Communication audiovisuelle (Urgence - Suite)

Discussion des articles (Suite)

Article 18 (Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l'article 18, à l'amendement n°34 rectifié de la commission des affaires culturelles. J'ai été saisi de douze nouveaux sous-amendements, et le groupe CRC-SPG a rectifié quatre de ses amendements pour en faire des sous-amendements à l'amendement n°34 rectifié.

Sous-amendement n°446 à l'amendement n°34 rectifié de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer le 2° de l'amendement n°34 rectifié.

M. David Assouline.  - Il est défendu.

M. le président.  - Sous-amendement n°451 à l'amendement n°34 rectifié de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Rédiger comme suit le second alinéa du 2° de l'amendement n°34 rectifié :

« La renégociation d'un contrat d'objectifs et de moyens avant son terme ne peut survenir qu'en cas de hausse de l'indice des prix à la consommation imprévue et exceptionnelle, de moins-value des recettes de redevance ou de mise en oeuvre de nouvelles orientations technologiques. »

M. David Assouline.  - Il est défendu.

M. le président.  - Sous-amendement n°142 rectifié à l'amendement n°34 rectifié de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.

Dans le quatrième alinéa du 3° de l'amendement n°34 rectifié, supprimer les mots :

et en valeur absolue

M. Ivan Renar.  - Il est défendu.

M. le président.  - Sous-amendement n°453 à l'amendement n°34 rectifié de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Rédiger comme suit le huitième alinéa du 3° de l'amendement n°34 rectifié :

« - Le montant du produit de la redevance audiovisuelle ainsi que des autres ressources publiques devant lui être affectées, en identifiant celles prioritairement consacrées au développement des budgets de programmes ;

M. David Assouline.  - Il est défendu.

M. le président.  - Sous-amendement n°141 rectifié à l'amendement n°34 rectifié de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer le dernier alinéa du 3° de l'amendement n°34 rectifié.

M. Ivan Renar.  - Il est défendu.

M. le président.  - Le sous-amendement n°87 rectifié a été présenté hier.

Sous-amendement n°143 rectifié à l'amendement n°34 rectifié de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer le 10° de l'amendement n°34 rectifié.

M. Ivan Renar.  - Il est défendu.

M. le président.  - Sous-amendement identique n°447 à l'amendement n°34 rectifié de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

M. David Assouline.  - Il est défendu.

M. le président.  - Sous-amendement n°448 à l'amendement n°34 rectifié de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer la deuxième phrase du deuxième alinéa du 10° de l'amendement n°34 rectifié.

M. David Assouline.  - N'ayant pu obtenir la suppression pure et simple des dispositions de cet article concernant la publicité sur les chaînes publiques, nous souhaitons au moins supprimer celle qui prévoit l'interdiction totale de la publicité, à compter de l'extinction de la diffusion en mode analogique prévue en 2011.

L'audiovisuel public aurait alors deux défis à affronter simultanément : le basculement vers le numérique et la suppression totale de la publicité. J'ai déjà souligné la fragilité de l'économie du service public audiovisuel, le risque de sous-financement auquel il est confronté ; cette mesure risque de le fragiliser encore plus. Dans trois ans, peut-être se sera-t-il adapté au nouveau modèle économique imposé par la fin de la publicité après 20 heures ; mais il devra se soumettre à une nouvelle adaptation. En outre, nous ne savons pas comment le marché publicitaire va évoluer, dans quelle proportion les recettes vont être redirigées vers la télévision privée ou les autres médias. Il serait plus sage d'attendre les résultats de la première phase de la réforme avant de lancer la deuxième.

Je le répète : cette réforme, qui prive France Télévisions de 25 % de ses recettes, ne s'accompagne pas des garanties indispensables pour assurer un financement suffisant et pérenne de la télévision publique. La compensation prévue est très partielle. Nous sommes d'autant plus inquiets que certains, dans la majorité, souhaitent réduire le périmètre du service public audiovisuel, ce qui permettrait de libérer des fréquences et de vendre certains services régionaux par appartement pour le plus grand profit des groupes privés.

M. le président.  - Sous-amendement n°457 à l'amendement n°34 rectifié de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.

Rédiger comme suit la troisième phrase du deuxième alinéa du 10° de l'amendement n°34 rectifié.

Elle ne s'applique ni aux campagnes d'intérêt général, ni aux messages de promotion du spectacle vivant et de la création.

M. Ivan Renar.  - Il est défendu.

M. le président.  - Sous-amendement n°449 à l'amendement n°34 rectifié de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer la quatrième phrase du deuxième alinéa du 10° de l'amendement n°34 rectifié.

M. David Assouline.  - A ma grande surprise, les rapporteurs ont intégré dans leur amendement une disposition qui devait être prise par décret. Le passage de l'heure glissante à l'heure d'horloge va permettre de véritables tunnels de publicité : aujourd'hui, on peut avoir six minutes (et bientôt neuf) de publicité par heure ; avec cette disposition, les publicités pourront commencer à 19 h 51 et continuer jusqu'à 20 h 9, soit dix-huit minutes d'affilée. On ne peut pas nous expliquer que la publicité ne peut pas être l'alpha et l'oméga d'un service public de qualité dégagé de contraintes mercantiles et que le téléspectateur pourra subir dix-huit minutes de cette publicité nocive et polluante -certains collègues de l'UMP nous expliquent combien la coupure publicitaire peut être frustrante quand elle tue une émotion. Nous nous étonnons que les rapporteurs prennent l'initiative de relayer ainsi le Gouvernement dans sa volonté de conforter la position dominante des grandes chaînes privées : ont-ils mesuré l'ampleur des dégâts que provoquerait la phrase qu'ils glissent subrepticement dans la loi ? TF1 récolterait ainsi une centaine de millions de recettes publicitaires supplémentaires alors que nous nous efforçons de grappiller quelques dizaines de millions pour le service public. Cette disposition constitue un nouveau cadeau pour TF1 mais au bout de dix-huit minutes, quelle publicité ne serait-elle pas abrutissante ? Nous demandons la suppression de cette phrase.

M. le président.  - Sous-amendement n°145 rectifié bis à l'amendement n°34 rectifié de Mme Morin-Desailly , au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer la cinquième phrase du deuxième alinéa du 10° de l'amendement n°34 rectifié.

M. Ivan Renar.  - L'Assemblée nationale a encore aggravé les dispositions initiales de l'article 18, chargeant un peu plus la barque de France Télévisions. Elle a notamment ajouté aux mesures prévues la suppression de la publicité sur les antennes du RFO, par le biais -comble du paradoxe- d'un amendement du Gouvernement.

Les rédacteurs du projet de loi avaient-ils oublié RFO ? L'exposé des motifs ne la mentionne pas parmi les chaînes du service public. Était-ce un acte manqué, une anticipation sur l'avenir de RFO ? Les salariés de l'entreprise sont inquiets et je souhaite que Mme la ministre s'explique.

En l'occurrence, cet oubli était plutôt une bonne chose pour le personnel de RFO et la télévision de service public outre-mer. Car il est impossible d'ignorer les conséquences sociales et économiques de la suppression de la publicité pour l'entreprise et pour l'outre-mer.

Les pertes de recettes publicitaires n'ont pas été intégrées dans le plan que l'État et France Télévisions négocient actuellement. Or la publicité sur RFO représente un chiffre d'affaires de plus de 18 millions d'euros. Elle mobilise environ 60 salariés ; sa suppression aura donc un fort coût social.

L'économie locale sera également touchée. A la Réunion, il existe un seul opérateur privé, qui diffuse en clair : la suppression de la publicité sur RFO va créer un monopole publicitaire privé. Ce modèle risque de se reproduire en Martinique et en Guadeloupe. Dans les territoires où n'existe pas d'opérateur privé, il n'y aura plus de publicité du tout. Or les créations de nouvelles stations vont se multiplier, avec l'arrivée de la TNT.

Cette mesure va à l'encontre du principe de libre concurrence, si cher au Président de la République, pour laisser la place à une concurrence parfaitement faussée. Les conséquences sur l'économie locale risquent d'être désastreuses : rétrécissement des supports de diffusion publicitaire, hausse des tarifs, distorsions de concurrence et accentuation de la concentration économique déjà très forte outre-mer. Ce projet qui prétend « améliorer la représentation de la diversité » pourrait se traduire par un plan social à RFO, où travaillent des hommes et de femmes qui apportent aux antennes de France Télévisions la richesse de leur regard.

M. le président.  - Sous-amendement identique n°450 à l'amendement n°34 rectifié de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

M. David Assouline.  - Nous demandons la suppression d'une disposition introduite à l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement. L'avant-projet prévoyait de supprimer la publicité sur RFO mais cela avait été retiré du texte à la demande du Conseil d'État, faute de consultation des collectivités territoriales en temps et en heure. Pourquoi fragiliser RFO et provoquer soixante licenciements dans sa régie ? La formulation « sous réserve de l'existence d'une offre de télévision privée diffusée par voie hertzienne terrestre en clair » a au moins le mérite de la clarté : les intérêts du privé prévalent. On aurait pu aussi écrire pour la métropole « sous réserve que TFI et M6 recueillent davantage de recettes publicitaires » ! Le secrétaire d'État à l'outre-mer s'est fait la courroie de transmission des intérêts privés mais nous refusons, quant à nous, de fragiliser davantage RFO.

M. le président.  - Le sous-amendement n°228 rectifié bis a été présenté hier.

Sous-amendement n°452 à l'amendement n°34 rectifié de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Rédiger comme suit le début de la seconde phrase du dernier du 10° de l'amendement n°34 rectifié :

Lors de chaque loi de finances, le montant de cette compensation est...

M. David Assouline.  - Il n'est pas question de redéfinir chaque année les modalités d'une compensation qui doit être intégrale. Trois des amendements que nous avions déposés à cet effet ont été déclarés irrecevables par la commission des finances au motif qu'ils auraient créé des charges pour l'État. On peut regretter un tel usage de l'article 40 car le premier de ces amendements affirmait seulement que Radio France bénéficie de la compensation ; le second qu'elle est intégrale ; le troisième que celle-ci était fonction des recettes annuelles des chaînes privées, lesquelles auraient pu être inférieures : l'irrecevabilité avoue donc l'importance du cadeau fait au privé.

Il est regrettable que nous n'ayons pu débattre de la compensation et que le législateur méconnaisse ainsi sa propre compétence. En effet, le préjudice anormal subi par une société du fait de la loi doit être analysé à la lumière de la jurisprudence inaugurée par l'arrêt La Fleurette rendu par le Conseil d'État le 14 janvier 1938.

La compensation ne doit pas pouvoir être remise en cause à chaque loi de finances. Celle prévue pour 2009 -450 millions- est déjà inférieure de 100 millions à la perte de recettes subie entre 2008 et 2009.

M. le président. -  Sous-amendement n°456 à l'amendement n°34 rectifié de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.

Dans la seconde phrase du dernier alinéa du 10° de l'amendement n°34 rectifié, après le mot :

montant

insérer le mot :

prévisionnel

M. Jack Ralite.  - La suppression en deux temps de la publicité sur les chaînes publiques se traduit par la création d'une compensation financière, qui prend la forme d'une dotation budgétaire déterminée en loi de finances. Est-il sûr qu'elle amortira le choc de la perte de ressources ? Non seulement la bonne santé du marché publicitaire dépend de celle de l'économie, mais encore, comme toute dotation budgétaire, celle-ci peut-être soumise à régulation, donc déconnectée des besoins. Dans le cas de la redevance, nous votons chaque année des avances qui sont débloquées mensuellement et ajustées si nécessaire en loi de finances rectificative. Nous proposons de procéder de la même manière : vote en loi de finances initiale de la compensation prévisible et remise des comptes au niveau requis en collectif.

Le rendement des taxes prévues aux articles 20 et 21 a été présenté comme incertain et l'on a pu s'alarmer du caractère aléatoire des recettes comme de l'absence de fléchage -ce ne sont pas des recettes fiscales dédiées. J'ajoute que l'extension de la couverture en numérique ainsi que le choix d'un quatrième opérateur pour la téléphonie mobile et internet va affecter le produit de ces taxes. Comment d'ailleurs appliquera-t-on le dispositif à un opérateur qui n'avait pas de recettes publicitaires l'année dernière ? Raison de plus pour voter une dotation prévisionnelle puis ajustée en fonction des besoins.

M. le président. - Sous-amendement n°455 à l'amendement n° 34 rectifié de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter l'amendement n°34 rectifié par deux alinéas ainsi rédigés :

...° Le VII est ainsi rédigé :

« VII. - A l'issue de chacun des cinq premiers exercices au cours desquels les règles mentionnées au VI sont appliquées, le Gouvernement présentera au Parlement un rapport évaluant leur incidence sur l'évolution du marché publicitaire. »

M. Serge Lagauche.  - Depuis le 5 janvier 2009, les antennes de France Télévisions ne diffusent plus, sur instruction du Gouvernement et avant même l'entrée en vigueur de la loi, d'écrans de publicité entre 20 heures et 6 heures. Ce sont environ 250 millions d'euros qui ne seront plus investis sur les chaînes publiques. Rappelons que la totalité des recettes publicitaires des chaînes de télévision s'est montée, en 2007, à 3,46 milliards. Ce sont donc près de 8 % de ce montant qui, depuis le 5 janvier, migrent de la télévision publique vers les autres acteurs du marché. Il semble vraisemblable que 60 % à 70 % des investissements publicitaires échappant désormais à France Télévisions seront captés par TF1, 25 % allant vers M6. Dans un marché qui se contractera d'au moins 5 %, et peut-être de 10 % dans les mois qui viennent du fait de la crise économique, TF1 et M6 verront, au mieux, leurs chiffres d'affaires publicitaires rester stables par rapport à ceux de 2008, voire se dégrader un peu. La récession générale du marché publicitaire masquera donc un réel transfert de richesse du secteur public vers le secteur privé.

France Télévisions n'en essaiera pas moins, jusqu'à l'extinction totale de la publicité sur ses antennes en 2011, de réaliser ses objectifs de chiffre d'affaires publicitaire, de l'ordre de 260 millions d'euros en 2009, pour ne pas connaître un déséquilibre de ses comptes encore plus substantiel que celui directement provoqué par la décision du Président de la République. Son déficit 2008 sera de 106 millions, et sans doute de 135 millions en 2009. En journée, les grandes chaînes de télévision hertziennes se livrent déjà une vive compétition pour vendre leurs écrans publicitaires. Nous assistons donc à une restructuration profonde du marché de la publicité, en particulier télévisée, du fait de changements réglementaires importants. Le Gouvernement prend ainsi la lourde responsabilité de bouleverser un peu plus un marché et, au-delà, tout un secteur économique allant de la production à la diffusion et qui vit déjà de profondes évolutions liées à la révolution numérique et à la multiplication des modes de réception et de consommation de la télévision.

Cela étant, il est essentiel que le législateur, qui aura à se prononcer tous les ans sur le financement du service public de l'audiovisuel, dispose de toutes les informations utiles à sa compréhension de l'évolution du marché publicitaire. Nous proposons donc que le Gouvernement remette, tous les ans pendant cinq ans, un rapport au Parlement évaluant l'impact de l'application de la loi sur ce marché. Cette proposition ne fait qu'étendre le champ d'une disposition introduite dans la loi de 1986 par la loi « Trautmann-Tasca » d'août 2000, qui prévoyait de réduire à huit minutes par heure la diffusion de messages publicitaires sur les antennes de France 2 et de France 3.

M. le président.  - Sous-amendement n°454 à l'amendement n°34 rectifié de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter l'amendement n°34 rectifié par deux alinéas ainsi rédigés :

...° Après le VII, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« ... - Dans les deux mois suivant la date à laquelle le Gouvernement a connaissance du montant du produit de la redevance pour chaque exercice budgétaire et lorsque ce montant est inférieur à celui fixé par la loi de finances pour l'exercice budgétaire considéré, un débat sur les perspectives de financement des organismes du secteur public de la communication audiovisuelle visés au I est organisé au Parlement. »

M. Claude Domeizel.  - Dans son dernier rapport annuel, la Cour des comptes dressait un bilan complet de la réforme de la redevance audiovisuelle de 2005. Reconnaissant qu'il est bien résulté de cette réforme une simplification pour les contribuables, une diminution de la fraude ainsi que des économies significatives de gestion, la Haute juridiction financière jugeait cependant que les ressources procurées par la redevance au secteur public de la communication audiovisuelle avaient augmenté moins vite, depuis 2005, que les prévisions établies par les contrats d'objectifs et de moyens. Ainsi, observait la Cour, « la réforme n'a pas apporté, comme la perspective en avait pourtant été annoncée, de réponse substantielle au problème du financement de l'audiovisuel public ». Or, pour les magistrats de la rue Cambon, la refonte d'ensemble du financement de l'audiovisuel public construite, dans le cadre de la réforme en cours, autour de dotations budgétaires compensant les recettes publicitaires et financées par le produit de nouvelles taxes, trouvera difficilement son équilibre, a fortiori de manière pérenne. Et la Cour de conclure, sous forme de recommandation aux pouvoirs publics et en parfait accord avec celles que formule notre commission des affaires culturelles depuis 2003, qu'« en tout état de cause, le financement par la redevance devrait demeurer un élément majeur du financement de l'audiovisuel public ».

Pour assurer à l'audiovisuel public une ressource publique sûre et pérenne, constituée principalement par le produit de la redevance, le présent sous-amendement, dans la logique de nos amendements nos314 et 367, reprend à son compte l'une des recommandations de la rue Cambon. Il s'agirait de compenser le décalage existant entre la connaissance des ressources et l'autorisation des dépenses qui, dans le cas de l'audiovisuel public, aboutit à conduire le débat parlementaire sur les dépenses de l'année N+1 dans l'ignorance des recettes de l'année N, le produit de la redevance ne pouvant être estimé qu'en décembre de chaque année. Nous proposons donc d'atténuer ce décalage en convoquant au début de l'année N+1 un débat à l'Assemblée nationale et au Sénat sur le financement des organismes de l'audiovisuel public en cas de moins-value des recettes de redevance constatée en fin d'année N.

M. le président.  - Les amendements nos357, 362, 358, 233, 291 rectifié, 367, 359 et 360 ont été défendus hier. L'amendement n°361, devenu le sous-amendement n°450, a été défendu de même.

L'amendement n°97 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°418, présenté par M. Maurey et les membres du groupe UC.

Supprimer les trois dernières phrases du deuxième alinéa du 9° de cet article.

M. Hervé Maurey.  - Il semble plus logique que le Gouvernement présente un seul rapport faisant le bilan des modalités de financement de France Télévisions et qui permette de faire les ajustements nécessaires avant que la publicité ne soit totalement supprimée sur les chaînes de France Télévisions.

M. le président.  - Les amendements nos365, 369 et 368, devenus les sous-amendements nos452, 454 et 455 viennent d'être défendus.

M. Michel Thiollière, rapporteur de la commission des affaires culturelles.  - Je donnerai mon avis personnel sur les sous-amendements qui n'ont pu être examinés en commission.

Avis défavorable à l'amendement n°356.

Défavorable au sous-amendement n°446 : il est intéressant qu'à chaque nouveau mandat corresponde un nouveau contrat d'objectifs et de progrès. Avis défavorable au n°451 : il faut laisser des marges de manoeuvre aux sociétés nationales de programmes. Avis défavorable au n°142 rectifié ; même avis au n°453 : ce n'est pas aux contrats d'objectifs et de progrès de fixer le produit de la redevance mais au Parlement. Avis défavorable au n°141 rectifié, satisfait par l'amendement de la commission.

Avis favorable au n°87, et défavorable aux nos143 rectifié et 447, identiques : la suppression de la publicité est une opportunité pour France Télévisions et est de plus en plus appréciée par les téléspectateurs. Avis défavorable au n°448 pour les mêmes raisons. Défavorable au n°457 : la promotion du spectacle vivant est une mission de service public, elle n'a pas à être faite par la publicité. Avis défavorable au n°449 parce qu'il faut permettre à France Télévisions de conserver des recettes minimales. Je vous renvoie, monsieur Assouline, à la page 474 du rapport.

Avis favorable aux sous-amendements identiques n°145 rectifié bis et 450.

Avis défavorable au n°228 rectifié bis. Une clause de revoyure est prévue en 2011. Défavorable au n°452, la loi de 1986 prévoit déjà que le législateur fixe la redevance. Défavorable au n°456 ainsi qu'au n°455, satisfait par la rédaction de l'Assemblée nationale. Défavorable également aux nos454, 357, 362, 358, 233, 291 rectifié, 367, 359, 360 : ils sont incompatibles avec la rédaction de la commission. Défavorable au n°361, mais je rappelle que nous sommes favorables au sous-amendement correspondant n°450. Avis défavorable aux nos418, 365, 369 et 368.

Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication.  - Défavorable bien sûr au n°356. Favorable au n°34 rectifié, défavorable au n°446 car une concomitance entre le contrat d'objectifs et le mandat du président est préférable. Défavorable au n°451 qui introduit une rigidité. Même avis sur le n°142 rectifié car une obligation d'investissement dans la création me paraît une bonne chose. Défavorable au n°453, il n'y a pas lieu d'inscrire cela dans le contrat d'objectifs ; défavorable au n°141 rectifié, satisfait. Sagesse sur le n°87 rectifié, défavorable aux nos143 rectifié et 447, car ils sont contraires au but poursuivi. Même avis sur le n°448 : en 2011, le Gouvernement rendra un rapport au Parlement et proposera éventuellement des adaptations. Défavorable au n°457, qui n'est pas la meilleure manière de soutenir le spectacle vivant ! Défavorable au n°449, la comptabilisation du temps de publicité à l'heure d'horloge est la règle dans l'Europe entière.

Avis défavorable aux amendements nos145 rectifié bis et 450. La publicité est maintenue sur RFO pendant la phase transitoire. Elle ne sera supprimée que si deux conditions sont réunies : que l'analogique soit éteint et le numérique déployé ; et qu'il existe une offre suffisante de télévision privée pour absorber la publicité de RFO. Sagesse sur le n°228 rectifié bis. Défavorable au n°452, la précision est inutile. Défavorable au n°456, sagesse sur le n°455, défavorable au n°454 puisque la redevance fait l'objet d'un débat parlementaire chaque année en loi de finances, sagesse sur le n°418. Avis défavorable à tous les autres amendements, je m'en suis déjà expliquée puisqu'ils sont identiques, sur le fond, aux sous-amendements.

M. le président.  - Je mets aux voix l'amendement n°356 de suppression.

M. François Fortassin.  - Je suis surpris par cette avalanche d'avis défavorables. Ardent défenseur du service public, je souhaite qu'il soit doté des moyens dont il a besoin. Or il n'aura plus de visibilité financière. Je ne suis pas partisan d'une hausse systématique de la redevance ; mais une augmentation équivalant au prix de deux bottes de poireaux en hiver (sourires) ne me semble pas si gênante. La redevance, ne l'oublions pas, est un gage d'indépendance.

M. Michel Mercier.  - Voilà !

M. François Fortassin.  - Les dotations budgétaires annuelles ne la garantissent pas : ce qu'un gouvernement accepte une année, un autre -ou le même !- peut le refuser l'année suivante. Il sera trop facile de porter atteinte au service public en lui coupant les vivres.

Et quelle assurance avons-nous aujourd'hui que l'égalité territoriale sera respectée en 2012 après l'extinction de l'analogique ? Sans doute demandera-t-on aux collectivités locales de participer...

M. Jean-Pierre Plancade.  - Je le crains aussi...

M. François Fortassin.  - ...à la construction des émetteurs ou à leur maintenance. Et cela se passera plutôt en Lozère -elle a, on le sait bien, des revenus considérables- que dans les Hauts-de-Seine ! L'inégalité territoriale, c'est la dégradation du service public, sinon sa fin. Certains des amendements présentés avaient le mérite de le défendre. (MM. Michel Mercier et Jean-Pierre Plancade applaudissent)

M. Ivan Renar.  - Les articles 8, 9 et 18 sont les points essentiels de ce projet de loi. La méthode retenue pour la suppression de la publicité est humiliante pour le Sénat. Et le financement prévu n'est ni pérenne, ni garanti. L'équilibre financier de France Télévisions est en péril, donc le service public audiovisuel. Nous voterons l'amendement de suppression et demandons un scrutin public.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Dans sa précipitation, Mme la ministre a balayé d'un revers de main toute une série d'amendements en arguant qu'ils étaient identiques aux sous-amendements : mais le n°291 rectifié n'a pas été transformé en sous-amendement et méritait un commentaire...

