Mercredi 15 juillet 2015

-Présidence de Mme Fabienne Keller, vice-présidente, puis de Mme Michèle André, présidente -

La réunion est ouverte à 10 h 04.

Suivi du contrôle de l'Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) - Contrôle budgétaire - Communication

Mme Fabienne Keller, présidente. - Nous entendons aujourd'hui une communication de Francis Delattre sur l'Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS).

M. Francis Delattre, rapporteur. - L'EPRUS n'est pas une province éloignée de la Grèce mais l'une des dix agences sanitaires cofinancées par la mission « Santé » du budget de l'État. Ce jeune établissement a été créé en 2007, sur le fondement d'une proposition de loi sénatoriale de notre défunt collègue Francis Giraud. L'EPRUS est chargé, d'une part, de la gestion des stocks nationaux de produits de santé constitués en cas d'attaques terroriste ou de pandémie, également appelés « stocks stratégiques » ; d'autre part, de la gestion administrative et financière de la « réserve sanitaire », qui constitue un corps de réserve de professionnels de santé mobilisable, en France et à l'étranger, en cas de menace sanitaire grave.

En 2009, peu avant le déclenchement de la crise de la grippe A/H1N1, l'un de mes prédécesseurs en tant que rapporteur spécial de la mission « Santé », Jean-Jacques Jégou, avait réalisé une mission de contrôle de cet établissement qui venait de naître. Il en soulignait alors les « faiblesses administratives et budgétaires » et émettait des doutes quant à son utilité, jugeant qu'il ne permettait pas de répondre aux difficultés antérieures de la direction générale de la santé. Il recommandait également de dresser un bilan de l'action menée au fil des années. La mission de contrôle que j'ai menée durant le premier semestre 2015 s'inscrit dans la suite de ces travaux.

Ajoutons que le projet de loi de modernisation de notre système de santé, qui sera examiné par la commission des affaires sociales la semaine prochaine, prévoit d'autoriser le Gouvernement à prendre une ordonnance pour regrouper l'EPRUS avec deux autres agences sanitaires, l'Institut national de veille sanitaire (InVS) et l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES) - au sein de la future agence nationale de santé publique. La pertinence du regroupement est claire dans le premier cas, même si elle l'est peut-être un peu moins dans le second. A la veille de cette fusion, il m'a paru d'autant plus utile de dresser le bilan de l'action de l'EPRUS depuis 2009.

Après avoir présenté la situation financière de l'établissement, je vous ferai part de mes principaux constats concernant la gestion des stocks stratégiques et de la réserve sanitaire - élément opérationnel qui doit absolument être préservé - avant de vous présenter mes principales recommandations.

L'EPRUS ne compte que 30 agents mais dispose d'un budget relativement conséquent. Ses dépenses se sont élevées à 41,3 millions d'euros en 2014. Ses ressources sont essentiellement constituées de deux subventions, l'une de l'État et l'autre de l'assurance maladie, normalement à parité.

Après avoir connu un pic en 2009 à la suite de la crise de la grippe A/H1N1 (791 millions d'euros au total), les subventions versées à l'EPRUS ont fortement diminué : après avoir oscillé aux alentours de 40 millions d'euros entre 2012 et 2014, les dotations prévues pour 2015 s'élèvent à environ 26 millions d'euros. Mais ceci a été possible au prix d'une mise à contribution des réserves de l'établissement, et notamment de son fond de roulement, qui était relativement important.

Ces dernières années, plus de 90 % des dépenses de l'EPRUS ont servi à l'acquisition et surtout à la gestion des stocks de produits de santé, tandis que la gestion de la réserve sanitaire ne représente qu'entre 3 et 4 millions d'euros chaque année. Je précise que la réserve sanitaire intervient souvent, à la demande du ministère des affaires étrangères, hors du territoire national.

S'agissant des stocks stratégiques, il n'est pas inutile de souligner deux points. Premièrement, l'EPRUS ne peut décider seul d'acquérir ou de renouveler des stocks. Il ne peut agir que sur ordre du ministre chargé de la santé. Dans les faits, les décisions du ministre résultent souvent des objectifs fixés au niveau interministériel par le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) et des avis du Haut Conseil de la santé publique (HCSP). Mais il convient de souligner la tutelle relativement étroite qui est exercée par le ministère chargé de la santé sur l'EPRUS. En second lieu, les informations relatives aux quantités et à la localisation des différents types de stocks constituent des données sensibles, dans le détail desquelles je n'entrerai donc pas.

