Mardi 11 avril 2006

- Présidence de M. Jean Arthuis, président.

Traités et conventions - Convention France-Chili - Doubles impositions et prévention de l'évasion et de la fraude fiscales - Examen du rapport

Au cours d'une première séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Adrien Gouteyron, rapporteur, sur le projet de loi n° 352 (2004-2005), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Chili en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole).

M. Adrien Gouteyron, rapporteur, a tout d'abord indiqué que cette convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Chili avait été signée à Paris le 7 juin 2004.

Il a souligné que l'autorisation demandée au Parlement, si elle pouvait apparaître parfois convenue à certains observateurs, n'en revêtait pas moins une grande importance, notamment parce qu'elle mettait en lumière l'impact sur les finances publiques que pouvait avoir la convention. Il a noté qu'elle était surtout l'occasion, pour la commission, de rappeler les enjeux économiques, parfois considérables, attachés à ces conventions, et les bénéfices que pouvaient en tirer les entreprises françaises investissant à l'étranger.

Il a précisé qu'il y était particulièrement attentif, et qu'il suivait désormais, pour cette raison, en amont, la définition du calendrier de négociation avec les pays tiers, en s'intéressant aux travaux de l'observatoire des conventions fiscales internationales. Il a souligné que, dans ce but, il avait auditionné la sous-direction des relations internationales de la direction de la législation fiscale, attachée à la direction générale des impôts. Il s'est félicité que la priorité soit accordée dans les négociations, ou les renégociations, à des accords avec des pays tiers présentant les enjeux économiques les plus importants. Il a noté que la France bénéficiait déjà d'un réseau de conventions fiscales bilatérales particulièrement dense. Il convenait donc d'être favorable à une politique plus sélective dans la conclusion de nouveaux accords, permettant d'affecter des ressources au nécessaire travail d'actualisation, de « maintenance », des conventions existantes, et à la participation aux groupes de travail multilatéraux se réunissant dans le cadre de l'OCDE, afin de faire évoluer les « conventions types ».

Soulignant les enjeux que représentaient les conventions fiscales internationales pour les entreprises françaises, M. Adrien Gouteyron, rapporteur, a porté son attention sur le délai d'approbation de ces textes. Il a relevé qu'outre le présent projet de loi, deux projets de loi, l'un autorisant l'approbation de l'avenant sous forme d'échange de lettres modifiant la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Arménie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, l'autre autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Slovénie en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales, avaient été déposés au Sénat le 12 mai 2005.

Il a également noté que deux autres conventions, l'une avec la Syrie, l'autre avec la Lybie, pourraient entrer dans la phase d'approbation avant la fin de l'année 2006.

Il a souhaité évaluer le délai d'approbation des conventions fiscales, en le comparant avec celui que pratiquaient les pays parties prenantes. Il a considéré que le constat paraissait peu favorable à la France. Il a noté que sur la période récente, le processus d'approbation engagé par la France s'était achevé plus tardivement que celui du pays tiers, dans huit cas sur dix. Il a cité, pour exemple, le cas de la convention fiscale entre l'Albanie et la France, signée le 24 décembre 2002, approuvée par l'autre pays tiers le 21 mai 2003 et par la France le 21 juin 2005, ce qui représentait un retard par rapport au pays tiers de 2 ans et un mois. Il a également évoqué le cas de la convention fiscale avec l'Arménie, signée le 3 février 2004, approuvée par le pays tiers le 14 décembre 2004, et pas encore approuvée par la France. Il a admis qu'il y avait matière à réflexion sur la manière dont notre pays conduit le processus d'approbation des conventions fiscales internationales.

Sur le fond de la convention, M. Adrien Gouteyron, rapporteur, a alors rappelé que la conclusion d'une convention fiscale avec le Chili constituait une priorité indéniable. Il a constaté que ce pays de 16 millions d'habitants, doté d'un régime démocratique stable, offrait, en effet, un potentiel de croissance important. Il a observé que le taux de croissance du produit intérieur brut (PIB) s'était ainsi établi à 6,3 % en 2005 et devrait atteindre encore 5,4 % en 2006. Il a relevé que le taux d'investissement était particulièrement élevé (27 % du PIB en 2005), que les capitaux étrangers affluaient, que la dette extérieure apparaissait maîtrisée, que les réserves internationales étaient importantes et que les exportations étaient en forte croissance. Il a ajouté qu'en moins de dix ans, le Chili avait signé des accords de libre-échange avec trente-deux pays, y compris l'Union européenne en 2002 et les Etats-Unis en 2003, se classant ainsi au cinquième rang mondial des pays les plus ouverts aux importations et aux investissements étrangers.

Il a estimé que, dans ce contexte, la France avait intérêt à développer la présence de ses entreprises au Chili et indiqué que le prochain déplacement du Président de la République dans ce pays pourrait utilement y contribuer.

Malgré la taille limitée de son marché, il a jugé que le Chili constituait, pour la France, un enjeu important et un partenaire intéressant, par son exemplarité économique en Amérique latine et son ouverture à l'international. S'agissant des exportations, il a remarqué que la France était le dixième pays fournisseur du Chili, et le deuxième pays européen après l'Allemagne. Il a constaté que les exportations françaises s'étaient élevées à 340 millions d'euros en 2004 et 448 millions d'euros en 2005, ce qui représente une progression, d'une année à l'autre, de près de 32 %. Il a ajouté qu'elles portaient sur les secteurs suivants : automobile, ferroviaire, aéronautique, chimie et pharmacie, et tonneaux pour la vinification, plus spécifiquement au Chili. Il a précisé que leur évolution pouvait être assez erratique, car elle suivait l'exécution des grands contrats d'équipement, tels les transports urbains (Alstom) ou l'aéronautique (Airbus).

M. Adrien Gouteyron, rapporteur, a alors indiqué que la bonne santé économique du Chili, l'appréciation du peso par rapport à l'euro, ainsi que la récente signature d'importants contrats, devaient offrir à la France de réelles occasions, notamment sur la période 2006-2009.

Il a observé que, si au début des années 90, on ne comptait qu'une quarantaine d'implantations, celles-ci représentaient aujourd'hui environ 130 établissements, dans tous les secteurs, à l'exception du domaine minier : agriculture (vignes), industrie, construction, services. Il a souligné que, grâce au groupe Suez, la France occupait une place très importante dans les secteurs stratégiques de l'eau, de l'électricité et du gaz. Il a ajouté que des sociétés comme Alstom, Air Liquide ou Sodexho connaissaient également de très bons résultats au Chili.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur, a alors indiqué que le renforcement de la présence économique française au Chili rendait nécessaire la conclusion d'une convention fiscale, d'autant que le système fiscal chilien était marqué par l'existence d'une « additional tax » particulièrement défavorable aux entreprises étrangères souhaitant rapatrier leurs bénéfices.

Il a rappelé que cette spécificité fiscale chilienne avait été le point central de la négociation de la convention. Il a noté que, de l'avis des négociateurs français, une solution de compromis avait été trouvée qui devait permettre aux entreprises de bénéficier d'un effacement partiel, mais important, de la double imposition, sans que le coût pour le Trésor public français excède ce qui était habituellement consenti à nos partenaires. Il a précisé que l'ensemble des résidents de France, personnes physiques ou personnes morales, aurait droit, pour les dividendes, à un crédit d'impôt égal, soit au montant de « l'additionnal tax » chilien après imputation de l'« impôt sur les sociétés » chilien, soit à 15 % du montant brut des dividendes, avant imputation de « l'additionnal tax », si ce montant était inférieur.

Il a relevé que, s'agissant des autres stipulations, la convention était conforme en grande partie au modèle de convention de l'OCDE, même si elle comportait des adaptations rédactionnelles issues principalement, soit du modèle de convention de l'ONU, soit des spécificités de la législation fiscale des deux Etats. Il a ajouté que l'ensemble des adaptations souhaitées par le Chili, et que la France avait acceptées, avaient d'ores et déjà fait l'objet d'un accord de la part des Etats membres de l'OCDE ayant conclu une convention fiscale avec le Chili (Canada) ou ayant déjà paraphé un projet de convention avec cet Etat (Royaume-Uni et Allemagne).

M. Adrien Gouteyron, rapporteur, a enfin annoncé que le processus d'approbation de la présente convention était achevé au Chili depuis le 16 janvier 2006.

Ayant apporté ces précisions et exprimé ses réserves sur les délais d'approbation des conventions fiscales, il a alors proposé de demander au Sénat d'adopter le présent projet de loi.

Après que M. Jean Arthuis, président, eut remercié le rapporteur pour la qualité, la clarté et la concision de son propos, la commission a approuvé, à l'unanimité, le projet de loi.

Domaines - Réforme de l'immobilier de l'Etat - Audition de M. Daniel Dubost, chef du service France Domaine, de M. Jean-Pierre Lourdin, secrétaire général du conseil de surveillance de l'immobilier de l'Etat et de M. Antoine Pouillieute, directeur général de l'administration au ministère des affaires étrangères, sur la réforme de l'immobilier de l'Etat

Au cours d'une deuxième séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'audition de M. Daniel Dubost, chef du service France Domaine, de M. Jean-Pierre Lourdin, secrétaire général du conseil de surveillance de l'immobilier de l'Etat et de M. Antoine Pouillieute, directeur général de l'administration au ministère des affaires étrangères, sur la réforme de l'immobilier de l'Etat.

