Mardi 24 juin 2025

- Présidence de M. Jean-François Longeot, président -

La réunion est ouverte à 14 h 00.

Projet de loi relatif à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 - Examen des amendements de séance sur les articles délégués au fond sur le texte de la commission des lois

M. Jean-François Longeot, président. - Nous examinons cet après-midi les amendements de séance sur les articles délégués au fond par la commission des lois sur le projet de loi relatif à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030.

EXAMEN DES AMENDEMENTS DE SÉANCE

Après l'article 2

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°  92.

Article 3

La commission émet un avis défavorable à l'amendement de suppression no  16, de même qu'à l'amendement n°  17. Elle émet un avis favorable à l'amendement n°  100. Elle émet un avis défavorable aux amendements nos  49, 18, 23, 19 et 20.

Après l'article 3

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°  38 rectifié. Elle émet un avis favorable à l'amendement n°  44 rectifié.

Après l'article 14

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°  89.

Après l'article 32

La commission propose à la commission des lois de déclarer l'amendement n°  68 irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.

Les avis de la commission sur les amendements de séance sont repris dans le tableau ci-après :

Auteur

Objet

Avis de la commission

Article additionnel après Article 2

M. DOSSUS

92

Respect par les partenaires commerciaux et sponsors de la directive CSRD

Défavorable

Article 3

M. DOSSUS

16

Suppression

Défavorable

M. DOSSUS

17

Interdiction de l'affichage publicitaire sur les arbres et dans l'enceinte des parcs et jardins publics

Défavorable

Le Gouvernement

100

Publicité dans les aires d'adhésion aux parcs nationaux

Favorable

Mme MARGATÉ

49

Financement d'activités gratuites et publiques

Défavorable

M. DOSSUS

18

Interdiction des publicités sur des supports lumineux ou numériques 

Défavorable

Mme BRIANTE GUILLEMONT

23 rect. bis

Interdiction des publicités sur des supports lumineux ou numériques 

Défavorable

M. DOSSUS

19

Interdiction de la publicité au moyen d'aéronefs

Défavorable

M. DOSSUS

20

Interdiction de la publicité sur des emballages et contenants composés de plastique

Défavorable

Article additionnel après Article 3

M. Michaël WEBER

38 rect.

Engagements du Cojop en faveur de l'économie circulaire

Défavorable

M. GONTARD

44 rect.

Rapports sur l'impact environnemental des JOP 2030

Favorable

Article additionnel après Article 14

Mme NOËL

89 rect. quater

Reconnaissance d'une raison impérative d'intérêt public majeur aux projets relatifs aux JOP 2030

Défavorable

Article additionnel après Article 32

Mme OLLIVIER

68

Moratoire sur les vertiports et les taxis volants

Irrecevable

La réunion est close à 14 h 05.

Mercredi 25 juin 2025

- Présidence de M. Jean-François Longeot, président -

La réunion est ouverte à 9 h 30.

L'application de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (Agec) - Examen du rapport d'information

M. Jean-François Longeot, président. - J'ai le plaisir d'introduire notre second point d'ordre du jour : la présentation des conclusions et des recommandations de la mission d'information sur le bilan de la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (Agec).

Je remercie chaleureusement nos deux rapporteurs, Marta de Cidrac et Jacques Fernique, pour la qualité de leur travail, l'équilibre de leur analyse, et leur engagement constant tout au long de ces six mois d'auditions, de déplacements et de concertations. Ils ont su être à l'écoute de l'ensemble des acteurs de l'économie circulaire, dans toute leur diversité.

Pour mémoire, notre commission avait décidé de créer cette mission en novembre dernier, car, plus de quatre ans après l'entrée en vigueur de la loi, nous avons constaté les premières tensions autour des filières à responsabilité élargie du producteur (REP). D'un côté, les écocontributions sont montées en puissance et pèsent parfois lourdement sur la compétitivité de certains acteurs économiques ; de l'autre, les résultats environnementaux sont encore trop timides.

Ces signaux d'alerte nous ont interpellés, la présidente du groupe d'études Économie circulaire, Marta de Cidrac, et moi-même, sur la nécessité de conduire un travail d'évaluation sénatorial. Dans ce contexte, nous avons décidé de lancer cette mission d'information interne à la commission, afin de faire le point sur l'application de la loi et d'identifier des leviers d'amélioration.

Alors que ces travaux de contrôle arrivent à leur terme, l'actualité législative semble nous avoir donné raison puisque nous avons examiné pas moins de trois textes de loi relatifs à l'économie circulaire, ce qui confirme la nécessité d'évaluation que nous avions bien identifiée.

Je cède sans plus tarder la parole à nos rapporteurs, Marta de Cidrac et Jacques Fernique, pour qu'ils nous présentent les enseignements et les propositions résultant de leurs travaux.

Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Après plusieurs mois de travail au long cours, j'éprouve un réel plaisir à vous présenter, avec mon collègue Jacques Fernique, le rapport d'information consacré au premier bilan de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire de 2020.

En décembre dernier, ayant été alertée par les représentants de plusieurs secteurs - le bâtiment, l'ameublement, le textile - j'ai sollicité le président Longeot pour qu'une mission d'information passe au crible l'application de cette loi. Cinq ans après sa promulgation, il nous fallait mesurer, non pas filière par filière, mais de façon globale, l'efficacité de ce texte fondateur.

L'actualité de notre commission nous a donné raison, puisque, en quatre mois, nous avons examiné trois textes touchant directement à l'économie circulaire : la proposition de loi visant à renforcer la prévention des risques d'accident liés aux batteries au lithium et aux cartouches de protoxyde d'azote dans les installations de traitement de déchets ; la proposition de loi visant à rééquilibrer la filière à responsabilité élargie du producteur des produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment au profit des produits du bois et la proposition de loi visant à réduire l'impact environnemental de l'industrie textile. Autant de signaux prouvant qu'il était grand temps de dresser un état des lieux.

Je vous remercie de la confiance que vous nous avez accordée, à Jacques Fernique et à moi-même, pour conduire ces travaux de contrôle très attendus par l'ensemble des acteurs de l'économie circulaire.

Dès le mois de janvier, nous avons engagé nos travaux sur le terrain. Nos trente-quatre auditions, nous ont permis d'entendre plus de cinquante acteurs de l'économie circulaire : collectivités, services de l'État, éco-organismes, fédérations professionnelles, associations environnementales ou encore structures de l'économie sociale et solidaire.

Nous avons également souhaité prendre le pouls sur le terrain, en nous rendant sur plusieurs sites confrontés aux défis de la loi Agec : dans les Yvelines, nous avons visité une unité de valorisation énergétique et un point de tri textile ; dans le Bas-Rhin, nous avons visité un centre de tri pour recyclage.

Nous nous sommes également rendus à Bruxelles pour échanger avec des acteurs européens et avons sollicité une étude de législation comparée, car, chacun le sait ici, l'économie circulaire ne s'arrête pas aux frontières nationales : elle s'inscrit aussi pleinement dans les dynamiques européennes.

Tout cela nous a permis d'accumuler une matière riche, à partir de laquelle nous avons rédigé un rapport d'information volontairement concis et tourné vers l'action. Plutôt que de nous perdre dans les détails techniques propres à chaque filière, nous avons choisi le point de vue du législateur et formulé huit recommandations claires pour accélérer et amplifier la transition vers l'économie circulaire.

M. Jacques Fernique, rapporteur. - Après l'introduction de ma collègue rapporteure, j'aimerais revenir sur les principaux enjeux que nous avons identifiés au fil de nos travaux.

Le premier enjeu est le plus évident : la question environnementale.

La loi Agec de 2020, première loi française consacrée à l'économie circulaire, portait avant tout une ambition environnementale forte. Elle visait à mieux informer le consommateur, à lutter contre le gaspillage, à renforcer le principe du pollueur-payeur et à encadrer plus efficacement les dépôts sauvages.

S'il est encore trop tôt pour mesurer si les objectifs ont bien été atteints, dans la mesure où ils sont, pour beaucoup, fixés au-delà de l'horizon 2025, tous les acteurs que nous avons entendus ont salué la prise de conscience que cette loi a permise. Toutefois, ils ont également souligné les difficultés qu'ils rencontrent sur le terrain. Cela nous conduit à une conclusion claire : il faut donner un nouveau souffle aux politiques d'économie circulaire.

Le deuxième enjeu a émergé plus récemment : l'autonomie stratégique.

Les représentants d'institutions européennes que nous avons rencontrés nous ont clairement dit que l'économie circulaire est devenue un levier essentiel pour réduire notre dépendance aux importations de matières premières et prévenir une potentielle crise des ressources, comme ce fut le cas de la crise énergétique que la guerre en Ukraine a déclenchée. L'Europe a bien saisi cet enjeu : à l'heure actuelle, l'économie circulaire est l'un des rares volets du Pacte vert pour l'Europe à continuer à progresser, malgré les vents contraires. En France, cette prise de conscience mérite d'être renforcée et traduite en actes.

Enfin, le troisième enjeu est majeur : la compétitivité économique, qui conditionne en grande partie l'adhésion à cette transition.

D'ici à 2029, les écocontributions, c'est-à-dire les montants versés par les producteurs pour financer la gestion de la fin de vie de leurs produits, devraient atteindre 8 milliards d'euros, contre 900 millions d'euros en 2010. Cette progression spectaculaire est due à l'élargissement des filières concernées - les produits sont beaucoup plus nombreux - et à l'augmentation des montants dus. Mais cette hausse, perçue comme brutale par certaines entreprises, alimente des interrogations croissantes sur la soutenabilité du système et oblige à la performance.

