- Mardi 17 juin 2025
- Mercredi 18 juin 2025
- Projet de loi, rejeté par l'Assemblée nationale, relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année 2024 - Examen du rapport
- - Projet de loi, rejeté par l'Assemblée nationale, portant approbation des comptes de la sécurité sociale de l'année 2024 - Examen du rapport pour avis
Mardi 17 juin 2025
- Présidence de M. Claude Raynal, président -
La réunion est ouverte à 14 h 30.
Projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes pour l'année 2024 ainsi que sur l'exécution 2025 - Audition de Mme Amélie de Montchalin, ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics
M. Claude Raynal, président. - Madame la ministre, nous vous entendons cet après-midi pour évoquer les résultats de l'année 2024, dans le cadre de l'examen du projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année 2024, mais également, et peut-être surtout, pour évoquer l'exécution de la loi de finances sur l'année 2025.
L'année 2024 a été marquée par une nouvelle dégradation du déficit public par rapport à l'année 2023, où il avait déjà atteint un niveau inédit, hors période de crise, dans l'histoire de la Ve République. En 2024, le déficit public a donc atteint 5,8 % du PIB. Notre commission a cherché, dans un rapport publié en novembre 2024, à en déterminer les causes, tant politiques qu'économiques.
Nous attendons donc de votre présentation que vous reveniez sur ces résultats, et en particulier que vous vous concentriez sur les raisons de l'écart massif entre la prévision de déficit public de 4,4 % du PIB contenue dans la loi de finances de 2024 et le résultat final de 5,8 %, soit un écart de près de 40 milliards d'euros.
Le projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année 2024 montre également un écart de solde structurel de 1,5 point entre ce que prévoyait la loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027 et l'exécution : il s'agit donc d'un écart « important » au sens de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (Lolf), en vertu duquel le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) a déclenché le mécanisme de correction. Vous nous direz ce que l'application de ce mécanisme, prévu par la Lolf et le traité sur la stabilité, la coordination et gouvernance au sein de l'Union économique et monétaire (TSCG) de 2012, signifie concrètement. Le Premier président de la Cour des comptes, lorsque nous l'avons entendu sur la loi relative aux résultats, craignait que les effets de ce mécanisme ne deviennent au fil du temps artificiels. Vous nous direz ce que vous en pensez.
Cette audition sera également l'occasion d'aborder les sujets relatifs à l'exécution du budget 2025. Tout d'abord, nous serions tous intéressés de connaître les conséquences concrètes de l'absence de budget en janvier et de la mise en oeuvre de la loi spéciale et des services votés. Ensuite, nous souhaitons savoir si l'objectif d'un déficit public de 5,4 % du PIB est, selon vous, toujours atteignable, s'il y a lieu de s'alerter, comme en 2023 et 2024, sur le niveau de perception des recettes, et où en sont les mesures annoncées au moment de l'adoption du décret d'annulation du 25 avril dernier - vous évoquiez en particulier une mise en réserve complémentaire se traduisant par des mesures de surgel, adossée le cas échéant à des mesures de maîtrise plus ciblées.
Sans plus attendre, je vous laisse la parole, en rappelant que cette audition fait l'objet d'une retransmission sur le site internet du Sénat.
Mme Amélie de Montchalin, ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics. - Je vous remercie de me permettre de vous présenter formellement ce projet de loi de règlement, et c'est aussi l'occasion de revenir sur l'exécution 2025. Il est très important à mes yeux que nous puissions vous en rendre compte, puisque ce budget 2025 est particulier, issu d'un compromis parlementaire, et soumis à de forts aléas dans un contexte macro-économique, géopolitique et commercial particulièrement agité.
Le contexte valide notre décision, avec Éric Lombard, de tenir chaque trimestre le comité d'alerte - le prochain se réunira le 26 juin - lors duquel nous faisons toute la transparence sur l'intégralité de nos dépenses, de nos recettes et de nos décisions garantes du compromis parlementaire et des fameux 5,4 % de déficit.
Ce projet de loi est un texte technique à vocation d'abord comptable, mais il est essentiel puisqu'il rend compte des résultats de la gestion et met en évidence, plus que jamais, l'impérieuse nécessité de redresser nos finances publiques. Même s'il concerne le passé, il est essentiel pour préparer l'avenir sur la base d'un constat partagé et indiscutable. L'objectif est que nous puissions mieux nous projeter.
Ce projet de loi est un prérequis du débat budgétaire de l'automne. Bien que son équivalent ait été rejeté ces trois dernières années, et qu'il ait lui-même été rejeté la semaine dernière sans débat à l'Assemblée nationale, il me semble néanmoins essentiel que nous puissions l'examiner en détail et assurer ainsi la parfaite transparence de la gestion de nos comptes publics.
Ce texte rappelle ce qui s'est passé en 2024, une situation que vous connaissez mieux que moi puisque je n'ai pris mes fonctions que le 23 décembre dernier.
Le déficit final est donc de 5,8 % du PIB pour 2024, contre 4,4 % prévus en loi de finances initiale. Les écarts de prévision qui s'ajoutent à ceux constatés en 2023 reflètent les aléas qui ont marqué ces deux dernières années. Ils ne sont pas satisfaisants et appellent une nouvelle méthode. C'est pourquoi nous avons changé notre façon de suivre les recettes, les dépenses et l'exécution afin que, si de tels écarts venaient à advenir, nous le sachions vite, le disions vite et agissions vite.
Cependant, si la dégradation a été réelle en 2024, l'effort en gestion sur les dépenses de l'État l'a été également, avec une forte activité budgétaire : décret d'annulation dès le mois de février ; plafonds de dépenses ministériels inférieurs aux crédits disponibles ; surgel à l'été 2024. La fin de l'année a été marquée par la préparation de l'entrée inédite dans la gestion 2025 en régime de services votés, avec l'adoption d'une loi spéciale.
Nous connaissons tous la gravité de la situation. Le déficit public s'est établi à 5,8 %, très loin des 4,4 %. Vous l'avez dit, monsieur le président, comme l'écart de solde structurel est supérieur à 0,5 point de PIB par rapport à la loi de programmation des finances publiques 2023-2027, il est constaté par le Haut Conseil des finances publiques que cet écart est « important ». Nous avons donc présenté dans ce projet de loi les raisons de l'écart entre la prévision et l'exécution ainsi que les mesures de correction, tant budgétaires que méthodologiques, envisagées pour y remédier.
L'économie a subi de très grands chocs, notamment en termes d'inflation, qui ont fortement pesé sur les recettes, avec une élasticité particulièrement faible, deux années de suite. Les mesures de modération des dépenses sur le périmètre de l'État ont partiellement compensé cette dégradation des recettes, puisque l'exécution des dépenses sur le périmètre de l'État a été inférieure de 7 milliards d'euros à la loi de finances initiale (LFI) de 2024, s'établissant à 485 milliards d'euros, contre 492 milliards d'euros ouverts en LFI.
En 2025, nous produisons un effort courageux de redressement de nos finances publiques, validé par la commission mixte paritaire. C'est un compromis qui nous oblige.
La nouvelle méthode est le « quoi qu'il arrive », avec une gestion renforcée. Les reports de crédits ont été divisés par deux sur les périmètres ministériels, à hauteur de 4 milliards d'euros début 2025, contre près de 8 milliards d'euros en 2024.
Nous avons aussi créé une réserve de précaution réellement interministérielle, pilotée par la direction du budget et non plus par chaque ministère, ceux-ci considérant qu'in fine cet argent pouvait être totalement dépensé.
Nous avons aussi inclus une véritable réserve de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam), à hauteur de 1,1 milliard d'euros. Nous avons procédé à une première annulation de cette réserve, pour un montant de 2,5 milliards d'euros, associée à un surgel de même montant.
Le comité du 26 juin sera l'occasion d'un point d'étape sur l'exécution à mi-année. Nous vous ferons part de toutes les remontées comptables dont nous disposerons la semaine prochaine et présenterons tous les aléas macroéconomiques et toutes les incertitudes que nous affrontons, ainsi que les mesures prudentielles que nous prenons pour tenir nos objectifs, en particulier de dépenses, d'ici à la fin de l'année.
Le comité d'alerte inclut les collectivités, les partenaires sociaux et les acteurs de la sécurité sociale pour que nous nous rappelions bien que le déficit public est celui de la Nation, et non pas seulement celui de l'État.
Nous avons révisé le taux d'inflation de 1,8 % à 1,4 % lors de notre rapport annuel d'avancement. Cependant, nous constatons une grande volatilité assortie de deux risques contradictoires : d'un côté, depuis quelques mois, une baisse des prix de l'énergie, en particulier du pétrole, qui a ralenti l'inflation, laquelle s'est établie autour de 0,6 % à 0,8 % en rythme annuel ; de l'autre, depuis quelques jours, une très forte hausse de certains prix de l'énergie, qui pourraient pousser à la hausse des risques inflationnistes modérés, plutôt baissiers. Nous avons là une très forte incertitude. J'ai réuni les prévisionnistes publics et privés à Bercy : ils n'ont pas dégagé de consensus sur les prévisions relatives aux prix du pétrole.
La dernière prévision de croissance de la Banque de France est proche de celle du Gouvernement, à 0,6 % contre 0,7 %. Notre acquis de croissance s'est établi à 0,3 % à la fin du premier trimestre. Atteindre les 0,7 % nécessite 0,2 point de croissance par trimestre, ce qui est tout à fait possible.
Le chômage reste proche de son point bas, à 7,4 %. Le taux d'emploi a de nouveau atteint un record au premier trimestre. C'est très positif puisque la France a un enjeu en termes d'emploi des jeunes et des seniors.
Deux signaux positifs : le rebond des permis de construire, de 4,9 % au premier trimestre, et un frémissement de reprise des transactions immobilières.
J'en viens aux dépenses. Dans la sphère sociale, le comité d'alerte sur l'évolution des dépenses de l'assurance maladie rendra son avis dans les prochaines heures. Je peux déjà vous annoncer une forte dynamique de la dépense hospitalière en début d'année, en raison notamment d'une épidémie de grippe plus aiguë et plus tardive. En outre, la dépense des soins de ville est dynamique, portée notamment par la hausse du nombre des arrêts maladie, sujet sur lequel nous sommes très engagés : nous veillerons à ce que les prochaines lois de financement de la sécurité sociale incluent des mesures d'encadrement et de meilleur pilotage des arrêts maladie.
Du côté de l'État, nous avons pris, en avril dernier, des mesures de ralentissement de la dépense avec le décret d'annulation et les surgels. Nous sommes particulièrement vigilants sur les risques de dépenses en matière de logement, de travail et de défense. Certaines dépenses sont pilotables, en revanche nous n'avons pas toujours les outils pour limiter les dépenses de guichet à très court terme.
Du côté des collectivités territoriales, nous observons une baisse de la dynamique des dépenses de fonctionnement et d'investissement : la croissance est un peu moins forte qu'au cours des derniers trimestres. Nous restons toutefois très attentifs, car, bien qu'autonomes en matière de gestion, les collectivités territoriales participent à notre dynamique de dépenses publiques.
Notre approche reste inchangée : identifier les aléas et lorsqu'ils se transforment en risques, prendre les mesures nécessaires pour ralentir la dépense. C'est notre devoir afin de conserver notre crédibilité vis-à-vis de nos partenaires européens, des parlementaires et surtout des contribuables.
Vous, parlementaires, avez la primauté de la construction et de la validation de nos budgets, mais c'est bien par un esprit de dialogue, de transparence, de confiance et de responsabilité que nous pourrons, collectivement, mieux prendre en compte nos différentes contraintes et surtout tenir nos engagements, afin d'aborder sereinement les débats en vue du budget pour 2026.
Notre priorité est de tracer une trajectoire commune, prévisible et pluriannuelle, réaliste au vu des incertitudes macroéconomiques et juste en termes de redressement des finances publiques. Certains peuvent penser que c'est impossible. Il me semble que c'est tout l'inverse. C'est un enjeu démocratique en termes de crédibilité et de sérieux qui nous anime et, je crois, nous réunit. J'ai une grande confiance dans notre capacité à poser les bons diagnostics et à prendre les bonnes décisions.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Madame la ministre, pour 2024, vous avez parlé d'une « impérieuse nécessité de redresser nos finances publiques » et de chiffres qui posent la « gravité de la situation ».
Il y a un an, à la même époque, ces chiffres étaient déjà préoccupants, mais on nous assurait alors que le navire avançait sereinement en eaux calmes et que l'horizon s'annonçait radieux. Dès lors, madame la ministre, il me semble que le recul dont vous disposez désormais permet d'identifier les causes de cette dégradation : entre la conjoncture économique et les choix politiques opérés, où se situent les responsabilités respectives ? Ce travail de clarification permettra tant au Parlement qu'au Gouvernement de mieux préparer les Français à l'exercice budgétaire qui s'annonce.
S'agissant de l'exécution budgétaire pour 2024, notre mission d'information sur la dégradation des finances publiques depuis 2023 avait, dans ses premières conclusions, attiré l'attention sur le rythme de traitement des remboursements de TVA, lequel a pesé significativement sur le suivi des recettes nettes de cet impôt. Lors de votre audition le 17 mars dernier, vous aviez indiqué le lancement de deux missions internes : l'une sur la gestion des remboursements de TVA, l'autre sur les prévisions de l'acompte d'impôt sur les sociétés. Ces deux missions ont-elles rendu leurs conclusions ? Et, si tel est le cas, quelles leçons en tirez-vous ?
En ce qui concerne maintenant l'exécution budgétaire 2025, le 2 juin dernier, l'Assemblée nationale a adopté en première lecture une proposition de loi visant à rétablir les plafonds de la franchise en base de TVA, en vigueur avant le 1er mars de cette année. Quelle est la position du Gouvernement sur ce texte ? Quelles sont ses intentions ? Je rappelle que nous avions déjà alerté l'exécutif et appelé à une forme de sagesse sur ce sujet.
