Mardi 17 février 2009

- Présidence commune de M. Jean Arthuis, président, M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques, et M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales -

Développement économique de l'outre-mer - Audition de M. Yves Jégo, secrétaire d'Etat chargé de l'outre-mer

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission des finances, en commun avec les commissions des lois, des affaires économiques et des affaires sociales, a procédé à l'audition de M. Yves Jégo, secrétaire d'Etat chargé de l'outre-mer, sur le projet de loi n° 496 (2007-2008) pour le développement économique de l'outre-mer.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, s'est félicité de la tenue de cette audition qui, en conséquence du contexte aigu de crise que traversent les territoires ultramarins, a été reportée à deux reprises. Après avoir rappelé que le projet de loi relatif au développement économique de l'outre-mer a été déposé au Sénat le 21 juillet 2008, il a souligné la nécessité de prendre en compte, lors de l'examen du texte, les préoccupations actuellement exprimées par nos concitoyens des collectivités d'outre-mer.

M. Yves Jégo, secrétaire d'Etat chargé de l'outre-mer, a expliqué que le conflit qui agite l'outre-mer depuis plusieurs semaines nécessite, en effet, un « travail de terrain » qui mobilise l'ensemble de ses équipes. Après avoir rappelé que le projet de loi témoigne d'une volonté politique forte de promouvoir un développement économique endogène de l'outre-mer et d'y développer le logement social grâce à la révision de la loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 dite loi « Girardin », il a observé que la crise financière et économique modifie les équilibres qui existaient il y a encore quelques mois. A cet égard, il convient de prendre acte des changements profonds en cours en réadaptant, en temps réel, les outils et les périmètres des dispositifs proposés par le projet de loi.

Il s'est ainsi déclaré favorable à un travail de « co-production » avec le Parlement, et ce d'autant plus que les réponses à apporter restent à préciser, afin que leurs modalités de mise en oeuvre soient pleinement en accord avec l'objectif de soutien des secteurs économiques les plus fragilisés. Il a donné l'exemple de la proposition, plébiscitée initialement, consistant à réduire, quel que soit le domaine d'activité, les charges sociales jusqu'à 1,4 Smic. Elle ne se révèle plus, après examen, pleinement adaptée puisqu'elle reviendrait, par son caractère général, à ne pas soutenir les secteurs qui en ont le plus besoin. Au regard de l'effort financier qui serait consenti s'agissant de la diminution des charges sociales, soit un milliard d'euros, il importe de définir les dispositifs les plus efficients. De même, il a souligné que les mesures qui seront adoptées ne doivent pas conduire à aggraver les taux de chômage de ces collectivités, qui comme le relève une enquête récente d'Eurostat, sont les plus élevés d'Europe. Il a ainsi estimé nécessaire de parvenir à trouver un équilibre entre, d'une part, le jeu social, marqué par les questions de coût de la vie, et d'autre part, le taux d'emploi.

S'agissant du développement du logement social, qui est aussi bien un enjeu de société qu'un enjeu économique, il a indiqué que, au-delà de l'effort financier conséquent qui est opéré sur la ligne budgétaire unique par le projet de loi, d'autres mesures ont été prises telles que le décret n° 2009-100 du 30 janvier 2009 relatif aux subventions et prêts pour la construction, l'acquisition et l'amélioration de logements locatifs aidés dans les départements d'outre-mer et modifiant le code de la construction et de l'habitation. Il a observé qu'en Martinique seulement 400 logements sociaux ont été construits en 2008 alors que les listes d'attente comptent plusieurs milliers de personnes.

S'agissant du soutien au développement économique de l'outre-mer, il a rappelé les deux principales mesures du projet de loi :

- la création de zones franches d'activité, qui permettront à certaines entreprises de bénéficier d'une déduction fiscale à hauteur de 50 % de leur revenu, portée à 80 % pour certains secteurs choisis par chaque collectivité. Le tourisme, les nouvelles technologies ou l'agro-production seraient ainsi des domaines particulièrement soutenus compte tenu de l'intérêt qu'ils représentent ;

- les exonérations de charges sociales, dont les modalités précises de mise en oeuvre restent encore soumises à discussion.

M. Yves Jégo a observé ensuite que la situation économique dans les territoires ultramarins appelle des réponses structurelles qui devront faire l'objet d'un traitement particulier. La création du comité interministériel de l'outre-mer décidée par le Président de la République témoigne de cette volonté. Plusieurs sujets sont propres à ces territoires, tels que l'octroi de mer ou les conséquences contradictoires de l'insularité sur la structuration des économies ultramarines. En effet, l'étroitesse des marchés locaux peut, soit favoriser certaines entreprises par le biais du développement d'une clientèle captive, soit handicaper celles-ci compte tenu du manque de débouchés. En outre, M. Yves Jégo a reconnu que l'Etat n'a peut être pas toujours exercé comme il aurait dû son rôle de contrôle et de garant de la transparence. Le projet de loi ne constitue ainsi que la première étape du changement de modèle économique indispensable pour ces territoires.

Il a indiqué enfin que l'examen tardif du projet de loi par le Parlement, soit sept mois après son dépôt, nécessite de revoir l'entrée en vigueur des dispositifs prévus tout en gardant une démarche pragmatique afin de ne pas porter préjudice aux opérations économiques en cours, telles que les programmes immobiliers.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a rappelé que l'examen du projet de loi relatif au développement économique de l'outre-mer s'inscrit dans le cadre des nouvelles procédures issues de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. Le texte examiné en séance sera ainsi le texte adopté par la commission des finances, saisie au fond, après examen des amendements des rapporteurs et des membres de la commission.

M. Eric Doligé, co-rapporteur au nom de la commission des finances, a souhaité obtenir des précisions sur le plan annoncé lundi 16 février en Guadeloupe, d'un montant de 87,8 millions d'euros. Cette somme n'est pas négligeable au regard du chiffrage actuel du projet de loi qui s'élève à 290 millions. Par ailleurs, compte tenu des observations formulées par M. Martin Hirsch, Haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, Haut commissaire à la jeunesse, lors de son audition par la commission des finances le 6 mai 2008, il s'est interrogé plus particulièrement sur la possibilité de faire entrer en vigueur le revenu social d'activité (RSA) en outre-mer.

En réponse, M. Yves Jégo a rappelé que l'urgence a été déclarée sur le projet de loi. Il a précisé que le plan annoncé fait suite aux réponses du Gouvernement aux 132 revendications des représentants ultramarins. Ce chiffrage, qui compte des dispositifs concernant l'ensemble de l'outre-mer, renvoie aux mesures suivantes :

- l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés non bâties pour les terres agricoles ;

- le soutien à l'investissement dans le cadre du plan de relance ;

- l'aide au fret via une évolution de la TVA, dite « non perçue récupérable » (TVA NPR) ;

- la modernisation du secteur du tourisme ;

- la mise en oeuvre, avant fin 2009, du RSA « chapeau », c'est-à-dire en faveur des personnes, qui même étant employées, ont un niveau de revenu très faible, situation plus fréquente en outre-mer qu'en métropole. Environ 100 000 personnes pourraient être concernées ;

- l'augmentation de la prestation de restauration scolaire, afin de privilégier un approvisionnement, au moins à hauteur de 50 %, en produits locaux ;

- la revalorisation de l'aide au logement.

Ce chiffrage ne comprend toutefois pas l'effort supplémentaire qui pourrait être consenti sur la diminution des charges sociales.

M. Marc Massion, co-rapporteur au nom de la commission des finances, s'est interrogé sur la négociation menée par le Gouvernement, au regard de l'insatisfaction exprimée par les différentes parties. Il s'est demandé également dans quelle mesure le texte n'est pas devenu caduc compte tenu du contexte de crise et des modifications qui sont en cours de discussion. Il a estimé que les conditions d'examen du présent projet de loi contredisent la volonté de revaloriser le Parlement et souhaité que le calendrier soit revu.

En réponse, M. Yves Jégo a affirmé que le texte n'est pas caduc dans la mesure où il permet notamment de soutenir des secteurs économiques privilégiés par les collectivités locales. Le travail de concertation a été mené ; néanmoins, il reste nécessaire de poursuivre les négociations parallèlement à l'examen du texte qui ne saurait être reporté compte tenu de l'acuité de la crise économique et sociale.

Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, a présenté ses observations sur les deux dispositifs principaux contenus dans le projet de loi : la création de zones franches globales d'activités et la réforme de la politique du logement.

Elle a tout d'abord pris acte de ce que le Gouvernement semble favorable à une harmonisation des secteurs prioritaires entre les départements d'outre-mer, mais s'est interrogée sur la décision qu'il prendra au sujet de la date d'application de la modification du système d'exonération de charges patronales, fixée au 1er avril 2009 par la dernière loi de finances. Parmi les zones prioritaires, elle s'est demandé s'il est possible d'inclure les Hauts de la Réunion pour le bénéfice du taux majoré de 80 %. Dans le même esprit, est-il possible d'inclure dans le dispositif et à certaines conditions le petit commerce de détail dans ces zones particulièrement défavorisées ? La Guadeloupe a bien montré depuis quelques semaines combien ce secteur est primordial pour l'activité économique au quotidien.

En ce qui concerne la politique du logement, il apparaît nécessaire de mieux définir la notion de primo-accédant pour ne pas limiter excessivement le bénéfice du dispositif. Par ailleurs, il serait sans doute souhaitable de conserver, au moins pour une certaine durée, le dispositif actuel de défiscalisation, lorsque le propriétaire loue son bien aux conditions de loyer et de ressources d'un logement social.

Enfin, pour bien prendre en compte les effets de la crise économique et financière qui touche encore plus durement des économies fragilisées comme celles d'outre-mer, le Gouvernement devrait envisager de programmer la création des nouveaux dispositifs et la suppression des anciens de manière plus souple et plus étalée dans le temps. Le secteur du bâtiment travaux publics, essentiel à l'activité économique, ne pourra pas s'adapter, en effet, aussi rapidement que le prévoit le projet de loi actuel. Cette période de transition pourrait se révéler catastrophique pour l'économie.

M. Yves Jégo a répondu que le Gouvernement s'est engagé, lors du débat sur le projet de loi de finances, à ce que le nouveau dispositif relatif à l'exonération de charges patronales ne rentre pas en vigueur avant la promulgation de la loi pour le développement économique de l'outre-mer. Par ailleurs, le petit commerce bénéficie d'ores et déjà de mesures d'aide jusqu'à 1,3 Smic. Le Gouvernement accueillera avec bienveillance un amendement qui concernerait l'intégration des Hauts de la Réunion dans la liste des zones particulièrement défavorisées, comme la Guyane et les îles de la Guadeloupe. Le Gouvernement envisage également une période de transition entre l'entrée en vigueur des nouveaux dispositifs et la sortie des anciens ; cette période pourra peut-être être prolongée pour que les chantiers lancés puissent se terminer : l'idée est que tout ce qui est déjà en cours de réalisation doit pouvoir être achevé.

Après s'être réjoui de l'organisation de l'audition commune aux quatre commissions saisies du projet de loi, M. Daniel Marsin, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, a souligné le contexte particulier de l'examen du texte au Sénat. Il a tout d'abord souhaité connaître les marges de manoeuvre du Gouvernement, tant sur le plan financier que pour les ajustements à prévoir.

Après avoir salué la prise en compte par le projet de loi des difficultés des îles du Sud de la Guadeloupe, qui souffrent de la double insularité, il a souhaité que le taux bonifié d'exonération de 80 % puisse être appliqué à l'ensemble des entreprises de ces territoires et a interrogé le ministre sur la possibilité d'étendre à ces îles les dispositions en vigueur en Guyane, notamment en matière de TVA.

Il a ensuite appelé de ses voeux la suppression de la taxe foncière sur les propriétés non bâties au bénéfice des agriculteurs et l'augmentation des seuils prévus par le projet de loi en matière de rénovation hôtelière, tant pour ce qui est du nombre de chambres concernées par opération que du montant de l'aide.

S'agissant des mesures de soutien à la construction de logements, il s'est montré favorable à la suppression de la défiscalisation dans le secteur libre, tout en évoquant la possibilité de décaler l'échéance d'un an. Il s'est inquiété de la situation du logement intermédiaire, dont le rôle est essentiel tant en matière de besoins de logements que pour le secteur du BTP. Il a enfin estimé qu'il pourrait être intéressant d'adapter les plafonds pour la défiscalisation des logements sociaux.

M. Yves Jégo a rappelé que les exonérations de charges avaient représenté, pour les finances publiques, un coût de 1,358 milliard d'euros en 2008 et que l'estimation du nouveau dispositif pour 2009 est de 1,456 milliard d'euros.

Il a annoncé que le gouvernement proposerait l'exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties dans les départements d'outre-mer, une interrogation demeurant sur la possibilité de restreindre cette disposition aux seuls agriculteurs.

Il a indiqué qu'il est ouvert aux propositions d'amendements s'agissant des îles du Sud de la Guadeloupe. Pour ce qui est de l'hôtellerie, il a annoncé une amélioration du dispositif, le Gouvernement souhaitant faire passer le plafond de la subvention de 5 000 à 7 500 euros par chambre, dans la limite des cent premières chambres, quelle que soit la taille de l'hôtel.

Enfin, il a fait observer que l'augmentation du coût du foncier provient en partie de la pression exercée par la défiscalisation, raison pour laquelle le projet de loi exclut pour l'avenir le logement libre du dispositif de défiscalisation pour favoriser en contrepartie le seul logement social.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a relevé que la technique de la défiscalisation, qu'elle s'applique outre-mer ou ailleurs, peut effectivement fausser la concurrence sur le marché.

M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis de la commission des lois, a souligné que le projet de loi a été préparé avant la crise mais qu'il va être examiné par le Parlement pendant celle-ci.

Il a rappelé que la solidarité continue de la métropole en faveur de l'outre-mer a permis, depuis 1946, d'apporter une amélioration substantielle à la qualité de la vie dans ces territoires en termes d'éducation, de santé, de logement et de niveau de vie, mais que la crise économique qui frappe la France a des conséquences encore plus aigües outre-mer compte tenu de l'équilibre instable de son économie.

Il a souhaité que la crise économique actuelle soit l'occasion de cerner les questions réelles qui se posent en matière de développement des économies ultramarines et d'y apporter des réponses efficaces. A défaut, les tensions actuelles en Guadeloupe et dans les autres départements d'outre-mer persisteront.

Il a mis en exergue les abus de position dominante fréquents dans les départements d'outre-mer, citant l'exemple du cartel mis en place sur le prix du kérosène à la Réunion, récemment sanctionné par le conseil de la concurrence. Du fait de ces situations monopolistiques, le coût de la vie outre-mer est plus élevé qu'en métropole alors même que le revenu par habitant y est inférieur.

Il a estimé qu'il est nécessaire d'utiliser les possibilités offertes tant par l'article 73 de la Constitution que par l'article 299-2 du traité instituant la Communauté européenne, qui permettent un traitement différencié des départements d'outre-mer par rapport à la métropole. Il serait opportun que, dans ce cadre, une adaptation des dispositions de l'article L. 410-2 du code de commerce soit apportée à l'occasion de la discussion du projet de loi afin que l'Etat puisse réglementer, dans les départements d'outre-mer, le prix de produits de première nécessité. Seule une mesure de ce type permettrait de mettre fin aux abus résultant de l'existence de monopoles de fait dans ces territoires.