M. David Assouline.  - Faut-il maintenir l'article ? Il y a un paradoxe à discuter d'une mesure déjà appliquée, sur injonction par le conseil d'administration de France Télévisions. Cette affaire est un cas d'école qui restera dans les annales.

Chaque sénateur mesure l'importance de la décision qui va être prise, même si nous sommes aujourd'hui peu nombreux...

M. Roland du Luart.  - Certes, mais les sénateurs présents sont de qualité !

M. David Assouline.  - Ce vote, qui restera dans l'histoire parlementaire, fera jurisprudence en ce qu'il montrera comment un gouvernement qui veut rapidement mettre en oeuvre une mesure peut, dans une démocratie, contourner le débat parlementaire. A ce titre, refusons de le banaliser au prétexte que nous ne ferions qu'entériner une mesure déjà appliquée. Marquons solennellement que le Parlement a seul le pouvoir de délibérer dans ce pays et que le Sénat ne saurait légiférer sur ordre, au pied du mur ou a posteriori. Ce point devrait nous rassembler.

Cette réforme met en péril l'audiovisuel public en ce qu'elle supprime un quart de son financement annuel garanti. Hier, la Haute assemblée a refusé d'inscrire dans la loi le principe de la compensation à l'euro près, à laquelle s'était pourtant engagé le Président de la République, au motif que le montant était trop difficile à calculer et que nos amendements tombaient sous le coup de l'article 40 de la Constitution. En outre, n'ayant pu lire les 520 pages du rapport entre minuit et six heures du matin, soit avant la réunion de la commission, j'ai seulement appris hier qu'une mesure qui devait être introduite par décret serait finalement portée dans la loi. Pourtant, à la commission des affaires culturelles, nous partageons une certaine conception de la culture, l'idée que le commerce et l'économie ne doivent pas broyer l'art, la création et l'être humain. Avec l'amendement 34 rectifié et le passage de l'heure glissante à l'heure d'horloge, les téléspectateurs de TF1 et de M6 auront droit à de véritables tunnels de publicité, contraires à tout esprit de beauté. Où est la lutte contre le consumérisme qui, selon les sénateurs centristes et certains membres de l'UMP, est le but de ce texte ?

M. Jean-Pierre Fourcade.  - J'ai expliqué hier les raisons pour lesquelles le groupe UMP est partisan de l'article 18, je n'y reviens pas. Parlons concrètement et évitons de verser dans l'idéologie et d'utiliser les grands mots tels que lutte contre le consumérisme...

M. David Assouline.  - C'est vous qui avez employé ce terme !

M. Jean-Pierre Fourcade.  - La suppression totale de la publicité doit intervenir au moment du passage au numérique. Madame le ministre, ne pourrait-on pas prévoir une clause de revoyure ? Je suis contre les dispositions à caractère automatique, surtout lorsque leur mise en oeuvre est prévue dans trois ans. (Exclamations de satisfaction sur les bancs socialistes)

A l'instar de M. Fortassin, je crois que la redevance doit assurer l'autonomie du service public et que son calcul dépendra du nouveau formatage de France Télévisions. En revanche, je ne suis nullement frappé par les nombreux avis défavorables, car ils portent sur une kyrielle de sous-amendements tendant à démanteler l'amendement que la commission avait mis au point dans un esprit de consensus. M. Assouline nous a longuement expliqué qu'il s'agissait d'un débat de fond, et non d'obstruction... (M. Alain Gournac en doute) Mais, peut-être aurait-il fallu, en cette affaire, cibler davantage les points importants.

M. Roland du Luart.  - Tout à fait !

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Le groupe UMP n'est donc pas malheureux de cette débauche d'avis négatifs qui fait écho à la débauche de sous-amendements déposés par l'opposition.

M. Roland du Luart.  - Oui à la clause de revoyure !

M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles.  - Par respect envers la fonction de président de la commission des affaires culturelles, je m'oblige à intervenir le moins possible dans les débats. Mais je veux d'abord souligner que je partage le souhait de M. Fourcade : nous devrons utiliser toutes les nouvelles dispositions constitutionnelles pour exercer notre fonction de contrôle et de suivi d'application de cette loi.

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Très bien !

M. Jacques Legendre, président de la commission.  - Ensuite, monsieur Assouline, le point que vous avez évoqué a été débattu la semaine dernière en commission, et non la veille. La commission cherche le consensus, ce que vous avez au reste reconnu, mais elle refuse légitimement des propositions qui remettent radicalement en cause l'esprit d'un texte sur lequel la majorité s'accorde.

M. Alain Gournac.  - C'est logique !

M. Jacques Legendre, président de la commission.  - Notre volonté est d'améliorer le texte. Et, quand nécessaire, nous savons aussi dire non ! (Applaudissements sur quelques bancs à droite)

M. Alain Gournac.  - Très bien !

M. Michel Mercier.  - Nous sommes très favorables à la suppression de la publicité car, dans le foisonnement actuel des chaînes, la télévision publique doit se distinguer complètement de ses concurrents. Reste que le Sénat a été maltraité : décider la suppression de la publicité avant notre vote, la pilule est dure à avaler !

M. Roland du Luart.  - C'est vrai !

M. Michel Mercier.  - Certains membres de notre groupe ne l'acceptent pas et le marqueront par leur vote. Mais, honnêtement, la suppression de la publicité est un progrès. Le Gouvernement qui reviendra sur cette décision n'est pas né... (Marques d'approbation à droite) Il est temps que nous travaillions pour le long terme ! (Applaudissements au centre et sur quelques bancs à droite)

M. Jacques Legendre, président de la commission.  - Très bien !

Mme Catherine Tasca.  - L'amendement n°360 témoigne de l'esprit constructif dans lequel nous avons abordé ce débat : nous proposons de ne pas préjuger de la situation de la télévision publique en 2011 et de chercher à gérer au mieux la première phase de cette réforme.

Madame le ministre, donnons à France Télévisions toutes les chances d'aborder cette profonde modification qu'est la suppression de la publicité en refusant de fixer dans la loi la deuxième phase en 2011, au moment du passage au numérique qui nécessitera, au demeurant, de lourds investissements. Dans le cas contraire, nous nous interdirions une évaluation solide, sérieuse et libre. Nous l'avons constaté avec la première phase de cette loi : la date du 5 janvier étant acquise et impérative -vous l'avez tenue en recourant à une décision du conseil d'administration-, vous avez stérilisé le débat parlementaire. Si vous inscrivez le rendez-vous de 2011 dans la loi, vous rendez inéluctable la mise en oeuvre de la deuxième phase de la réforme et vous privez le Parlement de sa responsabilité de contrôler et d'évaluer la loi.

Vous nous privez de la possibilité de contrôler et d'évaluer cette réforme énorme, et vous enjoignez l'entreprise de se mettre en ordre de marche. C'est une politique de Gribouille !

Nous ne cherchons pas à vous convaincre sur le fond, nos conceptions sont trop différentes, mais nous avons le souci de l'avenir. Le Sénat doit se montrer raisonnable, plus encore que la commission des affaires culturelles, et subordonner le passage à la seconde étape à un examen libre et approfondi de l'impact de cette première phase sur l'entreprise, sur le marché publicitaire et sur les nouveaux médias. (Applaudissements à gauche)

Mme Christine Albanel, ministre.  - La suppression de la publicité apparaît déjà comme naturelle aux téléspectateurs. Cela ne relevait d'ailleurs pas de la loi ; c'est pourquoi, devant l'obstruction de l'Assemblée nationale, le conseil d'administration de France Télévisions a pris cette décision en décembre.

Il est bien prévu que le Gouvernement doit remettre un rapport au Parlement avant le passage à la seconde phase et qu'il doit présenter les adaptations qui seront apparues nécessaires au vu des évolutions constatées.

Mme Blandin m'a fait remarquer que je n'avais pas donné mon avis sur son sous-amendement n°291 rectifié. Je la prie de m'en excuser. Mon avis est défavorable parce que la disposition qu'elle vise est l'application d'un accord interprofessionnel.

M. Jack Ralite.  - J'approuve au mot près ce qu'a dit Mme Tasca. J'ai d'ailleurs senti la même idée chez M. Fourcade. Il y aura un rapport ? Sans doute, mais le problème, c'est l'obligation. Je suis favorable à l'idée de dire dès maintenant qu'on supprimera totalement la publicité sur les chaînes publiques mais je voterai dans le même sens que Mme Tasca. C'est comme lorsque la commission des affaires culturelles a fait passer l'idée que la redevance était la source principale du financement des chaînes publiques : une phrase toute simple, qui ne fige rien et n'insulte pas l'avenir.

A la demande du groupe CRC, l'amendement n°356 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 335
Nombre de suffrages exprimés 316
Majorité absolue des suffrages exprimés 159
Pour l'adoption 141
Contre 175

Le Sénat n'a pas adopté.

M. Yannick Bodin.  - La disposition prévoyant d'aligner la durée des contrats d'objectifs et de moyens sur celui du mandat des présidents constitue, à nos yeux, une arme à double tranchant.

On peut effectivement estimer que l'alignement des durées sécurise l'action d'un président élu, ayant lui-même négocié son contrat d'objectifs et de moyens qui ne pourra être renégocié durant son mandat. Mais les présidents seront désormais sur un siège éjectable. Comment, dès lors, accepter que les contrats puissent être renégociés à des fréquences diverses, concomitamment à l'arrivée d'un nouveau président dont la nomination pourra être assortie d'une injonction de faire faire des économies ?

L'État s'engage à fournir les moyens financiers convenus pour la durée du contrat d'objectifs et de moyens. En contrepartie de leurs engagements, les organismes du secteur public audiovisuel ont une visibilité à moyen terme sur l'évolution de leurs ressources. Que va-t-il advenir de cette visibilité si les contrats d'objectifs et de moyens sont remis en cause à chaque nomination ? Qu'en est-il de la logique de responsabilisation mutuelle entre l'État et les sociétés ?

Il faut maintenir la durée initiale du contrat d'objectifs et de moyens afin que les engagements des signataires revêtent un caractère stable et pérenne.

M. David Assouline.  - Je tiens à répondre à certains propos qui, pour être renouvelés, n'en sont pas moins dénués de vérité. Ce n'est pas la prétendue « obstruction » à l'Assemblée nationale qui nous aurait amenés à examiner cette disposition après que la suppression de la publicité est entrée en vigueur. Les socialistes avaient mis comme condition à leur participation à la commission Copé que les travaux de celle-ci ne remplaceraient pas ceux du Parlement. Cette condition avait été acceptée ; il fut donc convenu qu'il y aurait le temps de la discussion parlementaire.

Sur notre proposition, la commission Copé a considéré que la suppression de la publicité n'entrerait pas en vigueur avant septembre 2009, date logique puisque c'est aussi le moment de l'année où les chaînes mettent en place de nouvelles grilles.

La commission Copé était unanime pour demander la suppression de la publicité en septembre. On nous a répondu, sans aucune explication, que ce serait pour janvier mais que nous ne devions pas nous inquiéter car le débat parlementaire aurait lieu dès l'été. Il a fallu attendre novembre pour que la loi soit déposée à l'Assemblée nationale ! Bien évidemment, le Gouvernement avait ordonné bien en amont à France Télévisions de se préparer à cette suppression. La prétendue obstruction à l'Assemblée n'a donc eu aucune incidence sur la mise en oeuvre de cette réforme. Ce que je dis est un simple rappel des faits.

M. Alain Gournac.  - On a compris !

M. David Assouline.  - M. Fourcade peut penser ce qu'il veut du débat qui a eu lieu à l'Assemblée nationale mais ici, il n'y a pas eu d'obstruction. (Rires à droite) Tous nos amendements portent sur le fond. (Exclamations ironiques sur les mêmes bancs) Les sous-amendements que nous avons déposés ne sont que la conséquence d'une rectification de l'amendement de la commission. Nous avons du transformer nos amendements en sous-amendements, en accord avec la commission.

Enfin, si Mme la ministre se tourne systématiquement vers la droite pour répondre, avouez que c'est nous qui faisons vivre ce débat ! (Nouveaux rires à droite)

M. Jacques Legendre, président de la commission.  - Si nous avons modifié, avec M. Assouline, certains de ses sous-amendements pour parvenir à une rédaction acceptable, je ne peux laisser dire que ces sous-amendements ont été déposés en accord avec la commission.

Le sous-amendement n°446 n'est pas adopté.

Le sous-amendement n°451 n'est pas adopté.

M. Jack Ralite.  - Je vais terminer mon intervention d'hier. (Rires à droite)

J'appelle les producteurs et les personnels de France Télévisions à se retrouver pour inventer une responsabilité publique qui convienne aux uns et aux autres. L'unanimité obtenue à l'Assemblée nationale permettra un vrai rapport de force. Il y a eu unanimité au Parlement en 2007 sur la définition de l'oeuvre patrimoniale mais, hélas, le Gouvernement n'en a pas tenu compte : on ne joue pas à la pétanque avec des boules carrées. (Sourires)

J'espère que le vote du Sénat rejoindra celui de l'Assemblée nationale. Vous avez donné votre accord à l'Assemblée, madame la ministre. Souhaitons qu'il en soit de même ici mais, de grâce, prévoyez des moyens financiers ! L'auto France Télévisions a besoin de combustible pour l'audiovisuel mais aussi pour le cinéma, les personnels et les téléspectateurs. Je retire ce sous-amendement en ne regrettant pas de l'avoir écrit pour alerter les cinéastes, mais aussi les personnels

Le sous-amendement n°142 rectifié est retiré.

M. Yannick Bodin.  - L'indépendance de l'audiovisuel public à l'égard du pouvoir exécutif et des puissances économiques ne sera réelle qu'à condition que deux critères soient remplis. Si l'autonomie de gestion n'a aucun sens sans indépendance politique, l'indépendance politique est vidée de sa substance si la tutelle financière demeure.

Comme la commission des affaires culturelles, nous estimons que la redevance est la ressource la plus adaptée pour assurer au service public de l'audiovisuel un financement sûr, pérenne et adapté à ses besoins. C'est d'ailleurs ce qui se passe au Royaume-Uni et en Allemagne. La redevance n'est pas un impôt mais une contribution au financement d'un service public, comme le sont d'autres prélèvements de ce type dont le produit est affecté au financement de services publics locaux. C'est d'ailleurs pourquoi notre commission propose de modifier la dénomination de la redevance audiovisuelle.

France Télévisions et les autres entreprises publiques de ce secteur doivent disposer d'une visibilité financière pluriannuelle afin que leur gestion soit autonome. La loi d'août 2000 avait d'ailleurs institué une forme de contractualisation entre l'État et France Télévisions, Radio France, Radio France Internationale, Arte-France et l'Institut national de l'audiovisuel. Ainsi, les contrats d'objectifs et de moyens déterminent sur plusieurs années le montant des ressources publiques devant être affectées à chacun de ces organismes.

Alors que le Gouvernement a bouleversé toute l'économie du PAF en imposant à France Télévisions de supprimer la publicité de ses écrans, le législateur doit assurer à notre radio et à notre télévision publiques, mais aussi à l'INA, une ressource publique pérenne. Notre sous-amendement va dans ce sens.

Notre assemblée doit à la constance de sa commission des affaires culturelles, soutenue si longtemps par le président Valade et par notre ancien collègue de Broissia, de faire bloc face aux ennemis irréductibles de la redevance qui font entendre leur voix depuis les travées du groupe UMP de l'Assemblée nationale. En votant ce sous-amendement, notre position serait renforcée.

Le sous-amendement n°453 n'est pas adopté.

M. Ivan Renar.  - La suppression de la publicité est un véritable boulet pour France Télévisions : on ne peut à la fois prétendre vouloir son équilibre financier et interdire la publicité.

Le sous-amendement n°141 rectifié n'est pas adopté.

Le sous-amendement n°87 rectifié est adopté.

M. David Assouline.  - Mon intervention d'hier a été interrompue par le président de séance.

M. Roland du Luart.  - Je vous avais à l'oeil ! (Sourires)

M. David Assouline.  - La loi ne doit pas être rédigée pour satisfaire les intérêts privés mais l'intérêt général. Or, la suppression de la publicité sur France Télévisions va servir les intérêts de TF1 et, dans une moindre mesure, de M6. Nous aurions aimé que les chaines de la TNT bénéficient de cette manne. Il n'en sera hélas rien.

Cette réforme met en péril le service public de l'audiovisuel, qui sera chroniquement sous-financé. Vous créez une usine à gaz en recourant à des taxes hautement contestables. Au-delà des bancs de l'opposition, bien des voix s'élèvent pour contester cet état de fait.

M. Fourcade a dit qu'il serait bon, avant la suppression totale de la publicité en 2011, de prévoir une clause de revoyure. C'est l'objet de notre prochain sous-amendement.

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Le Sénat vient de repousser, par scrutin public, l'amendement de suppression de l'article. Or ce sous-amendement supprime toute une partie de l'article ayant trait à la suppression de la publicité ! Reconnaissez que, s'il n'y a pas d'obstruction stricto sensu, on s'emploie tout de même manifestement à ralentir les choses... (M. Alain Gournac approuve) En outre, réglementairement, un sous-amendement parfaitement contraire à l'amendement qu'il modifie ne peut être accepté. Vous êtes pris en flagrant délit ! (Applaudissements à droite)

M. Alain Gournac.  - Très bien !

M. le président.  - Le sous-amendement n°447 a été déclaré recevable par la séance.

Le sous-amendement n°447, identique au sous-amendement n°143 rectifié, n'est pas adopté.

Mme Catherine Tasca.  - D'un naturel optimiste, je reviens à la charge. Ne gravons pas dans la loi le rendez-vous de 2011 ! Je remercie M. Fourcade d'avoir admis que la question se posait. Mais on ne pourra se contenter d'une accumulation de rapports : il faut une véritable clause de revoyure pour que le Parlement puisse, demain, prendre une autre position.

L'entreprise doit pouvoir conduire une mutation réfléchie, sans être en permanence cul par-dessus tête ! On ne change pas les paramètres financiers d'une entreprise tous les trois ans !

Il y a des inconnues colossales concernant la transformation du paysage audiovisuel, l'évolution du marché de la publicité, le passage au tout numérique. Décréter aujourd'hui ce que sera l'économie de l'audiovisuel public après 2011, c'est conduire une politique de Gribouille. Comme je ne peux croire que vous voulez fragiliser l'audiovisuel public, je vous conjure de donner du temps au temps !

La perte de recettes devait être compensée « à l'euro près ». On en est loin : 450 millions, alors qu'il en faudrait 800 ! Malgré l'engagement moral de l'État, vous avez refusé d'inscrire que la compensation serait « intégrale » ! C'est incompréhensible, au regard de l'annonce du Président de la République, et des débats au sein de la commission ad hoc. La compensation n'est pas garantie au-delà de trois ans, et l'on voudrait consacrer dans la loi le rendez-vous de 2011 ! Je ne demande pas à la majorité une conversion philosophique, mais d'agir de façon responsable, et de ne pas préjuger de l'avenir.

M. Jack Ralite.  - Nous soutenons ce sous-amendement. Les États-Unis envisagent aujourd'hui de différer le passage au tout numérique. Nous, nous restons sur l'autoroute, alors que c'est les venelles qu'il faudrait savoir prendre !

Le rendez-vous de 2012 n'a-t-il pas été pensé stratégiquement ? La maison radio-télévision sera en péril : peut-être certaines personnes seront-elles contentes de la cueillir ?

A la demande du groupe socialiste, le sous-amendement n°448 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 323
Nombre de suffrages exprimés 317
Majorité absolue des suffrages exprimés 159
Pour l'adoption 138
Contre 179

Le Sénat n'a pas adopté.

Le sous-amendement n°457 n'est pas adopté, non plus que le sous-amendement n°449.

M. Ivan Renar.  - Au sujet de RFO, la musique de la commission a paru douce à nos oreilles. Je regrette que Mme la ministre n'ait pas montré le même souci des salariés et du public de la chaîne.

Les sous-amendements identiques nos145 rectifié bis et 450 sont adoptés, ainsi que l'amendement n°228 rectifié bis.

Le sous-amendement n°452 n'est pas adopté, non plus que les sous-amendements nos456, 455 et 454.

M. Jack Ralite.  - Puisque l'amendement n°34 rectifié réécrit l'article, j'explique dès à présent mon vote sur ce dernier.

Le Gouvernement peut souffler : la publicité sera bel et bien interdite sur les chaînes publiques. Il a obtenu les deux votes qu'il souhaitait, l'un légal, l'autre qui va le devenir. La compensation des pertes de recettes n'est pas assurée, ce qui pose un problème moral. Le service public entre dans une phase de bouleversement de son équilibre et de ses structures financières. Aucune entreprise privée n'accepterait d'être traitée ainsi !

MM. Fourcade et Longuet disent qu'il ne faut pas être archaïque, mais moderne. Il faut en fait distinguer deux problèmes. D'une part, l'audiovisuel est confronté à des mutations technologiques gigantesques. Nous le reconnaissons volontiers. Nous nous sommes justement intéressés à cette question lors des états généraux de la culture, comme en témoigne le document que je vous ai envoyé. Mais la question du financement de l'audiovisuel public et celle de la nomination des présidents a pris tellement de place dans notre débat que nous n'avons pas eu le temps d'aborder vraiment ce sujet. Ce qui nous sépare de vous, c'est que nous ne considérons pas les nouvelles technologies comme un fatum : il s'agit d'un nouvel outillage, comme tant d'autres qui se sont succédé au cours de l'histoire de l'humanité.

D'autre part, il y a la question de savoir quelle est la meilleure manière d'aborder ces défis. Sur ce point, qui est le plus archaïque ? Je laisse cette interrogation sans réponse pour rester courtois...

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Tant mieux !

M. Jack Ralite.  - La solution apportée par le projet de loi est purement idéologique. Elle ne résoudra pas les problèmes rencontrés par France Télévisions, malgré vos belles paroles.

A quoi avait donc pensé M. Sarkozy dans la nuit du 8 janvier ? J'ai longtemps cru qu'il avait déjeuné avec Alain Minc ce matin-là ; à présent je suis sûr qu'il l'avait lu pendant la nuit. M. Minc écrivait dans son livre L'après-crise a commencé, publié en 1982 et véritable manifeste du sarkozysme : « Le jeu libéral stricto sensu doit s'appuyer sur un État de plus en plus bouclier industriel. Cette alliance des contraires traduit l'ambivalence croissante du marché : d'une part le seul régulateur, d'autre part un champ mondial de forces où s'affrontent des acteurs de plus en plus massifs, chacun dopé par son État afin d'arracher des parts de marché comme on enlevait autrefois des positions. » Il poursuivait : « C'est une guerre qui s'y mène, avec son front, la bataille pour les grandes positions mondiales, ses percées, les grands contrats d'exportation, et ses arrières, le marché intérieur, aussi décisifs que dans toutes les guerres. (Marques d'impatience à droite) Elle rend désormais suranné le principe sacramentel sur lequel s'est bâti le welfare français : tout service collectif doit être public et non marchand. Elle rend inévitable le recours au marché comme régulateur social. »

M. Roland du Luart.  - Hors sujet !

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Vous devez vous aussi y passer des nuits blanches, monsieur Ralite !

M. Jack Ralite.  - Ne recommencez pas à m'interrompre ! Vous réclamez des discussions de fond, eh bien en voilà !

M. Alain Gournac.  - Les goujats ont des oreilles !

M. Jack Ralite.  - Je n'avais visé qu'une personne hier. Dans Le Média-choc, publié en 1992, le même Alain Minc reprend la question de la régulation audiovisuelle pour inviter à « un remède de cheval, version droite ». Il ne s'agit plus de poursuivre les privatisations après celle de TF1 ; « l'exemple vient une fois de plus du monde anglo-saxon (...), de Grande-Bretagne où Margaret Thatcher a essayé de redessiner le paysage audiovisuel dans une optique plus brutalement libérale ». Cette réforme reposait sur plusieurs volets : « une diffusion privée et plurielle, un secteur public producteur [sur ce point, M. Sarkozy n'a pas suivi M. Minc] et fonctionnant comme une agence d'achat d'heures de diffusion, une instance de régulation toute-puissante. » (Nouvelles marques d'impatience à droite) Dans cette conception, « c'est la nature des ressources, budgétaires ou publicitaires, qui fixe la vocation de la chaîne ». La télévision publique, alimentée par la redevance, « produirait ou plutôt commanderait des émissions que la logique naturelle du marché ignorerait. (...) A l'État resterait le rôle d'actionnaire de l'agence, puisqu'il la financerait, et donc le pouvoir de nomination de ses dirigeants. » Cela me rappelle ce que disait Mme Pécresse à propos de la recherche publique. J'en ai terminé.