Le Gouvernement estimait, dans son rapport annuel d'avancement pour 2025, que la hausse des droits de douane imposés par les États-Unis risquait de grever la croissance de 0,3 point. Les économistes que nous avons entendus sur le sujet estiment que l'impact sur le solde public devrait se limiter à 0,1 point de PIB. Chaque dixième de point ayant son importance dans le contexte actuel, pouvez-vous nous indiquer si, à ce stade, votre appréciation s'est précisée ?
Dans son avis rendu le 16 avril dernier, le HCFP estime que l'objectif d'un déficit public à hauteur de 5,4 % du PIB en 2025 « peut être tenu mais est loin d'être acquis ». Quelle est, selon vous, la solidité de la trajectoire budgétaire prévue pour 2025 au regard de cet objectif ? D'autres mesures de gestion sont-elles envisagées pour parvenir à l'atteindre ?
Qu'en est-il des dépenses militaires ? Au-delà de la progression déjà actée dans la loi de programmation militaire (LPM), d'éventuelles hausses supplémentaires sont-elles à prévoir ?
Où en est-on sur le guichet MaPrimeRénov' ? En tant que ministre chargée des comptes publics, vous êtes bien placée pour nous apporter des précisions à ce sujet.
Un an après sa création, quel est le bilan de l'Office national antifraude (Onaf), venu remplacer le Service d'enquêtes judiciaires des finances (SEFJ) ? Des résultats concrets ont-ils été obtenus en matière de lutte contre la fraude ?
S'agissant de 2026, la trajectoire des finances publiques de la loi de programmation des finances publiques (LPFP) est définitivement hors d'atteinte. Le Gouvernement envisage-t-il de présenter une nouvelle LPFP, correspondant à la trajectoire financière effective de notre pays ?
Pouvez-vous nous expliquer de quelle façon vous avez construit le chiffre de 40 milliards d'euros d'économies prévus en 2026 ? En regardant simplement l'écart entre le déficit public prévu pour 2025 et celui prévu pour 2026, soit une amélioration de 0,8 point, on parvient plutôt à 25 milliards d'euros. Comment le Gouvernement justifie-t-il donc le passage à 40 milliards d'euros ?
Enfin, madame la ministre, pouvez-vous nous confirmer que les montants des crédits votés par le Parlement, notamment en commission mixte paritaire, au bénéfice des collectivités locales, ont bien été respectés ? Je citerai trois dispositifs majeurs : la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL), la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), et le fonds vert. Les crédits ont-ils été effectivement alloués, dans leur intégralité, à la gouvernance des préfectures départementales ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - Je m'efforcerai d'être aussi claire, synthétique et transparente que possible sur les nombreuses questions que vous me posez. C'est, en général, dans cet esprit que nous progressons sur le chemin du redressement, que j'aborde avec une grande lucidité quant au constat actuel et une forte volonté pour l'avenir. Je ne consacre pas de temps excessif à l'analyse du passé : l'urgence commande de concentrer nos efforts sur le présent et sur l'avenir.
S'agissant des remboursements de TVA et de la prévisibilité de leur dynamique nette, nous avons lancé une mission d'audit, fin avril, au sein de la direction générale des finances publiques (DGFiP), qui s'articule autour de trois volets.
Premièrement, il s'agit de mieux comprendre le comportement des entreprises, afin de le rendre plus prévisible, notamment en identifiant les motifs ponctuels de gestion de trésorerie susceptibles d'induire des variations de comportement.
Deuxièmement, un audit complet du processus de traitement des demandes a été engagé. L'augmentation du nombre de demandes a, en effet, entraîné une croissance du stock de dossiers de remboursement à traiter. Il convient de passer en revue chaque étape du circuit et les délais associés pour garantir un dispositif à la fois agile, efficace et sécurisé face aux risques de fraude.
Troisièmement, nous avons entrepris de mieux documenter les hypothèses retenues pour le niveau des remboursements de crédit de TVA (FCTVA) et leur évolution au fil des exercices budgétaires. Ce poste constitue, en effet, un élément central des mécanismes de dégrèvement.
Nous disposerons d'un bilan en septembre, qui nous permettra, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2026, de bâtir des hypothèses les plus solides possible.
Concernant l'impôt sur les sociétés, la question du cinquième acompte est complexe, car celui-ci génère une forte volatilité en toute fin d'exercice. Il demeure difficile à modéliser, car les décisions des entreprises sont volatiles, individualisées et non publiques. Toutefois, nous avons contacté, la semaine dernière, un millier d'entreprises afin de recueillir, en amont, leurs estimations sur le montant du cinquième acompte. Nous leur avons demandé de nous transmettre ces données d'ici au début du mois d'octobre. L'objectif est de disposer de tous les éléments nécessaires à une discussion budgétaire éclairée.
Je rappelle que ce cinquième acompte est versé le 15 décembre, soit généralement après le vote du budget pour l'année suivante. Il est donc utile d'en anticiper la dynamique en amont. C'est le sens de la démarche engagée.
Nous avons privilégié une approche partenariale et volontaire, qui respecte le secret fiscal. L'Association française des entreprises privées (Afep), le Mouvement des entreprises de France (Medef) ainsi que les acteurs du secteur bancaire et assurantiel ont pleinement compris l'enjeu collectif auquel nous faisons face.
S'agissant de la TVA et de la franchise en base, qui avait été fixée à 25 000 euros dans le texte initial issu des travaux de la commission mixte paritaire, j'ai pris la décision de suspendre cette mesure jusqu'à la fin de l'année 2025. Cette décision est cohérente avec le vote intervenu à l'Assemblée nationale sur la proposition de loi déposée par le groupe Ensemble pour la République. Le sujet pourra être réexaminé à l'occasion du projet de loi de finances pour 2026.
Le travail de concertation mené par Mme Véronique Louwagie a révélé un point important, que je tiens à porter à votre connaissance en vue d'éventuels débats à l'automne : un secteur professionnel s'est montré favorable à une réduction du seuil de franchise, celui du bâtiment.
Il s'agit, premièrement, de protéger l'action de certains opérateurs économiques français face à la concurrence d'intervenants européens bénéficiant de franchises bien plus basses, voire inexistantes, et pouvant désormais exercer en France. Ainsi, en Espagne, la franchise n'existe pas et la TVA s'applique dès le premier euro. Ce différentiel incite un certain nombre d'acteurs étrangers, notamment dans le secteur du bâtiment, à venir opérer sur le territoire français afin de bénéficier du régime plus favorable qui y prévaut. Le second enjeu est celui de la concurrence loyale et de la qualité. Le secteur du bâtiment a en effet signalé plusieurs distorsions induites par ces écarts de régime.
Telles sont les conclusions issues de la concertation qui a été menée à l'Assemblée nationale. Ce sujet pourra être réexaminé, le cas échéant, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2026. En tout état de cause, la mesure est suspendue jusqu'à la fin de l'année 2025.
S'agissant de la loi spéciale, monsieur le président Raynal, il s'agit là d'une question complémentaire. Le régime des services votés s'est révélé particulièrement rudimentaire et, en réalité, peu adapté à la gestion d'un pays. Fort heureusement, ce régime n'a duré que six semaines. À la mi-février 2025, les autorisations d'engagement affichaient une baisse de 46 % par rapport à l'année 2024, tandis que les crédits de paiement étaient en retrait de près de 8 %, ce qui était conforme à nos prévisions. Durant cette période, nous avons veillé à piloter les dépenses essentielles afin que le pays ne soit pas à l'arrêt. Néanmoins, nous avons aussi tenu à éviter toute accélération après le retour à un fonctionnement budgétaire normal.
Autrement dit, nous avons refusé une gestion de « douze mois en dix » pour privilégier, dans la mesure du possible, un rythme de « dix mois en dix » dans plusieurs périmètres.
Concernant l'impact économique des droits de douane, monsieur le rapporteur général, j'entends que certains considèrent cet effet comme moins préoccupant et j'en prends note. Dans la loi de finances initiale pour 2025, nous avions intégré un aléa international représentant 0,1 point de PIB. Cet aléa a été porté à 0,3 point, ce qui explique la révision à la baisse de notre prévision de croissance. Celle-ci s'établit désormais à 0,7 %. Si jamais l'impact était moins marqué, cela pourrait signifier in fine que notre scénario de croissance présente un potentiel de révision à la hausse. Ce serait une bonne nouvelle. Quoi qu'il en soit, nous présenterons un nouveau scénario macroéconomique dans le cadre du projet de loi de finances à venir.
Nos services de prévision, quant à eux, actualisent en continu les modèles en fonction des données disponibles, des décisions politiques prises et des aléas extérieurs. Ces derniers jours, les prix de l'énergie ont connu une inflexion brutale : alors que nous étions dans une tendance nettement baissière, nous sommes désormais confrontés à une dynamique haussière marquée.
Vous m'interrogez sur la soutenabilité du déficit à 5,4 % du PIB. Le Haut Conseil des finances publiques s'est exprimé à ce sujet dans des termes choisis, variés, mais clairs. L'objectif est « atteignable », mais il demeure « exigeant ». Cette formule résume assez fidèlement ma lecture de la situation. À ce stade, nous ne disposons pas d'éléments indiquant un décalage majeur qui rendrait cet objectif hors de portée. Nous présenterons d'ailleurs un point précis sur ce sujet lors de notre communication du 26 juin.
Il est vrai que ce pilotage infra-annuel est devenu essentiel. Il a fait cruellement défaut en 2023 et 2024, dans un contexte mondial marqué par une forte volatilité. C'est précisément pourquoi nous devons aujourd'hui nous ajuster. Nous pouvons le faire dans les limites de la Lolf grâce aux instruments qui sont à notre main. En cas de dépassement des plafonds autorisés, un projet de loi de finances rectificative (PLFR) serait requis. Pour l'heure, les écarts constatés ne justifient pas un tel recours.
S'agissant des dépenses militaires, je rappelle qu'au cours des derniers exercices, la fin de gestion a fréquemment donné lieu à des ouvertures de crédits conséquentes, atteignant parfois 1 milliard, 1,5 milliard, voire 2 milliards d'euros. Nous avons toujours eu l'obligation constitutionnelle de couvrir les coûts liés aux opérations extérieures. Nous avons également le devoir de poursuivre les engagements que nous avons pris auprès de nos partenaires, notamment l'Ukraine.
Avec le ministre des armées, M. Sébastien Lecornu, nous menons un travail exigeant de maîtrise de la dépense. Notre objectif est de garantir que les financements soient consacrés à ce qui est strictement nécessaire et essentiel. Nous ne remettons en cause ni notre effort de défense ni notre sécurité nationale, et nous veillons au respect scrupuleux des engagements inscrits dans la loi de programmation militaire. Comme le rappelle souvent le ministre des armées, cette loi doit être exécutée « à l'euro près ». C'est dans cet esprit que nous agissons. À ce stade, je ne dispose d'aucun signal indiquant que la fin de gestion 2025 s'écarterait radicalement des schémas observés les années précédentes.
S'agissant du guichet MaPrimeRénov', je tiens à souligner le lien étroit entre ce dispositif et les enjeux de lutte contre la fraude, notamment dans le cadre de l'action conduite par l'Onaf. L'an dernier, 20 % des montants versés au titre de MaPrimeRénov' ont fait l'objet de fraudes avérées. Soit les devis étaient artificiellement gonflés, conduisant à des restes à charge nuls, voire à des situations où des particuliers se retrouvaient subventionnés au-delà du montant réel des travaux effectués ; soit des mécanismes élaborés relevant de la criminalité organisée ont été mis en place : plusieurs centaines de millions d'euros ont ainsi quitté le territoire national sans qu'aucun ménage français en ait effectivement bénéficié. Enfin, dans un nombre significatif de cas, la qualité des travaux réalisés était très inférieure à celle promise.
Grâce à votre soutien, un nouvel outil législatif est désormais à notre disposition, après l'examen de la proposition de loi contre toutes les fraudes aux aides publiques, dite Cazenave. L'article 1er de cette loi, qui sera promulguée dans les prochaines semaines, prévoit de suspendre le versement d'une aide publique dès lors qu'il existe une suspicion de fraude.
Dans ce contexte, sous l'autorité du Premier ministre, nous avons décidé, avec Éric Lombard et Valérie Létard, de mettre en pause le guichet de dépôt des dossiers relatifs à la rénovation globale, car il s'agit du segment le plus touché par la fraude. À l'inverse, les opérations dites « monogestes », de nature forfaitaire, présentent un plus faible risque de fraude. L'objectif est d'utiliser les dispositions de la loi Cazenave pour instruire et purger tous les dossiers présentant une suspicion de fraude. Si la suspicion de fraude est levée, les aides seront naturellement versées. Durant cette phase, notre priorité sera de consacrer les 3,6 milliards d'euros d'autorisations d'engagement consenties par la collectivité aux ménages « honnêtes » ayant constitué des dossiers complets et légitimes.
Tous les dossiers complets et conformes bénéficieront du versement des aides d'ici à la fin du mois de septembre. Les dossiers frauduleux, eux, seront mis de côté. La réouverture du guichet interviendra une fois ce travail de vérification accompli.
Un point essentiel à retenir est que la gestion de ce dispositif repose sur une enveloppe fermée. Nous disposons de 3,6 milliards d'euros de crédits d'engagement et nous entendons consacrer l'intégralité de cette enveloppe aux ménages éligibles, et non à des réseaux frauduleux. Je crois que cet objectif fait consensus.
Votre question sur l'Onaf, monsieur le rapporteur général, est particulièrement bienvenue. Je m'entretenais encore, il y a deux heures, avec le directeur de l'Office. C'est un sujet que je suis de manière extrêmement attentive.
