Mardi 28 avril 2009

- Présidence conjointe de M. Josselin de Rohan, président, et de M. Roland du Luart, président d'honneur du groupe d'amitié France-Amérique latine -

Rencontre avec les ambassadeurs des pays d'Amérique latine et de la Caraïbe (GRULA)

La commission a procédé à un échange de vues avec les ambassadeurs des pays d'Amérique latine et de la Caraïbe (GRULA) en France, en présence des présidents des groupes interparlementaires d'amitié concernés.

M. Josselin de Rohan, président, a rappelé que la France entretenait des relations anciennes avec l'Amérique latine et qu'elle était présente sur le sous-continent latino-américain au travers de la Guyane, de la Martinique et de la Guadeloupe.

Il a regretté que, en dépit d'une forte présence culturelle, marquée par l'influence des idées des Lumières et de la Révolution française et par l'existence de 250 alliances françaises et de 36 lycées français, les relations économiques entre la France et l'Amérique latine ne fussent pas encore suffisamment développées.

Il a cependant indiqué que, après avoir connu une certaine « éclipse », les relations politiques s'étaient nettement renforcées ces dernières années, notamment grâce aux récents déplacements du Président de la République au Brésil et au Mexique. Il a rappelé que la France et les pays d'Amérique latine partageaient des intérêts et des valeurs communes sur un grand nombre de sujets, tels que la démocratie, la diversité culturelle, la protection de l'environnement ou encore la lutte contre le trafic de drogue. Il a estimé que la France avait un rôle particulier à jouer pour favoriser l'intégration régionale de ce continent de 540 millions d'habitants, dans le respect de la spécificité de chacun des pays qui le composent, ainsi qu'un rapprochement entre l'Union européenne et l'Amérique latine, comme elle l'avait montré lors de sa présidence de l'Union européenne.

Il a considéré que, face à l'influence du grand voisin nord américain que sont les Etats-Unis d'Amérique, mais aussi à celle des puissances émergentes, comme la Chine, la Russie et l'Inde, les liens historiques et la communauté de valeurs et d'intérêts entre l'Europe et l'Amérique latine offraient une voie pour approfondir les relations entre la France et cette région, tant sur le plan bilatéral que multilatéral, en matière politique, économique et culturelle.

Son Exc. M. Jorge Alberto Lepra Loiodice, ambassadeur de l'Uruguay, président en exercice du GRULA, a remercié le président Josselin de Rohan pour l'initiative de cette réunion et s'est félicité de l'intérêt manifesté par le Sénat, au travers de la commission des affaires étrangères et de la défense et des groupes interparlementaires d'amitié concernés, pour l'Amérique latine et la Caraïbe. Dans le prolongement des propos du président Josselin de Rohan, il a jugé nécessaire de renforcer les relations politiques et économiques entre l'Union européenne et l'Amérique latine et il a estimé que la France avait un rôle particulier à jouer dans ce domaine.

M. Roland du Luart, président d'honneur du groupe d'amitié France-Amérique latine, président du groupe d'amitié France-Brésil, a indiqué qu'il revenait d'un déplacement au Brésil, dans le cadre du lancement de l'année du Brésil en France, et qu'il avait été frappé à cette occasion par les conséquences de la crise économique dans ce pays. Il a souhaité savoir si tous les pays d'Amérique latine étaient touchés par cette crise et il s'est demandé si le renforcement des relations économiques entre l'Union européenne et l'Amérique latine ne serait pas un moyen d'en limiter les effets.

Son Exc. M. Fernando Cepeda Ulloa, ambassadeur de la Colombie en France, s'est également félicité de cette initiative.

Il a indiqué que, si la crise économique avait débuté aux Etats-Unis et en Europe, elle était devenue une crise mondiale et qu'elle touchait plus particulièrement les pays exportateurs, comme la Chine ou les pays d'Amérique latine, même si ces derniers avaient déjà connu ces dernières années plusieurs crises financières ou économiques.

Citant l'exemple de la Colombie, il a rappelé que ce pays avait demandé un prêt de 10 milliards de dollars au Fonds monétaire international, pour faire face aux conséquences de cette crise.

