'un déficit de légitimité et de compétence, alors même qu'il n'avait pas utilisé cet argument lorsqu'il s'était agi de bénéficier d'exonérations de cotisations sociales. Il a déploré le même désintérêt pour les questions relatives à la santé au travail.

Soulevant le cas de l'indemnisation des accidents du travail et des maladies professionnelles, M. André Lardeux a attiré l'attention sur la multiplication des recours judiciaires des victimes de l'amiante et les déficits à prévoir sur ces comptes, se demandant s'il n'était pas souhaitable d'aborder cette question à l'occasion de la réforme globale de l'assurance maladie.

Partageant les préoccupations de M. Guy Fischer, M. Gilbert Chabroux a déploré le rejet du paritarisme et l'absence d'engagement clair du MEDEF sur la réforme de l'assurance maladie, alors même que l'ampleur des exonérations de cotisations sociales accordées aux entreprises, qu'il évaluait à 17 milliards d'euros, aurait dû, selon lui, avoir pour contrepartie l'exigence de créations d'emploi, ces créations ayant un impact positif sur le redressement des comptes de la sécurité sociale. En dépit des engagements pris par le précédent gouvernement, les faits n'ont pas démontré que cet objectif ait été atteint.

M. Serge Franchis a exprimé ses craintes vis-à-vis de la raréfaction des soins, proposant que la réflexion sur la réforme de l'assurance maladie porte aussi sur les moyens de prise en charge des malades.

Estimant que la résorption de la crise de l'assurance maladie dépendait également de la capacité de chacun à assumer ses responsabilités, M. Alain Gournac a estimé que le désengagement du MEDEF n'était pas légitime, surtout si l'on tient compte du fait que les salariés employés dans les entreprises étaient aussi des assurés sociaux.

Revenant sur la gestion des risques professionnels dans laquelle le MEDEF se disait très impliqué, M. Roland Muzeau a souhaité connaître sa position sur les insuffisances du système de déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles.

S'agissant de l'implication des organisations patronales dans la gestion de l'assurance maladie, M. Jacques Creyssel a répondu que le MEDEF ne pouvait intervenir dans tous les domaines, sauf à rencontrer des résistances sociales fortes, en particulier lorsqu'il s'agit de faire prévaloir un point de vue gestionnaire sur des sujets de société, tels que l'opportunité de fermer des hôpitaux. Il a ajouté que le MEDEF serait disposé à s'impliquer davantage dans un cadre paritaire s'il était autonome, ce qui n'était pas le cas aujourd'hui, puisque c'est l'État qui fixe le niveau des cotisations sociales. Il a justifié, à cet égard, les exonérations de cotisations sociales comme la contrepartie - d'ailleurs insuffisante - des charges supplémentaires pesant sur les entreprises, notamment à cause de la réduction du temps de travail de trente-neuf à trente-cinq heures, et comme le moyen le plus efficace de créer des emplois. Il a insisté sur la nécessité de favoriser la compétitivité de notre économie.

S'agissant de la qualité du système de soins, il s'est défendu de souhaiter la raréfaction des soins et a indiqué que le MEDEF avait pour objectif de permettre aux Français de bénéficier du meilleur système de soins qui soit, mais au meilleur prix.

S'agissant de la santé au travail, M. Bernard Caron a jugé que la gestion des risques professionnels (accidents du travail et maladies professionnelles) était le seul dossier de la protection sociale convenablement géré, puisque le nombre de victimes avait significativement baissé grâce à une politique de prévention efficace et une tarification intelligente. Il a recommandé de s'inspirer de cette réussite pour réformer les autres branches de la protection sociale. Il a toutefois reconnu que la gestion des maladies professionnelles était plus complexe, en raison de la faiblesse relative des connaissances en ce domaine, justifiant ainsi les lacunes observées sur les maladies liées à l'amiante. Il a considéré que la médiatisation de la crise liée à l'amiante ne devait pas occulter les progrès réalisés par ailleurs. Enfin, il a expliqué que les évolutions jurisprudentielles récentes en la matière avaient amené le MEDEF à approfondir sa réflexion sur les moyens d'améliorer l'indemnisation des victimes, notamment en s'inspirant des pays voisins et du régime des réparations civiles existant dans d'autres secteurs.

M. Nicolas About, président, s'est étonné de ce que le MEDEF se déclare non impliqué dans de nombreux domaines de la protection sociale, en particulier dans la politique du médicament, qui semble pourtant avoir un intérêt économique et commercial significatif pour les entreprises françaises.

M. Bernard Caron a répondu que la politique du médicament était inspirée par deux logiques contradictoires, celle de l'économie de marché et celle de l'État-providence, ce qui la rendait complexe aux yeux des opérateurs économiques. Reconnaissant que cette question revêtait une importance particulière pour l'industrie pharmaceutique, il a préconisé un meilleur diagnostic de la situation et la fixation d'un objectif clair.

M. Alain Vasselle, rapporteur du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l'assurance maladie, a souhaité connaître la position du MEDEF sur les conséquences de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), constatant que cette loi semblait réintégrer la loi de financement de la sécurité sociale dans la loi de finances.