L'année dernière, nous avons encaissé 13 milliards d'euros au titre de la lutte contre la fraude, soit davantage que le budget du ministère de la justice. Nous avons, dans le même temps, détecté 20 milliards d'euros de fraudes, un montant presque équivalent à celui du budget du ministère de l'intérieur. Un écart subsiste, naturellement, entre les montants détectés et ceux effectivement recouvrés. Toutefois, la tendance est claire : nous détectons de mieux en mieux et nous recouvrons de plus en plus efficacement.
L'Onaf joue un rôle déterminant. Grâce à ses actions, notamment dans le domaine du blanchiment douanier et des dispositifs fiscaux, 600 millions d'euros de saisies ont pu être réalisés. À ce jour, 360 enquêtes ont été confiées à l'Office, dont 40 % par des juridictions spécialisées dans la lutte contre la criminalité et la fraude. C'est une réintégration de l'Onaf dans le périmètre de la lutte contre la criminalité organisée, et cette organisation fonctionne de manière très satisfaisante. Deux tiers des effectifs de l'Office proviennent des douanes et un tiers des services fiscaux. Nous étudions désormais la possibilité d'étendre son périmètre d'action à la fraude aux aides publiques, notamment à des fraudes sociales et fiscales plus larges. Plusieurs travaux convergent pour montrer que l'Onaf pourrait jouer un rôle d'appui majeur dans des domaines relevant davantage de la sphère de la sécurité sociale. C'est un axe sur lequel je travaille activement avec Mme Catherine Vautrin.
Il est évident que les outils fiscaux, notamment en matière de gel et de saisie, produisent d'excellents rendements. Or ces instruments ne sont pas encore pleinement mobilisés dans le champ social. Cela explique, notamment, que les Urssaf détectent un volume important de fraudes, mais disposent d'une capacité de recouvrement plus limitée. Nous travaillons très activement sur ce sujet.
Quant à la nouvelle loi de programmation des finances publiques, le Premier ministre présentera, à la mi-juillet, un plan global pluriannuel de retour à l'équilibre des comptes publics. Sur le texte en tant que tel, je n'exclus pas une approche différente de celle consistant à rédiger un projet de loi de A à Z. Dans le contexte politique actuel, où il nous est déjà difficile de réunir une majorité sur un texte de constat comme le projet de loi de règlement, il n'est pas certain que ce soit la voie la plus pragmatique. Mieux vaut inscrire dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2026 des trajectoires allant jusqu'en 2028 ou 2029 sur le plus grand nombre d'objets possible. Ce n'est pas le même outil et cela n'a pas la même portée, mais c'est une réponse pragmatique que je propose.
Écrire une nouvelle loi de programmation est techniquement faisable. En revanche, la faire adopter est une tout autre affaire et la faire respecter est un défi. Vous pouvez constater, monsieur le rapporteur général, que je m'emploie avec détermination à ce que les engagements pris soient tenus dans toute la mesure du possible.
Vous me demandez comment l'objectif des 40 milliards d'euros d'économies a été fixé. Vous le savez, toute la construction des budgets repose sur l'analyse de ce que l'on appelle la « tendance », c'est-à-dire l'évolution spontanée de la dépense publique si aucune mesure nouvelle n'était prise. Cette projection tient compte de la démographie, des paramètres, des enjeux de guichet ainsi que de l'évolution des politiques publiques.
Par exemple, dans le champ de la sécurité sociale, la définition du rythme naturel de croissance de la dépense donne lieu à de nombreux débats. La loi de programmation des finances publiques actuellement en vigueur a fixé une tendance de 2,9 % de croissance par an pour la progression des dépenses de santé. Toutefois, certains experts, y compris au sein d'administrations spécialisées, comme celle qui suit la dépense hospitalière, estiment que le rythme naturel se situe plus vraisemblablement autour de 4,5 %. D'autres avancent même un chiffre proche de 5 %, compte tenu du vieillissement de la population, de la hausse des maladies chroniques et du coût croissant des médicaments innovants.
Dès lors, lorsqu'il est question d'« économies » dans le champ de la santé, il ne s'agit pas d'une baisse absolue de la dépense, mais bien d'une réduction de l'Ondam par rapport à cette tendance naturelle. On appelle « économies » la différence entre les deux.
Du côté des dépenses de l'État, nous avons procédé à un examen poste par poste. Certaines dépenses sont incompressibles, comme la contribution française au budget de l'Union européenne, les engagements liés aux lois de programmation, le compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » ou encore des crédits résultant d'autorisations d'engagement antérieures, comme dans le cadre du dispositif MaPrimeRénov' : une part importante des crédits de paiement mobilisés en année n résulte des engagements pris en année n-1.
Ainsi, nous avons évalué, pour chaque programme, les dépenses à législation constante. Ce travail conduit à une projection de dépenses totales pour 2026 à hauteur de 1 750 milliards d'euros. Inversement, lorsque l'on fixe une cible de déficit, l'analyse conjointe de nos recettes et de nos dépenses nous conduit à constater que le niveau global des dépenses devrait s'établir à environ 1 710 milliards d'euros pour que cette cible soit atteinte. La différence entre les deux montants donne le fameux montant de 40 milliards d'euros.
Pour ma part, je préfère raisonner en termes de déficit, car la trajectoire tendancielle de la dépense publique est extrêmement sensible aux aléas extérieurs. L'inflation naturelle ou les règles d'indexation influent sur la tendance. Par exemple, une inflation prévue à 2 % génère une progression de la dépense plus forte qu'une inflation estimée à 1 %.
Dans le cadre collectif de notre réflexion, ce qui m'importe, c'est avant tout le rythme de croissance de la dépense publique et la manière dont nous parvenons à en ralentir la progression dans un certain nombre de secteurs. Par ailleurs, j'insiste sur la nécessité de se concentrer sur le déficit, c'est-à-dire sur l'équilibre entre les recettes et les dépenses, et pas seulement sur ces « milliards d'euros d'économies » que les Français ne pourront jamais observer dans leur vie quotidienne, puisqu'il s'agit d'un écart par rapport à une trajectoire qui n'est jamais advenue. Il ne s'agit pas d'une réduction de la dépense par rapport à l'année n-1, mais par rapport à un scénario contrefactuel qui, par définition, ne se produira jamais. C'est pourquoi il me semble plus lisible de parler en termes de déficit et de dynamique de dépense.
Enfin, vous m'avez interrogée sur les dotations aux collectivités territoriales, en particulier sur la DSIL, la DETR et le fonds vert. Je vous transmets, monsieur le rapporteur général, en temps réel et en continu, l'ensemble des décisions prises sur ces sujets. Je vous confirme donc qu'aucune mesure n'a été arrêtée de manière cachée ou subreptice qui empêcherait, par exemple, les préfets de tenir les commissions DETR ou DSIL comme prévu.
Quant au fonds vert, les crédits de paiement sont intégralement honorés. L'enjeu concerne les autorisations d'engagement. Là encore, des mesures de mise en réserve ont été prises. Je pourrai vous transmettre les éléments qui vous permettront de constater que nous ne remettons rien en cause sur le principe. Nous ne faisons qu'utiliser les outils qui sont à notre disposition dans le cadre du pilotage infra-annuel, uniquement dans les quantums qui sont autorisés par la Lolf et dans une transparence totale de ma part.
M. Dominique de Legge. - À la question du rapporteur général sur la LPM, je ne partage pas la réponse que vous avez apportée, madame la ministre. En effet, le budget de la défense participe largement au financement des surcoûts que vous avez évoqués. D'après les calculs que j'ai effectués, entre les gels, les suppressions de crédits et les dégels, il manquera 1 milliard d'euros à la fin de l'année.
Premièrement, s'agissant du report de charges, il s'élevait à 3,8 milliards d'euros en 2023 et a atteint plus de 8 milliards au début de l'année 2025. Quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour mieux piloter ce report de charges qui représente désormais 22 % du budget de la défense ?
Deuxièmement, le Gouvernement, par la voix de M. Jean-Noël Barrot, a affirmé, au mois de mai dernier, que l'objectif de consacrer 3 %, voire 3,5 %, du PIB à la défense était un objectif partagé par la France. Cela représenterait un effort supplémentaire d'au moins 25 milliards d'euros. Comment ce montant sera-t-il financé ?
Enfin, vous avez évoqué les dépenses dites « pilotables ». Or, nous étions nombreux hier au salon du Bourget. Plusieurs industriels nous ont confirmé que les commandes de l'État, en matière de défense, ne sont actuellement pas passées. Est-ce ainsi que le Gouvernement entend piloter les dépenses militaires ?
M. Michel Canévet. - Puisque nous abordons la loi de finances pour 2024, je tiens à souligner qu'elle constitue, pour les parlementaires que nous sommes, quasiment la pire année en période de crise. Le dérapage observé entre les prévisions de décembre 2023 et la réalisation en décembre 2024 est particulièrement préoccupant.
Nous avions formulé un certain nombre de propositions - vous avez évoqué l'Onaf et la lutte contre la fraude - pour rétablir la situation des comptes publics, en particulier dans le champ social, mais hélas, elles n'ont pas été retenues. J'espère que nous serons davantage entendus lors de l'examen du prochain projet de loi de finances. C'est absolument essentiel.
Nous sommes désormais à la moitié de l'exercice. Où en sommes-nous concrètement au regard des objectifs ? Vous avez mentionné un certain nombre de paramètres à prendre en compte. La prévision d'un déficit public à 5,4 % du PIB est-elle encore atteignable ?
Avec Raphaël Daubet, nous sommes rapporteurs spéciaux de la mission « Aide publique au développement ». La commission des finances a produit un rapport à la suite de l'enquête de la Cour des comptes sur les contributions multilatérales de la France. L'une des recommandations était de mettre en place un instrument de suivi de ces versements, afin de mieux anticiper et de rationaliser le processus. Cet instrument de pilotage sera-t-il opérationnel pour le projet de loi de finances pour 2026 ?
Par ailleurs, le fonds de solidarité pour le développement (FSD) qui était géré par l'Agence française de développement (AFD) a été rebudgété. Son affectation est principalement orientée vers les contributions multilatérales. Les crédits seront-ils en partie mis en réserve ou bien seront-ils, comme le Gouvernement l'a annoncé, strictement sanctuarisés ?
M. Bruno Belin. - Quel a été le coût, en milliards d'euros, de la loi spéciale, c'est-à-dire l'impact budgétaire de la censure ?
Ma deuxième question concerne la mission « Sécurités » dont j'ai la responsabilité. L'an passé, le budget de la gendarmerie s'est trouvé en grande souffrance au début du quatrième trimestre, notamment en raison de l'impact de la crise en Nouvelle-Calédonie et de l'engagement lors des jeux Olympiques. Cette situation a conduit à l'impossibilité de payer certains loyers. Les collectivités concernées en ont subi les conséquences : certaines d'entre elles se sont retrouvées avec des impayés à six chiffres. Qu'en sera-t-il en 2025 ?
M. Grégory Blanc. - Madame la ministre, j'ai écouté avec attention vos propos sur MaPrimeRénov'. Vous évoquez 20 % de fraude. Si tel est le cas, à quoi sert Mon accompagnateur Rénov' (MAR), dont la mission est d'accompagner, de structurer et de vérifier l'utilisation des fonds ? Ce dispositif a alourdi considérablement la procédure ; face à un tel niveau de fraude, comment comptez-vous le faire évoluer ?
Ma deuxième question concerne le pilotage. Les chefs d'entreprise ont besoin de stabilité et de visibilité sur les orientations. Or le Gouvernement semble avoir une idée par jour, et à la fin de la semaine, nous avons le tournis. Comment comptez-vous donner cette stabilité et cette visibilité aux acteurs économiques pour aborder au mieux la construction du budget 2026 ?
Ma troisième question porte sur 2024. Le HCFP, au vu de l'écart saisissant entre le prévisionnel et le réalisé, que nous avons tous constaté, évoque la nécessité de remettre sur l'établi la construction d'une loi de finances pluriannuelle conforme à la réalité des chiffres. Quelle est votre position sur ce point ? Nous ne savons plus quelle est la trajectoire pluriannuelle du pays, et il ne me semble pas vous avoir entendue sur ce sujet.
M. Pascal Savoldelli. - Madame la ministre, vous avez évoqué la question de la méthode. Le problème réside dans l'objet même de notre examen : les résultats de la gestion et l'approbation des comptes. Si une collectivité territoriale présentait un compte administratif comparable à celui que l'État nous présente, elle n'aurait plus de budget. Le moment est donc solennel.
L'écart sur le déficit public est énorme, avec un décret portant annulation de 10 milliards d'euros de crédits et un effondrement des recettes de 23 milliards d'euros, dont 14 milliards d'euros au titre de l'impôt sur les sociétés. En dépit de raisonnements professoraux, et avec tout le respect dû à la pédagogie, l'exigence de visibilité s'impose, tant pour les parlementaires que pour nos concitoyens.
En tant que parlementaire, je m'interroge sur l'annonce d'une intervention du Premier ministre à la mi-juillet, qui se ferait en dehors de tout contrôle parlementaire. Après avoir assisté au débat sur la proposition de loi instaurant un impôt plancher de 2 % sur le patrimoine des ultrariches, la taxe Zucman, et entendu vos arguments, je souhaite que vous nous indiquiez quelles nouvelles recettes vous envisagez précisément d'introduire dans le projet de loi de finances pour 2026. Cette interrogation n'est pas personnelle ; elle est partagée par les Français, par les acteurs économiques et par les collectivités territoriales.
M. Pierre Barros. - Madame la ministre, vous parliez de transparence et de sincérité. Or la Cour des comptes a émis cinq réserves substantielles sur la certification des comptes, dénonçant des failles persistantes en matière de sincérité, d'exhaustivité et de régularité. Pire encore, les articles 7, 8 et 9 du projet de loi visent à réécrire rétroactivement les votes du Parlement sur les comptes de 2021, 2022 et 2023, en procédant à des affectations patrimoniales a posteriori pour, semble-t-il, effacer les rejets.