Abordant la question du logement outre-mer, M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis, a souligné que le projet de loi ne prend pas suffisamment en compte la réalité des besoins de financement. Il a indiqué que le financement du logement social outre-mer par le biais d'un financement croisé faisant intervenir à la fois les crédits de la ligne budgétaire unique et les dispositifs de défiscalisation recèle une complexité qui pourra empêcher le montage d'opérations d'envergure.

Il a souhaité que des dispositions soient insérées dans le projet de loi afin de favoriser le financement du logement patrimonial intermédiaire à vocation sociale, qui pourrait être offert à la location à un montant de 7,5 euros par mètre carré.

Il a évoqué la nécessité de favoriser le développement du secteur des énergies renouvelables outre-mer, à commencer notamment par les mécanismes de « co-génération » charbon-bagasse, pour lesquels la Réunion est en pointe.

Il a souligné que la productivité du travail a davantage augmenté outre-mer dans les dernières années qu'en métropole. Il convient désormais de favoriser l'emploi dans les secteurs porteurs, tels que ceux des technologies de la communication et de l'information, des énergies renouvelables et de l'agro-nutrition.

Il a noté que les effets bénéfiques sur l'emploi de l'extension outre-mer du revenu de solidarité active seront limités dans la mesure où ils ne favoriseront pas un grand nombre de créations d'emplois nouveaux. Il a jugé essentiel de favoriser la formation professionnelle, en particulier celle des jeunes, l'effort devant être d'autant plus important compte tenu de l'isolement et de la distance des départements d'outre-mer par rapport à la métropole.

M. Yves Jégo a indiqué que les lois ordinaires qui devront accompagner les lois organiques relatives à la Nouvelle-Calédonie et, le cas échéant, à la départementalisation de Mayotte, qui seront présentées au mois de juillet 2009, seront l'occasion de mettre en place des dispositifs s'attaquant aux problèmes structurels évoqués par M. Jean-Paul Virapoullé.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a suggéré l'ajout au projet de loi d'un titre portant sur le soutien au pouvoir d'achat outre-mer, qui comprendrait des dispositifs adaptant les règles de la concurrence dans ces territoires, en particulier en instituant un mécanisme de contrôle des prix.

M. Yves Jégo s'est dit très favorable à l'insertion de telles mesures, ajoutant qu'il a saisi l'Autorité de la concurrence de deux demandes d'avis concernant les conditions de la concurrence dans les départements d'outre-mer : l'une concernant le prix des carburants, l'autre relative aux produits de consommation courante. Il a ajouté qu'il s'était entretenu avec les services de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes afin de définir une politique de contrôle dans ces départements.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a souligné les effets économiques négatifs induits par la réglementation actuelle de l'octroi de mer qui, s'il constitue une taxe à l'importation participant au financement des collectivités territoriales d'outre-mer, a pour effet de renchérir le prix payé par les consommateurs.

M. Yves Jégo a répondu que la question de l'octroi de mer constitue un problème de nature structurelle et que sa suppression impliquerait de trouver d'autres modes de financement des collectivités ultramarines.

Il a insisté sur le fait que le projet de loi pour le développement économique de l'outre-mer doit permettre d'apporter des réponses destinées à sortir du conflit en cours dans les Antilles et qu'il conviendra d'engager une réflexion plus approfondie sur les problèmes structurels que connaît l'outre-mer.

M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis, a jugé opportun que la commission des finances se saisisse de la question de la réforme de l'octroi de mer, et notamment de son rôle dans la détermination des prix, suggérant l'institution d'une TVA spécialement applicable outre-mer.

M. Yves Jégo a rappelé que l'octroi de mer permet de financer les collectivités ultramarines à hauteur de 900 millions d'euros. Il a estimé qu'une évolution du dispositif pourrait être envisagée, d'autant que la Commission européenne n'a autorisé le maintien de cette taxe que jusqu'en 2014.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, s'est interrogé sur la large habilitation prévue dans le projet de loi pour actualiser et adapter l'organisation juridictionnelle et le statut civil personnel de droit local à Mayotte. Il a souhaité savoir si les ordonnances envisagées auront pour objet de mettre fin aux fonctions juridictionnelles des cadis et de rendre le statut personnel pleinement compatible avec les principes républicains, compte tenu de la démarche vers la départementalisation souhaitée par les élus de Mayotte.

M. Yves Jégo a indiqué que cette habilitation avait été inscrite dans le projet de loi avant même que le calendrier de la consultation référendaire sur l'avenir de Mayotte soit établi. Il a jugé que cette habilitation pourrait offrir le support juridique permettant une mise en oeuvre rapide de la feuille de route présentée par le Gouvernement, dès lors que les Mahorais se seront prononcés positivement sur la départementalisation de leur collectivité. Il a ajouté que, le cas échéant, il ne serait pas opposé à ce que les mesures envisagées soient définies dans un autre support législatif.

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques, a souhaité connaître le délai dans lequel l'Autorité de la concurrence sera amenée à rendre ses avis sur les prix du carburant et les prix à la consommation outre-mer.

M. Yves Jégo a indiqué que ces avis lui seront remis avant l'été, afin de permettre aux services de l'Autorité de la concurrence d'effectuer un examen de la situation locale.

M. Thierry Repentin a formulé trois observations.

Il s'est tout d'abord déclaré satisfait que le ministre ait annoncé que le forfait de charges serait traité de manière uniforme en métropole et outre-mer. M. Yves Jégo a précisé qu'il s'agit du forfait hors chauffage.

Ensuite, M. Thierry Repentin a jugé que l'ouverture de la défiscalisation au logement social ne doit pas remettre en cause, même à long terme, la ligne budgétaire unique (LBU), qui doit rester le socle du financement du logement social outre-mer. Mais la question va se poser de la manière de mobiliser les investisseurs métropolitains sur ce type de produit, dans la mesure où en métropole, ce genre de dispositif n'a jamais rencontré le succès escompté. M. Yves Jégo a alors rappelé l'engagement clair du Gouvernement d'augmenter la LBU dans les prochaines années ; elle passera de 209 millions en 2009 à 229 millions en 2011.

Enfin, M. Thierry Repentin s'est inquiété de l'annonce faite sur le blocage des loyers dans les départements d'outre-mer. La situation du logement social est déjà assez dramatique et de nombreux organismes sont en situation financière tendue, voire en plan de redressement. Dans ce contexte, le blocage des loyers, qui pourrait se propager en métropole, remettrait en cause le fragile équilibre financier des organismes. Sur ce point, M. Yves Jégo a rappelé que le blocage des loyers en Guadeloupe est une annonce volontaire des bailleurs sociaux de ce département. Enfin, la coexistence de la LBU et du mécanisme de défiscalisation doit être conçue de façon très souple : certains programmes ne nécessiteront que l'un des deux soutiens, d'autres les deux.

Mme Gélita Hoarau a évoqué la crise profonde qui touche depuis longtemps les départements d'outre-mer. Le taux de chômage y est plus élevé qu'en métropole, comme le taux d'illettrisme, mais il ne s'agit pas ici de chercher des responsables. La question est en effet de savoir comment sauver collectivement les territoires concernés. Pour cela, il est indispensable de concevoir une rupture et de casser les pratiques habituelles en cours dans ces départements. Par exemple, le coût de la vie souffre naturellement des surprofits des monopoles et de l'éloignement des sources d'approvisionnement ; il est nécessaire d'orienter les échanges vers les voisins les plus proches. Pourquoi ne pas favoriser la création d'une compagnie maritime régionale pour réaliser ce commerce intra zone ? La crise frappe par ailleurs les plus démunis et des mesures urgentes doivent être prises en leur faveur, par exemple en mutualisant les crédits des minima sociaux pour améliorer leur efficacité. Le conseil régional de La Réunion a engagé de nombreuses politiques en ce sens, notamment en matière de développement durable, de grands travaux ou de tourisme. En conclusion, Mme Gélita Hoarau a souhaité savoir si le comité interministériel sur l'outre-mer sera permanent ou temporaire.

M. Yves Jégo a répondu qu'il est disposé à participer à ce travail de fond, particulièrement nécessaire au regard de la situation outre-mer.

Mme Odette Terrade a souligné la nécessité de prendre des mesures exceptionnelles afin de répondre à la crise actuelle. Elle a estimé que cette crise montre les limites de la politique de défiscalisation, peu efficace, voire néfaste en termes d'emploi et d'urbanisme. Elle a donc fait part de son inquiétude quant aux dispositions du projet de loi. Enfin elle a appelé le gouvernement à prendre en compte la dimension culturelle du mouvement en cours aux Antilles et a espéré que les forces de l'ordre ne seront pas amenées à intervenir.

En réponse à Mmes Hoarau et Terrade, M. Yves Jégo a souligné qu'un travail de fond important est en effet nécessaire : il a ainsi estimé que le projet de loi est un texte conjoncturel, des évolutions plus structurelles demeurant par ailleurs nécessaires.

Mme Nicole Bricq a estimé que le Gouvernement a tardé à prendre la mesure de la mobilisation dans les Antilles. Elle a jugé que les conditions de travail des parlementaires sur ce projet de loi sont difficiles du fait des modifications du texte qui devront être présentées par le Gouvernement et de l'application de la nouvelle procédure issue de la réforme constitutionnelle.

Elle a relevé que l'examen de ce projet de loi, qui comprend une réforme du dispositif de défiscalisation, intervient dans un contexte fiscal marqué par le vote par le Parlement en 2008 du plafonnement des niches fiscales.

Elle a souligné que certaines mesures annoncées par le Gouvernement ou demandées par les parlementaires ultramarins ne figurent pas à ce jour dans le texte, et nécessiteront un véritable travail de fond. Elle a enfin souhaité avoir plus d'information sur le « plan B » évoqué dans la presse.

En réponse, M. Yves Jégo a indiqué que le « plan B » consiste à adapter des dispositifs de baisse des charges en faveur des secteurs où ils seront les plus utiles. Il a souligné que le projet de loi n'évoque pas les niches fiscales. Il a par ailleurs rappelé que le texte a été adopté en conseil des ministres le 21 juillet 2008 et que son examen n'est donc pas précipité, les modifications qui pourraient y être introduites en réponse à la crise actuelle n'en altérant pas l'orientation générale.

M. Georges Patient a estimé qu'un report de l'examen du projet de loi est nécessaire au vu de la situation dans les Antilles. Il a rappelé que la Guyane a connu des événements similaires en novembre 2008, indiquant que, trois mois après la signature d'un protocole de sortie de crise, aucune réunion ne s'est encore tenue pour faire le point sur la situation. Il a enfin jugé nécessaire d'assortir le dispositif des zones franches globales de contreparties en matière de retombées salariales.

En réponse, M. Yves Jégo a indiqué que les présidents du conseil général et du conseil régional de la Guadeloupe ont publié un communiqué appelant à examiner en urgence le projet de loi. S'agissant du protocole guyanais, il a annoncé que le rapport sur le prix de l'essence sera remis à la fin du mois et qu'il souhaite travailler en liaison étroite avec les élus sur cette question.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a rappelé le calendrier relatif au projet de loi :

- les amendements des membres de la commission des finances peuvent être déposés jusqu'au 17 février à 16 heures ;

- la commission des finances se réunira pour examiner le rapport de MM. Doligé et Massion et les amendements des commissaires le jeudi 19 février après-midi ;

- les commissions saisies pour avis devraient se réunir le 4 mars au matin pour examiner les rapports des rapporteurs pour avis ;

- les amendements des sénateurs non membres de la commission des finances pourront être déposés jusqu'au 4 mars à midi ;

- la commission des finances se réunira afin de procéder à l'examen des amendements des rapporteurs pour avis et des sénateurs non membres de la commission des finances le 5 mars. Les rapporteurs pour avis seront conviés à cette réunion afin de pouvoir défendre les amendements adoptés par leur commission respective ;

- le texte devrait être discuté en séance à partir du 10 mars.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a indiqué qu'il déposera un amendement visant à introduire un titre relatif au pouvoir d'achat et à la concurrence. Il a espéré par ailleurs que le Gouvernement puisse transmettre ses amendements au plus vite à la commission des finances, afin que le texte issu des travaux de celle-ci soit le plus complet possible.

Crise financière internationale : plan de soutien aux banques - Audition de M. Michel Pébereau, président du conseil d'administration de BNP Paribas

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'audition de M. Michel Pébereau, président du conseil d'administration de BNP Paribas.

M. Jean Arthuis, président, a rappelé que l'audition de M. Michel Pébereau intervient dans le cadre du suivi du plan de soutien aux banques, qui s'est traduit, dans la loi du 16 octobre 2008 de finances rectificative pour le financement de l'économie, par l'adoption d'une garantie globale de l'Etat à hauteur de 360 milliards d'euros.

Présentant les causes de la crise financière actuelle, qu'il a qualifiée d'un genre nouveau, M. Michel Pébereau a tout d'abord insisté sur la responsabilité dans l'ébranlement du système financier international de trois de ses principaux acteurs :

- en premier lieu, les autorités politiques américaines, qui sont en cause dans l'excès de liquidités sur les marchés financiers. Cet excès de liquidités est la conséquence du déficit structurel de la balance des paiements courants des Etats-Unis, dû à l'insuffisance de l'épargne américaine. Il s'est traduit par l'apparition d'une « bulle immobilière » ;

- l'industrie financière, ensuite, dont le manque de professionnalisme et les errements éthiques, de degré variable, ont conduit à une crise de solvabilité et de liquidité et ont affecté la confiance dans les marchés financiers ;

- les régulateurs, enfin, particulièrement les régulateurs américains, qui n'ont pas pleinement assuré leur mission de prévention. La confiance dans les agences de notation a notamment été excessive.

M. Michel Pébereau a indiqué que la crise financière actuelle est également la conséquence d'une conception trop extensive de la notion de marché, dont le danger s'est matérialisé en comptabilité dans le concept de la « juste valeur », qui privilégie une valorisation à court terme des établissements. La crise financière a notamment révélé les limites du principe du « Mark-to-market », selon lequel la valeur de marché d'un produit peut être évaluée en permanence.

M. Michel Pébereau a ensuite rappelé les trois grandes étapes de la crise financière actuelle :

- la crise dite des « subprimes » au mois d'août 2007, qui a provoqué la fermeture de l'ensemble des marchés de produits structurés, suite au constat selon lequel la notation d'un produit n'en garantit pas la valeur ;

- la crise de liquidité et du crédit, ensuite, dite « crise du marché interbancaire », qui est apparue entre l'été 2007 et l'automne 2008 : les investisseurs, qui s'étaient retirés des marchés structurés, se sont également progressivement retirés des marchés interbancaires, menaçant leur équilibre ;

- enfin, la faillite de la banque d'affaires américaine Lehman Brothers en l'absence d'intervention des autorités américaines : les investisseurs se sont retirés de tous les marchés de taux au profit des marchés obligataires, selon le principe du « Fly to quality », les investisseurs ayant davantage confiance dans les signatures des Etats.