Après avoir souligné que l'imbrication entre la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale s'expliquait par l'existence de régimes à la fois contributifs et redistributifs dans notre système de protection sociale, M. Bernard Caron a jugé mineur l'impact de la LOLF sur les comptes au motif que, quelle que soit leur base légale, les prélèvements demeuraient, de toutes les façons, toujours aussi élevés. Afin de savoir « qui paye quoi » en matière de sécurité sociale, il a ensuite suggéré que le souci de clarifier les comptes des régimes redistributifs, d'une part, et des régimes contributifs, d'autre part, devait prévaloir sur ce genre de réformes. Il a également recommandé une meilleure distinction entre le budget de la sécurité sociale et le budget de l'État, estimant que le premier ne devait pas être la variable d'ajustement financier du second. Enfin, pour assurer un meilleur parcours de santé des malades, il a plaidé pour la réhabilitation du carnet de santé, sans cesse proposée par le MEDEF, mais toujours refusée par les médecins et les usagers.

Audition de MM. Jean-Claude Mailly, secrétaire général, et Jean-Claude Mallet, secrétaire confédéral, responsable du secteur de la protection sociale, de la Confédération générale du travail-Force ouvrière (CGT-FO)

La commission a procédé à l'audition de MM. Jean-Claude Mailly, secrétaire général, et Jean-Claude Mallet, secrétaire confédéral, responsable du secteur de la protection sociale, de la Confédération générale du travail-Force ouvrière (CGT-FO).

M. Jean-Claude Mailly a justifié la nécessité de réformer l'assurance maladie par les lacunes d'un système que les ordonnances de 1996, qui avaient procédé à un début d'étatisation, n'étaient pas parvenues à rénover.

Il a considéré qu'il convenait de pondérer l'appréciation de la situation financière de l'assurance maladie par l'importance du budget global des régimes de protection collective, et que le déficit lui semblait préférable à l'exclusion de certaines populations du système.

Concernant l'équilibre budgétaire de l'assurance maladie, M. Jean-Claude Mailly a souhaité une clarification des comptes entre l'État et la sécurité sociale, estimant que les 20 milliards d'euros d'exonérations de charges accordées n'étaient pas intégralement compensés au régime général par l'État. De même, le coût de la TVA hospitalière et des études médicales était, à tort, imputé à la sécurité sociale. Selon lui, la prise en compte de ces transferts de charges relativisait l'ampleur des déficits.

Concernant la gestion du système, M. Jean-Claude Mailly a demandé à ce que les trois caisses nationales (CNAMTS, CANAM et MSA) soient les responsables exclusifs du pilotage de l'assurance maladie. Par conséquent, il s'est déclaré opposé à un copilotage associant les régimes complémentaires (mutuelles, assurances, caisses de prévoyance), symboles, selon lui, d'une amorce de privatisation du système.

Puis M. Jean-Claude Mailly a appelé de ses voeux une politique conventionnelle plus dynamique avec les professionnels de santé, qui ne porterait pas seulement sur la tarification, mais également sur la démographie médicale, pour corriger les inégalités d'accès aux soins.

Pour permettre un apurement de la dette, M. Jean-Claude Mailly a déclaré ne pas être défavorable à une prolongation de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) et a défendu le principe d'une hausse des cotisations patronales. En revanche, il s'est opposé à tout relèvement de la contribution sociale généralisée (CSG), dont le coût serait essentiellement assumé par les salariés et les retraités, sauf à ne le faire porter que sur les revenus financiers de placement.

Concernant la méthode de réforme, il a contesté le fait qu'il s'agisse d'une négociation classique, puisqu'en définitive, il appartiendra au Parlement de voter la loi, et il a préconisé un effort de consultation et de concertation approfondie. Il a également souhaité que le Gouvernement livre ses propositions dès la semaine prochaine.

M. Alain Vasselle, rapporteur du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l'assurance maladie, a souhaité des précisions sur trois points : le chiffrage des dépenses indues à la charge de la sécurité sociale, les pistes de réflexion pour une meilleure responsabilisation des professionnels et des usagers et le montant des économies et des recettes à attendre du plan de réforme présenté par la CGT-FO.

M. Jean-Claude Mailly a estimé à 18 milliards de francs le montant des charges de l'État inscrites au budget de la sécurité sociale. Il a affirmé que s'il approuvait la responsabilisation des acteurs, il préférait que celle-ci passe par une logique de prévention (par exemple, les campagnes réussies de sensibilisation de la population aux effets des antibiotiques), plutôt que de culpabilisation des assurés sociaux. Il a considéré qu'il fallait privilégier la maîtrise médicalisée et non la maîtrise financière. Enfin, il a recommandé un meilleur partage des compétences, notamment avec la création d'un comité scientifique chargé d'expertiser l'efficacité des médicaments, tandis que, de son côté, l'État conserverait son pouvoir de fixation des taux de remboursement. Il s'est déclaré favorable à la définition d'objectifs de dépenses indicatifs par le Parlement pour ne pas procéder par « enveloppes fermées » en matière de santé.

M. Gilbert Chabroux a déclaré qu'il partageait l'analyse sur la dédramatisation nécessaire de la question des comptes et a critiqué diverses annonces gouvernementales qui n'avaient d'autre but que de culpabiliser les assurés sociaux. Il a néanmoins souhaité connaître la réalité des fraudes à la carte vitale dénoncées par le ministre de la santé. Puis il a demandé à connaître le sentiment de la CGT-FO sur la place des organisations patronales dans le système paritaire actuel.

M. Alain Gournac a souhaité connaître la position de la CGT-FO sur la consommation excessive de médicaments dans notre pays, sur la réforme de l'hôpital et sur la création d'un dossier médical partagé.

M. Guy Fischer s'est interrogé sur la notion de périmètre de panier de soins remboursables et sur le paradoxe qui résulte de la concomitance entre les inégalités constatées dans la qualité des soins et les restructurations hospitalières sans précédent menées par les agences régionales hospitalières.