Un autre sujet de préoccupation est étroitement lié à la compétitivité : la fraude. Certains producteurs, que l'on qualifie de passagers clandestins, ne s'acquittent pas des écocontributions, pourtant obligatoires. En échappant à leurs responsabilités, ils faussent la concurrence au détriment des entreprises vertueuses, créant ainsi un sentiment d'injustice économique. Ces pratiques minent l'adhésion au système.

Des efforts sont faits pour lutter contre ces dernières, mais ils demeurent insuffisants face à l'ampleur du phénomène. Il est indispensable de les renforcer afin de restaurer un climat de confiance et de garantir des règles du jeu équitables. Ces conditions sont essentielles pour assurer la viabilité économique et l'efficacité environnementale du modèle circulaire.

Je redonne à présent la parole à Marta de Cidrac, qui va vous présenter nos propositions de réforme de la gouvernance que nous souhaitons soumettre à votre réflexion.

Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Pour donner un nouveau souffle aux politiques d'économie circulaire, il est d'abord indispensable d'en revoir le pilotage.

Beaucoup d'acteurs entendus l'ont dit très clairement : trop souvent, ils naviguent à vue faute de boussole et de vision d'ensemble. Or, pour investir et innover, les acteurs économiques ont besoin de visibilité. Ceux-ci demandent également une véritable coordination interministérielle, car l'économie circulaire ne répond pas uniquement à un enjeu environnemental. Elle est aussi intimement liée à notre industrie, à notre économie, à notre politique de formation et à l'aménagement de notre territoire.

C'est pourquoi nous proposons qu'une stratégie industrielle soit élaborée au plus haut niveau, par un service à compétence interministérielle directement rattaché au Premier ministre.

Cette stratégie consisterait à fixer des objectifs chiffrés à moyen terme et à préciser les leviers à mobiliser - qu'il s'agisse des écocontributions, de la formation, des aides publiques ou des investissements -, tout en clarifiant ce qui relève ou non du champ d'action des éco-organismes. Surtout, elle s'imposerait à l'ensemble des ministères, pour garantir la cohérence de l'action publique.

Toutefois, nous savons bien, au Sénat, que, sans ancrage territorial, une stratégie reste de papier. Pour décliner notre stratégie dans les territoires, l'échelon régional nous paraît le plus pertinent. En effet, depuis une dizaine d'années, les régions sont déjà responsables de la planification en matière de déchets. Elles connaissent les réalités du terrain et les besoins des acteurs locaux.

Encore faut-il leur en donner les moyens. Comme l'a rappelé l'association Régions de France, que nous avons auditionnée, il est impératif d'adapter les financements à cette nouvelle responsabilité. Le fonds économie circulaire, qui permet déjà de financer des projets de réduction des déchets, de réemploi ou de recyclage, pourrait être cogéré par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) et les régions. Il deviendrait ainsi le bras armé de la stratégie nationale à l'échelle locale.

Nous avons également constaté que la gouvernance des éco-organismes méritait d'être profondément repensée. Ces structures, financées par les producteurs, sont chargées de la gestion de la fin de vie des produits. Depuis la loi Agec, elles doivent également soutenir le réemploi et la réparation.

Or de nombreux acteurs nous ont alertés sur un déséquilibre : les producteurs, qui financent le système, en conservent aussi le contrôle. Cela crée un conflit d'intérêts structurel. L'objectif légitime de contenir les coûts peut se traduire, dans les faits, par une pression sur les collectivités et les opérateurs de déchets, au détriment de l'intérêt général.

La loi Agec avait posé les premiers jalons d'une gouvernance plus ouverte, en intégrant les collectivités, les associations environnementales ou encore les acteurs de l'économie sociale et solidaire. Nous pensons qu'il faut aller plus loin en simplifiant les instances, en clarifiant les rôles, et en renforçant la co-construction. La gouvernance serait ainsi plus équilibrée et plus efficace.

Enfin, l'État doit jouer pleinement son rôle de régulateur. Celui-ci fixe les objectifs aux éco-organismes et s'assure de leur respect, mais nous avons constaté des défaillances. En tant que garant de l'intérêt général, l'État doit pouvoir imposer des objectifs clairs, proportionnés, économiquement soutenables, et veiller à ce qu'ils soient respectés. En outre, il doit encadrer la concurrence entre éco-organismes pour éviter les effets pervers tels que le dumping réglementaire, une complexité excessive pour les collectivités, ou encore l'inefficacité environnementale.

Voilà les grandes orientations que nous vous soumettons pour réformer en profondeur la gouvernance de l'économie circulaire. L'économie circulaire doit être pilotée par une stratégie interministérielle territorialisée par les régions. De leur côté, les éco-organismes doivent associer pleinement les parties prenantes à la gouvernance des filières à responsabilité élargie des producteurs, tout en étant correctement régulés par l'État.

M. Jacques Fernique, rapporteur. - J'en viens à la déclinaison de cette stratégie. Pour cela, je vous propose de suivre le cycle de vie du produit.

L'économie circulaire doit être appréhendée dès la conception du produit. Il convient de mieux encourager l'écoconception, qui consiste à créer des produits plus durables, réparables et recyclables. Par exemple, un système de bonus-malus renforcé et harmonisé à l'échelle européenne permettrait de valoriser les produits les plus vertueux.

Ensuite, nous devons agir au moment de la commercialisation du produit. Le texte que nous avons examiné récemment sur la mode ultra-express le montre bien, nous devons freiner la surconsommation, en encadrant les pratiques publicitaires les plus agressives. À ce titre, nous proposons que la publicité contribue elle aussi à la prévention et au traitement des déchets. Puisqu'elle incite à consommer, elle doit être mobilisée dans le cadre de la responsabilité élargie du producteur.

Pour garantir l'universalité de la mise en oeuvre de ce principe, nous proposons également la création d'une taxe dite « balai ». Son principe est simple : lorsqu'un produit n'est pas couvert par une filière REP, le producteur devra s'acquitter d'une taxe. Cette taxe sera ensuite reversée aux collectivités territoriales pour couvrir le coût de la gestion du déchet, afin qu'elles n'aient pas à le supporter seules.

J'en viens à la question de la collecte, qui est assurée par les collectivités territoriales.

Nos travaux confirment la position constante de notre commission : la consigne pour recyclage des bouteilles plastiques n'est pas la bonne solution. Elle concentre le débat sur une part très minoritaire des déchets plastiques, ce qui emporte les effets pervers aussi bien économiques qu'environnementaux que vous connaissez bien. C'est pourquoi nous demandons, à l'échelle européenne, la suppression de l'objectif intermédiaire de collecte des bouteilles plastiques, dont le non-respect rendrait la consigne automatique. Il faut laisser aux mesures locales déjà engagées le temps de porter leurs fruits. Nous estimons que trois ans supplémentaires sont nécessaires.

L'État doit accompagner les collectivités dans cette transition, en tenant compte des réalités de celles-ci. Cela passe par un soutien plus fort au tri à la source des biodéchets, un assouplissement des conditions de mise en oeuvre de la tarification incitative, et un effort renouvelé de communication auprès des citoyens.

En ce qui concerne la gestion des déchets, il est urgent de réaffirmer un principe fondamental : la hiérarchie des modes de traitement. Inscrite dans notre droit depuis 1975, cette hiérarchie nous invite à privilégier la réparation, le réemploi et la réutilisation avant le recyclage. C'est une logique de sobriété, à la fois plus respectueuse des ressources, plus sobre en énergie, et plus favorable à l'emploi local.

La loi Agec a commencé à engager ce virage, en créant deux fonds : l'un est consacré à la réparation et finance le « bonus réparation » ; l'autre est consacré au réemploi et soutient les structures de l'économie sociale et solidaire. Toutefois, leur mise en oeuvre reste laborieuse, notamment à cause de leur gouvernance. En effet, ces fonds sont pilotés par les éco-organismes, lesquels sont eux-mêmes contrôlés par les producteurs, ce qui crée un conflit d'intérêts évident.

Pour y remédier, nous proposons de confier aux régions la gestion de ces fonds. Cela permettrait de renforcer leur efficacité, de mieux les ancrer dans les territoires, et de prévenir les blocages liés aux intérêts financiers des filières. Nous plaidons également pour une meilleure reconnaissance des acteurs de l'économie sociale et solidaire, en leur garantissant un accès prioritaire aux gisements de déchets réutilisables. Face à la montée en puissance des distributeurs ou des plateformes de seconde main, il est essentiel de protéger la plus-value sociale et environnementale qu'apportent ces structures dans nos territoires.

Si la réparation et le réemploi doivent être encouragés en priorité, il nous faut également développer nos capacités nationales de recyclage et mettre fin à l'insuffisance industrielle en la matière. Sur le plan environnemental, cette insuffisance limite le taux de recyclage. Sur le plan économique, elle contraint les éco-organismes à exporter les déchets et oblige les producteurs à importer de la matière recyclée pour tenir leurs objectifs d'incorporation. Nous devons mettre fin à cette situation paradoxale.

Ainsi, nous devons soutenir le développement d'une véritable industrie nationale du recyclage, capable de traiter plus de matière sur notre sol et de garantir des débouchés économiques stables à ses filières.

Voilà, mes chers collègues, les huit propositions que nous vous proposons aujourd'hui d'approuver. Pour résumer, il s'agit de redonner à la politique d'économie circulaire une colonne vertébrale industrielle en réaffirmant deux principes fondateurs - le pollueur-payeur et la hiérarchie des modes de traitement - et en faisant des régions des accélérateurs de transition sur mesure dans les territoires.