A titre liminaire, M. Jean Arthuis, président, a rappelé que plusieurs parlementaires s'étaient fortement investis, sur le sujet de l'immobilier de l'Etat, en particulier M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial de la mission « Action extérieure de l'Etat », s'agissant de la gestion immobilière du ministère des affaires étrangères. Il a évoqué les négligences qui, dans ce cadre, avaient été mises au jour, de la part de l'Etat, en ce qui concerne la gestion et l'entretien de son patrimoine immobilier, de même que le manque de détermination des ministères à entreprendre une politique énergique de cessions. Mais il a fait valoir, également, qu'une prise de conscience, en la matière, avait résulté de ces critiques, dont les premiers effets pouvaient être observés. Il a relevé, ainsi, qu'une volonté politique s'exprimait clairement, désormais, en faveur d'une gestion améliorée et de cessions importantes, et que les instruments adéquats avaient été mis à la disposition des gestionnaires. Tel était le cadre dans lequel s'inscrivait l'audition de ce jour.

M. Daniel Dubost, procédant à l'aide d'une vidéo-projection, a présenté cette nouvelle politique immobilière de l'Etat. Il a souligné, tout d'abord, le caractère récent de la réforme, en rappelant qu'elle n'avait été mise en oeuvre, de manière effective, qu'à la suite du rapport d'information n° 2457 (AN-XIIe législature) fait par M. Georges Tron, député, au nom de la Mission d'évaluation et de contrôle (MEC) de l'Assemblée nationale. Ce rapport, en juillet 2005, avait pointé l'insuffisance du pilotage de la politique immobilière de l'Etat et les surcoûts afférents, notamment en raison de la sous-occupation des locaux disponibles et de leur entretien insuffisant.

Dressant une rapide chronologie, M. Daniel Dubost a rappelé que la décision de créer, dans la loi de finances initiale pour 2006, le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat », avait été prise en septembre 2005, de même que la décision de mener une expérimentation de loyers budgétaires auprès de trois ministères (le ministère des affaires étrangères, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie et le ministère de la justice). Il a fait valoir que, dès l'automne 2005, plusieurs ventes importantes avaient été réalisées, en particulier celle de l'îlot de la rue du Bac, à Paris, jusqu'alors occupé par l'administration des douanes et dont le produit de cession s'est élevé à 165 millions d'euros. Il a rappelé que le patrimoine immobilier de l'Etat avait été transféré au service France Domaine, succédant à l'ancien service des domaines, à la suite de l'annonce de cette mesure par le Président de la République dans son allocution prononcée, à Metz, le 6 janvier 2006. Il a mentionné, en outre, que M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, avait présenté devant le Conseil des ministres du 22 février 2006 une communication relative à cette réforme de la politique immobilière de l'Etat, et que M. Georges Tron venait d'en établir une première analyse, dans un rapport d'information n° 2926 (AN-XIIe législature) fait, au nom de la Mission d'évaluation et de contrôle (MEC) de l'Assemblée nationale, au titre de suivi de son rapport précité.

Présentant, ensuite, les résultats d'ores et déjà obtenus dans le cadre de cette réforme, M. Daniel Dubost a indiqué que, tandis que, durant la période 1993-2003, le produit global des cession d'actifs immobiliers de l'Etat avait représenté, chaque année, environ 100 millions d'euros, ce produit avait atteint 170 millions d'euros en 2004 et s'était élevé, en 2005, à 630 millions d'euros. Il s'est attaché, alors, à détailler les moyens mis en oeuvre pour obtenir ce dernier résultat. Il a souligné, d'abord, l'implication personnelle du ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, ainsi que l'importance de la nouvelle responsabilité confiée au service France Domaine. Il a précisé, d'ailleurs, que celui-ci s'appuyait fortement sur les directeurs en charge des affaires immobilières au sein de chaque ministère. Il a également mentionné la mise en place du conseil de surveillance de l'immobilier de l'Etat, pour lequel il a renvoyé à l'intervention suivante de M. Jean-Pierre Lourdin. Il a surtout insisté sur le dispositif d'incitation aux cessions, par intéressement au produit de celles-ci, introduit en direction des ministères, dont il a exposé les grandes lignes. Dans l'hypothèse de cessions d'immeubles inoccupés, les ministères bénéficient d'un « droit de tirage », sur les crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat », à hauteur de 50 % du produit net de cession. Dans le cas de cessions donnant lieu à relogement de services, les ministères perçoivent 85 % du produit de cession pour leurs opérations de relogement ou, si leurs dépenses réelles s'avèrent inférieures, pour d'autres dépenses immobilières, hors dépenses de personnel. Par exception, l'intéressement est de 100 % dans le cas du ministère de la défense. Les fonds qui ne sont pas reversés au budget des ministères soit la moitié du produit de cession des immeubles inoccupés et 15 % dans les autres cas, pour les administrations civiles se trouvent affectés au désendettement de l'Etat.

M. Jean Arthuis, président, s'est interrogé sur l'éventuel encouragement à dépenser que pourrait entraîner un tel système d'intéressement. Au terme d'un échanges de vues, sur ce point, avec MM. Philippe Marini, rapporteur général, et Jean-Jacques Jégou, M. Daniel Dubost a précisé que l'emploi des fonds issus de cessions et reversés aux ministères faisait l'objet d'un contrôle strict, et que cet intéressement s'avérait déterminant pour inciter les administrations à la vente.

Revenant sur l'expérimentation des loyers budgétaires, il a fait valoir, notamment, l'enjeu essentiel de cette mesure, consistant dans l'identification claire des rôles du propriétaire, d'une part, c'est-à-dire l'Etat, et des affectataires, d'autre part, c'est-à-dire les ministères. Pour conclure, il a indiqué les trois principaux objectifs qui seraient poursuivis en 2006 concernant le patrimoine immobilier de l'Etat :

- en premier lieu, la réalisation de cessions, selon les prévisions de la loi de finances initiale pour 2006, à hauteur de 480 millions d'euros. Ce résultat devrait correspondre à un grand nombre d'opérations, chacune ayant un montant individuel limité, au contraire des ventes, peu nombreuses mais d'un enjeu financier important, réalisées en 2005 ;

- en deuxième lieu, la réussite des opérations de relocalisations induites par ces cessions, dont M. Daniel Dubost a mis en exergue qu'elle impliquait, en particulier, de parvenir à faire évoluer les mentalités au sein des administrations ;

- en troisième lieu, l'élaboration de schémas prévisionnels de stratégie immobilière (SPIS), par administration centrale.

Parmi les facteurs de réussite de ce programme, M. Daniel Dubost a relevé la forte contrainte pesant actuellement sur le budget de l'Etat, dont il a souligné qu'elle constituait un puissant moteur de dynamisation de la gestion immobilière de chaque ministère.

M. Jean Arthuis, président, a fait remarquer qu'en dépit des lenteurs observées à son démarrage, cette politique semblait désormais, en effet, « bien engagée ».

M. Jean-Pierre Lourdin, en préambule, a tenu à faire remarquer que, si le produit des cessions, en 2004, ne s'était pas monté à plus de 170 millions d'euros, la cause devait en être recherchée dans la lourdeur de la mise en place, alors en cours, des mesures préparatoires à la nouvelle politique immobilière, notamment les opérations de classement et de déclassement du domaine public de l'Etat, et la réforme de la réglementation des ventes des dépendances de celui-ci, alors que la mission interministérielle de valorisation du patrimoine immobilier de l'Etat (MIVPIE) venait seulement d'être installée. Il a exposé les deux objectifs que cette mission avait poursuivis. D'une part, l'encouragement des cessions d'immeubles vacants ou, à Paris, d'immeubles de valeur qui ne constituaient pas une localisation pertinente des services en cause. D'autre part, la professionnalisation et la modernisation de la gestion, par l'Etat, de son patrimoine immobilier. Il a fait observer que, dans ces conditions, si le rapport précité de M. Georges Tron, en 2005, avait apporté une contribution importante à la réflexion sur le sujet, cette réflexion, néanmoins, se trouvait déjà amorcée auparavant. Il a indiqué, également, que la communication précitée de M. Jean-François Copé, lors du Conseil des ministres du 22 février 2006, avait constitué un aboutissement de ce travail.

M. Jean Arthuis, président, s'est enquis, alors, de l'existence d'un tableau de bord opérationnel des actifs immobiliers de l'Etat, permettant à celui-ci de mettre en oeuvre, effectivement, les nouvelles orientations de sa politique de gestion. En réponse, MM. Daniel Dubost et Jean-Pierre Lourdin ont indiqué qu'un tel tableau existait sous la forme du tableau général des propriétés de l'Etat (TGPE), mais qu'il n'avait été actualisé exhaustivement, s'agissant du dénombrement des actifs, que de manière très récente. Il demeurait approximatif en ce qui concerne la mesure des surfaces en cause. Il a été précisé en conséquence, qu'il était fait appel préalablement à tout projet de cession, à des géomètres experts.

Puis M. Jean-Pierre Lourdin a présenté le conseil de surveillance de l'immobilier de l'Etat, dont il a annoncé l'installation dans les prochaines semaines. Il en a détaillé, d'abord, la composition, qui devrait se répartir comme suit : deux députés et deux sénateurs, des représentants de l'administration, des professionnels de l'immobilier, ainsi que le responsable du parc immobilier d'une administration étrangère. Le rôle de ce conseil, qui devrait se réunir de quatre à six fois par an, consistera à assurer la mise en oeuvre effective des réformes, par l'examen régulier de l'état d'avancement de la modernisation de la gestion immobilière de l'Etat, et à débattre des nouvelles orientations retenues par le gouvernement en ce domaine. Il reviendra au conseil d'orientation de la politique immobilière de l'Etat de les présenter. Il aura, ainsi, vocation à connaître de l'ensemble des problématiques intéressant le patrimoine immobilier de l'Etat : cessions, loyers, entretien. Sur l'identification précise de la problématique de l'entretien, M. Jean-Pierre Lourdin a précisé que la réflexion était encore en cours, et faisait l'objet d'une mission confiée conjointement à l'Inspection générale des finances et au Conseil général des ponts et chaussées, qui devraient rendre prochainement leur rapport.