S'agissant des fraudes, M. Jean-Claude Mailly s'est d'abord élevé contre toute stigmatisation des populations, d'autant que, depuis les déclarations du ministre de la santé, l'ampleur de la fraude à la carte vitale a été démentie. S'agissant du paritarisme, s'il ne lui appartenait pas de juger de la participation des organisations patronales, celles-ci avaient toute légitimité pour faire partie d'un système dont le caractère paritaire est indiscutable au regard du financement essentiellement contributif de la sécurité sociale.

S'agissant de la haute autorité d'experts dont la création a été proposée, M. Jean-Claude Mailly a demandé à ce que, dans un souci de transparence, ses avis soient rendus publics. En revanche, du côté des malades, la plus stricte confidentialité du dossier médical était nécessaire, seul le médecin prescripteur devant y avoir accès.

Quant au périmètre du panier de soins remboursables, il a jugé cette notion restrictive comme la voie ouverte à la privatisation du système et s'est opposé à tout déremboursement de médicaments.

Enfin, M. Jean-Claude Mailly a vivement dénoncé le plan « Hôpital 2007 », estimant que pour l'été 2004, 22 % des lits seraient fermés dans les hôpitaux. La gestion de l'hôpital public devait relever de l'État et de la politique de santé publique, même s'il souhaitait une meilleure association des régimes obligatoires de sécurité sociale.

Solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées - Audition de M. Hubert Falco, ministre délégué aux personnes âgées

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, sous la présidence de M. Nicolas About, président, la commission a procédé à l'audition de M. Hubert Falco, ministre délégué aux personnes âgées, sur le projet de loi n° 299 (2003-2004), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.

M. Hubert Falco, ministre délégué aux personnes âgées, a déclaré que les 15.000 décès causés par la canicule de l'été 2003 ont révélé les carences des dispositifs d'aide et d'accueil des personnes âgées fragiles et imposé l'urgence d'une prise en compte des conséquences du vieillissement.

A ce titre, il a rappelé que le Premier ministre avait concrétisé ces moyens d'action en octobre dernier dans l'annonce d'un plan ambitieux au bénéfice des personnes âgées et handicapées. Il a précisé que ce plan permettrait d'assurer un financement pérenne des diverses actions d'accompagnement du vieillissement, dont le financement de l'allocation personnalisée d'autonomie, et de combler le retard pris par les politiques publiques en ce domaine. Une enveloppe de 9 milliards d'euros serait consacrée à sa mise en oeuvre d'ici à 2008, partagée équitablement entre les actions menées au bénéfice des personnes âgées et celles prévues en faveur des personnes handicapées.

M. Hubert Falco, ministre délégué aux personnes âgées, s'est félicité de ce que ce financement soit assuré par l'instauration d'une journée de solidarité, en raison du caractère symbolique et fraternel de cette mesure. Il a insisté sur le choix du Gouvernement de recueillir le produit d'une journée de travail offerte par l'ensemble des salariés, plutôt que de pénaliser le pouvoir d'achat des ménages en augmentant la fiscalité.

Il a enfin affirmé que la création d'une caisse de solidarité constitue en soi une garantie que les sommes dédiées à l'amélioration du sort des personnes âgées et des personnes handicapées ne seront pas détournées de leur objectif.

M. André Lardeux, rapporteur, a rappelé que le Gouvernement a donné des instructions pour que les établissements d'accueil de personnes âgées soient équipés de salles rafraîchies. Il s'est interrogé sur l'existence de moyens financiers permettant d'accompagner cette annonce. Il a ensuite constaté que le projet de loi ne précise pas clairement la nature des organes, ni l'étendue des missions de la caisse nationale de solidarité. Il a donc demandé si, dans l'attente du futur projet de loi qui procédera à ces définitions, il ne serait pas préférable de confier, au fonds de financement de l'allocation personnalisée d'autonomie, la gestion provisoire des ressources collectées au titre de la journée de solidarité.

M. Hubert Falco, ministre, a observé que la plupart des personnes âgées victimes de la canicule sont décédées du fait de leur incapacité à récupérer, durant la nuit, de la fatigue accumulée pendant la journée, en raison du maintien de températures nocturnes élevées. Il a rappelé qu'une circulaire, publiée en février, dernier avait incité l'ensemble des établissements pour personnes âgées à s'équiper d'une pièce rafraîchie en prévision de l'été 2004. Des financements, abondés à hauteur de 40 millions d'euros, permettront de subventionner 40 % de ces équipements, dont le coût est plafonné forfaitairement à 15.000 euros, pour tout établissement habilité à l'aide sociale.

Il a ensuite estimé que le fonds de financement de l'APA n'est pas en mesure d'accueillir des sommes destinées à financer tout à la fois des actions en faveur des personnes âgées et des personnes handicapées et que, pour cette raison, le Gouvernement a préféré qu'une caisse spécifique soit destinataire du produit de la journée de solidarité.

M. André Lardeux, rapporteur, a rappelé la publication récente du rapport d'étape de l'étude commandée par le Gouvernement à MM. Raoul Briet et Pierre Jamet, dans le cadre du plan de solidarité pour les personnes dépendantes. Ce rapport provisoire propose de conférer aux départements une fonction de chef de file dans la gestion de la prise en charge de la dépendance et du handicap, cette fonction justifiant par ailleurs, que puisse leur être confiée la gestion de certains crédits aujourd'hui gérés par l'assurance maladie. Il s'est interrogé sur l'accueil réservé par le Gouvernement à ses propositions.