M. Michel Pébereau a indiqué qu'un « risque systémique », c'est-à-dire de propagation de la crise à l'ensemble du système financier mondial, était concevable, mais qu'il a pu être évité grâce à l'intervention des Etats qui se sont substitués aux marchés défaillants. Les banques centrales ont joué un rôle important en assurant la liquidité des marchés et en coordonnant leurs interventions. Les Etats, notamment les Etats-Unis, le Royaume-Uni et l'Allemagne, sont, quant à eux, intervenus, pour éviter la faillite de certains de leurs établissements bancaires.

M. Michel Pébereau a insisté sur la spécificité de la situation française, dont les banques ont été moins affectées par la crise financière, celles-ci conservant des comptes d'exploitation bénéficiaires. L'intervention du Gouvernement a donc consisté avant tout à éviter le « credit crunch », à savoir l'impact, sur la sphère économique, des difficultés rencontrées dans le système bancaire. Le plan de relance français a reposé sur deux modalités : d'une part, le renforcement des fonds propres des établissements bancaires, et, d'autre part, leur refinancement en liquidités, en contrepartie notamment d'une augmentation de leurs encours à l'économie réelle.

Rappelant que la Société de prise de participation de l'Etat (SPPE) est sur le point de lancer une seconde tranche de souscription à des actions de préférence ou à des titres super subordonnés (TSS) à hauteur de 10,5 milliards d'euros, assortie d'une option de conversion des TSS précédemment souscrits, M. Jean Arthuis, président, a souhaité savoir si BNP Paribas entend émettre des actions de préférence ou demander la conversion de certains de ses TSS précédemment émis.

M. Michel Pébereau a jugé techniquement rationnel ce dispositif, dans la mesure où il doit permettre un renforcement des fonds propres des établissements bancaires et favoriser le crédit. Bien qu'elles soient plus coûteuses que les TSS proposés dans un premier temps, BNP Paribas devrait, après accord de ses actionnaires, émettre des actions de préférence, voire convertir une partie des TSS émis dans le cadre de la première tranche. Ce type de titres bénéficie en effet d'une meilleure appréciation par les marchés financiers.

En réponse à M. Jean Arthuis, président, M. Michel Pébereau a indiqué que la pratique du rachat d'actions, qui a pu avoir lieu au moment de la fusion entre la Banque nationale de Paris et Paribas et qui consiste pour une entreprise à annuler, en les rachetant, ses propres actions, pour éviter une dilution de son capital, a cessé.

M. Jean Arthuis, président, a souhaité savoir quelle appréciation BNP Paribas porte sur les fonds d'investissement d'acquisition par effet de levier (leveraged buy-out ou LBO), ces opérations ayant été mises en cause dans l'endettement de certaines petites et moyennes entreprises (PME).

M. Michel Pébereau a indiqué que trois éléments doivent être pris en compte dans l'appréciation des opérations de LBO, les difficultés engendrées par certaines de ces opérations ne pouvant être généralisées :

- premièrement, les effets de leviers résultant des opérations de LBO peuvent être très différents selon les entreprises et les banques qui les financent ;

- deuxièmement, il est toujours loisible aux propriétaires de l'entreprise et aux investisseurs financiers de renégocier les conditions de ces opérations ;

- troisièmement, la qualité de gestion et le segment de marché sur lequel une entreprise se situe jouent un rôle important dans la réalisation de ces opérations.

M. Jean Arthuis, président, a souhaité connaître l'appréciation de BNP Paribas sur les dispositifs français de refinancement et de recapitalisation des banques, au travers de deux sociétés ad hoc, la Société de financement de l'économie française (SFEF) et la Société de prise de participation de l'Etat (SPPE). Il a souhaité savoir si ces mesures ont permis une relance du crédit.

M. Michel Pébereau a insisté sur la nécessité d'une intervention de l'Etat et, particulièrement, sur le rôle complémentaire de la SFEF et de la Banque centrale européenne (BCE). Il a indiqué que l'insuffisance actuelle du crédit tient à une insuffisance de la demande et non de l'offre. Cette baisse de la demande de crédit s'explique par la crise de confiance qui affecte les entreprises et les ménages, ces derniers ayant renoncé à la réalisation de certains de leurs investissements.

M. Jean-Jacques Jégou s'est interrogé sur les réformes pouvant être engagées en vue d'une amélioration des règles de régulation des marchés financiers. Il a ensuite insisté sur la contradiction pouvant exister entre, d'une part, la mauvaise image du secteur bancaire dans l'opinion publique et, d'autre part, le constat selon lequel la crise actuelle du crédit résulte d'un manque de demande et non d'offre de crédit. Il a enfin souhaité connaître l'avis de M. Michel Pébereau, auteur d'un rapport relatif à la dette publique en 2005, sur la dégradation actuelle du déficit public et de la dette publique.

M. Joël Bourdin s'est interrogé, d'une part, sur l'évolution envisageable des tâches de la Banque centrale européenne (BCE) afin que celle-ci fasse du soutien à la croissance une de ses missions principales à côté de la maîtrise de l'inflation et, d'autre part, sur le rôle joué par les hedge-funds dans la crise financière actuelle. Il a enfin souhaité savoir si le secteur de l'assurance-vie doit faire l'objet d'une surveillance particulière.

M. Serge Dassault s'est interrogé sur les causes de l'insuffisance du crédit immobilier et automobile, sur l'efficacité du plan de relance proposé par le Gouvernement, ainsi que sur les conséquences de ces mesures sur le déficit public.

M. Philippe Adnot a souhaité obtenir des précisions sur l'opération de rachat du groupe Fortis par BNP Paribas, ainsi que sur l'évolution des règles comptables à envisager pour l'avenir.

M. Eric Doligé a demandé si la confiance entre les établissements financiers est aujourd'hui retrouvée ou si, au contraire, des inquiétudes subsistent.

M. Jean-Pierre Fourcade a souhaité savoir si la faillite de la banque d'affaires Lehman Brothers aurait pu être évitée, si la souscription de la SPPE à des actions de préférence représente, pour les établissements bancaires, un coût plus élevé que la souscription aux TSS et si un risque inflationniste n'est pas à craindre en raison des écarts de taux importants existant entre les Etats.

Faisant référence aux déclarations de M. Baudouin Prot, directeur général de BNP Paribas, devant la commission des finances de l'Assemblée nationale le mardi 3 février 2009, Mme Nicole Bricq a souhaité savoir dans quelle mesure il y a une contradiction entre, d'une part, demander aux banques d'accorder davantage de crédit et, d'autre part, exiger d'elles qu'elles augmentent leur ratio de fonds propres. Elle s'est interrogée sur la capacité des établissements bancaires à remplir leur engagement d'augmenter les encours de crédits de 3 à 4 %, cet engagement étant la contrepartie de l'apport en fonds propres accordé aux établissements bancaires par la SPPE. Elle a enfin demandé comment BNP Paribas envisage l'éventuelle entrée de l'Etat au sein de son conseil d'administration, l'Etat pouvant détenir une partie importante du capital de la banque dans le cadre des émissions d'actions de préférence.

M. Aymeri de Montesquiou a demandé si la création, à l'échelle internationale, d'une autorité de régulation des marchés financiers est envisageable.

M. Roland du Luart a insisté sur la nécessité d'une certaine prudence face à une crise financière de cette ampleur, les décisions prises dans l'urgence pouvant être un facteur aggravant de celle-ci.

M. Jean Arthuis, président, a souhaité savoir comment les conclusions du groupe de travail relatif à la rémunération des professionnels du milieu bancaire, adoptées par la Fédération bancaire française (FBF), seront prises en compte par BNP Paribas. Il s'est enfin interrogé sur les mesures pouvant être prises pour assurer la transparence des opérations des établissements bancaires via les paradis fiscaux.

M. Michel Pébereau a indiqué qu'il convient, avant tout, d'appliquer les règles de régulation existantes, mais non pleinement mises en oeuvre aujourd'hui, plutôt que de modifier ces dernières ou d'en créer de nouvelles. Un niveau de régulation effectif à l'échelle européenne doit être mis en place, en coordination avec le système de régulation américain.

La mise en place d'une autorité de régulation internationale est aujourd'hui utopique. Néanmoins si une telle autorité devait voir le jour, il serait légitime qu'elle soit localisée en Europe et créée à partir de la Banque des règlements internationaux (BRI).

Evoquant les critiques dont les banques font actuellement l'objet en raison de l'aide qui leur est apportée en dépit de l'ampleur de leurs bénéfices, il a souligné que si les banques françaises sont aujourd'hui moins affectées par la crise financière, cela résulte de leur comportement prudentiel dans la période précédant la crise.

M. Michel Pébereau a estimé nécessaires les mesures prises par le Gouvernement pour relancer l'économie en dépit de leur impact sur les finances publiques. Il a néanmoins indiqué qu'il fallait tirer les conséquences de la situation actuelle, à savoir, d'une part, revenir aussitôt que possible dans une trajectoire de retour à l'équilibre des finances publiques et, d'autre part, poursuivre les efforts entrepris pour accroître l'efficacité de la dépense publique, objectif fixé à la Révision générale des politiques publiques (RGPP).

S'agissant de la Banque centrale européenne (BCE), il a précisé que celle-ci a pleinement joué son rôle en assurant la liquidité du marché européen. Faire du soutien à la croissance et à l'emploi une des missions principales de la BCE semble inutile, dans la mesure où il s'agit déjà de l'un des objectifs de la BCE à côté de la maîtrise de l'inflation.

Répondant à M. Joël Bourdin, M. Michel Pébereau a indiqué que les hedge funds n'ont pas été à l'origine de la crise financière actuelle et qu'un contrôle du secteur de l'assurance-vie dépend du degré de sa régulation, le principal problème tenant à la liberté laissée aux épargnants dans le choix des produits constituant leur assurance-vie.

S'agissant du rachat du groupe Fortis, il a indiqué que la procédure est en cours.

Quant à la réforme des normes comptables, il a considéré que, d'une part, l'instauration de règles comptables mondiales est nécessaire et que, d'autre part, les Etats doivent se mettre d'accord sur les principes devant guider les comptables dans l'élaboration de ces normes. La définition de règles comptables constitue, en effet, un enjeu politique important.

M. Michel Pébereau a précisé qu'il n'y a plus d'inquiétudes entre les banques aujourd'hui grâce à l'intervention des Etats pour éviter la faillite de certains établissements. La perte de confiance sur le marché interbancaire n'a d'ailleurs jamais concerné les grandes banques internationales.

Il a indiqué que la faillite de la banque d'affaires Lehman Brothers aurait pu être évitée et a insisté sur l'importance de la réunion du Conseil européen au mois d'octobre 2008 dans l'enrayement de la crise. Il a indiqué qu'une reprise de l'inflation, à court terme, semble peu probable.

En réponse à Mme Nicole Bricq, M. Michel Pébereau a indiqué qu'une sortie de la crise actuelle n'est, en effet, pas envisageable si les analystes financiers exigent des normes de régulation plus strictes - notamment s'agissant du ratio de solvabilité des banques - que celles posées par les régulateurs de marché. Il a ensuite précisé que les banques feront tous les efforts nécessaires pour respecter leur engagement d'une augmentation du volume de crédit de 3 % à 4 %. Quant à l'entrée de l'Etat dans le conseil d'administration de BNP Paribas, il a jugé que la question ne se pose pas, dans la mesure où l'Etat n'a pas, à ce jour, souscrit des actions de BNP Paribas.

Il a rappelé que les refus de crédit aux entreprises ne sont pas plus importants qu'avant la crise et que, selon des données statistiques datées du mois de décembre 2008, le crédit en faveur des entreprises et des ménages progresse.

S'agissant de l'engagement de bonne gouvernance de la Fédération bancaire française (FBF), il a indiqué que l'évolution des dividendes accordés aux actionnaires de BNP Paribas devra désormais suivre la « profitabilité » de l'établissement. Les dividendes ne pourront plus être maintenus au niveau de ceux accordés auparavant. Une réunion des actionnaires de BNP Paribas est prévue afin de réfléchir à l'application de l'accord signé par la FBF.

Quant à la transparence des opérations des établissements bancaires, il a précisé que BNP Paribas applique la législation en vigueur dans chacun des pays où ses établissements sont implantés et respecte les codes de déontologie mondiaux.

Crise financière internationale : plan de soutien aux banques - Audition de M. Philippe Dupont, président du groupe Banque Populaire

La commission a ensuite procédé à l'audition de M. Philippe Dupont, président du groupe Banque Populaire.

M. Jean Arthuis, président, s'est interrogé, à titre liminaire, sur le risque systémique couru par l'économie et les marchés financiers à l'automne dernier, ainsi que sur l'action de l'Etat en vue d'assurer le financement de l'économie française. En outre, il a relevé l'importance du rapprochement en cours entre le groupe Banque Populaire et les Caisses d'épargne.

M. Philippe Dupont, président du groupe Banque Populaire, a rappelé que la faillite de la banque Lehman Brothers a déclenché la crise des marchés, mais que des mesures appropriées ont été prises en France afin de se prémunir contre le risque de pénurie de liquidité et en vue de permettre aux établissements bancaires de faire face à leurs engagements financiers. Il a ajouté que le groupe Banque Populaire a lui-même bénéficié de ce train de mesures, via un prêt de la Société de financement de l'économie française (SFEF), de l'ordre de cinq milliards d'euros, soit environ 25 % des besoins de financement annuels du groupe.

M. Philippe Dupont a souligné que, de par sa structure de banque coopérative et sa proximité avec les chefs d'entreprises, le groupe Banque Populaire a toujours eu le souci, au cours de la période récente, d'accompagner et de soutenir le développement de l'économie réelle. A cet égard, il a indiqué que l'encours des prêts aux entreprises a continué de progresser de près de 12 % sur les derniers mois.

Il a insisté sur l'importance des entreprises, et notamment des très petites entreprises (TPE) ainsi que des créateurs d'entreprises, dans la clientèle du groupe Banque Populaire. Par ailleurs, il a relevé l'étroite relation nouée avec les services du médiateur du crédit nommé au coeur de la crise.

Il s'est félicité de la situation plus favorable du crédit aux entreprises et aux particuliers en France, en comparaison de celle constatée dans les pays voisins. Il a toutefois observé que le groupe Banque Populaire ne peut pas financer des dossiers d'entreprises qui présentaient déjà un risque important avant même la crise.

M. Philippe Dupont a rappelé que le groupe Banque Populaire a eu recours à une large gamme d'outils financiers allant du crédit-bail à l'affacturage en passant par les fonds d'investissements de proximité. Il a ajouté que le groupe a désormais l'ambition d'accompagner les entreprises dans leur demande de fonds propres afin de faciliter leur reconversion.

Il a estimé que la sortie de crise ne peut s'envisager sans le rétablissement de la demande. A cet égard, il a souligné que cette demande s'est effondrée à la fin de l'année 2008, tant sur le marché immobilier que pour le crédit à la consommation. Évoquant l'attentisme des vendeurs et des acheteurs sur le marché immobilier, ainsi que les difficultés du marché de l'automobile, il a considéré que le ralentissement actuel de l'économie est lié à une crise de défiance.

