Mercredi 26 mars 2008

- Présidence de M. Jacques Legendre, vice-président. -

Musées - Inaliénabilité des collections - Audition de M. Jacques Rigaud, conseiller d'Etat honoraire

Au cours d'une première réunion tenue dans la matinée, la commission a procédé, tout d'abord, à l'audition de M. Jacques Rigaud, conseiller d'Etat honoraire, sur son rapport « Réflexion sur la possibilité pour les opérateurs publics d'aliéner des oeuvres de leurs collections ».

M. Jacques Legendre, président, a rappelé que la ministre de la culture et de la communication avait confié à M. Jacques Rigaud, en octobre 2007, une mission destinée à réfléchir à « la question de la « respiration » des collections publiques », dans le but d'en augmenter la richesse d'ensemble, comme l'y invitaient le Président de la République et le Premier ministre dans la lettre de mission adressée le 1er août 2007.

M. Jacques Rigaud a souligné, au préalable, combien les travaux du Sénat et de sa commission des affaires culturelles lui avaient été précieux dans la réflexion qu'il a été chargé de conduire sur la délicate question de l'éventuelle aliénabilité des oeuvres des collections publiques. Il a salué, notamment, M. Philippe Richert pour la qualité des travaux préparatoires à l'adoption de la loi du 4 janvier 2002 relative aux musées de France, dont il était le rapporteur. En effet, tout en réaffirmant le caractère imprescriptible et inaliénable des collections publiques explicitement reconnu par cette loi, le Sénat avait contribué à approfondir le débat, en instituant une possibilité de déclassement de certaines oeuvres, sous la responsabilité d'une commission scientifique nationale.

Il a indiqué que la réflexion sur la possibilité pour les opérateurs publics d'aliéner des oeuvres de leurs collections, souhaitée par le Président de la République et le Premier ministre, avait été relancée, notamment, par le rapport sur « L'économie de l'immatériel », remis en novembre 2006 par la commission présidée par MM. Maurice Lévy et Jean-Pierre Jouyet. Cette commission s'est intéressée aux collections des musées à travers l'exploitation, par les établissements, de leur « marque commerciale ». Ses recommandations ont été reprises par le député Jean-François Mancel, dans une proposition de loi déposée en octobre 2007, tendant à distinguer deux catégories d'oeuvres :

- les trésors nationaux, inaliénables,

- et les autres oeuvres, dites « libres d'utilisation », pouvant être vendues.

Observant que l'établissement d'une telle distinction représenterait un travail colossal, M. Jacques Rigaud a considéré, en outre, que cela reviendrait à ignorer l'histoire de nos musées et leur mission de service public. Les personnalités consultées pour la préparation de son rapport, et en particulier les artistes vivants, ont exprimé, de façon quasi unanime, la nécessité de préserver le principe d'inaliénabilité des collections publiques.

Il a souhaité, en revanche, que la procédure de déclassement prévue par le législateur puisse être expérimentée. Sa mise en oeuvre s'est heurtée, jusqu'à présent, à la crainte des professionnels du monde des musées d'ouvrir cette voie, traduisant une certaine crise de confiance à l'égard de l'Etat. En effet, la commission scientifique nationale instituée par la loi s'est déjà réunie sur des questions de restauration ou d'acquisition, mais elle n'a jamais eu à statuer sur des problèmes de déclassement et n'a pas défini de critères permettant d'encadrer cette possibilité. M. Jacques Rigaud a indiqué que le ministère de la culture et de la communication envisageait d'élargir la composition de cette commission.

Il a invité les conservateurs, par ailleurs, à une gestion plus transparente et plus dynamique des réserves des musées, afin de mettre davantage en avant leur intérêt et leur rôle fondamental pour la recherche, la connaissance scientifique, l'étude historique ou pour l'organisation d'expositions temporaires.

Il a évoqué, en outre, le Fonds national d'art contemporain (FNAC), dont les oeuvres ne constituent pas des collections publiques au sens de la loi de 2002, mais qui pourraient néanmoins se voir étendre la possibilité de transfert de propriété entre musées reconnue par cette loi.

Il s'est interrogé, enfin, sur la nécessité de clarifier la situation des Fonds régionaux d'art contemporain (FRAC), alors que, sans être des musées, certains ont mis en place des lieux d'exposition qui les apparentent, de fait, à des centres d'art.