Il a également constaté que les dispositions prévues par le projet de loi entraînent plusieurs dépenses directes ou indirectes pour les collectivités territoriales et s'est enquis des dispositifs financiers prévus par le Gouvernement pour les compenser.

M. Hubert Falco, ministre délégué aux personnes âgées, a déclaré que le Gouvernement ne disposait pas encore des conclusions définitives du rapport cité. Il appartiendra finalement à la représentation nationale, le moment venu, de suivre, ou non, les préconisations qu'il formulera. Il a estimé, par ailleurs, que le projet de loi n'imposera pas aux collectivités territoriales des charges telles qu'elles justifient un dispositif de compensation.

M. André Lardeux, rapporteur, a constaté que les dispositions du projet de loi permettront de financer la prestation de compensation en faveur des personnes handicapées, à hauteur de 850 millions d'euros. Il s'est interrogé sur la collectivité qui serait financeur, en dernier ressort, de cette prestation.

Il a ensuite souhaité savoir si le Gouvernement avait étudié des mesures concrètes permettant d'inciter les personnes vieillissantes ou leurs enfants à contracter une assurance personnelle, pour elles-mêmes ou pour leurs parents, permettant de les prémunir de manière complémentaire contre le risque de perte d'autonomie.

M. Hubert Falco, ministre, a estimé qu'il appartiendra au Parlement dans le cadre de l'examen du texte relatif aux droits et à l'égalité des chances des personnes handicapées de déterminer la collectivité à laquelle il reviendra la charge de financer, en ultime lieu, la prestation de compensation. Concernant les dispositifs de prévoyance ou d'assurance dépendance, il a considéré que les pouvoirs publics devaient avant tout répondre à une situation d'urgence et que, dès lors, il relevait de la responsabilité individuelle de compléter la prise en charge prévue dans le cadre de la solidarité nationale.

M. Serge Franchis s'est inquiété de la situation d'asphyxie financière dans laquelle se trouvent beaucoup d'associations d'aides à domicile dans le département de l'Yonne et a souhaité connaître les mesures que le Gouvernement serait susceptible de prendre pour leur apporter un soutien actif. Il a ensuite estimé hautement souhaitable d'inciter les personnes à recourir à des systèmes de prévoyance contre la dépendance.

M. Gilbert Chabroux a affirmé que le projet loi présenté par le Gouvernement recueillait contre lui une hostilité générale, tant des partenaires sociaux que des partis politiques, hostilité dont témoigne notamment l'opposition, au projet, du groupe de l'union pour la démocratie française à l'Assemblée nationale.

Il a souligné que la véritable motivation du projet de loi était de procéder à la remise en cause de la loi sur la réduction du temps de travail et a cité une étude réalisée par l'observatoire français des conjonctures économiques, estimant que les dispositions du projet de loi pourraient avoir pour effet la destruction de 20.000 à 30.000 emplois.

M. Jean-Pierre Godefroy a partagé cette critique et s'est inquiété des conséquences financières, sur les établissements publics de santé, de la contribution de 0,3 % assise sur la masse salariale prévue par le projet loi.

M. Bernard Cazeau a estimé que la dépendance relevait de la solidarité nationale et n'avait, dès lors, pas vocation à être financée par un prélèvement reposant sur les seuls revenus du travail. Il s'est élevé contre les transferts de charges vers les collectivités territoriales résultant de ce projet de loi, précisant que le coût de la cotisation pour le conseil général de Dordogne s'élèverait à 130.000 euros.

Il a enfin déploré le manque de cohérence législative entre l'ensemble des textes nécessaires à la mise en oeuvre du plan de solidarité pour les personnes dépendantes, dont certains aspects relèvent du projet de loi relatif aux droits et à l'égalité des chances des personnes handicapées, d'autres de la future réforme de l'assurance maladie, du présent projet de loi ou des textes relatifs à la décentralisation.

M. Michel Esneu s'est félicité de l'esprit généreux des dispositions du projet de loi, mais a déploré que l'équipement des établissements accueillant des personnes âgées en local rafraîchi ait été recommandé par une mesure contraignante, généralisée sur l'ensemble du territoire hors de toute considération locale.

M. Guy Fischer a rappelé l'hostilité du groupe communiste au projet de loi et a regretté que les débats qu'il occasionne n'aient pas lieu dans le cadre de la réforme de l'assurance maladie. Il a souligné l'opposition de l'ensemble des partenaires sociaux aux dispositions du texte et s'est inquiété des risques de privatisation de la prise en charge de la dépendance que pourrait susciter l'adoption de dispositions favorisant la prévoyance individuelle en matière d'autonomie.

M. Gérard Dériot a signalé que l'ensemble des établissements accueillant des personnes âgées dans l'Allier a déjà bénéficié d'une subvention du conseil général afin de s'équiper d'une salle rafraîchie. Il a demandé si ce département pourrait néanmoins percevoir, a posteriori, les incitations financières prévues à cet effet par le Gouvernement.

M. Paul Blanc s'est interrogé sur la place réservée aux services de maintien à domicile dans le cadre du « plan blanc » annoncé par le ministre.

M. Jean-Louis Lorrain a rappelé que la région Alsace bénéficie désormais d'une couverture gérontologique de haute qualité, mais que des problèmes d'articulation demeurent entre le secteur sanitaire et le secteur médico-social. Il s'est enquis, en conséquence, des mesures qui pourraient être prises afin de parvenir à une meilleure coordination entre ces deux secteurs.