M. Jean-Jacques Jégou a souhaité connaître les procédures de suivi des opérations de cession et de relogement décidées par les ministères. En réponse, M. Daniel Dubost a indiqué que, si l'emploi du produit des cessions inférieures à 2 millions d'euros relevait de la propre responsabilité des ministères, celui du produit des cessions supérieures à ce montant, en revanche, faisait l'objet d'une validation centralisée préalable, relevant de la responsabilité du ministre chargé du budget, après instruction par le service France Domaine, qui assure également le contrôle de la conformité des opérations ainsi autorisées.

Faisant valoir le point de vue particulier du ministère des affaires étrangères, M. Antoine Pouillieute a tout d'abord rappelé que la gestion immobilière de ce ministère avait été la cible, depuis deux ans, d'un certain nombre de critiques, émanant en particulier du Parlement. Il a assuré que ces critiques avaient été prises en compte, dans le cadre d'une redéfinition de la gestion immobilière du ministère, orientée dans trois directions, qu'il a successivement présentées. En premier lieu, il a dénombré six séries de mesures effectives :

- 1° la réalisation d'un « bilan d'entrée » dans le nouveau régime défini par la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), consistant dans le recensement de l'ensemble des actifs immobiliers détenus par le ministère des affaires étrangères, tant en France qu'à l'étranger. M. Antoine Pouillieute a signalé que ce patrimoine représentait une surface totale de 2,5 millions de mètres carrés ;

- 2° la transformation, en mars 2006, de la direction générale de l'administration du ministère des affaires étrangères en un secrétariat général adjoint, réforme tendant à mettre en place, notamment, un « guichet unique », pour les services, s'agissant des affaires immobilières ;

- 3° la consolidation de la compétence de la commission interministérielle chargée de rendre un avis sur les opérations d'acquisition et de cession immobilières de l'Etat à l'étranger, étendue à l'ensemble des opérations d'un montant supérieur à 5 millions d'euros et aux projets concernant les lycées français à l'étranger ;

- 4° la négociation, avec la direction du budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, d'un contrat triennal visant à permettre un intéressement du ministère des affaires étrangères à hauteur de 100 % du produit des cessions qu'il réaliserait, en contrepartie d'une diminution significative des crédits de dépenses d'investissement. M. Antoine Pouillieute a indiqué que ce contrat devrait être conclu à la mi-avril 2006, et que l'autofinancement qu'il permettrait de réaliser devrait être la source d'une importante dynamisation de la gestion immobilière du ministère ;

- 5° l'expérimentation volontaire, de la part du ministère des affaires étrangères, des loyers budgétaires. M. Antoine Pouillieute a précisé que cette expérimentation concernait les locaux du ministère situés à Paris, à Bruxelles et à Athènes ;

- 6° le développement de sources de financement innovant, partenariats public-privé et baux croisés avec des entrepreneurs de travaux notamment.

En deuxième lieu, M. Antoine Pouillieute a fait valoir que le ministère des affaires étrangères avait modifié sa manière de concevoir la programmation immobilière. Alors que celle-ci résultait, naguère, de la collation des diverses demandes en provenance des ambassades, une approche plus fonctionnelle a été mise en pratique, qui tend à faire découler la programmation, désormais, d'une réflexion d'ordre stratégique.

En dernier lieu, M. Antoine Pouillieute a exposé la politique de cession conçue par le ministère des affaires étrangères, qu'il a résumée en trois points :

- d'une part, un encouragement au regroupement des services, au sein d'une même ville, à Paris comme à l'étranger, sur un site unique ou, en tout cas, sur des sites moins dispersés qu'en l'état actuel. M. Antoine Pouillieute, au reste, a fait observer qu'un semblable regroupement, en général, recoupait le but de sécurité poursuivi, par le ministère, au bénéfice de ses agents ;

- d'autre part, selon ses propres termes, le passage « d'une diplomatie d'héritage à une diplomatie d'avenir », qui suppose un programme de cessions déterminé en fonction du réseau de relations bilatérales souhaité, désormais, par la France ;

- enfin, une préoccupation pour l'image de notre pays, qui conduit le ministère des affaires étrangères à exclure la cession de biens de valeur historique ou patrimoniale. A cet égard, M. Antoine Pouillieute a annoncé qu'une liste des immeubles concernés serait prochainement établie, et qu'une part significative des crédits affectés aux opérations immobilières du ministère devrait être employée à leur préservation. M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial de la mission « Action extérieure de l'Etat », a manifesté tout l'intérêt qu'il prenait à annonce.

M. Philippe Marini, rapporteur général, s'est interrogé, alors, sur la nécessité de faire intervenir, systématiquement, des experts français, en vue de l'évaluation d'immeubles situés à l'étranger, et sur la possibilité de confier cette tâche, lorsque cela s'avérait possible, à des professionnels locaux. M. Antoine Pouillieute, en réponse, a souligné le caractère mondial du marché sur lequel se trouvaient les biens immobiliers en cause, et la nécessité de recourir à des tiers, à la fois qualifiés et fiables, pour l'organisation de leur cession.

En conclusion, et en vue de relativiser l'importance du patrimoine immobilier affecté aux services du ministère des affaires étrangères, il a rapporté les éléments de comparaison avancés par le dernier rapport, précité, de M. Georges Tron : la valeur du parc immobilier de l'Etat dans le monde serait comparable à celle du parc dont il dispose dans les Yvelines, et la valeur des parcs immobiliers de l'Etat en Asie et en Afrique serait équivalente, respectivement, à celle de son patrimoine situé dans les Ve et VIe arrondissements de Paris et à celle de ses possessions à Marseille.

Après que M. Jean Arthuis, président, eut jugé « encourageants » les éléments développés par M. Antoine Pouillieute, un large débat s'est instauré.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a fait part de son vif intérêt pour chacun des exposés qui venaient d'être présentés. Il s'est félicité que les premiers effets d'une nouvelle politique de gestion immobilière de l'Etat soient observables, en soulignant l'importance des obstacles juridiques, mais aussi culturels, auxquels les animateurs de cette réforme se trouvaient confrontés. Puis il a formulé plusieurs questions. Tout d'abord, il a souhaité connaître les perspectives de maintien en activité de la mission interministérielle de valorisation du patrimoine immobilier de l'Etat. Il a voulu savoir, également, si le service France Domaine se trouvait associé aux opérations majeures de relocalisation de certains services, comme, par exemple, celles qui concernaient le Tribunal de grande instance de Paris. Par ailleurs, il s'est interrogé sur la possibilité d'un bilan des cessions, non seulement en valeur (le produit des ventes étant rapporté aux coûts de relogement des services), mais encore en termes de surfaces cédées, celles-ci étant portées en regard des surfaces acquises. Enfin, s'agissant du ministère des affaires étrangères, il a exprimé son scepticisme quant à l'opportunité de conserver des services techniques centraux destinés à intervenir dans le monde entier, plutôt que de définir, localement, des responsables assumant les mêmes tâches.

En réponse à la première de ces questions, M. Jean-Pierre Lourdin a indiqué que la mission interministérielle de valorisation du patrimoine immobilier de l'Etat n'était maintenue en activité, à présent, que pour la part des réflexions, entrant dans sa compétence, qu'elle n'avait pu encore mener à terme. Pour le reste, ses attributions allaient bientôt se trouver assumées par le conseil de surveillance de l'immobilier de l'Etat. M. Daniel Dubost a confirmé que la mission avait vocation à disparaître. M. Philippe Marini, rapporteur général, cependant, a estimé que les organismes intervenant en ce domaine étaient nombreux.

En réponse à sa deuxième question, M. Daniel Dubost a confirmé que le service France Domaine était associé aux opérations majeures de relocalisation, tout projet de cession et de relogement d'un montant supérieur à 2 millions d'euros devant nécessairement faire l'objet d'une décision d'autorisation de la part du ministre en charge du budget. M. Antoine Pouillieute a indiqué que le ministère des affaires étrangères, pour ses propres projets de cession, consultait effectivement le service France Domaine, en vue de sécuriser ses opérations, en particulier sur le plan financier.

En réponse à la troisième question, M. Daniel Dubost a indiqué que la vérification de l'écart entre les surfaces cédées et les surfaces acquises en vue d'un relogement des services était systématique, dans le cadre des opérations d'un montant supérieur à 2 millions d'euros, et que cet écart s'avérait, en pratique, significatif. Il a précisé que, cependant, cet écart n'était pas assuré dans les autres cas. M. Philippe Marini, rapporteur général, a fait part, concernant les récentes opérations immobilières du ministère de la culture, de ses doutes.

En réponse à sa dernière question, M. Antoine Pouillieute a mis en avant la difficulté de trouver l'équilibre souhaitable, au sein du ministère des affaires étrangères, entre centralisation et déconcentration. Il a signalé, toutefois, que le service des affaires immobilières de ce ministère, malgré l'importance des surfaces en cause, n'employait que 36 agents.

M. Paul Girod, rapporteur spécial du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat », a jugé que les éléments qui venaient d'être exposés à la commission, concernant le contrôle de l'efficacité opérationnelle des relocalisations, se révélaient satisfaisants. Cependant, il a fait observer l'insuffisance des indicateurs de performance mis en place, s'agissant du programme de cessions immobilières, à l'occasion du projet de loi de finances initiale pour 2006. En particulier, il a souhaité que, pour l'avenir, l'indicateur retraçant le nombre d'immeubles cédés soit complété d'un indicateur présentant pour chaque cession, d'une part, la valeur estimée, des immeubles avant cession et, d'autre part, le produit retiré de la vente.

M. Daniel Dubost, en réponse, a fait valoir, la création du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat » ayant été décidée en septembre 2005, que seuls, des indicateurs de performance encore sommaires avaient pu être élaborés pour le projet de loi de finances initiale pour 2006. Il a souligné, toutefois, la difficulté technique que présentait la mesure de l'efficacité, s'agissant des ventes immobilières de l'Etat, notamment au regard des modes d'évaluation de la valeur des biens et des fluctuations du marché de l'immobilier.