M. David Assouline.  - J'explique moi aussi mon vote par anticipation.

Nous sommes appelés à voter sur une mesure déjà effective. Dans ces conditions, on aurait pu s'attendre à une rébellion un peu plus forte de la part du Sénat, parfois accusé de ne servir à rien. Mais le vote n'a pas encore eu lieu, et il y a encore de l'espoir...

Les différents groupes de notre assemblée sont quelquefois tombés d'accord au cours de ce débat. Il eût été souhaitable qu'ils le soient une nouvelle fois sur la clause de revoyure. L'interdiction de la publicité après vingt heures risque de mettre en cause l'équilibre financier de France Télévisions, comme Mme Tasca l'a rappelé. Ce n'est pas rendre service aux dirigeants du groupe ni au service public. Mais on aurait au moins pu prévoir que le Parlement eût dû se réunir afin d'évaluer les conséquences de cette mesure, avant de l'étendre au reste de la journée en 2011 !

Cet article comprend en outre une disposition qui n'a rien à voir avec le service public : le passage de l'heure glissante à l'heure d'horloge pour le secteur privé. Ce que vous autorisez par là, c'est l'allongement de l'interminable tunnel publicitaire de TF1 !

Un mince rayon de soleil perce ces nuages : la majorité a accepté d'adopter un sous-amendement d'origine socialiste qui laisse à RFO la liberté de recourir à la publicité. C'est une bonne chose.

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur de la commission des affaires culturelles.  - C'était une initiative des sénateurs représentant les Français de l'étranger.

M. David Assouline.  - C'est le symbole de ce qui se passe depuis le début : alors que le Sénat ratifie une réforme dont il ne voulait pas vraiment, notre opposition est constructive et nous arrivons à créer des niches, à établir des protections. Nous évitons ainsi le pire quand notre Assemblée reprend nos propositions.

A la demande du groupe socialiste, l'amendement n°34 rectifié est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 335
Nombre de suffrages exprimés 314
Majorité absolue des suffrages exprimés 158
Pour l'adoption 174
Contre 140

Le Sénat a adopté.

En conséquence, les autres amendements tombent.

M. Jacques Legendre, président de la commission.  - La commission demande la réserve des amendements nos35 et 36 rectifiés jusqu'après les articles additionnels après l'article 19.

Acceptée par le Gouvernement, la réserve est de droit.

Article 19

Supprimé.

M. le président.  - Amendement n°37, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

La dernière phrase du second alinéa du III de l'article 1605 du code général des impôts est ainsi rédigée : « Il est arrondi à l'euro supérieur. »

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur.  - Loin d'être de circonstance, l'ensemble des propositions des rapporteurs traduit la cohérence des travaux que la commission des affaires culturelles conduit depuis plusieurs années ; je vous renvoie aux débats que nous avions avec le président Valade et M. de Broissia. Nous souhaitons que la recette soit pérenne et dynamique, qu'elle soit revalorisée dans son montant et dans son image. Cet amendement s'inscrit ainsi dans la réflexion sur la modernisation de la redevance voulue par le Premier ministre. Nous proposons un ajustement technique afin que la redevance soit arrondie à l'euro supérieur. D'un impact de 20 millions certaines années cette disposition a l'avantage de n'être pas ponctuelle. Ses conséquences à moyen et long terme contribuent à rendre la ressource dynamique.

M. le président.  - Amendement n°183, présenté par M. Pozzo di Borgo.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

L'exonération de la redevance ne s'applique pas aux abonnés des chaînes cryptées.

M. Yves Pozzo di Borgo.  - Il est paradoxal que des personnes qui paient leur abonnement à une chaîne cryptée jusqu'à 90 euros par mois profitent gratuitement des chaînes publiques. On estime que 15 % des téléspectateurs ne paient pas la redevance et que sept millions de foyers bénéficient d'une offre payante de Canal Plus ou de Canal Satellite, quatre millions de téléspectateurs ayant choisi une offre ADSL comme celle de Free. Enfin, 800 000 foyers sont exonérés de redevance. Tout cela crée des inégalités au détriment des chaînes publiques, dont on estime le manque à gagner à 90 millions. Certes, l'article 53 de la loi du 30 septembre 1986 avait bien prévu une compensation intégrale des exonérations, mais la loi de finances rectificative pour 2006 a plafonné ce remboursement. Les pertes substantielles qui en découlent rendent notre important amendement encore plus nécessaire.

M. le président.  - Amendement n°372, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le III de l'article 1605 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans son rapport annuel rendu public conformément à l'article 18 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, le Conseil supérieur de l'audiovisuel propose, au regard des rapports d'exécution des contrats d'objectif et de moyens des sociétés de l'audiovisuel public, prévus au I de l'article 53 de la même loi, les modalités de revalorisation du montant de la redevance. La revalorisation ne peut être inférieure à l'évolution de l'indice des prix à la consommation hors tabac, tel qu'il est prévu dans le rapport économique, social et financier annexé à la loi de finances pour l'année considérée. »

M. David Assouline.  - L'indépendance de l'audiovisuel public repose d'abord sur un financement sûr, pérenne, adapté et dont les modalités ne dépendent pas du pouvoir en place. Je sais que la commission partage ce point de vue qui rejoint la norme européenne. Rejoignant l'esprit de l'amendement n°37, nous estimons qu'il revient à une autorité indépendante, comme c'est le cas en Allemagne, de déterminer le niveau de ressources nécessaire.

Nous complétons le dispositif en précisant qu'il appartient au CSA de proposer les modalités de revalorisation annuelle de la redevance.

Ainsi, le CSA obtiendrait un champ de compétences comparable à celui de son homologue allemand. En effet, outre-Rhin, le montant de la redevance est fixé par une structure indépendante, la Commission pour l'évaluation des besoins budgétaires des établissements de radiodiffusion, la KEF. Cette commission recommanda, pour la période 2005-2008, une hausse de 1,07 euro de la redevance, qui devait ainsi atteindre 17,22 euros par mois et par foyer, soit une hausse de 6 % permettant d'augmenter les recettes des radiodiffuseurs publics d'environ 400 millions par an. Or en octobre 2004, les ministres-présidents des Länder décidèrent de limiter la hausse à 0,88 euro. Alors que l'ARD et la ZDF avaient fait savoir que leurs besoins de financement ne seraient couverts qu'avec une redevance à 18 euros : la Cour constitutionnelle leur donna raison dans un arrêt de septembre 2007.

C'est vers ce modèle garantissant réellement au service public de l'audiovisuel les moyens de financer son développement de manière pérenne que nous souhaitons voir notre législation évoluer.

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur.  - Avis défavorable au n°183. Il pose un vrai problème -les exonérations fiscales ne sont pas toujours pertinentes. Mais la loi n'a pas à définir, parmi les foyers modestes exonérés, ceux qui sont vertueux et ceux qui ne le sont pas. C'est là une question de liberté individuelle. Le croisement des fichiers pose un problème et notre groupe de travail va y réfléchir.

Avis défavorable au n°372, satisfait par un amendement de la commission portant article additionnel après l'article 14.

Mme Christine Albanel, ministre.  - Avis favorable au n°37. Défavorable au n°183 : il serait difficile de conditionner une exonération fiscale à un profil de consommation. Certaines personnes s'abonnent aux chaînes cryptées parce qu'elles sont immobilisées chez elles. En outre le contrôle serait problématique, à cause du croisement des fichiers.

Avis défavorable au n°372 : la fixation de la redevance n'est pas du ressort du CSA mais du Gouvernement et du Parlement.

M. Michel Billout.  - L'amendement n°37, adopté à l'unanimité par la commission des affaires culturelles lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2008 en décembre dernier, avait été retiré en séance à la demande du Gouvernement et de la commission des finances. Pourtant, nous aurions pu le faire adopter car le second amendement défendu par la commission avait alors recueilli 161 voix pour et 136 contre. Mon groupe avait d'ailleurs, à cette occasion, défendu un sous-amendement, que nous avions également proposé lors de la première partie du projet de loi de finances.

Cette redevance est une sorte d'actionnariat populaire qui a supporté la charge de l'ensemble du développement de la télévision. Les 450 millions prévus par le Gouvernement ne suffiront pas, ni pour redresser les finances de la télévision française, ni pour assurer son développement. La redevance doit donc être augmentée. Sinon comment prétendre créer un grand service public de l'audiovisuel ? D'autant que cette compensation repose sur les taxes affectant les ressources publicitaires des chaînes privées et le chiffre d'affaires des fournisseurs d'accès à internet, dont on a vu, à l'Assemblée nationale mais aussi dans cette enceinte, le peu d'enthousiasme qu'elles suscitaient. Et il ne faut pas oublier l'avis que porterait sur elles la Commission européenne.

Rien n'est donc acquis. C'est pourquoi, nous demandons, dans les amendements qui seront examinés après l'article 19, que la redevance augmente de 4 euros : 2 euros correspondant à l'inflation arrondie au chiffre supérieur et 2 euros constituant un surcroît net de recettes. Refuser cette augmentation serait refuser de satisfaire la création au bénéfice de la simple reproduction. En maintenant le statu quo, on n'avance pas vers l'avenir !

Car l'État, en même temps qu'il refuse d'augmenter la redevance, continue de plafonner les remboursements des dégrèvements de la redevance. Rien n'a changé à cet égard depuis 2006. Or la loi d'août 2000, relative à la liberté de communication, dispose que « les exonérations de redevance audiovisuelle décidées pour des motifs sociaux donnent lieu à remboursement intégral du budget général de l'État ». L'amendement des rapporteurs est un premier pas, insuffisant, mais il doit être franchi.

M. Jacques Legendre, président de la commission.  - Le débat sur la paternité de la réflexion sur une éventuelle augmentation de la redevance m'a amusé... La recherche en paternité doit amener à reconnaître la position constante en la matière, et depuis des années, de la commission des affaires culturelles, en particulier du président Valade et du rapporteur, mon ami de Broissia. Il faut leur rendre hommage pour avoir toujours souhaité, au moins, le maintien de l'indexation, non par ignorance de la situation des contribuables ou de l'économie mais parce qu'il faut accorder à une société qui réalise des programmes les moyens de le faire. L'autre solution serait de faire contribuer, de manière plus anonyme, le contribuable. Mais il semble plus juste que celui qui veut accéder aux programmes télévisés consente à payer un peu plus. La réussite de la télévision publique impose qu'on lui en donne les moyens. Le Sénat peut se rassembler unanime derrière cette idée dont nous sommes les pères.

M. Yves Pozzo di Borgo.  - Si l'amendement de la commission est adopté, le mien devient sans objet. Cependant, je persiste et signe : un téléspectateur assujetti à la redevance trouve injuste que son voisin, abonné au câble, puisse être exonéré. Je regrette que la commission et le Gouvernement m'aient répondu par une pirouette sans avoir pris la peine d'examiner plus sérieusement la question.

L'amendement n°37 est adopté et devient l'article 19.

L'amendement n°183 devient sans objet, ainsi que l'amendement n°372.

La séance est suspendue à midi quarante-cinq.

présidence de M. Roger Romani,vice-président

La séance reprend à 15 h 5.

M. le président.  - Nous allons maintenant examiner les articles du titre premier précédemment réservés.

Article 13 bis (Réservé)

Après le deuxième alinéa du I de l'article 34-2 de la même loi, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les collectivités d'outre-mer, la société mentionnée au I de l'article 44 met à disposition de tout distributeur de services sur un réseau n'utilisant pas de fréquences terrestres assignées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel qui en fait la demande, tout ou partie des services de télévision nationaux qu'elle édite. »

M. Georges Patient.  - En privant d'effet les dispositions de must carry et l'obligation de diffusion outre-mer, cet article crée des distorsions entre ces citoyens et ceux de la métropole. En effet, un décret du 1er septembre 1992 oblige les réseaux distribuant des services de radiodiffusion et de télévision à offrir en simulcast, ou diffusion simultanée, l'ensemble des chaînes hertziennes, publiques ou privées, normalement reçues dans leur zone de desserte.

Avec la commercialisation outre-mer des chaînes nationales de service public, non distribuées sur ces territoires, certains citoyens auront les capacités financières pour y accéder alors que les plus modestes devront se limiter aux deux ou trois chaînes locales. Cela sera d'autant plus dommageable que France Télévisions prévoit le déploiement de l'intégralité de ses chaînes nationales dans les territoires d'outre-mer dans le courant de l'année 2009 grâce au numérique terrestre (TNT), par définition associé aux notions de gratuité, de liberté de concurrence, de respect du pluralisme, et de qualité d'image et de son.

D'autre part, les chaînes de service public locales -notamment RFO à travers ses Télés Pays, qui puisent près de 80 % de leurs programmes dans le catalogue de ces chaînes- seront fragilisées. En outre, France Télévisions devra payer des droits additionnels pour la diffusion de programmes qu'elle a déjà achetés, mais qui profiteront aux distributeurs de services du fait d'une primo-diffusion. Le service public se doit de diffuser et d'organiser la primo-diffusion de ses propres programmes.

Si le Sénat devait adopter ce texte en l'état, il ferait bénéficier les opérateurs privés d'un avantage concurrentiel sur le service public, financé par celui-ci et s'apparentant à une subvention déguisée. Par ailleurs, l'arrivée brutale des chaînes nationales de service public outre-mer affaiblira les éditeurs privés de programmes locaux, affectés par la concurrence de nouveaux écrans publicitaires.

La télévision numérique doit être garantie pour tous outre-mer et le must carry doit s'appliquer dans chacun des territoires où les chaînes nationales de service public sont diffusées par l'intermédiaire de la TNT dupliquée par France Télévisions.

L'amendement n°107 rectifié bis n'est pas soutenu, non plus que l'amendement identique n°137.

M. le président.  - Amendement n°346, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

M. David Assouline.  - L'article 13 bis a été introduit par l'Assemblée nationale sur proposition de Jean Dionis du Séjour. Il prévoit une clause de must offer qui, loin d'être une extension du must carry, constitue une atteinte au droit de France Télévisions de maîtriser la première diffusion de ses programmes. Les opérateurs privés bénéficieraient d'une préséance pour la diffusion des chaînes métropolitaines de France Télévisions, qui serait dépossédée de la maîtrise de ses premières diffusions assurées jusqu'ici par les Télés Pays de RFO. Cet avantage considérable serait financé par les ressources du secteur public.

De surcroît, la rédaction de l'article ouvre la voie à une dénaturation et à un morcellement de l'offre publique, puisque la reprise concernera « tout ou partie » de celle-ci, ce qui constitue de fait une privatisation du service public outre-mer, les chaînes publiques n'étant accessibles qu'au travers d'un mode de distribution payant. Le développement de la TNT outre-mer risque d'être entravé : pour capter de façon anticipée les chaînes publiques, les téléspectateurs s'abonneront au satellite, au câble ou à l'ADSL, ce qui pénaliserait les foyers les plus modestes qui ne seront pas équipés pour recevoir les services payants. En juillet 2008, le rapport Méar sur le développement de la TNT outre-mer estimait pourtant que celle-ci constitue le seul mode de diffusion offrant les garanties de gratuité, de respect du pluralisme et de liberté de concurrence.

L'adoption de cet article représenterait une menace de concurrence destructrice pour les Télés Pays de RFO en pleine restructuration. Nous ne saurions nous satisfaire du dispositif alternatif proposé par nos rapporteurs, le problème de gratuité des programmes de France Télévisions retransmis par les services bénéficiaires de cette clause de must offer étant certes important mais annexe comparé aux risques liés pour le développement de la TNT et le fonctionnement du service public outre-mer.

M. le président.  - Amendement n°23, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.

Rédiger comme suit le second alinéa de cet article :

«  Dans les collectivités d'outre-mer, la société mentionnée au I de l'article 44 ne peut s'opposer à la reprise par un distributeur de services sur un réseau n'utilisant pas de fréquences terrestres assignées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel des services nationaux de télévision qu'elle édite. Ces derniers doivent être mis gratuitement à la disposition des abonnés concernés. »

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Cet amendement vise à clarifier le dispositif adopté par l'Assemblée qui prévoit que, dans les collectivités d'outre-mer, France Télévisions devra mettre ses chaînes à la disposition des opérateurs sur satellite, câble ou ADSL, ce à quoi le droit en vigueur ne l'oblige pas. En pratique, France Télévisions refuse actuellement que France 2, France 3, France 4 et France 5 soient diffusées outre-mer.

Comme l'a précisé le rapport récent d'Alain Méar, les téléspectateurs ultramarins n'ont donc accès gratuitement, et au mieux, qu'aux deux chaînes publiques gratuites de RFO. En attendant l'arrivée prochaine de la TNT, qui mettra fin à cette situation, peut-on continuer à accepter que, même sur le satellite ou sur le câble, les chaînes publiques nationales ne soient pas accessibles outre-mer ? Nous ne le croyons pas. Tout en confirmant le principe du dispositif adopté par l'Assemblée nationale, nous vous proposons donc de préciser, par son insertion dans la loi de 1986, que France Télévisions ne peut s'opposer à la reprise de ses programmes par un opérateur câble, satellite ou ADSL, lequel ne pourra cependant choisir « à la carte » ce qu'il souhaite diffuser, comme le prévoyait la rédaction initiale de l'article : ce sera ou toutes les chaînes ou rien. Enfin, les abonnés n'auront à payer aucun surcoût supplémentaire : l'accès aux chaînes publiques leur sera offert gratuitement.

La commission souhaite bien évidemment entendre l'avis de nos collègues d'outre-mer car, si elle s'est montrée sensible à cette question, elle n'entend pas se permettre de trancher sans eux.

M. le président.  - Amendement n°90 rectifié, présenté par Mme Payet, MM. Détraigne, Maurey et Mme Férat.

Compléter le second alinéa de cet article par les mots :

et qui sont diffusés préalablement par voie hertzienne terrestre sur le territoire de ces collectivités d'outre-mer

Mme Anne-Marie Payet.  - L'arrivée de la TNT outre-mer est une priorité pour l'ensemble des acteurs, et en particulier pour les téléspectateurs ultramarins qui pourront bénéficier de tous ses avantages : offre de programmes gratuits diversifiée et abondante, qualité de l'image et du son, simplicité d'utilisation. C'est notamment une priorité pour les élus, que le CSA a relayés dans son rapport.

Dans sa rédaction actuelle, l'article 13 bis pourrait retarder, voire remettre en cause, l'arrivée de la TNT outre-mer et favoriser l'instauration d'une télévision à deux vitesses : d'un côté, une télévision payante, bien dotée en programmes ; de l'autre, une télévision hertzienne analogique, gratuite mais pauvre.

La modification proposée garantit la télévision numérique pour tous outre-mer. Elle met en place les conditions d'un lancement et d'une diffusion rapides de la TNT tout en permettant aux distributeurs audiovisuels autres que hertziens de reprendre à leurs propres frais les programmes de France Télévisions si cela correspond aux attentes de leurs abonnés ultramarins.

L'amendement n°437 n'est pas défendu.

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Sur l'amendement n°346, la commission souhaiterait entendre l'avis du Gouvernement. L'amendement n°90 rectifié revient à une suppression de l'article. La loi de 1986 permet la reprise outre-mer de réseaux autres que hertziens. Cet amendement vide ce service de son sens. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Yves Jégo, secrétaire d'État chargé de l'outre-mer.  - Défavorable à l'amendement n°346. L'amendement de M. Dionis du Séjour a été voté à l'unanimité de l'Assemblée nationale. La volonté est donc partagée d'offrir dès maintenant à nos compatriotes d'outre-mer les chaînes de la télévision publique. Mais il est vrai que, ce faisant, on favorise de fait les opérateurs qui peuvent offrir un abonnement à ces chaînes par voie satellitaire, mais tout bien pesé, le Gouvernement est défavorable à la suppression de l'article.

Il est défavorable, de même, à l'amendement de la commission, puisqu'il pense que la proposition de Mme Payet, avec son amendement n°90 rectifié, est équilibrée. Elle ouvre la possibilité d'ouvrir gratuitement les chaînes de télévision publiques aux distributeurs satellitaires, mais seulement à l'arrivée de la TNT qui -le Gouvernement en prend l'engagement- interviendra très rapidement, dès 2010. On évite ainsi de déséquilibrer le lancement de la TNT et d'avantager les prestataires du satellite. Le Gouvernement avait donné un avis de sagesse à l'Assemblée nationale, vous comprendrez le sens de l'avis de sagesse qu'il émet ici sur cet amendement qu'il juge sage...

Mme Catherine Tasca.  - Le ministre considère que la mesure est équilibrée et transitoire. Mais quel bénéfice les chaînes publiques, puisque ce texte rend hélas la question lancinante, tireront-elles de la mise à disposition de leurs programmes ? Nous aimerions une réponse sur la contribution des opérateurs privés à France Télévisions pour ce service.

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - Nous sommes soucieux de ne pas déséquilibrer l'offre en ouvrant dès à présent la maîtrise des programmes aux opérateurs satellitaires, au détriment de la TNT. Nous estimons qu'il faut engager rapidement les négociations pour savoir quelles chaînes publiques seront reprises sur la TNT, tant dans l'offre gratuite que payante. Il ne s'agit pas de trancher dès aujourd'hui en disant aux opérateurs privés « Non, jamais » ou « Oui, tout le monde à la fois ». La position de Mme Payet a l'avantage de rapprocher les calendriers et concilie des impératifs contradictoires en assurant une présence du service public sans privilégier le satellite.

M. Jean-Etienne Antoinette.  - Il est essentiel de maintenir outre-mer des chaînes de qualité, en leur permettant de jouer leur rôle historique tout en garantissant aux téléspectateurs ultramarins l'accès à de nouvelles chaînes grâce à la TNT. C'est pourquoi j'appelle le Gouvernement à la vigilance. Il serait en particulier fâcheux que la CMP revînt sur le sous-amendement socialiste capital, voté ce matin grâce au soutien de la majorité, et qui autorise le maintien de la publicité sur RFO. Cela lui évitera de lourdes conséquences, alors que ses chaînes doivent s'adapter aux nouvelles réalités de la création, de la programmation, de la gestion des personnels et de la diffusion. La fin de la publicité signifierait la disparition de 55 emplois en régie publicitaire et de 2 millions de recettes supplémentaires permettant aux chaînes d'avoir leur ligne éditoriale propre, ainsi en Guyane.

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - La commission prend acte de l'engagement du Gouvernement d'installer la TNT dès l'an prochain et retire l'amendement n°23.

L'amendement n°23 est retiré.

M. le président.  - Je vais mettre au vote l'amendement n°346.

M. David Assouline.  - Je demande la parole pour explication de vote.

M. le président.  - Le débat a eu lieu, il est temps de passer au vote. (Protestations à gauche)

M. David Assouline.  - Il y a un peu de confusion. M. le rapporteur a retiré son amendement, mais ne nous a pas répondu...

M. le président.  - Il l'a fait en votre absence...

M. David Assouline.  - Je souhaite que nos débats se déroulent dans de bonnes conditions, voilà tout.

M. le président.  - Il n'y a aucune confusion. La présidence a simplement accepté qu'un de nos collègues évoque un sous-amendement hors-sujet, qui a été débattu ce matin ; et elle ne le regrette pas.

L'amendement n°346 n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Plancade.  - Le RDSE s'exprime peu, et toujours avec pertinence ; il va continuer à le faire. Je remercie la commission d'avoir permis un vrai débat en son sein sur les amendements de nos collègues d'outre-mer (M. David Assouline s'exclame) Ayez donc la patience de nous écouter ! (Applaudissements à droite) Vous cherchez décidément des verges pour vous faire battre ! Je me félicite que M. le rapporteur ait retiré son amendement ; après les engagements du Gouvernement, celui de Mme Payet nous convient mieux. Nos compatriotes d'outre-mer seront plus rapidement satisfaits.