Son Exc. M. Luis Fernando Avalos Gimenez, ambassadeur du Paraguay, s'est à son tour réjoui de cette initiative et de l'intérêt manifesté par le Sénat pour l'Amérique latine et la Caraïbe. Il a souligné l'intérêt de développer les échanges entre les parlementaires, en citant l'exemple du « Parlosur », qui regroupe les représentants des parlements des pays du Mercosur et dont la présidence est actuellement exercée par le Paraguay.

En réponse à Son Exc. M. Joaquin Rodezno Munguia, ambassadeur de la République du Salvador, M. Roland du Luart a précisé que le groupe d'amitié France-Amérique latine du Sénat, dont il avait assuré la présidence pendant dix-huit années et qui regroupait tous les pays d'Amérique latine et de la Caraïbe, avait été une première fois scindé en trois, à la demande du président René Monory, avec un groupe France-Mexique et pays d'Amérique centrale, un groupe France-Caraïbes, et un groupe d'amitié France-Amérique latine, avant que ce dernier soit à nouveau scindé en trois, à l'issue du dernier renouvellement sénatorial, avec un groupe France-pays du Cône Sud, un groupe France-pays andins et un groupe France-Brésil, qui regroupe également le Guyana et le Suriname. Il a expliqué que, au départ, l'existence d'un groupe unique s'expliquait par les liens noués avec la maison de l'Amérique latine à Paris, mais que, outre la difficulté d'assurer la gestion d'un groupe d'amitié comprenant une trentaine de pays, cette séparation avait l'avantage de multiplier l'intérêt des sénateurs pour cette région.

Revenant sur l'impact prévisible de la crise économique sur l'Amérique latine, Son Exc. M. Joaquin Rodezno Munguia, ambassadeur de la République du Salvador, a estimé que la crise aurait certainement un impact, même si, pour le moment, les effets ne sont pas aussi sensibles qu'on aurait pu le penser, étant donné que les Etats-Unis sont le premier partenaire commercial de l'Amérique latine et qu'ils sont eux-mêmes directement frappés par cette crise.

Il a jugé que, dans ce contexte, le renforcement des relations économiques entre l'Amérique latine et l'Union européenne serait de nature à atténuer les effets de la crise, étant donné que cela permettrait aux pays d'Amérique latine et des Caraïbes d'avoir accès à de nouveaux marchés en Europe et de ne plus dépendre du seul marché nord américain.

A cet égard, il a souligné l'importance de conclure rapidement les négociations sur l'accord entre l'Amérique centrale et l'Union européenne. Il a indiqué que les négociations sur le volet politique de cet accord et la coopération technique avaient bien progressé et qu'elles pourraient être achevées en juillet. Les discussions sur les relations commerciales et le libre-échange pourraient, quant à elles, durer un peu plus longtemps, mais il a estimé que cet accord pourrait être signé avant la fin de l'année et entrer en vigueur en 2010.

Son Exc. M. Jesus Arnaldo Perez, ambassadeur du Venezuela, a rappelé que le Venezuela était un pays producteur et exportateur de pétrole et que la forte fluctuation des prix des hydrocarbures -le prix du baril de pétrole étant passé de 150 dollars en 2007 à environ 50 dollars aujourd'hui- mettait ce pays dans une situation très difficile. Toutefois, si la forte baisse du prix du pétrole a contraint le gouvernement vénézuélien à modifier sensiblement son budget et à réduire d'environ 6 % les dépenses publiques, celui-ci a également manifesté la volonté politique de ne pas toucher aux programmes sociaux et de maintenir à leurs niveaux les dépenses dans les secteurs de la santé et de l'éducation, afin que ce ne soient pas les couches sociales les plus défavorisées qui supportent les conséquences de la crise.

Jugeant que les fortes variations du prix des hydrocarbures étaient préjudiciables à la fois aux pays exportateurs et aux pays importateurs, il a indiqué que le Venezuela avait pris des initiatives afin de nouer des partenariats avec certains pays, comme la Chine, qui devrait recevoir prochainement un million de barils de pétrole par jour, soit un peu moins que les Etats-Unis, qui reçoivent quotidiennement un million et demi de barils de pétrole du Venezuela, ainsi qu'en vue de favoriser l'intégration régionale des pays de l'Amérique latine et de la Caraïbe, notamment dans le cadre de l'Alternative bolivarienne pour l'Amérique latine (ALBA), lancée par le président Hugo Chavez.

Son Exc. M. Rogelio Sanchez Levis, ambassadeur de Cuba, a remercié le Sénat et le groupe d'amitié France-Caraïbes pour son action en faveur du renforcement des relations avec ce pays et la zone des Caraïbes.