M. Stéphane Demilly. - La loi Agec avait constitué une avancée majeure dans la politique environnementale française, notamment en structurant les filières REP. Celles-ci impliquent les producteurs dans la gestion de la fin de vie de leurs produits. Ce dispositif est au coeur de la transition vers une économie circulaire.

Il est donc essentiel de mesurer précisément l'impact de cette loi. À ce titre, ce rapport d'information tombe à point nommé. Monsieur Fernique, vous avez déclaré que si la loi Agec avait enclenché un virage, son application était laborieuse. Disposez-vous de données précises de l'évolution des taux de collecte, de recyclage et de réemploi depuis l'entrée en vigueur de la loi ? Le cas échéant, ces données montrent-elles une réelle amélioration ?

Mme Audrey Bélim. - Je voudrais évoquer la situation dans les outre-mer. L'article 62 de la loi Agec prévoit : « Tout éco-organisme élabore et met en oeuvre un plan de prévention et de gestion des déchets dans les collectivités régies par l'article 73 de la Constitution, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, ayant pour objectif d'améliorer les performances de collecte et de traitement des déchets dans ces territoires afin qu'elles soient identiques à celles atteintes, en moyenne, sur le territoire métropolitain dans les trois ans qui suivent la mise en oeuvre du plan. »

Je commencerai par une question d'ordre formel : cette obligation est-elle bien respectée par l'ensemble des éco-organismes ?

Par ailleurs, quel regard portez-vous sur les plans de prévention et de gestion des déchets ? Les éco-organismes déploient-ils une stratégie suffisamment réaliste et ambitieuse pour améliorer les performances de collecte et de traitement des déchets dans nos territoires ?

Enfin, la couverture des coûts supportés par les services publics de gestion des déchets d'emballages ménagers et de papier, qui comprennent le coût du ramassage des déchets abandonnés, est fixée à 100 % dans nos territoires d'outre-mer. Comment jugez-vous l'application de cette mesure ? A-t-elle été utile aux collectivités ? Leur a-t-elle permis d'agir de manière préventive sur le volume des déchets abandonnés ?

M. Jacques Fernique, rapporteur. - Monsieur Demilly, les objectifs chiffrés fixés par la loi Agec étaient ambitieux. Il est trop tôt pour avoir une vision claire et exhaustive indicateur par indicateur, mais nous disposons d'ordres de grandeur. Un rapport inter-inspections nous a notamment fourni des éléments.

En matière de sobriété et de prévention des déchets, l'objectif était de réduire de 15 % la production de déchets. Disons-le clairement, nous ne sommes pas engagés sur de bons rails pour l'atteindre.

En ce qui concerne la réduction du stockage, l'objectif est que, en 2030, seuls 10 % des déchets assimilés soient stockés. Si le stockage a bel et bien diminué de manière consistante, une part des déchets que nous ne stockons plus alimentent nos voisins en combustibles, ce qui n'était pas exactement l'intention du législateur...

Enfin, le taux de recyclage des déchets non minéraux non dangereux a été fixé à 65 % pour l'année 2025, contre 46 % en 2022, ce qui témoigne d'un progrès. Encore une fois, pensons à assurer notre autonomie stratégique : il faut, à côté du marché intérieur européen, construire un marché intérieur de valorisation des déchets.

Du reste, en 2022, le système de responsabilité élargie des producteurs couvrait 5 % du gisement total des déchets, contre 22 % aujourd'hui.

Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - Les remarques que vous avez formulées sur les outre-mer sont très pertinentes, madame Bélim. En effet, le cyclone Chido a durement touché Mayotte. Le groupe d'études « Économie circulaire » a entendu un certain nombre d'acteurs sur la situation singulière que vous évoquez. C'est un sujet que nous traiterons dans le cadre de nos travaux, cela va de soi.

En 2022, Viviane Malet et Gisèle Jourda avaient rendu un rapport sur la gestion des déchets en outre-mer. Nos collègues avaient pris le soin d'associer le groupe d'études « Économie circulaire ». J'avais, à cette occasion, relevé les spécificités liées aux difficultés de mise en oeuvre de la loi Agec. Ce rapport est toujours d'actualité, hélas, tous les problèmes n'ayant pas été traités.

Nous nous sommes beaucoup intéressés, dans le cadre de nos travaux sur la loi Agec, à définir ce que devrait être la stratégie nationale en matière d'économie circulaire, afin de répondre à un certain nombre de questions, y compris en outre-mer.

La question environnementale, notamment, se pose de manière constante. Nous nous sommes rendu compte, dans le cadre de nos échanges à Bruxelles avec des acteurs européens, que la compétitivité et la souveraineté d'un certain nombre de gisements sont un sujet majeur. L'économie circulaire peut être un vecteur de développement économique dans nos territoires, grâce à des actions de proximité.

C'est pourquoi nous souhaitons qu'un encadrement soit mis en place au plus haut niveau. Il devrait ensuite se décliner dans nos territoires, ce qui permettrait aux régions de se saisir davantage de tous ces sujets.

M. Jacques Fernique, rapporteur. - À l'origine, la loi Agec avait fixé à 5 % le taux de réemploi du gisement sous responsabilité élargie du producteur. Aujourd'hui, il s'élève à 2,3 %, ce qui est très loin des prévisions initiales. D'où notre idée de confier cette responsabilité aux régions, qui constituent un échelon plus adapté.

M. Hervé Gillé. - Les mesures de consolidation à l'échelon régional sont particulièrement importantes, d'autant qu'elles recoupent les compétences régionales d'appui des filières et de gestion des déchets. Je pense que nous n'évaluons pas suffisamment l'impact économique de la loi Agec. On parle souvent des coûts, mais on oublie les retours sur investissement pour l'État, via certaines mesures fiscales. Les sommes sont loin d'être négligeables.

L'évaluation du rapport entre le coût et les bénéfices est un sujet important. On a souvent le sentiment d'une charge croisée qui, au niveau des différents systèmes de production, alourdit le coût du produit. Or, j'y insiste, le retour d'investissement peut être significatif.

Mme Marta de Cidrac, rapporteure. -Votre observation est pertinente, cher collègue. C'est justement parce que nous avons conscience de cette question que nous avons plaidé pour la mise en place d'une action interministérielle. On ne peut pas chacun rester dans notre couloir. Encore une fois, nous demandons la définition d'une véritable stratégie de l'économie circulaire, qui devient un levier de réindustrialisation de nos territoires. Il est certain que nous disposerons de chiffres beaucoup plus précis sur les coûts et les bénéfices, en matière économique, industrielle, environnementale, sociale et de formation.

Il importe de prendre conscience de ces questions. Surtout, nous devons éviter de nous disperser sur des sujets d'économie circulaire, qui sont très vastes et techniques. Précisément, Jacques Fernique et moi-même avons pris le parti de bâtir le squelette d'une politique de l'économie circulaire, sans entrer dans la technicité des mesures. Certaines d'entre elles peuvent être améliorées. À cet égard, je rappelle que nos collègues députés ont formulé pas moins de cent propositions de simplification.

M. Jean Bacci. - Je partage les préoccupations de notre collègue Anne-Catherine Loisier concernant la filière bois. Le bois est classé parmi les matériaux du bâtiment, ce qui le désavantage fortement par rapport aux autres matériaux. Notez que la première transformation du bois, à la scierie, et son stockage pour les maîtres d'oeuvre ne produisent aucun déchet. En effet, toutes les chutes sont recyclées en plaquettes forestières ou sont utilisées par les usines de cogénération. En outre, les déchets des scieries sont transformés en pellets.

Pour l'ensemble de ces raisons, il convient de traiter à part cette étape de transformation du bois.

M. Jacques Fernique, rapporteur. - Sur le sujet du bois, le Sénat, au travers de la proposition de loi de notre collègue Anne-Catherine Loisier, a fait du bon travail. Il est regrettable d'exclure complètement le bois de la REP. L'essentiel des déchets générés par le bois survient lorsque ce matériau est intégré dans la construction. Il faut compter parfois des dizaines d'années entre l'achat du bois et sa transformation en déchet - cela n'a rien à voir avec la mode express, dont nous avons débattu récemment !

Le Sénat demande à ce que les critères d'écocontribution prennent mieux en compte la spécificité du bois, afin que celui-ci ne soit pas défavorisé par rapport à d'autres matériaux. Nous devons aussi déplacer le niveau d'écocontributions davantage vers l'aval. Il convient par ailleurs d'améliorer la valorisation des déchets du bois. Enfin, il faut lutter contre la « déforestation importée ».

Mme Marta de Cidrac, rapporteure. - La troisième recommandation que nous formulons traite de la gouvernance des différentes filières REP. Aujourd'hui, pléthore de parties prenantes s'asseyent à la table des négociations pour discuter d'un ordre du jour qui n'est pas suffisamment établi en amont. Ainsi, personne n'a le temps de défendre les spécificités de sa filière.

Du reste, notre collègue Bacci a raison : le bois ne peut être comparé à du plâtre ou du verre. Ainsi, la filière doit pouvoir faire entendre sa voix. Les recommandations que nous avons formulées en ce sens permettraient de lever un certain nombre de freins.

M. Jean-François Longeot, président. - Je vous remercie pour ce rapport, chers collègues. Il était bon d'évaluer la loi Agec, cinq ans après son adoption. Malgré les différences d'orientation politique au sein de notre assemblée, nous savons travailler en partenariat : c'est cela qui fait la marque du Sénat.