L'amendement n°90 rectifié est adopté.

L'article 13 bis, modifié, est adopté.

Article 14 bis (Réservé)

Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi et de la compétence de l'État, tendant :

- à adapter aux départements et régions d'outre-mer, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon les dispositions relatives à la télévision numérique terrestre ;

- à étendre et adapter dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie les dispositions relatives à la télévision numérique terrestre.

Le projet de loi de ratification de l'ordonnance doit être déposé devant le Parlement au plus tard le premier jour du troisième mois suivant la publication de l'ordonnance.

M. le président.  - Amendement n°347, présenté par M. Gillot et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

M. David Assouline.  - L'équilibre de la télévision outre-mer est fragile. Alors que la TNT n'y est pas encore diffusée, les pressions qui s'exercent outre-mer sont fortes, comme en témoignent plusieurs dispositions du texte ; heureusement, le Sénat a, ce matin, refusé, à l'initiative du groupe socialiste, la suppression de la publicité sur RFO. Le développement du numérique pose des questions majeures ; dès lors que des adaptations de la législation à l'outre-mer sont inévitables, le Parlement doit se prononcer. Il y va de l'accès de tous au service public, du pluralisme et de l'indépendance des médias.

Un mot enfin : on ne peut reprocher à ceux qui consacrent tout leur temps à ce débat de ne pas avoir entendu telle ou telle partie d'intervention. M. Plancade a salué le Gouvernement et la commission pour avoir écouté nos collègues d'outre-mer ; que n'ont-ils été entendus !

Rappel au Règlement

M. François Fortassin.  - Personne ici ne peut se dire plus présent ou plus au fait des questions en débat que les autres. Je suis un élu de gauche depuis trente ans et je n'ai jamais fait de complexe de n'être pas socialiste ; je ne vais pas commencer aujourd'hui... (Sourires à droite) Si nous appartenons à une formation politique, nous nous exprimons à titre individuel ; si nous estimons devoir voter avec des sénateurs d'une autre sensibilité que la nôtre, c'est notre droit. Nous vous respectons, monsieur Assouline ; nous attendons la réciproque. (Applaudissements à droite)

Discussion des articles (Suite)

Article 14 bis (Réservé - Suite)

M. le président.  - Amendement n°348, présenté par M. Gillot et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer le deuxième alinéa de cet article.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Chacun trouve normal que le Parlement débatte sur ces questions lorsque la métropole est concernée ; il n'y a pas lieu de faire un sort particulier à l'outre-mer. Pourquoi lui réserver les ordonnances ?

M. le président.  - Amendement n°349, présenté par M. Gillot et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer le troisième alinéa de cet article.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Il est défendu.

M. le président.  - Amendement n°91 rectifié bis, présenté par Mme Payet, M. Détraigne, Mme Férat, MM. Maurey et Loueckhote.

Compléter le dernier alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :

Il vise à favoriser le lancement dans les collectivités d'outre-mer d'une offre de télévision numérique terrestre attractive incluant notamment des services locaux, des services nationaux ainsi que des services en haute définition, et à garantir la transition des téléspectateurs vers le numérique grâce à la continuité de réception des services actuellement diffusés par la voie hertzienne terrestre en mode analogique en assurant une période de double diffusion hertzienne terrestre analogique-numérique minimale de ces services, une couverture de la télévision numérique terrestre au moins égale à celle de la diffusion hertzienne terrestre en mode analogique, ainsi qu'un processus d'information et d'accompagnement des téléspectateurs.

Mme Anne-Marie Payet.  - La transition vers le numérique sera beaucoup plus rapide outre-mer qu'en métropole puisque l'arrêt de l'analogique y est prévu le 30 novembre 2011, comme en métropole, alors que la TNT ne démarrera probablement pas avant 2010. Des garanties doivent être apportées afin que cette transition se déroule dans de bonnes conditions pour les téléspectateurs, notamment une couverture TNT au minimum égale à la couverture analogique, afin de faciliter l'équipement des foyers à moindre coût. En métropole, l'équipement en TNT coûte en moyenne 50 à 60 euros, contre 300 à 400 en satellite.

Il faut également garantir une période de double diffusion des chaînes analogiques existantes afin d'éviter que l'introduction de la TNT ne se traduise par une diminution de l'offre le temps que les téléspectateurs d'outre-mer s'équipent en numérique. La chaîne Tempo est un cas particulier ; elle n'a pas nécessairement vocation à être reprise sur la TNT dès lors que ses contenus seront accessibles via l'accès direct aux chaînes de France Télévisions.

Dans le cadre de la procédure des ordonnances, il appartient au législateur de préciser les objectifs que le Gouvernement devra poursuivre.

L'amendement n°206 n'est pas soutenu.

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Quand elle a débattu de ces amendements de suppression, la commission a souhaité avoir des précisions. Nous partagions l'opinion de M. Méar sur l'intérêt de la TNT outre-mer. Mais M. Jégo s'est exprimé tout à l'heure. Sagesse sur ces quatre amendements.

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - Avis défavorable à l'amendement n°347. La TNT est plébiscitée par les téléspectateurs de métropole, ceux de l'outre-mer l'attendent avec impatience. Le Parlement se prononcera, les collectivités locales seront consultées ; les ordonnances permettront d'adapter très vite la législation aux spécificités de l'outre-mer, l'objectif étant la TNT gratuite dès 2012 et dix chaînes présentes sur tous les territoires.

La question de la publicité est fondamentale. Chaînes publiques et chaînes privées se font face outre-mer.

J'ai bien pris note du vote du Sénat ce matin. Mais les chaînes privées pourraient être victimes d'un dumping sur les prix de la publicité. Les Français plébiscitent à 78 % la chaîne publique sans publicité : au nom de quoi priverions-nous l'outre-mer d'une chaîne de télévision dégagée des diktats de la publicité ? Et pourquoi entraver l'essor de chaînes privées qui vivront grâce à la publicité ?

Je souhaiterais sous-amender l'amendement n°91 rectifié bis, en remplaçant les mots « au moins égale à celle de la diffusion hertzienne terrestre en mode analogique » par : « aussi large que possible ». Je serais alors favorable à la proposition de Mme Payet.

Mme Anne-Marie Payet.  - Je rectifie mon amendement en ce sens !

M. le président.  - C'est encore plus simple...

L'amendement n°347 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos348 et 349.

L'amendement n°91 rectifié ter est adopté, le groupe socialiste s'abstenant.

L'article 14 bis, modifié, est adopté.

Article 14 ter (Réservé)

En Nouvelle-Calédonie, par dérogation au I de l'article 28-1 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 précitée, les autorisations délivrées aux services de radio diffusés par voie hertzienne terrestre avant le 1er janvier 2008 et en vigueur à la date de la publication de la présente loi sont prorogées jusqu'au 31 décembre 2011.

M. le président.  - Amendement n°28, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.

Rédiger comme suit cet article :

Après le I de l'article 28-1 de la même loi, il est inséré un I bis ainsi rédigé :

« I bis. - Par dérogation aux dispositions du I, les autorisations délivrées aux services de radio diffusés par voie hertzienne terrestre en Nouvelle-Calédonie avant le 1er janvier 2008 et en vigueur au 1er janvier 2009 sont reconduites jusqu'au 31 décembre 2011. »

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Amendement rédactionnel. Les autorisations délivrées aux radios en Nouvelle-Calédonie arriveront à échéance fin janvier. Normalement, le CSA devrait en attribuer de nouvelles, qui vaudront pour quinze ans. Or le congrès de Nouvelle-Calédonie pourrait bientôt se saisir de la compétence audiovisuelle. Dans cette attente, mieux vaut reconduire -et non « prolonger », comme dans le texte adopté par l'Assemblée nationale- les autorisations actuelles.

Le sous-amendement n°438 n'est pas soutenu, non plus que l'amendement n°210.

L'amendement n°28, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 14 ter, modifié, est adopté.

Articles additionnels après l'article 19

M. le président.  - Amendement n°38, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.

Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans l'ensemble de la section V du chapitre Ier du titre III de la deuxième partie du livre premier du code général des impôts, les mots : « appareil récepteur de télévision ou un dispositif assimilé » sont remplacés par le mot : « terminal ».

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur.  - Dans notre rédaction, le fait générateur de la redevance est la possession d'un « terminal », quel qu'il soit. Mais une seule redevance est due par foyer. Cette mesure rapportera 20 millions d'euros de recettes supplémentaires. Mais il s'agit surtout de prendre en compte la convergence médiatique et d'anticiper les futurs modes de consommation afin d'éviter un rétrécissement du produit de la taxe, aux dépens de l'audiovisuel public.

Ne laissons pas penser aux jeunes que l'on peut regarder gratuitement la télévision publique sur son ordinateur, comme l'on pouvait pirater impunément des films. Et raisonnons à partir du concept de média global, de télévision qui peut être regardée sur n'importe quel support.

M. le président.  - Amendement identique n°217 rectifié, présenté par MM. Maurey, Amoudry, Détraigne, Fauchon, Pozzo di Borgo, Jean-Léonce Dupont et Deneux.

M. Hervé Maurey.  - Le code général des impôts prévoit déjà que la redevance est due quel que soit le mode de réception de la télévision. Mais une instruction fiscale va en sens contraire. Nous prenons en compte tous les supports, y compris, éventuellement, les téléphones mobiles. Une seule redevance est acquittée par habitation. Je précise que ce n'est pas l'ordinateur en lui-même qui est assujetti, mais l'abonnement au réseau internet grâce auquel on accède à la télévision en ligne.

M. le président.  - Amendement n°270, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, Voynet, MM. Desessard et Muller.

Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 2° du II de l'article 1605 du code général des impôts, il est inséré un 3° ainsi rédigé :

« 3° Par toutes les personnes physiques autres que celles mentionnées au 1° et 2° qui reçoivent des chaînes de télévision par un support fixe autre qu'un appareil récepteur de télévision. »

Mme Marie-Christine Blandin.  - Il convient en effet d'actualiser l'assiette de la redevance. La démocratisation numérique est en marche. Les ordinateurs et les écrans plats équipent un nombre croissant de foyers. Beaucoup possèdent encore un récepteur classique, mais d'autres n'ont plus que des ordinateurs et ceux-ci, dans l'avenir, seront de plus en plus nombreux. Alors la nouvelle assiette, au rendement modeste dans un premier temps, sera indispensable pour conserver un bon niveau de ressources à l'audiovisuel public.

Nous anticipons le changement des habitudes et des équipements. Mon amendement vise le même but que celui de la commission, mais « support fixe » exclut la téléphonie mobile. Le terme de la rédaction, « terminal », est sujet à interprétation...

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur.  - « Terminal » est le terme consacré, la commission y attache une importance particulière. A notre sens, il recouvre le téléphone mobile, ce qui ne devrait pas conduire à modifier considérablement l'assiette de la redevance puisque, dans les faits, la plupart des utilisateurs de la télévision mobile personnelle posséderont également un écran plus large à domicile. Qui plus est, les téléphones mobiles de troisième génération donnent déjà accès à la télévision. Par conséquent, avis défavorable.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.  - La commission des affaires économiques va faire entendre une petite musique différente... L'amendement n°38 pose des problèmes très pratiques, qu'a soulignés Mme Blandin. Le droit en vigueur, qui étend la définition des postes de télévision à des « dispositifs assimilés », permet à l'administration fiscale d'assujettir à la redevance des foyers qui posséderaient d'autres formes de récepteurs. Reste que la loi n'est pas appliquée car, pour reprendre l'explication fort pédagogique de la Cour des comptes, « l'administration a préféré, non sans raison, faire l'hypothèse que le nombre de foyers qui disposeraient de dispositifs assimilés mais non d'un téléviseur était limité, et que leur taxation effective entraînerait des difficultés hors de proportion avec le produit supplémentaire à en attendre. » De fait, le possesseur d'un ordinateur n'a pas forcément souscrit une offre multiservices ; le taxer serait injuste. En outre, la France se caractérise par un faible taux de pénétration des ordinateurs, inférieur de 10 à 15 % à celui enregistré en Europe du Nord ou en Grande-Bretagne. Taxer davantage les ordinateurs serait un bien mauvais signal, un paradoxe concernant la TMP. De fait, celle-ci est complètement embourbée en France : le CSA en a attribué les fréquences il y a quelques mois, et rien ne se passe. Enfin, quels ordinateurs taxer ? Où est la frontière ? Aujourd'hui, les modèles netbook et les portables se vendent davantage que les fixes. Bref, ce nouveau droit serait porteur de difficultés. (Applaudissements sur quelques bancs à droite)

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - Mme Albanel étant retenue par les obsèques de Claude Berri, je représente, pour quelques moments encore, le Gouvernement. Il nous faut effectivement adapter la législation fiscale à l'évolution extrêmement rapide des nouvelles technologies en évitant de faire obstacle à leur développement, tout en taxant les bénéficiaires du service public de la télévision. Pour l'heure, la réponse proposée est peut-être trop brutale. Je remercie les auteurs des amendements nos38, 217 rectifié et 270 d'avoir lancé la réflexion, laquelle devrait bientôt aboutir à une formule la plus juste possible. En attendant, retrait ?

M. Yannick Bodin.  - Une question simple aux rapporteurs : ont-ils l'assurance que le mot « terminal » est défini quelque part, dans un dictionnaire ou un document juridique ? Sinon, nous serions dans l'embarras : il faut bien que la loi soit rédigée en français !

M. Hervé Maurey.  - A gauche et au centre, nous considérons que la redevance est le seul moyen de garantir un financement autonome et pérenne de l'audiovisuel public. Puisqu'il n'est pas question de l'augmenter de manière à assurer une compensation intégrale de la suppression de la publicité, il faut élargir son assiette. Une fois n'est pas coutume, je ne suivrai donc pas le rapporteur pour avis. Taxer les détenteurs de terminaux qui ont souscrit un abonnement pour accéder à la télévision semble justifié...

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - Soit, mais il est possible de regarder la télévision sur ordinateur sans abonnement !

M. Hervé Maurey.  - Pourquoi ne seraient-ils pas taxés ? Sinon, nous avons tous intérêt à nous débarrasser de nos postes dans les nombreuses foires à tout organisées dans nos départements et à regarder la télévision sur nos ordinateurs.

M. Yves Jégo, secrétaire d'État.  - Certes, mais un détenteur de clé TNT pour un ordinateur n'a pas forcément d'abonnement ni de télévision... (M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis, et M. Jean-Pierre Plancade acquiescent) Il serait donc sage, le débat étant lancé, de retirer ces amendements afin de se donner le temps de trouver la meilleure réponse.

M. David Assouline.  - Soit, certaines difficultés techniques doivent être résolues. Mais notre assemblée ne devrait-elle pas donner un signe fort ? La tendance sera, qu'on le veuille ou non, de regarder la télévision sur des écrans d'ordinateur de plus en plus larges et sophistiqués. Dans quelques années, voire quelques mois, chacun préférera conserver chez soi un écran unique : l'ordinateur. Résultat : l'assiette sera si réduite que le principe de la redevance comme source principale de financement de l'audiovisuel public sera caduc. Quoique je comprenne le souci de Mme Blandin, la voie indiquée par la commission me semble la bonne. Si la TMP n'est pas encore répandue en France, 15 millions de Coréens l'utilisent déjà. Enfin, j'ajoute que la mesure ne pénaliserait pas les plus modestes : une seule redevance est due par foyer fiscal et une réduction de 50 % est prévue pour les jeunes hors foyer fiscal. Donc, pas de panique ! Élargissons l'assiette, c'est garantir un service public performant !

Mme Catherine Procaccia.  - Je suis fermement opposée à toute forme de taxation des nouvelles technologies, que le Sénat a toujours soutenues jusqu'ici. Ce serait un signal négatif envoyé aux jeunes. Les étudiants, en chambre de bonne ou en cité universitaire, possèdent un ordinateur d'abord pour internet, ce ne sont pas de vrais téléspectateurs. Avec ces amendements, vous tuez une nouvelle forme de communication, vous privilégiez la télévision au détriment des autres secteurs.

M. Jack Ralite.  - Ces diverses interventions me rendent perplexe. La majorité des jeunes qui ont un ordinateur portable ne regardent pas la télévision : les ordinateurs ne peuvent pas être assimilés à des téléviseurs comme les autres. Mais si l'on entre dans l'ère de la gratuité, cela implique l'abandon de la télévision.

M. Jean-Pierre Plancade.  - Comme vient de le dire mon collègue Ralite, évitons d'envoyer un mauvais signal alors que seuls 2 à 3 % des utilisateurs sont concernés.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Les ressources affectées à la télévision doivent être dynamiques. Il ne s'agit pas ici de fragiliser les nouvelles technologies mais de prendre en compte le fait que de plus en plus de personnes qui ont un ordinateur disposent d'un triple abonnement : téléphone, internet et télévision. Le passage au numérique va être l'occasion, dans deux ou trois ans, de jeter les vieux téléviseurs qui vont encombrer les déchetteries. En ce qui concerne la téléphonie mobile, je suis d'accord avec M. Retailleau : l'idéal serait d'étendre l'assiette aux ordinateurs capables de recevoir la télévision mais d'exclure la téléphonie mobile.

La commission doit donc prendre ses responsabilités et bien mesurer quels seront les services qui seront taxés avec la rédaction qu'elle propose.

M. le président.  - Mme le rapporteur vient de me faire passer une rectification de son amendement n°38 qui se lit ainsi :

Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans l'ensemble de la section V du chapitre Ier du titre III de la deuxième partie du livre premier du code général des impôts, les mots : « appareil récepteur de télévision ou un dispositif assimilé » sont remplacés par les mots : « terminal, hors téléphone portable ».

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur.  - Ce débat montre bien quels sont les enjeux autour des nouveaux modes de réception de la télévision. Peut-être s'agit-il encore de cas relativement isolés mais demain, la convergence sera telle que les écrans des téléviseurs et des ordinateurs ne seront plus qu'une seule et même chose. Il n'est pas normal qu'un texte fiscal se substitue à la loi. Nous devons tenir notre rôle de législateur. Certes, la téléphonie mobile doit être exclue, mais ce n'est pas une raison pour ne pas réformer : à partir du moment où l'on reçoit la télévision sur un ordinateur, il faut payer la redevance. C'est pourquoi je vous propose de rectifier notre amendement : peut-être sommes-nous en avance sur la technologie, mais pas tant que cela. Il n'y a pas que les jeunes qui regardent la télévision sur leur ordinateur, madame Procaccia ! Il serait injuste que votre voisin de pallier ne paye pas la redevance parce qu'il regarde la télévision sur son ordinateur alors qu'ayant un écran classique, vous la payez.

Enfin, les jeunes qui vivent dans des chambres de bonne sont rattachés, le plus souvent, au foyer fiscal de leurs parents, or il n'y a qu'une redevance par famille.

M. le président.  - Pouvez-vous nous dire, monsieur Retailleau, quelle est la définition d'un téléphone qui n'est pas rattaché à un poste fixe ?

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis.  - Les technologies avancent beaucoup plus vite que les lois et la sémantique.

M. Henri de Raincourt.  - Et que le Parlement ! (Sourires)

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis.  - Le mot « terminal » est inconnu en droit.

La position du Gouvernement est très sage : ne disons pas que cette mesure concerne les ordinateurs, d'autant que cette disposition figure déjà dans la loi de finances pour 2004, même si l'administration fiscale ne l'a pas appliquée car elle est très compliquée à mettre en oeuvre. Nous nous apprêtons à faire bégayer la loi !

Je tiens également à faire remarquer que les étudiants qui sont rattachés au foyer fiscal de leurs parents appartiennent souvent à des familles aisées alors que ceux qui ne le sont pas sont issus de milieux beaucoup plus modestes.

Pourquoi voter une mesure qui enverra un mauvais message alors que nous disposons déjà de tous les outils législatifs nécessaires ? (Mme Catherine Procaccia applaudit)

M. Jean-Pierre Sueur.  - L'amendement de la commission me semble intéressant et utile. Mais l'intervention de Mme Procaccia m'a mis mal à l'aise car en refusant d'étendre la redevance aux nouveaux modes de réception, on en condamne à court terme le principe même. Si la redevance reste attachée aux téléviseurs classiques, sa disparition est inéluctable. Or, étant attachés à la télévision publique, que cette loi fragilise, nous souhaitons, bien au contraire, qu'elle dispose de plus de moyens. Ce type de discours est, révérence parler, un peu démagogique.

Mme Catherine Procaccia.  - Certainement pas !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Quoi qu'il en soit, il est plus facile de défendre votre position que de demander de taxer les différents supports.

Sans cela, on supprime le mode de financement principal de la télévision publique.

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Il s'agit d'un débat compliqué, qui nous plonge au coeur des nouvelles pratiques des Français. La commission a souhaité modifier la législation pour deux raisons. D'une part, elle a voulu prendre en compte l'apparition de nouvelles technologies permettant de recevoir chez soi la télévision : pour une fois, la loi pourrait précéder la pratique au lieu de la suivre. D'autre part, il s'agit d'une mesure d'équité : ceux qui bénéficient des mêmes services doivent contribuer de la même façon à leur financement.

M. David Assouline.  - Cet amendement est d'autant plus souhaitable qu'il a été judicieusement rectifié afin d'exclure les téléphones mobiles. En effet, il n'aurait pas été équitable de soumettre à la redevance les foyers pour lesquels le téléphone mobile constitue le seul mode d'accès à la télévision, car la qualité de réception n'est pas la même.

On entend dire que cette mesure pénaliserait certains publics modestes, comme les étudiants. Mais l'argument ne tient pas : soit les étudiants sont rattachés au foyer fiscal de leurs parents, soit, s'ils vivent seuls dans une chambre, ils sont exonérés de taxe d'habitation et donc de redevance.

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Bien sûr !

M. David Assouline.  - Monsieur Retailleau, je vous invite à poursuivre dans cette veine sociale, et à voter l'amendement que nous présenterons tout à l'heure tendant à exonérer de redevance les bénéficiaires du RSA ! (Sourires)

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Nous débattons d'un point de droit fiscal : on a tendance à l'oublier. Or ce droit n'évolue habituellement pas au gré des évolutions technologiques. En l'état actuel, la loi dispose que sont assujettis les foyers possédant « un appareil récepteur de télévision ou un dispositif assimilé » : cette rédaction suffit à couvrir l'ensemble des évolutions technologiques futures. Je souhaite donc que la commission retire son amendement et que le Gouvernement nous éclaire sur son interprétation future de l'expression « dispositif assimilé ». Le mot « terminal » n'a pas encore de sens juridique défini ; d'ailleurs, c'est peut-être une erreur d'exclure les téléphones portables, qui pourraient devenir demain un mode de réception important.

M. Laurent Béteille.  - Très bien !

M. Jacques Legendre, président de la commission.  - Il s'agit d'un sujet complexe. Si la commission retirait son amendement, il faudrait que le Gouvernement s'engageât à préciser rapidement sa position. J'accorde à M. Fourcade que la loi permet, dans sa rédaction actuelle, d'étendre la redevance à tous les types de récepteurs, mais jusqu'ici elle n'a pas été appliquée ainsi. (M. Jean-Pierre Fourcade le reconnaît) Nous attendons donc les explications et les engagements du Gouvernement.

M. le président.  - Je rappelle en effet qu'il s'agit d'un droit d'usage.

Mme Christine Albanel, ministre.  - Ce sujet suscite, je le vois, un large débat. MM. Fourcade et Legendre ont évoqué les termes de la loi actuelle, qui posent certes des problèmes d'interprétation et d'application. La sagesse voudrait que l'on s'en remette à l'engagement de M le Premier ministre de mettre en place un comité de la redevance, qui apportera toutes les précisions et les adaptations rendues nécessaires par le nouveau paysage audiovisuel. (M. David Assouline ironise)

Mme Catherine Morin-Desailly.  - J'ai bien entendu les arguments de Mme la ministre et de M. Fourcade. Mais si, profitant de ce projet de loi, nous avons pris l'initiative de cet amendement, c'est parce que l'instruction fiscale n'est pas assez précise. Nous aimerions donc que cette précision soit apportée au texte actuel : il sera toujours possible de la supprimer en CMP si des éclaircissements nous ont été apportés.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Très bien !