Il a toutefois souligné que le début de l'année 2009 a permis d'enregistrer quelques signes encourageants, avec notamment en matière de logement et de crédits aux entreprises une décrue des taux d'intérêt, revenus à leur niveau du début de l'année 2008.

M. Jean Arthuis, président, s'est interrogé sur l'apport en liquidités supplémentaires drainées par le Livret A.

M. Philippe Dupont a indiqué que depuis le 1er janvier 2009 l'encours du Livret A au sein du groupe s'élève à 1,6 milliard d'euros. Il a toutefois ajouté que les récentes émissions effectuées sur le marché obligataire l'ont été à des taux d'intérêt élevés et que le coût des liquidités restera durablement onéreux.

Il a rappelé que la banque Natixis résulte du rapprochement depuis la fin de l'année 2006 de Natexis et des métiers de marché et de crédit de la Caisse des dépôts et consignations. Il a relevé que Natixis a été affectée au cours des derniers mois tant sur ses activités de gestion pour compte propre que sur celles de titrisation.

M. Jean Arthuis, président, a souhaité savoir si la plus grande part des pertes enregistrées l'ont été sur les activités aux Etats-Unis.

M. Philippe Dupont a reconnu qu'effectivement les pertes ont notamment été subies sur les marchés à Londres et aux Etats-Unis. Il a précisé que les difficultés financières ont affecté Natixis dès le printemps 2007 et plus encore au cours de l'exercice 2008.

M. Jean Arthuis, président, s'est interrogé sur l'activité de rehausseur de crédits du groupe Banque Populaire.

M. Philippe Dupont a indiqué que cette activité est certes présente au sein de Natixis, mais qu'elle a été récemment préservée de l'impact négatif d'éventuels actifs « toxiques ».

M. Jean Arthuis, président, s'est inquiété du coût devant être supporté par le groupe Banque Populaire du fait de cette activité.

M. Philippe Dupont a indiqué que ce coût est de l'ordre de 500 millions d'euros et qu'il a été provisionné dès 2007.

M. Jean Arthuis, président, s'est interrogé sur l'intervention de la Société de prise de participation de l'Etat (SPPE), dans le contexte traversé par le groupe Banque Populaire.

M. Philippe Dupont a rappelé qu'un apport en fonds propres a été réalisé en décembre 2008 à hauteur de 950 millions d'euros en titres super subordonnés. Par ailleurs, il a précisé que 900 millions d'euros seront passés en réserves au titre de l'exercice 2008 et que les pertes enregistrées correspondent à des pertes prudentielles, et non à des pertes comptables.

Il a ajouté que le groupe Banque Populaire présente d'ailleurs l'un des meilleurs ratio Tier 1 de la place, à un niveau de 9 %.

Il a reconnu que le contexte difficile des derniers mois conduit à s'interroger sur la pertinence du projet de rapprochement entre l'un des principaux financeurs de l'économie nationale, le groupe Banque Populaire, et le plus grand collecteur d'épargne du pays, les Caisses d'épargne. Il a souligné qu'un tel projet ne peut s'envisager que dans des conditions de solidité financière absolue.

M. Jean Arthuis, président, s'est interrogé sur l'opportunité pour le groupe Banque Populaire d'être associé à la deuxième tranche de participation à laquelle pourrait prochainement souscrire la SPPE.

M. Philippe Dupont a estimé qu'en matière de financement le choix des outils utilisés est particulièrement important et a affirmé qu'il ne négligera ni les actions de préférence, ni les titres hybrides.

M. Jean Arthuis, président, a rappelé la nécessité de conforter les fonds propres des petites et moyennes entreprises (PME) et a salué dans cette perspective la détermination dont fait preuve le groupe Banque Populaire.

Mercredi 18 février 2009

- Présidence de M. Jean Arthuis, président, puis de M. Yann Gaillard, vice-président -

Enquête de la Cour des Comptes sur la dette du Centre national d'études à l'égard de l'Agence spatiale européenne - Audition pour suite à donner

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a procédé à une audition relative à l'enquête de la Cour des comptes sur la dette du Centre national d'études spatiales (CNES) à l'égard de l'Agence spatiale européenne (ASE).

M. Jean Arthuis, président, a tout d'abord rappelé que la commission avait demandé une enquête à la Cour des comptes sur les engagements du CNES dans les programmes de l'ASE, conformément aux dispositions de l'article 58-2° de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF). En effet, la forte augmentation de la dette du CNES à l'égard de cette agence, passée de 165 millions d'euros fin 2005 à 334 millions d'euros fin 2007, est susceptible de poser problème tant en termes de sincérité budgétaire que pour le maintien du leadership de l'industrie spatiale française en Europe. La Cour des comptes a remis son enquête à la commission en juillet 2008 mais la finalisation des négociations sur la conférence ministérielle de l'ASE, qui s'est tenue à La Haye les 25 et 26 novembre 2008, a empêché d'organiser l'audition « pour suite à donner » dès l'automne dernier.

M. Alain Hespel, président de la 2e Chambre de la Cour des comptes, a précisé que, du fait de ce décalage, l'enquête précitée n'est plus complètement à jour, la conférence ministérielle de La Haye ayant modifié la programmation de l'ASE et les engagements des pays membres à son égard.

Procédant à l'aide d'une vidéo projection, M. Michel Camoin, président de section à la Cour des comptes, a déclaré que la France occupe la deuxième place mondiale, derrière les Etats-Unis, dans le domaine spatial et que son effort en la matière repose sur le programme national du CNES, de l'ordre de 700 millions d'euros par an, sur sa contribution à l'ASE, de 685 millions d'euros par an, sur les programmes du ministère de la défense, d'environ 300 millions d'euros par an, et sur sa participation à des programmes multilatéraux, tel que Galileo, pour un montant annuel de 100 millions d'euros.

Il a indiqué que le contrat de plan liant l'Etat et le CNES pour la période 2005-2010 couvre trois domaines : l'accès à l'espace, les utilisations de l'espace et, enfin, la défense et la sécurité. Le cadrage financier de ce contrat prévoit, pour le programme « national » du CNES, un budget de 681,4 millions d'euros en valeur de 2004, majoré de 1,5 % par an. Aux termes de ce même document, la subvention à l'ASE s'établit à 685 millions d'euros courants par an sur la période, la dette du CNES à l'égard de l'agence devant être ramenée à zéro à fin 2010. Le plan à moyen terme du CNES, que la Cour des comptes a consulté lors de ses travaux, confirme cet objectif.

M. Michel Camoin a précisé que les engagements des Etats membres de l'ASE résultent de programmes obligatoires, auxquels tous doivent souscrire en proportion de leur produit national brut, et de programmes facultatifs, auxquels ils déterminent librement leur souscription et leur quote-part. Avant la conférence de La Haye, les engagements de la France sur la période 2008-2015 s'élevaient à 2.357 millions d'euros, compte non tenu de la dette à fin 2007, laquelle atteignait alors 334 millions d'euros.

Puis M. Michel Camoin a déclaré que les travaux de la Cour des comptes conduisent à mettre en doute la capacité réelle du CNES à réaliser son objectif d'extinction de sa dette à l'égard de l'ASE à fin 2010. En effet, le plan à moyen terme élaboré en ce sens repose sur une présentation comptable favorable et sur plusieurs hypothèses improbables :

- des charges d'un montant de 100 millions d'euros relatives au programme d'accès européen garanti à l'espace (EGAS), réelles dès à présent mais dont l'ASE ne réclamera le paiement qu'en 2011, sont reportées à cette même année 2011 dans la comptabilité du CNES ;

- les prévisions d'appels de fonds de l'ASE sont fortement minorées sur la période 2008-2010, le CNES ayant expliqué à la Cour des comptes qu'il espérait la restitution de la trésorerie issue de versements de la France et inemployée par l'agence sur certains de ses programmes. Or, si certaines agences, comme l'organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAr), fonctionnent selon ces modalités, tel n'est pas le cas de l'ASE ;

- aucune provision n'a été constituée pour faire face aux dépassements de coûts de certains programmes de l'agence, alors même que de tels dépassements ne nécessitent pas d'autorisation des Etats souscripteurs s'ils restent dans la limite de 20 % du coût du projet initial ;

- certaines charges avérées, relatives, par exemple, à l'arrivée du lanceur russe Soyouz sur le centre spatial guyanais, et représentant un montant total de 117 millions d'euros, ne sont pas prises en compte par le CNES ;

- il en va de même pour d'autres charges « quasi certaines », comme la participation de la France à la station spatiale internationale (ISS), estimée à 65 millions d'euros par an dans les documents comptables du CNES, la Cour des comptes jugeant que les engagements passés devraient conduire à un niveau réel d'environ le double de cette somme.

M. Michel Camoin a ensuite évoqué les conséquences de la programmation décidée lors de la conférence ministérielle de La Haye, cette actualisation ne figurant pas dans l'enquête remise à la commission par la Cour des comptes après délibération. Le montant total des nouveaux engagements souscrits par la France s'élève à 2 233 millions d'euros, le plan à moyen terme du CNES faisant apparaître un engagement de 1 872 millions d'euros à ce titre à l'horizon 2018. Dans ces conditions, la dette à l'égard de l'ASE ne pourra être apurée à la fin de l'année 2010 et elle devrait alors s'élever à 484 millions d'euros. En revanche, dans l'hypothèse d'une participation financière de la France portée à 770 millions d'euros par an à compter de 2011, une extinction de cette dette est possible à la fin de 2015, sur la base d'une estimation réaliste des engagements qui pourraient être pris à l'occasion des deux prochaines conférences ministérielles de l'ASE.

M. Philippe Gillet, directeur du cabinet de la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, après avoir souligné le caractère stratégique de la recherche spatiale et l'équilibre de l'effort français en la matière entre programme européen, programme militaire, programme national et programmes multilatéraux, a rappelé le fort élan donné par la présidence française de l'Union européenne, qui s'est notamment traduit par un engagement « sans précédent » des Etats membres de l'ASE lors de la conférence ministérielle de La Haye : plus de 10 milliards d'euros d'engagements nouveaux, dont 2,3 milliards d'euros pour la France. Cet effort français, qui bénéficiera à l'industrie nationale en vertu du principe du « retour géographique » selon lequel fonctionne l'agence, profite à l'ensemble de l'Europe, la participation des industriels français étant souvent nécessaire pour qu'un projet puisse se concrétiser. Il est donc nécessaire de ne pas diminuer l'investissement de la France au sein de l'ASE.

M. Philippe Gillet a indiqué que la dette portée par le CNES à l'égard de l'ASE trouve son origine dans la politique mise en place pour le retour en vol d'Ariane 5 après l'échec de ce lanceur, en décembre 2002. Deux réponses structurelles sont apportées à cette question de fond :

- d'une part, la signature d'un contrat d'achat, par Arianespace, d'un nouveau lot de lanceurs devant lui permettre d'atteindre l'équilibre financier sans subvention ;

- d'autre part, la mise en place d'une mission confiée à MM. Yannick d'Escatha, président du CNES, Bernard Bigot, administrateur général du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) et Laurent Collet-Billon, délégué général pour l'armement, qui a pour objet de définir la position française sur l'avenir des lanceurs européens et leurs conditions d'exploitation.

L'apurement de la dette accumulée sera le fruit d'une gestion rigoureuse et de l'octroi des moyens financiers nécessaires. Ainsi, dans le cadre de la loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012, la subvention versée au CNES au titre de la participation de la France aux programmes de l'ASE s'établit à 685 millions d'euros en 2009 et en 2010, mais à 770 millions d'euros en 2011. Sur cette base, et dans l'hypothèse d'une augmentation ultérieure de cette subvention de l'ordre de l'inflation, la dette devrait être soldée à la fin de l'année 2015.

M. Yannick d'Escatha, président du CNES, après avoir salué la qualité des travaux de la Cour des comptes, a précisé que certaines différences pouvant apparaître entre les échéanciers du CNES et de l'ASE résultent de l'actualisation plus régulière par le CNES (sur une base bisannuelle) de l'estimation des annuités de paiement futures dues par la France au regard de l'état d'avancement des programmes de l'agence.

D'autre part, en réponse aux remarques de la Cour des comptes sur l'absence de prise en compte par le CNES de « charges certaines », il a fait valoir que les comptes du CNES ne traduisent que les conséquences financières des décisions votées par la France. Ainsi, lors des travaux de la Cour des comptes, la programmation relative à l'ISS n'était votée que jusqu'à la mi-2008, ce qui explique qu'aucun engagement sur la station spatiale internationale n'apparaissait alors au-delà de cette échéance.

Enfin, à propos du programme EGAS, il a confirmé que les comptes du CNES n'enregistrent cette charge que pour la date d'appel de cette somme par l'ASE, c'est-à-dire pour l'année 2011.

Après avoir remercié la Cour des comptes pour la qualité de ses travaux, M. Christian Gaudin, rapporteur spécial de la mission « Recherche et enseignement supérieur », a souhaité savoir si le prochain contrat Etat - CNES traduirait l'engagement des pouvoirs publics d'éteindre la dette de la France à l'égard de l'ASE et permettrait, de manière générale, de financer la participation réelle du CNES dans les programmes de l'agence.

En réponse, M. Julien Lagubeau, conseiller technique du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, a expliqué que le montant de la dotation versée annuellement au CNES jusqu'en 2011 est déjà connu, du fait de l'adoption de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 précitée, et qu'il s'élève à 770 millions d'euros. Ce chiffre s'appuie sur des hypothèses de dépenses raisonnables et sur une évolution des recettes au rythme de l'inflation. Il est prévu d'intégrer l'effort du « rebasage » en 2011.

M. Christian Gaudin s'est ensuite interrogé, d'une part sur la trésorerie de l'ASE, et d'autre part sur la manière dont cette agence concilie le « retour à l'euro près » des sommes versées par les Etats avec l'optimisation de son budget. Il fait part de sa crainte que le fonctionnement de l'ASE n'illustre une « Europe des égoïsmes nationaux ».

M. Jean-Jacques Dordain, directeur général de l'ASE, a tout d'abord souhaité répondre à la Cour des comptes en indiquant que tout dépassement de financement d'un programme facultatif nécessite une décision, la « règle des 120 % » correspondant au seuil à partir duquel un Etat peut se désengager financièrement d'un programme facultatif.

Puis il a indiqué à M. Christian Gaudin que la trésorerie de l'agence est effectivement importante compte tenu de « l'étanchéité » financière de chaque programme qui correspond à un seul budget. Les prévisions budgétaires annuelles concernent 80 programmes et sont calculées de manière à disposer de marges de manoeuvre sur chacun d'entre eux, afin de pouvoir financer, le cas échéant, les différentes étapes industrielles. En outre, le niveau de la trésorerie de l'agence dépend du montant et du rythme des versements des Etats.