A l'issue de cette intervention, M. Philippe Richert a remercié M. Jacques Rigaud pour l'appréciation portée sur les travaux du Sénat, aussi bien dans le cadre de l'examen de la loi sur les musées de France que de la mission d'information sur la gestion des réserves des musées, présidée par M. Philippe Nachbar et dont il était le rapporteur. Il a souligné que les analyses et conclusions sont très proches, insistant sur les précautions devant encadrer le recours à la procédure de déclassement.

Nomination de rapporteurs

Au cours de la même réunion, la commission a procédé à la désignation de rapporteurs sur les textes suivants :

- sur la proposition de loi n° 187 (2007-2008) tendant à prendre en compte le temps de parole du Président de la République dans les médias audiovisuels, elle a désigné M. Jacques Valade ;

- sur la proposition de loi n° 215 (2007-2008) visant à autoriser la restitution par la France des têtes maories, elle a désigné M. Philippe Richert ;

- sur le projet de loi n° 226 (2007-2008) ratifiant l'ordonnance n° 2007-1389 du 27 septembre 2007 relative aux contrôles, au constat des infractions et aux sanctions en matière de lutte contre le dopage et de protection de la santé des sportifs en Nouvelle-Calédonie, elle a désigné M. Alain Dufaut.

Mission d'information en Inde - Désignation des membres

Enfin, la commission a désigné les membres de la mission d'information qui se rendra en Inde du 19 au 27 avril 2008.

Ont été désignés : MM. Jacques Valade, président, Jacques Legendre, Serge Lagauche, Jean-Léonce Dupont, Yves Dauge, Alain Dufaut, Jean-François Humbert, Pierre Martin et Michel Thiollière.

Présidence de M. Jacques Valade, président. -

Enseignement scolaire - Programmes de l'école primaire - Audition de M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'audition de M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation, sur les projets de nouveaux programmes de l'école primaire.

M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale, a tout d'abord replacé la réécriture des programmes de l'école primaire dans le contexte de la prise de conscience récente des difficultés persistantes que rencontrent 15 % des élèves français dès la fin de la scolarité élémentaire. Les évaluations nationales et internationales concordent sur ce point et ce constat impose de définir un nouvel horizon pour l'école primaire, première étape et condition indispensable de toute scolarité réussie.

Cela est d'autant plus indispensable que les enfants issus de milieux modestes sont largement surreprésentés parmi les élèves en difficulté à la fin de la deuxième année de cours moyen (CM2). Surmonter les inégalités sociales, telles qu'elles se manifestent dès l'école primaire, suppose donc un effort particulier. Pour ce faire, le ministère de l'éducation nationale s'est donné deux objectifs chiffrés : diviser par trois le nombre d'élèves en situation d'échec lourd et réduire de moitié le taux de redoublement.

M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale, a ensuite abordé la question de l'organisation du temps scolaire, premier axe de la réforme de l'école primaire. Dès la rentrée prochaine, les cours du samedi matin seront supprimés et les deux heures ainsi libérées seront réinvesties sous forme d'aide personnalisée aux élèves en difficulté ou de travail en petit groupe. De plus, les élèves de cours moyen qui rencontreraient des difficultés malgré ce soutien individualisé et l'accompagnement éducatif mis en place à partir de septembre prochain se verront proposer des stages de remise à niveau gratuits pendant les vacances scolaires. D'une durée d'une semaine, ils seront proposés aux élèves dès les prochaines vacances de printemps.

Deuxième axe de la réforme, la mise en place d'un nouveau système d'évaluation permettra de disposer chaque année de données fiables sur les performances des élèves de première année de cours élémentaire (CE1) et de CM2. Les familles pourront ainsi connaître les résultats de leurs enfants et la Nation pourra apprécier ceux de son système scolaire.