M. le président.  - Je salue la richesse de ce débat. Le temps est venu de mettre aux voix l'amendement de la commission.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°38 rectifié, mis aux voix par assis et levé, est adopté.

En conséquence, les amendements nos217 rectifié et 270 deviennent sans objet.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Voilà une position courageuse du Sénat !

M. le président.  - Amendement n°39 rectifié bis, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.

Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. Le I de l'article 1605 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Les mots : « , d'une part, » sont supprimés ;

2° Les mots : « et, d'autre part, jusqu'au 31 décembre 2011, au profit du groupement d'intérêt public visé à l'article 100 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée » sont supprimés.

II. Le VI de l'article 46 de la loi n°2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa du 1, après le mot « audiovisuel », est ajouté le mot « public »

2° Le 1° du 1 est ainsi rédigé :

« 1° En dépenses : le montant des avances accordées aux sociétés et à l'établissement public visés par les articles 44, 45 et 49 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ; »

3° La deuxième phrase du premier alinéa du 2 est supprimée.

III. Cet article s'applique à compter du 1er janvier 2010.

IV. La perte de recettes résultant pour le groupement d'intérêt public visé à l'article 100 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 précitée des I à III ci-dessus est compensée par la création d'une taxe additionnelle aux droits de consommation sur les tabacs prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur.  - La loi de finances pour 2009 a étendu le bénéfice du produit de la redevance au groupement d'intérêt public France Télé Numérique. Le rôle de ce GIP est certes fondamental, mais il est contestable de lui accorder une part du produit de la redevance puisqu'il associe des acteurs publics et privés. La commission s'était alors unanimement opposée à cette mesure ; le Gouvernement avait promis d'en reparler à l'occasion du débat sur l'audiovisuel public : nous y voilà.

Il est impossible de revenir sur cette disposition pour l'année 2009, mais nous pouvons le faire pour les années suivantes. Le financement du GIP s'élèvera à 72 millions d'euros en 2010, 131 millions en 2011. La revalorisation de la redevance souhaitée par le Sénat n'aurait aucun effet s'il fallait continuer à financer par ce biais le GIP.

Nous proposons donc d'exclure celui-ci du champ des bénéficiaires de la redevance. L'amendement est gagé afin de compenser les pertes de recettes pour le GIP. Il est conforme à la doctrine constante de votre commission depuis plusieurs mois.

Mme Christine Albanel, ministre.  - Depuis sa création en 1933, la redevance a toujours servi à accompagner la modernisation du secteur audiovisuel : elle a contribué au développement de la radio, de la télévision en noir et blanc puis en couleur, et une fraction de celle-ci est aujourd'hui mobilisée au service d'une quatrième révolution, le passage au numérique.

Cette mutation technologique permettra au public de disposer gratuitement d'un plus grand nombre de chaînes et d'une meilleure qualité d'image et de son. Il est normal que ses premiers bénéficiaires, les téléspectateurs, contribuent à son financement. C'est la solution qui a été retenue au Royaume-Uni.

La redevance se justifie par le fait qu'elle aide certains organismes à accomplir des missions de service public dans le domaine audiovisuel. L'INA, créé en 1974, a été financé de cette manière alors qu'il s'agit d'un organisme de conservation et non de création ou de diffusion. Cela ne s'est pas fait au détriment des sociétés nationales de programme, ainsi délestées d'une charge qui pouvait grever leur développement.

La logique est la même en ce qui concerne le GIP France Télé Numérique. La mesure est d'ailleurs limitée dans le temps, puisqu'elle prendra fin en 2011 : cette précision a été ajoutée à la loi de finances initiale pour 2009 à la demande du Parlement.

Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement et ne lève pas le gage.

M. le président.  - Permettez-moi de vous informer que le riche débat que nous avons eu tout à l'heure a duré pas moins de cinquante minutes...

M. David Assouline.  - Et alors ?

M. Jean-Pierre Sueur.  - Il faut prendre le temps du débat !

Mme Catherine Tasca.  - Avec votre permission, monsieur le président, je vais tout de même m'exprimer sur cet amendement. C'est l'occasion d'aborder la question du sens de la redevance, après avoir parlé de ce qu'elle rapporte. Cette taxe joue un rôle essentiel dans le financement de l'audiovisuel public. Nous nous réjouissons que la rédaction initiale de l'amendement, qui tendait à exclure trois organismes du bénéfice de la redevance, ait été rectifiée.

Il serait en effet très contestable de priver l'INA et Audiovisuel extérieur de la France (AEF) de toute redevance pour compenser la perte de recettes de France Télévisions. Le premier est un grand organisme public qui joue un rôle central pour la sauvegarde de notre patrimoine audiovisuel. Sa compétence est reconnue par tous jusques à l'étranger, y compris par des pays qui ne peuvent reconstituer seuls leur mémoire collective, tels que l'Afghanistan, le Viêt-Nam ou le Cambodge. Supprimer tout financement par la redevance, c'est compromettre le plan de sauvegarde et de numérisation ainsi que des partenariats avec des créateurs pour des projets qui puisent dans les archives. N'envoyons pas au personnel de l'INA le message qu'il ne fait plus partie de l'audiovisuel public tel que le définit le versement de la redevance versée par les citoyens !

Priver AEF d'une partie non négligeable de ses ressources serait contradictoire avec la volonté affirmée de renforcer l'audiovisuel extérieur. Il faudrait compenser avec une subvention de l'État mais la redevance, elle, est une ressource dynamique, non sujette à régulation budgétaire. Ne négligeons pas non plus l'importance d'AEF pour le rôle de la France et pour la francophonie.

Il est bon de rétablir un financement de l'INA et d'AEF sur la redevance ; en revanche, la situation du GIP France Télé Numérique est plus contestable compte tenu des engagements pris par le Gouvernement lors de sa création. Nous soutenons donc l'amendement n°39 rectifié bis.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Rappel au Règlement ! Nous avons passé 50 minutes à parler du sujet précédent. Vous semblez dire, monsieur le président, que nous ne pourrions plus traiter les sujets suivants dans les mêmes temps...

M. le président.  - Vous m'avez mal compris !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous ne faisons aucune obstruction mais parlons du fond et exposons nos arguments avec conviction. De plus, les 50 minutes sont faibles eu égard à l'importance des enjeux économiques et financiers pour la télévision publique. Nous revendiquons le droit de parler durant le temps que prévoit le Règlement. Le débat suit son cours normal et il n'y a pas lieu de tenir compte des 53 minutes ici ou d'une heure et demie là. Nous travaillons dans le cadre défini par la Constitution et le Règlement.

M. le président.  - Ma remarque ne s'adressait pas particulièrement à l'opposition mais vous avez trouvé bon de comprendre qu'elle portait sur un débat que j'ai qualifié de riche et instructif. Je m'apprêtais à dire qu'à ce rythme-là, nous devrions passer quelques jours de plus sur ce projet et qu'il y a d'autres textes importants. Vous vouliez me donner une leçon, mais j'ai moi aussi le droit de m'exprimer et, présidant la séance, d'observer qu'il y a eu dans ces 50 minutes beaucoup de répétitions et de redondances. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jean-Pierre Sueur.  - La parole est libre.

M. le président.  - On est encore en démocratie !

M. David Assouline.  - Sans poursuivre la polémique, je remarque que s'il y a pu y avoir des répétitions, nous avons toujours débattu du fond. Nous savons qu'au rythme actuel, nous n'aurons pas besoin de journées supplémentaires parce que si le débat s'arrête parfois sur une disposition, il y a aussi des accélérations. C'est affaire de volonté dans ce débat auquel participent également des membres de la majorité.

Je me réjouis que la commission ait repris dans son amendement notre sous-amendement. Il serait en effet très contestable de priver l'INA et AEF de toute redevance pour compenser la perte de recettes publicitaires de France Télévisions. Le premier est un grand organisme public qui joue un rôle central pour la sauvegarde de notre patrimoine audiovisuel. Sa compétence est reconnue par tous jusques à l'étranger. Supprimer totalement les 86 millions qu'il perçoit sur la redevance compromettrait le plan de sauvegarde et de numérisation et des partenariats pour des créations qui puisent dans les archives. Priver AEF de 65 millions sur un budget de 298 millions serait contradictoire avec la volonté affirmée de renforcer l'audiovisuel extérieur. Il faudrait compenser avec une subvention de l'État mais la redevance, elle, est une ressource dynamique, non sujette à arbitrages. Enfin, AEF sert la France et la francophonie. En revanche, il est plus contestable que le GIP France Télé Numérique émarge à la redevance pour 15 millions. Nous avons déjà rappelé les promesses du Gouvernement en 2007 lors de sa création. Il est d'autant plus important d'y remédier que le financement du GIP va augmenter pour atteindre 131 millions à terme. C'est pourquoi nous souhaitons le rétablissement de l'adjectif public du compte d'avance à l'audiovisuel.

M. Jack Ralite.  - L'INA doit garder la redevance ! Jeune député, je participais en 1974 au débat sur le texte qui n'avait rien prévu ni pour la recherche, ni pour la formation professionnelle, ni pour les archives ; j'ai croisé le regard de Pierre Schaeffer dans la tribune et, à la suspension, nous nous sommes retrouvés à la buvette, nous avons parlé, puis le Sénat a travaillé : c'est ainsi que l'INA est né d'un manque. Il a depuis pris sa part de la recherche et contribué à la formation professionnelle tout en jouant un rôle remarquable pour la conservation et la circulation des archives. Toute personne un peu familière avec ces questions vous le dira, mieux vaut la redevance qu'une aléatoire compensation budgétaire, car la crainte pour ses ressources conduira l'INA à relever ses prix... qu'acquitte France Télévisions : c'est le serpent qui se mord la queue ! Restons donc sur la position conquise par la mobilisation de la direction et du personnel de l'INA, dont la part de la redevance ne représente que 3 % du produit total.

J'ai reçu une dépêche de l'AFP : ce matin, la direction de RFI a présenté un plan de modernisation supprimant 210 postes sur un millier et envisageant la création de 34 emplois.

On le voit ici : les dangers annoncés peuvent se concrétiser très vite ! RFI envisage la fin de la diffusion dans six langues qui ne correspondent pas à ses priorités géopolitiques, dont l'allemand. Il est aberrant de penser que cette langue européenne majeure n'est pas considérée comme fondamentale, ce qui conduira à fermer le bureau de Berlin. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Pour la commission, il est clair que la redevance doit être affectée principalement à l'INA, à l'audiovisuel extérieur français, à France Télévisions et à Radio France, médias qui s'adressent au grand public. Pour le financement du GIP France Télé Numérique, en revanche, il s'agit d'un jeu à somme nulle puisque cet organisme n'a vocation à exister que durant deux ou trois ans, jusqu'à ce que l'ensemble du territoire soit desservi. Il doit donc être financé par l'État : cette position était déjà celle de la commission avec MM. Valade et de Broissia.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°39 rectifié bis, mis aux voix par assis et levé, est adopté et devient un article additionnel.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Le Sénat avance !

M. le président.  - Amendement n°147, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.

Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 1° de l'article 1605 bis du code général des impôts est ainsi rédigé :

« 1° Une seule redevance audiovisuelle est due, quel que soit le nombre d'appareils récepteurs de télévision ou dispositifs assimilés dont est équipé le local meublé affecté à l'habitation pour lequel le redevable et ses enfants rattachés à son foyer fiscal en application du 3 de l'article 6 sont imposés à la taxe d'habitation ; »

M. Jean-François Voguet.  - Au moment où le budget de la télévision publique est amputé de plus d'un milliard d'euros par une décision présidentielle arbitraire et où le problème de son financement se pose avec une urgence et une acuité inquiétantes, nous devons examiner la question du périmètre de la redevance. L'importance, pour la démocratie et le rayonnement du pays, d'un secteur public de l'audiovisuel fort, légitime et de qualité impose de faire preuve de courage politique.

Nous considérons la redevance comme un financement particulièrement légitime, qui peut être assimilé à un actionnariat populaire et démocratique. Son montant ne peut être augmenté que raisonnablement et progressivement, ce qui ne suffira pas à compenser les fonds manquants. Nous proposons donc d'élargir son assiette en l'étendant aux résidences secondaires, qui représentent environ 10 % des logements. A défaut, ce sont 300 millions d'euros qui manquent à l'appel. Ne pas augmenter la redevance ni élargir son assiette alors qu'il manque plus de 1,2 milliard au budget de France Télévisions serait lourd de conséquences.

L'imposition des résidences secondaires pose cependant un problème de cohérence fiscale, lié à l'insuffisance de la lutte contre la fraude. Mettons un terme à cette situation, établissons l'égalité entre redevables.

M. le président.  - Amendement n°218 rectifié, présenté par MM. Mercier, Maurey, Amoudry, Détraigne, Fauchon, Pozzo di Borgo, Jean-Léonce Dupont et Deneux.

Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 1605 bis du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Dans le 1°, les mots : « sont équipés le ou les locaux meublés affectés » sont remplacés par les mots : « est équipé le local meublé affecté » ;

2° Après le 1°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Le montant total de la redevance due par le redevable ne peut excéder une fois et demi le montant de la redevance tel que fixé au III de l'article 1605 du code général des impôts. » ;

3° Après les mots : « taxe d'habitation », la fin de la première, phrase du deuxième alinéa du 5° est supprimée.

M. Hervé Maurey.  - Cet amendement vise lui aussi à élargir l'assiette de la redevance qui, seule, assure à l'audiovisuel public un financement pérenne et autonome. Dans ce sens, nous venons d'adopter l'amendement de la commission appliquant cette taxe aux terminaux de réception.

Nous proposons d'étendre la redevance aux résidences secondaires, mais en prévoyant pour celles-ci un demi-tarif. Jusqu'en 2005, cette taxe était due pour chaque logement, puis on l'a couplée avec la taxe d'habitation, la limitant à une par foyer fiscal. La commission Copé a estimé à 116 millions d'euros les ressources dégagées par ce nouvel assujettissement.

Je précise que le plafonnement à une redevance et demie s'appliquerait quel que soit le nombre de résidences secondaires possédées...

M. le président.  - Amendement n°370, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° Dans la première phrase du 1° du II de l'article 1605, après les mots : « affecté à l'habitation », sont insérés les mots : « principale ou secondaire » ;

2° Au 1° de l'article 1605 bis, le mot : « seule » est supprimé et les mots : « dont sont équipés le ou les » sont remplacés par les mots : « pour chacun des ».

M. Serge Lagauche.  - Depuis l'exercice budgétaire de 2005, la redevance est adossée à la taxe d'habitation pour les particuliers et à la TVA pour les professionnels, la charge de la preuve de détention d'un appareil de télévision a été inversée, les résidences secondaires sont exonérées ainsi que certains foyers exonérés, parallèlement à la taxe d'habitation -soit plus de 3,63 millions foyers fiscaux, auxquels il faut ajouter les anciennes exonérations maintenues pour 27 866 autres. Cette réforme était supposée dégager des moyens supplémentaires pour l'audiovisuel public, mais les choix démagogiques du Gouvernement, empêchant notamment de suivre le taux de croissance, en ont limité les effets.

Si le Gouvernement avait augmenté chaque année le tarif de la redevance, comme c'était le cas jusqu'en 2002, ne l'avait pas arrondie au demi-euro inférieur et n'avait pas plafonné le remboursement des exonérations, et si la base en avait été fixée par appareil et non par foyer fiscal, la réforme aurait pu mieux porter ses fruits. Pour corriger ce dernier point, nous proposons de taxer les résidences secondaires, dont l'exonération ne répond à aucun objectif d'ordre social et induit un manque à gagner d'environ 60 millions d'euros par an pour l'audiovisuel public. A l'heure où l'on supprime les recettes publicitaires du secteur public audiovisuel, il faut compenser la perte correspondante, qui s'élève déjà à 360 millions pour les exercices 2008 et 2009 de France Télévisions.

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur.  - Nous réfléchissons à la question de l'assiette de la redevance depuis plusieurs années. Et nous ne voulons pas créer de confusion avec l'amendement prévoyant la prise en compte des terminaux de réception, disposition importante mais qui relève de l'application du code des impôts.

Il faut poursuivre dans cette voie en se fondant sur une étude approfondie, qui pourra être réalisée par le groupe de modernisation de la redevance dont Mme la ministre nous a annoncé la création. La commission est donc défavorable aux amendements nos147, 218 rectifié et 370, en relevant toutefois la proposition intéressante de M. Mercier, présentée par M. Maurey, qui prévoit le plafonnement de son montant en même temps que l'élargissement de l'assiette.

Mme Christine Albanel, ministre.  - Même avis. Cette question sera étudiée par le comité de réflexion sur la redevance.

Je vous rappelle toutefois que, lorsque les résidences secondaires étaient assujetties, l'évasion fiscale était considérable : les propriétaires déclarant transporter chaque fois leur téléviseur, les contrôles étaient difficiles.

M. Henri de Raincourt.  - Et n'oublions pas qu'il n'y a plus de service de la redevance !

M. Hervé Maurey.  - Les assurances que vient de nous donner Mme le rapporteur nous permettent de retirer notre amendement. Mais nous veillerons à ce que ce comité soit mis en place et, en tout état de cause, nous en reparlerons lors de l'examen de la loi de finances pour 2010.

Madame le ministre, l'évasion n'était pas liée à l'assujettissement des résidences secondaires, mais au mode déclaratif, qui a été supprimé en 2005.

Ce n'est qu'en 2005 qu'a été mis en place un système... demandé en 1986 !

L'amendement n°218 rectifié est retiré.

M. David Assouline.  - Le voeu a bien été émis par la majorité de notre assemblée, sanctionné par un vote, de voir la redevance rester la source principale de financement de l'audiovisuel public. Il est donc normal que nous en venions à débattre des moyens d'en augmenter le produit. Que l'on ne vienne pas ici nous resservir la controverse sur les taxes antiéconomiques qui nuisent à la croissance. La nouvelle taxe sur les fournisseurs d'accès internet, vous le savez comme moi, sera de toute façon refacturée sur les clients. Ici, nous ne parlons que de revenir à un système -certes mal mis en pratique, mais est-ce une raison pour le supprimer ?- qui permettait de taxer les résidences secondaires, à 50 % seulement de surcroît. Si vous refusez de l'envisager, en considérant que les propriétaires de résidences secondaires doivent être exonérés, je vois mal comment vous pourrez refuser, tout à l'heure, d'exonérer les attributaires du RSA.

C'est en même temps que l'on a cessé d'indexer la redevance sur l'augmentation du coût de la vie que l'on a exonéré les résidences secondaires, en vertu du dogme qui disait que la redevance était mauvaise et devait disparaître. Il s'agit pourtant, je le répète, d'un véritable actionnariat populaire, puisque son produit va directement à l'audiovisuel. Avec un tant soit peu de pédagogie, les Français peuvent savoir que ce qu'ils payent va directement à l'audiovisuel et à l'INA.

M. Serge Lagauche.  - Votre réponse, madame la ministre, a peut-être été un peu hâtive. Est-ce donc parce que certains cherchent à tricher qu'il faudrait supprimer un impôt ? J'espère que vous ne ferez pas trop d'émules...

L'amendement n°147 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°370.

M. le président.  - Amendement n°371, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Après le 3° de l'article 1605 bis du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 3° bis Les personnes bénéficiaires du revenu visé à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles sont exonérées de la redevance audiovisuelle, à compter du 1er janvier 2009 ».

II. - La perte de recettes résultant pour l'État et les sociétés audiovisuelles publiques du II ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. David Assouline.  - Juste après un vote qui exonère les propriétaires de résidences secondaires, je me fais le plaisir de défendre un amendement qui propose la même exonération pour les attributaires du futur RSA. Nous parlons ici des ménages les plus modestes, exclus du monde du travail, sans revenu stable. La solidarité nationale exige que soit assuré l'accès de tous à la télévision et à la radio publiques, sans pourtant que les plus fragiles acquittent la même contribution que les autres. Or, son taux ne peut être progressif, sauf à complexifier à l'excès le recouvrement et déconnecter la taxe de son objectif. Cinq millions de foyers bénéficient déjà d'un dégrèvement sous condition de ressources, notamment les bénéficiaires du RMI. La loi de décembre 2008 généralisant le RSA doit remplacer le RMI et l'allocation de parent isolé à compter du 1er juin 2009. Il convient donc d'adapter les dispositions de l'article 1605 bis du code général des impôts. La doctrine en matière sociale n'est-elle pas que le passage au RSA ne doit pas signifier, pour ses attributaires, la perte d'exonérations dont ils bénéficiaient auparavant ? Nous proposons une exonération au 1er janvier 2009 afin que ceux qui sont déjà attributaires du RSA, dans le cadre de l'expérimentation, puissent en bénéficier.

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur.  - Je veux rassurer M. Assouline. L'objectif social est atteint puisque le RSA vise à offrir aux bénéficiaires des revenus suffisants pour intégrer la compensation des droits connexes ; pour plus de détails, je vous renvoie à l'excellent rapport de Mme Létard. L'idée était bien de lier les droits sociaux au revenu et non plus au statut. Le Premier ministre vient de confirmer la mission de Mme Desmarescaux sur la réforme des droits connexes pour les mettre en conformité avec les principes présidant au RSA. Ce dispositif a un coût, le choix du Gouvernement a été courageux, il s'agit bien d'inciter à la reprise d'activité. (Approbations à droite)

Mme Christine Albanel, ministre.  - Je m'associe aux propos du rapporteur et j'ajoute que les personnes qui ne sont soumises ni à l'impôt sur le revenu, ni à la taxe d'habitation ne payent pas la redevance. C'est le cas des titulaires du RSA.

Mme Bernadette Dupont.  - J'ai été le rapporteur, avec beaucoup de conviction, du projet de loi généralisant le RSA. J'observe, monsieur Assouline, que le groupe socialiste ne l'a pas voté. Vous avez beau jeu de réclamer maintenant des exonérations... qui sont déjà prévues !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je m'étonne du tour que prend ce débat. (Exclamations à droite) Mme le rapporteur nous explique d'un côté que si ceux qui touchent le RSA gagnent plus, c'est pour pouvoir payer plus.

Mme Bernadette Dupont.  - Vous n'avez rien compris.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je fais pourtant ce que je peux. Je constate simplement que les titulaires du RSA ne vont pas rouler sur l'or et que je ne peux souscrire à un raisonnement qui veut que parce qu'ils toucheront un peu plus, il est juste qu'ils paient plus d'impôt.

Mme Bernadette Dupont.  - Ils ne paieront pas l'impôt sur le revenu.

M. Jean-Pierre Sueur.  - C'est bien ce que nous dit Mme la ministre, qui nous tient un tout autre discours.

Elle nous dit en substance que le problème ne se pose pas, puisque les allocataires du RSA ne paient ni impôt sur le revenu ni taxe d'habitation. Pourquoi dans ces conditions refuser notre amendement ?

Au-delà, j'ai été choqué que, s'agissant des possesseurs de résidence secondaire, contre lesquels nous n'avons strictement rien, on s'en remette à un comité ; pire, que Mme la ministre nous explique que, puisqu'on ne peut pas contrôler ceux qui disent transporter leur téléviseur d'une résidence à l'autre, on ne peut pas les faire payer ! Voilà qui signe la démission de l'État ! Comme il y a un problème, ce n'est pas la peine de s'embarrasser d'un impôt pourtant socialement juste !

C'est dire qu'on fait deux poids, deux mesures : on incite les allocataires du RSA à la vertu contributive tandis qu'on exonère les possesseurs de résidence secondaire au motif que l'État est incapable d'exercer son contrôle. Situation qui, à l'évidence, ne va pas dans le sens de la justice.

M. David Assouline.  - J'ai écouté attentivement la longue intervention argumentée de Mme Dupont... (Exclamations et marques d'agacement à droite) Monsieur le président...

M. le président.  - Je ne peux croire qu'un orateur tel que vous puisse être déstabilisé par une si brève interruption...