Les recommandations sont adoptées.

La commission adopte, à l'unanimité, le rapport d'information et en autorise la publication.

Nuisances sonores causées par les transports - Examen du rapport d'information

M. Jean-François Longeot, président. - Je me réjouis de vous retrouver aujourd'hui pour entendre les conclusions et les recommandations de la mission d'information sur les nuisances sonores causées par les transports, conduite par Guillaume Chevrollier et Gilbert-Luc Devinaz.

Le bruit causé par les transports est la première cause d'exposition aux nuisances sonores en France. Ce constat a été confirmé et précisé par le sondage réalisé par l'Institut CSA à la demande de la commission sur ce sujet et dont les résultats nous ont été présentés le 30 avril dernier. Le recours à cet outil d'investigation nous a confrmé que le bruit émis par les transports est bien au coeur des préoccupations des Français. Notre commission était donc parfaitement fondée à se pencher sur ce sujet qui a des répercussions directes sur le quotidien de nos concitoyens.

Nous avions déjà travaillé à plusieurs reprises sur ces enjeux. Je pense en particulier à la mission d'information sur la modernisation de l'aéroport de Nantes-Atlantique conduite par Didier Mandelli à l'automne 2023. Notre rapporteur pour avis sur les crédits « Transport aérien » du projet de loi de finances, Stéphane Demilly, a aussi travaillé sur ces enjeux. Nous avons enfin entendu en audition, conformément à l'article 13 de la Constitution, Pierre Monzani avant sa nomination à la tête de l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa).

Toutefois, le transport aérien n'a pas le monopole du bruit causé par les transports. Il était donc particulièrement pertinent d'élargir l'objet de notre travail pour avoir une vue d'ensemble sur le secteur des transports.

M. Guillaume Chevrollier, rapporteur. - Je suis heureux de partager avec vous le fruit des investigations conduites avec mon collègue rapporteur Gilbert-Luc Devinaz, que nous allons vous présenter au travers des conclusions de notre rapport d'information sur la pollution sonore causée par les transports.

Vous avez bien entendu : nous parlons de « pollution sonore », et non de « nuisances sonores ». Si notre mission d'information avait pour objet initial les « nuisances sonores », nos travaux nous ont amenés à une prise de conscience plus large : le bruit, plus qu'une nuisance du quotidien affectant notre qualité de vie, est une véritable pollution, qui dégrade la santé des populations et représente un enjeu sanitaire majeur.

La trentaine d'auditions que nous avons conduites nous ont permis d'échanger avec les acteurs concernés de près ou de loin par cette problématique, certes techniquement complexe, mais dont l'impact est direct et concret sur le quotidien de nos concitoyens.

Un déplacement au laboratoire national de métrologie et d'essais (LNE), en avril dernier, qui teste actuellement des radars sonores routiers pour sanctionner les véhicules trop bruyants - notamment les deux-roues à pot d'échappement modifié -, a également été très instructif sur les instruments de lutte contre le bruit qui sont susceptibles d'être généralisés.

Enfin, nous avions souhaité, comme vous le savez, prendre le pouls des Français sur leur rapport au bruit. C'est la raison pour laquelle nous avons confié à un institut de sondage, l'Institut CSA, le soin de réaliser une enquête dont les résultats vous ont été présentés le 30 avril dernier.

Les principaux enseignements de cette étude sont sans ambiguïté : le bruit est un sujet de préoccupation majeure des Français. Ainsi, 71 % d'entre eux considèrent les nuisances sonores comme un sujet de préoccupation, et 45 % se déclarent personnellement affectés par le bruit lié aux transports.

Le Parlement n'avait encore jamais mené des travaux de contrôle sur ce sujet essentiel. Il est donc très positif que notre commission se soit emparée de cette problématique.

Le transport routier est identifié comme le premier émetteur de pollutions sonores. Ce constat est logique : la voiture demeure le premier mode de transport des Français et la densité du réseau routier est forte sur le territoire. Cette conjonction de facteurs entraîne mécaniquement la sensation d'une omniprésence des nuisances routières.

Cette exposition aux pollutions sonores est particulièrement intense en milieu urbain et progresse avec la taille de l'agglomération, pour tous les modes de transport. Ainsi, un Francilien sur cinq déclare subir des nuisances sonores aériennes et ferroviaires.

M. Gilbert-Luc Devinaz, rapporteur. - J'aimerais compléter le propos de mon collègue rapporteur en revenant sur les enjeux sanitaires causés par les pollutions sonores.

À court terme, les effets du bruit sur la santé peuvent se résumer à des perturbations de l'attention la journée et à des troubles du sommeil la nuit. Lorsque ces événements sont passagers et ponctuels, ils n'ont qu'une incidence faible sur notre santé. En revanche, l'exposition régulière à cette pollution conduit à dégrader significativement la qualité de vie d'un individu, ce qui peut avoir des répercussions sur sa vie personnelle et professionnelle : une irritabilité par exemple, ou encore une perte de productivité au travail.

C'est surtout à moyen et long terme que les effets du bruit sur la santé sont les plus notables. Des études scientifiques ont mis en avant une relation de cause à effet entre exposition au bruit et développement de pathologies lourdes telles qu'un risque d'hypertension artérielle, d'infarctus du myocarde, voire de développement de la maladie d'Alzheimer, notamment en raison d'une sursécrétion d'hormones du stress, le cortisol. Enfin, des scientifiques ont souligné des risques élevés pour les enfants, notamment concernant leur développement intellectuel et l'acquisition du langage et de la lecture.

J'évoquerai ensuite l'un des constats phares de notre rapport d'information : la complexité, l'illisibilité, voire parfois la cacophonie des instruments de lutte contre le bruit causé par les transports.

Éparse et complexe, la réglementation de la lutte contre les pollutions sonores s'est forgée par strates successives, sans approche globale.

D'abord, en 1985, le législateur s'est concentré sur le transport aérien, en imposant des servitudes d'urbanisme aux espaces urbains situés à proximité des aéroports et en instaurant des plans d'exposition au bruit (PEB).

Puis, une étape plus ambitieuse a été franchie avec la loi du 31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit, dite « Bruit », afin de prendre en compte l'ensemble du spectre des nuisances sonores émis par les transports. Ce texte est, d'ailleurs, toujours le cadre de référence en la matière. Cette loi définit un « classement sonore des voies » de transports terrestres les plus bruyantes et des obligations de protection des riverains situés à leur proximité.

Enfin, la directive européenne du 25 juin 2002 relative à l'évaluation et à la gestion du bruit dans l'environnement, dite « Bruit », a invité les États membres à mettre en place une cartographie du bruit dans un périmètre déterminé - grandes agglomérations et à proximité des grandes infrastructures de transport - par le biais de cartes de bruit stratégiques (CBS). Des plans de prévention du bruit dans l'environnement (PPBE) visant la réduction du bruit ont également été définis pour mettre en oeuvre cette exigence européenne dans notre droit.

Force est de constater que ces outils se superposent sans qu'une remise à plat rationnelle et une réflexion d'ensemble aient été menées : un seul et même émetteur de bruit doit appliquer une multitude de normes.

Ainsi, les grandes infrastructures de transports terrestres sont répertoriées dans des CBS et dans le classement sonore des voies de transport terrestre. Cet enchevêtrement est source d'illisibilité et de complexité, car les indicateurs de bruit utilisés dans ces documents, applicables aux mêmes infrastructures, ne sont pas identiques.

Le cas des PPBE est révélateur de ce labyrinthe normatif. Les périmètres de plusieurs PPBE peuvent se chevaucher, notamment dans les grandes agglomérations. En outre, les mesures qui y figurent n'ont pas de valeur normative et leur non-respect ne fait l'objet d'aucune sanction. Il en résulte un manque d'appropriation de cet outil par les pouvoirs publics, perçu comme une contrainte administrative. Un autre symptôme de ce faible intérêt pour les PPBE est que certains d'entre eux, obligatoires au regard du droit de l'Union européenne (UE), n'ont toujours pas été réalisés, si bien que la Commission européenne a ouvert devant la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) un recours en manquement à l'encontre de la France sur ce motif.

Pour illustrer mon propos, je prendrai un exemple topique : l'aéroport de Paris-Orly. Ce dernier est soumis à 4 instruments de cartographies différents : plan d'exposition au bruit (PEB), plan de gênes sonores (PGS), CBS et PPBE. La complexité ne se réduit pas à cette démultiplication des outils ; elle tient aussi à la pluralité des acteurs chargés de les utiliser. À cet égard, l'aéroport d'Orly est à lui seul soumis à 3 PPBE : celui de la Métropole du Grand Paris, celui du conseil départemental du Val-de-Marne, et enfin, celui qui est réalisé par l'aéroport lui-même. Or, comme vous pouvez vous en douter, les objectifs et orientations de ces PPBE diffèrent les uns des autres. Cet exemple illustre l'inefficacité de notre système de lutte contre les pollutions sonores.

Rationaliser l'élaboration des PPBE sur un même territoire et en faire un outil stratégique de réduction du bruit, plutôt qu'un simple outil de reporting européen, constitue donc un impératif.

J'en viens désormais à la question des indicateurs, très technique, mais centrale pour promouvoir une politique publique de lutte contre le bruit efficace.

Actuellement, les réglementations française et européenne utilisent des indicateurs énergétiques qui mesurent un niveau moyen de bruit annualisé.