M. Claude Domeizel a estimé que la canicule servait d'alibi au Gouvernement pour obtenir du Parlement le vote d'un texte aux dispositions inéquitables. Il a estimé que l'institution d'un dispositif de veille et d'alerte relève du domaine réglementaire et que les dispositions afférentes à ce plan ne figurent dans le projet de loi que parce qu'elles constituent des charges nouvelles non compensées pour les collectivités territoriales. Il a ensuite fait part de ses inquiétudes devant le peu de précision des dispositions proposées par le texte pour la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.

En réponse, M. Hubert Falco, ministre délégué aux personnes âgées, a observé que les mesures prévues dans le cadre du plan de solidarité pour les personnes dépendantes permettraient d'améliorer la situation du secteur de l'aide à domicile. Il a en outre indiqué que le lundi de Pentecôte ne constitue pas en soi une fête religieuse, cette journée étant d'ailleurs travaillée dans l'État du Vatican.

Concernant les établissements de santé, il a précisé que la taxe de 0,3 % s'appliquerait sur l'ensemble de la masse salariale, mais que le coût serait répercuté sur les comptes de l'assurance maladie en proportion de la partie soin, et sur les résidants pour la partie relative à l'hébergement.

M. Hubert Falco, ministre délégué aux personnes âgées, a ensuite rappelé que les mesures incitant au rafraîchissement d'une pièce dans les établissements accueillant des personnes âgées n'impliquent pas l'obligation de climatiser les locaux.

Il a insisté sur la nécessité d'une mise en oeuvre rapide de certaines dispositions du projet de loi, notamment le plan d'urgence ou encore le vote des mesures financières permettant d'assurer le financement de l'allocation personnalisée d'autonomie pour l'année 2004.

Il a enfin précisé à M. Gérard Dériot que le bénéfice des subventions d'équipement permettant l'installation de salle rafraîchie serait ouvert à toutes les maisons accueillant des personnes âgées qui auraient procédé à ces investissements à compter du mois de septembre 2003.

M. Nicolas About, président, a rappelé que les 15.000 morts causés par la canicule constituent une blessure profonde pour la nation tout entière et que cette plaie justifie en elle-même qu'un effort financier à la mesure de l'enjeu soit entrepris.

Jeudi 13 mai 2004

- Présidence de M. Nicolas About, président -

Autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées - Auditions

La commission a procédé aux auditions sur le projet de loi n° 299 (2003-2004), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à lasolidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.

Audition de M. Jean-Marie Spaeth, président du conseil d'administration de la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

La commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Jean-Marie Spaeth, président du conseil d'administration de la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS).

M. André Lardeux, rapporteur, a souhaité connaître la position du conseil d'administration de la CNAMTS sur ce projet de loi, ainsi que les éventuels termes de l'alternative que l'on pouvait envisager pour assurer la prise en charge du risque autonomie-dépendance.

M. Jean-Marie Spaeth a toutd'abord souligné le caractère partiel du débat en cours en raison, d'une part, de la perspective d'une seconde loi sur les missions de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), dont le contenu reste à déterminer, d'autre part de l'attente des conclusions définitives du rapport confié à MM. Raoul Briet et Pierre Jamet sur ce sujet, qui ne sont pour l'instant disponibles que sous la forme d'un document d'étape.

Après avoir relevé le caractère exceptionnel de l'avis négatif sur le projet de loi, rendu unanimement, tant par le conseil d'administration de la CNAMTS que par ceux des trois autres organismes gestionnaires consultés du régime général, la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAVTS), l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) et la caisse centrale de mutualité sociale agricole (CCMSA), il a fait part de son opposition au dispositif retenu, pour des raisons tenant à la fois à son fond et à sa forme. Sur la forme, il a déploré le manque de concertation initial, ainsi quel'éclatement de la discussion entre différents projets de loi actuellement en navette ou en cours de préparation. Sur le fond, et en s'appuyant sur le rapport d'étape Briet - Jamet établi dans le cadre de la mission de préfiguration de la CNSA, il a fait part de l'inquiétude du conseil d'administration de la CNAMTS, qui redoute que la création de la CNSA ne soit la première étape d'un processus aboutissant à la partition de la prise en charge des soins des assurés sociaux. Après avoir considéré que le projet de loi porterait alors en germe un risque de rupture du pacte de solidarité entre les générations, il a annoncé que la CNAMTS et les autres organismes gestionnaires cités seront amenés à présenter, dans les prochains jours, un ensemble de contre-propositions.

Après avoir rappelé que la CNSA devrait fournir une somme de 170 millions d'euros afin d'accélérer la médicalisation des maisons de retraite,M. André Lardeux, rapporteur, s'est interrogé sur les dispositions de l'article 9 du projet de loi, qui prévoit une contribution des régimes d'assurance maladie pour le financement des établissements accueillant des personnes âgées.

M. Jean-Marie Spaeth a souligné qu'en 2002, l'assurance maladie avait consacré 2,2 milliards d'euros au financement de l'accueil des personnes âgées. Il s'est ensuite déclaré totalement opposé à l'orientation envisagée par le document d'étape Briet - Jamet consistant à transférer la totalité de l'objectif national de dépenses de l'assurance maladie (ONDAM) médico-social, soit un montant annuel de l'ordre de 8 milliards d'euros, aux départements. Il a considéré que ce schéma était condamnable, dans la mesure où il était de nature à remettre en question l'effectivité de la tarification ternaire - avec trois parties distinctes pour les soins, l'hébergement et la dépendance - des établissements d'hébergement des personnes âgées dépendantes. Rappelant que ce mécanisme apportait un élément de transparence et de bonne gestion, il s'est inquiété de la perspective de voir une part des dépenses de soins, dans ces établissements, s'imputer sur celles des soins de ville, et échapper ainsi à la régulation d'ensemble de la dépense.