M. David Assouline.  - Je le suis pourtant !

Je croyais qu'il était admis par tous, M. Mercier a bien insisté sur ce point en son temps, que la création du RSA, une idée de gauche, en remplacement du RMI, ne devait pas entraîner la disparition des droits connexes. Les allocataires du RSA sont en difficulté ; pourquoi ceux qui ne sont exonérés ni d'impôt sur le revenu ni de taxe d'habitation, dont je conviens qu'ils ne sont sans doute pas nombreux, devraient-ils payer la redevance ? Vous venez de refusez de faire payer à 50 % les possesseurs de résidence secondaire ! Je suis prêt à venir m'en expliquer avec vous sur les marchés des Yvelines, madame Dupont ! Je suis sûr qu'on m'écoutera plus que vous !

L'amendement n°371 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°146, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.

Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Dans le III de l'article 1605 du code général des impôts, le montant : « 116 euros » est remplacé par le montant : « 120 euros ».

II. - Le produit découlant de l'application du I ci-dessus est affecté à la société France Télévisions.

III. - Le montant de la redevance est de 75 euros pour les départements d'outre-mer.

IV. - Au 3 du VI de l'article 46 de la loi n°2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006, les mots : « inférieurs à 2 451,7 millions d'euros » sont remplacés par les mots : « inférieurs à 3 245 millions d'euros ».

V. - La perte éventuelle de recettes résultant pour l'État des I, III et IV ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Odette Terrade.  - Cet amendement a un seul objectif : contribuer à assurer des ressources financières pérennes à un service public de l'audiovisuel profondément ébranlé par la suppression de la publicité.

La redevance est la ressource la plus légitime pour la télévision publique et s'est construite avec elle ; elle était dès son origine une sorte d'actionnariat populaire et citoyen. Le Gouvernement l'a transformée en impôt, en demandant au contribuable de l'acquitter en même temps que la taxe d'habitation. Nous pensons que l'augmentation que nous proposons sera comprise par les citoyens qui tiennent à la qualité de cet outil de lien social et culturel qu'est la télévision.

On ne peut à la fois prétendre vouloir un service public fort, l'amputer d'un tiers de ses recettes et refuser toute majoration de la redevance ! Notre amendement assurera à l'audiovisuel public 130 millions d'euros de recettes. Il faut se souvenir que la redevance française est bien inférieure à celle de la Grande-Bretagne, 195 euros, ou de l'Allemagne, 204 euros ; elle n'atteint même pas les 161 euros de la moyenne européenne. Une augmentation sensible de la redevance permettrait le maintien de la qualité des programmes et la préservation de l'emploi. S'il faut payer un peu plus pour que France 3 continue d'assurer par ses propres moyens une bonne couverture de l'actualité locale, pourquoi pas ?

Nous contestons en outre le transfert d'une part du produit de la redevance vers le groupement d'intérêt public France Télé Numérique, qui a mission d'accompagner l'extinction de l'analogique. L'audiovisuel public est fragile, il est impensable de le priver ainsi d'une part de ses ressources. Surtout quand il s'agit de faire payer par lui ce qui devrait procéder du budget général. Le Gouvernement tient un double langage : derrière l'argument incantatoire de la culture, on trouve un véritable affaiblissement du service public, au profit d'un secteur privé auquel le Gouvernement ne cesse de faire des cadeaux. Les opérateurs privés participent-ils en quelque façon au financement de l'extinction de l'analogique dont ils vont pourtant tirer parti ? Après le transfert des revenus publicitaires du secteur public vers le secteur privé, voici celui d'une part de la redevance qui profitera indirectement aux télévisions privées et au secteur des télécoms ! C'est un détournement de la redevance pour assumer des dépenses que l'État ne veut pas prendre en charge.

M. le président.  - Amendement n°215 rectifié, présenté par M. Mercier et les membres du groupe UC.

Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. Dans le premier alinéa du III de l'article 1605 du code général des impôts, le montant : « 116 euros » est remplacé par le montant : « 120 euros ».

II. Les dispositions du I s'appliquent à compter du 1er janvier 2010.

M. Hervé Maurey.  - Cet amendement a fait beaucoup parler de lui avant même notre débat. Il revient à augmenter la redevance de 2 euros par an depuis l'annonce de la suppression de la publicité par le Président de la République ; il reprend un dispositif adopté par le Sénat en décembre dernier à la demande de la commission des affaires culturelles mais que la CMP avait repoussé.

Nous avons la redevance la plus basse d'Europe, loin des 200 euros de l'Allemagne ou du Royaume-Uni. Notre proposition revient à l'augmenter de 1,7 % sur neuf ans, ce qui est très modéré. Le groupe de l'Union centriste y tient beaucoup ; elle est le prolongement de ses travaux comme de ceux de la commission des affaires culturelles, afin de donner à l'audiovisuel public, auquel nous sommes tous ici attachés, un financement autonome et pérenne.

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Défavorable à l'amendement n°146, puisqu'un groupe de travail sur la redevance va être mis en place. Favorable au n°215 rectifié, identique à celui défendu par la commission en décembre dernier.

Mme Christine Albanel, ministre.  - Je comprends la position de la commission mais il me paraît difficile d'aller au-delà d'une indexation sur l'inflation. Défavorable aux deux amendements.

L'amendement n°146 n'est pas adopté.

Mme Catherine Tasca.  - Nous voterons l'amendement n°215 rectifié. D'abord, parce que les financements de l'audiovisuel public sont insuffisants. Nous pouvons comprendre que le Gouvernement opte pour une progression par paliers, mais comment un ajustement aussi modeste peut-il faire problème ? Avez-vous la volonté d'aider l'audiovisuel public à acquérir des recettes à la hauteur de ses missions ? Ou faut-il s'interroger sur les intentions souterraines de la réforme ?

Nous avons une autre raison pour voter l'amendement. Les parlementaires que nous sommes sont tous attachés au principe du vote majoritaire. Lorsqu'une disposition a recueilli une large majorité, comme ce fut le cas en décembre sur la redevance, le Gouvernement a le devoir de la respecter. Quant à nous, nous devons assumer nos responsabilités et la commission nous montre l'exemple. Nous ne comprendrions pas que le Gouvernement s'obstine à refuser un si modeste ajustement.

M. Jacques Legendre, président de la commission.  - Il y a convergence de vues entre nous pour donner à la télévision publique les moyens dont elle a besoin et pour augmenter, modestement, le montant de la redevance. La commission des affaires culturelles est en cela fidèle à une position constante et ancienne, qui doit beaucoup au président Valade et à M. de Broissia. Donnons à la télévision publique les moyens de nous offrir des émissions de qualité, montrons au personnel des chaînes concernées notre volonté d'assurer l'avenir de ce service public. C'est un moment important.

M. David Assouline.  - Important et attendu. Il ne s'agit pas de l'une de ces grandes joutes entre la droite et la gauche mais d'une prise de position consensuelle du Sénat, non pour augmenter considérablement la redevance mais pour procéder à un ajustement de 2 euros... La manne publicitaire disparaissant, cette contribution, modérée pour chacun de nos concitoyens mais au total significative pour la télévision publique, sera bienvenue. Nous rendons hommage à M. Valade et M. de Broissia pour leur rôle passé, prépondérant, dans cette affaire. Il est bon que parfois le Sénat fasse d'une seule voix entendre sa sagesse collective. Nous souhaitons qu'il s'exprime par scrutin public.

M. Yann Gaillard.  - Ce n'est pas nécessaire !

M. Alain Gournac.  - C'est une erreur !

M. Hervé Maurey.  - Je suis stupéfait et triste, pour ne pas dire plus, de voir le Gouvernement persister dans son opposition à la hausse modeste que nous proposons. Nous avons un Président de la République qui ne manque pas de courage. Pourquoi ne pas aller au bout de la réforme ? Si la publicité est supprimée, il faut une ressource pérenne et stable, et la seule, c'est la redevance.

L'image de notre Assemblée est également en jeu. Nous avons tout de même été bafoués par la suppression de la publicité intervenue avant notre débat ; de surcroit, une décision que nous avions votée n'est pas appliquée. Saisissons l'occasion de confirmer notre choix ; ne pas le faire serait incompréhensible.

L'amendement n°215 rectifié est mis aux voix par scrutin public à la demande du groupe socialiste.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 336
Nombre de suffrages exprimés 333
Majorité absolue des suffrages exprimés 167
Pour l'adoption 329
Contre 4

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements sur de nombreux bancs)

M. Jean-Pierre Sueur.  - Le Sénat sert à quelque chose !

M. Jacques Legendre, président de la commission.  - Encore un point sur lequel nous sommes tous d'accord ! (Sourires)

M. le président.  - Amendement n°268, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, Voynet, MM. Desessard et Muller.

Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le III de l'article 1605 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« A compter du 1er janvier 2009, ce montant est indexé chaque année sur l'indice des prix à la consommation hors tabac, tel qu'il est prévu dans le rapport économique, social et financier annexé à la loi de finances pour l'année considérée. »

Mme Marie-Christine Blandin.  - Je me réjouis de ce vote historique. Rendez-vous est maintenant pris en CMP, M. Retailleau l'a rappelé, pour défendre ensemble l'honneur du Sénat.

M. Henri de Raincourt.  - Comptez sur nous !

Mme Marie-Christine Blandin.  - L'Allemagne et la Grande-Bretagne sont souvent citées en exemple. Mais parlons-en vraiment et abordons la question du financement : 6 milliards pour la BBC, contre 2,7 pour France Télévisions. La Cour des comptes, si prompte à critiquer les gaspillages, dénonce depuis des années la perte de moyens de France Télévisions : selon ses calculs, le produit de la redevance a perdu 10 % de sa valeur réelle entre 2001 et 2008. Un consensus s'étant dégagé au sein de notre Haute assemblée pour faire de la redevance la source principale de financement de l'audiovisuel public, reconstruisons sur des bases saines. Certes, le principe de l'indexation a été introduit à l'article 97 de la loi de finances rectificative pour 2008, mais, si j'ai bien compris, seulement pour un an. Brisons avec le cycle de la stagnation en inscrivant le principe de l'indexation dans cette loi !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Très bien !

M. le président.  - Amendement n°269, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, Voynet, MM. Desessard et Muller.

Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le III de l'article 1605 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« À compter du 1er janvier 2009 jusqu'au 1er janvier 2014, le montant de la redevance progresse pour atteindre la moyenne européenne. La progression fait l'objet d'un décret. »

Mme Marie-Christine Blandin.  - Le ton provocateur de mes deux autres amendements tranche avec le précédent puisque l'indexation est une proposition de bon sens.

Ceux qui veulent faire de l'audiovisuel public un outil performant et compétitif, doté d'un pilotage dynamique, et créer la télévision du XXIe siècle devraient en tirer toutes les conséquences... Que fait la concurrence ? La redevance est de 200 euros en Allemagne, et les parlementaires ont décidé de la porter à 216 euros d'ici 2012 ; elle est de 280 euros au Danemark et de 215 euros en Finlande et en Suède. D'où notre volonté de rejoindre, à l'amendement n°269, la moyenne européenne d'ici 2014 ; principe qui aurait pour conséquence de porter la redevance à 161 euros, objet de l'amendement n°436.

Plutôt que ces deux amendements ambitieux déposés au nom du développement durable de la télévision (sourires), j'insisterai sur le n°268. Sans compter que ma proposition ne coûte rien à l'État aujourd'hui, elle nous épargne de futurs écueils.

M. le président.  - Amendement n°436, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, Voynet, MM. Desessard et Muller.

Après l'article 19,  insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le III de l'article 1605 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« À compter du 1er janvier 2009 jusqu'au 1er janvier 2014, le montant de la redevance progresse pour atteindre la moyenne européenne soit de 161 euros. »

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur.  - Avis défavorable à l'amendement n°268 : le principe de l'indexation est acté dans le collectif tant pour 2009 que pour les années suivantes. Rejet également des amendements nos269 et 463 : l'écart entre la redevance française et la moyenne européenne est trop important pour envisager un tel rattrapage. Au reste, le CSA entreprendra une évaluation annuelle des ressources de l'audiovisuel public à partir de 2009.

Mme Christine Albanel, ministre.  - L'amendement n°268 est effectivement satisfait puisque la loi de finances rectificative dispose que le principe de l'indexation est applicable « à compter du 1er janvier 2009 ». Avis évidemment défavorable aux deux amendements suivants : la hausse envisagée est considérable...

Mme Marie-Christine Blandin.  - En situation de crise, l'augmentation de 4 euros constitue déjà une prouesse. Je n'insisterai donc pas : les amendements nos269 et 436 visaient davantage à rappeler que les besoins resteraient insatisfaits. En revanche, s'agissant du n°268, le Gouvernement et la commission peuvent-ils m'assurer que cette disposition inscrite dans un collectif engage pour le futur ?

Les amendements nos269 et 436 sont retirés.

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur.  - Oui, puisqu'elle figure à l'article 1605 du code général des impôts...

M. David Assouline.  - Lequel dispose « à compter du 1er janvier 2009, ce montant est indexé chaque année sur l'indice des prix à la consommation hors tabac. ».

Mme Marie-Christine Blandin.  - Dans ce cas, je n'insiste pas. Des décisions de principe peuvent donc être prises lors de l'adoption d'un collectif, j'en prends acte !

L'amendement n°268 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°373, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le III de l'article 1605 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« A compter du 1er janvier 2010, le manque à gagner constaté pour les organismes du secteur public audiovisuel du montant de la redevance, du fait de sa non indexation sur l'indice des prix à la consommation, depuis le 1er janvier 2003, est compensé par une progression accrue de ce montant, de façon à compenser ce manque à gagner sur cinq exercices budgétaires. »

M. Serge Lagauche.  - Il s'agit de rattraper le manque à gagner que l'audiovisuel public a subi depuis 2002. Si l'on retient la seule hausse de l'indice des prix, la redevance atteindrait aujourd'hui 134 euros. Mais, prenant acte de l'effort qui vient d'être consenti par la majorité, nous retirons l'amendement.

L'amendement n°373 est retiré.

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur.  - Très bien !

M. le président.  - Amendement n°316 rectifié, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au début du premier alinéa du III de l'article 53 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« La principale source de financement des organismes du secteur public de la communication audiovisuelle est constituée par le produit de la redevance audiovisuelle. »

Mme Catherine Tasca.  - A la demande de la commission, nous proposons d'insérer cet amendement, initialement présenté à l'article premier ter, après l'article 19. Il est d'autant plus utile de préciser que la redevance est la principale ressource de l'audiovisuel public que certains ont essayé de remettre en cause ce principe, pour l'audiovisuel extérieur de la France et pour l'INA. De surcroît, il n'a échappé à personne que le Gouvernement s'est refusé à garantir une compensation de la suppression de la publicité au-delà des trois premières années.

A l'heure où nous regardons tous avec envie nos voisins européens du Nord où la redevance dépasse les 200 euros, il faudrait que cette loi rappelle que les organismes publics de télévision sont financés par la redevance. Ainsi, la législateur serait peut-être plus enclin, dans le futur, à augmenter progressivement son montant. Le secteur audiovisuel public devra faire face à de lourds chantiers : il lui faut donc un financement suffisant.

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur.  - Avis défavorable car la commission souhaitait plutôt, dans un premier temps du moins, décroiser les financements pour que la redevance ne soit plus affectée qu'au secteur audiovisuel public. En outre, si la redevance finance aux deux tiers l'audiovisuel public métropolitain, ce n'est pas le cas pour l'audiovisuel extérieur.

L'amendement n°316 rectifié, repoussé parle Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président. - Amendement n°36 rectifié, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.

Avant l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans le I de l'article 1605 du code général des impôts, les mots : « redevance audiovisuelle » sont remplacés par les mots : « contribution à l'audiovisuel public »

Amendement n°35 rectifié, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.

Rétablir cette division dans la rédaction suivante :

De la contribution à l'audiovisuel public

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur.  - Après la modeste revalorisation de la redevance obtenue par la commission, je vous propose de modifier son nom : plutôt que de parler d'une redevance, qui s'apparente à une taxe ou un impôt, il serait préférable de l'intituler « contribution », ce qui signifie : participation à une action commune. Cette notion est beaucoup plus valorisante. En outre, nous avons tenu compte du souhait de Mme la ministre de voir figurer le mot audiovisuel, puisque l'INA est concerné. Il faudrait donc, sur la feuille d'appel de la taxe d'habitation, ajouter entre parenthèses les mots « radio, télévision et INA » afin que nos concitoyens sachent que la redevance permet de financer cinq chaînes de télévision, mais aussi neuf radios, l'INA et quatre orchestres nationaux.

Mme Christine Albanel, ministre.  - Avis favorable à l'amendement comme à la suggestion.

M. Jean-Pierre Plancade.  - Je regrette l'absence de référence à la radio car peu de Français savent que la redevance sert aussi à financer Radio-France, mais si cela leur est indiqué sur la feuille d'impôt...

M. David Assouline.  - Nous voterons cet amendement car peu de nos concitoyens savent à quoi sert la redevance. Il y a donc un effort pédagogique à faire. Mais un intitulé trop long serait contreproductif. Il serait sans doute opportun que les feuilles d'impôt mentionnent le fait que cette contribution sert à financer la radio et la télévision publiques et l'INA. Encore faut-il qu'elles soient lisibles.

L'amendement n°36 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

L'amendement n°35 rectifié est adopté et devient une division additionnelle.

M. le président. - Amendement n°148, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.

Rédiger comme suit l'intitulé de cette division :

Institutions de taxes sur les investissements publicitaires et les chiffres d'affaires des opérateurs de communications électroniques

M. Jean-François Voguet.  - La compensation de la perte des recettes publicitaires ne permettra pas à France Télévisions de se développer ni de faire face à ses missions de service public. Vous souhaitez une télévision publique de qualité, les moyens doivent suivre. En l'état, seule la réduction des effectifs permettra d'équilibrer les comptes.

Pourquoi acceptons-nous ces nouvelles taxes alors que nous étions opposés à la suppression de la publicité ? Pour financer les missions de service public de France Télévisions et de Radio France, qu'il s'agisse de la couverture régionale par France 3 ou de l'action spécifique de RFO en outre-mer. Notre opposition à la suppression de la publicité, décidée par Nicolas Sarkozy, ne nous dispense pas de mettre à contribution les opérateurs privés du secteur audiovisuel qui ont engrangé des profits record : ils pourront aisément contribuer au financement de l'audiovisuel public.

M. le président.  - Amendement identique n°271, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, Voynet, MM. Desessard et Muller.

Mme Marie-Christine Blandin.  - La télévision de qualité informe, cultive, émancipe et fait réfléchir tandis que la publicité désinforme, abrutit, aliène et fait acheter. C'est pourquoi il faut appliquer le principe pollueur-payeur. (On s'amuse)

Mme Odette Terrade.  - Très bien !

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur.  - Il n'est pas pertinent de taxer les investissements publicitaires qui permettent d'améliorer l'information des consommateurs. Avis défavorable.

Mme Christine Albanel, ministre.  - Cette mesure déséquilibrerait le dispositif prévu pour compenser la perte des ressources publicitaires. Avis défavorable.

Les amendements identiques nos148 et 271ne sont pas adoptés.

Article 20

I. - Dans le titre II de la première partie du livre Ier du code général des impôts, il est inséré un chapitre VII septies ainsi rédigé :

« CHAPITRE VII SEPTIES

« Taxe sur la publicité diffusée par les chaînes de télévision

« Art. 302 bis KG. - I. - Il est institué une taxe due par tout éditeur de services de télévision au sens de l'article 2 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, établi en France.

« II. - La taxe est assise sur le montant, hors taxe sur la valeur ajoutée, des sommes versées par les annonceurs, pour la diffusion de leurs messages publicitaires, aux redevables concernés ou aux régisseurs de messages publicitaires. Ces sommes font l'objet d'un abattement forfaitaire de 4 %.

« III. - L'exigibilité de la taxe est constituée par le versement des sommes mentionnées au II.

« IV. - La taxe est calculée en appliquant un taux de 3 % à la fraction du montant des versements annuels, hors taxe sur la valeur ajoutée, afférent à chaque service de télévision, qui excède 11 millions d'euros. Toutefois, pour les services de télévision autres que ceux diffusés par voie hertzienne terrestre en mode analogique, ce taux est fixé à 1,5 % en 2009, 2 % en 2010 et 2,5 % en 2011.

« Pour l'ensemble des redevables, jusqu'à l'année d'extinction en métropole de la diffusion par voie hertzienne terrestre en mode analogique des services de télévision, la taxe est plafonnée à 50 % de l'accroissement de son assiette, telle que définie au II, constaté pour l'année civile au titre de laquelle la taxe est due par rapport à 2008. En tout état de cause, le montant de la taxe ne peut pas être inférieur à 1,5 % de l'assiette telle qu'elle est définie au II.

« V. - Les redevables procèdent à la liquidation de la taxe due au titre de l'année civile précédente lors du dépôt de la déclaration mentionnée au 1 de l'article 287 du mois de mars ou du premier trimestre de l'année civile.

« VI. - La taxe est recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe. »

II. - A la section 2 du chapitre Ier du livre II du même code, il est inséré un II quinquies ainsi rédigé :

« II quinquies. - Régime spécial des redevables de la taxe sur la publicité diffusée par les chaînes de télévision

« Art. 1693 quinquies. - Les redevables de la taxe prévue à l'article 302 bis KG acquittent cette taxe par acomptes mensuels ou trimestriels au moins égaux, respectivement, au douzième ou au quart du montant de la taxe due au titre de l'année civile précédente.

« Le complément de taxe exigible au vu de la déclaration mentionnée au V de l'article 302 bis KG est versé lors du dépôt de celle-ci.

« Les redevables qui estiment que les acomptes déjà payés au titre de l'année atteignent le montant de la taxe dont ils seront en définitive redevables peuvent surseoir aux paiements des acomptes suivants. Si le montant de la taxe est supérieur de plus de 20 % au montant des acomptes versés, l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 et la majoration prévue à l'article 1731 sont applicables. »

III. - Dans un délai d'un an à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l'application du présent article, portant notamment sur le rendement effectif de la taxe prévue à l'article 302 bis KG du code général des impôts. Ce rapport propose, le cas échéant, les adaptations nécessaires de la présente loi.

M. Jean-François Voguet.  - Il a suffi que le projet de loi prévoie la suppression des recettes publicitaires de l'audiovisuel public et l'instauration de taxes compensatrices pour que se lèvent divers boucliers. Certains préconisent la suppression de ces nouvelles taxes. De plus, il suffira, dans un contexte de quasi-monopole de la publicité télévisée, de majorer de trois points le prix des messages publicitaires pour que le coût de cette nouvelle taxe soit indolore pour ces entreprises. Enfin, c'est bel et bien le consommateur qui, in fine, la payera, d'une façon ou d'une autre.

Cet article biaise le débat : la taxation limitée de la publicité des autres chaînes permettrait de financer le secteur public de l'audiovisuel. Mais le cahier des charges des entreprises privées est bien moins contraignant que celui du secteur public, dont les ressources sont manifestement insuffisantes. Cet article propose donc une fausse bonne solution et il va préserver l'essentiel : la grande rentabilité de l'audiovisuel privé qui va récupérer de nouvelles recettes publicitaires.

Mme Bernadette Bourzai.  - L'article 20 prévoit dans le code général des impôts une taxe sur la publicité diffusée par les chaînes de télévision, destinée à compenser les pertes de recettes de France Télévisions et assortie d'un régime spécial pour les redevables.

Ces dispositions sont discriminatoires et contraires au principe constitutionnel d'égalité des citoyens devant les charges publiques. Leur censure par le Conseil constitutionnel rendrait encore plus aléatoire le financement et la survie même de la télévision publique.

Cette taxe est devenue si complexe depuis l'examen du texte à l'Assemblée nationale qu'elle s'apparente à une usine à gaz. Elle est assise sur le montant des sommes versées par les annonceurs, mais on a instauré un abattement forfaitaire de 4 % et exclu les sommes inférieures à 11 millions d'euros ; son taux varie selon le mode de diffusion des services de télévisions ; jusqu'à la fin de la diffusion en mode analogique, elle est fonction de l'accroissement du chiffre d'affaires des chaînes et elle est plafonnée à 50 % de l'élargissement de l'assiette par rapport à 2008. La taxe s'applique aussi aux chaînes publiques, qui ne devraient pas avoir à s'en acquitter puisque leurs recettes publicitaires baisseront. Qui peut s'y retrouver dans cette foule d'abattements et de dérogations ? J'en ai bien une petite idée, puisque les formulations choisies reprennent celles du Livre Blanc de TF1...