Il a rappelé que les pays d'Amérique latine et de la Caraïbe disposaient de nombreux atouts, comme une grande stabilité politique et sociale, d'importantes ressources naturelles et un net développement économique ces dernières années, et qu'il existait une forte volonté politique de renforcer les relations avec l'Union européenne, notamment afin de faire contrepoids à l'influence des Etats-Unis. Il a estimé que les parlementaires avaient un rôle important à jouer afin de modifier la perception souvent fausse de ces pays dans l'opinion publique et chez les chefs d'entreprises européens.

Concernant les effets de la crise économique, il s'est déclaré moins optimiste, en jugeant que cette crise était une crise mondiale, longue et profonde, qui touche les fondements du système international. Il a indiqué que les effets de cette crise se faisaient déjà sentir à Cuba, avec une baisse du prix des produits exportés, une diminution du tourisme et une réduction des investissements, qui s'ajoutent au blocus économique imposé par les Etats-Unis depuis cinquante ans, même si Cuba dispose des deux atouts que sont l'absence d'actifs toxiques et une expérience ancienne de diversification des partenaires commerciaux en raison précisément du blocus.

Son Exc. M. Carlos De Icaza, ambassadeur du Mexique, a fait observer qu'il participait pour la première fois à une réunion conjointe au Sénat avec les ambassadeurs des autres pays d'Amérique latine et de la Caraïbe, et il s'est félicité à son tour de l'intérêt manifesté par la commission des affaires étrangères et de la défense et par le groupe d'amitié France-Mexique pour son pays et l'Amérique centrale.

S'agissant des conséquences de la crise économique mondiale, il a estimé qu'il y avait eu, lors de la réunion du G20 à Londres, une très grande identité de vues entre la France, d'une part, et le Brésil, l'Argentine et le Mexique, d'autre part, et il a rappelé la visite du Président de la République au Mexique, quelques jours avant ce sommet, ainsi que le rôle de la présidence française de l'Union européenne.

Relevant avec humour que, pour cette fois, les pays d'Amérique latine n'étaient pas à l'origine de la crise, il a estimé qu'il fallait résister à la tentation du protectionnisme et il a jugé qu'il fallait plutôt chercher la solution à cette crise du côté de l'Amérique du Nord.

Concernant les relations bilatérales, il a rappelé la forte présence française dans le domaine culturel et universitaire, illustrée par l'existence de 55 alliances françaises au Mexique et la présence de 3 500 étudiants mexicains en France, ou encore par le succès remporté par les auteurs mexicains lors du dernier salon du Livre, dont le Mexique était l'invité d'honneur, et il s'est félicité du renforcement des relations politiques, notamment à l'occasion de la visite du président de la République, tout en regrettant que les relations en matière économique ne soient pas au même niveau que les échanges culturels ou politiques.

Rappelant que de nombreux pays d'Amérique latine et d'Amérique centrale célèbreraient le bicentenaire de leur indépendance en 2009 ou en 2010, il a estimé que cela représentait une réelle opportunité pour la France, dont les idées avaient fortement influencé ces pays à cette époque-là, de renforcer sa présence dans cette zone.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam a indiqué qu'elle revenait d'un déplacement au Venezuela et qu'elle avait ressenti une certaine inquiétude de la part des chefs d'entreprises français établis dans ce pays du fait de l'insécurité juridique et politique, qui expliquait peut être le faible niveau des investissements français.

Son Exc. M. Jesus Arnaldo Perez, ambassadeur du Venezuela, a répondu que le Venezuela avait connu une véritable révolution, avec un renouvellement complet des élites et une quasi-disparition de l'opposition, uniquement par le recours à des élections et sans violence. Il a également souligné que le Venezuela avait toujours honoré ses engagements contractuels et que les entreprises françaises, comme Total, étaient présentes dans ce pays.

M. Jean-Marc Pastor, président du groupe d'amitié France-pays du Cône Sud, a exprimé le souhait que la France s'associe d'une manière ou d'une autre à la célébration par les pays d'Amérique latine et de la Caraïbe du bicentenaire de leur indépendance.