Il a expliqué que la dette de la France a été « vertueuse d'un point de vue programmatique » car elle a permis de remettre à niveau Ariane 5 et d'assurer le succès commercial de ce lanceur. En outre, cette dette n'a jamais inquiété la direction de l'ASE compte tenu, premièrement, des assurances données par la France sur le remboursement de cette dette, deuxièmement de l'absence d'impact de la dette sur le fonctionnement normal de l'agence, et troisièmement de la régularité des versements de la France, qui règle toujours au 1er janvier le solde de la dette de l'année précédente, la dette ne réapparaissant qu'au cours du second semestre de l'année.

S'agissant « du retour à l'euro près », M. Jean-Jacques Dordain a estimé que cette règle, à laquelle l'ensemble des Etats membres sont attachés, n'empêche pas l'industrie spatiale européenne de se montrer compétitive au niveau mondial. Ce retour n'est pas « à l'euro près », les industriels des Etats membres n'étant assurés de percevoir « que » 94 % des sommes versées. D'autre part, la gestion des retours géographiques a été facilitée par la mise en place, en 2005, d'une méthode de calcul globale permettant une relative mise en concurrence des industriels au sein de chaque programme.

M. Yann Gaillard, président, s'est félicité que la dette du CNES accumulée à l'égard de l'ASE ne porte pas préjudice à l'influence de la France dans le domaine spatial.

M. Christian Gaudin s'est interrogé sur la compatibilité de la programmation issue de la conférence de la Haye avec le leadership de l'industrie spatiale française en Europe, la part de l'Allemagne étant supérieure de trois points à celle de la France.

M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis de la mission « Recherche et enseignement supérieur » au nom de la commission des affaires culturelles, établissant une analogie avec le cas de la société Airbus, s'est inquiété de l'éventualité d'un transfert de technologies-clés de la France vers l'Allemagne, pays dont il a considéré qu'il a une politique industrielle plus affirmée.

M. Edouard de Pirey, conseiller sciences, technologies et espace de la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, a affirmé que la France conduit une réelle politique industrielle en matière spatiale, appuyée par un corpus industriel très compétitif. Toutefois, chaque conférence ministérielle reprend dans sa programmation des projets qui recoupent plus ou moins les intérêts industriels des Etats. Ainsi la conférence de La Haye répond aux priorités allemandes avec l'ISS, alors que les conférences ministérielles précédentes ont davantage été axées sur les champs de compétence français, tels que les lanceurs. De même, si le développement complet d'Ariane 5 était décidé lors de la prochaine conférence, la balance pencherait à nouveau en faveur de la France. En tout état de cause, il convient de ne pas confondre la contribution des Etats dans le cadre de la programmation d'une conférence et les flux annuels de ces mêmes Etats qui sont nécessairement différents compte tenu de l'échelonnement du financement des précédentes programmations.

M. Jean Jacques Dordain a ajouté que l'activité de l'ASE ne repose pas, pour les trois prochaines années, sur la programmation de la conférence de la Haye, mais prioritairement sur la mise en oeuvre des programmes décidés en 2003 et 2005. Concernant la conférence de La Haye, le différentiel entre l'Allemagne et la France s'explique non par une diminution de la participation française mais par une augmentation de la contribution allemande.

Répondant à M. Jean-Pierre Plancade, il a estimé que l'agence ne peut pas être comparée à Airbus, qui est une société commerciale privée régie par des règles distinctes de l'ASE.

M. Yannick d'Escatha a précisé que le choix des programmes s'effectue en relation avec les industriels. Il a estimé que la France et l'Allemagne parviennent à concilier de manière satisfaisante leurs intérêts, comme en témoigne le financement des futurs Météosat de troisième génération (MTG), finalement fixé à part égale entre les deux pays.

S'agissant de la contribution du CNES à l'ASE, le montant a été établi de façon à ne pas recréer une nouvelle dette en garantissant la soutenabilité des ressources. En outre, le financement de l'ASE devrait être mieux assuré puisque, dans le prochain contrat pluriannuel du CNES, seront intégrés et provisionnés les engagements des conférences ministérielles de l'ASE, ce qui constitue un réel progrès méthodologique. Enfin, il convient de noter que le leadership de la France n'est pas discutable au vu du niveau de sa participation au sein de l'agence.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial de la mission « Recherche et enseignement supérieur » s'est interrogé sur le périmètre et le budget de l'agence ainsi que sur le lien entre la constitution de la dette du CNES à l'égard de l'ASE et le succès du programme relatif à Ariane 5.

En réponse, M. Jean-Jacques Dordain a indiqué que l'ASE regroupe désormais 18 pays, soit les 15 pays de l'Union européenne avant l'élargissement de 2004, auxquels s'ajoutent la Suisse, la Norvège et la République tchèque. 90 % du financement de l'agence est assuré par 6 pays (France, Allemagne, Italie, Royaume-Uni, Espagne, Belgique), ce qui témoigne de la concentration de l'industrie spatiale européenne. Sur un budget total d'environ 3 milliards d'euros par an, la part de la France varie entre 22 % et 25 %. S'agissant enfin du programme Ariane, la moitié du financement étant pris en charge par la France, il était inconcevable d'arrêter le programme par manque de moyens financiers, d'où le recours à la dette.

A l'issue de ce débat, la commission a autorisé, à l'unanimité, la publication de l'enquête de la Cour des comptes ainsi que du compte rendu de la présente audition sous la forme d'un rapport d'information.

Crise financière internationale : plan de soutien aux banques - Audition de MM. René Carron, président de Crédit agricole SA, et Jacques Lenormand, directeur général délégué de Crédit agricole SA

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'audition de MM. René Carron et Jacques Lenormand, respectivement président et directeur général délégué de Crédit agricole SA.

M. Jean Arthuis, président, a rappelé que la loi n° 2008-1061 du 16 octobre 2008 de finances rectificative pour le financement de l'économie a instauré une société de prise de participation de l'Etat (SPPE) et une société de financement de l'économie française (SFEF), susceptibles de bénéficier de la garantie de l'Etat pour un montant de, respectivement, 40 milliards d'euros et 320 milliards d'euros. Le Crédit agricole a su faire face à son besoin de recapitalisation, et a, semble-t-il, surmonté les difficultés connues aux Etats-Unis par sa filiale Calyon. Quelle analyse le Crédit agricole fait-il de la crise actuelle ? Pourquoi a-t-il contribué à la première tranche de titres super-subordonnés souscrits par la SPPE, et ne prévoit-il pas de contribuer à la deuxième ? Prévoit-il de sortir rapidement du dispositif ? Le plan de financement de l'activité française améliore-t-il effectivement le financement de l'économie ? Le problème concerne-t-il actuellement surtout l'offre ou plutôt la demande de crédit ?

En réponse, M. René Carron, président de Crédit agricole SA, a estimé que la crise est très profonde, et provient de l'insuffisance de la régulation, en particulier aux Etats-Unis. Le groupe Crédit agricole a été transparent sur la manière dont il a été touché par la crise et, en juin 2008, a augmenté son capital de 5,9 milliards d'euros. En effet, s'il n'avait pas besoin de réaliser une telle augmentation, il a considéré que celle-ci deviendrait plus difficile par la suite. A l'automne 2008 a été engagée une vaste réorganisation. Le groupe dispose aujourd'hui de 64 milliards d'euros de capitaux propres, et son ratio Tier-1 s'établit à 8,5 %. Il est présent dans 70 pays, et, avec le Crédit Lyonnais, représente 29 % de la banque de détail en France. Le plan de financement de l'économie française a permis d'améliorer la fluidité du marché interbancaire et d'accroître la capitalisation des banques. En ce qui concerne les garanties que l'Etat peut accorder à la SFEF, alors que le plafond est de 320 milliards d'euros, seulement 16 milliards d'euros de garanties ont été attribués pour des prêts aux banques.

M. Jean Arthuis, président, a demandé à M. René Carron si, selon lui, ce montant de 16 milliards d'euros sera dépassé.

M. René Carron a considéré que l'enveloppe ne sera pas totalement utilisée. Cependant, il n'est pas en mesure d'affirmer si le montant total des garanties accordées par l'Etat sera de l'ordre de 25, 30 ou 40 milliards d'euros. Le Crédit agricole a contribué à titre de précaution à l'émission des 10,5 milliards d'euros de la première tranche de titres super-subordonnés souscrits par la SPPE, mais n'a pas besoin de contribuer aux émissions de la deuxième tranche, sa capitalisation étant forte, en particulier grâce aux caisses régionales.

M. Jean Arthuis, président, a demandé quelle a été la part des caisses régionales dans l'augmentation de capital réalisée en juin 2008.

M. René Carron a indiqué qu'elle a été de 57 %. Le groupe Crédit agricole et les caisses régionales distribuent, respectivement, 17 % et 14% de leurs résultats. En 2008, l'encours de crédits du groupe Crédit agricole a augmenté d'environ 7 %, ce qui ne doit pas masquer une baisse à la fin de 2008 et au début de 2009. Au 15 janvier 2009, les dossiers de clients du Crédit agricole adressés au médiateur du crédit étaient au nombre de 843, sur un total d'1 million de dossiers par an pour les PME et les TPE.

M. Jean Arthuis, président, s'est interrogé sur le montant des pertes américaines de la banque de financement et d'investissement Calyon.

M. René Carron a estimé ces pertes à 6 milliards d'euros.

M. François Marc a souhaité savoir si les fluctuations des valeurs boursières du secteur bancaire résultent désormais essentiellement de la manière dont les marchés perçoivent le soutien que lui accordent les pouvoirs publics. Par ailleurs, le Crédit agricole, qui ne distribue que 17 % de ses bénéfices, doit-il se rapprocher de la « règle des trois tiers » évoquée par le Président de la République et M. Serge Dassault, selon laquelle les bénéfices des entreprises doivent se diviser à parts égales entre les salariés, les actionnaires et les investissements ? Quelle est la stratégie du Crédit agricole face aux débiteurs en difficulté ?

En réponse à cette dernière question, M. Jacques Lenormand, directeur général délégué de Crédit agricole SA, a indiqué que l'on n'observe pas, à ce stade, d'augmentation significative des créances sensibles, douteuses ou litigieuses.

M. René Carron, président de Crédit agricole SA, a estimé que, du fait des problèmes financiers multiples apparus aux Etats-Unis, la Bourse est devenue « folle », ce qui perdurera selon lui tant que les autorités américaines n'auront pas clarifié la manière dont elles entendent se débarrasser des créances douteuses. Du fait de son statut mutualiste, le Crédit agricole n'a pas vocation à suivre la « règle des trois tiers ». Les caisses régionales sont souvent le « premier acteur de la cité » après les collectivités territoriales, comme le montre leur implication dans le sport, le théâtre ou la musique.

M. Aymeri de Montesquiou a demandé des précisions sur les modalités de cette implication.

M. René Carron a indiqué qu'il s'agit essentiellement d'actions de mécénat. Le Crédit agricole est ainsi le deuxième mécène du Louvre, et le premier du musée Guimet.

M. Jean Arthuis, président, a considéré que le Crédit agricole a été protégé des excès de l' « hyper-financiarisation » par son statut mutualiste et que ses difficultés se résument à celles rencontrées par Calyon aux Etats-Unis.

M. René Carron a considéré que les pertes américaines du Crédit agricole proviennent non d'erreurs qui auraient été commises, mais des insuffisances de la régulation, qui l'ont empêché de disposer d'informations fiables. Personne ne prévoyait, il y a un an, que Lehman Brothers ferait faillite. Par ailleurs, dès lors que l'on décide de faire de la banque d'investissement, il est inévitable de payer les traders conformément aux usages de la profession.

M. Jean Arthuis, président, a estimé que les pertes américaines du Crédit agricole s'expliquent aussi par un manque de vigilance de sa part.

M. Jean-Jacques Jégou s'est interrogé sur la signification de certaines notations « triple A ».

M. Pierre Bernard-Reymond a souhaité connaître l'analyse de M. René Carron sur la crise actuelle.

En réponse, M. René Carron a considéré que la crise financière trouve son origine dans le fait que les Etats-Unis ont recouru à la titrisation pour contourner les règles prudentielles. Il s'agit donc non de refonder le capitalisme, mais seulement de préciser les règles et de veiller à ce qu'elles soient effectivement appliquées. Par ailleurs, l'importance croissante d'un « savoir parcellisé », notamment avec le développement des mathématiques financières, a fait perdre de vue les questions fondamentales : à quoi sert une banque ? Est-il possible d'avoir durablement un retour sur investissement de 20 % alors que le produit intérieur brut augmente de 2 % ? Quelle est l'utilité pour les Etats de faire des efforts importants de réglementation, si la principale économie mondiale, les Etats-Unis, n'en fait pas ? Ne faut-il pas davantage « récompenser » les clients et les actionnaires fidèles ?

Mme Nicole Bricq a souhaité savoir si le rapprochement des activités de gestion d'actifs de la Caisse d'épargne et de la Société générale est une conséquence de la crise. Par ailleurs, comment prévoit-on de mettre en oeuvre les préconisations faites par M. Georges Pauget, président de la Fédération des banques françaises, dans son rapport sur la rémunération des opérateurs de marché, remis le 11 février 2009 à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi ? Le Crédit agricole respectera-t-il son engagement d'accroître son encours de crédit ?

En réponse, M. René Carron a indiqué que si le rapprochement en cours des activités de gestion d'actifs de la Caisse d'épargne et de la Société générale ne résulte pas de la crise, celle-ci l'a accéléré. Ce rapprochement concernerait non seulement les clients des réseaux du Crédit agricole et de la Société Générale, mais aussi ceux de LCL (ex-Crédit Lyonnais) et du Crédit du Nord. Dans les prochains mois, les rapprochements entre banques seront plus fréquents que les prises de contrôle de banques entre elles, du fait des incertitudes qui subsistent en matière de bilans. En ce qui concerne les engagements pris au sujet de l'augmentation de l'encours de crédits, le Crédit agricole fera tout pour les satisfaire, même s'il ne s'agit pas de commettre les mêmes erreurs qu'aux Etats-Unis, en prêtant à des clients non solvables.

M. Jacques Lenormand, directeur général délégué de Crédit agricole SA, a indiqué que le Crédit Agricole prévoit de réduire globalement les bonus d'un montant compris entre 30 et 50 %. En réponse à une question de M. Jean Arthuis, président, il a précisé qu'il n'est pas envisagé de supprimer totalement les bonus. Ceux-ci rémunèrent non seulement les traders, mais aussi, en particulier, les courtiers, qui ne spéculent pas. Le Crédit agricole prévoit de continuer de distribuer des bonus, mais aussi de les « lisser » sur une période de trois ans, la troisième année voyant le versement d'un solde déterminé en fonction de la pérennité des performances observées.

M. René Carron, président de Crédit agricole SA, a estimé que le Crédit agricole a été relativement protégé, par son statut mutualiste, des excès constatés dans le secteur financier en matière de rémunération. Depuis 2006 le Crédit agricole n'a pas eu de plan de stock-options. M. René Carron n'a jamais bénéficié de bonus, de stock-options ou d'intéressement aux bénéfices.