Comme l'évoquaient certains de mes collègues, si l'on fait l'analogie avec les procédures budgétaires des collectivités, qui s'appuient sur le compte administratif et le compte de gestion, un tel constat d'insincérité rendrait particulièrement délicat l'exercice de construction d'un budget.
S'agissant des collectivités, vous avez évoqué une stabilité des crédits de la DSIL et de la DETR. Ce n'est pourtant pas ce que j'entends des services de l'État dans mon département, où l'on observe un effondrement des crédits alloués aux collectivités pour accompagner des projets, souvent d'investissement, qui font tourner l'économie locale. Cette situation ne se limite malheureusement pas au seul Val-d'Oise. J'aimerais donc obtenir une confirmation de votre part sur ce point, car ces informations contredisent ce que nous entendons sur le terrain.
Ma dernière question portera sur le dispositif de lissage conjoncturel des recettes fiscales des collectivités territoriales (Dilico), introduit en 2025, qui permet de récupérer 1 milliard d'euros, qui pèse pour 500 millions sur les communes, pour 210 millions sur les départements et pour 280 millions sur les régions.
À mi-année, parvenons-nous à en mesurer l'efficacité ? L'argent est-il rentré et dans quelles conditions ? Ce qui a été annoncé aux collectivités correspond-il à ce qui a été perçu ? Ce n'est pas si simple, car, lorsque nous discutons avec nos collègues élus, nous constatons que certaines collectivités assujetties n'en sont même pas informées.
Enfin, ce dispositif sera-t-il reconduit d'année en année ou s'agit-il bien, comme il a été conçu au départ, d'une mesure one-shot ?
M. Vincent Delahaye. - Madame la ministre, j'ai compris que vous n'étiez pas très enthousiaste au sujet du chiffre de 40 milliards d'euros, cité à de nombreuses reprises par le Gouvernement. Je souhaite que vous nous transmettiez une note expliquant la manière dont on parvient à cette somme.
De même, et c'est un minimum en matière de transparence, j'aimerais obtenir l'explication des 8 milliards d'euros de gel et des 5 milliards d'euros supplémentaires de surgel annoncés pour le début de 2025. Il importe que l'on nous expose comment ces montants sont calculés et pourquoi ces chiffres précis ont été retenus.
M. Thierry Cozic. - Madame la ministre, dans vos réponses au rapporteur général, vous avez fait état de votre volonté de ne pas seulement parler du passé, mais surtout de vous projeter vers le présent et l'avenir. Je souhaite donc revenir sur la taxe différentielle sur les hauts revenus, dont la mise en oeuvre constituait un engagement écrit du Premier ministre et aurait produit des recettes nouvelles pour le budget de l'État.
Je rappelle d'ailleurs les propos du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, M. Éric Lombard, lors du débat budgétaire : « la pente naturelle du capitalisme, bien démontrée par Thomas Piketty, c'est que le capital s'accroît alors que la part qui va aux salariés n'augmente pas spontanément. » Il ajoutait que l'on n'y parvient pas si l'on ne baisse pas le rendement du capital. Des paroles aux actes, il me semble toutefois qu'il y a un monde.
Ma question est donc claire et fait écho à mon interpellation lors de l'examen de la proposition de loi sur la taxe Zucman : quelle suite comptez-vous donner aux dispositifs fiscaux sur lesquels le Premier ministre s'est engagé afin de rétablir plus de justice fiscale ? Quel en est le calendrier ? Si cet engagement n'était pas tenu, quel crédit accorder à la parole gouvernementale pour le prochain budget ?
M. Claude Nougein. - Ma première question concerne l'année 2024, qui a été marquée par une importante sous-exécution des crédits dédiés aux aides aux buralistes, de l'ordre de 25 %. La Cour des comptes a d'ailleurs souligné cette énorme erreur de prévision. Cette ligne budgétaire sera-t-elle mieux calibrée et plus en phase avec les estimations en 2025 ?
Ma seconde question porte sur la création de la foncière de l'État. La commission des finances du Sénat soutient ce projet, qui était inscrit dans le PLF pour 2025, mais a été censurée par le Conseil constitutionnel. Cette réforme nous permettait pourtant de réaliser 1 milliard d'euros d'économies chaque année par la réduction et l'amélioration des surfaces immobilières de l'État.
Que comptez-vous faire en 2025 ou en 2026 à ce sujet, sachant que des expérimentations ont été réalisées, notamment au ministère des finances ?
M. Hervé Maurey. - Madame la ministre, une commune de mon département m'a interpellé hier, car elle n'a pas obtenu le versement de la DSIL. Après m'être rapproché de la préfecture, il m'a été indiqué que Bercy n'aurait pas délégué les crédits nécessaires à la préfecture de région, ce qui empêcherait le préfet de département de répartir des fonds qu'il n'a pas reçus. Cette information est-elle exacte ? Si c'est le cas, que comptez-vous faire ? Cette situation place les communes et les entreprises dans une position très difficile.
Sur la préparation du budget 2026, lors de votre audition du 19 mars, vous aviez évoqué la nécessité de rechercher des économies par un examen, je vous cite, « ligne par ligne, budget base zéro ». Vous aviez conclu que cet « inventaire » permettrait de réaliser des économies. Peut-on savoir où en est cette démarche ? Nous n'avons aucune information sur le travail mené en la matière ; pouvez-vous lever le voile sur ce grand mystère ?
Toujours sur le budget 2026, le Premier ministre a semblé valider hier la proposition d'instaurer un dispositif proche de l'article 40 de la Constitution mais à destination des collectivités, qui interdirait de leur imposer de nouvelles normes sans ressources ni compensations. Cet engagement trouvera-t-il sa traduction dans le projet de loi de finances pour 2026 ?
Enfin, je réitère deux questions écrites restées sans réponse. La première, datant de décembre et adressée à votre prédécesseur, concernait l'Union des groupements d'achats publics (Ugap) qui, sur des marchés comme la plateforme Place (plateforme des achats de l'État), favorise les grandes entreprises au détriment de nos PME et de notre souveraineté. Un député a obtenu une réponse, mais j'attends toujours la mienne.
La seconde question, envoyée il y a quatre mois, porte sur le fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR). Des communes comme Ferrières-Haut-Clocher voient leurs contributions à ce fonds gelées sur la base de recettes passées de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (Ifer), recettes aujourd'hui disparues. Les compensations actuelles étant très loin du compte, pourra-t-on réexaminer ce sujet lors du PLF pour 2026 ?
M. Éric Jeansannetas. - Madame la ministre, je m'attarderai uniquement sur la mission « Sport, jeunesse et vie associative », en évitant tout commentaire sur la gestion chaotique de ses crédits. Il s'agit de la plus petite mission en volume, mais elle a subi de fortes pressions en cette année olympique. Je n'évoquerai pas non plus le service civique, alors que le gel de 100 millions d'euros de crédits met en difficulté l'Agence nationale dédiée et oblige à réaffecter des crédits en projet de loi de finances pour assurer sa survie.
Je me concentrerai plutôt sur ce qui aurait pu constituer une source d'économies : le service national universel (SNU), pour lequel nous avions proposé la suppression de 100 millions d'euros. Ce dispositif mort-vivant revient régulièrement avec la perspective de sa généralisation, dont j'ai moi-même souligné la difficulté dans un rapport, sans même mentionner celui de la Cour des comptes, encore plus sévère sur sa quasi-inutilité.
Aucun des objectifs initiaux n'est atteint par ce dispositif très coûteux, dont les 100 millions d'euros serviraient bien plus utilement à des mécanismes qui fonctionnent, comme le service civique, lequel doit être ancré dans nos territoires et répond à une demande de la vie associative et sportive.
Ma question est donc simple : alors que 40 milliards d'euros d'économies sont recherchés, une réforme du SNU est évoquée. La généralisation serait abandonnée, mais un rapport de mai dernier mentionne un nouveau dispositif dont le coût passerait de 600 millions d'euros à 15 milliards d'euros. Qu'en est-il exactement ? Dans le contexte budgétaire serré qui est le nôtre, tout cela manque de lisibilité.
Mme Florence Blatrix Contat. - Je souhaite vous interroger sur le pilotage des crédits votés en loi de finances. L'exécution des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'État », dont je suis rapporteure spéciale, a été fortement perturbée par un décret d'annulation de 170 millions d'euros, compensé ensuite par des dégels de la réserve de précaution. Des nombreuses auditions que j'ai menées ressort un sentiment de gestion par à-coups, à la prévisibilité limitée, qui confère à l'exécution budgétaire pour 2024 des « aspects chaotiques ». Comment, à l'avenir, comptez-vous procéder pour assurer une exécution plus fluide et plus prévisible pour les administrations de l'État ?
Ma seconde interrogation porte sur le coût croissant des dépenses fiscales, estimé aujourd'hui à 83 milliards d'euros pour 2024, contre 70 milliards d'euros initialement. Cette orientation à la hausse est jugée alarmante par la Cour des comptes ; elle est d'autant plus préoccupante que des dispositifs importants comme le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) ont disparu, ce qui laissait plutôt attendre une régression de ces dépenses.
Je rappelle les travaux d'Anne-Laure Delatte démontrant que, depuis 1979, la part des niches fiscales est passée de 1 % à 4 % du PIB, tandis que les subventions restaient stables à 2 %. Notre action publique a donc privilégié les exonérations fiscales au détriment des subventions, se privant ainsi d'un meilleur pilotage. Envisagez-vous d'agir sur ces niches fiscales ?
Mme Christine Lavarde. - Je reviens sur les travaux que nous avons menés concernant la réforme de la Lolf, adoptée en 2021. L'un de ses objectifs était de rendre l'ancienne loi de règlement plus lisible. Cet objectif ne me paraît pas atteint. En effet, sa rédaction, notamment celle de l'article liminaire, ne présente aucune donnée en valeur absolue, à l'exception de la dépense publique, mais uniquement des chiffres en pourcentage du PIB. Nos voisins européens procèdent différemment, en communiquant des données en masse, en milliards d'euros de déficit.
Par ailleurs, aucun tableau ne présente des résultats consolidés en double comptabilité, budgétaire et nationale, ce qui empêche toute comparaison aisée avec les chiffres de l'Insee. Pour autant, Eurostat et la Commission européenne fondent bien leur suivi financier des États membres sur la comptabilité nationale.
Enfin, l'article liminaire est le seul à donner une vision consolidée pour toutes les administrations publiques (toutes APU) ; la suite du texte n'offre qu'une vision à la maille de l'État. Dès lors, si ce format devait être conservé, il faudrait compléter l'article liminaire par des déclinaisons par blocs d'administrations publiques, à l'instar de ce que fait l'Insee. Cela permettrait des comparaisons utiles en comptabilité budgétaire et la lisibilité de l'ensemble en serait améliorée.
Mme Isabelle Briquet. - J'ai trois questions. La première concerne l'exercice 2025. Après la mise en réserve, le gel, le décret d'annulation et le surgel, un projet de loi de finances rectificative ne s'impose-t-il pas par souci de transparence ?
Ensuite, je partage les inquiétudes relatives aux dotations d'investissement pour les collectivités. Pouvez-vous nous assurer que la DETR, la DSIL bénéficieront bien aux collectivités et, singulièrement, que le fonds vert bénéficiera aux seules collectivités ? Selon mes informations, ce dernier dispositif, qui a pourtant été sensiblement réduit, ne leur serait pas entièrement affecté, alors que celles-ci étaient sa destination initiale. Une telle situation serait dommageable pour les investissements en matière de transition énergétique.
Enfin, l'éventualité d'une année blanche étant évoquée, j'aimerais savoir si cette mesure, si elle était retenue, s'appliquerait à la revalorisation des bases fiscales.
Mme Ghislaine Senée. - Il serait intéressant d'obtenir des réponses écrites à chacune de nos questions.
Vous concluiez votre propos liminaire en affirmant que poser les bons diagnostics permettait de prendre les bonnes décisions. Or vous avez omis de répondre à la première question du rapporteur relative aux responsabilités quant à la situation actuelle. Votre analyse m'intéresse, car un bon diagnostic permet précisément d'éviter qu'une telle situation ne se reproduise.
Enfin, ma dernière question portera sur le projet de loi relative aux résultats de la gestion et à l'approbation des comptes de l'État. Ce texte fait apparaître en exécution une baisse de 4,2 milliards d'euros des dépenses ayant un impact favorable sur l'environnement et de 1,1 milliard d'euros de celles dont les impacts sont mixtes. Ne faut-il pas y voir un renoncement de notre pays à ses objectifs climatiques ?
M. Raphaël Daubet. - Je m'associe aux questions de mes collègues concernant la DSIL, au sujet de laquelle mon département est également dans l'expectative.
Concernant l'aide publique au développement (APD), sujet du rapport spécial que j'ai l'honneur de partager avec Michel Canévet, nous prenons acte que l'exécution de 2024 rend caduque la loi du 4 août 2021 de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales, qui en fixait la trajectoire. Il apparaît donc nécessaire de la réactualiser en tenant compte de nos priorités stratégiques. Un débat sur ce sujet est-il envisagé ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. - De nombreuses questions ont été posées. Il est très précieux pour moi de vous savoir dans ce rôle d'évaluation et de contrôle ; cela permet de rappeler à tous que la gestion de l'argent public impose de rendre des comptes.
Sur les enjeux de la défense, monsieur de Legge, je l'ai déjà indiqué, chaque année, en 2021, en 2022, en 2023 et en 2024, des crédits ont été ouverts en fin de gestion afin de tenir les engagements des lois de programmation, des opérations extérieures et les autres engagements pris par la défense. Je suis une ministre responsable, tout comme le ministre des armées, et nous faisons de notre mieux pour payer durant l'année les dépenses couvertes par les crédits déjà ouverts, tout en préparant cette fin de gestion dans un cadre budgétaire contraint. En temps voulu, je ferai preuve d'une totale transparence, mais nous ne renonçons à rien dans les lois de programmation comme dans les programmes.