Cette méthode, adaptée pour mesurer la gêne liée au transport routier, se fonde sur une logique linéaire. Moins opérationnelle pour le transport ferroviaire et aérien, elle présente l'inconvénient de lisser les pics de forte intensité entrecoupés de silences. Pourtant, ces bruits sont gênants la nuit : ils perturbent la qualité du sommeil et méritent donc d'être pris en compte. Cette approche est en décalage manifeste avec la gêne ressentie par les riverains. À titre d'exemple, une voie ferroviaire comptant moins de 50 trains par jour n'est pas considérée comme une installation bruyante. Les voisins d'une ligne à grande vitesse (LGV) ont du mal à l'accepter !

La loi du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités, dite « LOM », a prévu, pour mesurer le bruit ferroviaire, le recours à des indicateurs dits « événementiels », qui prennent en compte l'intensité et le nombre d'événements sonores : ils permettent d'éviter d'appréhender de la même façon un bruit moyen et durable et des pics de bruit répétés. Cet instrument est testé depuis 2022 pour le transport ferroviaire. Le transport aérien fait l'objet d'une démarche analogue depuis 2023. Pour l'heure, ces tests n'ont pas encore permis la définition d'indicateurs fiables en raison de difficultés techniques rencontrées. Il nous paraît indispensable que la volonté du législateur soit respectée : il faut appliquer pleinement la loi d'orientation des mobilités, six ans après son entrée en vigueur, avec la fixation d'un calendrier précis pour les prochaines phases d'expérimentation d'indicateurs événementiels.

En outre, d'un point de vue sanitaire, un indicateur est considéré comme performant s'il est bien corrélé avec les effets du bruit sur la santé. Toutefois, aucune étude n'a, à ce stade, été menée pour démontrer la supériorité des indicateurs événementiels sur les indicateurs énergétiques pour quantifier les effets du bruit sur la santé. Réaliser des études de santé publique afin d'évaluer leur rôle dans l'explication des effets du bruit sur la santé nous paraît donc indispensable.

En outre, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a défini en 2018 des seuils au-delà desquels l'exposition au bruit des transports est nocive pour la santé. Les plafonds définis dans la réglementation française sont moins disant par rapport aux indicateurs internationaux. Cet écart entre notre droit et les recommandations de l'OMS est peu satisfaisant.

Cependant, l'application stricte de ces exigences aux nouveaux projets d'infrastructures de transport semble difficile à envisager dans l'immédiat, au risque d'empêcher l'achèvement de projets indispensables au report modal et au respect de nos engagements climatiques.

Ce principe de réalité ne doit pas, pour autant, justifier l'inaction réglementaire. Si la définition de nouveaux seuils réglementaires à brève échéance alignés sur ceux qui ont été établis par l'OMS n'est pas encore possible, des études d'impact pourraient amorcer des évolutions souhaitables de la réglementation. Dans un souci de pragmatisme, ces modifications pourraient s'appliquer aux nouvelles infrastructures et aux modifications significatives des infrastructures existantes.

M. Guillaume Chevrollier, rapporteur. - J'en viens maintenant aux politiques publiques de lutte contre la pollution sonore liée aux transports.

Notre constat est sévère : le bruit demeure un angle mort des politiques publiques de prévention des risques et souffre en particulier d'un manque de pilotage.

La prévention de l'exposition des populations au bruit des transports implique une dizaine d'administrations et opérateurs de l'État. La mission du bruit et agents physiques, rattachée à la direction générale de la prévention des risques (DGPR), assure le pilotage et la coordination de tous ces acteurs. Les moyens humains qui lui sont alloués sont modestes : trois agents en équivalent temps plein (ETP). Eu égard à la diversité des actions de lutte contre le bruit, à la technicité des enjeux, et au nombre d'acteurs en présence, cette cellule ne semble pas suffisamment calibrée et donc armée pour s'acquitter de sa mission stratégique de pilotage dans de bonnes conditions.

En outre, le ministère de la santé, que nous avons entendu dans le cadre de nos travaux préparatoires, dispose de peu de compétences en matière de lutte contre la pollution sonore. L'évolution des effets sanitaires, tant auditifs qu'extra-auditifs, du bruit à l'échelle de la population est mal connue, faute de marqueurs sanitaires suivis par un dispositif de surveillance des effets sanitaires du bruit. Alors que nous connaissons avec précision les effets de la pollution de l'air, nous agissons à l'aveuglette pour lutter contre la pollution sonore. Dans ce contexte, il pourrait être pertinent de confier à Santé publique France la mission de définir des indicateurs permettant de suivre, à l'échelle de la population, les conséquences sanitaires du bruit. Cet acteur pourrait ainsi mesurer plus précisément le coût social du bruit, estimé à environ 150 milliards d'euros par an, ainsi que les effets des politiques de lutte contre le bruit, dont le coût pour les mobilités est estimé à 100 milliards d'euros.

À l'échelle des territoires, la gouvernance de la prévention du bruit est également complexe : elle implique de nombreux acteurs locaux dans les collectivités territoriales (conseils régionaux et départementaux, communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI)) et les administrations déconcentrées - préfectures départementales et régionales, directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal), directions départementales des territoires. Un observatoire régional du bruit fédérant ces acteurs n'existe que dans deux régions : en Île-de-France, avec Bruitparif, et en région Auvergne-Rhône-Alpes, avec Acoucité, l'observatoire de l'environnement sonore de la Métropole de Lyon.

Le bruit est un sujet éminemment technique - nous avons pu le mesurer au fil des auditions -, à forts enjeux scientifiques et juridiques. La dispersion des compétences engendrée par une gouvernance aussi éclatée limite les capacités d'action des acteurs publics.

Un regroupement des moyens humains des services déconcentrés de l'État à l'échelle régionale et un renforcement de leur coordination avec les collectivités territoriales serait souhaitable. Cette mise en commun des compétences permettrait d'en éviter l'émiettement, source d'une perte d'efficience de l'action.

Par-delà ces questions de gouvernance, la politique de protection des Français les plus exposés au bruit est insuffisante.

Les zones les plus exposées au bruit des transports terrestres sont appelées points noirs de bruit (PNB).

Depuis 1984, puis au début des années 2000 et en 2009, des plans visant à les résorber en isolant les logements ou en modernisant les infrastructures de transports ont été déployés. Les moyens budgétaires n'ont pas été suffisamment mobilisés, ainsi qu'en atteste la diminution progressive des crédits consacrés à la résorption des PNB, principale cause de l'échec des politiques en la matière.

Ainsi, en 2017, sur 53 000 PNB ferroviaires, SNCF Réseau en a traité seulement 2 200. Quant aux axes routiers, on estimait alors à 850 000 les logements situés sur un PNB routier à protéger. Par comparaison, le plan Bruit de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) mené entre 2009 et 2015 a permis de protéger 3 324 logements. On dénombrerait aujourd'hui près de 900 000 PNB liés aux transports terrestres selon le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), mais le rythme atone du traitement de ce stock ne permet pas, à ce stade, d'envisager une amélioration substantielle de la situation.

De surcroît, les pouvoirs publics ne disposent pas d'une base de données identifiant finement l'ensemble des PNB - les demandes que j'ai adressées au préfet de mon département sont restées lettre morte. Un recensement est donc urgent, car il constitue un préalable à la définition d'un plan national de traitement en vue de financer presque intégralement les travaux pour les riverains. Un tel plan répondrait à un impératif de santé environnementale, en application du principe « pollueur-payeur ».

M. Gilbert-Luc Devinaz, rapporteur. -Le transport routier est le premier pourvoyeur de bruit causé par les transports. Deux modes de transports routiers sont particulièrement émetteurs de bruits : les deux-roues motorisés (2RM) et les poids lourds. Des radars sonores ont été déployés depuis la LOM de 2019 dans plusieurs territoires, notamment à Paris, dans le cadre d'une expérimentation pilotée par la DGPR. Le constat est sévère : rue d'Avron, dans le XXe arrondissement de Paris, 166 véhicules en moyenne par jour dépassent les 83 décibels. Or, à partir de 80 décibels, la durée d'exposition à la source de bruit devient un facteur important de risque.

Par ailleurs, il nous paraît fondamental d'agir pour réduire les pollutions sonores nocturnes, dont les effets sur la santé sont les plus importants. Il semble pertinent de faire confiance à l'intelligence des territoires et de placer les maires au coeur de la décision. Les autorités chargées de la voirie pourraient être autorisées à agir pour abaisser les vitesses de circulation la nuit en vue de protéger le sommeil et la santé des populations.

J'en viens maintenant au transport aérien.

La persistance de l'exposition de populations au bruit aérien, en particulier nocturne, nécessite d'envisager une extension des mesures de lutte contre la pollution sonore aérienne, notamment au travers de mesures de restriction d'exploitation comme des couvre-feux.

Ces mesures doivent toutefois être proportionnées : il est indispensable de prendre en compte leurs conséquences économiques et sociales éventuelles. Certains aéroports se trouvent à proximité immédiate de zones densément urbanisées, notamment Toulouse-Blagnac, Nantes Atlantique et Paris-Orly, et exigent une attention particulière. Didier Mandelli a déjà proposé des évolutions du couvre-feu pour l'aéroport Nantes Atlantique. Le président Gérard Larcher a également mis en avant la nécessité d'avancer d'une demi-heure le couvre-feu instauré à l'aéroport de Paris-Orly. Nous partageons tous deux ces propositions.

Enfin, en dépit de niveaux de bruit parfois particulièrement élevés auxquels sont soumis les riverains d'aérodromes de loisir ou d'entraînement, leurs activités sont faiblement encadrées - voire pas du tout. Nous vous proposons donc de mieux les encadrer en confiant au maire la faculté de définir des niveaux sonores maximaux pour les aéronefs utilisés et des plages horaires de restriction d'exploitation des plateformes. Là encore, faisons confiance aux élus locaux, qui connaissent leur territoire !