M. Yves Fréville a souhaité obtenir des précisions sur la détermination du montant des loyers budgétaires d'une part, sur le régime applicable à l'immobilier militaire d'autre part. En outre, il a fait observer, qu'à ce jour, les universités n'étaient pas reconnues, formellement, comme affectataires des locaux qu'elles occupent.

Répondant à ces questions, M. Daniel Dubost a d'abord indiqué que les loyers budgétaires avaient été calculés, dans la loi de finances initiale pour 2006, sur la base de la valeur des locaux inscrite au tableau général des propriétés de l'Etat, affectée d'un taux de 5,12 %. Il a précisé que ce taux correspondait au taux moyen de remboursement de la dette de l'Etat, mais était inférieur à celui du marché. Concernant l'immobilier militaire, il a signalé que celui-ci constituait près de la moitié du patrimoine immobilier de l'Etat, et que la forte incitation aux cessions, aménagée en faveur du ministère de la défense, devait entraîner une contribution importante, de la part de ce dernier, à la politique de rationalisation engagée. Enfin, s'agissant de l'affectation aux universités des locaux qu'elles occupent, il a reconnu ne pas pouvoir apporter d'élément nouveau.

M. Jean-Jacques Jégou a voulu savoir si une rationalisation du parc immobilier de l'Etat à l'étranger pouvait être recherchée dans des opérations de regroupements des locaux diplomatiques français avec ceux d'autres Etats membres de l'Union européenne. M. Antoine Pouillieute, répondant positivement, a souligné, néanmoins, les nombreuses difficultés, notamment d'ordre juridique, que de telles opérations comportaient.

M. Jean Arthuis, président, ayant fait observer la disparité pouvant exister, selon les pays, entre les parcs immobiliers détenus par l'Etat à l'étranger, en termes de surface, M. Antoine Pouillieute a précisé que ces différences correspondaient, souvent, à l'existence de lycées français, dont les surfaces, importantes, se trouvaient intégrées dans le calcul des chiffres auxquels il venait d'être fait référence.

Répondant à une question de M. Auguste Cazalet, il a précisé que la notion de patrimoine immobilier, du point de vue du ministère des affaires étrangères, correspondait à l'ensemble des locaux affectés aux services politiques, consulaires, culturels et de coopération. Il a confirmé à M. Philippe Marini, rapporteur général, que les missions économiques et financières n'étaient pas prises en compte.

Pour conclure, M. Jean Arthuis, président, remerciant les trois intervenants, au nom de la commission, pour l'intérêt de leurs exposés respectifs, a estimé que ceux-ci constituaient autant d'encouragements à persévérer dans la voie d'une gestion immobilière de l'Etat rationalisée.

Economie - Réforme des partenariats public-privé - Audition de M. Noël de Saint-Pulgent, président de la mission d'appui à la réalisation des partenariats public-privé au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, de M. Jean-Baptiste Gillet, directeur des affaires financières au ministère de la défense et de M. Claude Martinand, vice-président du conseil général des Ponts et chaussées, sur les partenariats public-privé

Au cours d'une troisième séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'audition de M. Noël de Saint-Pulgent, président de la mission d'appui à la réalisation des partenariats public-privé au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, de M. Jean-Baptiste Gillet, directeur des affaires financières au ministère de la défense et de M. Claude Martinand, vice-président du conseil général des Ponts et chaussées, sur les partenariats public-privé.

Au préalable, M. Jean Arthuis, président, a rappelé que l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 avait créé une nouvelle modalité d'association du secteur public et du secteur privé, les contrats de partenariats, permettant à une collectivité publique de confier à une entreprise la mission globale de financer, concevoir, maintenir et gérer des ouvrages, des équipements et services concourant aux missions de l'administration, dans un cadre de longue durée, contre un paiement effectué par la personne publique, étalé dans le temps. Il a donc souhaité tirer un premier bilan de la relance des partenariats public - privé.

M. Noël de Saint-Pulgent a rappelé que les contrats de partenariat constituaient en matière d'achat public un troisième pilier, entre le marché public et la délégation de service public, et que leur champ d'application était extrêmement large, car ils pouvaient s'appliquer à d'autres projets qu'aux seuls projets immobiliers. Il a indiqué que les contrats de partenariat, passés en application d'une procédure de « dialogue compétitif », devaient être précédés d'une évaluation préalable. Il a ainsi expliqué la création de missions d'appui aux contrats de partenariat, en application de l'article 2 de l'ordonnance précitée du 17 juin 2004, l'une au sein du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, dont il assurait la présidence, l'autre au sein du ministère de la défense, ayant pour mission, outre la réalisation de guides ou de fiches pratiques sur le sujet, de rendre un avis sur les projets des gestionnaires. Il a fait valoir que 35 projets pilotes avaient été engagés et que, s'agissant de l'Etat, quatre projets avaient fait l'objet d'un avis de la mission d'appui : trois avis positifs, concernant la rénovation de l'Institut national du sport et de l'éducation physique (Insep), la formation initiale des pilotes militaires d'hélicoptères dans le cadre de l'école d'application de l'aviation légère de l'armée de terre (EA-ALAT) de Dax et la réalisation du pôle énergie du centre hospitalier de Roanne, et un avis négatif, relatif à un projet de la cité d'architecture et du patrimoine. Il a indiqué qu'un autre projet devrait prochainement faire l'objet d'un avis favorable de la mission : la gestion du système de billetterie du château de Versailles, et que trois autres projets concernant une réalisation de prison, la rénovation du zoo de Vincennes et la constitution d'un réseau de radio-téléphone étaient en cours d'examen. Il s'est félicité du lancement de projets portés par les universités, citant en exemple l'extension de l'université de Paris IV à Clignancourt, évoqué le cas des lycées français à l'étranger, comme celui du Caire, et noté que 15 à 20 collectivités territoriales avaient sollicité la mission d'appui, un projet, celui relatif à l'informatisation des collèges d'Eure-et-Loir, lancé par le président du conseil général, ayant fait l'objet d'une expertise plus poussée.

Il a conclu en considérant que les contrats de partenariats faisaient l'objet de beaucoup d'intérêt de la part des gestionnaires publics, mais que les délais de maturation des projets étaient longs, voire lents, se heurtant parfois à des obstacles juridiques, comme la procédure de déclaration d'utilité publique dans le cas de la rénovation du zoo de Vincennes. Rappelant que les partenariats public - privé représentaient 15 % de la commande publique au Royaume-Uni, il a considéré qu'il serait satisfait si la France parvenait à rattraper partiellement son retard, et à atteindre la moitié de ce pourcentage.

M. Jean-Baptiste Gillet a ensuite évoqué les partenariats public - privé relevant du ministère de la défense, soulignant que la loi de programmation militaire 2003-2008 avait expressément prévu des moyens de financement alternatifs pour la réalisation de certains équipements militaires. Il a indiqué que le ministère de la défense s'était doté d'un organisme expert dont la composition, à l'exception de son président, était complètement extérieure au ministère, et qu'il avait recours aux contrats de partenariat, comme à d'autres instruments, afin d'associer le secteur privé à ses investissements.

S'agissant des contrats de partenariat, il a cité les projets suivants :

- l'externalisation de la formation initiale des pilotes d'hélicoptères, pour un montant global de 50 millions d'euros, qui devrait avoir pour effet de réduire un parc vieillissant d'appareils, tout en assurant une meilleure disponibilité de ceux-ci. La mise en service des nouveaux appareils devrait avoir lieu en 2006 ;

- la rénovation de l'école interarmées des sports de Fontainebleau, dont les installations paraissaient dépassées, qui avait fait l'objet d'une évaluation préalable conduisant à s'interroger sur le réalisme financier d'un contrat de partenariat ;

- le déploiement d'un réseau de desserte Internet-protocole (RDIP) pour les bases de l'armée de l'air ;

- et, enfin, la mise en oeuvre du projet d'hélicoptères de transport NH90, et en particulier du simulateur destiné à l'entraînement des pilotes, qui pourrait faire l'objet d'une location à des pays partenaires.

Il a observé, par ailleurs, que d'autres projets associant le secteur privé étaient menés par le ministère de la défense dans le cadre plus traditionnel des marchés publics, citant :

- un projet de crédit-bail visant à renouveler un parc de 20.000 véhicules légers, en France métropolitaine, permettant à la fois un remplacement de véhicules âgés aujourd'hui, en moyenne, de sept ans, et une réduction des coûts de l'ordre de 15 % à 25 %, grâce, notamment, à une maintenance intégrée au contrat ;

- l'externalisation de la gestion des logements des gendarmes ;

- la délégation externe de la maintenance de la base école de Cognac ;

- et la location, avec option d'achat, d'avions de transport à long rayon d'action.

En réponse à une question de M. Jean Arthuis, président, il a confirmé que l'intégration de la maintenance dans le contrat de renouvellement du parc automobile du ministère de la défense aurait pour conséquence des économies en termes d'effectifs.

M. Jean-Baptiste Gillet a tiré plusieurs enseignements de l'expérience acquise par le ministère de la défense dans les partenariats public - privé, notant, d'une part, que ces partenariats permettaient de prendre en compte les coûts sur l'ensemble du cycle de vie des matériels et que, d'autre part, ils faisaient ressortir des coûts cachés, coûts fiscaux, comme la TVA, mais aussi coûts d'assurance. Il a fait remarquer que ces coûts, que l'Etat éludait lorsqu'il assumait lui-même ces investissements, rendait plus difficile l'équilibre des opérations de partenariat avec le secteur privé.

M. Jean Arthuis, président, a considéré que, s'agissant de la TVA, le problème pouvait être résolu par un accord entre le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire et les ministres gestionnaires.

M. Jean-Baptiste Gillet a néanmoins indiqué que les difficultés liées au fait que la TVA devait être acquittée dans le cadre d'un contrat de partenariat public - privé pouvaient remettre en cause l'équilibre financier de l'opération.

