Travaux de la commission des affaires sociales



Mardi 18 mai 2004

- Présidence de M. Nicolas About, président -

Solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées - Examen du rapport

La commission a procédé à l'examen du rapport de M. André Lardeux sur le projet de loi n° 299 (2003-2004), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à lasolidarité pour l'autonomie despersonnes âgées et des personnes handicapées et la proposition de loi n° 145 (2003-2004), de M. Alain Vasselle, relative à lacréation d'une assurance dépendance.

M. André Lardeux, rapporteur, a tout d'abord rappelé la gravité du drame de la canicule, qui a mis en évidence, à l'été 2003, la nécessité de mieux prendre en charge les personnes âgées dépendantes. Le texte présenté par le Gouvernement, qui s'inscrit dans un programme d'actions plus vaste, propose un mode de financement original pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.

Il comporte trois titres : le premier est consacré à la mise en place d'un dispositif de veille et d'alerte, le deuxième institue la « journée de solidarité » et le troisième prévoit les dispositions créant une Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées et les modalités de son financement.

M. André Lardeux, rapporteur, a présenté le volet préventif qui comprend, d'une part, la définition d'un plan départemental de veille et d'alerte, d'autre part, la tenue d'un fichier communal des personnes âgées et des personnes handicapées permettant aux autorités de disposer rapidement de la liste des personnes auxquelles une attention particulière devra être portée. Il a, sur ce point, considéré que la charge supplémentaire qui en résultera, pour les communes, justifie qu'une compensation financière leur soit accordée, conformément à l'article 72-2 de la Constitution.

Il a ensuite exposé le principe de la journée de solidarité qui, s'inspirant du modèle allemand, consiste à transformer un jour férié en jour ouvré sans rémunération supplémentaire afin de dégager des moyens financiers nouveaux à affecter à la prise en charge de la dépendance. En rupture avec la tendance à la réduction du temps de travail, cette mesure aurait pour effet d'accroître de 0,4 % le temps de travail des Français. Le choix de ce dispositif s'explique par le fait que la préservation de notre protection sociale ne peut plus reposer sur l'augmentation de la pression fiscale, mais suppose un effort supplémentaire afin d'accroître la richesse nationale.

M. André Lardeux, rapporteur, a rappelé que l'instauration de cette journée préserverait le revenu des ménages : elle ne donnerait certes pas lieu à rémunération supplémentaire, mais les salariés mensualisés, auxquels les jours fériés sont déjà payés, ne subiraient aucune perte de salaire. Par ailleurs, sa mise en oeuvre devrait permettre l'augmentation de la production des entreprises privées et une amélioration du fonctionnement des services publics.

M. André Lardeux, rapporteur, a ensuite évoqué les difficultés pratiques que pose l'application de cette mesure, notamment dans les entreprises où les jours fériés ne sont pas chômés et pour lesquelles la journée de solidarité n'entraînerait pas systématiquement de production supplémentaire. Il a également évoqué la situation des salariés non mensualisés qui bénéficient généralement du chômage des jours fériés, mais sans être rémunérés et pour lesquels il semblait difficile d'imposer une journée supplémentaire de travail sans aucune contrepartie financière.

Conscients de ces difficultés, le Gouvernement, puis l'Assemblée nationale, ont opéré les assouplissements nécessaires : le projet de loi propose désormais que les partenaires sociaux fixent, par la négociation, la date de la journée de solidarité et que le lundi de Pentecôte ne soit imposé qu'à défaut d'accord. Il est également prévu de rémunérer les salariés non mensualisés s'ils étaient amenés à travailler une journée de plus et d'aménager le régime applicable aux salariés à temps partiel ou à ceux changeant d'employeur en cours d'année.

Puis M. André Lardeux, rapporteur, a présenté la seconde innovation du projet de loi : le financement de l'autonomie des personnes âgées ou des personnes handicapées par une Caisse nationale dédiée à cet objet et les modalités de calcul des ressources nouvelles. Sur la base estimée de la richesse supplémentaire produite par une journée travaillée, le Gouvernement a considéré qu'une contribution équivalente à 0,3 % de la masse salariale pouvait être demandée aux entreprises. Celle-ci sera instituée, calculée et recouvrée selon les mêmes modalités que les cotisations patronales d'assurance maladie et devrait rapporter 1,6 milliard d'euros, soit 1,2 milliard versé par les employeurs privés et 400 millions par les employeurs publics. En y ajoutant les 300 millions d'euros attendus de la contribution additionnelle à la taxe de 2 % sur les revenus du capital, on évalue à 1,9 milliard d'euros les moyens nouveaux affectés à la Caisse nationale de solidarité pour la prise en charge de l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.

Sur ce point, M. André Lardeux, rapporteur, a précisé que, dans l'attente des conclusions du rapport Briet-Jamet, le projet de loi ne pouvait pour l'instant prévoir, de manière définitive, les organes et les missions de cette Caisse. Cette question sera traitée d'ici quelques mois dans un texte de loi ultérieur.

Il a ajouté qu'il ne lui paraissait pas souhaitable que la gestion du risque dépendance soit confiée à la sécurité sociale, en raison de sa situation financière d'abord, et parce qu'il serait préjudiciable de se priver de la riche expérience des départements dans la prise en charge de la dépendance.

Il a ensuite exposé la répartition des ressources nouvelles entre les actions destinées respectivement aux personnes âgées et aux personnes handicapées, ces deux secteurs étant strictement distingués :

- les personnes handicapées bénéficieront, à partir de 2005, de 850 millions d'euros, essentiellement consacrés au financement de la prestation de compensation ;

- les personnes âgées sont attributaires de 60 % des recettes nouvelles : 20 % serviront de complément pour le financement de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), les 40 % restants permettront de solvabiliser les actions en faveur des personnes âgées affichées dans le plan de solidarité pour l'autonomie, c'est-à-dire la médicalisation des établissements et l'accentuation de l'effort en faveur de la vie à domicile. Par ailleurs, les crédits actuels du fonds de financement de l'APA, soit un milliard d'euros, seront regroupés au sein de la future Caisse.

Enfin, compte tenu du vieillissement de la population française, M. André Lardeux, rapporteur, a estimé utile de promouvoir la prévoyance individuelle ou collective. Il a retenu dans ce but plusieurs éléments d'une proposition de loi déposée par M. Alain Vasselle et plusieurs de ses collègues, destinés à créer des incitations fiscales et sociales permettant aux personnes de s'assurer, ou d'assurer leurs ascendants, face au risque de la dépendance.