Ce n'est pas parce que les commandes se feraient moins vite que prévu que nous pilotons la dépense. En revanche, les services votés ont causé du retard. J'ai procédé à un premier dégel de 650 millions d'euros à la fin du mois d'avril et au tout début du mois de mai, un autre devrait intervenir dans les prochaines semaines pour que les programmes se déploient. Nous ne pratiquons donc pas de pilotage caché pour limiter les dépenses ; les crédits du ministère de la défense sont connus, ils seront respectés et les engagements pris seront tenus.
Évidemment, il nous faut limiter les reports de charges. Le programme est très complexe, puisqu'il s'agit d'autorisations d'engagement qui conduisent ensuite à des crédits de paiement dont nous ne connaissons pas exactement la date de versement. C'est le seul programme qui est construit ainsi, car si l'État se pilote, pour le dire de manière triviale, comme un compte de trésorerie, avec des entrées et des sorties brutes, les armées établissent, quant à elles, une programmation pluriannuelle de très long terme.
Pour preuve, dans la loi de programmation militaire actuelle, le reste à payer à la fin de la programmation se chiffrera encore en plusieurs dizaines de milliards d'euros, ce qui montre que nous sommes engagés dans des trajectoires de très longue durée. Je veux vraiment vous rassurer : il n'y a pas d'agenda caché à Bercy. Au contraire, nous accompagnons les démarches pour que les crédits annoncés soient versés ; c'est un enjeu de souveraineté. Je me bats pour notre souveraineté financière ; il serait baroque que j'empêche notre souveraineté géopolitique et stratégique d'advenir.
Monsieur Canévet, j'ai déjà répondu sur le chiffre de 5,4 %. S'agissant du FSD, je peux vous confirmer que nous n'avons pas d'agenda caché visant à le raboter. Nous avions pris un engagement de rebudgétisation, puisque la Lolf ne nous permettait pas de continuer à affecter cette taxe comme elle l'était, mais nous n'avons pas prévu de réduire les montants qui lui sont alloués.
L'impact budgétaire de la censure s'élève d'abord à 6 milliards d'euros d'effets directs, dus à la chute de la croissance et à une moindre activité par manque de perspectives. À cela s'ajoutent 6 milliards d'euros de moindres économies. Certaines mesures que nous entendions prendre ne l'ont été que très tardivement, voire pas du tout, car elles sont tombées dans le cadre du processus, et un certain nombre de coûts n'ont pas pu être rattrapés. C'est pour cette raison que nous avons dégradé notre objectif, qui était initialement de 5 % de déficit, à 5,4 % : il était impossible, sur seulement dix mois d'année budgétaire, de compenser ces pertes sèches. On peut donc considérer, comme cela a été dit plusieurs fois, que le coût de la censure atteint 12 milliards d'euros.
L'incertitude qui a découlé de l'absence de majorité absolue est, en outre, l'un des éléments qui expliquent la hausse du taux d'épargne et le moindre investissement, mais les chiffres que je vous donne ici sont des coûts directs, que nous savons mesurer, et sont déjà très importants.
Les impayés de loyers relèvent de ce que j'appelle la sincérisation de l'exécution budgétaire. Nous avons divisé par deux les reports dans les ministères : ils s'élevaient à 8 milliards d'euros en entrée 2024, ils sont de 4 milliards d'euros en entrée 2025, et je souhaiterais qu'en 2026, nous les divisions à nouveau par deux. Je rappelle qu'avant la crise du covid, sur le strict périmètre des ministères, les reports étaient de moins de 1 milliard d'euros par an. Il me semble qu'il serait de bon aloi, y compris pour le suivi de l'exécution par les parlementaires, d'en revenir à ce niveau. Une manière de régler cet enjeu des reports est que les dettes soient payées par tous en temps et en heure.
Nous avons aussi beaucoup de dettes hospitalières vis-à-vis des Urssaf et des impôts. Tout cela n'est pas très sérieux. Nous essayons de rappeler à tous qu'il faut payer ses factures à temps, en particulier quand on les doit à d'autres acteurs publics. Nous pilotons cela très précisément.
La question de M. Blanc sur le dispositif MonAccompagnateurRénov est pertinente. Une solution a été apportée à un problème identifié, sans que l'on soit assuré qu'elle l'ait résolu. En effet, certains Accompagnateurs Rénov' adoptent des pratiques pour le moins étonnantes, se trouvant parfois à des centaines, voire à des milliers de kilomètres des chantiers qu'ils suivent. L'accompagnement effectif de terrain s'apparente donc dans certains cas à un simple effet d'annonce. Il s'agit de l'un des points sur lesquels Mme la ministre chargée du logement est susceptible de formuler des propositions dans notre plan de suivi.
Cela ne signifie pas que tous les accompagnateurs soient en cause. Comme dans tout domaine, certains professionnels accomplissent leur mission avec excellence, tandis que d'autres se montrent moins performants. Il importe de s'assurer que la dépense publique puisse être suivie, évaluée et, enfin, défendue.
Je partage pleinement votre exigence de clarté, de stabilité et de lisibilité pour les acteurs économiques. Certains points peuvent être affirmés sans détour : la surtaxe d'impôt sur les sociétés n'existera plus en 2026. Ce gouvernement n'a nulle intention de recourir à une baguette magique fiscale pour combler des écarts dont la cause est la hausse de la dépense, laquelle progresse à des rythmes très supérieurs à ceux de la croissance. Dépenser structurellement plus que sa croissance signifie dépenser structurellement plus que ses recettes. D'aucuns diront qu'il nous faut des recettes ; d'autres, dont je suis, estiment que l'on pourrait commencer par réduire la hausse de la dépense. Je le dis et le redis aux acteurs économiques, ce gouvernement entend préserver les facteurs qui concourent à la compétitivité, à l'innovation et à l'emploi ; en un mot, tout ce qui contribue à la croissance de notre PIB.
L'équation budgétaire s'améliore si notre taux d'emploi et notre productivité augmentent. Si le modèle économique de certains acteurs repose sur la subvention publique, sans productivité ni efficacité économique à la clé, leur inquiétude est légitime, toutefois, comme l'immense majorité d'entre eux opèrent avec des modèles économiques viables, notre but est de préserver et d'encourager cette viabilité, car ce sont nos emplois, notre compétitivité et nos exportations qui sont en jeu.
S'agissant de la loi de programmation des finances publiques, j'ai indiqué que le Premier ministre présenterait une trajectoire pluriannuelle. Nous disposons déjà, par ailleurs, d'une telle trajectoire, présentée à nos partenaires européens, qui vise un retour à 3 % de déficit en 2029. Celle-ci matérialise nos engagements, lesquels ne sont pas pris à la légère puisqu'ils le sont devant nos partenaires européens et, par conséquent, devant nos créanciers, la garantie de notre monnaie constituant un élément clé de notre crédibilité.
Monsieur Savoldelli, si votre manière de l'exprimer est personnelle, je vous rejoins sur un point essentiel : une collectivité ou un ménage qui se trouverait dans cette situation serait confronté à de très grandes difficultés, voire pourrait perdre sa capacité à décider par lui-même. Soit nous sommes capables de faire nos propres choix pour remettre notre pays sur la voie de la souveraineté et du contrôle budgétaire, par des décisions prises démocratiquement ; soit d'autres prendront les décisions à notre place, lorsque ceux qui nous financent, c'est-à-dire nos créanciers, l'imposeront. C'est d'ailleurs ce qui se produit pour un ménage surendetté : des tiers décident pour les adultes responsables du foyer de ce qu'il est possible de faire ou non.
Si nous ne sommes pas crédibles, ce ne sera plus le Parlement qui, de manière autonome, prendra des décisions et fera des choix ; ce seront la contrainte et la pression financières, c'est-à-dire nos créanciers extérieurs. Ce seront aussi les Français eux-mêmes, qui, je le rappelle, financent largement la dette via l'assurance vie.
Nous observons que dans des pays comme les États-Unis cette confiance est aujourd'hui mise à l'épreuve, alors que nous avons tous appris dans les livres que le dollar était une valeur refuge et que le marché obligataire américain était stable et profond. Nous l'avons constaté aussi au Royaume-Uni lors de la présentation des premiers budgets du gouvernement de Mme Truss. La situation est fragile. Je vous rejoins donc sur un point : nous devons être particulièrement déterminés à décider par nous-mêmes, afin de ne pas laisser la pression des marchés nous imposer des choix que nous ne voudrions pas faire.
Je fais le lien avec d'autres questions relatives aux recettes pour 2026. Je le rappelle, nos dépenses représentent l'équivalent de 57 % du PIB, pour 51,3 % de recettes. Ce taux de recettes est un majorant, voire un record en Europe. Chacun peut imaginer de nouvelles recettes, mais il me semble que cela nous placerait dans une situation où nous conserverions les dépenses les plus élevées, nous aurions peut-être davantage de recettes, mais nous maintiendrions notre déficit.
Mon intuition, et même ma conviction, est que, lorsque les recettes atteignent 51,3 % et les dépenses 57 %, on ne peut affirmer que la solution réside uniquement dans les recettes, et qu'il n'y a rien à faire du côté de la dépense, car un tel niveau me paraît trop lourd. Je le rappelle, le consentement à l'impôt des Français est aujourd'hui fragile. Accroître les recettes alors que le consentement à l'impôt est fragile reviendrait à s'assurer de sa disparition. Je ne souhaite donc pas que notre choix collectif se porte sur une hausse des impôts qui pèserait sur les PME, sur les classes moyennes ou sur les classes populaires.
Je souhaite toutefois avancer dans certains domaines, comme les petits colis asiatiques, qui nous coûtent des fortunes et dont 80 % sont non conformes. Cela a été annoncé. J'entends évidemment que toutes les plateformes respectent pleinement et entièrement nos règles et nos charges sociales et je souhaite renforcer la lutte contre la fraude. Ce sont là des sources de recettes. Vous êtes certes les législateurs, mais il ne me semble pas que notre pays ait besoin d'une potion fiscale transversale et massive qui serait, à mon sens, contre-productive.
Concernant la sincérité et la certification des comptes par la Cour des comptes, je vous confirme avoir lu très attentivement son rapport et j'ai rencontré son Premier président. Nous avons engagé un travail très approfondi avec le Conseil de normalisation des comptes publics (CNOCP) afin de nous accorder enfin avec la Cour sur la manière de comptabiliser les amortissements de matériel militaire et sur un certain nombre d'autres points qui sont en débat depuis des années.
Des enjeux de droit, de normes et d'application s'imposent ; je suis très sérieusement engagée sur ce sujet et j'ai demandé que nous ayons une vision claire des différends que nous pouvons résoudre dès cette année et, si ce n'est pas possible, que nous définissions la trajectoire pour ce faire. Il me semble que la certification de nos comptes par la Cour et la définition des bonnes méthodes pour y parvenir constituent un élément de confiance absolue.
S'agissant des collectivités, vous avez été nombreux à m'interroger. Je vous confirme qu'il n'y a aucun blocage de crédits par Bercy. Tous les crédits ont été délégués, à l'exception de la mise en réserve de 5,5 % sur les dépenses hors masse salariale et de 0,5 % sur la masse salariale. L'ensemble des crédits a été délégué aux ministères, qui les répartissent ensuite. Je ferai le point avec M. Retailleau pour comprendre comment, dans les circuits budgétaires du ministère de l'intérieur, les crédits ont été répartis avec la direction générale des collectivités locales (DGCL) et les services de l'administration territoriale de l'État. Vous savez que la DSIL a été ajustée au montant de l'année dernière retranchée des 145 millions d'euros qui ont été réaffectés à la dotation globale de fonctionnement (DGF), un choix confirmé par la commission mixte paritaire. Je n'ai cependant connaissance d'aucune révision majeure des montants. Une mise en réserve de ces sommes est toujours pratiquée, mais elle ne devrait nullement affecter ce que vous signalez, à savoir la capacité des communes à être suivies.
Le Dilico a été notifié et prélevé dans les différentes communes, sans que j'aie été informée de difficultés particulières. Nous avons pris l'engagement de communiquer aux collectivités les éléments pour les trois prochaines années. Il s'agit d'une forme de modération de la dépense qui, d'ailleurs, se traduisait par une moindre croissance début 2025 par rapport à fin 2024. Pour autant, nous n'avons pas encore validé la manière dont nous bâtirons le budget, notamment pour ce qui concerne les collectivités, pour 2026.
Monsieur Delahaye, je dis simplement que ces milliards d'euros sont des sommes que les Français ne peuvent pas toucher du doigt, liées à une dépense qui n'a jamais eu lieu. C'est pourquoi j'estime que, dans le débat public, il est préférable de parler en déficit, en écart d'une année sur l'autre en points de PIB. Il me semble que ce chiffre est mieux compris. Cela ne signifie pas que nous ne travaillons pas sur ces montants, mais ces 40 milliards d'euros ne correspondent, dans le débat public, à aucune mesure que les Français constateront. Entre nous, nous pouvons nous comprendre, mais un déficit de 4,6 %, qui évoque un étiage au niveau duquel la dette n'augmente plus constitue, à mon avis, la boussole que nous pouvons suivre.
Les 8 et 5 milliards d'euros d'annulation et de surgel correspondent à ce que nous faisons en comité d'alerte : nous identifions nos risques et nos aléas. Quand les aléas deviennent des risques avérés, nous prenons des mesures. La mise en réserve de 8 milliards d'euros correspond à l'application stricte de la règle des 5,5 % des crédits hors masse salariale et 0,5 % des crédits de masse salariale. Nous avons mis cette somme de côté. Ensuite, sur ces 8 milliards d'euros, nous en avons annulé 2,5 milliards en raison d'un risque avéré de dérapage d'une somme équivalente. Nous avons rechargé cette réserve du même montant après l'annulation. Le 26 juin prochain, nous présenterons de nouveau une vision claire de notre situation, des aléas et, par conséquent, des mesures que nous prenons.