Il a terminé en soulignant qu'il était difficile, dans une opération de partenariat public- privé concernant le ministère de la défense, de faire apparaître des « revenus tiers », liés à la mise à disposition d'équipements auprès d'autres partenaires, car les armées devaient avoir la totale maîtrise de la disponibilité de leurs équipements.

M. Claude Martinand a ensuite observé que le nouveau contrat de partenariat, s'il constituait un outil parmi d'autres permettant une gestion publique renouvelée, visait à satisfaire de nouveaux besoins, dans le domaine de l'investissement public. Il a souligné, en effet, la faiblesse du niveau d'investissement public en Europe, faute d'argent public, alors que d'importants volumes de capitaux privés étaient disponibles, à des taux extrêmement bas. Il a fait valoir l'intérêt des partenariats public - privé dans ce contexte, d'autant que ceux-ci, selon la doctrine d'Eurostat, n'avaient pas d'impact sur le niveau de la dette publique. Il a montré que les partenariats public - privé réalisés au Royaume-Uni avaient permis de mieux tenir les délais de réalisation que les investissements publics traditionnels, que ceux-ci étaient de nature à mieux identifier les coûts de maintenance des équipements et permettaient d'avoir la certitude que ceux-ci seraient correctement entretenus.

Il a fait remarquer que les partenariats public - privé permettaient, par ailleurs, de réaliser immédiatement des investissements nécessaires, citant le cas des digues de Camargue, sans étaler les travaux dans le temps, ce qui, sur un plan socio-économique, serait à la fois moins efficace et plus coûteux.

Enfin, il a souhaité que les collectivités territoriales, qui constituaient les plus gros investisseurs publics, puissent avoir accès à une mission d'appui aux contrats de partenariat, par l'intermédiaire des associations d'élus locaux.

Un débat s'est ensuite engagé.

M. Yves Fréville s'est félicité que les partenariats public -privé permettent de retrouver des préoccupations économiques qui avaient disparu des décisions d'investissement, rappelant qu'un investissement consistait à acheter la disponibilité d'un équipement sur longue durée, et que son coût devait ainsi être évalué de manière globale. Il a montré les vertus d'un mécanisme conduisant à comparer la rentabilité d'un investissement public par rapport à celui réalisé dans le cadre d'un partenariat public - privé.

M. Jean Arthuis, président, s'il s'est montré en accord avec cette analyse, a néanmoins considéré, s'agissant notamment du ministère de la défense, que l'absence d'arbitrage dans les projets d'équipement, et la sédimentation des programmes, pouvaient conduire à avoir recours des partenariats public - privé, non pas dans une perspective de rationalité économique, mais pour esquiver la contrainte budgétaire de court terme. Il s'est interrogé sur la prise en compte de ces investissements au regard des règles posées par Eurostat.

M. Jean-Baptiste Gillet a convenu que les modalités de financement d'un équipement étaient neutralisées en comptabilité nationale, grâce à Eurostat, puisque les biens étaient pris en compte au moment de leur livraison, et non plus de leur paiement, mais que cela n'était pas le cas en comptabilité budgétaire.

M. Jean Arthuis, président, a reconnu l'intérêt des partenariats public - privé pour achever des investissements informatiques dans des délais convenables, alors qu'ils auraient autrement été différés en raison de mesures de régulation budgétaire qui touchaient habituellement ce type d'investissements.

En réponse à une question de Mme Nicole Bricq, M. Noël de Saint-Pulgent a considéré qu'il n'y avait pas de véritables problèmes culturels au sein des collectivités territoriales les conduisant à hésiter à recourir aux partenariats public - privé, mais, qu'au contraire, l'adhésion des décideurs locaux à cette nouvelle formule était forte et que les décisions étaient souvent prises à l'unanimité au sein des assemblées délibérantes locales. Il a souligné que le contrat de partenariat public - privé ne dépossédait pas les collectivités territoriales de leurs prérogatives stratégiques, seule la gestion étant déléguée.

M. Eric Doligé a souhaité apporter son témoignage en indiquant que le lancement récent de la construction d'un collège dans le cadre d'un partenariat public - privé avait fait l'objet d'une décision unanime de l'assemblée départementale du Loiret, et que les avantages de cette formule se révélaient considérables, notamment s'agissant des délais de réalisation, habituellement de cinq ans, et ramenés dans le cadre d'un contrat de partenariat à deux ans.

M. Jean Arthuis a conclu en soulignant que le contrat de partenariat, utile sur le plan économique, ne devait pas être dévoyé par un « Etat impécunieux », qui verrait dans cet outil un moyen commode pour différer la réforme des administrations et éviter de réformer un code des marchés publics devenu trop complexe.

Mercredi 12 avril 2006

- Présidence de M. Jean Arthuis, président.

Loi organique relative aux lois de finances - Application - Communication

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a entendu une communication de M. Jean Arthuis, président, sur la mise en oeuvre de la LOLF.

Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Jean Arthuis, président, a rappelé que cette communication s'inscrivait dans le prolongement du séminaire de travail de la commission organisé à Guéret les 3 et 4 avril derniers. A cet égard, il a tenu à remercier M. Michel Moreigne pour l'excellence de son accueil dans la Creuse.

M. Jean Arthuis, président, s'est félicité que tous les sénateurs aient « joué le jeu » de la LOLF lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2006, qui avait été le premier à être entièrement discuté selon les nouvelles règles prévues par la LOLF.

Il a précisé l'importance de la concertation qui avait été conduite en amont de la discussion du projet de loi de finances pour 2006, au sein de la commission et en liaison étroite avec les cinq autres commissions permanentes, devant lesquelles il avait été entendu au printemps 2005. De façon plus générale, il a insisté sur la nécessité de coordonner les initiatives des commissions permanentes, afin de revaloriser pleinement le rôle du Parlement.

S'agissant des nouvelles modalités d'examen du projet de loi de finances au Sénat, il s'est félicité du respect du délai constitutionnel de vingt jours. Il a regretté, toutefois, qu'un autre projet de loi, celui portant engagement national pour le logement, ait été discuté au cours de la période budgétaire. Ainsi, il a proposé qu'à l'avenir, la Conférence des présidents n'inscrive que le projet de loi de finances initiale à l'ordre du jour au cours de la période d'examen budgétaire, à l'exception de tout autre texte.

Il a observé que deux nouveaux débats thématiques avaient été organisés, relatifs, respectivement, au plafond des emplois rémunérés par l'Etat et à la variation nette de la dette de l'Etat. Cependant, il a invité à conduire une réflexion sur le nombre et l'organisation des débats thématiques, en suggérant ainsi l'organisation d'un seul débat sur les finances locales pendant l'examen du projet de loi de finances.

Concernant l'examen des crédits des missions, il a souhaité poursuivre le rééquilibrage entre la durée des discussions générales et celle des amendements, au profit d'un débat davantage centré sur les modifications des crédits, à l'instar de ce qui s'était produit à l'automne dernier.

Il s'est réjoui que les rapports spéciaux aient été plus courts, en rappelant l'orientation retenue, lors du séminaire de travail de la commission dans la Creuse, de poursuivre ce mouvement. Il a fixé l'objectif d'une nouvelle réduction de 20 % du nombre de pages des rapports spéciaux, faisant suite à une précédente diminution de 40 % enregistrée à l'automne dernier.

Enfin, il a suggéré la présence d'un fonctionnaire du service de la communication aux réunions de la commission relatives à l'examen du projet de loi de finances et du projet de loi de finances rectificative, afin que la communication s'opère en « temps réel » et que les communiqués de presse de la commission soient diffusés dans les tous meilleurs délais.

M. Jean Arthuis, président, a ensuite exposé les avancées permises par l'application des règles de la LOLF, en appelant à les prolonger.

Tout d'abord, il a souligné l'émergence d'un vrai pouvoir d'arbitrage parlementaire au regard du nombre d'amendements présentés : sur les crédits des missions, 85 amendements avaient été déposés en première délibération, dont 44 adoptés par le Sénat, au lieu de 12 amendements pour le projet de loi de finances pour 2005. Toutefois, il a regretté le bilan plus modeste à l'issue de la seconde délibération et des débats en commission mixte paritaire (CMP) : en première délibération, les 14 amendements d'origine sénatoriale, adoptés sur les crédits des missions du budget général, portaient sur 700 millions d'euros ; en seconde délibérations, 12 de ces 14 amendements avaient été confirmés et ne modifiaient plus que 400 millions d'euros de crédits ; enfin, seuls 8 de ces 12 amendements avaient été confirmés, à l'issue de la CMP, pour un montant de 30 millions d'euros.

Il a observé que le bilan était également modeste au regard des modifications de la nomenclature budgétaire et du plafond des emplois : le seul programme créé au Sénat à l'issue de la CMP, « Audiovisuel extérieur », provenait d'une initiative gouvernementale. Par ailleurs, 112 emplois publics avaient été supprimés par le Sénat.

M. Jean Arthuis, président, a ensuite dressé des perspectives d'amélioration dans l'organisation des débats budgétaires.

Il a suggéré d'inclure les crédits des programmes dans l'état B annexé à l'article retraçant, au sein du projet de loi de finances, les crédits du budget général. Puis il a souhaité que les crédits des missions soient examinés en commission après le vote en séance publique à l'Assemblée nationale afin de faciliter l'examen, par les rapporteurs spéciaux, des modifications qui y auraient été apportées. Il a également formulé le voeu d'accroître le délai entre la fin de la première lecture au Sénat et la réunion de la commission mixte paritaire, afin d'améliorer les conditions de préparation de cette dernière. Enfin, il a appelé à une meilleure délimitation des domaines respectifs des différentes catégories de lois : lois de finances, lois ordinaires comprenant trop souvent des dispositions fiscales, et lois de financement de la sécurité sociale.