Troisième pilier de la rénovation de l'école primaire, la réécriture des programmes, désormais rédigés dans un style clair, concis et compréhensible par tous, vise à recentrer l'école sur les enseignements essentiels. Cinq changements majeurs peuvent ainsi être identifiés :

- s'agissant de l'école maternelle, sa finalité est de préparer les élèves à l'apprentissage de la lecture, de l'écriture et du calcul tout en conservant sa singularité propre. L'accent est désormais mis sur l'apprentissage du vocabulaire, chaque élève devant se constituer progressivement un stock de mots ;

- les programmes sont désormais plus précis, puisqu'un horaire unique clairement identifié est défini pour chaque discipline en lieu et place des intervalles prévus par les anciens programmes. Dix heures seront désormais consacrées au français en cycle 2 et huit heures en cycle 3, alors que jusqu'ici, les programmes prévoyaient entre six et huit heures pour le cycle 3. De même, l'horaire d'éducation physique et sportive est renforcé et passe de trois à quatre heures par semaine ;

- les programmes disciplinaires renouent également avec l'ambition, notamment en français et en mathématiques. L'enseignement de la grammaire, en lieu et place de l'observation raisonnée de la langue, ainsi que l'apprentissage du vocabulaire et de l'orthographe sont désormais mentionnés de manière explicite. La récitation et la rédaction sont également remises à l'honneur. De même, en mathématiques, les quatre opérations devront être parfaitement maîtrisées avant l'entrée au collège et la pratique quotidienne du calcul mental sera encouragée. L'histoire, quant à elle, fera l'objet d'un véritable enseignement destiné à ancrer fermement dans l'esprit de chaque élève un cadre chronologique bien défini via l'apprentissage des grandes dates et la découverte des grands personnages. Par ailleurs, les nouveaux programmes font également référence à la question de la traite des Noirs et de l'esclavage, ainsi qu'à l'extermination des Juifs et des Tsiganes par les nazis ;

- afin d'assurer l'ouverture des élèves à d'autres formes de connaissances, une initiation à l'histoire des arts est introduite dès le cours préparatoire et bénéficie d'un programme précis dès la deuxième année du cours élémentaire, en lien avec l'étude des six périodes chronologiques étudiées en histoire. Vingt heures au moins y seront consacrées chaque année ;

- l'éducation civique est remplacée par un enseignement d'instruction civique et morale, qui permettra aux élèves de découvrir progressivement les valeurs, les principes et les règles qui régissent la vie sociale. Il inclut la connaissance des symboles de la République française et, pour la première fois, des symboles de l'Union européenne. Enfin, les élèves découvriront par ce biais les traits constitutifs de la Nation française, du projet européen et de la francophonie.

M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale, a ensuite rappelé que ces programmes étaient soumis à la consultation des enseignants, mais également à celle du public et en particulier des familles, témoignant ainsi de son souci d'associer à leur élaboration la Nation tout entière, dont ils conditionnent l'avenir.

C'est pourquoi ces programmes sont soumis pour la première fois à l'avis de la commission des affaires culturelles du Sénat ainsi qu'à celui de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale. Sur un sujet aussi crucial, il était en effet naturel et nécessaire d'associer le Parlement.

Un large débat a suivi l'intervention du ministre.

Après avoir remercié M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale, de la clarté et de l'intérêt de sa présentation, M. Jacques Valade, président, s'est réjoui de voir la commission saisie des programmes du primaire et a indiqué que M. Philippe Richert, rapporteur pour avis de la mission « Enseignement scolaire », avait été chargé de se pencher plus particulièrement sur la question et de présenter à la commission dans les semaines à venir une communication orale à ce sujet.

M. Philippe Richert, rapporteur pour avis de la mission « Enseignement scolaire », a tout d'abord rappelé la nécessité de réviser les programmes du primaire pour tenir compte du socle commun de connaissances et de compétences défini par la loi n° 2005-380 du 23 avril 2005 d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école. Début 2007, les programmes du primaire avaient d'ores et déjà été complétés à cet effet, mais cette modification apparaissait encore insuffisante. En ce sens, la présentation de nouveaux programmes du primaire apparaît logique, nécessaire et bienvenue.

Il a ensuite attiré l'attention du ministre sur le risque de voir les deux heures du samedi matin disparaître progressivement des obligations de service des enseignants, ce qui serait peu acceptable à un moment où la vigilance budgétaire est de mise. Ainsi, sur les 72 heures annuelles libérées par la suppression des cours le samedi, 12 sont d'ores et déjà affectées à des tâches de concertation et de formation ainsi qu'aux relations avec les parents. Le soutien personnalisé apporté aux élèves en difficulté mobilisera donc seulement 60 heures. Dans ces conditions, il conviendrait de s'assurer que celles-ci soient utilisées conformément à leur objet.