Cette taxe sera contre-productive puisque son produit augmentera à mesure de l'augmentation de l'audience et du chiffre d'affaires des chaînes privées. On en est donc réduit à espérer que les chaînes publiques vont perdre des spectateurs au profit de leurs concurrentes pour être suffisamment financées ! A moins que l'audience globale augmente, ce qu'il n'y a aucune raison de supposer.

Au plan économique, cette taxe s'inscrit dans un contexte de dépression du marché publicitaire. Selon le directeur des médias de l'agence H, filiale de Havas, dont Le Figaro du 4 janvier rapportait les propos, l'effondrement du marché de la publicité audiovisuelle est dû à l'effet conjugué « de la récession et de toutes les inconnues qu'a engendrées la mise en oeuvre au pas de course de cette réforme de l'audiovisuel. A l'heure qu'il est, déclarait-il, on ne sait toujours pas ce à quoi le Sénat aboutira. Le média télé paie cher la facture ! »

Les chaînes de télévision, soumises à cette nouvelle taxe, devront réduire certains postes budgétaires, notamment ceux consacrés à la création. Cela risque de modifier le paysage audiovisuel, de conduire à des suppressions d'emplois et d'altérer la situation économique et sociale du secteur.

Plus grave encore : ce texte pose des problèmes de constitutionnalité. M. Guy Carcassonne relève que le produit de ces taxes ne sera pas directement affecté au financement de l'audiovisuel public mais versé au budget général. Alors que la Lolf permet de manière limitative d'affecter certaines recettes à certaines dépenses, le Gouvernement n'a pas souhaité recourir à cette possibilité. Aucun motif d'intérêt général n'étant mentionné pour les justifier, ces nouvelles taxes attentent au principe d'égalité des citoyens devant les charges publiques. Pourquoi, parmi toutes les entreprises qui acquittent l'impôt sur les sociétés, en avoir isolé quelques-unes qui seront soumises à un impôt supplémentaire ?

Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de cet article.

M. Jean-Pierre Sueur.  - L'article 20 est paradoxal. Rien ne garantit la pérennité des recettes prévues. Il serait imprudent de notre part de voter un dispositif qui n'assure pas à France Télévisions des ressources durables. Ensuite, il est dérisoire de taxer les recettes publicitaires résiduelles des chaînes publiques pour les financer elles-mêmes ! Enfin, l'article instaure un mécanisme pervers : le service public aura d'autant plus de moyens que ses concurrents auront plus d'audience et de recettes publicitaires.

Le Sénat, par un vote historique, a heureusement adopté à une quasi-unanimité une légère augmentation de la redevance. Il s'agit là d'un acte civique et politique d'une grande portée. C'est reconnaître qu'il ne faut pas avoir peur d'instituer des contributions publiques justes pour financer le service public. Il est dommage que la majorité ait refusé certains de nos amendements visant à rendre la redevance plus juste encore.

Les mesures que nous proposez, madame le ministre, sont irresponsables. Il y a quelque paradoxe à voir un ministre de la culture, qui occupe une fonction douée d'une charge symbolique très forte dans notre pays, celle d'un garant de la capacité collective de créer et d'inventer, refuser devant le Sénat une hausse mesurée de la redevance souhaitée par la quasi-totalité des sénateurs et plaider en faveur d'une recette aléatoire pour la télévision publique tirée de la publicité sur les chaînes privées, après avoir accepté à l'Assemblée nationale plusieurs amendements déposés pour complaire aux chaînes privées et réduire leur contribution. Peut-être n'était-ce pas votre choix mais celui du Gouvernement ou du Président de la République. Toujours est-il que votre position marque une rupture profonde avec la conception que la plupart de vos prédécesseurs, de gauche comme de droite, se sont fait de leur mission.

M. David Assouline.  - Si nous avons participé aux premiers travaux de la commission Copé, c'est parce que nous espérions que ses membres reconnaîtraient qu'en l'absence de publicité, il n'y avait aucun moyen d'assurer un financement à la fois juste et pérenne de l'audiovisuel public. Mais la suppression de la publicité était devenue un dogme intangible. Puisqu'il fallait trouver à tout prix d'autres modes de financement, on en a inventé qui ne sont ni justes, ni pérennes.

L'article 20 instaure une taxe due par tous les éditeurs de services de télévisions. On verra bientôt une situation ubuesque où les chaînes publiques devront payer cette taxe pour assurer leur propre financement. Elles ne toucheront d'ailleurs pas directement le produit de cette contribution : celui-ci sera versé au budget de l'État qui décidera chaque année de le réaffecter, ou non, à France Télévisions. Si l'on a décidé d'imposer également les chaînes publiques, c'est sans doute pour répondre à un problème de constitutionnalité et éviter une infraction au principe d'égalité des citoyens devant l'impôt. Mais ce système de vases communicants, ce serpent qui se mord la queue, c'est cocasse.

En outre, cette taxe a été rendue modulable par l'Assemblée nationale. Son taux est fixé à 1,5 % du chiffre d'affaires si ce dernier n'augmente pas, entre 1,5 % et 3 % s'il augmente. Cette disposition favorise une nouvelle fois TF1 et M6, qui sont dans une période de faible croissance, au détriment des nouvelles chaînes en expansion de la TNT.

Les plus innovants, ceux qui expriment la diversité et la nouvelle économie supporteront plus le faix de cette taxe dure et injuste que ceux qui recevront l'essentiel de la manne publicitaire, d'où une perte de 40 millions à 60 millions sur les 400 millions initialement prévus. La compensation se réduit comme peau de chagrin, mais que représentent ces 40 millions par rapport aux 500 millions perdus par le service public ? La grande idée du Président, c'est beaucoup de bruit pour presque rien. Faut-il rappeler que la compensation avait d'abord été envisagée pour l'INA ? Inéquitable et peu productive, cette mesure fiscale va à l'encontre des principes qui doivent guider le financement de l'audiovisuel public.

Mme Christine Albanel, ministre.  - Cette taxe s'inscrit dans une logique, celle du transfert : la publicité qui disparaît sur la télévision publique va se reporter sur les chaînes privées et la radio ainsi que la presse : je préfère cela à ce qu'elle parte hors médias. Il est logique que ces transferts, ces plus, soient taxés mais il fallait vérifier leur montant, d'où une intelligente modulation, car on ne peut pas taxer un moins. Il n'y a pas de problème de constitutionnalité puisque la taxe n'est pas affectée. Il n'est pas extraordinaire que France Télévisions y soit assujettie : il y va de l'égalité devant les charges publiques. Au demeurant, lorsque l'État fait des travaux sur ses monuments, il paie la TVA. Enfin, monsieur Sueur, je ne déshonore pas ma fonction en portant une réforme qui libère la télévision publique de la publicité.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je n'ai pas dit déshonoré, j'ai parlé de rupture. Et je vous rappelle qu'André Malraux nous regarde !

M. le président.  - Amendement n°244, présenté par M. Maurey.

Supprimer cet article.

M. Hervé Maurey.  - Même si nous appartenons à une majorité qui souhaite diminuer les charges, ce n'est pas par dogmatisme que nous proposons la suppression de cette taxe mais parce que la redevance est le seul moyen d'assurer un financement autonome et pérenne à l'audiovisuel public. Ces taxes ne seront pas affectées mais iront dans le budget global de l'État, de sorte que le président de France Télévisions sera tenu d'aller demander chaque année des crédits pour faire vivres ses chaînes : cela ne correspond pas à un service public indépendant, doté des moyens de ses ambitions.

On se rappelle la vignette automobile, jadis créée pour les personnes âgées, ou la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat, dont 80 millions sur 600 millions vont à l'artisanat... Le financement prévu nous rassure d'autant moins qu'il n'est prévu que pour trois ans. La ministre a semblé dire que la constitutionnalité ne posait pas de problème mais des juristes ont exprimé leurs doutes.

Il est étonnant que le financement du service public repose dorénavant sur le succès du privé.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Absolument !

M. Hervé Maurey.  - Voilà le premier secteur d'activité dont le financement dépend de son concurrent. (M. Jean-Pierre Sueur approuve vivement l'orateur) Je rappelle que la publicité est déjà taxée à 6,28 %. J'aimerais qu'on démystifie enfin l'idée qu'il y a des taxes neutres. On n'a pas voulu augmenter la redevance au motif que les Français ne pouvaient pas la payer mais on les infantilise et nous verrons bien à l'article 21 qu'aucune taxe n'est neutre.

M. le président.  - Amendement identique n°374, présenté par M. Antoinette et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

M. David Assouline.  - Nous avons dit notre totale opposition à la suppression précipitée de la publicité, compensée par deux taxes inégalitaires dont le produit est douteux et qui n'offrent pas de garanties suffisantes au regard de l'égalité devant les charges publiques. Je ne reprends pas l'ensemble de notre argumentation. Qu'il me suffise de rappeler que si nous sommes dans une situation difficile, c'est vous qui en portez la responsabilité : qu'on ne nous reproche pas de vouloir une autre compensation, car nous sommes prêts à faire des propositions si le Sénat revient sur son vote précédent. En attendant, nous avons conscience que s'opposer à la taxe est une autre manière de s'opposer au texte.

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Comme nous allons être amenés à donner plusieurs avis défavorables, je souhaiterais rappeler comment, compte tenu des engagements pris, deux taxes ont été prévues pour financer la compensation par le budget de l'État de 450 millions. Nous avons estimé responsable et raisonnable d'en rester au texte issu de l'Assemblée nationale car ces dispositions ont été amendées pour intégrer les données liées à la conjoncture, la crise dégradant les recettes publicitaires. S'agissant de la taxe sur les fournisseurs d'accès, le curseur a été bien placé pour lancer la nouvelle société et nous avons décidé que le CSA donnerait chaque année son avis sur les moyens nécessaires à l'audiovisuel public, de manière à ce que nous puissions décider en connaissance de cause.

M. Roland du Luart.  - Très bien !

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Ne fragilisons pas le socle ainsi établi et, puisque dans ce monde mouvant aucune taxe n'est éternelle, nous verrons chaque année comment la faire évoluer. Avis défavorable aux amendements nos244 et 374.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis.  - Comme vous, monsieur Maurey, le mot taxe me gêne dans un pays qui connaît un record de prélèvements obligatoires. Toutefois, dans ce cas, il y a un lien consubstantiel entre l'assujettissement à la taxe et le transfert de ressources publicitaires, la seconde coupure, l'heure d'horloge, etc. Le fondement économique de ce prélèvement est avéré. Je vous propose donc de retirer votre amendement pour vous concentrer sur les améliorations que nous pouvons éventuellement apporter à ce texte. (Sourires)

Mme Christine Albanel, ministre.  - Avis défavorable à ces amendements de suppression. Cette taxation répond à un vrai besoin et suit une logique certaine puisque de nouvelles fenêtres publicitaires sont ouvertes -même si nous restons en deçà de ce que la directive SMA permet, avec neuf minutes de publicité au lieu de douze. Et le financement du secteur public par les recettes publicitaires n'a rien d'extraordinaire dans la mesure où l'ensemble des chaînes soutiennent déjà, sur l'ensemble de leur chiffre d'affaires, le secteur du cinéma ou la création audiovisuelle. En outre, les 450 millions correspondants ont été votés dans la loi de finances. Ils sont donc garantis par l'État pour les trois prochaines années, ce qui donne à la télévision publique une bonne visibilité financière.

M. Hervé Maurey.  - Je suis l'avis du rapporteur et de Mme la ministre, pour ne pas « déstabiliser » le système. Et cette taxe est peut-être moins illogique que les dispositions que nous allons examiner tout à l'heure.

L'amendement n°244 est retiré.

M. Jean-Pierre Plancade.  - Je ne répéterai pas toutes les critiques que nous inspire cette taxe. Je souhaite toutefois rappeler combien il est contradictoire qu'elle ne soit pas affectée, et pas très sain que le secteur privé finance le secteur public, même si toutes les chaînes y sont assujetties. Certes, il faut compenser la suppression des recettes publicitaires, mais le groupe RDSE s'abstiendra car le système proposé ne nous convient pas.

M. Roland du Luart.  - Je voudrais vous signaler un malentendu fondamental : lorsque cette loi a été préparée, il y a quelques mois, l'économie était prospère et la publicité florissante. Aujourd'hui qu'elle s'effondre, assurer que ces dispositions s'accompagneront d'une hausse des recettes publicitaires relève d'une analyse spécieuse. Et les annonceurs achètent des espaces en fonction des scores d'audience : qu'en sera-t-il si les téléspectateurs ne regardent pas les chaînes concernées ? Le transfert de recettes n'est pas automatique. Il est heureux qu'une clause de revoyure soit prévue et que la redevance augmente car, si mon analyse est juste, il sera très difficile d'équilibrer le financement de l'audiovisuel. Pour ces raisons, je reste très réservé sur cet article.

Mme Christine Albanel, ministre.  - Je comprends votre raisonnement : on ne peut connaître à l'avance le montant exact du transfert, surtout si le marché connaît une dépression. Mais nous avons ouvert des fenêtres de publicité et prévu une modulation de la taxe de 1,5 % au lieu de 3, ainsi qu'une clause de revoyure. Le système de financement me semble donc équilibré.

M. Roland du Luart.  - Oui, on se reverra ! (Sourires)

L'amendement n°374 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°149 rectifié, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.

I. - Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour l'intitulé du chapitre VII septies du code général des impôts :

« Taxe sur les investissements publicitaires bruts et les chiffres d'affaires des opérateurs de communications électroniques

II. - Rédiger comme le texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KG du même code :

« Art. 302 bis KG. - Il est institué une taxe de 1 % sur les investissements publicitaires bruts et les chiffres d'affaires des opérateurs de communications électroniques. Sont exonérés la presse écrite quotidienne, ainsi que les sociétés mentionnées à l'article 44 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, le cinéma, l'édition et les sociétés de spectacle vivant. »

III. - Supprimer les II et III de cet article.

Mme Odette Terrade.  - Nous le disons depuis longtemps : on ne doit pas se contenter d'une taxe sur les recettes publicitaires des télévisions privées, il faut également taxer le chiffre d'affaires des opérateurs de télécommunications. Quoi qu'il en soit, seule une augmentation de la redevance peut garantir un service public de qualité et indépendant, bien plus sûrement que l'usine à gaz financière que l'on nous propose. Ce projet choisit le délestage, le moindre coût : de toute façon, les téléspectateurs paieront par l'augmentation prévisible des abonnements aux services de communications.

Nous proposons de créer une taxe de 1 %, portant sur les recettes publicitaires et sur le chiffre d'affaires, qui permettrait de soutenir le financement de l'audiovisuel public, très fragilisé par le système choisi par le Gouvernement. Cet amendement, qui prévoit une taxe à l'assiette élargie, pourrait recueillir l'unanimité de notre assemblée. Mais n'oublions pas qu'il s'est trouvé de bonnes âmes pour ajuster à la baisse les taxes prévues par les articles 20 et 21 en reprenant des textes rédigés par le service juridique de TF1, « pauvre petite fille riche » qu'on souhaite apparemment rendre plus présentable pour de nouvelles noces... A défaut d'adopter cet amendement, le Sénat dévaluerait son rôle législatif en adoptant un dispositif financier qui tend à régler la question audiovisuelle de la manière la plus conforme aux intérêts du seul secteur privé.

Cet amendement a été rectifié pour ajouter l'édition et les sociétés de spectacle vivant aux secteurs exonérés.

M. le président.  - Amendement n°272, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, Voynet, MM. Desessard et Muller.

I. - Rédiger comme suit l'intitulé proposé par le I de cet article pour le chapitre VII septies du code général des impôts :

« Taxe sur les investissements publicitaires bruts et les chiffres d'affaires des opérateurs de communications

II. - Rédiger comme suit le I du texte proposé par le même I pour l'article 302 bis KG du code général des impôts :

« I. - Il est institué une taxe de 1 % sur les investissements publicitaires bruts et les chiffres d'affaires des opérateurs de communications. Sont exonérés la presse écrite, les sociétés mentionnées à l'article 44 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. »

Mme Marie-Christine Blandin.  - Cet amendement relève du même esprit. Le Sénat a rejeté l'amendement socialiste qui refusait la création d'une taxe pour lui préférer l'augmentation de la redevance. Puisque nous fabriquons une boîte à taxes et que l'argent public semble manquer alors que le standing du privé montre au contraire qu'il dispose de moyens importants, prélevons 1 % sur tous les investissements publicitaires et les chiffres d'affaires des opérateurs de communications.

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Avis défavorable : ces amendements mettent en péril l'équilibre général du texte.

Mme Christine Albanel, ministre.  - Même avis. Nous créerions un risque de délocalisation des régies publicitaires sur internet.

L'amendement n°149 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°272.

M. le président.  - Amendement n°152, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.

Dans le I du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KG du code général des impôts, après le mot :

éditeur

insérer le mot :

privé

Mme Odette Terrade.  - Le Gouvernement a unilatéralement décidé de supprimer la publicité sur le service public, avec pour conséquences un manque à gagner très important, une modification des programmes et des grilles, un bouleversement des marchés publicitaires. Cette décision importante, qui remettait en cause une disposition prise il y a quarante ans pour permettre le développement du secteur audiovisuel alors exclusivement public, a été imposée au conseil d'administration de France Télévisions : ce cadeau a été fait peu de temps avant Noël au commanditaire de ce projet de loi, le Président de la République.

Il est regrettable que nous soyons placés devant le fait accompli et qu'on nous demande en quelque sorte de sauver les apparences afin de faire disparaître cette détestable impression de coup de force. Nous devons craindre que les chaînes privées n'augmentent très fortement le prix des écrans publicitaires au cours de la plage horaire concernée et ne pratiquent une forme de dumping des écrans publicitaires le reste de la journée.

Ceci leur donnera une position quasi monopolistique sur le marché publicitaire aux heures de grande écoute. Alors que le service public est déjà considérablement fragilisé par ce texte, la question de la rupture d'égalité, que vous opposez à notre demande, ne tient pas. Restons-en à l'essentiel, protégeons le service public.

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Défavorable pour les raisons déjà invoquées. Votre amendement bafoue le principe d'égalité devant l'impôt.

L'amendement n°152, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président. - Amendement n°151, présenté par M. Ralite et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

Supprimer le II du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KG du code général des impôts.

M. Jean-François Voguet.  - Les arguments sont nombreux qui montrent que le service public de l'audiovisuel est sous-financé et que les taxations imposées à l'audiovisuel privé ne sont pas suffisantes, tant en termes de pourcentage sur les recettes publicitaires que d'assiette. Ce n'est que pur affichage. Nous avons tout à l'heure proposé un amendement visant à taxer non seulement les recettes mais le chiffre d'affaires. L'argument de la baisse du chiffre d'affaires, invoqué par M. Bouygues qui, à la tête d'une entreprise qui n'a jamais respecté son cahier des charges, poursuit son lobbying, ne change rien à l'effet d'aubaine. La taxe sur la publicité mérite donc d'être relevée.

M. le président.  - Amendement n°246 rectifié, présenté par M. Maurey.

Compléter la première phrase du II du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KG du code général des impôts par les mots :

, déduction faite des sommes versées en application de la taxe prévue à l'article 302 bis KC du présent code

M. Hervé Maurey.  - Il y a lieu d'exclure de l'assiette de la taxe créée par cet article les sommes versées par les éditeurs au titre des taxes destinées à financer l'industrie de programmes. Notre taxation sur le chiffre d'affaires, bien supérieure à ce qui a cours en Europe, est déjà de 10 %, auxquels viennent s'ajouter toutes les taxes destinées à alimenter les fonds de soutien. Évitons une double taxation, directe et indirecte, sur les mêmes sommes.

M. le président.  - Amendement identique n°426 rectifié, présenté par MM. Philippe Dominati, Bécot et Houel.

M. Philippe Dominati.  - Le rapporteur nous dit que l'équilibre auquel est parvenue l'Assemblée nationale ne peut être modifié. Mais nous venons de voter, même si je le déplore, une augmentation de la redevance qui apporte des recettes supplémentaires substantielles. Ce que nous proposons ici sera loin de les entamer et je pense que la commission devrait se réunir pour examiner à nouveau un certain nombre d'amendements à la lumière de cette situation nouvelle, qui crée une manne inattendue.

M. le président.  - Amendement n°427, présenté par MM. Philippe Dominati, Bécot et Houel.

I. - Compléter la première phrase du II du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KG du code général des impôts par les mots :

, déduction faite des frais de régie publicitaire dûment justifiés

II. - En conséquence, supprimer la seconde phrase du même II.

M. Philippe Dominati.  - Cet amendement procède du même esprit que le précédent. M. Assouline, de même que M. du Luart, a rappelé la grande incertitude qui pèse sur les recettes. Les chaînes de la TNT, qui font un gros effort, ont des frais de régie publicitaire plus importants, relativement, que les chaînes historiques. Qu'est-ce qui justifie le choix d'une réduction forfaitaire de 4 % sur la régie ? Nous proposons une déduction sur frais réels. Le coût en sera, je le redis, sans commune mesure avec le montant des recettes supplémentaires d'augmentation de la redevance.

M. Jacques Legendre, président de la commission.  - J'attire l'attention, à ce stade du débat, sur un point important de la philosophie de la commission. Ce n'est pas de gaieté de coeur que nous avons demandé à tous les assujettis un effort supplémentaire pour aider à équilibrer les moyens de la télévision publique. Je comprends la logique de certaines interventions, comme celle de M. Dominati, mais gardons-nous de nous engager dans un processus qui nous conduirait à réduire les recettes, sur les FAI par exemple. N'oublions pas que notre but, en augmentant la redevance, était bien d'assurer à France Télévisions un financement suffisant et non de réduire d'autres taxes.

M. le président.  - Amendement n°150, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer la seconde phrase du II du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KG du code général des impôts.

M. Jean-François Voguet.  - Il n'est en rien légitime d'accorder un abattement des frais de régie publicitaire sur la quotité de la taxe due par les sociétés privées de télévision sur leurs recettes publicitaires. La TVA, elle aussi assise sur le chiffre d'affaires, est-elle allégée d'aucun forfait représentatif de frais ? La seule réduction consentie porte sur les dépenses soumises elles mêmes à la taxe, soit rien qui ait à voir avec des dépenses de fonctionnement et encore moins de salaires.

Veut-on ajouter un abattement que rien ne justifie à l'effet d'aubaine dont vont déjà bénéficier les chaînes privées, qui n'auront qu'à accueillir des annonceurs devenus orphelins ?

M. le président.  - Amendement identique n°274, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, Voynet, MM. Desessard et Muller.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Comme M. Legendre, je me félicite des 4 euros supplémentaires que nous avons votés. Mais contrairement à lui, je pense que l'équilibre n'est pas assuré. Il faut encore trouver des ressources. D'où la suite d'amendements que je vous proposerai. Ici, il s'agit de supprimer un abattement qui ressemble à un bouclier fiscal au profit des publicitaires.

M. le président.  - Amendement n°186, présenté par M. Pozzo di Borgo.

Compléter le II du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KG du code général des impôts par un alinéa ainsi rédigé :

« Sont déduits de l'assiette de la redevance les investissements réalisés par les chaînes dans les programmes originaux, présentant les caractéristiques d'une oeuvre de création et notamment les documentaires audiovisuels présentant un caractère original résultant d'un travail de recherche ou d'investigation, en vue de favoriser la compréhension du monde contemporain, ainsi que les magazines réalisés en plateau, répondant aux mêmes critères.

M. Yves Pozzo di Borgo.  - Cet amendement vise à déduire de l'assiette de la taxe les investissements réalisés par les chaînes en faveur de la création audiovisuelle, au financement de laquelle elles ont l'obligation de contribuer.

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Défavorable à l'amendement n°151, pour les raisons déjà invoquées. Je comprends le raisonnement de M. Maurey, auteur de l'amendement n°246 rectifié, mais le groupe de travail qui sera mis en place en 2009 aura précisément mission de se pencher sur la question de l'ajustement. Retrait ? En ce qui concerne l'amendement n°426 rectifié, je dirai à M. Dominati que l'augmentation de la redevance ne portera ses fruits qu'en 2010.