Observons, tout d'abord, que la valeur des stocks stratégiques a été divisée par deux entre 2009 et 2014. Il a en effet été décidé de ne pas renouveler certains stocks arrivant à péremption. C'est une des difficultés à laquelle se heurte l'établissement que d'avoir à gérer ces stocks de médicaments « en fin de vie » - ce qui peut représenter des sommes très importantes.

La ministre chargée de la santé a décidé de développer une nouvelle modalité d'acquisition, via des contrats, aussi appelés « sleeping contracts », avec les fabricants de médicaments, par lesquels ces derniers garantissent la production et la fourniture en cas de pandémie. Malheureusement, l'appel d'offre qui a été lancé n'a pas rencontré un grand succès. C'est pourtant un mode de gestion plus intelligent que d'accumuler des stocks sur le site de Vitry-le-François. Il faut donc persévérer, en essayant de contractualiser avec les grands laboratoires.

Par ailleurs, pour certains produits qui sont considérés comme « stables » - comme les comprimés d'iode, dont il faut savoir qu'il en est également stocké dans un rayon de vingt kilomètres autour des centrales nucléaires - un dispositif dérogatoire au code de la santé permet de prolonger leur durée de validité en faisant figurer la date de fabrication et non la date de péremption. Ces stocks sont alors soumis à des contrôles de l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) afin de vérifier s'ils ne présentent pas de risques.

Sur la base de cette nouvelle doctrine, les besoins annuels en produits de santé sont estimés, au total, à 33 millions d'euros par an sur la période 2016-2018.

Outre la plate-forme nationale de Vitry-le-François, d'autres sites de stockage existent, au nombre d'une quinzaine contre 38 auparavant, ce qui permet d'améliorer la connaissance réelle des stocks et de réduire le coût du stockage, passé de près de 19 millions d'euros en 2010 à 8 millions d'euros en 2014.

Quant au coût de construction de la plateforme centralisée de Vitry-le-François, mise en place en 2013 et 2014, il a été conforme aux prévisions, soit 33 millions d'euros. Il s'agit d'un investissement conséquent mais qui devrait permettre de dégager entre 1 et 1,5 million d'euros d'économies par an.

Enfin, le nouvel outil informatisé de suivi des stocks permet désormais d'assurer une cohérence presque parfaite entre les stocks physiques et les stocks recensés. Le seul bémol est que les inventaires physiques sont réalisés sur deux à trois ans et non chaque année, ce qui a conduit le commissaire aux comptes à émettre une réserve dans le cadre de la certification des comptes de l'EPRUS pour l'exercice 2014.

J'en viens à la réserve sanitaire, dont le nombre de volontaires est passé, entre 2010 et 2014, de 500 à 2 000. Elle est composée de volontaires des professions paramédicales ou médicales, avec une majorité de retraités et d'étudiants, mobilisés en premier lieu pour éviter de désorganiser l'offre de soins. Ce sont eux que nous avons vus, dans les gymnases, lors de l'opération de vaccination en masse contre la grippe H1-N1 dont nous avons tous gardé un souvenir ému... Se pose également la question de leur rémunération. Le coût est relativement élevé : autour de 700 euros par jour pour les médecins, les retraités ne touchant que 53 % de ce montant.

La réserve sanitaire de l'EPRUS a réalisé une cinquantaine de missions, dont environ 35 à l'étranger, en particulier à la demande du centre de crise du ministère des affaires étrangères. À ses débuts, la réserve sanitaire est ainsi fréquemment intervenue pour des rapatriements de ressortissants français dans des zones de conflits ou de crise sanitaire. Le nombre d'interventions a fortement augmenté en raison de l'épidémie de chikungunya en Guadeloupe et en Martinique et surtout de l'épidémie d'Ebola en Afrique de l'Ouest. Par ailleurs, des réservistes de l'EPRUS ont apporté un renfort au centre hospitalier de Sens lors de l'épidémie de grippe saisonnière.