Il s'est également interrogé sur l'articulation entre la maternelle et l'école primaire, telle qu'elle résulte des projets de programme. Ceux-ci semblent faire commencer le cycle des apprentissages fondamentaux au cours préparatoire, alors que jusqu'ici la grande section de maternelle était tout à la fois la dernière classe du cycle des apprentissages premiers et la première étape du cycle des apprentissages fondamentaux. Cette nouvelle organisation, si elle se confirme, devrait être transcrite dans les textes règlementaires. Elle offrirait également l'occasion de rebaptiser les différentes classes de l'école primaire afin de mettre en conformité leur dénomination avec leur nature, ce qui aurait dû être fait depuis déjà près de 20 ans.

Abordant alors la question du contenu des programmes, il a par ailleurs souligné la réduction de la place accordée aux enseignements autres que le français et les mathématiques. Le recentrage sur les fondamentaux est sans aucun doute une nécessité, mais il serait bon qu'il ne conduise pas à un effacement par trop marqué des sciences et de l'histoire. Par ailleurs, la progressivité des apprentissages devrait également prévaloir dans ces matières : ainsi la nécessaire protection de la biodiversité serait-elle sans doute mieux comprise si elle pouvait s'appuyer sur la découverte approfondie d'un certain nombre d'espèces animales et végétales.

Dès lors, la publication de la grille horaire des enseignements devrait être l'occasion d'accorder un temps significatif aux autres matières que le français et les mathématiques. De ce point de vue, il est possible de s'interroger sur le doublement des heures d'éducation physique et sportive à l'école primaire. Inciter les élèves à adopter des modes de vie moins sédentaires est une nécessité, mais il n'est peut-être pas besoin pour ce faire de retirer deux heures de plus aux autres enseignements disciplinaires.

Après avoir rappelé la constitution d'un groupe de travail au sein de la commission sur la scolarisation des enfants de moins de 3 ans, Mme Monique Papon est revenue sur la question de la maternelle. Faisant référence à la formule de M. Alain Bentolila, qui considère que la maternelle est « une école à part entière » et non pas une « école entièrement à part », elle s'est interrogée sur la transformation progressive de l'école maternelle en un véritable lieu de préapprentissage et a souhaité que les professeurs des écoles qui sont affectés dans ces classes aient reçu auparavant une formation adaptée.

Exprimant sa satisfaction de voir les nouveaux programmes revenir à des principes d'enseignement qui ont fait leur preuve, M. Pierre Martin a ensuite indiqué que les maires, et notamment ceux des petites communes, étaient nombreux à s'interroger sur l'avenir de toutes les formes d'aménagement du rythme scolaire (ARS) après la suppression du samedi matin.

Revenant sur la série de mesures annoncées par le ministère de l'éducation nationale, Mme Brigitte Gonthier-Maurin a fait état du sentiment d'inquiétude et du scepticisme qu'elle éprouve à leur sujet, dès lors que ces réformes ne semblent pas guidées par un fil conducteur clair et ne procèdent en rien d'une analyse scientifique et objective de la situation de l'enseignement scolaire en France. Les chercheurs en sciences de l'éducation sont pourtant nombreux. Ils n'ont pourtant pas été consultés au sujet de la réécriture des programmes du primaire, alors même qu'ils auraient pu porter un jugement pondéré et informé sur leurs résultats. Dans ces conditions, et compte tenu des contraintes budgétaires qui pèsent sur l'école, il est difficile de croire au succès du plan pour l'école primaire annoncé depuis peu, d'autant plus qu'il fait la part belle aux méthodes anciennes et délaisse complètement la posture d'appropriation réfléchie qui seule préside à de vrais apprentissages. De plus, si les deux heures désormais consacrées à l'accompagnement des élèves en difficulté permettront sans doute de vrais progrès dans les écoles où ils sont peu nombreux, elles seront largement insuffisantes dans les établissements où l'échec scolaire est important. De nouvelles inégalités naîtront donc.

M. Yannick Bodin s'est tout d'abord interrogé sur la nature des programmes qui seront soumis à l'avis de la commission, puisque ceux-ci ont vocation à être amendés après la consultation des enseignants et du grand public actuellement en cours.

Il a ensuite souligné que l'école devait être son propre recours et qu'à ce titre, le développement de nouvelles formes de soutien était un élément très positif, même si un risque existe que les modalités retenues par le ministère ne conduisent à stigmatiser les élèves qui auront à suivre des heures d'enseignement supplémentaires. Dans ces conditions, il ne saurait être possible de préjuger du résultat de la réforme.