M. Gilbert Chabroux s'est étonné que les contestations formulées contre ce texte lors des débats à l'Assemblée nationale, et ne provenant pas seulement de l'opposition, n'aient pas été rapportées dans cette présentation. Il a estimé que le projet de loi rompait le pacte de solidarité nationale, dans la mesure où l'effort principal porte sur les salariés. Alors que les entreprises verront leur production augmenter, ce qui permettra d'ailleurs à l'État de prélever davantage de recettes fiscales, les salariés ne retireront aucun bénéfice de leur journée de travail supplémentaire. Il a déploré le manque de précisions concernant les contours définitifs de la Caisse nationale de solidarité, ainsi que l'absence de cohérence de l'action du Gouvernement qui poursuit des objectifs connexes à travers des textes différents comme la réforme de l'assurance maladie, les responsabilités locales ou la compensation du handicap, ce qui ne permet pas d'appréhender globalement la situation. Il a indiqué qu'en conséquence son groupe s'opposerait à ce projet.

M. Guy Fischer a estimé que les amendements du rapporteur portaient sur des points de détail et ne traitaient pas les vrais problèmes soulevés par ce projet de loi. Tout en partageant l'objectif d'une meilleure prise en charge de la dépendance, il a estimé que ce projet de loi remettait en cause le pacte de solidarité et la durée du travail dans notre pays. Il s'est inquiété des encouragements donnés aux assurances privées, prélude à une privatisation de la sécurité sociale. Il a déploré que le débat sur la création d'une cinquième branche de sécurité sociale soit esquivé et que le texte ne prévoie aucun dispositif pour réduire les inégalités entre départements. Il a annoncé que son groupe s'opposerait à l'adoption de ce projet de loi.

M. Alain Vasselle s'est réjoui que les partenaires sociaux puissent fixer à leur gré la date de la journée de solidarité.

M. Alain Gournac a également approuvé la souplesse offerte aux partenaires sociaux et s'est déclaré très satisfait du message de solidarité adressé à nos aînés par ce projet de loi. Il a souhaité que la prise en charge de la dépendance soit assurée au plus près des usagers.

M. Michel Esneu s'est félicité que la concertation ait permis d'introduire les souplesses nécessaires dans le texte et a estimé que les valeurs de générosité et de fraternité devaient être remises à l'honneur.

M. Bernard Cazeau est revenu sur le manque de cohérence entre les différents projets du Gouvernement. Il a indiqué que le projet ne garantissait pas que les recettes permettraient de faire face à l'augmentation future des besoins et il a estimé qu'on ne pouvait dissocier le cas des personnes âgées dépendantes de celui des personnes handicapées.

M. Claude Domeizel s'est étonné que le rapport ne mentionne pas l'opposition unanime des instances consultées à ce projet de loi. Il s'est inquiété des difficultés de financement des travaux à mener dans les maisons de retraite et a estimé que la compensation accordée aux collectivités territoriales devait prendre en compte d'autres sujétions que la seule création de fichiers.

Mme Annick Bocandé a demandé si la totalité des recettes prélevées en application de ce projet iraient à la Caisse nationale de solidarité et comment elles seraient réparties.

M. André Lardeux, rapporteur, a répondu que la totalité des recettes seraient bien affectées à la Caisse et que l'article 10 du projet de loi définissait les conditions de répartition des crédits. Il a jugé excessives les critiques adressées à ce projet de loi, qui constitue une réponse pragmatique à la nécessité de trouver de nouvelles ressources pour faire face à la dépendance, en mettant aussi à contribution les revenus du capital. Il a précisé qu'il souhaitait une compensation de l'ensemble des dépenses résultant pour les collectivités locales de la mise en place des plans de veille. Il s'est réjoui des garanties de souplesse et de proximité apportées par le texte et a souhaité que des incitations soient créées pour encourager les Français à s'assurer contre le risque de dépendance.

A l'issue de ce débat, la commission a procédé à l'examen des articles du projet de loi et des amendements présentés par le rapporteur.

A l'article premier (mise en place d'un dispositif de veille et d'alerte destiné à la protection des personnes âgées et des personnes handicapées), la commission a adopté un amendement excluant les « personnes particulièrement vulnérables » des populations concernées par le plan d'urgence, en raison de l'imprécision du public visé. Elle a aussi supprimé l'obligation d'assurer un contact périodique avec les personnes âgées et handicapées isolées à leur domicile, cette disposition apparaissant difficile à appliquer. Elle a également adopté un amendement de clarification juridique.

A l'article 2 (création d'une journée de solidarité), la commission a adopté un amendement simplifiant les conditions dans lesquelles les salariés à temps partiel peuvent effectuer leur journée de solidarité.

A l'article 3 (application de la journée de solidarité au secteur agricole), elle a adopté un amendement de coordination.

A l'article 4 (adaptation des stipulations conventionnelles relatives au lundi de Pentecôte), elle a adopté un amendement précisant les cas dans lesquels les stipulations relatives au lundi de Pentecôte ou aux autres jours chômés deviennent inopposables.

La commission a adopté sans modification l'article 5 (adaptation des clauses conventionnelles et des stipulations contractuelles à la modification de la durée du travail liée à la création de la journée de solidarité).

A l'article 6 (application de la journée de solidarité dans les fonctions publiques), elle a adopté un amendement précisant les conditions de fixation de la journée de solidarité dans les établissements d'enseignement ne relevant pas du ministère de l'éducation nationale et indiquant que la journée de solidarité n'est pas une journée d'enseignement supposant la présence des élèves.

A l'article 7 A (rapport au Parlement sur l'évaluation de l'allocation personnalisée à l'autonomie), elle a adopté un amendement modifiant la date de remise du prochain rapport.

A l'article 7 (création d'une Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées), elle a adopté un amendement précisant que le financement de la prestation de compensation ne serait assuré que dans la limite des fonds disponibles.

A l'article 7 bis (statut de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie), la commission a adopté un amendement instituant un contrôle parlementaire de la Caisse, comparable à celui effectué dans le cadre du contrôle de l'application des lois de financement de la sécurité sociale.

A l'article 7 ter (organes et missions de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie), elle a adopté un amendement rédactionnel.

A l'article 8 (produits affectés à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie), elle a adopté un amendement précisant que les recettes de la Caisse seraient aussi composées des crédits non consommés de l'année précédente.

A l'article 9 (charges de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie pour l'année 2004), la commission a adopté un amendement garantissant le caractère pérenne des règles définies par le présent projet de loi pour la répartition du concours financier versé par la Caisse aux départements, ainsi qu'un amendement de coordination.

A l'article 10 (charges de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie à compter de 2005), elle a adopté un amendement précisant que les reports de crédits d'une année à l'autre seraient effectués section par section.

A l'article 11 (dispositions transitoires liées à la disparition du fonds de financement de l'allocation personnalisée d'autonomie), elle a adopté un amendement de coordination.