Concernant les engagements qui ont permis cet accord collectif de non-censure, je peux vous assurer que le Premier ministre est un homme de parole. Le Gouvernement travaille et nous avons formulé un certain nombre de propositions qui sont soumises à son arbitrage et dont il pourra, le moment venu, présenter la mise en oeuvre de celles qu'il souhaite retenir. Plusieurs options sont possibles. Mon objectif n'est cependant pas de créer de nouveaux impôts ni d'augmenter les impôts des Français qui les paient conformément aux règles ; il est de combattre les suroptimisations volontaristes et abusives des revenus fiscaux de référence, via des mécanismes de mise de côté des revenus dans des holdings. Nous le savons, ceux-ci contribuent à une forme d'échappement à l'impôt, potentiellement sur de très longues années. Il en va de même des transmissions entre générations sans que des impôts soient payés. Lors des contrôles fiscaux, les contrôleurs observent un certain nombre de situations de ce type. Il existe plusieurs manières de traiter ce phénomène, le Premier ministre rendra ses arbitrages conformément aux engagements qu'il a pu vous présenter.
Monsieur Nougein, j'ai participé à distance au congrès des buralistes. J'y ai annoncé que les dispositifs seraient rendus pleinement efficaces. Nous avons rouvert un certain nombre de guichets pour que les intéressés puissent bénéficier des aides, soit à la conversion, soit à l'extension des dispositifs de soutien aux buralistes ayant une activité saisonnière. Nous allons mieux lisser les effets de seuil, relancer la campagne de déclaration et, en parallèle, lutter plus efficacement contre la contrebande.
Je vous invite, monsieur le sénateur, si vous le souhaitez, à venir jeudi prochain au ministère, j'y présenterai, en lien avec l'Onaf, les résultats de l'opération Colbert de lutte contre le trafic de tabac, qui sont importants en volumes et en montants. Les buralistes, du reste, soutiennent ce plan.
Votre autre question portait sur la foncière de l'État. Je défends pleinement ce projet ; j'ai d'ailleurs demandé aux équipes que nous en portions l'ambition un peu plus loin et que nous nous inscrivions dans une logique réelle de valorisation du patrimoine immobilier de l'État, mais aussi de celui des opérateurs, de la sécurité sociale, de certaines universités, et potentiellement de certaines collectivités qui le souhaiteraient.
Les Français, par leurs impôts, nous ont collectivement permis de nous constituer un patrimoine immobilier. Il me semble essentiel que celui-ci soit valorisé et produise un rendement. Nous devons faire de la promotion immobilière, de la construction de logements, en particulier pour les agents publics, sur le foncier de l'État. Dans vos départements, les cités administratives disposent souvent de grands parkings en centre-ville avec quelques bâtiments plus ou moins denses. Ces terrains peuvent, par exemple, faire l'objet de constructions pour loger nos jeunes agents publics, nos infirmières, nos aides-soignantes, nos pompiers, nos douaniers, nos policiers. C'est une manière utile de servir l'intérêt général, de participer au logement de nos agents publics, à la construction et à la meilleure valorisation du foncier public. J'y travaille avec une ambition élargie.
Monsieur Maurey, je l'ai indiqué, la délégation de crédits pour la DSIL a été effectuée. Je vais m'enquérir de la situation auprès du préfet, mais je n'ai donné aucune instruction budgétaire visant à ralentir quoi que ce soit en la matière. Des enjeux de répartition peuvent exister, mais il n'y a pas de blocage à ma connaissance.
Concernant les économies, je mène actuellement les entretiens budgétaires : je reçois tous mes collègues ministres pour dresser avec eux le bilan de l'ensemble de leurs politiques, pour déterminer ce qui est prioritaire, pour choisir ce qui doit être réformé et pour identifier les gisements d'économies pour 2026, ou pour la période 2026-2028. Comment nous réorganisons-nous, pour faire le lien avec la commission d'enquête présidée par le sénateur Barros et dont Mme Lavarde est rapporteure, afin d'avoir une organisation plus claire et de fournir les services publics aux Français de manière plus efficace ? Ce travail est en cours, et c'est sur cette base que je présenterai au Premier ministre, pour arbitrage, une méthode pour préparer le prochain budget et les budgets des années à venir.
Sur le fameux article 40 applicable pour le champ d'intervention des collectivités territoriales, je suis très favorable à une forme d'accord entre l'État et les collectivités : une moindre dynamique des recettes perçues par les collectivités doit s'accompagner d'une moindre dynamique de leurs dépenses contraintes par l'État. Boris Ravignon avait estimé ces dépenses peu utiles s'imposant à elles à plus de 7 milliards d'euros. Certaines normes ont déjà été supprimées et un travail très assidu est mené par Gilles Carrez au Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) ainsi que par Boris Ravignon ; il se poursuit.
Nous avons également observé des délais de mise en oeuvre parfois totalement illusoires, qui coûtent très cher, que personne ne peut financer et qui aboutissent à ce que tout le système s'effondre : comme les délais sont intenables, une opposition se manifeste, non plus au délai, mais à la mesure elle-même. J'estime qu'il vaut parfois mieux se donner un peu plus de temps et conserver la mesure, plutôt que de voir certains éléments disparaître purement et simplement du droit.
S'agissant de l'Ugap et de Place, nous allons vous répondre, monsieur le sénateur. J'ai pris des mesures fortes, au vu des éléments portés à ma connaissance, pour que nous rouvrions l'appel d'offres de ce segment, qui a fait beaucoup de bruit. Une mission de l'inspection générale des finances est en cours sur les coûts des centrales d'achat. Pour autant, notre droit de la commande publique permet d'acheter beaucoup de choses en dehors des règles formelles si le montant est inférieur à 40 000 euros pour les achats ou à 100 000 euros pour les travaux. Les petites collectivités se trouvent souvent très en deçà de ces montants. Nul ne les oblige, pour des achats du quotidien, à en payer deux ou trois fois le prix alors qu'elles n'encourent aucun risque juridique à procéder autrement.
Je souhaite que l'on soit également plus clair sur ce qu'est la commande publique et sur la protection qu'elle offre aux citoyens contre les risques de favoritisme, entre autres.
Le deuxième élément de votre question concerne les PME et la souveraineté. Je peux vous assurer que je travaille très activement avec la direction des achats de l'État pour que nous évoluions, en lien avec le droit européen. La France est en pointe pour le faire évoluer, en acceptant la préférence européenne et en introduisant des clauses pour les PME, avec une sorte de Small Business Act ou un Buy European Act, comme les Américains le pratiquent depuis longtemps sans être considérés comme des acteurs hostiles à la concurrence.
Je reviendrai en détail avec vous sur le FNGIR. Par définition, vous êtes souverains sur le budget, vous avez donc la capacité d'agir.
Concernant le SNU et le service militaire volontaire, j'admets que la lisibilité est faible. Que le Président de la République, en particulier dans le cadre de la loi de programmation militaire, remette en avant des mécanismes identifiés et fonctionnels d'engagement, de réserve, de mobilisation de la jeunesse et d'insertion me semble être une bonne chose. Nous y travaillons actuellement en interministériel et j'espère que nous pourrons présenter tout cela rapidement à l'ensemble des intéressés, et à la Nation entière.
Concernant la gestion par à-coups, madame Blatrix Contat, je suis entièrement d'accord avec vous, c'est pourquoi la préparation du budget 2025 a été très différente : nous avons demandé à chaque ministère de constituer une réserve connue, qui est devenue interministérielle et qui ne sera dépensée que si la conjoncture le permet ou si de réels aléas exigent qu'un ministère reçoive un supplément de crédits. En procédant ainsi, on évite de donner et de reprendre plusieurs fois dans l'année au risque de rendre le système illisible et, honnêtement, désespérant pour ceux qui le gèrent.
Concernant les dépenses fiscales, vous savez que j'ai annoncé une action portant en particulier sur deux types de dépenses fiscales, nous y travaillons avec des parlementaires.
Les premières sont les très petits montants, parfois plus coûteux à contrôler et à gérer qu'à verser. Quand j'étais députée, j'avais mené un travail sur les dépenses fiscales bénéficiant à moins de dix contribuables, que nous pourrions renouveler. Pour certaines très petites niches, il pourrait être pertinent de verser directement une subvention aux quelques acteurs concernés.
Le deuxième type de niches fiscales que j'examine concerne celles qui sont très dynamiques et dont la croissance excède largement la croissance économique ou celle des dépenses publiques classiques. Cela révèle un risque de manque de pilotage et de contrôle, et parfois de purs effets d'aubaine, très détachés des intentions initiales ayant présidé à la mise en place de ces dispositifs. Je souhaite étudier cela avec vous, parce que les dépenses fiscales sont souvent mieux étudiées par les parlementaires que par les ministères.
Madame Lavarde, je suis pleinement d'accord avec vous sur la manière de faire évoluer la présentation de ce projet de loi de résultats et je suis intéressée par toutes les évolutions concrètes que votre commission souhaiterait nous proposer. J'estime qu'il est préférable de parler en milliards d'euros et en éléments lisibles sur la dépense et de faire en sorte que les éléments exposés soient comparables. L'approche par la comparabilité entre dépenses budgétaires et comptabilité nationale me semble donc être une excellente idée.
Madame Briquet, s'agissant d'un éventuel projet de loi de finances rectificative (PLFR), nous en présenterions un si nous excédions les bornes fixées par la Lolf. Aujourd'hui, avec 2,5 milliards d'euros d'annulations et autant de surgel, nous sommes largement en deçà de ce seuil. Le but des comités d'alerte est que vous soyez associés, en toute transparence, à la visibilité de notre action. Tous les éléments sont transmis à votre président et à votre rapporteur général, qui sont des vigies exigeantes et précises, comme vous le savez, et qui s'assurent que nous restions bien dans l'étiage en question.
Sur le fonds vert, il y a eu une mise en réserve, comme partout ailleurs, mais nous finançons des objectifs, parfois via les collectivités, parfois via d'autres mécanismes. Là aussi, il n'y a pas d'agenda caché.
Sur l'année blanche, son sens éventuel, son application, son lien avec les bases fiscales relèvent de débats que les parlementaires alimentent. Certains d'entre eux nous ont demandé de chiffrer le bénéfice ou le coût de telle ou telle mesure. Si vous souhaitez que nous examinions ce que signifierait un gel des bases fiscales pour les différentes strates de collectivités, nous pouvons tout à fait le faire. Mon équipe et moi-même y sommes ouverts.
Non, madame Ghislaine Senée, nous ne renonçons aucunement à nos objectifs climatiques. Dans la construction du budget 2026 et dans les échanges que j'ai avec les ministres, je souhaite au contraire que nous soyons très clairs sur les dépenses dites « brunes » et « vertes ». Agnès Pannier-Runacher porte un projet que je trouve intéressant : comparer les recettes générées au titre des malus, par exemple, avec les dépenses engagées pour la transition écologique, afin de nous assurer d'une forme de comparabilité et de lisibilité. Je sais que Mme Lavarde y travaille activement, nous pouvons sans doute nous réunir largement sur cette question, qui concerne notre avenir en tant qu'êtres humains sur la planète.
Enfin, monsieur Raphaël Daubet, concernant l'aide publique au développement, la trajectoire doit évidemment être sincère et lisible. Cela fait partie du fameux cadre pluriannuel que je souhaite que nous présentions dans le projet de loi de finances pour définir des caps qui dépassent une seule année.
J'ai essayé de répondre de manière exhaustive, je vous remercie pour la précision de vos excellentes questions, qui montrent que nous pouvons répondre à l'exigence démocratique : rendre tout cela lisible pour ceux qui y travaillent toute la journée, c'est-à-dire pour vous, comme pour les Français, qui paient des impôts et qui attendent de nous que nous gérions bien la ressource publique.
M. Claude Raynal, président. - Merci de votre participation, madame la ministre.
Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible sur le site du Sénat.
La réunion est close à 16 h 20.
Mercredi 18 juin 2025
- Présidence de M. Michel Canévet, vice-président -
La réunion est ouverte à 10 h 00.
Projet de loi, rejeté par l'Assemblée nationale, relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année 2024 - Examen du rapport
M. Michel Canévet, président. - Nous examinons ce matin le projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année 2024.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Le projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année 2024 a été rejeté par l'Assemblée nationale pour la quatrième année de suite, mais à la différence de l'an dernier, nous pouvons l'examiner suffisamment tôt.
Je dirai d'abord un mot de la situation économique et des finances publiques dans leur ensemble.
La croissance de l'activité en France a diminué en 2024. Là où l'Insee l'estime à 1,4 % en 2023, elle est de 1,2 % en 2024. C'est un peu mieux que la prévision avancée par Bruno Le Maire en février 2024, mais moins bien que ce que prévoyait le Gouvernement dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2024 : 1,4 %. Cet optimisme concernant la prévision de croissance avait bien été souligné par notre commission, de même que son impact sur les recettes : « le plus probable », écrivions-nous alors, « est que la croissance soit inférieure à 1,4 % et que, conséquemment, les recettes soient également inférieures » aux prévisions.
C'est une performance supérieure à celle qui a été enregistrée au niveau de la zone euro dans son ensemble, qui est de 0,9 %. Mais il faut préciser que ce taux a fortement pâti de la récession allemande. L'Espagne, par exemple, a fait beaucoup mieux que la France, avec une croissance de 3,2 %.
L'activité a évolué sous l'influence de vents contraires.