M. Stéphane Demilly. - Merci pour cette présentation. J'aurai trois questions à vous poser.

La première porte sur le Conseil national du bruit (CNB), créé en 1982 et placé sous la responsabilité du ministère de l'environnement. Je m'interroge sur son utilité concrète, car il ne fait pas beaucoup de bruit... L'avez-vous contacté ?

La deuxième question concerne la sensibilité aux bruits du quotidien dans les transports. J'y suis moi-même très sensible, notamment aux nuisances nocturnes : klaxons intempestifs, véhicules aux fenêtres ouvertes, ou encore boosters pétaradants qui gênent les riverains. J'ai le sentiment que nous accumulons les rapports, mais que nos politiques publiques ne sont pas très courageuses. Avez-vous échangé avec l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF) sur le développement des radars sonores, ces outils déjà installés dans certaines villes ? Au-delà de la sensibilisation, la répression est nécessaire. Pour ce faire, des contraventions ciblées pourraient avoir un réel effet dissuasif. Avez-vous exploré cet aspect ?

La troisième et dernière question a trait au transport aérien, qui suscite une forte attention dans les zones aéroportuaires. Ce secteur, je l'ai déjà dit ici, a entrepris depuis plusieurs années d'importants efforts : recherche sur des moteurs plus silencieux ; renouvellement progressif des flottes par les compagnies aériennes et respect des normes acoustiques internationales.

En tant que rapporteur budgétaire sur les crédits alloués au transport aérien, je souligne le rôle fondamental de l'Acnusa, acteur clé de la médiation entre autorités, opérateurs et usagers, notamment pour veiller au respect des normes de sécurité. D'ailleurs, avec Vincent Capo-Canellas, nous recevrons tout à l'heure cette autorité dans le cadre du groupe d'études Aviation civile. Comme chaque année, il conviendra d'être particulièrement attentif aux moyens qui lui sont alloués, tant elle est essentielle pour répondre aux défis croissants du transport aérien. Partagez-vous mon sentiment quant à l'importance de son rôle ?

Mme Nicole Bonnefoy. - À mon tour, je tiens à remercier nos rapporteurs, en saluant la qualité de leur travail et les recommandations qu'ils formulent.

Vous qualifiez le bruit de véritable pollution, et ce à juste titre. J'espère que notre réglementation et notre législation progresseront en conséquence. Le bruit a, en particulier, de graves effets sur la santé humaine.

Notre ancienne collègue Nelly Tocqueville avait beaucoup travaillé sur une question connexe, celle de la pollution de l'air. Louis-Jean de Nicolaÿ et moi-même avons, pour notre part, traité du bruit provoqué par la LGV Sud-Europe-Atlantique (SEA) : nous avons obtenu, par voie d'amendement, la modification du référentiel de mesures, notamment afin que l'on adapte la vitesse des trains.

Pour limiter les différentes pollutions provoquées par les poids lourds, parmi lesquelles la pollution sonore, il faut, selon vous, faire confiance aux élus locaux.

Ce problème est particulièrement préoccupant dans mon département. En certains points de l'agglomération d'Angoulême, traversée par la route nationale 10 (RN10), le bruit est absolument insupportable.

J'insiste, à cet égard, sur le trafic de transit. Certains poids lourds traversant mon département quittent l'autoroute pour prendre une route nationale, voire départementale, afin d'économiser quelques euros de péage, ce qui nuit gravement à la qualité de vie des riverains et endommage la chaussée aux frais des contribuables.

L'interdiction de traverser les agglomérations la nuit aurait déjà des effets considérables. Une telle mesure, qui ne coûte pas d'argent et relève tout simplement du bon sens, permettrait de réduire de 40 % le trafic de poids lourds en transit sur les axes considérés. J'ai défendu cette solution auprès du ministre chargé des transports.

Ces poids lourds n'ont pas leur place sur les routes nationales et départementales. Il faut faire en sorte qu'ils circulent sur des voies qui leur sont destinées. La situation actuelle est absolument insupportable, qu'il s'agisse du bruit ou de la pollution atmosphérique.

M. Pierre Jean Rochette. - En matière de transport routier, nous devons tenir compte des évolutions technologiques. À l'évidence, il faut aller vers le poids lourd électrique, d'autant que le poids lourd thermique est la source principale d'émission de bruit. Telle doit être, à mon sens, notre ligne nationale.

Vous suggérez de donner aux maires le pouvoir de fixer le niveau de bruit toléré sur les aérodromes. De manière générale, il faut bien sûr renforcer les prérogatives des maires, notamment en matière de police. Néanmoins, je me méfie de la tendance de notre pays à réglementer à outrance : il ne faudrait pas aboutir à une surenchère de propositions coercitives à l'occasion des élections municipales.

Je pense à l'aérodrome de Villefranche-Tarare : des restrictions excessives y seraient d'autant plus dommageables que ce lieu est en partie dédié à la formation des pilotes.

M. Guillaume Chevrollier, rapporteur. - Monsieur Demilly, le CNB est sans président depuis le dernier renouvellement de l'Assemblée nationale. Il s'agit, du reste, d'une instance essentiellement consultative et non décisionnaire. Nous n'avons donc pas entendu de représentant du CNB.

Vous évoquiez la réduction du bruit provoqué par les différents moyens de transport. Pour assurer des verbalisations, nous proposons la généralisation des radars sonores. De même, nous suggérons de mieux encadrer la vente des pots d'échappement non homologués.

Quant aux pics de bruit constatés sur les LGV, ils suscitent de fortes attentes. Il faut faire évoluer la législation.

Madame Bonnefoy, nous insistons dans notre rapport sur la nécessité de traiter les points noirs de bruit, en mettant en oeuvre le principe du pollueur-payeur. Les transporteurs provoquant des nuisances doivent apporter des réponses aux riverains.

M. Gilbert-Luc Devinaz, rapporteur. - Monsieur Demilly, soyons clairs : à l'heure actuelle, le CNB demeure une coquille vide. Il s'agit à l'évidence d'une lacune du dispositif, d'autant qu'à ce jour nombre de ministères sont chargés de la question du bruit. On peine à s'orienter dans cette forêt de pouvoirs publics.

Outre le voisinage et les transports, les terrasses peuvent être une grande source de nuisances sonores. Ces différents bruits du quotidien mériteraient sans doute une mission à part entière, en tout cas pour ce qui concerne les zones urbaines. Des radars mesurant le bruit sont en train d'être expérimentés ; ils finiront tôt ou tard par être mis au point. Il faudra alors les faire accepter, mais ils peuvent offrir une solution en ville.

L'aérien constitue un sujet à part entière. La commission devrait, à mon sens, prolonger ses réflexions sur le rôle et les prérogatives dévolues à l'Acnusa. En particulier, il semblerait légitime d'envisager l'extension de son champ de compétence aux aérodromes voire à d'autres modes de transport. Je précise que les aérodromes ne font l'objet, à ce jour, d'aucune réglementation en la matière. Le but est de traiter le problème du bruit dans sa globalité, donc d'assurer la cohérence de nos politiques publiques.

Madame Bonnefoy, le problème que vous mentionnez tient pour partie aux dispositifs de téléguidage et aux itinéraires bis qu'ils proposent. Au-delà des restrictions de circulation, il faut trouver des solutions dans le respect du principe de libre circulation des personnes et des marchandises.

Monsieur Rochette, en deçà de 50 kilomètres à l'heure, on entend le bruit du moteur : au-delà, c'est le bruit du roulement que l'on entend. Le passage au moteur électrique ne résoudra donc pas tous les problèmes de bruit.

Il faut faire en sorte que le pneumatique émette moins de bruit au contact. En parallèle, on peut adopter un revêtement moins bruyant sur les routes ; mais ce dernier coûte un peu plus cher et est davantage adapté aux routes en milieu urbain.

M. Jacques Fernique. - Merci de votre travail et de la pertinence de vos recommandations. Vous proposez, à juste titre, d'aligner nos seuils réglementaires sur ceux de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Vous voulez, en outre, remettre de la cohérence dans la « forêt des pouvoirs publics » chargés de lutter contre le bruit, ce qui est bel et bien nécessaire. Vous voulez assurer, via les documents d'urbanisme, la prise en compte des bruits provoqués par les transports terrestres. Vous insistez, de surcroît, sur l'effort de rénovation thermique et acoustique en proposant un diagnostic bruit en cas de cession ou de location d'un bien immobilier.

De même, j'approuve le renforcement du pouvoir de police des maires et le regroupement, à l'échelle régionale, des moyens humains et techniques de lutte contre le bruit.

Cela étant, je m'interroge sur la proposition relative au bruit solidien et aux basses fréquences sonores. Pouvez-vous nous apporter des précisions à cet égard ?

M. Louis-Jean de Nicolaÿ. - Étant a priori chargé de représenter le Sénat au CNB, à la suite de Marta de Cidrac, je ne manquerai pas de tenir notre commission informée des travaux de cette instance. Jusqu'à présent, le CNB a des airs de belle endormie, mais elle semble se réveiller tranquillement - sans bruit !

Je reviens sur les indicateurs de trajet. Ne faut-il pas mener un travail avec les entreprises proposant ces outils afin qu'ils précisent les itinéraires que les poids lourds doivent privilégier ?