Après l'article 11, elle a adopté un amendement créant un article additionnel indiquant que les charges supplémentaires résultant pour les collectivités territoriales de la présente loi seraient compensées dans des conditions prévues par la loi de finances pour 2005.

Avant l'article 12, elle a inséré une division additionnelle relative à l'assurance du risque dépendance composée de quatre articles additionnels : le premier institue une réduction d'impôt sur le revenu pour les primes d'assurance dépendance perçues par les assurés devenus dépendants ; le deuxième crée une déduction de l'assiette du revenu imposable pour les cotisations acquittées dans le cadre de contrats individuels d'assurance dépendance ; le troisième introduit cette même déduction pour les personnes ayant souscrit ces contrats au bénéfice des ascendants directs ; le quatrième vise à exclure de l'assiette des cotisations sociales patronales les contributions afférentes au financement des prestations dépendance.

La commission a enfin adopté l'article 12 (modalités d'entrée en vigueur de la loi) sans modification.

La commission a adopté le projet de loi ainsi amendé.

Mercredi 19 mai 2004

- Présidence de M. Nicolas About, président -

Réforme de l'assurance maladie - Auditions

La commission a poursuivi ses auditions en vue de préparer la future réforme de l'assurance maladie.

Audition de M. Jean-Marie Spaeth, président du conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)

La commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Jean-Marie Spaeth, président du conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS).

M. Jean-Marie Spaeth a estimé que la réforme de l'assurance maladie s'apparente à une réforme de l'État, dont la clé réside dans la clarification des responsabilités entre l'État et les gestionnaires, à travers une nouvelle délégation de compétences.

En effet, aujourd'hui l'assurance maladie n'a aucune compétence propre en matière de détermination de la politique de santé, d'offre de soins ou de responsabilisation des acteurs, et il n'existe pas de règles précises susceptibles de modifier les comportements des patients.

M. Jean-Marie Spaeth a considéré que le système pouvait être qualifié d'anarchique, car, au nom de la liberté des acteurs, il tolère des inégalités importantes et des déviances. Cette forme de « laisser-faire » affaiblit son impact au regard de la démocratie et de la cohésion sociale et ne respecte pas les ambitions que Pierre Laroque avait pour la sécurité sociale : construire une démocratie sociale qui prolonge la démocratie politique.

M. Nicolas About, président, s'est interrogé sur les formes que pourrait prendre la nouvelle gouvernance, et notamment sur ce que devrait être le rôle de l'État.

M. Jean-Marie Spaeth a plaidé pour que l'État joue un rôle de stratège, et non pas de gérant. Il a considéré que la définition des politiques de santé au sens large, c'est-à-dire une politique qui englobe aussi les relations entre santé et environnement et la santé au travail, doit relever de l'État, tout comme la définition du cadrage financier et l'établissement de référentiels scientifiques. Il a estimé que, dans ce contexte, la mission de l'assurance maladie serait alors de garantir l'égalité dans l'accès aux soins et de mettre en oeuvre les grandes orientations arrêtées par l'État.

Il a rappelé que l'assurance maladie versait essentiellement des prestations en nature, tandis que les professions de santé honoraient les droits ouverts aux assurés. Il a estimé que l'assurance maladie devait remplir un rôle d'interface entre les droits définis par les pouvoirs publics et la délivrance de ces droits par les professions de santé.

M. Nicolas About, président, s'est interrogé sur la gouvernance de la branche accidents du travail - maladies professionnelles et sur la contractualisation qui accompagnerait toute nouvelle délégation.

M. Jean-Marie Spaeth a estimé que la gestion des accidents du travail pouvait bénéficier d'une autonomie supplémentaire pour la définition et la classification des accidents, mais que la gestion des assurés devait être assurée par l'assurance maladie. Il a illustré ses propos en évoquant la situation d'un assuré blessé à l'occasion d'un accident de la route : cet assuré doit bénéficier des mêmes règles de prise en charge, qu'il s'agisse d'un accident du travail ou pas. Il a considéré que ce raisonnement valait également lorsqu'on abordait les droits des personnes âgées et la prise en charge de la dépendance.

Sur la question du périmètre de la délégation à accorder aux gestionnaires de l'assurance maladie, il s'est dit convaincu de la nécessité de confier un pouvoir d'initiative aux caisses, doublé d'une obligation de réponse imposée à l'organe de tutelle. Il a rappelé qu'entre 1967 et 1996, les caisses s'étaient vu reconnaître des prérogatives en matière financière.

M. Nicolas About, président, a demandé des précisions sur le périmètre d'autonomie de gestion susceptible d'être accordé aux partenaires sociaux.

M. Jean-Marie Spaeth a souligné que les partenaires sociaux géraient de façon autonome les régimes de retraite complémentaire, ainsi que l'Unedic, et que, malgré les turbulences actuelles, ces exemples démontraient leur capacité de gestion.

Il a estimé que deux éléments étaient indispensables pour assurer la réussite de la réforme : tout d'abord, la définition claire d'un périmètre de gestion confié aux partenaires sociaux, qui leur permettrait de concilier, suivant les lieux et les moments, leur capacité de gestion et leur fonction tribunitienne ; ensuite, la volonté des entreprises de s'impliquer dans la gestion du système.

M. Guy Fischer a regretté l'absence de prise de position sur les propositions émises par le ministre de la santé et de la protection sociale, qu'il considérait, pour sa part, comme une modification du pacte social, car elles ne prévoient qu'une faible contribution des entreprises et vont se traduire, pour les assurés, par un élargissement de l'assiette de la contribution sociale généralisée (CSG) et par une augmentation des tarifs de consultation des spécialistes. Il a souhaité connaître la date à laquelle les conseils d'administration des caisses d'assurance maladie seront saisis du projet de loi.

M. Jean-Marie Spaeth a précisé qu'il ne ferait pas de commentaire sur le dispositif de la réforme avant d'être saisi d'un texte écrit pour consultation. Il a rappelé que les cotisations salariales demeurent la principale source de financement de l'assurance maladie, même si le Gouvernement devait chercher de nouvelles recettes en élargissant les bases de la CSG.

Il a observé que la théorie du salaire différé, qui reste pertinente en matière de retraite ou de chômage, ne s'applique pas à l'assurance maladie. Dans ce cadre, c'est une solidarité entre bien-portants et malades qui agit, et elle doit donc s'exercer tout au long de la vie. Dans ces conditions, les cotisations destinées à l'assurance maladie doivent s'appliquer de manière uniforme quand les revenus sont égaux, conformément à la règle qui fonde notre système d'assurance sociale.

M. Alain Vasselle a fait état des dix milliards d'euros d'économie attendus par le Gouvernement et s'est interrogé sur le caractère suffisant de ces mesures pour rétablir l'équilibre du système, ainsi que sur le montant des économies qui pouvaient être réalisées et le niveau de recettes supplémentaires indispensables.