M. Philippe Adnot s'est interrogé sur la réalité de cette protection dans le cas de la banque Calyon.

En réponse, M. René Carron a une nouvelle fois déclaré que dès lors que l'on a décidé de faire de la banque d'investissement, il est nécessaire de rémunérer les traders conformément aux usages de la profession.

M. Joël Bourdin a demandé à M. René Carron s'il est, comme lui, favorable à la mise en place d'un « fichier positif » recensant l'ensemble des encours des crédits aux particuliers.

M. René Carron lui a indiqué que, jusqu'à présent, le monde associatif ne souhaite pas la mise en place d'un tel « fichier positif », et que, selon ses informations, les expériences étrangères ne sont pas concluantes.

M. Aymeri de Montesquiou s'est interrogé sur le paradoxe selon lequel les Français ont réduit leurs dépenses dans l'immobilier et l'automobile, alors que celles-ci sont restées soutenues pour les achats de Noël ou les sports d'hiver.

En réponse, M. René Carron a indiqué ne pas voir de contradiction entre ces différents phénomènes, le dynamisme de certains types de dépenses devant cependant rapidement s'essouffler. Le retournement observé dans l'immobilier est consécutif à la forte augmentation des prix suscitée par la croissance de l'endettement : désormais, les ménages attendent que les prix et les taux d'intérêt diminuent. Dans le cas de l'automobile, le problème est plus structurel, les personnes de moins de 35 ans considérant moins qu'auparavant la voiture comme un moyen de reconnaissance sociale.

M. Albéric de Montgolfier s'est demandé s'il faut davantage rémunérer les agents du « back office », afin de revaloriser leurs fonctions et d'améliorer le contrôle du « front office ». Par ailleurs, risque-t-on une deuxième crise financière, se diffusant à partir du crédit à la consommation aux Etats-Unis, et dans ce cas, les banques françaises sont-elles exposées ?

En réponse à la seconde question, M. René Carron a considéré qu'il s'agit effectivement d'un risque. Les banques françaises seraient peu concernées de manière directe. Cependant, l'impact serait important sur l'activité économique des Etats-Unis, et donc sur celle de la zone euro. Si le Crédit agricole n'avait pas été directement touché par la crise des subprimes, le cours de ses actions serait de 13 euros au lieu de 8,5 euros, ce qui représente un écart modeste, si l'on prend en compte le fait qu'avant la crise, ce cours était de l'ordre de 30 euros.

M. Jacques Lenormand, directeur général délégué de Crédit agricole SA, a estimé que les limites du contrôle du « front office » proviennent non d'une rémunération trop faible des agents du « back office », mais de la séparation insuffisante entre « back office » et « front office ».

M. Jean Arthuis, président, a estimé que les banques qui ont réalisé des acquisitions par emprunt, ou LBO (« leveraged buy-out »), doivent désormais accepter d'alléger les contraintes financières imposées aux entreprises concernées. Il s'est interrogé sur ce qu'il est possible de faire contre les « Etats non coopératifs » en matière bancaire.

M. René Carron, président de Crédit agricole SA, a indiqué que le Crédit agricole veille d'ores et déjà à ne pas imposer de contraintes financières excessives aux entreprises concernées par un LBO. M. Jacques Lenormand, directeur général délégué de Crédit agricole SA, a précisé que les clients du Crédit Agricole en Suisse et au Luxembourg sont majoritairement étrangers, et proviennent en particulier de l'Asie, du Golfe persique et des Etats-Unis.

En conclusion, M. René Carron a indiqué que la communauté financière française a très mal vécu les critiques faites aux banques. Le système bancaire français est l'un de ceux qui ont le mieux résisté. Il faut que chacun contribue à préserver la confiance.

M. Jean Arthuis, président, a estimé que « la confiance doit être au service de la relance ».

Crise financière internationale : plan de soutien aux banques - Audition de M. Michel Camdessus, président de la Société de financement de l'économie française (SFEF)

La commission a ensuite procédé à l'audition de M. Michel Camdessus, président de la Société de financement de l'économie française (SFEF) et de M. Jean-Yves Colin, secrétaire général.

M. Jean Arthuis, président, a rappelé le rôle de la SFEF et la portée de la garantie de l'Etat dont elle bénéficie pour ses émissions sur les marchés. Cette société contribue au refinancement des banques en leur pourvoyant des liquidités sur le moyen terme, et s'apparente en cela à un « second cercle de la Banque centrale ». Il a également souhaité connaître l'analyse que M. Michel Camdessus, en tant qu'ancien directeur général du Fonds monétaire international, peut livrer sur la crise financière, en particulier sur son caractère structurel et le rôle éventuellement joué par la faillite de la banque Lehman Brothers.

M. Michel Camdessus, président de la SFEF, a présenté la SFEF comme une sorte de « pompe aspirante et refoulante », dotée d'une petite équipe de sept personnes et chargée d'intervenir en substitution du marché défaillant pour soutenir le crédit interbancaire. La SFEF emprunte avec la garantie de l'Etat auprès d'une gamme diversifiée d'investisseurs, puis octroie des prêts non bonifiés aux établissements de crédit pour qu'ils puissent à leur tour prêter aux agents économiques. Le plafond théorique de la garantie de l'Etat, d'un montant de 265 milliards d'euros, ne sera sans doute pas atteint, la SFEF ayant vocation à ne plus exister après le 31 décembre 2009.

Compte tenu de l'émission en cours, libellée en dollars, le montant total des huit émissions de la SFEF devrait atteindre 33,2 milliards d'euros. Les prêts aux banques sont assortis de plusieurs conditions, tenant au respect des ratios réglementaires de solvabilité et d'une convention conclue par chaque établissement avec l'Etat. Cette convention prévoit un objectif, qu'il a qualifié d'ambitieux, d'augmentation de 3 % à 4 % en 2009 (par rapport à 2008) de l'encours de crédit aux agents économiques, et une clause d'ordre éthique portant sur la normalisation des rémunérations octroyées aux dirigeants et aux professionnels des marchés.

En réponse à une observation de M. Jean Arthuis, président, qui considère que cet objectif d'accroissement des crédits apparaît « mystérieux » au regard du constat récemment formulé par les banques, portant sur une contraction de la demande de crédit, il a affirmé que la progression de l'offre de crédit est pour l'instant conforme à la convention.

Il a ajouté que les émissions obligataires et les modalités de fonctionnement de la SFEF sont bien accueillies par l'ensemble des investisseurs internationaux sollicités, notamment américains, japonais et coréens. Ces investisseurs attribuent à la SFEF certains avantages par rapport aux émetteurs étrangers analogues, en particulier une garantie indirecte et globale plutôt que directe et individuelle aux banques, ce qui assure un marché secondaire plus profond.

En réponse à une question de M. Jean Arthuis, président, il a précisé que l'écart de taux par rapport aux émissions de France Trésor est de seulement 10 points de base, mais que l'émetteur de référence est plutôt la Kreditanstalt für Wiederaufbau (KfW) allemande, avec laquelle la SFEF est en compétition.

M. Jean-Yves Colin, directeur général de la SFEF, a ajouté que la SFEF et la KfW sont perçus comme les deux meilleurs émetteurs en Europe après les Etats allemand et français, et que la SFEF n'a pas été soumise à un « parcours initiatique », en dépit de l'historique de la KfW sur les marchés. En réponse à une question de M. Jean-Jacques Jégou, il a également indiqué que les conditions d'émission de la SFEF sont légèrement meilleures que celles de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES).

Revenant sur les engagements « éthiques » des banques, M. Michel Camdessus a précisé les nouvelles conditions afférentes aux rémunérations : elles doivent refléter la performance réelle des dirigeants, les indemnités de départ sont plafonnées à deux années de rémunération fixe, la distribution de stock-options et d'actions gratuites sans condition de performance est prohibée, et un nouveau régime de rétribution des « traders » a été mis en place. En réponse à une question de M. Jean Arthuis, président, il a ajouté que les rachats d'actions par les banques sont également interdits, mais que ce point relève de la Société de prise de participation de l'Etat (SPPE).

Il a ensuite exposé la répartition des prêts accordés par la SFEF aux 13 banques bénéficiaires (qui représentent environ 85 % du marché français des crédits), en fonction de la taille de leur bilan et de leur part de marché. Les deux filiales de crédit des constructeurs automobiles français, RCI Banque et Banque PSA Finance, ont également bénéficié des concours de la SFEF, pour un milliard d'euros chacune. Les prêts ainsi accordés se sont révélés plus attractifs, à hauteur de 50 à 90 points de base, que les financements de maturité équivalente qui auraient été obtenus sur le marché.

En réponse à une interrogation de M. Jean Arthuis, président, il a précisé que la Commission européenne a accepté une diminution de la rémunération de la garantie de l'Etat, à 20 points de base au lieu des 50 points de base qu'elle demandait initialement. A cette rémunération s'ajoute, dans le taux des prêts octroyés par la SFEF, un « spread » correspondant à la qualité de signature de chaque banque, dont M. Jean-Yves Colin a estimé l'amplitude à 50 à 90 points de base.

Répondant à Mme Nicole Bricq, M. Michel Camdessus a ensuite indiqué que le taux de l'émission en dollars de la SFEF en cours est de 2 %. M. Jean-Yves Colin a ajouté que le taux a varié entre 2 et 3 % selon les opérations, et que les prêts de la SFEF sont accordés aux banques dans les mêmes conditions de maturité et de devise que l'émission correspondante, ce qui permet à la SFEF d'écarter tout risque de discordance entre actif et passif.

Les modalités de la décote sur le taux des prêts, pratiquée selon la qualité des collatéraux remis en garantie par chaque banque, sont fixées par un arrêté ministériel du 20 octobre 2008, et pour les collatéraux en euros relatifs à une opération en dollars, par un arrêté de janvier 2009. Au final, le taux des concours de la SFEF avoisine en moyenne 4 %, aucun profit n'étant enregistré par la SFEF puisqu'elle n'agit que comme un « sas ».

En réponse à une question de Mme Nicole Bricq sur les intérêts reversés à l'Etat, M. Michel Camdessus a estimé qu'en se fondant sur un montant global de 80 milliards d'euros de prêts en 2009, une maturité moyenne de deux ans et demi et un coût moyen de 57 points de base pour les banques (hors rémunération de la garantie), l'Etat percevrait environ 1,2 milliard d'euros dès 2009. M. Jean-Yves Colin a ajouté que 441 millions d'euros de commissions ont d'ores et déjà été perçues par l'Etat depuis fin 2008, au moment du règlement de chaque opération.

M. Jean Arthuis, président, a considéré que ces sommes ne devraient pas apparaître en recettes dans la comptabilité budgétaire de l'Etat. Une telle procédure de « pré-paiement » témoigne d'un « excès de créativité » et la perception des intérêts devraient être étalée sur la durée correspondant à la maturité des prêts. M. Michel Camdessus a souscrit à cette proposition, tout en rappelant que la SFEF n'a pas à intervenir dans ces considérations budgétaires.

M. Jean-Jacques Jégou s'est interrogé sur le fonctionnement de la SFEF ainsi que sur l'impact de l'abaissement à 2 % du principal taux directeur de la Banque centrale européenne sur les conditions de refinancement des banques et une éventuelle répercussion de ces marges sur les crédits qu'elles consentent.

M. Michel Camdessus a précisé que le capital de la SFEF est détenu pour 34 % par l'Etat et pour 66 % par les sept principales banques françaises. Les taux directeurs de la BCE n'ont quant à eux guère d'impact sur les conditions de prêt de la SFEF, dans la mesure où ces deux structures couvrent deux segments distincts de refinancement, respectivement le court (jusqu'à six mois) et le moyen termes. La SFEF n'a pas non plus d'action particulière à exercer en matière de surveillance des marges des banques.

En réponse à une question de M. Aymeri de Montesquiou sur la participation des fonds souverains aux émissions de la SFEF, il a estimé qu'ils ont sûrement souscrit, sans pouvoir être plus précis. Il a distingué trois catégories de souscripteurs - banques centrales, investisseurs institutionnels et établissements de crédit - dont 70 à 80 % sont étrangers.

Evoquant les craintes souvent exprimées sur une raréfaction du crédit, M. Pierre Bernard-Reymond a demandé à M. Michel Camdessus son sentiment sur les perspectives en la matière pour 2009. Ce dernier a fait part de sa vive inquiétude, compte tenu de l'absence de visibilité et de l'ampleur des plans budgétaires de relance aux Etats-Unis, en Europe et bientôt au Japon, qui risquent de conduire à une brutale remontée des taux d'intérêt. Il a également confirmé l'appréciation de M. Jean Arthuis, président, selon laquelle ce type de crise pourrait inciter à la création monétaire, facteur de relance de l'inflation.

Puis en réponse à deux questions de Mme Nicole Bricq sur le soutien à Dexia et la possible résurgence de tensions sur la liquidité des banques en 2009, il a précisé que la SFEF n'est pas intervenue en faveur de Dexia, qui bénéficie d'une garantie directe de l'Etat à hauteur de 55 milliards d'euros. Concernant la liquidité du marché interbancaire, il a considéré que le refinancement à court terme ne pose pas de réelles difficultés, grâce à l'action efficace de la BCE, mais s'est déclaré plus inquiet sur le segment du moyen terme en raison du « télescopage » des besoins de financement des émetteurs privés et publics.

M. Michel Camdessus a ensuite livré sa perception de la crise économique et financière. Il l'a présentée comme « la crise de trop », qui ne serait sans doute pas advenue si on avait pleinement tiré les leçons des crises mexicaine et asiatique dans les années quatre-vingt dix, et mis en oeuvre les mesures consensuelles qui avaient été proposées en 1997 et 1998 sur le rôle du FMI en matière d'alerte et de surveillance du secteur financier. Depuis, les marchés financiers ont prospéré sur les lacunes de la réglementation financière, contribuant à la croissance économique mais aussi à un dévoiement manifeste des pratiques.

Il a rappelé que la délégation française avait proposé, lors des travaux sur la modernisation du FMI de la fin des années quatre-vingt dix, une extension de son mandat au secteur financier, un renforcement de la composante politique du processus décisionnel et un élargissement de la représentation des pays émergents et en développement. Les textes modifiant les statuts du FMI étaient prêts et il ne restait plus qu'à en fixer la date d'application ; aussi a-t-il déploré que cette réforme majeure ait depuis été oubliée.

Il a salué l'ampleur et les objectifs des travaux préparatoires aux prochains sommets du G20, qui abordent enfin des sujets sensibles tels que les agences de notation, l'encadrement des fonds spéculatifs, les centres off shore ou la procyclicité des normes comptables internationales. Il a jugé que l'on ne peut désormais plus se contenter de demi-mesures.

En réponse à une question de M. Jean Arthuis, président, il a estimé que la crise, bien qu'apparue à la faveur des défaillances sur les prêts « subprimes », était inéluctable en raison du « pari » qui avait été pris sur la liquidité et du fait que l'on ne s'était pas vraiment donné les moyens de prévenir ce type de crise. Il a ainsi fait référence aux déclarations d'Alan Greenspan sur « l'exubérance irrationnelle des marchés » dès 1996, et au vote à l'unanimité, par le comité intérimaire en 1998, du principe de la réforme des statuts du FMI.