Il a également jugé qu'au-delà de la question du périmètre des compétences envisagé pour la CNSA par rapport à celui de la CNAMTS, se posait celle du choix de société d'offrir un accès aux soins le plus égalitaire possible pour les assurés sociaux.

M. Nicolas About, président, a fait observer que le rapport d'étape Briet - Jamet n'était qu'un simple document de travail et, qu'en tant que tel, il n'avait fait l'objet d'aucune approbation officielle, de quelque nature que se soit.

M. Jean-Marie Spaeth a considéré par ailleurs que confier le forfait soins aux présidents de conseils généraux n'apparaissait pas cohérent sur le plan médical et était porteur d'un risque réel d'augmentation des dépenses. Considérant que la CNAMTS assurait au mieux la cohérence des négociations avec les interlocuteurs de référence de l'assurance maladie, il craignait de voir apparaître, à la place d'accords nationaux, une succession d'accords locaux les plus divers entre les présidents de conseils généraux et les différentes catégories de professionnels.

M. André Lardeux, rapporteur, a observé que le schéma envisagé excluait le risque d'un dérapage des dépenses, dans la mesure où l'utilisation des fonds reposait sur le principe d'une enveloppe fermée et que, seule, une décision d'un conseil général pouvait le conduire, sur une base strictement volontaire, à accroître son intervention dans le domaine de la dépendance. Il a également précisé que la contribution de la CNAMTS transiterait par la CNSA, avant d'être répartie par celle-ci entre les départements, suivant un mécanisme analogue à celui de l'actuel fonds de financement de l'allocation personnalisée d'autonomie (FFAPA).

M. Jean-Marie Spaeth a indiqué que la CNAMTS proposerait que les présidents de conseils généraux ne puissent établir la tarification de la partie soins sans avoir au moins recueilli, au préalable, un avis conforme de sa part.

M. André Lardeux, rapporteur, a posé la question de savoir si les comptes de la CNSA devaient figurer, ou non, dans la loi de financement de la sécurité sociale.

M. Jean-Marie Spaeth a précisé que deux options étaient en fait possibles : ou bien choisir, comme il le souhaitait et comme l'illustre l'exemple de la branche accidents du travail-maladies professionnelles, de créer un cinquième risque dans le cadre même de l'assurance maladie, ou bien décider que la dépendance ne relevait pas de la sécurité sociale. Il a ajouté que, dans ce deuxième cas, le rattachement de la CNSA à la loi de financement de la sécurité sociale deviendrait impossible. Après avoir indiqué que le problème ne résidait pas tant dans la création de la CNSA que dans la définition de son futur rôle, il a considéré que celui-ci devrait se limiter à celui d'un simple fonds.

M. Serge Franchis a rappelé que, dès la création de la prestation spécifique dépendance, s'était posée la question de la prise en charge de la dépendance dans le cadre d'un cinquième risque de la sécurité sociale ou par le biais de mécanismes d'assurance. Il s'est interrogé sur la notion de dépendance, en se demandant s'il s'agissait d'un état pathologique relevant d'une prise en charge sanitaire ou nécessitant un complément de ressources, à l'image des personnes titulaires du statut de grand invalide de guerre.

M. Jean-Marie Spaeth a considéré que les trois volets de la tarification des établissements accueillant des personnes étaient d'une nature différente, dans la mesure où la partie soins relevait de prestations en nature, tandis que l'hébergement et le traitement de la dépendance correspondaient tous deux à des prestations en espèces. Dans ces conditions, il a estimé qu'il n'était pas acceptable d'envisager que les dépenses de soins soient différentes sur le territoire national en fonction du degré de richesse et des choix faits par les départements.

M. André Lardeux, rapporteur, a souligné que le volet dépendance comportait également, pour une large part, des prestations en nature, notamment pour les personnes bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) à domicile.

M. Nicolas About, président, a fait valoir l'utilité, en confiant plus de pouvoirs aux conseils généraux, de disposer d'un opérateur de proximité, qui est, de surcroît, responsable devant les électeurs.

M. Gilbert Chabroux a souhaité pouvoir disposer du texte de l'avis rendu par le conseil d'administration de la CNAMTS. Il a également indiqué qu'il attendait avec intérêt la publication, par la CNAMTS et les autres caisses gestionnaires du régime général, des contre-propositions annoncées. Réaffirmant son opposition à la solution retenue par le Gouvernement, il a déclaré que la suppression d'un jour férié pour financer la prise en charge de la dépendance revenait à instituer une bonne oeuvre obligatoire et sélective, constituant une rupture avec le pacte social. Il a enfin insisté sur la nécessité de trouver de nouveaux moyens financiers.

M. Jean-Marie Spaeth a indiqué qu'au-delà de l'avis négatif rendu par le conseil d'administration de la CNAMTS, il considérait ne pas avoir la légitimité suffisante pour se prononcer, ès qualité, sur le principe même de la suppression d'un jour férié pour financer la dépendance, ni pour élaborer des propositions financières alternatives. Pour autant, il a estimé, à titre personnel, que son opposition au présent projet de loi n'allait pas jusqu'à considérer qu'il remettait en cause le pacte social.

M. Guy Fischer s'est déclaré fondamentalement opposé à ce texte, au motif qu'il constituait, à ses yeux, le premier pas d'un processus conduisant au démantèlement de la sécurité sociale. Il a par ailleurs regretté que le sujet de la dépendance et des missions de la CNSA soit simultanément abordé dans de nombreux projets de loi en discussion ou en préparation, ce qui nuit à la clarté du débat. Après avoir estimé que les besoins des personnes âgées dépendantes étaient sous-estimés, il a affirmé que ce texte constituait, après la catastrophe sanitaire de l'été dernier, un projet de loi-alibi.