M. Jean-Marie Spaeth a reconnu la permanence d'un écart entre la progression du PIB et celle des dépenses de santé. Il a indiqué que les dysfonctionnements du système pouvaient être la cause de dépenses inutiles, par exemple dans des cas de surconsommation médicamenteuse.

Il a souligné que le volume des dépenses était la somme des prestations en nature assurées par les professions de santé, lesquelles représentaient environ 1,8 à 2 millions d'emplois. Il a considéré, en conséquence, qu'il était nécessaire d'agir sur les comportements, des professionnels comme des assurés, et donc d'accepter que cette action ne se traduise en chiffres qu'à moyen terme.

Il a précisé que ces mesures pouvaient être accompagnées par l'émission de référentiels médicaux, rendus opposables par l'État.

Évoquant la question de la liberté tarifaire, M. Jean-Marie Spaeth a rappelé l'élaboration, en cours, d'une nouvelle classification commune des actes médicaux (CCAM), dont l'achèvement est prévu cette année. La tarification de ces nouvelles cotations donnera un contenu et une valeur à chaque acte médical. Il a déploré que les débats sur la liberté tarifaire occultent les travaux de préparation de la CCAM.

M. Alain Vasselle a rappelé que le dossier médical informatisé était présenté comme un élément central de la réforme à venir. Il a voulu connaître les conditions nécessaires à la généralisation de cet outil.

M. Jean-Marie Spaeth a insisté sur la persévérance dont la CNAM avait dû faire preuve pour imposer la carte Vitale. Il a indiqué que la diffusion de la carte Vitale avait accéléré l'informatisation des cabinets médicaux et que cette dernière allait bénéficier de la mise en oeuvre du dossier médical partagé. Il a affirmé que ce dossier est destiné au patient, puisqu'il retracera les soins reçus en médecine ambulatoire et hospitalière, mais qu'en aucun cas, il ne doit servir à contrôler l'assuré. Il a précisé qu'un cahier des charges était en préparation et que les premières expérimentations auront lieu à la fin de l'année 2004. Dans ces conditions, la généralisation du dossier médical n'aurait pas lieu avant vingt-quatre mois, en raison de contraintes techniques fortes.

M. Louis Souvet a considéré que la réduction du déficit ne serait possible qu'au travers d'une action conjointe sur la consommation et sur les recettes, d'un programme de lutte contre les abus et d'une hausse des prélèvements sur les revenus des assurés.

M. Gilbert Chabroux a rappelé qu'outre le ministre de la santé et de la protection sociale, d'autres acteurs, le parti socialiste et le parti communiste notamment, avaient fait connaître leurs propositions pour la réforme de l'assurance maladie.

Il a fait part de ses craintes quant aux conséquences possibles du plan proposé par le Gouvernement, qui risque de provoquer l'éviction des personnes les plus démunies du système de santé. Il a estimé que la création d'un forfait d'un euro à la charge des patients tenait de la simple mesure de maîtrise comptable.

M. Bernard Cazeau a brossé un tableau des enjeux de la réforme, avant de s'interroger sur l'efficacité d'une réforme, dont les principales dispositions excluent tout instrument de maîtrise comptable.

M. Jean Chérioux s'est enquis, dans l'hypothèse d'une délégation de gestion renforcée, de la responsabilité des gestionnaires de l'assurance maladie au regard de l'Objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM).

M. Serge Franchis a évoqué les objectifs de la réforme, avant de rappeler la nécessité de garantir la qualité de l'offre de soins, qui doit conditionner la rémunération des professions de santé.

M. Alain Gournac a considéré que si la responsabilité du patient et du médecin devait être évoquée, celle des caisses d'assurance maladie ne devait pas être écartée pour autant.

Mme Valérie Létard s'est dit en accord avec l'idée que, pour les assurés, les prélèvements devaient être égaux à revenu égal. Elle a souhaité connaître les modalités de paiement de la franchise d'un euro, l'organisation des parcours de santé et la mise en oeuvre du dossier médical partagé.

M. Jean-Claude Etienne s'est déclaré favorable au dossier médical partagé, mais s'est préoccupé des moyens disponibles pour identifier les assurés sans risque d'erreur.

En réponse, M. Jean-Marie Spaeth a estimé que le recours au numéro d'inscription au répertoire de la sécurité sociale (NIR) permettrait une identification sécurisée des patients.

Il a considéré que l'application de la franchise d'un euro était source de plusieurs interrogations, et d'abord sur son efficacité à responsabiliser le patient. Il a rappelé que le ticket modérateur était en place depuis plusieurs années et que ce dispositif n'avait pas fait la preuve de son efficacité, ainsi que le constate une étude de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) publiée en mai 2004. Il a observé que cette franchise d'un euro correspondait à 7 % de déremboursement et qu'elle était techniquement difficile à appliquer sans remise en cause du dispositif du tiers payant, qui représente 65 % du volume des remboursements pris en charge par l'assurance maladie.

Pour ces raisons, il s'est déclaré favorable à une responsabilisation par l'intermédiaire de référentiels médicaux opposables aux patients et aux professionnels.

En conclusion, il a estimé que si les partenaires sociaux devaient assurer la responsabilité de l'équilibre financier du système, ils seraient bien entendu soumis au respect de l'ONDAM. Il faudrait toutefois les associer à la détermination de celui-ci en amont de la discussion parlementaire.

Audition de M. Jacques Reignault, président du Centre national des professions de santé (CNPS)

La commission a ensuite procédé à l'audition de M. Jacques Reignault, président du Centre national des professions de santé (CNPS).

M. Jacques Reignault a rappelé que le Centre national des professions de santé (CNPS) réunit vingt-cinq syndicats nationaux de professions médicales et paramédicales, auxquels sont associés les représentants de l'industrie pharmaceutique [Les entreprises du médicament (LEEM)] et les représentants des entreprises de transport sanitaire, bien que ces derniers ne relèvent pas du code de la santé publique.

Il a également rappelé que, par le passé, le CNPS avait attiré l'attention en menant un certain nombre d'actions revendicatives, qu'il avait élaboré, durant les années 2000 et 2001, plusieurs documents de propositions et qu'il a dernièrement été sollicité pour désigner cinq membres chargés de le représenter au sein du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie.

Il a souscrit au diagnostic consensuel élaboré par le Haut conseil, en soulignant qu'il estimait, pour sa part, que l'impasse où se trouve le système de soins tient au  cloisonnement des discussions entre acteurs, cloisonnement à l'origine d'opacité et de coûts. Il a observé, en outre, que le déficit de l'assurance maladie était de nature structurelle, car les dépenses de santé augmentent en moyenne sur un rythme supérieur de deux points à celui du produit intérieur brut.