Dans la continuité des travaux engagés lors de l'examen des projets de loi de finances, il a exprimé sa volonté que la discussion budgétaire s'inscrive dans un « chaînage vertueux », où la discussion, au printemps, du projet de loi de règlement et le débat d'orientation budgétaire (DOB) préparent effectivement l'examen du projet de loi de finances initiale examiné à l'automne.

A cette fin, M. Jean Arthuis, président, a souhaité qu'au printemps 2006, une semaine puisse être consacrée à la discussion du projet de loi de règlement pour 2005. Par ailleurs, il a proposé de procéder à des auditions de ministres gestionnaires en salle Médicis ou en salle Clemenceau. Ces échanges, ouverts à la presse, auront pour objectif d'apporter davantage de spontanéité que les débats, de forme plus convenue, organisés en séance publique. Il a également suggéré que le rapport de la commission sur le projet de loi de règlement comporte des éléments détaillés de l'exécution budgétaire, mission par mission.

Puis il a souhaité que le DOB soit discuté immédiatement après le projet de loi de règlement : le champ du DOB pourrait, en outre, être étendu à l'ensemble des prélèvements, et non uniquement à la fiscalité de l'Etat, tandis que les débats sur la maquette budgétaire seraient concentrés lors de la discussion du DOB.

M. Jean Arthuis, président, a relevé l'importance d'opérer un suivi des travaux budgétaires tout au long de l'année. Il a ainsi cité l'exemple du contrôle qui serait conduit sur la flotte d'aviation de la sécurité civile par M. Claude Haut, rapporteur spécial de la mission « Sécurité civile », comme une illustration de la corrélation étroite entre l'examen des projets de loi de finances et le choix des thèmes de contrôle budgétaire.

Il a insisté, aussi, sur le suivi de la mise en oeuvre des principales réformes budgétaires, en rappelant l'audition, organisée par la commission le 22 mars dernier, de M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, sur l'adossement du recouvrement de la redevance audiovisuelle à la taxe d'habitation.

Il a souhaité que les rapporteurs spéciaux aient accès à tous les actes et décisions sur les budgets relevant de leur domaine de compétences, sans avoir à les demander expressément, en application de l'article 57 de la LOLF qui leur attribuait des pouvoirs incontestés en ce domaine. Enfin, il a appelé à poursuivre la simplification des questionnaires budgétaires.

En conclusion, M. Jean Arthuis, président, a évoqué les travaux conduits par la commission lors de son séminaire tenu à Guéret pour signifier l'importance qui devait s'attacher à la déclinaison opérationnelle des missions et des programmes sur le terrain, au moment de la mise en place des budgets opérationnels de programme (BOP) et des unités opérationnelles (UO). Il s'est interrogé, notamment, sur le bien-fondé de procéder à l'engagement des dépenses des services déconcentrés de l'Etat en même temps qu'à leur paiement. De même, il a salué les travaux conduits par M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial de la mission « Action extérieure de l'Etat », sur le patrimoine immobilier du ministère des affaires étrangères : ce contrôle budgétaire témoignait, en effet, des nombreux enseignements qui pouvaient être tirés d'un examen approfondi des conditions de mise en oeuvre de la réforme budgétaire, sur le terrain.

Enfin, il a souligné que le succès dans l'application de la LOLF reposait sur la volonté et l'engagement politiques des parlementaires, représentants de la Nation. S'agissant des relations avec la Cour des comptes, dont il s'est plu à relever l'excellence, il a proposé que les souhaits des rapporteurs spéciaux quant aux enquêtes demandées à la Cour des comptes dans le cadre de l'article 58-2° de la LOLF lui soient communiqués dès septembre, soit en amont de la définition de son programme annuel de travail par la Cour des comptes. Il a, également, invité à procéder à de nouvelles demandes d'assistance à la Cour des comptes, conformément aux dispositions de l'article 58-1° de la LOLF, après que M. Yann Gaillard eut rappelé le succès de l'enquête qu'il avait conduite dans ce cadre, grâce à la pleine implication du magistrat de la Cour des comptes ayant travaillé à ses côtés.

In fine, M. Jean Arthuis, président, a souligné l'importance du suivi de l'exécution budgétaire, évoquant la publication d'un rapport d'information présentant, en application de l'article 13 de la LOLF, l'avis de la commission des finances sur le projet de décret d'avance destiné à faire face à l'épidémie de chikungunya et à l'épizootie de grippe aviaire. Il a demandé que la commission réfléchisse à la procédure qu'elle pourrait adopter, lorsqu'elle devrait exprimer son avis sur un projet de décret d'avance en dehors des périodes de session ou pendant la suspension des travaux parlementaires. Dans ce cas, il a proposé qu'un projet de rapport soit établi sous la responsabilité du rapporteur général, ou, en son absence, du président de la commission, lequel serait alors communiqué à l'ensemble des commissaires par tout moyen disponible (lettre, courriel, fax). Les membres de la commission disposeraient, alors, d'un délai de 48 heures pour faire part de leurs observations, afin de respecter le délai impératif de sept jours fixé par l'article 13 de la LOLF.

En tout état de cause, eu égard à la brièveté des délais, il a relevé que cela supposait que la commission soit bien informée, en amont, par le gouvernement de tout projet de décret d'avance.

En conséquence, il a proposé d'actualiser le « guide des bonnes pratiques du contrôle budgétaire » de la commission sur ces différents points avant de l'adresser à tous les membres de la commission, comme cela était désormais la « tradition ».

Un large débat s'est alors instauré.

M. Jean-Jacques Jégou a fait part de sa crainte que les difficultés potentielles liées à la mise en oeuvre de la LOLF ne soient plus perçues par les agents de l'Etat que les bénéfices attendus de la réforme.

Par ailleurs, il s'est interrogé sur les conséquences sur le plafond des emplois rémunérés par l'Etat de l'annonce récente faite par M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, quant à l'embauche de 50.000 surveillants dans les écoles à la prochaine rentrée scolaire. Il s'est demandé si ces emplois nouveaux pourraient être créés par redéploiement au sein des effectifs du ministère de l'éducation nationale.

M. Jean Arthuis, président, a répondu que le respect du principe de sincérité budgétaire, inhérent à la réforme budgétaire, devait s'appliquer à tous les ministères.

Par ailleurs, il a fait part des difficultés rencontrées par certains agents de l'Etat suite à la mise en place, parfois très tardive, des budgets opérationnels de programme.

M. Michel Charasse s'est vivement inquiété des conditions d'application de la réforme budgétaire sur le terrain, et s'est interrogé sur le degré d'implication des ministres dans la mise en oeuvre de la réforme, le jugeant, à tout le moins, inégal.

M. Jean Arthuis, président, a déploré l'archaïsme des systèmes d'information, en observant les retards pris dans l'adaptation informatique des modèles comptables.

Toutefois, il a tenu à nuancer le bilan parfois « catastrophiste » qui pouvait être donné des conditions d'application de la LOLF, sur le terrain. A cet égard, il a noté l'adhésion des fonctionnaires à la réforme budgétaire, qu'il avait pu observer à l'occasion des déplacements effectués au sein des services déconcentrés de l'Etat lors du séminaire de travail de la commission dans la Creuse.

M. Yves Fréville a exprimé sa préoccupation que la réforme budgétaire ne se traduise pas par une moindre visibilité des programmes pluriannuels d'investissement dans le secteur de la défense, en appelant à dresser un compte rendu annuel de la loi de programmation militaire.

Par ailleurs, il a souhaité que les services responsables des BOP et des UO contribuent à l'élaboration d'une cartographie de la densité des services de l'Etat sur le territoire, notamment les services sociaux.

M. Jean Arthuis, président, a observé que la LOLF était pleinement compatible avec la définition d'une vision pluriannuelle des finances publiques, s'agissant, en particulier, de l'ensemble des lois de programme et de programmation. Puis il a attiré l'attention des rapporteurs spéciaux sur la nécessité de compléter leurs questionnaires budgétaires afin de disposer d'une information plus riche sur la répartition des services de l'Etat sur le territoire. En outre, il a attiré l'attention sur l'utilité de poser ces questions lors des auditions des ministres gestionnaires envisagées lors de l'examen du projet de loi de règlement.

Mme Nicole Bricq a relevé que la LOLF faisant l'objet de nombreuses critiques dans les tribunaux judiciaires, appelant la commission à rendre publiques ses observations quant aux conditions effectives de mise en oeuvre de la réforme, et ce, sur la base de cas précis qui pourraient être recensés. Elle s'est également interrogée sur le nombre et la place des nouveaux débats thématiques prévus dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances, en particulier le débat sur la dette publique.

M. Jean Arthuis, président, a relevé que les travaux sur les frais de justice conduits par M. Roland du Luart, rapporteur spécial de la mission « Justice », avaient permis de parvenir à des améliorations significatives de la gestion du ministère de la justice. Il a, par ailleurs, pris bonne note de la nécessité de procéder à des débats thématiques moins convenus et plus interactifs, grâce à des interventions plus brèves et plus percutantes.

M. Yann Gaillard a relevé les différences d'implication des magistrats judiciaires dans les activités de gestion.

M. Maurice Blin a souligné la forte sensibilité aux conditions de mise en oeuvre de la LOLF dans les ministères « à finalité humaine », tels que la justice et l'enseignement supérieur. Il a relevé que l'explosion de la demande sociale adressée aux tribunaux ou l'évolution à la hausse des prestations sociales témoignaient de profondes évolutions du corps social.

Par ailleurs, il a cité l'exemple du Canada comme l'illustration de la capacité d'un pays à limiter les déficits publics, dans un climat relativement consensuel.

M. Jean Arthuis, président, a déclaré souscrire pleinement aux observations formulées par M. Maurice Blin. La LOLF n'implique pas la définition d'une politique donnée, mais constitue un instrument pour éclairer les choix des décideurs publics, au sens de l'article XV de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 : « La Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration ».