Enfin, compte tenu des restrictions de circulation appliquées en région parisienne le dimanche jusqu'à minuit, voire jusqu'au lundi matin, les poids lourds s'accumulent sur les routes nationales, ce qui complique la circulation dans la région du Mans. Je pense en particulier à l'ex-route nationale 23.

M. Jean-François Longeot, président. - Le report de trafic vers les axes secondaires s'observe également dans nombre de villages du Doubs, traversés par la route nationale 83 (RN83). Mon collègue député Laurent Croizier s'est saisi du sujet ; à cet égard, il faut bel et bien se pencher sur les indicateurs de trajet.

M. Olivier Jacquin. - Lors d'un voyage au Japon, il y a quelques années de cela, j'ai été frappé du calme qui règne à Tokyo. À l'évidence, la réduction du bruit relève en bonne partie du civisme. La dimension culturelle du sujet ne doit pas être négligée.

Je salue l'important travail accompli par nos collègues. En particulier, j'approuve la volonté de traiter le bruit des transports routiers aussi rigoureusement que les nuisances sonores imputables aux transports aériens. En ce sens, la proposition n° 16 m'étonne quelque peu : pour moi, les pots d'échappement hurlants sont un irritant considérable. Puisque ces équipements émettent trop de décibels, au point de ne pouvoir être homologués, pourquoi ne pas les interdire purement et simplement ?

M. Pierre Jean Rochette. - Si tant de poids lourds circulent sur les routes nationales, c'est pour ne pas payer de péage : dès lors, la solution n'est-elle pas l'écotaxe ? Il me semble que nous sommes en train de rouvrir le débat.

Je tiens à revenir sur les transports par hélicoptère. Un certain nombre d'activités hôtelières et touristiques ont besoin d'hélisurfaces. Je l'observe dans les Alpes comme dans le Beaujolais. Or, aujourd'hui, la création d'une hélisurface est autorisée par le préfet sans consultation du maire. À mon sens, il faut revoir la procédure en vigueur pour donner davantage de poids à celui-ci.

Mme Nicole Bonnefoy. - En cas d'accident sur une route nationale, on dévie aussitôt le trafic vers l'autoroute. Il faut pouvoir, dans d'autres cas, orienter le trafic vers les axes autoroutiers.

M. Gilbert-Luc Devinaz, rapporteur. - Monsieur Fernique, le bruit solidien est le bruit causé par les vibrations - on peut penser aux vibrations provoquées, à Paris, par le passage du métro. Les LGV émettent quant à elle des bruits à basses fréquences.

Monsieur de Nicolaÿ, vous soulevez le problème des assistants de navigation utilisés par les automobilistes. Lorsque ces services sont apparus, je travaillais pour Bison Futé et mes collègues techniciens et ingénieurs avaient tout de suite anticipé les problèmes qu'ils entraîneraient. Certaines plateformes ne tiennent pas du tout compte des interdictions de passage en fonction, par exemple, du tonnage.

Vous avez raison, un travail doit être mené pour mettre en place une réglementation spécifique.

Monsieur Jacquin, il me semble que l'usage de pots d'échappement non homologués n'est autorisé que sur circuit et en compétition. À part cette exception, l'usage de ce type de pots d'échappement est déjà interdit sur la voie publique. Il s'agit simplement de faire respecter la règle.

Selon des estimations mentionnées dans le rapport d'information qui sera publié prochainement, les coûts sanitaires non marchands liés aux bruits s'élèveraient à 82 milliards d'euros et le coût de la mortalité prématurée lié aux maladies cardiovasculaires serait de près de 10 milliards d'euros. Le Cerema estime pour sa part à 57 milliards d'euros le coût sanitaire des nuisances sonores. En tout état de cause, le bruit coûterait donc entre 57 milliards et 92 milliards d'euros par an.

Compte tenu de ce chiffre, les moyens consacrés à la lutte contre le bruit sont non pas une dépense, mais un investissement pour la santé de l'ensemble de nos concitoyens.

Les recommandations sont adoptées.

La commission adopte le rapport d'information à l'unanimité et en autorise la publication.

Déplacement effectué par une délégation de la commission en Irlande en avril 2025 - Communication

M. Jean-François Longeot, président. -Notre commission s'est rendue en Irlande du 13 au 18 avril dernier. Je cède la parole à Franck Dhersin, pour partager avec vous au nom de la délégation quelques éléments d'information, précieux pour notre expertise.

M. Franck Dhersin. - Il y a deux mois, le 13 avril dernier, une délégation de notre commission s'est rendue, dans le cadre de son déplacement annuel, en République d'Irlande. Pendant cinq jours, aux côtés de Sylvie Valente Le Hir, Nadège Havet, Sébastien Fagnen et Marie-Claude Varaillas, nous avons parfait notre information sur une thématique chère à mon coeur, et qui relève du champ de compétence de la commission : les politiques relatives aux ports, dont l'économie irlandaise est très dépendante. Nous sommes allés dans les villes de Cork, de Rosslare et de Dublin à cet effet. Nous avons constaté que ces politiques jouaient un rôle essentiel dans la transition énergétique et climatique du pays.

J'ai souhaité adopter comme fil rouge de notre déplacement un axe de travail bien précis : le développement des liaisons maritimes entre la France et l'Irlande, dans le contexte d'après Brexit. Nous avons aussi également pris le temps d'explorer d'autres thématiques passionnantes, comme la transition énergétique, la prévention des inondations et la protection des milieux sensibles face aux effets du tourisme.

Je commencerai par le thème qui a constitué la colonne vertébrale de notre déplacement : le développement, depuis le Brexit, des lignes de fret par ferry entre les ports irlandais et français, qui constituent plus que jamais un véritable trait d'union entre nos deux pays.

Avec l'abandon du pont terrestre britannique, le Brexit a en effet entraîné une explosion des liaisons directes entre la France et l'Irlande en « RoRo », c'est-à-dire en matière de transport de marchandises par navires rouliers. Alors que l'on comptait quatre liaisons par semaine en 2018 entre l'Irlande et le nord de l'Europe, à commencer par la France, on en compte aujourd'hui près de soixante avec le nord de l'Europe, à commencer par la France.

Du côté français, cinq ports maritimes français sont concernés au premier plan par le développement de ces lignes : Dunkerque, Cherbourg, Le Havre, Roscoff et, bien que de façon plus marginale, Boulogne-Calais. Avant notre départ, nous avions échangé avec les représentants de ces ports dans le cadre d'une table ronde à Paris, ce qui nous a permis de recueillir leurs préoccupations et de les relayer aux autorités irlandaises.

Je concentrerai mon propos sur les ports de Cork et de Rosslare, car, malheureusement, nous n'avons effectué qu'une visite très rapide du port de Dublin. Au-delà des lignes de fret avec la France, nous souhaitions faire le point sur les projets de développement et de modernisation conduits dans ces ports, qui ont été profondément affectés par le Brexit.

Nous nous sommes tout d'abord rendus dans le port de Cork, situé sur la côte sud de l'Irlande. Il est confronté à des enjeux d'agrandissement depuis plusieurs années. Ce port comporte trois sites : Tivoli, soit le terminal à conteneurs historique situé au fond de l'estuaire, à proximité de la ville, Cobh, consacré aux navires de croisière, et, plus récemment, Ringaskiddy, plus proche de la mer, qui comporte des terminaux pour les ferries et les conteneurs.

Le port de Tivoli est aujourd'hui nettement sous-dimensionné, face à l'intensification du trafic et à la hausse de la taille des navires. Dès lors, un plan directeur 2023-2050 a été élaboré pour assurer le transfert de l'ensemble des activités commerciales vers Ringaskiddy, en eaux profondes, dans un nouveau terminal pouvant accueillir des navires de 90 000 tonneaux.

À plus brève échéance, un projet de construction d'une autoroute entre Ringaskiddy et la ville de Cork est en cours, afin d'améliorer la desserte du port. Nous avons pu le constater tout au long de notre déplacement, la route prédomine très largement en Irlande et le transport ferroviaire y est très marginal, y compris pour la desserte des ports et aéroports. En 2019, l'Irlande était d'ailleurs le dernier pays de l'Union européenne concernant la part modale du fret ferroviaire. Un projet de modernisation du réseau à l'horizon 2050 a été lancé par les gouvernements d'Irlande du Nord et du Sud, mais il reste des incertitudes quant à son financement.

Le port de Cork prévoit en outre d'investir 100 millions d'euros dans l'éolien offshore d'ici à dix ans. Pour l'heure, l'Irlande ne compte qu'un parc éolien de ce type, celui d'Arklow, mis en service en 2011. Le Gouvernement prévoit d'en déployer plusieurs d'ici à 2030, pour atteindre une production annuelle de 5 gigawatts. Cette énergie suscite un fort attrait politique et populaire en Irlande et, en conséquence, un fort intérêt portuaire.

J'en viens au port de Rosslare, situé au sud-est de l'Irlande, à 200 kilomètres de Cork et à 150 kilomètres de Dublin. Il a retenu l'attention de la délégation, car il est en train de décupler ses capacités de manière assez remarquable. Alors qu'il n'était constitué que d'un terminal de ferries sur le déclin, il a vu son trafic exploser depuis le Brexit, notamment avec la France, compte tenu de sa situation géographique avantageuse à l'extrémité sud-est du pays.

Ainsi, entre 2019 et 2023, les liaisons de ce port avec la France ont augmenté de 465 % pour le fret et de 188 % pour le transport de passagers. Nous avons pu constater, sur place, le vaste projet de réorganisation et d'extension en cours pour améliorer les conditions d'accueil des passagers et renforcer les capacités de fret roulier, notamment via l'installation de parcs de stationnement et d'infrastructures modernes de sûreté, de sécurité, de douanes et de contrôles sanitaires.