M. Jacques Reignault a déploré l'absence de véritable débat entre les gestionnaires de l'assurance maladie et les prescripteurs, le contenu des contrats n'étant pas négocié dans le détail, mais par grand bloc. Il a regretté que l'attention portée aux difficultés de la médecine de ville soit quelque peu surdimensionnée par rapport à celle accordée aux autres secteurs de l'assurance maladie, la médecine ambulatoire ne représentant pas la plus grande partie du budget de l'assurance maladie.

Il a regretté que les discussions de l'ONDAM ne reposent pas suffisamment sur une évaluation des besoins médicaux et que les professionnels de santé ne soient pas suffisamment associés à son élaboration. Cette association des professionnels de santé devrait d'ailleurs s'exercer dans le cadre des négociations conventionnelles avec les organismes gestionnaires de l'assurance maladie, en ne demeurant pas cantonnées aux seuls aspects tarifaires. Il a souhaité que l'expérience des professionnels puisse éclairer les Caisses, de manière à décliner des objectifs de santé publique sur le terrain et à nourrir une réflexion permanente sur l'utilité collective des soins dispensés par l'assurance maladie.

Il a souligné que les différentes professions médicales pouvaient avoir un rôle à jouer important, comme en témoigne la nécessité d'instaurer un dossier médical partagé. Ces professions ont d'ailleurs construit un socle informatique commun s'appuyant sur des normes partagées, dans le cadre d'un projet dénommé SOSI, qui devrait permettre la lecture de ce dossier par tous les adhérents.

Il a insisté pour que soit développée une politique de prévention qui, lorsqu'elle est menée à bon escient, permet de réaliser des économies significatives. Il a appuyé sa démonstration par la politique de prévention mise en oeuvre dans le secteur dentaire, les patients ayant accepté de passer un examen annuel de prévention, bénéficiant ensuite d'une meilleure prise en charge des prestations curatives. L'évaluation de ce dispositif, au bout de cinq années, a fait la preuve des économies qui peuvent résulter des dispositifs de prévention.

M. Alain Vasselle s'est enquis des obstacles s'opposant à une redéfinition de la représentation des professionnels de santé, qui leur permettrait de se doter d'un interlocuteur unique. Dans un deuxième temps, il a demandé selon quelles modalités pouvait être envisagée une meilleure responsabilisation des assurés.

M. Roland Muzeau a dénoncé l'insistance avec laquelle les pouvoirs publics et les médias mettent l'accent sur le déficit, qualifié d'abyssal, de l'assurance maladie, alors qu'il ne représente qu'une infime partie des budgets sociaux. Il s'est interrogé sur les mesures qui permettraient également une responsabilisation des professionnels de santé.

M. Gilbert Chabroux s'est montré soucieux de la pertinence d'instaurer une taxe d'un euro par feuille de soins, et sur les raisons conduisant à écarter l'hypothèse de réclamer un effort aux professionnels de santé. Il a contesté le bien-fondé d'une éventuelle libéralisation des tarifs des médecins spécialistes.

M. Alain Gournac a déclaré qu'une écrasante majorité des professionnels de santé adoptait un comportement responsable en matière de prescription, mais qu'une petite minorité, d'ailleurs identifiée, devrait pouvoir être sanctionnée. Il s'est interrogé sur les pouvoirs de sanction qui pourraient être confiés au Centre national des professions de santé ou aux syndicats médicaux afin d'assurer une meilleure responsabilisation des praticiens.

M. Jacques Reignault a observé que la responsabilisation des professionnels de santé était une nécessité, mais que celle-ci devait être envisagée selon des modalités précises, et dans un cadre décentralisé à l'échelon régional. Cette responsabilité implique que chaque prescripteur soit soucieux de l'utilité de la dépense médicale engagée. Il a souligné qu'un certain nombre de facteurs de progrès existent d'ores et déjà, telles l'amélioration de l'accueil réservé à la formation continue par les praticiens, l'amélioration de l'évaluation des pratiques et la qualité de l'enseignement.

M. Jacques Reignault a formulé ses réserves sur l'instauration de sanctions à l'encontre des professionnels de santé par les Caisses, à l'exception des procédures de déconventionnement. Il a estimé, enfin, que la responsabilisation devait davantage être recherchée dans le cadre d'instances professionnelles, à l'image des cercles de qualité.

Audition de M. Gérard de la Martinière, président, M. André Renaudin, délégué général, de la Fédération française des sociétés d'assurance (FFSA)

La commission a ensuite procédé à l'audition de M. Gérard de la Martinière, président, et de M. André Renaudin, délégué général, de la Fédération française des sociétés d'assurance (FFSA).

M. Alain Vasselle, rapporteur, s'est préoccupé des trois points essentiels de la réforme de l'assurance maladie. Concernant la gouvernance du système, il a d'abord souhaité connaître l'avis de la FFSA, d'une part, sur la création d'une union des assurances complémentaires et sur la manière dont son fonctionnement pouvait être organisé, d'autre part, sur la mise en place d'une Haute autorité de santé, chargée d'établir les référentiels médicaux, enfin sur le rôle que devait assumer l'État dans ce dispositif.

Concernant la responsabilisation des assurés, il s'est ensuite interrogé sur la forme que celle-ci pouvait prendre et sur l'opportunité de conduire une politique de responsabilisation globale des assurés et des soignants, notamment au regard de la constitutionnalité du forfait d'un euro par consultation, réclamé aux malades, qu'il pourrait être envisagé d'instaurer. Concernant le financement de l'assurance maladie, il a souhaité savoir si les assureurs complémentaires approuvaient le plan de réforme budgétaire proposé par le ministre de la santé et de la protection sociale et si ce plan permettrait un retour à l'équilibre des comptes sociaux.

Après avoir relevé que le taux de croissance des dépenses de santé était supérieur à celui de la richesse nationale, M. Gérard de la Martinière a appelé les pouvoirs publics à mieux distinguer les dépenses de soins, répondant à une stricte nécessité thérapeutique, et les dépenses de bien-être, apparentées à une recherche de confort. Il lui a donc semblé indispensable que le Gouvernement définisse des priorités claires de santé publique, ce qui, selon lui, supposait non pas un énième plan d'adaptation, mais une réforme d'envergure de la sécurité sociale.

S'agissant plus spécifiquement du rôle de l'assurance complémentaire, M. Gérard de la Martinière a rappelé le souhait des assureurs complémentaires, qui, à son sens, occupent une place importance sur le marché français, d'être mieux associés à la réflexion sur le système de santé, estimant que, trop souvent, les décisions relatives à la couverture des soins étaient prises par les caisses obligatoires d'assurance maladie, sans concertation préalable. Il a enfin déclaré qu'il ne se prononcerait sur l'opportunité de créer une union des assurances complémentaires qu'après avoir pris connaissance de la forme et des conditions de mise en place de cette structure.