Son Exc. M. Marco Erazo, ambassadeur de l'Equateur, a indiqué que son pays célébrerait le 10 août prochain le bicentenaire de son indépendance et que, à cette occasion, une série de manifestations seraient organisées en France et, en particulier la publication d'un ouvrage écrit par des historiens français et équatoriens portant sur l'influence du siècle des Lumières en France sur le processus d'indépendance en Amérique latine.

Rappelant les nombreux atouts dont dispose l'Amérique latine, dont la possession de la plus grande réserve d'eau douce du monde, de la plus grande réserve d'oxygène et de biodiversité avec la forêt amazonienne, de réserves importantes d'hydrocarbures, une population de plus de 500 millions d'habitants d'un bon niveau d'éducation, un important développement économique ces dernières années, ainsi que des régimes démocratiques et une stabilité politique, qui vont de pair avec une diversité des orientations sans puissance tutélaire, il a estimé que la France, l'Union européenne et l'Amérique latine avaient tout intérêt à renforcer et à développer encore leurs relations.

M. Demetrio Carvalho, représentant de l'ambassade du Brésil en France, a indiqué que la crise économique avait un impact réel au Brésil, même si les fondamentaux de cette économie restaient solides, ce pays devant ainsi connaître une croissance économique positive cette année, grâce notamment au plan de relance du gouvernement.

Il a jugé que les relations bilatérales étaient excellentes, en rappelant la visite du Président de la République au Brésil en décembre dernier et la signature d'un partenariat stratégique entre les deux pays ou encore leur convergence de vues lors du sommet du G20 à Londres. Il s'est également félicité de l'intérêt croissant des entreprises françaises et brésiliennes pour des investissements réciproques.

S'agissant des relations entre le Brésil et l'Union européenne, il a mentionné les résultats du récent sommet Union européenne-Brésil, organisé sous la présidence française de l'Union européenne, mais il a rappelé l'importance de conclure les négociations du cycle de Doha dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce, ainsi que les discussions sur l'accord entre le Mercosur et l'Union européenne.

M. Michel Guerry a indiqué que, à l'occasion de la célébration du bicentenaire de l'indépendance du Pérou, en novembre 2009, une série de manifestations seront organisées avec une participation de la France, notamment autour de la figure de Napoléon, qui a eu une grande importance dans la région.

Après avoir souligné la densité et l'intérêt de ces échanges, M. Josselin de Rohan, président, et Son Exc. M. Jorge Alberto Lepra Loiodice, ambassadeur de l'Uruguay, président en exercice du GRULA, sont convenus de se réunir à nouveau autour de thèmes d'intérêt communs.

Mercredi 29 avril 2009

- Présidence de M. Josselin de Rohan, président -

Accord de stabilisation et d'association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres et le Monténégro - Examen du rapport

La commission a d'abord procédé à l'examen du rapport de M. Didier Boulaud sur le projet de loi n° 353 (2008-2009), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de l'accord de stabilisation et d'association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République du Monténégro, d'autre part.

M. Didier Boulaud, rapporteur, a tout d'abord rappelé que les Communautés européennes avaient conclu des accords d'association avec de nombreux Etats tiers, en particulier avec ceux du pourtour méditerranéen dans le cadre du processus de Barcelone.

Ces accords ont pour objectif d'offrir un cadre au dialogue politique et à la coopération. Des instruments financiers communautaires les complètent.

Les accords conclus avec les Etats des Balkans occidentaux, appelés accords de stabilisation et d'association (ASA), ont ceci de particulier qu'ils s'adressent à des Etats qui ont clairement vocation à adhérer à l'Union européenne à terme. Approuvée lors du Conseil européen de Feira, en 2000, la vocation européenne des Balkans a été confortée lors du sommet de Thessalonique en 2003.

Les ASA se situent donc, du point de vue de leurs exigences pour le pays signataire, à mi-chemin entre les accords d'association « classiques » et les traités d'adhésion.

La structure de l'accord avec le Monténégro est proche de celle de l'accord conclu avec l'Albanie, récemment examiné par la Commission et entré en vigueur le 1er avril 2009.

Cet accord est composé de 139 articles, répartis en huit titres, qui détaillent successivement les modalités du dialogue politique, de la coopération régionale, de la libre-circulation des marchandises, des travailleurs, des services et des capitaux, et de la coopération.

L'association vise à l'instauration d'une zone de libre-échange dans un délai de cinq ans.