M. Philippe Adnot a constaté que l'on pallie aujourd'hui une crise de surfinancement privé par un surfinancement public.

M. Michel Camdessus a estimé qu'il est certes nécessaire de prendre des mesures proportionnés sur le court terme pour faciliter la relance économique et la liquidité, mais surtout de s'attacher rapidement aux problèmes structurels et de long terme, parmi lesquels le surendettement public et privé. Il a ainsi fait référence à son rapport de 2004 sur la croissance française et au rapport de M. Michel Pébereau sur la dette publique, remis fin 2005.

Evoquant le mandat du FMI, centré sur les questions monétaires et de change, M. Joël Bourdin s'est interrogé sur les évolutions institutionnelles qui doivent aujourd'hui être mises en oeuvre.

M. Michel Camdessus a exposé trois moyens traditionnellement utilisés pour remédier aux grandes crises de crédit et d'endettement : l'inflation, qui selon lui « lamine » les classes moyennes ; le report du coût sur les actionnaires par des faillites bancaires ; et le transfert de la charge sur les générations suivantes. Il a confirmé la nécessité d'élargir le mandat du FMI pour en faire une autorité mondiale en matière financière. Cette évolution, malgré la prise de conscience consécutive aux crises mexicaine et asiatique, s'est cependant heurtée à des résistances durant l'actuelle décennie, nées de la croyance en l'autorégulation des marchés. Les principes de la réforme, tant sur le mandat du FMI que sur sa gouvernance plus politique, étaient pourtant inscrits dans les statuts du Fonds dès les Accords de la Jamaïque de janvier 1976.

Le FMI est également confronté à un sérieux problème de ressources. Pour que la taille du bilan du FMI soit cohérente avec l'évolution des volumes traités sur les marchés financiers, il serait, selon lui, nécessaire de doubler les quote-parts des Etats membres. Compte tenu du délai requis par le processus de ratification dans chaque pays, le Fonds devrait, entretemps, pouvoir emprunter auprès de ses membres ou des fonds souverains.

Il a également confirmé l'appréciation de M. Pierre Bernard-Reymond sur l'impact, en termes d'endettement et de déséquilibre des flux mondiaux de capitaux, des besoins de financement des Etats-Unis pour mener deux guerres, comme ce fut déjà le cas avec la guerre du Vietnam. Les intérêts des Etats-Unis, qui s'endettent auprès du reste du monde, convergent cependant avec ceux des grands pays émergents, qui disposent d'importantes réserves, le cas échéant amplifiées par la sous-évaluation de leur devise. Il a donc jugé aujourd'hui nécessaire d'accroître le taux d'épargne des ménages américains et de réévaluer le yuan chinois.

M. Michel Camdessus a ensuite partagé l'avis de M. Jean Arthuis, président, sur l' « indécence » des bonus versés par certaines banques américaines pour leurs activités de marché, alors même qu'elles ont pu bénéficier du soutien de l'Etat. Ce constat rejoint la triple nature de la crise actuelle, qui porte à la fois sur les failles de la régulation - manifestées par l'ampleur du hors-bilan et des crédits hypothécaires -, l'architecture financière dans son ensemble - du fait de l'absence de surveillance centralisée -, et le défaut d'éthique qui exacerbe l'appât du gain.

S'il est difficile de mettre en oeuvre une réforme d'ordre éthique, il faut à tout le moins « sortir du déni » et se livrer à une prise de conscience collective. Les professions financières devraient ainsi, selon lui, se doter de codes de déontologie beaucoup plus exigeants, notamment en matière de formation à la commercialisation des produits, actuellement trop axée sur la maximisation du profit par opération. De même, il a appelé à une meilleure promotion de la responsabilité sociale et environnementale des entreprises.

Enfin, en réponse à une question de M. Philippe Adnot sur les leçons de la crise asiatique de la fin des années quatre-vingt dix, il a souligné que si cette crise n'est pas exactement de même nature que l'actuelle, les pays d'Asie concernés, en particulier la Corée, n'en ont pas moins accepté des ajustements de grande ampleur et conduit des réformes structurelles qui leur ont permis de s'extraire d'une situation de quasi-banqueroute en moins de deux ans. A l'inverse, le Japon a longtemps tardé à prendre les mesures nécessaires.

M. Jean Arthuis, président, a conclu en appelant la France à des réformes centrées sur la compétitivité.

Jeudi 19 février 2009

- Présidence de M. Jean Arthuis, président -

Développement économique de l'outre-mer - Examen du rapport

La commission des finances a procédé à l'examen du rapport de MM. Eric Doligé et Marc Massion et a établi le texte proposé par la commission pour le projet de loi n° 496 (2007-2008) pour le développement économique de l'outre-mer.

M. Jean Arthuis, président, a noté que la commission applique pour la première fois la nouvelle procédure prévue par l'article 42 de la Constitution, dans sa rédaction issue de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. Celle-ci modifie en profondeur les règles d'examen des textes, en prévoyant que la discussion des projets et des propositions de loi porte, en séance, sur le texte adopté par la commission saisie au fond. Ces dispositions entrent en vigueur le 1er mars 2009.

Il a indiqué que, à l'issue de cette réunion, la commission adopterait un texte sur lequel se prononceront les commissions pour avis, lors de leurs réunions du mercredi 4 mars 2009. La commission des finances examinera ensuite jeudi 5 mars et, éventuellement, lundi 9 mars 2009, les amendements extérieurs au présent projet de loi, et invitera les rapporteurs pour avis qui le souhaitent à venir présenter leurs amendements lors de cette réunion. M. Jean Arthuis, président, a observé qu'à cette occasion seront également examinés les amendements du Gouvernement, dont celui-ci a annoncé le dépôt et qui devraient traduire les annonces du Président de la République pour répondre à la situation de crise qui frappe notamment les Antilles. La discussion générale en séance publique pourrait débuter mardi 10 mars.

Il a rappelé que la réforme de la procédure parlementaire se traduit par le découpage de la séance publique en quatre temps : deux semaines par mois seront désormais consacrées au débat parlementaire à l'initiative prioritaire du Gouvernement, une semaine sera dédiée au contrôle et à l'évaluation des politiques publiques, et enfin, une semaine sera réservée aux initiatives législatives sénatoriales. Dans ce contexte, il a jugé opportun que le nombre d'amendements déposés permette de cerner les enjeux essentiels du projet de loi, sans entraîner un accroissement déraisonnable de la durée de la séance publique.

M. Jean Arthuis, président, a ensuite donné la parole aux co-rapporteurs.

M. Marc Massion, co-rapporteur, a indiqué que le Sénat a été saisi du projet de loi pour le développement économique de l'outre-mer le 28 juillet dernier.

Il a souligné le contexte particulier dans lequel s'inscrit l'examen de ce texte marqué d'une part par la situation économique difficile de l'outre-mer, et d'autre part par une crise de grande ampleur. Les mouvements sociaux qui ont commencé en Guadeloupe, ont atteint la Martinique et semblent gagner désormais La Réunion et la Guyane. De cette situation découlent un certain « décalage » des dispositifs proposés par le projet de loi, qui n'ont pas été prévus pour répondre à la situation actuelle, et la certitude que le Gouvernement amendera très largement les dispositions soumises au Sénat.

M. Marc Massion a rappelé qu'il s'est prononcé, à titre personnel, en faveur du report de l'examen du projet de loi. Il a demandé que la possibilité lui soit donnée d'exprimer, au sein du rapport, son opinion propre sur le projet de loi.

Il a ensuite précisé que la principale mesure du texte est la création, dans les départements d'outre-mer, de « zones franches d'activité » offrant des avantages fiscaux aux entreprises, conformément à un engagement pris par le Président de la République lors de la campagne pour les élections présidentielles. Ces zones franches s'appliqueront à la très grande majorité des PME des départements ultra-marins et consistent en des abattements de 50 % des bases d'impôt sur les bénéfices, de taxe professionnelle et de taxe foncière sur les propriétés bâties, dans la limite d'un plafond annuel de 150.000 euros. Certaines zones géographiques et certains secteurs bénéficieront d'un abattement préférentiel égal à 80 % des bases d'imposition.

M. Marc Massion a précisé que le projet de loi prévoit également l'ajustement de dispositifs fiscaux déjà en place dont l'efficacité s'est révélée incertaine. Ainsi, le taux de la réduction d'impôt consentie au titre des navires de plaisance dans les DOM est-il abaissé de 70 % à 50 %. Dans la même perspective, les collectivités d'outre-mer devront avoir signé une convention fiscale avec l'Etat pour bénéficier de la défiscalisation. De même, la TVA dite « non perçue récupérable » (TVA NPR), dispositif permettant aux entreprises d'outre-mer de récupérer la TVA, y compris sur des importations de biens qui en étaient exonérés, est-elle réformée et encadrée par le projet de loi

M. Marc Massion a expliqué que l'action en faveur du logement est l'un des axes du texte soumis au Sénat. Il a rappelé que les territoires d'outre-mer connaissent une situation tendue en la matière. Pour y remédier, le dispositif de défiscalisation est recentré sur le seul logement social. Le dispositif actuel favorise, en effet, le logement à loyer libre, pour lequel la demande est faible, entraîne un renchérissement du coût du foncier et monopolise les entreprises de construction, créant ainsi un effet d'éviction au détriment des structures de type HLM.

M. Eric Doligé, co-rapporteur, a indiqué que, d'après les chiffrages fournis par le Gouvernement, la dépense totale nette supplémentaire prévue par le présent projet de loi en faveur de l'outre-mer est relativement modeste, soit 22 millions d'euros. Cette somme est le résultat de la compensation entre le coût des zones franches d'activités, soit 224 millions d'euros, et les gains résultant de la réforme de la TVA NPR et des exonérations de charges sociales, soit respectivement 124 millions d'euros et 138 millions d'euros. Cet équilibre financier est complété par l'aide aux intrants et aux extrants, compensant partiellement pour les entreprises le coût d'acheminement des produits, estimée à 27 millions d'euros, et la création d'un fonds exceptionnel d'investissement. Ce dernier devrait être doté de 40 millions d'euros par an afin d'aider les collectivités d'outre-mer à financer de grands projets structurants. M. Eric Doligé a remarqué que l'équilibre global du projet de loi risque cependant d'être largement modifié par des mesures supplémentaires qui pourraient être annoncées par le Président de la République.

Il a estimé que le texte proposé par le Gouvernement opère essentiellement un déplacement budgétaire entre des niches fiscales, sous réserve que les nouvelles dépenses fiscales prévues soient évaluées à leur juste niveau, ce qui n'est pas certain. Il a donc recommandé de surveiller en particulier l'évolution du coût des zones franches d'activité, qui pourrait être supérieur aux évaluations initiales. Il a constaté que le projet de loi porte sur environ 250 millions d'euros, à comparer au montant global de la dépense fiscale en faveur de l'outre-mer, soit 3,3 milliards d'euros en 2009.

M. Eric Doligé s'est félicité que les recommandations de la commission des finances aient été entendues et trouvent leur traduction dans le texte soumis au Sénat. Sont ainsi réformés des dispositifs dont l'efficacité est limitée afin de réorienter les financements publics vers des mesures plus favorables à l'activité économique endogène des collectivités territoriales d'outre-mer, comme le préconise la commission. De même, la réforme du dispositif de la TVA NPR et la réorientation de la défiscalisation en matière de logement, au profit du logement social, correspondent à des orientations soutenues par la commission depuis plusieurs années. M. Eric Doligé a relevé que les réformes engagées reflètent également les conclusions de la révision générale des politiques publiques, ce qui doit être salué.

Il a indiqué que les amendements soumis à la commission peuvent être regroupés en trois ensembles :

- d'une part, l'encadrement du dispositif de défiscalisation, afin que le nouveau dispositif prévu par le projet de loi soit intégré au plafonnement des niches fiscales voté en loi de finances pour 2009 ;

- d'autre part, l'ajustement des plafonds et des seuils d'éligibilité prévus par les différents dispositifs du projet de loi à la situation réelle des collectivités d'outre-mer ;

- enfin, le report de l'entrée en vigueur de la majorité des dispositifs du projet de loi afin de tenir compte du délai écoulé depuis son dépôt.

Par ailleurs, le texte proposé par les rapporteurs comporte un certain nombre de rectifications de portée strictement rédactionnelle, qui ne font pas l'objet d'amendements mais qui seront insérées dans le projet de loi soumis à l'examen du Sénat en séance publique.

M. Jean Arthuis, président, a noté la forte attente suscitée par les prochaines annonces du Président de la République pour répondre à la situation des territoires d'outre-mer. Il a observé que le projet de loi pour le développement économique de l'outre-mer doit être adopté dans les meilleurs délais, contrairement à ce que préconisent certains sénateurs, afin de permettre la nécessaire évolution de l'économie ultra-marine. Il y a urgence en la matière, c'est toute une organisation qu'il faut repenser, à commencer par la fiscalité, totalement inadéquate. A titre d'exemple, l'octroi de mer garantit, certes, des ressources aux collectivités territoriales, mais c'est pour leur permettre d'aligner la rémunération de leurs fonctionnaires sur celle des fonctionnaires venus de métropole ; dans le même temps, il renchérit le coût des produits, de façon insupportable pour ceux qui ne bénéficient pas d'un statut privilégié. M. Jean Arthuis, président, a estimé que l'économie des territoires d'outre-mer n'est favorable ni à leur développement économique ni à leur cohésion sociale. Il a indiqué que le Sénat a décidé, dans ce contexte, de constituer une mission commune d'information chargée d'évaluer la situation outre-mer et de faire toutes propositions utiles pour trouver des solutions à moyen et long termes.

M. Jean-Claude Frécon a estimé que le projet de loi n'est pas examiné dans des conditions optimales : plus de six mois se sont écoulés depuis son examen en Conseil des ministres et l'urgence n'a été déclarée que récemment sur ce texte, alors qu'il est devenu en grande partie « obsolète », en raison du contexte économique et social nouveau des territoires ultra-marins. Il a relevé que l'application de la nouvelle procédure législative à un texte aussi sensible ne facilite pas son expérimentation. Il n'a pas ainsi été possible au groupe socialiste de déposer des amendements devant la commission dans le délai limite fixé.

M. François Trucy a admis que le contexte économique et social des territoires d'outre-mer a évolué depuis le dépôt du projet de loi. Il en a conclu que la nécessité d'apporter des réponses à ces situations de crise dans les meilleurs délais n'en est que plus impérieuse. Par ailleurs, il a observé que la possibilité d'entendre les rapporteurs pour avis qui souhaiteraient venir présenter leurs amendements devant la commission améliorera la procédure législative.

M. Charles Guené a jugé que les sénateurs sont capables de « légiférer en ligne », c'est-à-dire de s'adapter à l'actualité de sujets sensibles.