D'une part, l'investissement a reculé sous l'effet de la contraction passée de la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE) et de la hausse du climat d'incertitude né de la dissolution de l'Assemblée nationale, tandis que la consommation des ménages, ralentie par le poids de l'inflation et la lenteur du rattrapage des salaires réels, a été peu porteuse. D'autres facteurs ont pesé, comme le mauvais niveau des récoltes, qui a affecté la croissance à hauteur de 0,2 point selon l'Insee.
L'activité a surtout été portée par la demande publique, c'est-à-dire largement, en pratique, le déficit, et par l'amélioration de la balance commerciale. Que la demande publique ait contribué à hauteur de 0,6 point à la croissance, en ces périodes de déficit élevé, ne peut manquer d'interroger. Par ailleurs, l'amélioration de la balance commerciale, même si elle est contrecarrée par un mouvement de déstockage des entreprises, est une perspective encourageante. Elle s'explique certes, pour une part, par une baisse des importations, qui est la contrepartie d'une consommation intérieure atone, mais pour une part plus importante encore par une hausse franche des exportations. J'attire votre attention sur un point : si la balance commerciale s'est améliorée, elle demeure déficitaire.
Une fois évoquées ces considérations relatives à l'activité en 2024, je reviens sur le trait marquant de cette année : après avoir enregistré en 2023 le niveau de déficit public le plus élevé de la Ve République hors période de crise, notre pays a battu ce triste record en 2024.
La prévision de déficit public était de 4,4 points de PIB lors de la loi de finances initiale (LFI) pour 2024. Elle est passée à 5,1 points lors de la présentation du programme de stabilité, puis à 6,1 points lors de l'examen du PLF de fin de gestion pour 2024, avant de passer à 6 points dans le PLF pour 2025. Finalement, le déficit exécuté s'est élevé à 5,8 points de PIB. Il s'agit donc d'un écart de 1,4 point de PIB par rapport à la prévision, soit environ 41 milliards d'euros...
Nous avons fourni des éléments d'explications de ce qu'on ne peut plus appeler un dérapage, mais plutôt une plongée en eaux troubles, dans les conclusions de notre mission d'information sur la dégradation des finances publiques depuis 2023. Les facteurs sont multiples, mais j'en pointerai trois, que nous avons largement soulignés : un effet du dérapage de 2023 sur 2024 ; un optimisme des prévisions de croissance pour 2024 et des erreurs sur la composition de la croissance ; enfin, un manque de volonté politique tout au long de l'année 2024.
Ces facteurs ont eu des effets à la fois sur les recettes et sur les dépenses.
Je commencerai par les recettes.
D'abord, toutes administrations confondues, le faible niveau de recettes en 2023 s'est répercuté, par un effet de reprise en base, sur 2024, avec un effet de moins-value de 18 milliards d'euros selon le Gouvernement. Au-delà de cette reprise en base, les mécaniques spécifiques de certains impôts ont accentué l'effet de l'exécution de l'année 2023 à hauteur de 11 milliards d'euros.
Ensuite, la révision du scénario macroéconomique a eu un effet double. Selon le Gouvernement, la révision du niveau de croissance lui-même a entraîné une moins-value de 7 milliards d'euros sur les recettes, tandis que l'erreur de prévision sur la composition de la croissance s'est traduite par une élasticité des prélèvements obligatoires plus faible qu'anticipé, avec un effet de 9 milliards d'euros à la baisse.
Concernant les dépenses, par rapport à 2023, celles-ci ont été contenues du côté des administrations centrales grâce notamment à la disparition de mesures de crise. En particulier, les prévisions de dépenses entrant dans le périmètre de dépenses de l'État ont été minorées de plus de 7 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale. Elles ont en revanche été plus élevées que prévu pour les collectivités, avec 330 milliards d'euros, contre 322 milliards anticipés dans le PLF 2024.
Mais c'est la dépense des administrations de sécurité sociale qui a le plus augmenté par rapport à la prévision, avec 777 milliards d'euros au lieu de 761 milliards, en raison notamment du dépassement de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) et de la revalorisation des retraites en fonction de l'inflation passée. La hausse des prestations et transferts versés par les administrations de sécurité sociale (Asso) représente ainsi plus de la moitié de la hausse de la dépense publique en 2024.
Ces données sont toutefois à mettre en parallèle avec celles relatives au déficit public, dont on voit bien qu'il continue d'être porté majoritairement par l'État. C'est d'ailleurs une constante depuis 2017. Et par rapport à 2019, c'est bien l'État qui est responsable de la dégradation de notre situation budgétaire.
À la différence de l'an dernier, ce déficit inédit a bien creusé le ratio d'endettement, qui repart à la hausse, avec 113,2 % du PIB en 2024. En effet, contrairement à ce qu'on observait en 2023, la croissance nominale, du fait d'une baisse de l'inflation, n'est plus suffisamment forte pour, par elle-même, faire diminuer ce ratio. Cet endettement est également principalement porté par l'État.
Concernant la situation des finances publiques dans son ensemble, je ne peux terminer sans dire un mot de la charge de la dette qui, dans le meilleur scénario - à savoir un respect de la trajectoire de finances publiques prévue par le plan structurel et budgétaire de moyen terme - tutoierait les 100 milliards d'euros en 2028.
Lorsque nous l'avons entendu sur la loi de résultats, le premier président de la Cour des comptes nous avait alertés à ce sujet : il suffirait d'un écart même faible avec ce scénario pour que la hausse de la charge de la dette augmente de façon importante. Je pense que cela doit tous nous préoccuper et nous conduire à aborder l'examen du budget 2026 avec la plus grande détermination.
J'en viens à présent aux comptes de l'État, dont l'approbation est, comme chaque année, l'objet principal du projet de loi que nous examinons.
Le déficit budgétaire constaté pour 2024 s'élève à 155,9 milliards d'euros, en amélioration de 17 milliards d'euros par rapport à 2023. Toutefois, il s'agit d'un niveau supérieur de 9 milliards d'euros au montant de 146,9 milliards d'euros prévu en loi de finances initiale pour 2024, même si la loi de finances de fin de gestion avait anticipé un déficit encore plus élevé, à 162,4 milliards d'euros.
L'amélioration du solde entre 2023 et 2024 est d'abord due à une diminution des dépenses nettes de 13 milliards d'euros. Il est toutefois difficile de parler de bonne nouvelle, lorsque le déficit reste d'un niveau que je qualifie d'extrême depuis quelques années, car 150 milliards d'euros, c'est un seuil absolument considérable : imaginez que, même en supprimant « magiquement » toutes les dépenses de l'enseignement scolaire et des armées, le budget serait toujours en déficit.
L'examen de l'évolution du déficit budgétaire entre 2007 et 2024 souligne la lenteur de la décrue du déficit, après l'explosion de celui-ci qui a été causée par les mesures de restriction prises en 2020 pendant la crise sanitaire. Après la crise financière de 2009 et 2010, au contraire, la pente était remontée beaucoup plus vite.
Il ressort de l'évolution, corrigée de l'inflation, des recettes et des dépenses du budget général entre 2017 et 2024 que le budget est de plus en plus écartelé, comme dans un supplice raffiné, entre des dépenses qui ont augmenté de 10,5 % depuis 2017 et des recettes qui, elles, ont diminué de plus de 8 %. Toutes ces courbes sont exprimées en euros constants.
On ne peut donc pas opposer ceux qui disent que la dégradation vient de la baisse des recettes et des impôts et ceux qui affirment qu'elle résulte de la hausse des dépenses. Elle est, de manière factuelle, la résultante de ces deux mouvements parfaitement antagonistes. Loin d'adapter les dépenses au niveau des recettes, l'État a fait l'inverse : pour 1 euro de recettes, l'État dépense aujourd'hui plus de 1,50 euro.
Plusieurs phénomènes réduiront les marges de manoeuvre dans les années à venir. Je me limiterai ici à deux d'entre eux.
Le financement de la dette ne signifie pas qu'on emprunte chaque année des sommes égales au déficit, mais des sommes deux fois plus élevées : en effet, il faut renouveler le stock de dettes existant, et cela a représenté 155 milliards d'euros en 2024, exactement autant que le déficit. C'est ce qui explique que, même si le Gouvernement réussissait à diminuer le déficit dans les années à venir, la charge de la dette augmenterait par le simple renouvellement des emprunts à des conditions de taux moins favorables que par le passé.
Concernant les lois de programmation, on peut estimer leur impact, si elles sont maintenues, à + 19,4 milliards d'euros en 2027. Compte tenu de la situation financière très difficile dans laquelle se trouve notre pays, je crois indispensable d'en rediscuter, même s'il est difficile de nier la nécessité de préserver la plus importante, celle qui concerne les armées.
En 2024 comme en 2023, l'exécution budgétaire a été affectée par des moins-values importantes en recettes. Prévues à un niveau de 348,5 milliards d'euros en loi de finances initiale pour 2024, les recettes fiscales ont été de 325,7 milliards d'euros en exécution, soit un écart de 22,8 milliards d'euros.
L'impôt sur les sociétés, en particulier, a produit 57,4 milliards d'euros au lieu des 72 milliards attendus. Il faut bien constater, comme nous l'avons fait au cours de nos travaux l'an dernier, que les estimations présentées au Parlement en LFI étaient très exagérées, car aucune crise n'explique une telle évolution en cours d'année. Je noterai tout de même que, contrairement à ce qui s'était passé en 2023, le Gouvernement a pris acte, dès le début de l'automne, de cette moins-value : l'estimation donnée dans le projet de loi de fin de gestion était proche de l'exécution finale. Cela est vrai également pour la TVA et l'impôt sur le revenu, qui accusent respectivement des moins-values de 4 milliards et 5,4 milliards d'euros.
Sur le moyen terme, la diminution tendancielle des recettes fiscales en euros constants, que j'ai déjà évoquée, s'explique d'abord par le choix de l'État de financer les transferts de compétences à d'autres administrations non pas par des économies, mais par un transfert de parts croissantes de TVA. Sans ce choix, les recettes fiscales auraient augmenté de 25 % au lieu de diminuer de 10 %.
Lorsque les recettes sont insuffisantes, il faudrait réduire les dépenses. L'année 2024 a certes connu, ce qui est assez exceptionnel, une diminution des dépenses à hauteur de 11,2 milliards sur le budget général, mais son caractère conjoncturel impose de nouveaux efforts dès le prochain budget. En étudiant les évolutions des crédits entre 2023 et 2024, on voit en effet que la diminution des dépenses résulte d'un fait unique : la disparition progressive des boucliers tarifaires mis en place pendant la crise inflationniste, qui réduit les sommes dépensées au titre du service public de l'énergie.
Une autre baisse notable concerne la charge de la dette, car la diminution de l'inflation réduit la charge des obligations indexées : là encore, cette diminution est temporaire, car la hausse des taux entraînera mécaniquement une augmentation durable de la charge de la dette dans les années à venir, au fur et à mesure du remplacement des emprunts anciens, contractés à un taux très faible, par des emprunts soumis aux conditions actuelles.
Force est de constater que les dépenses ne sont toujours pas revenues au niveau antérieur à la crise sanitaire, signe que certaines dépenses présentées comme temporaires sont devenues définitives.
Ce constat est également valable pour les dépenses de masse salariale, qui font un véritable bond de 6,6 milliards d'euros en 2024. Cette augmentation est liée à des mesures catégorielles très importantes et nous indique où il faudra, aussi, porter l'effort : il n'est pas normal que ce poste de dépenses ait autant augmenté depuis 2019.
Les effectifs ont d'ailleurs augmenté de plus de 6 700 équivalents temps plein (ETP) en 2024. La loi de finances initiale, qui l'avait prévu, avait pourtant été promulguée onze jours seulement après une loi de programmation des finances publiques qui, elle, fixait comme objectif la stabilité des emplois sur la période 2023-2027. On s'y perd...
Pour terminer cette présentation, je dirai un mot sur le dispositif de suivi de la performance de la dépense publique. Nous fêterons l'an prochain les vingt ans de la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf). Nous fêterons probablement, aussi, l'atteinte du chiffre de 2 000 sous-indicateurs de performance : triste réussite qui ne saurait réjouir que les bureaucrates les plus acharnés, amateurs d'une complexification décourageante pour tout un chacun !
Le constat que je fais depuis plusieurs années est le même : les indicateurs de performance sont, pour beaucoup, non pertinents. Je citerai pour exemple un indicateur pour lequel l'administration fixe une cible : le nombre d'auditions de la Cour des comptes au Parlement. Or c'est le Parlement qui invite la Cour...
En outre, ces indicateurs sont inexploitables pour près d'un tiers : soit leur cible n'est pas fixée, soit les données quant à l'atteinte de la cible n'ont pas été collectées en temps voulu par l'administration.
Enfin, ces indicateurs sont toujours plus nombreux, et différents dispositifs de suivi de la performance se chevauchent : le récent « baromètre des services publics », créé par le ministre de l'action publique, de la fonction publique et de la simplification, crée de nouveaux indicateurs de satisfaction des citoyens qui ne sont pas retracés dans les documents budgétaires.
La Lolf devait créer une saine gouvernance des finances publiques, en favorisant l'objectivation de l'efficience de la dépense. Nous nous retrouvons aujourd'hui avec un dispositif lourd, illisible et hors de contrôle. Je propose donc qu'une réforme d'ampleur soit entreprise pour réduire drastiquement le nombre d'indicateurs. Si j'étais iconoclaste, je me demanderais si ne nous pourrions pas aller jusqu'à supprimer le suivi de la performance au vu de son actuelle inefficacité et pour simplifier le travail de l'administration... Supprimer peut aussi être l'aboutissement de la simplification !
En conclusion, l'année 2024 a vraiment été l'annus horribilis des finances publiques pour notre pays : déficit historique hors période de crise, écart massif avec la prévision, mesures de régulation erratiques avec un décret d'annulation de 10 milliards d'euros de crédits le 21 février juste avant des reports d'un montant supérieur - 16 milliards d'euros - et, finalement, illisibilité totale de l'exécution budgétaire.