En outre, le port mise, lui aussi, sur les énergies renouvelables. Il investit de l'argent pour s'étendre de 21 hectares sur la mer, afin de servir de hub au développement de l'éolien offshore dans les prochaines années.

Au-delà du caractère spectaculaire et rapide du changement d'échelle de ce port, nous avons apprécié la capacité d'anticipation de son gestionnaire, qui n'est autre que la société nationale de chemin de fer irlandaise, NI Railways. À titre d'exemple, il est prévu, une fois la phase de construction des éoliennes offshore achevée, que les 21 hectares qui y seront consacrés soient repensés pour accueillir un terminal multimodal relié au réseau ferroviaire. Cet exemple est particulièrement intéressant pour la France, dans la perspective du développement de lignes de fret non accompagné avec l'Irlande, dans le prolongement de nos lignes de ferroutage.

Le port de Rosslare est appelé à occuper une place stratégique dans l'organisation des chaînes logistiques entre l'Europe et l'Irlande. Compte tenu de sa localisation et de ses importantes marges de développement, il est idéalement situé pour absorber les reports de trafic du port de Dublin, qui devrait atteindre sa capacité maximale en 2035.

Rosslare est aujourd'hui relié aux ports français de Cherbourg, Dunkerque et Roscoff et il dessert le continent européen via 36 lignes hebdomadaires de ferries, à la fois pour le fret et les passagers.

En complément de ces visites de terrain, à la fin de notre déplacement, nous avons organisé une table ronde à Dublin consacrée à ce sujet, qui nous a permis de mieux comprendre comment soutenir le développement des lignes de fret par ferry entre la France et l'Irlande. Avec l'aide du service économique de l'ambassade, nous sommes parvenus à réunir les principales parties prenantes : les acteurs du transport maritime irlandais - le ministère de transports et l'Irish Maritime Development Office, des compagnies de ferries et des transporteurs routiers irlandais. Des représentants des ports français de Dunkerque, Cherbourg et Roscoff, que nous avions rencontrés à Paris avant notre départ, ont également tenu à faire le déplacement ; je les en remercie.

Ces échanges ont permis d'aborder de nombreux enjeux et pistes de travail pour nos deux pays. Citons d'abord le développement de « corridors verts » de fret entre la France et l'Irlande, grâce à la décarbonation du transport maritime, à l'électrification des quais - force est de constater que l'Irlande accuse un certain retard en ce domaine - et au développement des lignes de ferroutage.

Par ailleurs, citons la consolidation de la compétitivité des ports français par rapport à ceux du nord de l'Europe, pour le fret par ferries, qui nécessite d'assurer la fiabilité des infrastructures et la fiabilité sociale ; c'est un réel sujet d'inquiétude pour les entreprises et les opérateurs irlandais. Je pense aussi à la régularité des traversées et à la fluidité de la chaîne logistique, via les modes massifiés.

Cette table ronde a surtout permis de constater le caractère stratégique pour l'Irlande du développement des liaisons maritimes avec la France depuis le Brexit : au-delà du marché français, ces lignes permettent de relier l'Irlande au reste de l'Europe. La ligne de ferroutage Calais-Le Boulou et celle qui vient d'ouvrir entre Cherbourg et Bayonne suscitent un fort intérêt en Irlande. En effet, c'est l'occasion pour elle d'atteindre les marchés du sud de l'Europe de manière rapide, fiable et efficace.

Le Brexit constitue une opportunité pour nos ports et, plus globalement, pour nos relations avec l'Irlande. La délégation de la commission a pris la résolution de réunir, une fois par an, les ports irlandais et ceux du nord de la France, selon un format qui reste à définir. Nous pourrons ainsi faire le point sur l'état du développement des lignes de fret par ferry entre nos deux pays et identifier les difficultés et les solutions adéquates pour y répondre. Notre commission pourrait suivre ce sujet au long cours et jouer un rôle de facilitateur, si des évolutions législatives ou réglementaires venaient à être envisagées.

Parlons à présent des enjeux de transition énergétique, qui ont également été au coeur de notre déplacement. Nous avons pu constater le consensus politique dont les énergies renouvelables font l'objet en Irlande. Aujourd'hui, elles représentent 30 % à 40 % du mix électrique actuel du pays, essentiellement grâce à l'éolien. Ce taux devrait atteindre 80 % d'ici à 2030, selon les objectifs fixés par le Gouvernement irlandais.

En matière énergétique, comme en matière portuaire, les liens entre la France et l'Irlande se sont considérablement renforcés depuis le Brexit. Nous nous sommes rendus sur le chantier du Celtic Interconnector, une liaison sous-marine de 500 kilomètres reliera, d'ici à 2027, les réseaux électriques français et irlandais entre le comté de Cork et le Finistère. Ce projet d'intérêt commun permettra de renforcer la sécurité de l'approvisionnement électrique des deux pays et de mieux intégrer les systèmes énergétiques à l'échelon européen.

Au-delà de la prouesse technique que constitue ce vaste chantier, nous avons été intéressés par le dispositif mis en place pour en faciliter l'acceptabilité sociale auprès des populations riveraines. Un fonds doté de 2,4 millions d'euros a été mis en place par Eirgrid, l'homologue irlandais de Réseau de transport d'électricité (RTE), afin de financer des projets locaux dans les communes affectées par les travaux, ce dans différents domaines : transports, écoles, jardins publics, modernisation de l'éclairage public, projets énergétiques, etc.

Un forum communautaire a également été mis en place pour tenir informées l'ensemble des populations riveraines, tout au long du chantier, et anticiper les dérangements liés, par exemple, à des fermetures de routes.

Il me semble que nous pourrions utilement nous inspirer de ce mode opératoire pour réduire le fameux effet Nimby - en bon français, l'effet Napi, soit « Non au projet ici » -, et favoriser l'adhésion des populations riveraines aux projets d'infrastructures dans notre pays, notamment en matière d'énergies renouvelables.

Je conclus mon retour d'expérience en évoquant le dernier axe de travail de ce déplacement, à savoir la protection des écosystèmes sensibles et l'adaptation face au changement climatique. Nous avons eu le plaisir de nous rendre dans le parc naturel des monts de Wicklow, le plus grand parc national d'Irlande. Le site, situé aux portes de Dublin, accueille plus d'un million de visiteurs chaque année, notamment des randonneurs. Cette affluence constitue un véritable défi pour la conservation des écosystèmes, en particulier pour les tourbières, qui sont très fragiles.

Nous avons été frappés de constater que les parcs naturels ne sont que très peu protégés par la législation irlandaise, pour des raisons historiques et culturelles qui rendent très difficile l'adoption de mesures de régulation des activités humaines et de sanction.

En Irlande, la régulation des usages repose donc uniquement sur l'encouragement des bonnes pratiques. Les gestionnaires d'aires protégées semblent assez démunis, d'autant plus que les autorités misent sur les sites naturels pour développer l'activité touristique du pays. Les gestionnaires aimeraient au moins être en mesure de cartographier les itinéraires de randonnée à privilégier, de manière à interdire d'accès le reste du parc. Ils assureront ainsi la protection des tourbières. Toutefois, en l'absence de moyens coercitifs, on ne peut s'en remettre qu'à la concertation, c'est-à-dire à la bonne volonté des usagers.

Les déplacements à l'étranger nous permettent parfois de prendre de la hauteur sur nos propres pratiques. Alors que, en France, la police de l'environnement fait l'objet de nombreux débats, y compris au sein de notre commission, nous sommes frappés par le manque de leviers juridiques dont dispose l'Irlande pour protéger ses sites remarquables. Pourtant, le tourisme international s'y développe à grands pas. Les gestionnaires du parc que nous avons rencontrés se sont montrés assez curieux, pour ne pas dire envieux, de la réglementation dont nous disposons en France pour la gestion des aires protégées et les missions de police associées.

J'ajouterais encore un mot pour évoquer les mesures consacrées à la gestion des inondations dans la région de Cork, qui a subi d'importants dommages lors de la tempête Babet, en octobre 2023. Nous nous sommes rendus dans la petite ville de Midleton, à proximité de Cork, pour échanger avec des élus locaux sur les dispositifs de prévention des crues. En outre, nous leur avons fait part de notre retour d'expérience sur les inondations qui ont affecté notre pays en 2023 et en 2024, notamment dans le nord de la France.

La ville de Cork, où les inondations sont de plus en plus fréquentes, nous a également présenté un projet d'aménagement de son centre-ville, afin de le protéger des inondations et de l'élévation du niveau de la mer. Par ailleurs, la place de la voiture sera réduite au profit des mobilités douces. La ville est en outre confrontée à une forte croissance démographique, qui sera comprise entre 50 % et 60 % d'ici à 2040. Au demeurant, nous avons évoqué, avec des représentants de la ville de Cork, l'adaptation rapide des infrastructures de la ville en matière de logement et de transport, ainsi que la réhabilitation de certaines zones industrielles et portuaires impliquées par cette évolution.

Voilà les principales thématiques qui ont retenu notre attention lors de ce déplacement. Je tiens à remercier sincèrement mes collègues pour leur participation à ce déplacement, mais aussi pour leur bonne humeur, en dépit d'un programme très dense et de quelques imprévus, qui ne nous ont pas permis de visiter le parc éolien offshore d'Arklow et de rencontrer les gestionnaires du port de Dublin.

La réunion est close à 11 h30.