A son tour, M. André Renaudin a insisté sur la nécessité d'instaurer un dialogue entre les assurances obligatoires et les assurances complémentaires, dans la mesure où le taux de prise en charge des soins par les caisses obligatoires oscille entre 76,7 % et 81 %, le reste étant couvert par les assurances complémentaires. Ce dialogue permettrait aux caisses de s'accorder sur la mise en oeuvre du forfait d'un euro, dans le respect des règles de droit. Il s'est ensuite prononcé en faveur d'une union des assurances complémentaires, à la condition que la Haute autorité de santé définisse clairement, au préalable, non seulement le champ d'intervention de l'assurance maladie obligatoire, d'une part, et de l'assurance maladie complémentaire, d'autre part, mais aussi le périmètre de prise en charge individuelle, par les ménages, et collective, par les entreprises. Précisant que les assurances complémentaires étaient soucieuses d'adapter leurs prestations aux pathologies individuelles, à l'inverse des caisses d'assurances obligatoires, qui effectuaient une prise en charge globale, il s'est enfin défendu de toute sélection à l'entrée, assurant que les contrats d'assurance maladie n'étaient pas assortis d'un questionnaire de santé au moment de la souscription.

M. Guy Fischer s'est étonné de ce que les assurances complémentaires considèrent l'assurance maladie comme un marché à conquérir et s'est inquiété de la distinction entre dépenses de santé et dépenses de confort, susceptible de conduire à une couverture inégale des soins, selon qu'ils appartiennent à la catégorie des « petits risques » ou à celle des « gros risques ». Il a ensuite demandé si une définition claire du périmètre de soins remboursables était un préalable au positionnement des assureurs complémentaires sur le champ de l'assurance maladie.

M. Alain Gournac s'est prononcé en faveur d'une responsabilisation de tous les acteurs de l'assurance maladie, qu'il s'agisse des pouvoirs publics, des caisses, des médecins ou des usagers, s'interrogeant sur la manière dont les assureurs complémentaires allaient assumer, eux aussi, leur part de responsabilité.

M. Jean Chérioux a souhaité une réhabilitation du ticket modérateur d'ordre public, créé au lendemain de la seconde guerre mondiale, afin d'inciter les assurés à prendre conscience du fait que la santé a un coût.

M. Nicolas About, président, a demandé si les assureurs complémentaires étaient, comme ils en ont exprimé le souhait, prêts à prendre en charge la totalité du coût des médicaments dont le service médical rendu était insuffisant et s'il existait des cas où les médicaments ne sont remboursés ni par les assurances obligatoires ni par les assurances complémentaires.

M. Gérard de la Martinière a préconisé une clarification du champ d'intervention des assurances obligatoires et de celui des assurances complémentaires. Il s'est dit ouvert à la mise en place d'un ticket modérateur d'ordre public, à condition que les assureurs complémentaires soient associés à la prise de décision et qu'ils disposent d'un délai suffisant pour l'adaptation des contrats conclus avec leurs assurés.

M. André Renaudin a attiré l'attention sur la situation paradoxale née de la mise en place d'une couverture maladie universelle en faveur de 150.000 personnes, alors que la couverture maladie universelle complémentaire concerne cinq millions de personnes, bénéficiant à la fois d'un ticket modérateur et d'un forfait hospitalier. Enfin, il a recommandé au Parlement de ne pas revenir sur le caractère viager des contrats d'assurance maladie. En effet, à l'heure actuelle, la loi interdit aux assureurs de remettre en cause les contrats qui doivent obligatoirement être conclus pour la durée de la vie, sans possibilité de résiliation.

Audition de M. Etienne Caniard, administrateur délégué, chargé de la santé et de la sécurité sociale, de la Fédération nationale de la Mutualité française (FNMF)

La commission a enfin procédé à l'audition de M. Etienne Caniard, administrateur délégué, chargé de la santé et de la sécurité sociale, de la Fédération nationale de la Mutualité française (FNMF).

M. Alain Vasselle, rapporteur, s'est interrogé sur la gouvernance de l'assurance maladie et a notamment souhaité savoir quelle place devait revenir aux assureurs complémentaires dans la gestion du système de santé.

M. Etienne Caniard s'est tout d'abord élevé contre le raisonnement erroné, consistant à considérer qu'un renforcement de la place des assurances complémentaires dans le système de protection sociale serait le prélude à sa privatisation.

Il s'est dit favorable à la proposition du Gouvernement de créer une union nationale des caisses d'assurance maladie, une union des assurances complémentaires et un regroupement des professionnels de santé, mais a estimé que la question centrale était celle des relations à établir entre ces structures. Il a jugé inacceptable que certaines dépenses de santé, comme les soins dentaire ou d'optique, soient laissées presque entièrement à la charge des assurances complémentaires et précisé que les unions devraient avoir l'obligation de formuler des recommandations pour redresser les comptes lorsque la situation financière de l'assurance maladie se dégrade.

M. Etienne Caniard a considéré que le schéma souhaitable serait que l'État définisse les objectifs en matière de prise en charge des dépenses de santé par l'assurance maladie, puis qu'il confie aux caisses le soin d'atteindre ces objectifs par la négociation de conventions avec les professionnels et avec l'industrie pharmaceutique. Au-delà de la fixation des taux de remboursement, il importe de réfléchir aussi aux conditions de prescription des soins et des médicaments remboursables. Il a ajouté que l'hôpital devrait être intégré dans le champ de la régulation, en raison du poids financier qu'il représente et de ses interactions avec la médecine de ville.

Il a approuvé la proposition du Gouvernement de créer une Haute autorité en santé, en précisant que les avis émis par cette instance devaient n'être qu'un simple outil d'aide à la décision, car il appartient bien aux responsables politiques de fixer le taux de remboursement des dépenses de santé. Il a réservé le même accueil favorable à un Institut des données de santé, qui rassemblerait des informations à caractère médical et économique, favorisant ainsi l'émergence d'un diagnostic partagé par tous les acteurs du système de santé.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a demandé quelles mesures pouvaient être envisagées pour responsabiliser les assurés sociaux.

M. Etienne Caniard a indiqué que la mutualité était très attachée à une responsabilisation des assurés sociaux qui ne se résumait pas à un accroissement de leur contribution financière. Il convient de faire évoluer les comportements en instaurant des incitations adaptées. Il a critiqué, de ce point de vue, la proposition d'augmenter de trois euros le forfait hospitalier, en rappelant que les décisions d'hospitalisation ne relevaient évidemment pas du choix personnel des usagers. En revanche, il serait favorable, par exemple, à ce que les consultations chez les médecins spécialistes soient mieux remboursées lorsque le patient a, au préalable, consulté un médecin généraliste ; cette mesure inciterait à une utilisation plus rationnelle de l'offre de soins. De même, il pourrait être envisagé de moins bien rembourser les consultations effectuées à domicile, chaque fois que le déplacement du médecin n'est pas médicalement justifié. La mutualité a élaboré, dans ce sens, un cahier des charges définissant précisément les cas dans lesquels une visite à domicile peut être considérée comme médicalement justifiée.