Pourtant, le Gouvernement - l'audition de Mme de Montchalin hier l'a confirmé - persévère dans l'aveuglement passé, en refusant de faire la lumière sur les motifs de cette dérive. Le titre de l'exposé des motifs du présent projet de loi est à cet égard assez éloquent : « Un résultat s'inscrivant dans une trajectoire de redressement des comptes publics et s'appuyant sur un pilotage renforcé de la dépense ».
Pour l'ensemble de ces raisons, je vous propose, comme l'an dernier, de rejeter le projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année 2024, tout en espérant vivement que l'exécution 2025 nous permette - enfin ! - de retrouver une gestion budgétaire saine et sereine.
M. Michel Canévet, président. - Il est toujours étonnant, presque remarquable, de constater la contribution positive des administrations de sécurité sociale au solde des comptes publics, alors même que la sécurité sociale, en elle-même, est en déficit...
M. Vincent Delahaye. - Je partage l'analyse du rapporteur général. D'ailleurs, si nous ne rejetions pas cette année le projet de loi d'approbation des comptes, nous ne le ferions jamais !
La Cour des comptes a de nouveau émis des réserves : est-ce que des améliorations sont tout de même apparues quant à celles qui avaient été formulées les années précédentes ?
Je partage l'idée que nous devrions supprimer les 2 000 indicateurs de performance : il est presque évident que personne ne s'en sert et qu'ils ont pour seul « intérêt » de faire travailler des fonctionnaires !
Hier, lors de l'audition de la ministre en charge des comptes publics, nous avons obtenu quelques éclaircissements en ce qui concerne les 40 milliards d'euros d'efforts projetés pour 2026. Cette somme représenterait la différence entre le tendanciel - 1 750 milliards - et le niveau de 2025 - soit 1 710 milliards d'euros. Or, dans ce projet de loi, on voit que les dépenses publiques s'élevaient à 1 670 milliards en 2024 : cela signifie-t-il qu'on augmenterait les dépenses publiques de 80 milliards d'euros en deux ans si l'on suivait le tendanciel en 2026 ? En tout cas, nous sommes bien loin de l'austérité décriée par certains !
Mme Isabelle Briquet. - Nous partageons le constat du rapporteur général sur les dysfonctionnements relevés en 2024, qui constituent vraiment une caricature de ce qu'il ne faut pas faire en termes d'exécution budgétaire. Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera donc contre ce projet de loi.
Pour autant, nous divergeons, monsieur le rapporteur général, sur les solutions à apporter : s'il est nécessaire de maîtriser la dépense, n'envisager aucune recette nouvelle ne nous paraît pas soutenable. Nous en débattrons au moment du PLF.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - L'avis de la Cour des comptes est encore plus sévère cette année que l'an passé : la Cour a continué d'émettre des réserves et a menacé de ne pas certifier les comptes l'an prochain.
Je retiens la préoccupation d'Isabelle Briquet sur la nécessaire maîtrise de la dépense : c'est ce qui est à la fois le plus important et le plus difficile à réaliser, alors même que notre pays atteint les niveaux les plus élevés des pays de l'OCDE. Je fais d'ailleurs confiance à l'esprit de responsabilité des uns et des autres pour trouver les meilleures solutions. Le Sénat a déjà montré sa capacité à prendre des décisions.
M. Pascal Savoldelli. - Le groupe CRCE-K votera également contre le projet de loi. Cela ne signifie évidemment pas que nous soutenons l'argumentation du rapporteur général...
La commission décide de proposer au Sénat de ne pas adopter le projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année 2024. En conséquence, elle décide de ne pas adopter chacun des articles du projet de loi.
- Projet de loi, rejeté par l'Assemblée nationale, portant approbation des comptes de la sécurité sociale de l'année 2024 - Examen du rapport pour avis
M. Michel Canévet, président. - Nous examinons maintenant le rapport pour avis de notre collègue Vincent Delahaye sur le projet de loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale de l'année 2024.
M. Vincent Delahaye, rapporteur pour avis. - Le projet de loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale (Placss) constitue le pendant, pour les comptes sociaux, du texte que nous venons d'examiner, à savoir le projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes. Comme l'année dernière, la commission des finances s'est saisie pour avis de ce texte afin de donner son appréciation de la situation de la sécurité sociale en 2024. N'oublions pas en effet que les dépenses sociales représentent 46,5 % des dépenses publiques.
La très grande majorité des dépenses sociales constituent des dépenses de fonctionnement, ce qui justifierait que les comptes soient à l'équilibre... Or nous assistons à une hausse incontrôlée des déficits : le déficit total de la sécurité sociale s'est ainsi élevé à 15,3 milliards d'euros en 2024, supérieur de 4,5 milliards à celui de 2023.
Ce déficit provient très largement de la mise en oeuvre des décisions prises dans le cadre du Ségur de la santé, pour un coût de 13 milliards d'euros chaque année : l'augmentation des salaires des soignants n'a pas été financée par des recettes nouvelles ou par des économies. Ainsi, la branche maladie connaît un déficit de 13,2 milliards d'euros.
De son côté, le déficit de la branche retraite atteint 5,6 milliards, en incluant le fonds de solidarité vieillesse (FSV). Ce montant provient principalement de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), qui gère les pensions des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers : le déficit s'est élevé à 3 milliards d'euros en 2024, alors même que le taux de cotisation des employeurs a été rehaussé d'un point. Il est prévu que ce taux de cotisation augmente de trois points par an entre 2025 et 2028, année où est envisagé un retour à l'équilibre, ce qui ne me parait pas certain.
Je tiens à souligner l'impact qu'a eu le mécanisme de compensation démographique sur les comptes de la CNRACL. En 2024, cette caisse a encore versé 456 millions d'euros à ce titre. Au total, elle a contribué pour près de 100 milliards d'euros constants depuis 1974. Une révision des règles du mécanisme de compensation démographique doit absolument être envisagée.
L'explosion des déficits de la sécurité sociale implique une hausse très forte de la dette sociale, qui devient insoutenable : 157,1 milliards d'euros en 2024. Cette dette sociale est encore portée en majeure partie par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades), dont le plafond de transfert de dette est fixé par la loi organique à 136 milliards d'euros. Aucun nouveau transfert de dette à la Cades n'est possible à partir de 2025 sans une nouvelle loi organique. Les déficits sont donc portés par l'Urssaf Caisse nationale, nouveau nom de l'Acoss, qui ne peut se financer que sur le court terme.
J'imagine que le Gouvernement envisage de présenter un projet de loi organique pour transférer une nouvelle fois de la dette à la Cades. Une telle mesure ne remplacerait pas la nécessité de prendre des mesures de fond pour juguler une situation qui est aujourd'hui insoutenable, en particulier dans les branches maladie et retraite.
Par ailleurs, comme pour l'État, les prévisions de recettes ont été largement surestimées, de l'ordre de 4,8 milliards d'euros. Leur hausse est stabilisée.
En 2024, les dépenses ont crû de 33 milliards d'euros, principalement en raison de la revalorisation des retraites - 5,3 % au 1er janvier 2024.
De nouveau cette année, les comptes de la branche famille n'ont pas été certifiés par la Cour des comptes.
Pour conclure, je vous rappelle que, pour les comptes 2022 et 2023, nous avions décidé de ne pas émettre d'avis favorable au projet de loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale en raison à la fois des réserves de la Cour des comptes et de la dérive des dépenses. Je vous propose de faire de même cette année.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Malheureusement, l'annus horribilis 2024 se confirme pour les comptes publics !
Je m'interroge sur l'enchevêtrement et la fragilité des montages financiers entre les branches, les régimes, la Cades et l'Urssaf Caisse nationale. Comment avancer en la matière ?
Mme Nathalie Goulet. - Comme l'indique Vincent Delahaye dans son rapport pour avis, les comptes sociaux ont une fiabilité incertaine. Ainsi, il y aurait 6 milliards d'euros d'indus, d'erreurs et de fraudes pour la seule branche famille ! Que représente la menace d'une non-certification des comptes dans ce contexte ? Pas grand-chose ! Dans n'importe quel autre organisme, combien de temps laisserait-on des dirigeants en place avec un tel montant de fraudes et d'erreurs ? Qui plus est, les contrôles sont toujours réalisés en interne. Il faut absolument inverser le cours des choses.
M. Grégory Blanc. - Je partage l'avis défavorable proposé par notre rapporteur en raison des réserves émises par la Cour des comptes.
Cela étant, parler d'une dette sociale « insoutenable » me paraît excessif au regard des enveloppes budgétaires des comptes sociaux : elle est insoutenable en raison des déficits annuels qui s'accumulent.
À combien évalue-t-on le montant des recettes qui devraient rentrer dans les caisses et qui n'y sont pas du fait de décisions politiques ?
M. Christian Bilhac. - Je suis quand même abasourdi par la légèreté avec laquelle nos comptes sont gérés ! Et j'aurais pu dire la même chose pour le texte précédent, qui portait sur les comptes de l'État. N'importe quelle commune aurait déjà été lourdement sanctionnée ; là, rien ne se passe !
Je rappelle, comme l'a fait Vincent Delahaye, que la CNRACL est ponctionnée tous les ans - 100 milliards d'euros depuis 1974 ! -, si bien que les employeurs locaux et hospitaliers payent pour compenser l'inanité de la puissance publique.
En France, nous souffrons de normes excessives, d'une sur-administration. Une enquête diffusée ce matin sur Franceinfo révèle la perte d'attractivité de la France dans le secteur pharmaceutique et les raisons mises en avant sont respectivement les normes, la bureaucratie, les délais et la fiscalité - la fiscalité n'est qu'en quatrième place ! Tout le monde dit la même chose ; les agriculteurs, les maires, les chefs d'entreprise, etc. en ont tous assez de ce carcan normatif.
Je vais prendre l'exemple de l'hôpital : on vote un objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) en hausse, mais ce sont des personnels administratifs, et pas des soignants, qui sont recrutés ! Or, que je sache, les tableaux Excel n'ont jamais soigné un malade... On augmente les crédits, et chacun constate pourtant une dégradation des services publics et tout cela, parce que l'argent n'est pas consacré au coeur de métier de l'État ou de la sécurité sociale, il part dans la bureaucratie et les frais généraux ! Voilà pourquoi nous ne devons pas laisser totalement la main à l'exécutif et à l'administration.
Mme Florence Blatrix Contat. - Je veux simplement rappeler que l'État n'a pas voulu prendre en charge la dette liée au covid et que ce sont la sécurité sociale et la Cades qui ont dû le faire. Cela explique une large part de la situation actuelle.
M. Didier Rambaud. - Je peux être d'accord avec les constats qui sont faits, mais quelles conséquences en tirez-vous, mes chers collègues, en particulier pour 2026 ? On nous dit que la revalorisation des pensions de retraite à hauteur de 5,3 % début 2024 a eu un effet majeur sur les comptes sociaux. Il faut alors assumer : quid d'une année blanche en 2026 ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur pour avis. - L'idéal serait de réduire la dépense, au moins de limiter son augmentation, mais on ne peut pas, en tout état de cause, laisser l'Urssaf Caisse nationale s'occuper d'un déficit structurel : cet organisme est chargé de gérer la trésorerie de la sécurité sociale et est donc limité notamment dans la durée des emprunts qu'il peut effectuer.
Des augmentations de salaire ont été décidées sans aucun financement et ces décisions vont continuer de peser lourdement sur les comptes, en particulier si aucune mesure n'est prise pour endiguer les déficits. Certes, le contexte politique ne favorise pas la prise de décision, mais il nous faut être responsables !
Nathalie Goulet appelle notre attention sur les responsables de cette situation. Même si les ministres ont changé, c'est l'administration qui dirige dans notre pays, et des sanctions devraient être prises. On ne peut pas continuer sur cette base ! Les réserves de la Cour des comptes n'ont pas été levées, les choses s'aggravent et rien ne change.
S'agissant de la fraude, je crois qu'une certaine dynamique s'est enclenchée - l'engagement de Nathalie Goulet, comme d'autres, n'est d'ailleurs pas étranger à ce début de mobilisation. Les différents gouvernements qui se succèdent intègrent maintenant un objectif de lutte contre la fraude. C'est très important, parce que les sommes en jeu sont loin d'être négligeables et tout cela nuit au système lui-même.
J'imagine que la question de Grégory Blanc fait référence aux exonérations de cotisations sociales. Ces exonérations sont estimées pour les régimes de base de la sécurité sociale à 74,5 milliards d'euros, dont 2,8 milliards ne sont pas compensés par l'État à la sécurité sociale.
Je partage les propos de Christian Bilhac sur les normes excessives et la sur-administration. Mais on le voit bien, dès qu'on veut supprimer quelque chose dans notre pays, c'est extrêmement difficile... On en revient au débat précédent sur les indicateurs de performance dans le budget de l'État : en supprimant ces 2 000 indicateurs, nous ferions en fait des économies !
La dette covid a effectivement été largement prise en charge par la sécurité sociale et la Cades ; c'est une réalité. Pour autant, concernant les retraites, l'État supporte une partie du déficit de la branche, notamment au titre des pensions de ses agents : il faudrait en fait procéder à un rééquilibrage pour diminuer un peu le déficit de l'État, mais cela augmenterait celui de la branche retraite.
Pas besoin, monsieur Rambaud, de trop me pousser vers l'idée d'une année blanche sur les retraites ! Je pense même qu'il en faudrait plusieurs, puisqu'on ne réussit pas à financer les revalorisations. Ce serait une façon de faire, mais ce n'est pas la seule.
La commission émet un avis défavorable à l'adoption du projet de loi portant approbation des comptes de la sécurité sociale de l'année 2024.
La réunion est close à 10 h 55.