Pour conclure, je veux souligner que l'EPRUS est un outil réactif, bien adapté aux situations dans lesquelles il est censé intervenir. Cette spécificité doit être préservée dans le cadre de la fusion avec l'InVS et l'INPES. Or, la réactivité de l'établissement tient essentiellement à sa réserve sanitaire, qui est récemment intervenue en Guinée pour aider la Croix Rouge française dans la mise en place du centre de traitement de Macenta, mais aussi au Mali et à l'aéroport de Roissy pour le contrôle sanitaire aux frontières. L'EPRUS a également fourni un important travail d'expertise et d'approvisionnement en housses de transport. Enfin, lors de la crise d'Ebola, l'EPRUS a renforcé sa collaboration avec ses partenaires, en particulier l'InVS - preuve que le rapprochement entre ces deux établissements peut favoriser les synergies -, le service de santé des armées, qui collabore étroitement avec l'EPRUS dans ses achats de médicaments, et la cellule de crise du ministère des affaires étrangères.

J'en viens aux principales recommandations que m'ont inspirées ces travaux.

Tout d'abord, j'estime que le projet de regroupement de l'EPRUS avec l'InVS et l'INPES au sein de la future Agence nationale de santé publique est pertinent. À condition de conserver, comme je l'ai dit, la spécificité de l'EPRUS, et notamment sa réserve sanitaire qui garantit la réactivité des interventions. Ce qui suppose de préserver une certaine autonomie des fonctions au sein de la future agence, en même temps que des synergies se mettront en place.

Il serait également utile de stabiliser en volume, pour les trois années à venir, le niveau des subventions versées à la future agence nationale de santé publique. Entre 2010 et 2015, les budgets des trois établissements ont beaucoup diminué - de 33 % pour l'INPES, de 10 % pour l'InVS et de 40 % pour l'EPRUS. La diminution du budget de l'EPRUS s'explique certes par la fin de l'effort d'investissement à Vitry-le-François et l'absence de renouvellement de certains stocks. Il serait bon que les dotations soient stabilisées au niveau de 2014 dans les années à venir, même s'il faudra engager un investissement immobilier de 12 millions d'euros afin de regrouper les équipes sur le site de Saint-Maurice.

Le principe du cofinancement à parité entre l'État et l'assurance maladie, auquel les équipes sont très attachées, doit être maintenu dans le cadre de la future agence. Afin de renforcer l'autonomie de l'agence et son rôle d'expert, celle-ci pourrait en outre être autorisée à transmettre formellement au ministre chargé de la santé des propositions en matière d'acquisition et de renouvellement des stocks stratégiques. L'EPRUS a, de fait, acquis un savoir-faire qui pourrait être utile à l'établissement des commandes.

La réservation de capacités de production de produits de santé, via une contractualisation avec les laboratoires, est un outil à soutenir et développer - en dépit de ses difficultés. Il faut aussi développer les achats groupés, avec le service de santé des armées et les établissements de santé dépositaires de stocks dits « tactiques ».

Il conviendrait également de promouvoir, au niveau européen, un statut juridique spécifique pour les produits relevant des stocks stratégiques nationaux afin de permettre l'allongement de leur durée de conservation.

Enfin, lorsque le rapport coûts-avantages le justifie, les stocks stratégiques de produits d'usage courant arrivant à péremption dans les six mois pourraient être remis dans le circuit et transférés aux établissements de santé, ce qui permettrait quelques économies.

Il est impératif d'achever le pré-positionnement de stocks stratégiques permettant de répondre à des menaces épidémiques pendant les 72 premières heures d'une crise, dans tous les départements d'outre-mer, notamment Mayotte, la Martinique et la Réunion.

Il convient également de suivre avec attention l'achèvement des plans départementaux de distribution exceptionnelle de produits de santé. Car si 90 % d'entre eux sont terminés, 10 % restent encore inachevés. Ceci est important, car c'est grâce à eux que ces produits arriveront le plus rapidement aux citoyens.