La commission a alors donné acte à M. Jean Arthuis, président, de sa communication et décidé, à l'unanimité, que ses conclusions feraient l'objet d'une publication sous la forme d'un rapport d'information.

Mission d'information - Corée du Sud et Japon - Désignation des membres

Puis, la commission a procédé à la désignation des membres de la mission d'information en Corée du Sud et au Japon. Ont été désignés M. Jean Arthuis (UC-UDF), président, M. Philippe Marini (UMP), rapporteur général, MM. Philippe Adnot (NI), Denis Badré (UC-UDF), Yann Gaillard (UMP), François Marc (Soc), Aymeri de Montesquiou (RDSE), Michel Moreigne (Soc) et Bernard Vera (CRC), après que M. Yann Gaillard eut indiqué que les deux autres postes dévolus au groupe de l'UMP n'avaient pas été pourvus, faute de candidats.

Exécution de la loi de finances pour 2005 - Communication de M. Philippe Marini, rapporteur général

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a entendu une communication de M. Philippe Marini, rapporteur général, sur l'exécution de la loi de finances pour 2005.

Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Philippe Marini, rapporteur général, a tout d'abord présenté les grandes caractéristiques de l'exécution de la loi de finances pour 2005. Il a indiqué que la croissance du PIB en 2005 avait été de 1,4 %, contre 2,5 % selon la prévision associée au projet de loi de finances pour 2006, que la commission avait toujours jugée volontariste. Il a indiqué que l'exécution des charges de l'Etat avait été inférieure de 1,1 milliard d'euros aux prévisions, alors que ses recettes avaient été supérieures de 0,6 milliard d'euros aux prévisions, d'où un solde supérieur de 1,7 milliard d'euros.

Il a souligné que ce supplément de recettes était paradoxal, alors que la croissance du PIB s'était révélée inférieure aux prévisions. Il a expliqué que si les recettes fiscales auraient dû, compte tenu du ralentissement de la croissance du PIB, être inférieures d'environ 8 milliards d'euros aux prévisions, ce phénomène avait été compensé par des recettes fiscales 2004 supérieures aux estimations disponibles lors de l'élaboration du projet de loi de finances pour 2005 (+ 2 milliards d'euros), par la réforme du régime des acomptes d'impôt sur les sociétés réalisée par la loi de finances rectificative pour 2005 (+ 2,3 milliards d'euros) - qui avait permis d'atténuer la moins-value sur cet impôt, qui s'élevait au final à 1,7 milliard d'euros, et par l'évolution plus favorable que prévu de plusieurs impôts ne reposant pas sur l'activité économique de l'année 2005 : l'impôt sur le revenu (+ 1,4 milliard d'euros), les donations et successions (+ 1 milliard d'euros) et l'impôt de solidarité sur la fortune (+ 0,3 milliard d'euros). Il a indiqué qu'au total, les recettes fiscales nettes avaient été supérieures de 0,6 milliard d'euros aux prévisions. Les recettes de la taxe sur la valeur ajoutée, qui tendaient à suivre l'activité économique, étaient en revanche inférieures aux prévisions à hauteur de 600 millions d'euros.

Ces facteurs conjoncturels, qui n'étaient pas connus lors du débat d'orientation budgétaire pour 2006 qui s'était tenu en juillet 2005, expliquaient en grande partie que les projections de moins-value de recettes fiscales établies par le gouvernement comme par la commission des finances en juin 2005 fussent plus pessimistes, à hauteur de 4 milliards d'euros pour le gouvernement et de plus de 6 milliards d'euros pour la commission.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a ajouté que les recettes non fiscales avaient été supérieures de 2,8 milliards d'euros et les prélèvements sur recettes supérieurs de 2,1 milliards d'euros aux prévisions, essentiellement du fait du prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne (+ 1,5 milliard d'euros). Il a précisé que ce supplément de recettes non fiscales provenait essentiellement de la progression des dividendes (750 millions d'euros de plus que les prévisions), de l'amende versée par les opérateurs de téléphonie mobile (+ 535 millions d'euros), de diverses opérations internationales, telles que les intérêts sur prêts octroyés à des Etats étrangers et les reversements de la COFACE (+ 1 milliard d'euros), et des frais d'assiette et de recouvrement (+ 250 millions d'euros). Il a également indiqué que le supplément du prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne (+ 1,5 milliard d'euros par rapport à la loi de finances initiale) résultait de l'augmentation des appels de fonds de la Commission européenne, qui avait accéléré les mises en paiement dans la perspective de la clôture de la programmation financière 2000-2007.

Il a indiqué que les recettes de privatisations avaient été de 10 milliards d'euros en 2005, ce qui correspondait essentiellement au débouclage de l'opération France Telecom/ERAP (4 milliards d'euros), à GDF (2,4 milliards d'euros), à France Telecom (1,8 milliard d'euros), à SNECMA/Sagem (1 milliard d'euros) et à Bull (0,5 milliard d'euros). Il a considéré que si ces sommes avaient servi à des opérations de capitalisation ou de recapitalisation, celles-ci avaient concerné, pour 7 milliards d'euros, des organismes chargés de réaliser des dépenses d'avenir, structurantes : Agence de financement des infrastructures de transport de France (4 milliards d'euros), Agence de l'innovation industrielle (1,7 milliard d'euros) et Agence Nationale de la Recherche (1,3 milliard d'euros). Il a considéré que l'annonce, pour 2006, de l'affectation de l'intégralité du produit escompté de 10 milliards d'euros au désendettement de l'Etat était une novation à caractère « vertueux », dans la mesure où, jusqu'alors, les recettes de privatisation avaient très largement été utilisées pour la recapitalisation des entreprises publiques. A cet égard, il a relevé que le récent rapport de M. Michel Pébereau sur la dette publique évaluait les recettes des opérations de privatisation entre 1986 et 2004 à 83 milliards d'euros, dont seuls 14 %, soit 12 milliards d'euros, avaient été affectés directement au désendettement de l'Etat.

Il a indiqué que l'Etat avait respecté en 2005 la norme de dépenses du « zéro volume », ce qui, selon lui, n'allait pas de soi, et que les comptes spéciaux du Trésor avaient amélioré le solde de 1,1 milliard d'euros par rapport à la prévision de la loi de finances initiale, essentiellement en raison du compte d'avances aux collectivités territoriales.

Evoquant son entrevue, le 23 février 2006, avec M. Pierre-Mathieu Duhamel, alors directeur du budget, il a indiqué que 2,1 milliards d'euros de dépenses non prévues par la loi de finances rectificative pour 2005 donneraient lieu à des ouvertures de crédits en loi de règlement, dont 1 milliard d'euros de remboursements et dégrèvements. Les 1,1 milliard d'euros restants concernaient principalement des dépenses évaluatives telles que les charges sociales, les frais de justice, les pensions, l'Agence française de développement, les garanties et la dette négociable. Il a ajouté que plus de 800 millions d'euros de crédits limitatifs, qui n'avaient pu être consommés lors des derniers jours de l'année 2005, avaient été ouverts sur la période complémentaire, correspondant notamment à la prime de Noël des allocataires du RMI (286 millions d'euros) et à des aides personnelles au logement (155 millions d'euros). Ces 2,1 milliards d'euros de dépenses seraient toutefois compensées par des annulations de crédit en loi de règlement.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a considéré que la LOLF avait un double effet vertueux sur les reports : d'une part, le plafond de 3 % limitait fortement le volant des crédits reportables, de seulement 5,4 milliards d'euros en 2006 (pour des reports de 9,7 milliards d'euros en 2005) ; d'autre part, le réexamen de l'opportunité de la dépense permettait d'accentuer davantage la pression sur les reports de crédits. Il a ainsi indiqué que 200 millions d'euros de reports de crédits, dans le cadre du plafond de 5,4 milliards d'euros, avaient été annulés. Il a déclaré que les reports 2006 s'établissaient donc à 5,2 milliards d'euros, ce qui constituait un minimum « historique » et une diminution de moitié par rapport au montant des reports sur 2005, et qu'à ce titre, il adressait un « satisfecit » aux auteurs de la LOLF comme au gouvernement. Il a considéré que l' « épée de Damoclès » des reports sur la gestion de l'exercice en cours s'effaçait donc quelque peu.

Il a jugé que cette diminution des reports était positive pour les gestionnaires, du fait de la diminution de mises en réserve de crédits. Il a indiqué que la mise en réserve prévue pour 2006 était ainsi de 5,1 milliards d'euros en crédits de paiements, contre 7,4 milliards d'euros en 2005 (9,7 milliards d'euros de reports issus de la gestion précédente) et 6,6 milliards d'euros en 2004  (9,0 milliards d'euros de reports issus de la gestion précédente). Il a précisé qu'aucune autre mesure de régulation n'était prévue à ce stade.

Il a cependant considéré qu'il y avait une tension sur la dépense, les constatations de l'Agence France Trésor sur l'évolution récente des taux courts, sans préjuger de l'évolution à venir en cours d'année 2006, conduisant à réévaluer à la hausse la prévision relative à la charge de la dette de l'Etat, pour 450 millions d'euros.

Il a indiqué qu'en 2005 le déficit public avait été de 2,9 points de PIB, conformément aux données du programme de stabilité, et la dette publique de 66,8 points de PIB. Il a considéré que, malgré l'amélioration du solde public, la situation demeurait alarmante, la dette publique étant durablement établie au-dessus des 60 % du PIB, et la dépense publique poursuivant sa croissance (54 % du PIB en 2005, contre 53,3 % en 2004), de même que les prélèvements obligatoires (44,1 % du PIB en 2005, contre 43,1 % du PIB en 2004).