Il serait intéressant également que les patients atteints d'affections de longue durée et bénéficiant d'un remboursement intégral de leurs dépenses de santé soient invités à respecter un parcours de soins, défini contractuellement avec le médecin traitant, l'assurance maladie et les assureurs complémentaires. Plus généralement, il conviendrait que notre système de santé évolue en vue d'une meilleure prise en charge des personnes atteintes de maladies chroniques ou affectées par des phénomènes de dépendance.

M. Nicolas About, président, a souhaité connaître la réaction de la mutualité à la proposition de faire payer un euro au patient pour chaque consultation et a demandé s'il ne serait pas préférable d'instaurer une « taxe sociale », frappant les biens de consommation.

M. Etienne Caniard a répondu qu'il n'était pas illégitime de mettre davantage à contribution les patients, à condition que les mesures prises aient un véritable effet sur leurs habitudes et contribuent à une meilleure utilisation du système de santé. Il a indiqué que la hausse des dépenses de santé était aujourd'hui largement subie et qu'il importerait, à l'avenir, de l'orienter en fonction de nos priorités de santé publique. La question des financements doit donc être subordonnée à une réforme préalable de la gouvernance et des structures de notre système de santé.

Assistants maternels et assistants familiaux - Examen des amendements

Puis la commission a procédé à l'examen des amendements au projet de loi n° 201 (2003-2004) relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux.

Avant l'article premier, la commission a confié à la sagesse du Sénat le soin d'apprécier l'amendement n° 32 présenté par MM. Philippe Nogrix et Daniel Soulage et Mmes Gisèle Gautier et Anne-Marie Payet, portant article additionnel, précisant que le bien-être de l'enfant doit être au coeur de la politique de la petite enfance et a donné un avis défavorable à l'adoption de l'amendement n° 47 présenté par les membres du groupe communiste républicain et citoyen, portant article additionnel, ayant pour objet de donner à la commission départementale d'accueil des jeunes enfants la mission d'évaluer les besoins en personnel dans le domaine de la petite enfance.

A l'article premier (rôle de la commission départementale de l'accueil des jeunes enfants), elle a donné un avis favorable à l'amendement n° 66 du Gouvernement visant à corriger une erreur matérielle.

A l'article 5 (définition du métier d'assistant familial et dispositions relatives à l'agrément des assistants maternels et des assistants familiaux), elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 37 présenté par M. Jean-Pierre Vial, ayant pour objet de soumettre pour avis les candidatures à une commission départementale d'agrément. Elle s'est déclarée favorable à l'adoption de l'amendement n° 67 du Gouvernement, indiquant que l'évaluation des capacités éducatives ne concerne que les candidats au métier d'assistant maternel. Elle a ensuite émis un avis défavorable aux amendement nos 19 du groupe socialiste, apparenté et rattachée et 48 des membres du groupe communiste républicain et citoyen, prévoyant que les capacités éducatives du candidat seront évaluées selon des critères nationaux. Elle s'en est remise à la sagesse du Sénat concernant l'amendement rédactionnel n° 68 présenté par le Gouvernement et un avis favorable à l'adoption de l'amendement n° 42 de Mme Valérie Létard, visant à rendre obligatoire la motivation du refus d'agrément. La commission a donné un avis défavorable aux amendements nos 21 et 20 présentés par les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, tendant à modifier la précision de l'âge des mineurs figurant dans l'agrément des assistants maternels. Elle a également émis un avis défavorable à l'amendement n° 49 présenté par le groupe communiste républicain et citoyen, limitant strictement à trois enfants l'effectif pouvant être accueilli par un assistant maternel. Elle a fait de même pour les amendements nos 50 et 51 des mêmes auteurs, visant respectivement à préciser que les dérogations peuvent concerner l'accueil de fratries d'enfants scolarisés et à garantir aux départements la compensation financière des charges résultant des compétences nouvelles prévues par le projet de loi, ces deux amendements étant déjà satisfaits par les propositions de la commission. Elle a enfin donné un avis favorable à l'amendement n° 22 présenté par les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, supprimant la mention de l'âge des enfants accueillis dans l'agrément des assistants familiaux.

Après l'article 5, elle s'en est remise à la sagesse du Sénat concernant l'amendement n° 31 rectifié présenté par MM. Alain Vasselle et Charles Revet, portant article additionnel, et permettant la reconnaissance du service apporté par les assistants maternels en matière de garderie et de restauration scolaire.

A l'article 6 (dispositions relatives à la notification et à la motivation des décisions d'agréments, aux conditions de logement et à l'assurance des assistants maternels et familiaux), elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 52 des membres du groupe communiste républicain et citoyen, limitant à quatre mois le délai de notification des demandes d'agrément, mais un avis favorable, sous réserve d'une modification rédactionnelle, à l'amendement n° 53 des mêmes auteurs rendant obligatoire la motivation des décisions de retrait ou de modification de l'agrément. Elle a également donné un avis favorable à l'amendement rédactionnel n° 69 du Gouvernement.

La commission a, par ailleurs, adopté l'amendement n° 73 présenté par son rapporteur, et visant à apporter, au texte, une précision juridique.

A l'article 7 (formation des assistants maternels et des assistants familiaux), la commission a donné un avis défavorable à l'amendement n° 33 présenté par les membres du groupe de l'Union centriste et à l'amendement n° 54 des membres du groupe communiste républicain et citoyen, précisant, tous deux, que la formation des assistants maternels doit être préalable à tout accueil d'enfant et d'une durée minimum de soixante heures. Elle a donné un avis défavorable à l'amendement de coordination n° 34 présenté par les membres du groupe de l'Union centriste et à l'amendement n° 23 des membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, précisant que la formation initiale des assistants maternels doit avoir lieu dans les deux mois qui précèdent l'accueil du premier enfant. Elle a également donné un avis défavorable aux amendements nos 55, 56 et 57 présentés par les membres du groupe communiste républicain et citoyen, visant respectivement à organiser le stage préparatoire suivi par les assistants familiaux, à fixer une rémunération minimum pendant leur temps de formation et à qualifier cette formation. Elle a considéré déjà satisfait l'amendement n° 40, présenté par Mme Françoise Férat, visant à offrir à l'assistant familial un soutien des autres professionnels de l'aide sociale à l'enfance au moment de l'accueil du premier enfant et a souhaité recueillir l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 24 des membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, précisant que la validation de la formation des assistants familiaux a un caractère national.