Deux autres recommandations concernent le rôle d'appui de l'EPRUS et de la future agence nationale de santé publique aux agences régionales de santé (ARS). Ces dernières demandent à être davantage consultées, et il est bon, de fait, de partager les expériences pour assurer le meilleur service possible.

Sachant que beaucoup de réservistes sont des professionnels de santé en activité, il serait utile d'identifier lesquels sont directement concernés en cas de pandémie, afin que la mobilisation dans la réserve ne déshabille pas l'offre de soins. Les réservistes de l'EPRUS devraient également, pour une meilleure coordination, déclarer leur éventuelle appartenance à un autre corps de réserve.

Concernant la grille d'indemnisation des réservistes, malgré une récente refonte et l'apport du projet de loi de modernisation de notre système de santé sur certains points, la possibilité de mettre en place une grille d'indemnisation spécifique des réservistes participant à des opérations de soutien humanitaire pourrait être étudiée - en particulier pour les retraités et les étudiants.

En conclusion, cinq ans après la précédente mission de contrôle de notre ancien collègue Jean-Jacques Jégou, j'estime que l'EPRUS a progressé. Il est devenu un outil utile et indispensable. Ce qui ne veut pas dire que son regroupement avec deux autres agences, dont la complémentarité apparaît certes plus ou moins nettement, ne soit pas justifié. J'en ai discuté avec le président de la commission des affaires sociales, d'abord réticent, mais qui reconnaît que cela facilitera les synergies. C'est une nouvelle orientation pour l'EPRUS, dont il faudra veiller, au sein de la future agence nationale de santé, à préserver la spécificité, garante de sa réactivité sur le terrain.

Mme Fabienne Keller, présidente. - Merci de ce rapport très complet sur l'unité opérationnelle qu'est l'EPRUS.

M. Philippe Dallier. - Si j'ai bien compris, la décroissance des stocks n'est pas seulement liée au fait que l'on se soit enfin débarrassés des stocks accumulés au moment de la crise de la grippe H1-N1, en en vendant une partie...

M. Francis Delattre, rapporteur. - Les fameux masques...

M. Philippe Dallier. - Et tout ce qui allait avec. Cela dit, a-t-on tiré les enseignements de cette affaire ? A-t-on amélioré les conditions dans lesquelles sont passés les contrats entre l'État et les fabricants de médicaments ? Je m'interroge également sur la distribution de médicaments. Imaginons le pire, une catastrophe à Nogent-sur-Seine ; imaginons que le nuage décide de ne pas s'arrêter à la frontière de l'Ile-de-France... Qui est alors responsable de la distribution sur le terrain ? Bien que maire, depuis vingt ans, d'une modeste commune de 22 000 habitants, je n'ai pas souvenir d'avoir été informé du détail du dispositif. Si les sirènes retentissaient un beau matin et qu'il faille rapidement distribuer ne serait-ce que des pilules d'iode, j'aimerais savoir qui en a la charge et comment les collectivités sont associées au mécanisme.

M. Francis Delattre, rapporteur. - En effet, je n'ai découvert que récemment que le préfet était responsable de la distribution dans un tel cas, une fois que l'EPRUS avait été saisi par le ministre chargé de la santé. Au plan départemental, la mise en place des dispositifs de réponses est assurée par les services de l'État, aux niveaux central et déconcentré, via les services préfectoraux et en collaboration avec les maires.

Mme Fabienne Keller, présidente. - Mais l'achat des masques, à l'époque, relevait des communes.

M. Francis Delattre, rapporteur. - Le Gouvernement a fait en sorte que les entreprises, les administrations constituent aussi des stocks, et les financent.

Sur les médicaments, il y a eu une erreur d'appréciation, si bien qu'ensuite, l'établissement s'est retrouvé avec un fond de roulement très important, du fait de l'annulation d'une grande partie des commandes de vaccins.

M. Éric Doligé. - Si j'ai bien compris, c'est l'État qui s'est chargé de l'achat des médicaments, alors que pour les masques, les collectivités, les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS), les entreprises ont également été appelés à contribuer. Une évaluation du coût pour chaque entité a-t-elle été menée ? D'autres produits peuvent-il éventuellement être mis à la charge d'autres entités que l'État ?