Il a également indiqué que le recentrage des programmes sur les fondamentaux se traduisait plutôt par leur alourdissement que par leur allégement. De ce point de vue, il serait bon de les élaborer sans chercher à étendre à tous les élèves les méthodes qui prévalaient pour la poignée d'élèves qui se destinaient à passer l'examen d'entrée en sixième. Les souvenirs ne doivent pas faire oublier ce qu'était la pratique.

Il a par ailleurs signalé le risque de voir s'évaporer les deux heures du samedi matin, de la même manière que les trois heures de cours du samedi après-midi n'ont finalement jamais été utilisées comme elles devaient l'être lorsqu'elles ont été supprimées, les enseignants n'ayant pas effectivement assuré les missions qui leur avaient été confiées à cette occasion.

Revenant sur le doublement des heures consacrées à l'éducation physique et sportive, il a déclaré que celles-ci jouaient le plus souvent le rôle de variable d'ajustement et qu'à l'avenir elles seraient sans doute encore destinées à remplir le même rôle.

Il en a en outre exprimé son étonnement devant l'absence de publication d'une grille des horaires d'enseignement, alors même que les projets de programme ont été rendus publics il y a plusieurs semaines déjà. Compte tenu des annonces qui ont déjà été faites, il semble évident qu'il sera extrêmement difficile de consacrer plus d'une poignée d'heures par semaine à tous les enseignements qui ouvrent sur le monde. Cela est regrettable.

Enfin il a déploré que de programmes en programmes se poursuive un mouvement de balancier dont les excès sont préjudiciables aux élèves. En 2002, ils donnaient sans doute une trop grande part aux différentes formes d'ouverture et à l'activité. En 2008, le projet actuellement débattu revient de manière excessive aux enseignements fondamentaux et à des méthodes mécanistes. Il serait bon de parvenir enfin à une forme d'équilibre.

Evoquant la question de l'histoire des arts, M. Ivan Renar a exprimé ses réserves quant à une conception de cet enseignement qui ne relierait pas systématiquement les oeuvres au contexte politique et social qui leur a donné naissance. C'est en effet la première des conditions pour que les élèves s'approprient non pas seulement les créations artistiques, mais aussi leur histoire, qui à leurs yeux ne serait alors plus abstraite, mais bien vivante.

M. Serge Lagauche a ensuite souhaité savoir quel était l'état d'avancement des réflexions sur la création d'une véritable direction dans les écoles primaires, sans laquelle il ne saurait y avoir ni équipe enseignante, ni harmonisation entre les enseignements dispensés par les différents maîtres. Par ailleurs, il serait nécessaire de s'interroger sur la mobilité des professeurs des écoles, car lorsque l'un d'entre eux exerce depuis vingt ans les mêmes fonctions dans la même classe, il devient très difficile de l'amener à abandonner des habitudes bien ancrées pour mettre en oeuvre un vrai projet d'établissement.

Mme Marie-Christine Blandin a enfin souhaité que les nouveaux programmes fassent une place à l'idée d'une approche sensible de la nature, afin de donner corps aux ambitions du Grenelle de l'environnement.

En réponse à ces interrogations, M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale, a apporté les précisions suivantes :

- parmi les 72 heures libérées par la suppression du samedi matin, seules 60 seront effectivement consacrées à la prise en charge des élèves en difficulté. Les 12 heures restantes permettront aux enseignants de se former, de se concerter et d'entretenir de nouvelles relations avec les familles, chacune de ces activités étant nécessaire pour assurer le succès de la nouvelle manière d'accompagner les élèves qui est au coeur de la réforme du rythme scolaire ;

- les cycles demeurent et leurs bornes ne sont pas modifiées. Toutefois, il a paru utile d'organiser des étapes plus nettes au sein de ces cycles, en prévoyant une progression par classe ;

- l'apprentissage de la langue maternelle est la condition même de tous les autres enseignements. C'est pourquoi la place prépondérante qui est faite au français ne met pas en péril les autres disciplines, mais leur garantit l'assise sans laquelle elles ne sauraient véritablement être apprises ;