M. Didier Boulaud, rapporteur, a indiqué que, tout comme les autres États des Balkans, le Monténégro bénéficiait d'une libéralisation asymétrique des échanges pour ses produits industriels et une partie de ses produits agricoles qui entrent sur le marché européen en franchise de droits et sans quota.

Un accord intérimaire, reprenant les stipulations de l'accord qui relèvent de la compétence communautaire, est entré en vigueur le 1er janvier 2008. La Commission européenne juge satisfaisante sa mise en oeuvre par le Monténégro. Le rapporteur a précisé que l'autorisation parlementaire portait par conséquent, pour l'essentiel, sur les modalités du dialogue politique.

Il a souligné que le Monténégro était un jeune Etat qui a proclamé son indépendance le 3 mai 2006. Il compte 13 812 km2 et 620 000 habitants. République de l'ex-Yougoslavie, le Monténégro est resté lié à la Serbie au sein de la fédération de Yougoslavie puis au sein de l'Etat commun de Serbie-et-Monténégro. La volonté d'indépendance de ce pays était clairement liée à la volonté d'adhésion à l'Union européenne et à celle de mettre fin à l'isolement qui caractérisait l'Etat commun de Serbie-et-Monténégro.

La construction de l'Etat monténégrin et la production de normes coïncident avec la marche vers l'Union européenne. C'est pourquoi les autorités monténégrines ont décidé de reprendre d'emblée l'acquis communautaire et ont adopté unilatéralement l'euro, en contravention avec les règles de la Banque centrale européenne.

L'économie du Monténégro, qui repose sur le tourisme, les services financiers et l'aluminium est fortement intégrée à celle de l'Union européenne.

M. Didier Boulaud, rapporteur, a souligné que dans son rapport de progrès sur le Monténégro, publié en novembre dernier, la Commission européenne décernait globalement un satisfecit à cet Etat pour l'accomplissement des réformes. Elle relevait cependant la faiblesse des capacités administratives du pays, la persistance de la corruption, en particulier sur la zone côtière et les insuffisances de la police et du système judiciaire. Les efforts du pays pour se conformer aux attentes de l'Union sont cependant réels et le Monténégro est un « bon élève ».

C'est également le cas en matière de coopération régionale, sur laquelle l'Accord met un accent particulier, afin que les Etats signataires ne se contentent pas de développer leur relation bilatérale avec l'Union européenne mais coopèrent entre eux à l'échelon régional. Le Monténégro entretient de bonnes relations avec l'ensemble de ses voisins, y compris avec la Serbie, malgré sa reconnaissance du Kosovo en octobre dernier.

M. Didier Boulaud, rapporteur, a ensuite évoqué la perspective d'adhésion du Monténégro, et plus généralement des Etats des Balkans, à l'Union européenne.

Il a rappelé que l'adhésion de la Croatie était envisagée à une échéance relativement brève, mais que, compte tenu de l'impasse dans laquelle se trouvait actuellement la réforme institutionnelle, certains Etats membres, dont l'Allemagne, plaidaient pour une « pause » dans l'élargissement après la Croatie.

Il a estimé indispensable, sans sous-estimer la question institutionnelle, de maintenir la dynamique des réformes dans ces Etats qui sont par ailleurs très conscients du long chemin qui leur reste à parcourir pour rejoindre l'Union. Il a considéré que certains d'entre eux, comme la Bosnie et la Serbie, n'étaient pas encore en mesure d'entrer pleinement dans cette dynamique. Pour la Bosnie, la réforme de ses institutions est clairement un préalable. Pour la Serbie, qui dispose d'un potentiel considérable, il lui faut d'abord faire le deuil des provinces perdues.

Il a souligné la nécessité de ne pas discréditer les forces politiques qui font campagne sur l'intégration européenne face à des mouvements nationalistes. La perspective de l'intégration est un levier très puissant, y compris lorsqu'une certaine fermeté est nécessaire.

Insistant sur le signal positif que constituerait la ratification de l'Accord de stabilisation et d'association à l'endroit du Monténégro, il a recommandé l'adoption du projet de loi.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

M. Josselin de Rohan, président, a considéré que la corruption persistant dans les Etats des Balkans était un réel sujet de préoccupation. Intégrée à l'Union européenne en 2007, la Bulgarie ne semble pas avoir réellement progressé sur ce sujet. A la lumière de cet exemple, la perspective de l'intégration à l'Union européenne peut-elle constituer une réelle incitation à lutter contre ce fléau ? Il a souligné la nécessité de la réforme institutionnelle de l'Union européenne avant d'envisager une nouvelle vague d'adhésion.