M. Francis Delattre, rapporteur. - N'oublions pas que l'EPRUS est financé à 50 % par l'État et à 50 % par l'assurance maladie. Les achats importants de médicaments ont donc été cofinancés. Il y a eu un peu d'improvisation au départ, mais aujourd'hui, le système s'est rationalisé. Pour les médicaments et tout ce qui est nécessaire à la protection des citoyens, il y a désormais trois niveaux : le site de Vitry-le-François, les plates-formes de l'EPRUS, dans chaque zone de sécurité et de défense, les stocks « tactiques » dans certains établissements de santé et enfin, pour la protection nucléaire, certains stocks sont situés dans les SDIS. Au-delà, est assurée une gouvernance nationale, relayée au niveau des départements. Le système n'a plus rien à voir avec ce qu'il était il y a dix ans.

M. Marc Laménie. - Le budget de l'EPRUS est financé paritairement par l'État et l'assurance maladie, avez-vous indiqué. On peut se demander si la ressource est pérenne et si le budget est susceptible d'évoluer, dans un contexte de maîtrise des dépenses.

Quel est le lien entre l'EPRUS et l'INPES, qui envoie une abondante documentation aux communes, notamment dans le cadre du plan canicule ? La création de la future Agence nationale de santé publique apportera-t-elle des simplifications et des économies ?

M. Francis Delattre, rapporteur. - Il s'agit de créer des synergies entre les trois établissements que j'ai mentionnés. La veille sanitaire a besoin d'un opérateur qui déclenche des procédures dont l'EPRUS est l'un des acteurs. La nouvelle agence doit pouvoir compter sur les dotations actuelles, qui ont déjà été sérieusement réduites - de 40% pour l'EPRUS. Les missions quotidiennes de l'INPES sont certes assez éloignées de celles de l'EPRUS, mais l'Institut peut assumer une mission d'information et de communication en cas de crise. C'est pourquoi je pense que l'ensemble est assez cohérent.

Au total, la nouvelle agence devrait employer quelque 550 personnes - l'INPES compte actuellement 127 équivalents temps plein (ETP), l'InVS, 392 et l'EPRUS, 30. Il est vrai qu'avec ce maigre effectif, il pourra être un peu difficile pour l'EPRUS de conserver sa spécificité. Mais les missions des trois établissements sont largement imbriquées. J'ajoute que l'EPRUS a fait beaucoup d'efforts de rationalisation tant sur le site de Vitry-le-François que sur ses plateformes zonales. Je pense qu'il est utile de rassembler ces établissements, même s'il est vrai que cela peut présenter un risque, sachant que l'EPRUS est un outil qui s'est créé sur le terrain et qui s'est montré très opérationnel.

- Présidence de Mme Michèle André, présidente -

Mme Fabienne Keller. - Merci à notre rapporteur, qui s'est attaché à rappeler le caractère très opérationnel de l'outil. Souvenons-nous que l'EPRUS est également intervenu lors de la crise de la dengue qui a sévi l'an dernier en Martinique et en Guadeloupe, touchant 25 000 personnes dans chaque île.

Dans les périodes où ne sévit aucune pandémie, un tel outil paraît toujours trop coûteux, mais en période de crise, on juge à l'inverse qu'il n'est pas assez puissant. La comparaison est peut-être un peu osée, mais j'ai envie de dire que l'EPRUS est, comme les opérations extérieures de l'armée, notre outil d'intervention en cas de crise. Je soutiens donc le rapporteur quand il s'inquiète de la préservation de la capacité opérationnelle de l'EPRUS à mobiliser et à projeter sa réserve en réponse à des crises.

Vous soulignez l'importance des réservistes. Or, j'ai cru comprendre que le regroupement entrainerait un déplacement des sites de formation, avec un risque d'éloignement des transports en commun, alors que des centaines de personnes s'y rendent pour se former. Confirmez-vous cette difficulté ? Les capacités de formation sont-elle bien, dans le cadre de ce regroupement, préservées ?