- il est impossible de s'attacher à la question de la maternelle sans prendre au sérieux les besoins différents des élèves selon les niveaux. Les petites et moyennes sections sont des classes où les jeunes écoliers ont des besoins particuliers qui doivent être satisfaits. A partir de la grande section, les élèves commencent à entrer dans un âge scolaire. Les programmes doivent tenir compte de cette réalité et permettre à chaque enfant d'apprendre à entrer en rapport à autrui, à discipliner son travail et à se préparer à l'apprentissage de la lecture et de l'écriture. Sans doute tout cela suppose-t-il une formation particulière pour les enseignants et cela sera donc pris en compte à l'occasion de la réforme des concours de la fonction publique qui s'annonce ;

- les collectivités qui pratiquent l'ARS pourront continuer à le faire, le ministère de l'éducation nationale étant prêt à les y aider en ayant recours aux heures supplémentaires prévues par la loi de finances pour 2008 ;

- l'ensemble des chantiers ouverts dans l'éducation nationale depuis quelques mois forme un ensemble cohérent. Il y a bien une unité globale de la question scolaire qui suppose de travailler à la fois sur les programmes de maternelle et sur l'organisation du lycée. Au demeurant, l'ensemble des études publiées par les experts tant nationaux qu'internationaux démontre que notre école doit être réformée dans son ensemble. S'agissant en particulier du primaire, il paraît difficile de se satisfaire des résultats de l'enquête du Programme international de recherche en lecture scolaire (PIRLS), qui classe la France parmi les 5 pays dont les performances sont les moins bonnes, alors même que de tous les pays concernés, la France est celui où la scolarité commence le plus tôt, où les élèves ont 20 % d'heures de cours de plus en moyenne que leurs camarades étrangers et où le taux d'encadrement est le meilleur. Dans ces conditions, il apparaît évidemment nécessaire d' agir et de le faire globalement ;

- l'école primaire échoue pour l'heure à atténuer l'effet des déterminants sociaux sur la réussite scolaire. Il est impératif d'y parvenir et c'est la raison même pour laquelle une réforme d'ensemble de cette étape de la scolarité va s'engager. Sans doute les deux heures consacrées à l'accompagnement des élèves ne seront-elles pas suffisantes partout, mais elles marquent un véritable effort et une vraie prise de conscience de la nécessité d'aider les élèves les plus en difficulté à progresser ;

- les résultats de la consultation des enseignants et de l'opinion publique feront l'objet d'une synthèse qui sera publiée sur le site Internet du ministère de l'éducation nationale. Les programmes seront amendés en conséquence ;

- le ministère de l'éducation nationale n'a jamais pris à son compte les critiques qui ont été adressées aux programmes de 2002, dont les qualités étaient évidentes. Toutefois, six ans après leur entrée en vigueur, tout démontre qu'ils n'ont pas permis de résoudre la question du retard scolaire en fin de CM2. Dans ces conditions, il faut prendre acte des faits et s'efforcer d'apprendre « le temps d'apprendre » à une génération plus habituée à un incessant zapping qu'aux travaux studieux qui font la réussite. Au demeurant, on n'apprend pas à pratiquer un sport en méditant sur le destin du ballon ou à pratiquer les arts en s'interrogeant longuement sur la démarche que l'on va adopter. Il en va de même pour le français et les mathématiques ;

- la grille horaire des enseignements n'a pas été publiée au même moment que les projets de programme afin de tenir compte des résultats des différentes consultations. Des modifications sont possibles, mais il reste légitime de faire un choix entre les enseignements, en donnant la priorité, à l'école primaire, aux matières dont la maîtrise conditionne le succès de tout apprentissage ultérieur ;

- l'histoire des arts et l'histoire de nos sociétés entretiennent sans aucun doute des liens profonds. Les projets de programme en tiennent compte en organisant l'étude de la première selon les mêmes principes que celle de la seconde ;

- l'expérimentation des regroupements d'école sous forme d'établissements publics d'enseignement primaire (EPEP) est en cours. Cette nouvelle structure pourrait réunir toutes les écoles d'une même ville moyenne ainsi que celles de différentes communes en zone rurale en un seul EPEP, doté d'un directeur, d'une vraie structure administrative et offrant un interlocuteur unique aux collectivités territoriales ;

- la nécessité d'une approche sensible de la nature sera inscrite dans les programmes tels qu'ils seront rédigés à l'issue de la concertation.