Soulignant que le schéma retenu par le Gouvernement tendait fondamentalement à remettre en cause la législation sur les trente-cinq heures, à laquelle certains n'hésitaient pas à attribuer une part de responsabilité dans le bilan de la crise de la canicule, il a rappelé que le groupe communiste républicain et citoyen défendait, pour sa part, la prise en charge de la dépendance dans le cadre d'un cinquième risque de la sécurité sociale géré par la CNAMTS.

Audition de M. Pierre Burban, président du conseil d'administration de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS)

La commission a ensuite procédé à l'audition de M. Pierre Burban, président du conseil d'administration de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS).

M. André Lardeux, rapporteur, a souhaité connaître la position des membres du conseil d'administration de l'ACOSS sur le projet de loi, ainsi que leurs éventuelles propositions alternatives.

M. Pierre Burban a indiqué que le conseil d'administration de l'ACOSS avait exprimé son point de vue dans une résolution critique adoptée à l'unanimité, par laquelle il déplore le manque de concertation préalable et l'insuffisante mise en cohérence des différents projets du Gouvernement. Sur le fond, il s'est inquiété du risque de déstructuration de la sécurité sociale et de rupture du pacte de solidarité que comporte le projet de loi. Le conseil d'administration n'a pas élaboré de propositions alternatives, mais serait favorable à la prise en charge de la dépendance par la sécurité sociale.

M. André Lardeux, rapporteur, a ensuite demandé des précisions sur le rôle que serait appelée à jouer l'ACOSS dans la perception et la gestion de la nouvelle cotisation destinée à financer l'autonomie.

M. Pierre Burban a répondu que les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) prélèveraient la cotisation et que son produit serait centralisé par l'ACOSS. Le prélèvement s'opèrerait en même temps que celui des cotisations d'assurance maladie, dont l'assiette est identique. Une convention, à négocier entre l'ACOSS et la future caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), déterminerait les conditions de versement des fonds à cette dernière. La responsabilité de la trésorerie incomberait à la CNSA.

M. André Lardeux, rapporteur, s'étant interrogé sur l'opportunité d'inclure les comptes de la CNSA dans les lois de financement de la sécurité sociale, M. Pierre Burban a estimé qu'il revenait à l'Etat de répondre à cette question.

Puis M. André Lardeux, rapporteur, a demandé si les exonérations de charges sociales s'appliqueraient aussi à la nouvelle cotisation pour l'autonomie.

M. Pierre Burban a répondu que cette question devrait faire l'objet d'un examen plus approfondi, mais qu'il lui paraissait, à première vue, difficile d'appliquer les allègements de charges à cette cotisation spécifique.

M. Alain Vasselle a souhaité savoir si la substitution d'une journée de travail à des heures supplémentaires n'allait pas entraîner un manque à gagner pour la sécurité sociale.

M. Pierre Burban a considéré que cet effet serait marginal, car la mensualisation des salaires réduit beaucoup l'impact d'une journée de travail supplémentaire.

M. Guy Fischer a fait part de ses inquiétudes, renforcées par la prise de position hostile du conseil d'administration de l'ACOSS sur l'avenir de la sécurité sociale.

M. Yves Krattinger a souhaité savoir si le conseil d'administration de l'ACOSS, en dépit de son analyse globalement critique, portait un jugement positif sur certains aspects du projet de loi.

M. Nicolas About, président, a demandé quelle était sa position sur une éventuelle départementalisation des crédits médico-sociaux relevant actuellement de l'assurance maladie.

M. Pierre Burban a indiqué que le conseil d'administration de l'ACOSS approuvait les objectifs du projet de loi et qu'il reconnaissait un rôle aux départements dans la prise en charge de la dépendance. Toutefois, il préférerait que cette question soit prise en charge par la sécurité sociale, qui établirait alors un partenariat avec les conseils généraux. Il craignait que le nouveau dispositif prévu par le projet de loi s'articule difficilement avec ceux déjà mis en place par la caisse nationale d'assurance maladie (CNAM), la caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) ou la caisse nationale d'allocations vieillesse (CNAV) et ne vienne ajouter au manque de lisibilité des financements.

M. Claude Domeizel a demandé si le nouveau dispositif allait occasionner des frais de gestion supplémentaires pour la sécurité sociale, notamment en raison des transferts de crédits des caisses de retraite vers la CNSA.

M. Pierre Burban a indiqué que la sécurité sociale ne supporterait pas de frais de gestion supplémentaires et que les fonds en provenance des régimes vieillesse ne transiteraient pas par l'ACOSS.

M. André Lardeux, rapporteur, a précisé que ces fonds étaient actuellement versés au fonds de financement de l'allocation personnalisée pour l'autonomie (FFAPA), auquel la CNSA va simplement se substituer.

Audition de M. Marcel Lesca, vice-président du conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAVTS)

La commission a enfin procédé à l'audition de M. Marcel Lesca, vice-président du conseil d'administration de la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAVTS).

M. Marcel Lesca a rappelé les principales orientations retenues par la CNAVTS dans le domaine de la dépendance. Il s'est interrogé sur la légitimité des départements à traiter les cas de dépendance les plus lourds, correspondant aux groupes iso-ressources (GIR) 1 à 4, dans la mesure où ces collectivités n'ont pas de compétence dans le domaine sanitaire, et s'est dit favorable à leur prise en charge par la sécurité sociale. Elle seule est à même, en effet, d'avoir une approche globale de la personne, alliant dimension sanitaire et accompagnement social.