Dans un rapport que j'ai rendu avec Roger Karoutchi, au nom de la délégation à la prospective, sur les maladies infectieuses, j'avais insisté, comme viennent de la faire Philippe Dallier et Éric Doligé, sur la nécessité de tirer les enseignements des épisodes épidémiques précédents. La formule opérationnelle serait de faire, sur le modèle militaire, un exercice grandeur nature pour revisiter les épisodes de la grippe H1-N1, du virus Ebola ou encore de la dengue, pour voir comment mieux s'organiser et mobiliser des acteurs complémentaires. L'EPRUS doit être naturellement au coeur d'un tel exercice de simulation, qui permettrait de bien comprendre quels acteurs, aux niveaux français et européen, il est nécessaire de mobiliser.

Éric Doligé a rappelé l'épisode de l'achat de masques, au moment de la grippe H1-N1, dont nous avons tous gardé le souvenir. On peinait alors à comprendre s'il fallait en prévoir pour les seules personnes sensibles, pour tout le monde ou si l'on pouvait prévoir un stock couvrant la moitié de la population sachant que l'investissement était onéreux. Une simulation permettrait d'identifier les charges collatérales, que ce soit en cas de pandémie ou d'incident nucléaire.

Mme Michèle André, présidente. - Vous préconisez d'obliger les réservistes de la réserve sanitaire à déclarer leur appartenance à d'autres corps de réserve. A-t-on idée du nombre de personnes concernées ?

Il avait été question, à la suite de la pandémie grippale de 2009, d'une initiative au niveau européen pour réaliser des achats groupés de vaccins. Ce projet a-t-il vu le jour ?

M. Francis Delattre, rapporteur. - Les formations ont, en partie, lieu sur le site de Saint-Denis ; elles devraient donc être transférées vers le nouveau siège. Mener un exercice de simulation national ? L'idée est intéressante mais dépasse le cadre de mon rapport. C'est une question qu'il faudra poser en séance, lors de l'examen du projet de loi de modernisation de notre système de santé.

Le problème qui se pose au niveau européen, madame la présidente, concerne surtout la règlementation et la nécessité de pouvoir prolonger la conservation de certains produits coûteux. C'est là-dessus qu'il convient de travailler. Les 30 agents de l'EPRUS sont essentiellement des logisticiens. Ils travaillent en collaboration étroite avec le service de santé des armées. Je rappelle que les interventions de l'EPRUS ne se limitent pas aux pandémies, elles peuvent aussi concerner un problème nucléaire ou les conséquences d'une attaque terroriste. Il est normal que le ministère de la défense soit aussi impliqué.

Sur les quelques 2 000 réservistes, 1 000 sont retraités ou étudiants, tandis que les 1 000 autres sont déjà impliqués dans la couverture sanitaire du pays. C'est pourquoi j'estime qu'il faut clairement savoir les distinguer. Dans les interventions à l'étranger, on peut faire des équipes mixtes, associant des professionnels à de purs réservistes. Mais en cas de mobilisation générale sur le territoire, il faut prévoir plusieurs stades et ne mobiliser, dans le premier, que les purs réservistes. Ce n'est que dans un deuxième stade - celui que nous avons connu dans les gymnases, évoqué tout à l'heure - que l'on essaye de mobiliser le plus possible de professionnels.

Il est vrai que le regroupement fait peser un risque sur la réactivité de l'EPRUS, mais ses interventions vont de pair avec la veille sanitaire, dont il est l'outil opérationnel. L'INPES joue aussi un rôle important d'information et de communication, y compris en cas de crise. Les acteurs principaux du dispositif, que nous avons tous interrogés, ne sont pas contre cette fusion, à condition qu'on leur garantisse leur budget et leur spécificité.

La commission donne acte de sa communication à M. Francis Delattre et en autorise la publication sous la forme d'un rapport d'information.

Actualisation du programme de contrôle de la commission

Mme Michèle André, présidente. - Depuis le 4 février, date à laquelle nous avions arrêté notre programme de contrôle, Michel Berson, qui est l'un de nos deux rapporteurs spéciaux de la mission « Recherche et enseignement supérieur », a engagé des travaux sur le financement et le pilotage du projet de constitution d'un pôle scientifique et technologique (« cluster ») sur le plateau de Paris-Saclay. Je vous propose donc d'ajouter ce contrôle à notre programme initial.

Il en est ainsi décidé.

La réunion est levée à 10 h 50.