Mme Nicole Bricq a souhaité que les propositions d'amendements du Gouvernement permettent de répondre aux attentes des populations et des élus ultra-marins. Elle a expliqué que le report de ce texte aurait été d'autant plus légitime qu'il avait été préparé alors que la crise financière n'avait pas encore éclaté. Par ailleurs, le projet de loi ne remplit pas ses promesses : les zones franches d'activité qu'il prévoit de créer constituent en effet une position de repli par rapport aux zones franches globales initialement annoncées. Mme Nicole Bricq s'est étonnée que la constitution de zones franches dans les territoires d'outre-mer soit conditionnée à l'impératif de mise en oeuvre d'un développement économique endogène, alors que l'on n'a pas le même type d'exigence lorsqu'un département métropolitain bénéficie d'un dispositif similaire.

M. Jean Arthuis, président, a rappelé qu'à l'automne la session parlementaire a été consacrée au projet de loi de financement de la sécurité sociale, au projet de loi de finances, puis à deux projets de lois de finances rectificatives, et que l'inscription du projet de loi pour le développement économique de l'outre-mer à l'ordre du jour du Sénat en début d'année témoigne de l'importance qui est donnée à ce sujet. Il a observé que l'insularité des collectivités territoriales ultra-marines justifie un développement économique endogène de leurs économies. Enfin, il a souhaité que le Gouvernement dépose dans les meilleurs délais ses amendements sur le présent projet de loi, afin que les co-rapporteurs puissent les examiner dans de bonnes conditions.

Puis la commission a procédé à l'examen des amendements déposés sur le projet de loi.

M. Jean Arthuis, président, a présenté un amendement insérant un titre additionnel et un article additionnel avant l'article premier afin de prévoir la fixation, par décret en Conseil d'Etat, des prix de cent produits de première nécessité dans les départements d'outre-mer. Il a précisé que cette modification du projet de loi vise à ouvrir un dialogue sur ce sujet avec le Gouvernement.

Mme Nicole Bricq a souhaité savoir s'il est possible de réglementer les prix de produits sur une partie seulement du territoire français. Elle a estimé que le titre additionnel « Soutien au pouvoir d'achat » inséré par l'amendement du président ne correspond pas pleinement aux objectifs de l'article additionnel qui porte sur la fixation du niveau de prix et non sur l'augmentation des salaires. Elle a regretté cette inadéquation qui explique qu'elle s'abstiendra sur cet amendement.

M. Jean-Claude Frécon a défendu une position identique à celle de Mme Nicole Bricq.

M. Adrien Gouteyron s'est également demandé si des mesures spécifiques d'encadrement des prix peuvent être prévues pour les seuls territoires ultra-marins, et a apporté néanmoins son soutien au titre et à l'article additionnels proposés par l'amendement de M. Jean Arthuis, président.

M. François Trucy a noté que cet amendement est particulièrement opportun car il permet d'ouvrir un débat sur les modalités de fixation des prix dans les territoires ultra-marins, question régulièrement soulevée par la commission.

M. Charles Guené a estimé que cet amendement présente un intérêt certain, mais qu'il inscrit dans la loi des principes très contraignants. En Martinique, des négociations ont permis d'aboutir à l'encadrement des prix des produits de première nécessité. Favorable à ce type de procédure négociée, M. Charles Guené a déclaré qu'il s'abstiendrait donc sur la proposition du président de la commission.

M. Eric Doligé a souligné que les élus ultra-marins, et le Gouvernement, paraissent susceptibles d'approuver le présent amendement. Il a rappelé que le Gouvernement s'est déjà rallié à des positions défendues par les membres de la commission des finances, en matière notamment d'application du revenu de solidarité active (RSA) aux territoires d'outre-mer. Par ailleurs, il a observé que la réglementation des prix, permettant leur encadrement à des niveaux inférieurs à ceux imposés par l'existence de monopoles de distribution en outre-mer, serait incontestablement une mesure favorable au pouvoir d'achat.

En réponse aux intervenants, M. Jean Arthuis, président, a précisé que l'article L. 410-2 (deuxième alinéa) du code du commerce prévoit que dans les secteurs ou les zones où la concurrence par les prix est limitée en raison de situations de monopole ou de difficultés durables d'approvisionnement, un décret en Conseil d'Etat peut réglementer les prix après consultation de l'Autorité de la concurrence. Il a rappelé que celle-ci a d'ores et déjà été saisie par le secrétaire d'Etat à l'outre-mer de deux demandes d'avis concernant les conditions de la concurrence dans les départements d'outre-mer : l'une relative au prix des carburants, l'autre aux produits de consommation courante. Il a estimé que la limitation des prix est une mesure de soutien du pouvoir d'achat, au même titre qu'une augmentation des revenus.

La commission a adopté cet amendement.

A l'article 1er relatif à l'abattement sur les bénéfices de certains établissements situés dans les départements d'outre-mer, MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté, outre trois amendements rédactionnels, deux amendements :

- l'un repoussant l'entrée en vigueur des zones franches d'activité aux exercices clos à compter du 1er janvier 2009 ;

- l'autre supprimant la condition selon laquelle une entreprise qui souhaite être éligible aux zones franches d'activité doit consacrer, en dépenses de formation professionnelle, un montant de 500 euros par salarié.

La commission a adopté ces cinq amendements.

A l'article 2 relatif à l'abattement de taxe professionnelle pour certains établissements situés dans les départements d'outre-mer, MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté un amendement rédactionnel, que la commission a adopté.

A l'article 3 relatif à l'abattement de taxe foncière sur les propriétés bâties pour certains établissements situés dans les départements d'outre-mer, MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté deux amendements rédactionnels que la commission a adoptés.

Elle a adopté sans modification l'article 4 relatif à la durée d'application des exonérations de taxe professionnelle et de taxe foncière sur les propriétés bâties.

A l'article 5 relatif à la modification du régime de la défiscalisation en matière d'impôt sur le revenu pour les investissements productifs, MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté, outre trois amendements de coordination et de précision, deux amendements tendant :

- pour le premier, à supprimer le plafonnement de l'éligibilité des équipements de production d'énergies renouvelables à la défiscalisation ;

- pour le second, à prévoir une notification systématique au ministre du budget pour les opérations de défiscalisation mentionnées à l'article 199 undecies B du code général des impôts.

Après l'intervention de M. Jean Arthuis, président, la commission a adopté ces cinq amendements.

A l'article 6 relatif à la modification du régime de la défiscalisation en matière d'impôt sur les sociétés pour les investissements productifs, MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté, outre un amendement de précision, deux amendements :

- l'un supprimant le plafonnement de l'éligibilité des équipements de production d'énergies renouvelables à la défiscalisation ;

- l'autre prévoyant une notification systématique au ministre du budget pour les opérations de défiscalisation mentionnées à l'article 199 undecies B du code général des impôts.

La commission a adopté ces trois amendements.

Elle a adopté sans modification l'article 7 conditionnant la défiscalisation en matière d'impôt sur les sociétés à la conclusion d'une convention fiscale.

A l'article 8 relatif aux sanctions fiscales en cas de non-respect par l'entreprise locataire des engagements pris dans le cadre d'une opération de défiscalisation, MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté un amendement garantissant l'effectivité du dispositif de sanction, que la commission a adopté.

Elle a adopté sans modification l'article 9 étendant les sanctions pour déclaration frauduleuse aux cas où l'agrément n'a pas été obtenu et l'article 10 créant une aide abaissant le coût du fret pour les intrants et les extrants dans les départements d'outre-mer et à Saint-Pierre-et-Miquelon.

A l'article 11 relatif à la modification du régime des exonérations de charges sociales, MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté un amendement tendant, d'une part, à supprimer les dispositions de la réforme des exonérations de charges sociales, dans la mesure où ces dispositions ont déjà été adoptées dans le cadre de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 et, d'autre part, à repousser la date d'entrée en vigueur de cette réforme à la date de promulgation de la loi pour le développement économique de l'outre-mer.

La commission a adopté cet amendement.

MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté un amendement de suppression de l'article 12 relatif au maintien à Saint-Pierre-et-Miquelon du régime d'exonérations de charges sociales actuellement en vigueur, dans la mesure où cette réforme a déjà été adoptée dans le cadre de la loi de finances pour 2009.

La commission a adopté cet amendement.

A l'article 13 relatif à la création d'une aide à la rénovation des hôtels situés dans les départements d'outre-mer et à Saint-Pierre-et-Miquelon, MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté un amendement précisant les modalités de l'aide à la rénovation des hôtels afin de prendre en compte le contexte actuel de crise et de garantir au mieux l'efficacité du dispositif.

La commission a adopté cet amendement.

Elle a adopté sans modification l'article 14 exonérant de droits d'enregistrement les cessions de parts de copropriétés dans des résidences hôtelières défiscalisées sous l'empire de la loi « Pons ».

A l'article 15 relatif à la réforme du régime de la taxe sur la valeur ajoutée dite « non perçue récupérable » (TVA NPR) applicable en Guadeloupe, en Martinique et à La Réunion, MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté un amendement tendant à reporter l'entrée en vigueur de cette réforme.

La commission a adopté cet amendement.

A l'article 16 relatif à la création d'un fonds exceptionnel d'investissement outre-mer, MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté un amendement rédactionnel.

Après l'intervention de M. Jean-Claude Frécon, la commission a adopté cet amendement.

A l'article 17 relatif à l'autorisation des sociétés anonymes d'habitation à loyer modéré des DOM à devenir actionnaires de sociétés civiles immobilières, MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté un amendement de précision, que la commission a adopté.

Elle a adopté sans modification l'article 18 relatif à la remise sur le marché locatif de logements indivis vacants, et l'article 19 créant un groupement d'intérêt public visant à la reconstitution des titres de propriété pour les biens fonciers qui en sont dépourvus.

A l'article 20 relatif à la modification du dispositif de défiscalisation en matière de logement en outre-mer, MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté, outre deux amendements rédactionnels, quatre amendements tendant :

- le premier, à modifier le seuil et le plafond de surface habitable en dessous duquel les investissements sont éligibles à la défiscalisation ;

- le deuxième, à prévoir une notification systématique au ministre du budget pour les opérations de défiscalisation mentionnées à l'article 199 undecies B du code général des impôts, y compris celles qui ne nécessitent pas d'agrément ;

- le troisième, à repousser d'un an le calendrier de disparition de la défiscalisation « Girardin » en matière de logement intermédiaire ;

- le dernier, à augmenter le plafond de l'investissement défiscalisé et à garantir que son évolution prendra en compte la situation spécifique de chaque collectivité territoriale d'outre-mer en matière de coûts de la construction.

La commission a adopté ces six amendements.

Après l'article 20, MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté deux amendements insérant deux articles additionnels :

- le premier soumet l'avantage fiscal résultant du nouveau dispositif de défiscalisation du logement social créé par l'article 20 du projet de loi au plafonnement des niches fiscales prévu par la loi de finances pour 2009 ;

- le second prévoit, préalablement à la réalisation de la défiscalisation, l'envoi d'une notification aux collectivités territoriales concernées et la possibilité pour celles-ci de rendre un avis simple sur l'opération concernée.

La commission a adopté ces deux amendements.

A l'article 21 relatif à l'extension du champ de compétence de l'agence nationale de l'habitat (ANAH) à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon, MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté un amendement de coordination, que la commission a adopté.

Elle a adopté sans modification l'article 22 prévoyant la possibilité de cession à titre onéreux des parcelles libres de la zone dite des cinquante pas géométriques à toute personne physique ou morale, et l'article 23 prolongeant la durée de vie des agences de la zone dite des cinquante pas géométriques.

A l'article 24 relatif à l'indexation et à l'augmentation du plafond des taxes spéciales d'équipement au profit des agences de la zone dite des cinquante pas géométriques, MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté un amendement de coordination, que la commission a adopté.

A l'article 25 relatif à l'extension à l'ensemble des collectivités territoriales de Guyane et à leurs groupements des concessions et cessions d'immeubles domaniaux en vue de la constitution de réserves foncières, MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté un amendement de clarification.

La commission a adopté cet amendement.

Elle a adopté sans modification l'article 26 créant un fonds de continuité territoriale, l'article 27 supprimant le dispositif de soutien à l'emploi des jeunes diplômés, et l'article 28 supprimant l'exigence d'une domiciliation de la caution dans le ressort de la cour d'appel du contrat.

A l'article 29 relatif à la lutte contre l'orpaillage clandestin en Guyane, MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté un amendement de clarification, que la commission a adopté.

MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté un amendement tendant à supprimer l'article 30 prorogeant des autorisations délivrées par le conseil supérieur de l'audiovisuel aux services radios diffusés par voie hertzienne terrestre en Nouvelle-Calédonie, la mesure proposée ayant déjà été adoptée dans le cadre de l'article 24 de la loi, non encore promulguée, relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.

La commission a adopté cet amendement.

A l'article 31 relatif à la ratification de dix ordonnances et à la modification de l'organisation judiciaire à Mayotte, MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté deux amendements tendant à supprimer la ratification devenue sans objet des deux ordonnances.

La commission a adopté ces deux amendements.

A l'article 32 relatif à l'habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures nécessaires à l'extension, à l'adaptation ou à l'actualisation de dispositions législatives applicables à l'outre-mer, MM. Eric Doligé et Marc Massion, ont présenté deux amendements :

- l'un supprimant l'habilitation à prendre par ordonnance les mesures permettant l'extension de la télévision numérique terrestre aux collectivités d'outre-mer, compte tenu de l'adoption de cette mesure dans le cadre du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision ;

- l'autre supprimant les dispositions permettant de proroger un délai d'habilitation désormais forclos.

La commission a adopté ces deux amendements, après l'intervention de M. Jean-Claude Frécon.

A l'article 33 relatif à la création d'une Commission nationale d'évaluation des politiques de l'Etat outre-mer, MM. Eric Doligé et Marc Massion ont présenté trois amendements tendant à :

- préciser que les missions de la commission comprennent l'étude des mécanismes de formation des prix et notamment l'impact de l'organisation des circuits de distribution et de rémunération des fonctionnaires de l'Etat en outre-mer sur ces prix ;

- garantir que la commission disposera des informations nécessaires à l'évaluation des conséquences du projet de loi sur la formation professionnelle en outre-mer ;

- supprimer la disposition selon laquelle il reviendrait à un décret d'organiser une commission composée majoritairement de parlementaires.

La commission a adopté ces trois amendements.

Puis, elle a adopté le texte du projet de loi ainsi rédigé.

Groupe de travail sur la crise financière et la régulation des marchés - Désignation des membres

Puis la commission a désigné MM. Bernard Angels, Jean Arthuis, Pierre Bernard-Reymond, Joël Bourdin, Mme Nicole Bricq, MM. Yvon Collin, Jean-Jacques Jégou, Gérard Longuet, François Marc, Philippe Marini, Albéric de Montgolfier, François Rebsamen et Bernard Vera, membres du groupe de travail sur la crise financière et la régulation des marchés.

Groupe de travail sur la fiscalité environnementale - Désignation des membres

Enfin, la commission a désigné Mme Nicole Bricq, MM. Eric Doligé, Thierry Foucaud, Christian Gaudin, Charles Guené, Pierre Jarlier, Mme Fabienne Keller, MM. Gérard Micquel, Aymeri de Montesquiou et Michel Sergent, membres du groupe de travail sur la fiscalité environnementale.