Après l'article 7, la commission a émis un avis défavorable aux amendements nos 58 et 59 présentés par les membres du groupe communiste républicain et citoyen, portant article additionnel et ayant respectivement pour objet d'ouvrir aux assistants maternels le bénéfice de la validation des acquis de l'expérience et de prévoir la présentation au Parlement d'un rapport sur les droits des assistants maternels et familiaux en matière de sécurité sociale et de retraite.

A l'article 8 (contenu du contrat d'accueil et définition de l'accueil continu par un assistant familial), la commission a émis un avis défavorable à l'adoption de l'amendement n° 25 présenté par les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, tendant à substituer à la notion de remplacement temporaire de l'assistant familial celle de surveillance du mineur accueilli.

A l'article 10 (rôle du service départemental de la protection maternelle infantile auprès des assistants maternels et des assistants familiaux), elle a souhaité connaître l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 65 présenté par MM. Alain Gournac et Alain Vasselle visant à rendre obligatoire l'information du maire des demandes d'agrément déposées par ses administrés.

A l'article 11, la commission a adopté l'amendement n° 74 présenté par son rapporteur, procédant à une harmonisation rédactionnelle du texte.

A l'article 13 (obligation d'un contrat de travail écrit entre un assistant maternel ou familial et son employeur), elle a donné un avis favorable à l'amendement n° 43 de Mme Valérie Létard, précisant que le contrat de travail doit mentionner la décision d'agrément et la garantie d'assurance et elle a souhaité recueillir l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 44 du même auteur, confiant, au conseil des prud'hommes, l'ensemble des litiges relatifs à l'exécution des contrats de travail des assistants maternels.

A l'article 14 (décret relatif aux indemnités d'entretien et aux fournitures et rémunération des assistants maternels ou des assistants familiaux pendant leur période de formation), la commission a donné un avis défavorable à l'amendement n° 26 présenté par les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, tendant à unifier le montant des indemnités et fournitures d'entretien sur l'ensemble du territoire national.

A l'article 18 (limitation du temps de travail des assistants maternels), elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 60 présenté par les membres du groupe communiste républicain et citoyen, limitant à quarante heures la durée hebdomadaire de travail de l'assistant maternel.

A l'article 19 (rupture du contrat de travail des assistants maternels employés par des particuliers), la commission a donné un avis défavorable à l'adoption de l'amendement n° 45 de Mme Valérie Létard, rendant obligatoire la motivation de la rupture du contrat de travail lorsqu'elle est à l'initiative de l'employeur. Les estimant déjà satisfaits, elle a donné un avis défavorable aux amendements n° 35, présenté par Mmes Gisèle Gautier et Anne-Marie Payet, et n° 61 déposé par les membres du groupe communiste républicain et citoyen, ouvrant droit, pour l'employeur, au versement de dommages et intérêts en cas de rupture abusive du contrat de travail par un assistant maternel.

A l'article 20 (fixation des congés des assistants maternels employés par des particuliers), la commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 36 présenté par les membres du groupe de l'union centriste, subordonnant à une décision, prise à la majorité des employeurs, la fixation des dates des congés de l'assistant maternel.

A l'article 23 (licenciement pour motif réel et sérieux des assistants maternels et familiaux employés par des personnes morales de droit privé), elle a émis un avis défavorable à l'adoption de l'amendement n° 27 rectifié des membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, restreignant les motifs de licenciement d'un assistant familial.

A l'article 24 (devenir du contrat de travail en cas de suspension d'agrément), la commission a émis un avis favorable à l'amendement n° 70 du Gouvernement précisant que, durant la période de suspension de l'agrément, l'assistant maternel ou familial perçoit une indemnité compensatrice. Elle a souhaité connaître l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 46 présenté par Mme Valérie Létard, dispensant l'employeur d'un préavis de rupture du contrat de travail en cas de retrait de l'agrément.

A l'article 26 (régime de l'attente applicable aux assistants maternels employés par des personnes morales de droit privé), la commission a émis un avis favorable à l'adoption de l'amendement n° 64 présenté par MM. Alain Gournac, Alain Vasselle, Jean-Louis Lorrain, Georges Mouly et Bernard Murat, limitant à quatre mois la durée d'indemnisation de l'assistant maternel en cas d'absence d'enfants confiés.

Avant l'article 27, la commission a donné un avis défavorable à l'adoption de l'amendement n° 38 présenté par M. Jean-Pierre Vial, portant article additionnel, et visant à rendre applicable l'ensemble des dispositions des articles 27, 28 et 29 du projet de loi aux personnes morales de droit public.

A l'article 27 (nouvelle structure de rémunération et renforcement du régime de l'attente des assistants familiaux employés par des personnes morales de droit privé), elle a émis un avis défavorable à l'amendement n° 62, présenté par les membres du groupe communiste républicain et citoyen, tendant à fixer à 169 SMIC horaire la base mensuelle de rémunération pour le premier enfant accueilli par un assistant familial. Elle a également donné un avis défavorable à l'amendement n° 39 présenté par M. Jean-Pierre Vial, détaillant les obligations de l'assistant familial en matière d'accueil des enfants, ainsi qu'à l'amendement de précision n° 28 des membres groupe socialiste, apparenté et rattachée.

A l'article 28 (droit aux congés des assistants familiaux employés par des personnes morales de droit privé), la commission a émis un avis favorable à l'adoption de l'amendement n° 63, présenté par les membres du groupe communiste républicain et citoyen, précisant que la prise de congés des assistants familiaux doit être décidée en tenant compte de l'intérêt de l'enfant confié. Elle a donné, en revanche, un avis défavorable à l'amendement n° 30 rectifié bis des membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, prévoyant que les congés rémunérés sont accordés aux assistants familiaux employés par une personne morale de droit public, dans les conditions applicables aux agents titulaires de la fonction publique territoriale.

A l'article 30 (dispositions diverses et financement de la formation professionnelle continue), elle a émis un avis favorable à l'amendement de précision n° 71 du Gouvernement.

Après l'article 30, la commission a donné avis défavorable à l'amendement n° 41 présenté par M. Jean-Pierre Godefroy, portant article additionnel, et prévoyant la remise d'un rapport au Parlement sur les conditions d'intégration, dans la fonction publique territoriale, des assistants maternels et familiaux employés par des personnes morales de droit public.

Avant l'article 31, la commission a adopté l'amendement n° 75, présenté par son rapporteur, opérant une correction rédactionnelle dans le code général des impôts.

A l'article 33 (dispositions transitoires en matière de formation des assistants maternels), la commission a enfin émis un avis favorable à l'adoption de l'amendement n° 72, présenté par le Gouvernement, précisant la nature de la formation professionnelle des assistants maternels.