Il a rappelé que le conseil d'administration de la CNAVTS avait émis, en décembre 2003, un avis défavorable sur le projet de loi. De plus, la CNAVTS, la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), la caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) et l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) ont déploré, dans une déclaration commune, un manque de concertation dans la préparation du texte, un risque de rupture du pacte de solidarité constitutif de la sécurité sociale et l'absence de définition précise du périmètre d'intervention de la future caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA).

Il a ensuite évoqué la coopération, déjà ancienne, entre la CNAVTS et les conseils généraux autour de la question de la dépendance et s'est dit ouvert à de nouveaux partenariats que la CNSA devrait animer et coordonner.

M. André Lardeux, rapporteur, a demandé s'il était envisageable que la CNAVTS prenne en charge des cotisations d'assurance dépendance complémentaire pour certains de ses assurés aux revenus modiques.

Tout en admettant que la CNAVTS n'avait pas encore étudié précisément cette question, M. Marcel Lesca a exprimé quelques réserves. Ces dernières années, à la suite de la création de la prestation spécifique dépendance (PSD) et de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), la CNAVTS a recentré son action sur les personnes âgées non dépendantes. De plus, les fonds de la caisse ont vocation à financer des prestations, et non à verser des cotisations.

M. Claude Périnel, directeur national de l'action sociale à la CNAVTS, a ajouté que la caisse avait toujours veillé à individualiser ses mesures d'aide aux personnes âgées, notamment au niveau des caisses régionales qui organisent l'aide à domicile. La CNAVTS s'interroge aujourd'hui sur les moyens de contribuer au financement de l'hébergement des personnes âgées en établissement.

M. André Lardeux, rapporteur, a ensuite demandé des précisions sur les partenariats que la CNAVTS serait appelée à nouer avec la future CNSA.

M. Marcel Lesca a confirmé la volonté de la CNAVTS de contribuer au bon fonctionnement du dispositif. La caisse souhaite, en particulier, diversifier et améliorer la qualité de l'offre de services aux personnes âgées. Le réseau des caisses régionales du régime général doit rester un acteur important du système.

En réponse à une question de M. André Lardeux, rapporteur, il a estimé que les comptes de la CNSA, qui relèvent de la solidarité nationale, avaient vocation à figurer dans la loi de financement de la sécurité sociale.

M. Guy Fischer a demandé si l'on devait s'attendre à une augmentation de la demande de places d'hébergement en établissements pour personnes âgées dépendantes (EPAD).

M. Claude Périnel a rappelé que les EPAD étaient subventionnés par l'assurance maladie et la CNAVTS. Du fait de la création de l'allocation personnalité d'autonomie (APA), la CNAVTS souhaite se recentrer sur les personnes relevant des GIR 5 et 6, et envisage, dans le cadre de la négociation de sa prochaine convention d'objectifs et de gestion, d'associer les départements au financement de ces établissements. Cela permettrait de réorienter les fonds, afin de diversifier l'offre de services d'aide à domicile et de développer des formules intermédiaires entre l'hébergement en établissement et le maintien à domicile.

M. Alain Vasselle a souhaité savoir si la caisse avait une opposition de principe à ce que le fonds d'action sociale serve à financer des cotisations à une assurance complémentaire dépendance pour des personnes à faibles revenus. Il a fait valoir qu'il serait moins coûteux de verser des cotisations d'assurance que de prendre en charge, ensuite, les personnes dépendantes. Il a également demandé si l'on allait s'orienter vers une diminution de la prise en charge des heures d'aide ménagère pour les personnes relevant des GIR 5 et 6.

M. Marcel Lesca a indiqué que le conseil d'administration de la caisse ne s'était pas encore prononcé sur l'opportunité de développer une assurance complémentaire dépendance.

M. Claude Périnel a précisé que, le financement de la dépendance ne relevant pas de la CNAVTS, la prise en charge de cotisations d'assurance ne s'accompagnerait d'aucun gain financier pour la caisse. Il a indiqué que le nombre d'interventions d'aide ménagère n'avait pas diminué. Un accord de mars 2002 a eu pour effet de revaloriser la qualification et les salaires des aides à domicile et la caisse a accompagné financièrement ces améliorations, sans diminuer le nombre des interventions. Ces mesures d'aide bénéficient aux personnes relevant des GIR 5 et 6 et sont menées en coordination avec les conseils généraux et les centres locaux d'information et de coordination gérontologique (CLIC). La caisse s'efforce de réduire l'écart entre les besoins évalués et l'aide à domicile réalisée.

M. Alain Vasselle a souligné que l'APA avait été une mesure coûteuse et que l'on pouvait être tenté de réaliser des économies en inscrivant les personnes dépendantes dans un GIR ne reflétant pas leur degré réel de dépendance.

M. Marcel Lesca a rappelé la pluralité de services chargés d'évaluer la dépendance et a indiqué que la caisse avait décidé d'engager des expérimentations pour améliorer ses procédures. Il a souligné qu'elle avait, par ailleurs, récemment revalorisé les tarifs des aides ménagères, mais que les crédits dégagés au niveau national ne sont pas toujours perceptibles sur le terrain, les professionnels jugeant ces améliorations encore insuffisantes.

Désignation d'un candidat - Conseil national du bruit

La commission a désigné M. Georges Ginoux comme candidat à la nomination du Sénat pour siéger au sein du Conseil national du bruit, en remplacement de Mme Nelly Olin.