M. André Trillard a rappelé que la population du Monténégro était peu nombreuse et estimé que la perspective d'adhésion était un puissant moteur de réformes dans cette région, ce processus devant être soutenu.

M. Yves Pozzo di Borgo a appelé à la vigilance quant au développement des réseaux mafieux et des trafics dans la région des Balkans, dans la perspective d'une ouverture des frontières.

M. Jacques Blanc a souligné la nécessité de distinguer, dans l'immédiat, la question de l'association de celle de l'adhésion. Il est demandé à la commission de se prononcer sur un accord qui ne préjuge pas de l'adhésion.

Mme Nathalie Goulet a rappelé que le Monténégro avait été exemplaire dans l'accueil des réfugiés lors du conflit du Kosovo. Elle a indiqué que les progrès du Monténégro dans la voie démocratique étaient régulièrement soulignés par le Conseil de l'Europe.

M. Didier Boulaud, rapporteur, a apporté les éléments de réponse suivants :

- la ratification d'un Accord de stabilisation et d'association ne suppose pas d'accorder au pays signataire le statut de candidat. Le cas de l'Albanie, dont l'ASA vient d'entrer en vigueur et qui n'a formulé sa candidature que très récemment, en est une illustration. La Macédoine s'est vu reconnaître le statut de candidat en 2005, mais les négociations d'adhésion ne sont pas encore ouvertes ;

- la question institutionnelle est certes une difficulté mais le processus d'adhésion est très important pour la stabilité de la région. On peut également regretter la fragmentation des Etats, qui est un produit de l'histoire. La stabilisation de la région est loin d'être définitivement assurée comme en témoignent les incidents récents au Kosovo. Au Monténégro, la situation des minorités est satisfaisante. L'Union européenne a posé des exigences particulières pour l'indépendance du pays, lesquelles ont été satisfaites ;

- la corruption est une question ancienne pour les Balkans. L'objectif de l'ASA est précisément de renforcer les normes dans ce domaine. Les attentes des populations sont très fortes, et il convient d'y répondre. Les progrès sont très liés à l'espoir d'adhérer à l'Union européenne, tandis qu'un retour en arrière serait très contre-productif.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission a alors adopté le projet de loi et proposé que ce texte fasse l'objet d'une procédure d'examen simplifiée en séance publique.

Nominations de rapporteurs

La commission a ensuite nommé rapporteurs :

- M. Bernard Piras sur le projet de loi n° 310 (2008-2009) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Maurice relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure ;

- Mme Nathalie Goulet sur le projet de loi n° 311 (2008-2009) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume d'Arabie saoudite relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure et de défense civile ;

- M. Jean Besson sur le projet de loi n° 312 (2008-2009) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Bahreïn relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure et de défense civile ;

- M. Yves Pozzo di Borgo sur le projet de loi n° 313 (2008-2009) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République hellénique relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure ;

- M. André Trillard sur le projet de loi n° 314 (2008-2009) autorisant l'approbation de la convention relative à la coopération en matière de sécurité et de lutte contre la criminalité organisée entre le Gouvernement de la République française et la Grande Jamahiriya arabe, libyenne, populaire et socialiste ;

- M. Didier Boulaud sur le projet de loi n° 315 (2008-2009) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Conseil des Ministres de la République d'Albanie relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure ;

- M. Jacques Gautier sur le projet de loi n° 333 (2008-2009) autorisant la ratification de l'accord entre l'Irlande, le Royaume des Pays-Bas, le Royaume d'Espagne, la République italienne, la République portugaise, la République française et le Royaume-Uni de Grande Bretagne et d'Irlande du Nord, établissant un centre opérationnel d'analyse du renseignement maritime pour les stupéfiants ;

- M. Robert del Picchia sur le projet de loi n° 334 (2008-2009) autorisant l'approbation de la convention de partenariat entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire ;

- M. Xavier Pintat sur le projet de loi n° 335 (2008-2009) autorisant l'approbation de l'accord de coopération entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de l'Inde pour le développement des utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire ;

- M. René Beaumont sur la proposition de résolution européenne n° 339 (2008-2009) de Mme Annie David sur les relations entre l'Union européenne et l'Etat d'Israël.