Il a précisé qu'en mars 2006, Eurostat avait modifié le mode d'enregistrement des dépenses militaires d'équipement, ce dont avait résulté, en 2005, une amélioration du solde public de 0,1 point de PIB. Il a, par ailleurs, rappelé que la soulte versée par les entreprises électriques et gazières avait contribué à la réduction du déficit à hauteur de 0,4 point de PIB en 2005. Il a également estimé que les conditions dans lesquelles l'organisme Eurostat délibérait étaient critiquables et que son indépendance était perfectible, et qu'il importait donc qu'il devienne une autorité administrative européenne indépendante.

Cet exposé a été suivi d'un large débat.

M. Jean Arthuis, président, a relevé que les Etats membres de l'Union européenne n'avaient pas accordé un droit de contrôle à Eurostat.

En réponse à une question de Mme Nicole Bricq, M. Philippe Marini, rapporteur général, a précisé que la réévaluation, à hauteur de 450 millions d'euros, de la charge de la dette de l'Etat pour 2006, se rapportait à une prévision globale de flux d'endettement de 39,2 milliards d'euros.

M. Maurice Blin a fait part de son vif intérêt pour cette présentation, qui contenait, selon lui, une appréciation objective de la situation, et s'est référé aux recommandations contenues dans le rapport de son collègue Paul Girod sur la gestion de la dette publique. Rappelant que la dette de la France n'était guère plus élevée que celle d'autres partenaires européens, il a souhaité connaître l'affectation de la dette, notamment aux dépenses productives, et la structure de la dette prévalant dans les Etats membres dont le taux d'endettement était supérieur à celui de la France.

M. Yves Fréville a estimé qu'il serait utile de disposer d'une estimation de la dette française selon les concepts britanniques, qui incluaient notamment l'amortissement du capital. Il a considéré qu'une augmentation des dégrèvements accordés par l'Etat contribuait à améliorer le solde du compte d'avances aux collectivités territoriales, et que l'accroissement des reports de crédits militaires s'inscrivait à contre-courant de la tendance des reports sur les dépenses civiles. Revenant sur le rôle d'Eurostat, il a estimé que le débat portait également sur la manière dont ses critères étaient appliqués par les organismes statistiques nationaux.

S'interrogeant sur la stratégie gouvernementale pour le budget de 2007 et les modalités de réduction de la dette publique, M. Serge Dassault a émis le voeu que la commission fasse des propositions de réelles économies budgétaires au gouvernement, portant sur des dispositifs tels que les aides à l'emploi et la réduction du temps de travail, afin que le déficit public puisse à terme disparaître.

M. Jean Arthuis, président, a relevé l'annonce de la création de 50 000 postes d'auxiliaires, dans les établissements scolaires, pour un coût évalué à 75 millions d'euros.

M. Jean-Jacques Jégou a déploré que les données notifiées à Eurostat n'intègrent pas la reprise de la dette du Fonds de financement des prestations sociales agricoles (FIPSA), pour un montant de 2,5 milliards d'euros, ni le déficit de cet organisme pour 2005 et 2006, estimé à respectivement 1,5 et 1,6 milliard d'euros. Il a également rappelé que la dette de Réseau Ferré de France s'élevait à 18 milliards d'euros, et que les intérêts correspondants n'étaient plus remboursés depuis 1994. Considérant l'ampleur des déficits des organismes publics et sociaux, il a estimé nécessaire, dans une optique pédagogique, d'établir la liste exhaustive de la dette de l'ensemble des entités relevant du secteur public. Puis répondant à une observation de M. Jean Arthuis, président, qui se demandait si le rapport sur la dette publique de M. Michel Pébereau n'avait pas déjà fourni cette information, il a considéré que ce rapport n'était pas suffisamment détaillé et que le périmètre retenu n'était pas le plus extensif.

En réponse aux différents intervenants, M. Philippe Marini, rapporteur général, a indiqué que le tableau de financement de l'Etat pour 2006, tel que détaillé dans l'article 66 de la loi de finances initiale pour 2006, exposait un total de ressources et de besoins de financement de 133,4 milliards d'euros. Le besoin de financement comprenait le déficit budgétaire prévisionnel (46,9 milliards d'euros) et l'amortissement de la dette à moyen et long terme (84 milliards d'euros), auxquels avait été ajoutée en cours de discussion budgétaire une somme de 2,5 milliards d'euros au titre du FIPSA, tandis que les ressources incluaient 125 milliards d'euros d'emprunts nets à moyen et long terme, 2,5 milliards d'euros de bons du Trésor à taux fixe et 5,9 milliards d'euros de variations des « comptes de tiers », c'est-à-dire des dépôts des correspondants et du compte du Trésor. Il ressortait, en outre, qu'une partie des dépenses de fonctionnement de l'Etat était financée par emprunt, à hauteur de près de 28 milliards d'euros. Puis, en réponse à une question de M. Maurice Blin, il a précisé que la Commission européenne publiait des situations comparées du besoin de financement des Etats membres. Il a rappelé que la dette publique de la Belgique, en dépit d'efforts importants de réduction, se situait encore autour de 100 % du PIB, et que la dette française était à un niveau nettement inférieur mais poursuivait une dynamique haussière, qui ne pourrait être arrêtée qu'à un niveau de déficit public d'environ 2,5 % du PIB.

Revenant sur les propos de M. Yves Fréville, il a indiqué qu'il allait approfondir la question du compte d'avances aux collectivités territoriales, et que sa critique d'Eurostat ne portait pas sur la décision de cet organisme relative au traitement des dépenses d'investissement militaire, mais plutôt sur son positionnement institutionnel et sur le caractère évolutif de sa doctrine comptable au regard de certaines pratiques d'ingénierie financière publique, telles que les opérations de titrisation de l'Etat italien. Il a, à cet égard, établi un parallèle avec les nouvelles normes comptables internationales des entreprises, dont l'impact économique avait été sous-estimé et qui étaient élaborées par un organisme dont les autorités politiques européennes s'étaient désintéressées.

M. Jean Arthuis, président, a confirmé que la régulation comptable internationale échappait totalement à la puissance publique.

M. Yves Fréville a souhaité que la commission des finances puisse intervenir auprès du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, pour que le compte d'avances aux collectivités territoriales fasse apparaître le détail des dégrèvements accordés par l'Etat.

Après que M. Jean-Jacques Jégou eût estimé que le gouvernement aurait dû entreprendre, dès 2002, une action plus vigoureuse de redressement des finances publiques, et que M. Serge Dassault se fut demandé s'il serait vraiment possible de « redresser la barre », compte tenu des promesses qui ne manqueraient pas d'advenir au cours de la campagne électorale de 2007, M. Philippe Marini, rapporteur général, a rappelé qu'il avait été l'un des seuls à proposer, lors de la discussion de la proposition de loi qui allait devenir la LOLF, que le budget de l'Etat se dote à terme de la « règle d'or », consistant à ce que l'emprunt public ne finance que des dépenses d'investissement.

M. Jean Arthuis, président, a relevé que la situation n'avait, à cet égard, guère changé depuis 1996, et que la limitation du déficit public était aujourd'hui largement tributaire de l' « ingéniosité » financière, via des opérations telles que la soulte gazière ou l'anticipation du versement de l'acompte d'impôt sur les sociétés, qui ne pourraient pas être renouvelées à l'avenir. Il a proposé, en conséquence, que la communication du rapporteur général, eu égard à son intérêt, fasse l'objet d'un rapport d'information distinct de celui portant sur la loi de règlement pour 2005.

La commission a approuvé ce principe après que M. Philippe Marini, rapporteur général, eût estimé qu'il importait de ne pas laisser entendre que la relative embellie économique actuelle permettait de dégager de nouvelles marges de manoeuvre budgétaires.

La commission a ensuite donné acte de sa communication et décidé d'en autoriser la publication sous la forme d'un rapport d'information.

Loi de finances - Programme de stabilité 2007-2009 - Communication

Puis la commission a entendu une communication de M. Philippe Marini, rapporteur général, sur le programme de stabilité 2007-2009.

Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Philippe Marini, rapporteur général, a indiqué que, dans son scénario prévoyant une croissance du PIB de 2,25 %, le plus réaliste, le programme de stabilité 2007-2009 retenait un objectif de solde public de - 1 point de PIB en 2009 et de 0 point de PIB en 2010. Il a rappelé que la programmation pluriannuelle des finances publiques annexée au projet de loi de finances pour 2006 prévoyait un solde public de - 1,4 point de PIB en 2009. Il a expliqué que cet écart s'expliquait par la volonté de prendre en compte les préconisations du récent « rapport Pébereau » (rapport de la commission présidée par M. Michel Pébereau intitulé « Rompre avec les facilités de la dette publique »), remis au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en décembre 2005). Au total, il a jugé peu réaliste le programme de stabilité 2007-2009, considérant qu'il ne faisait que décaler, une fois de plus, la trajectoire d'ajustement. Il a estimé que si la règle dite du « zéro valeur » était effectivement appliquée aux dépenses de l'Etat à partir de 2007, et si les dépenses des autres administrations publiques continuaient d'augmenter d'environ 3 % par an en volume, l'objectif de solde public de - 1 point de PIB ne serait atteint qu'en 2013.

M. Jean Arthuis, président, a également jugé que le scénario retenu par le programme de stabilité 2007-2009 n'était guère crédible. Il a déploré que le supplément de réduction du déficit par rapport à la programmation annexée au projet de loi de finances pour 2006 provienne d'une hypothèse de solde des collectivités territoriales en 2009 de + 0,4 point de PIB, et non plus de 0 point de PIB. Il a considéré que cette hypothèse n'était pas réaliste. Il a souligné, par ailleurs, qu'elle ne correspondait pas aux préconisations du rapport Pébereau.

MM. Philippe Marini, rapporteur général, et Jean-Jacques Jégou, ont considéré que le programme de stabilité 2007-2009, tout comme les programmes de stabilité précédents, relevaient d'une certaine forme de « volontarisme politique ».

La commission a ensuite donné acte au rapporteur général de sa communication et a décidé d'en autoriser la publication sous la forme d'un rapport d'information.