Nous avons une clause de revoyure fin 2009 ; nous verrons alors comment aller de l'avant en 2010.

Avis défavorable à l'amendement n°427 : les frais réels sont très difficiles à estimer, il serait aventureux d'aller plus loin avant d'avoir fait le point. Même avis aux amendements nos150 et 274, l'abattement est une façon de moins pénaliser les chaînes émergentes, qui composent pour une bonne part la TNT. Avis défavorable enfin à l'amendement n°186, une contribution spécifique existe pour la création.

Vous l'aurez compris : nous avons souhaité un équilibre qui ménage les financements mais soit équitable ; nous verrons fin 2009 comment les choses auront évolué.

Mme Christine Albanel, ministre.  - Avis défavorable à l'amendement n°151 ; retrait des amendements nos246 rectifié et 426 rectifié pour les mêmes raisons que la commission ; défavorable au n°427, qui ne serait pas équitable. Même avis aux amendements nos150 et 274, l'abattement se justifie par le fait que les sommes versées par les annonceurs ne bénéficient pas en totalité aux chaînes. Défavorable enfin au n°186, qui mettrait à mal l'équilibre trouvé pour France Télévisions ; mieux vaut en outre, comme l'ont demandé producteurs et auteurs, laisser la définition du documentaire de création au CSA.

Mme Catherine Tasca.  - Après les réponses de la commission et du Gouvernement, la preuve est faite, si besoin en était, que nous légiférons la tête dans un sac ! Le Gouvernement a mis la charrue avant les boeufs ! Sur toutes les questions, son incapacité à donner des réponses claires sur les perspectives économiques et financières est flagrante ! C'est d'autant plus grave en cette période de séisme économique. Ce texte a été élaboré avec un volontarisme proprement stupéfiant, sans approche économique sérieuse ! La mise en place d'une commission sur la redevance est un aveu d'incurie : le Gouvernement a lancé un train sans savoir qui allait y monter.

M. Jack Ralite.  - L'improvisation est désormais patente. Il est impossible de rendre cohérent le chaos mental de l'initiateur de ce texte. On débat de ce qu'il faut faire ou ne pas faire, on se préoccupe du sort des fournisseurs d'accès, on veut que TF1 ne soit pas trop touchée... On va bientôt nous proposer une échelle mobile des taxes alors qu'on ne parle jamais d'une échelle mobile des salaires ! Il faut mettre un peu de morale dans tout ça ! Qui se soucie des conséquences pour les travailleurs de France Télévisions ? TF1 est en difficulté ? Lorsque j'étais salarié, je ne me suis jamais posé de questions sur l'origine de l'argent qui payait mon salaire ! Comme ils doivent rire, TF1 et les FAI ! Ils peuvent danser comme sur le pont d'Avignon ! Sauf que nous, nous voulons aller sur l'autre rive !

Voilà pourquoi nous avons déposé un amendement unifiant tout, un amendement indiscutable : une taxe de 1 % sur tous les investissements publicitaires. L'intérêt national y gagnera, le service public y gagnera, peut-être TF1 y gagnera-t-elle, peut-être les FAI y perdront-ils, mais tout le monde sera touché, sauf la culture. Aujourd'hui ça va mal ; mais quand ça allait bien, M. Le Lay allait quand même se plaindre à Bruxelles ! Tout le monde doit prendre sa part.

L'amendement n°151 n'est pas adopté.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, les amendements identiques nos246 rectifié et 426 rectifié, mis aux voix par assis et levés, sont adoptés.

Mme Christine Albanel, ministre.  - Je demande un scrutin public sur l'amendement n°427. (On s'interroge sur les bancs socialistes)

M. Philippe Dominati.  - Nous ferons le point ultérieurement. Je retire l'amendement.

Mme Isabelle Debré.  - C'est sage.

L'amendement n°427 est retiré.

Les amendements identiques nos150 et 274 ne sont pas adoptés.

M. Yves Pozzo di Borgo.  - Que la commission des affaires culturelles institue un groupe de travail à chaque fois que nous débattons d'un problème important -en l'espèce, une taxe- n'est pas de bonne méthode. Fort de l'expertise de la commission des finances et de celle de la Cour des comptes, nous avions les moyens d'estimer les besoins du nouveau service public de l'audiovisuel. Avec la dernière réforme constitutionnelle et le renforcement du Parlement, nous devons davantage jouer notre rôle d'expertise. Que le Parlement reprenne son autorité ! Je maintiens donc l'amendement n°186, malgré les explications du président de la commission.

M. Jacques Legendre, président de la commission.  - La longueur de ces débats, la fatigue entament notre capacité à rester cohérents. Mme Tasca a souligné la faible visibilité dont nous disposons actuellement en raison de la crise. Est-ce une raison pour que les parlements arrêtent de légiférer ?

Mme Catherine Tasca.  - Ce n'était pas mon propos !

M. Jacques Legendre.  - Il faut suivre au plus près la situation pour corriger les erreurs d'appréciation commises. D'où les nombreuses clauses de revoyure -je n'aime pas le terme, mais il est clair- prévues dans ce texte. Je tenais à souligner ce point, compte tenu du vote peu cohérent qui vient d'intervenir. Après avoir défendu un financement pérenne du service public, il est pour le moins paradoxal de supprimer une partie de ses recettes.

Mme Christine Albanel, ministre.  - Le Gouvernement a prévu de compenser la perte de 450 millions induite par la suppression de la publicité en instituant deux taxes. L'une d'entre elles porte sur les revenus publicitaires des chaînes privées. Leur demander de participer davantage est légitime quand nous leur ouvrons les vannes publicitaires. Réduire l'assiette de cette taxe est regrettable, c'est un cadeau aux chaînes privées !

L'amendement n°186 n'est pas adopté.

La séance est suspendue à 19 h 50.

présidence de M. Guy Fischer, vice-président

La séance reprend à 22 heures.

M. le président.  - Amendement n°154, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.

Dans la première phrase du premier alinéa du IV du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KG du code général des impôts, remplacer le taux :

3 %

par le taux :

5 %

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Pour certains, la création de taxes frappant les recettes publicitaires des chaînes de télévision privée était insupportable au point de justifier des compensations !

Nous avons déjà souligné que le prétendu nouvel équilibre défini dans ce projet de loi faisait en réalité la part belle aux opérateurs privés, surtout après le vote de l'Assemblée nationale qui a minoré les taxes servant à gager la suppression de la publicité.

Les recettes publicitaires des chaînes privées progresseront en 2009, ne serait-ce que grâce au quasi-monopole publicitaire dont elles jouiront. De surcroît, on envisage de plus en plus une seconde coupure publicitaire pendant les programmes de première partie de soirée. Je doute fort que Visconti ou Fellini soient diffusés par TF1 ou M6 au cours des mois à venir, vu le profond mépris du téléspectateur qui préside à la conception des grilles sur ces réseaux. Assurément, nous sommes loin du crépuscule des jeux et du « mieux-disant culturel » invoqué par Bouygues en 1986 pour l'acquisition de TF1.

Comme ces chaînes verront leur chiffre d'affaires croître et embellir, sans fournir aucun effort de qualité ni de programmation, il est normal de les taxer.

M. le président.  - Amendement identique n°275, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, Voynet, MM. Desessard et Muller.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Conformément à la ligne simple que j'ai déterminée, le mieux ne sera jamais trop beau pour l'audiovisuel public, surtout lorsqu'il s'agit de prélever sur les recettes des chaînes privées, peu soucieuses de qualité mais qui sont florissantes grâce aux cadeaux dont elles ont bénéficié. M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Avis défavorable, pour les raisons déjà indiquées.

Les amendements identiques nos154 et 275, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°276, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, Voynet, MM. Desessard et Muller.

Après les mots :

un taux de 3 %

rédiger comme suit la fin du premier alinéa du IV du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KG du code général des impôts :

au chiffre d'affaires annuel, hors taxe sur la valeur ajoutée, des chaînes de télévision privée.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Même objet. Il y a deux façons d'accroître les ressources : augmenter les taux ou étendre l'assiette.

Nous proposons ici de taxer l'ensemble du chiffre d'affaires annuel.

M. le président.  - Amendement n°155, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.

Après les mots :

taux de 3 %

rédiger comme suit la fin de la première phrase du premier alinéa du IV du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KG du code général des impôts :

au chiffre d'affaire annuel, hors taxe sur la valeur ajoutée, des chaines de télévision privées.

Amendement n°157, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.

Après les mots :

taux de 3 %

rédiger comme suit la fin de la première phrase du premier alinéa du IV du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KG du code général des impôts :

au montant des versements annuels, hors taxe sur la valeur ajoutée, afférent à chaque service de télévision.

Amendement n°156, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.

Dans la première phrase du premier alinéa du IV du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KG du code général des impôts, remplacer le montant :

11  millions

par le montant :

5 millions

M. Jean-François Voguet.  - Des seuils ont été introduits pour que la nouvelle taxe ne mette pas mettre en difficulté de petits opérateurs de télévision. Concrètement, tant que les chaînes du réseau numérique terrestre n'obtiennent que peu de recettes publicitaires, elles seront exonérées.

Cette disposition ne nous semble pas bienvenue. Ainsi, la chaîne Direct 8 ne doit pas être dispensée sous prétexte que la publicité ne lui rapporte que 2 millions d'euros, le déficit comptable atteignant 38 millions. Or, tout est fait pour que les sociétés exploitant des canaux numériques échappent à toute taxation, comme, d'ailleurs, à la moindre exigence de programmation ou de production.

Soyons clairs : le développement du numérique terrestre va aujourd'hui de pair avec l'arrivée de chaînes servant de robinet diffusant des images sui l'ont déjà été à de multiples reprises, sans aucune création. La logique fiscale qui préside à l'application de la nouvelle taxe préserve trop cette conception de la télévision. Le réseau numérique terrestre devrait contribuer au développement du secteur public audiovisuel, ne serait-ce que parce que l'essentiel des investissements nécessaires en ce domaine est supporté par la collectivité.

Ces trois amendements relèvent donc du bon sens.

M. le président.  - Amendement identique n°277, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, Voynet, MM. Desessard et Muller.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Nous ne partageons pas les choix frustes du Gouvernement quant aux ressources de l'audiovisuel public, non plus que la prudence de certains collègues envers de petites chaînes émergentes qui n'apportent rien à la création.

Certaines chaînes de la TNT sont jeunes, mais elles se développent très vite puisque certaines ont doublé leurs recettes publicitaires en un an. Elles peuvent donc être mises à contribution sans péril.

M. le président.  - Amendement n°158, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer la dernière phrase du premier alinéa du IV du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KG du code général des impôts.

Mme Odette Terrade.  - De façon en apparence contradictoire avec ce que nous venons de dire, nous proposons ici de prendre en compte la situation des opérateurs car les recettes publicitaires de certaines chaînes thématiques sont modestes. Simultanément, il serait paradoxal de modifier un dispositif déjà brinquebalant pour limiter le prélèvement sur les ressources des opérateurs plus opulents.

La taxe doit donc prendre en compte la capacité contributive de chacun, quitte à ce que le taux soit parfois très faible.

M. le président.  - Amendement n°273, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, Voynet, MM. Desessard et Muller.

Dans la seconde phrase du premier alinéa du IV du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KG du code général des impôts, après les mots :

service de télévision

insérer le mot :

privée

Mme Marie-Christine Blandin.  - Nous voulons corriger un paradoxe. La rédaction actuelle mentionne le « service de télévision », sans préciser « privé » ou « public », alors que cette taxe doit précisément fournir de nouvelles recettes au service public. En outre, les recettes publicitaires de l'audiovisuel public sont déjà érodées.

M. le président.  - Amendement n°245 rectifié, présenté par MM. Maurey, Amoudry, Détraigne et Deneux.

Après les mots :

fixé à

rédiger comme suit la fin de la seconde phrase du premier alinéa du IV du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KG du code général des impôts :

0,5 % en 2009, 1 % en 2010 et 1,5 % en 2011, et ce jusqu'à l'extinction complète de la diffusion hertzienne terrestre en mode analogique sur le territoire national.

M. Hervé Maurey.  - Les nouvelles chaînes de la TNT sont en phase d'investissement, avec des résultats lourdement déficitaires, puisque leur déficit cumulé dépasse 250 millions d'euros. En outre, leur chiffre d'affaires publicitaire est très inférieur à celui de TF1, qui avoisine 1,6 milliard d'euros.

L'application d'un taux unique sera justifiée après le basculement de la diffusion analogique vers la diffusion numérique. C'est pourquoi l'Assemblée nationale a introduit l'unification des taux à l'horizon 2012.

Nous vous proposons donc d'augmenter progressivement le taux de la taxe pour passer de 0,5 % en 2009, à 1 % en 2010 et 1,5 % en 2011. Il n'est pas normal que les nouvelles chaînes de la TNT acquittent une taxe supérieure à celle des autres chaînes analogiques.

L'amendement n°181 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°420, présenté par MM. Philippe Dominati, Bécot et Houel.

Après le taux :

1,5 %

rédiger comme suit la fin de la seconde phrase du premier alinéa du IV du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KG du code général des impôts :

jusqu'en 2011

M. Philippe Dominati.  - Comme vient de le dire mon collègue, il est tout à fait anormal que les chaînes de la TNT acquittent une taxe supérieure à celle des chaînes analogiques. Il est d'autant plus important de fixer à 1,5 % le taux du prélèvement pour toutes les chaînes que le déséquilibre du marché de la publicité va faire de la France une exception car les deux principales chaînes privées capteront près de 75 % de la publicité.

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - L'avis est défavorable sur les amendements nos276 et 155 car les recettes publicitaires liées à un effet d'aubaine méritent d'être taxées. Même avis défavorable sur les amendements nos157, 156 et 277 car cet abattement servira les intérêts des nouvelles chaînes de la TNT. Même avis pour l'amendement n°158 car il faut que la taxe sur les chaînes de la TNT entre en vigueur de façon progressive pour accompagner leur développement. Rejet de l'amendement n°273 car nous privilégions le principe d'égalité. Même avis sur l'amendement n°245 rectifié car le texte de l'Assemblée nous parait équilibré. Enfin, avis défavorable sur l'amendement n°420.

Mme Christine Albanel, ministre.  - Je suis également défavorable sur tous les amendements : les amendements nos276 et 155 alourdiraient à l'excès la taxe qui porte sur les chaînes, l'amendement n°157 supprimerait le seuil de 11 millions, ce qui fragiliserait les chaînes les plus modestes, les amendements identiques nos156 et 277 fragiliseraient les chaînes, les amendements nos158 et 273 provoqueraient une rupture d'égalité. Enfin, je suis défavorable aux amendements nos245 rectifié et 420.

L'amendement n°276 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos155 et 157.

Les amendements identiques nos156 et 277 ne sont pas adoptés, non plus que l'amendement n°158.

Mme Marie-Christine Blandin.  - M. le rapporteur et Mme la ministre souhaitent que les recettes de la télévision publique proviennent, en partie, des recettes publicitaires de ces mêmes télévisions ! Que se passera-t-il lorsque la publicité sera définitivement interdite sur ces chaînes ? France Télévisions n'aura plus de recettes publicitaires et ne disposera plus de la ressource des taxes sur sa propre publicité. Ce projet de loi ne s'est absolument pas projeté dans le futur : on ne sait pas de quelles sommes on parle, on ne sait pas combien d'argent manquera. Je maintiens bien évidemment mon amendement. (Applaudissements à gauche)

L'amendement n°273 n'est pas adopté.

L'amendement n°245 rectifié est retiré.

L'amendement n°420 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°153, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer le second alinéa du IV du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KG du code général des impôts.

M. Jean-François Voguet.  - Avec la suppression de la publicité sur les chaînes publiques, les télévisions privées vont en récupérer une bonne partie. Mais comme vous ne voulez pas trop les taxer, en oubliant au passage que les téléspectateurs sont aussi les consommateurs qui payent, in fine, la publicité, vous limitez les nouvelles contraintes fiscales.

D'ailleurs, si les chaînes privées n'enregistrent pas de progression de leurs recettes publicitaires, elles échapperont en grande partie à toute nouvelle taxation.

La main sur le coeur, vous promettez qu'en cas d'insuffisance de recettes, vous verserez la compensation financière prévue à l'article 18. Mais que ferez-vous si les 473 millions attendus ne sont pas au rendez-vous ? Continuerez-vous à prendre en charge les exonérations de redevance audiovisuelle ? Affecterez-vous d'autres recettes fiscales ?

Vous ne nous dites pas la vérité sur les réalités comptables, financières et politiques bien moins reluisantes. La suppression de cet alinéa permettra de nous prémunir contre une éventuelle insuffisance des ressources.

M. le président.  - Amendement identique n°376, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste et apparentés.

M. Claude Domeizel.  - Cet alinéa, ajouté par l'Assemblée nationale, ne répond à aucune exigence économique ou culturelle. Il permet simplement de conforter encore davantage les intérêts des chaînes historiques privées jusqu'à l'extinction de l'analogique en métropole au détriment des nouveaux entrants.

Avec cette disposition, les services dont les dépenses publicitaires sont en plein essor se verront appliquer le taux maximal de la taxe tandis que ceux bénéficiant d'années d'expérience et de recettes stabilisées payeront, du fait de la faible progression de leurs recettes, un taux minimal de 1,5 %.

Encore une fois, les intérêts de TF1 et de M6 se trouvent confortés alors que leur situation est florissante. A l'inverse, les chaînes nouvellement entrées dans la TNT, en phase d'expansion mais à l'économie encore fragile, devront acquitter une taxe de 3 %.

Ce projet de loi distribue ainsi les cadeaux aux chaînes amies du Président de la République au détriment de l'intérêt du téléspectateur et du pluralisme.

Désormais, chaque modification de la loi de 1986 est l'occasion de favoriser les chaînes historiques privées : octroi d'une chaîne bonus et mise en place d'une clause de must deliver au profit des opérateurs historiques en 2004, autre chaîne bonus à l'extinction de l'analogique et prorogation de cinq ans des autorisations d'émettre dans la loi de 2007, innombrables assouplissements du dispositif anti-concentration permettant à TF1 de conforter sa position dominante et mettant en péril le respect du pluralisme dans l'audiovisuel.

Cette disposition viendra encore garnir la hotte du Père Noël pour TF1 !

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Avis défavorable : étant donné l'état du marché publicitaire, la modulation du taux de la taxe est une nécessité. La crise économique va amputer les recettes publicitaires des chaînes privées et mettre en péril leur équilibre économique. Nous devons nous soucier du sort de leurs salariés.

Mme Christine Albanel, ministre.  - Avis défavorable. Il faut se contenter de taxer raisonnablement les surplus de recettes, pas les éventuels déficits.

M. David Assouline.  - Les arguments de M. le rapporteur et de Mme la ministre ne me convainquent guère. Le projet de loi initial ne prévoyait d'ailleurs pas cette modulation. Ce changement de pied est dû à l'intense lobbying de TF1 à l'Assemblée nationale.

La modulation est une injustice. Il aurait été concevable de ramener le taux à 1,5 % pour toutes les chaînes : nous aurions pu comprendre l'argument économique selon lequel il est nécessaire de ne pas surtaxer ces entreprises. Mais un taux variable pénalisera les petites chaînes, notamment celles de la TNT qui sont actuellement en plein essor, au profit des grosses chaînes historiques qui croissent plus lentement ; or ce sont ces dernières qui capteront l'essentiel de la manne publicitaire libérée par France Télévisions. Soyons sérieux : TF1 a des assises économiques et des soutiens solides ! Sans doute pâtira-t-elle quelque peu de la crise, comme toutes les entreprises. Mais la solution pour sortir de la crise, c'est justement d'aider massivement à l'innovation et de soutenir les petites entreprises dynamiques. J'y reviendrai à propos de la taxe sur les fournisseurs d'accès : c'est un calcul à courte vue que de taxer les secteurs nouveaux pour stabiliser les anciens.

L'amendement n°153, identique à l'amendement n°376, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°40, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.

I. - Compléter le IV du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KG du code général des impôts par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le cas des messages publicitaires visant un marché mondial, l'assiette retenue pour le calcul de la taxe est pondérée au prorata de l'audience française par rapport à l'audience mondiale visée par ces messages. Il appartient au redevable d'apporter les éléments permettant de bénéficier de cette réduction d'assiette. »

II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les pertes de recettes résultant pour l'État de la pondération de l'assiette retenue pour le calcul de la taxe sur la publicité au prorata de l'audience française par rapport à l'audience mondiale pour les messages publicitaires visant un marché mondial sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Cet amendement concerne la chaîne Euronews, installée en France mais qui diffuse dans de nombreux pays. L'effet d'aubaine occasionné par le transfert des recettes publicitaires de France Télévisions vers le secteur privé lui profitera peu : elle n'en bénéficiera que pour la part française de son audience totale, soit environ 7 %. Il ne serait pas équitable de la taxer sur l'ensemble de ses recettes publicitaires : c'est pourquoi nous proposons de réduire l'assiette de la taxe à 7 % du montant des versements annuels.

M. le président.  - Sous-amendement n°458 rectifié à l'amendement n°40 rectifié de Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles, présenté par le Gouvernement.

Rédiger comme suit le second alinéa du I de l'amendement n°40 :

« Pour les éditeurs de services de télévision dont l'audience quotidienne réalisée en dehors de la France métropolitaine est supérieure à 90 % de leur audience totale, le montant à retenir pour le calcul de la taxe est diminué du montant des sommes versées pour la diffusion de messages publicitaires destinés au marché européen ou mondial multiplié par la part dans l'audience totale annuelle de l'audience obtenue en dehors de la France métropolitaine. »

Mme Christine Albanel, ministre.  - Ce sous-amendement part du constat qu'Euronews a son siège à Lyon. Il vise à faire en sorte que seule la part française des recettes publicitaires de la chaîne soit taxée, et non les recettes pour les publicités destinées aux versions étrangères.

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Ce sous-amendement va dans le sens souhaité par la commission. Celle-ci n'a pas eu le temps de l'examiner, mais j'y suis à titre personnel très favorable.

Le sous-amendement n°458 rectifié est adopté, le groupe socialiste s'abstenant.

Mme Christine Albanel, ministre.  - Je lève le gage sur l'amendement.

M. le président.  - Ce sera donc l'amendement n°40 rectifié.

L'amendement n°40 rectifié est adopté, le groupe socialiste s'abstenant.

M. le président.  - Amendement n°229 rectifié, présenté par MM. Maurey, Amoudry, Détraigne et Deneux.

Supprimer le III de cet article.

M. Hervé Maurey.  - Cet amendement tire la conséquence d'un autre amendement adopté à l'article 18 : il tend à supprimer l'obligation faite au Gouvernement de présenter au Parlement un rapport sur le seul problème de la taxe sur la publicité payée par les chaînes de télévision. Plutôt qu'un empilement de rapports, il serait plus approprié que le Gouvernement nous remette un rapport global sur l'application de la loi avant l'entrée en vigueur de la deuxième étape.

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Sagesse. Je comprends la démarche de notre collègue, mais il serait tout de même souhaitable que le Gouvernement nous remette rapidement un rapport sur ce sujet. Il est vrai que beaucoup de rapports sont prévus, et qu'il faudrait veiller à inclure les sous-rapports dans de plus grands rapports.

Mme Christine Albanel, ministre.  - Sagesse.

M. Hervé Maurey.  - M. le rapporteur le reconnaît lui-même : trop de rapports tuent les rapports. Mieux vaut renoncer à celui-ci et prévoir la remise d'un vrai rapport qui nous permettra de mettre en oeuvre la fameuse clause de revoyure et de nous prononcer en toute lumière sur la poursuite de la réforme.

A la suite d'une épreuve à main levée, déclarée douteuse, l'amendement n°229 rectifié, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

L'article 20, modifié, est adopté.

Article additionnel

M. le président.  - Amendement n°431, présenté par M. Philippe Dominati.

Après l'article 20, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 48-1-A de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 précité est ainsi rédigé :

« Art. 48-1-A. - Les programmes et les services de médias audiovisuels à la demande des sociétés mentionnées à l'article 44 ne peuvent faire l'objet d'un droit exclusif de reprise, dès lors que ce droit exclusif aurait pour effet de restreindre le public pouvant accéder à ces reprises. »

M. Philippe Dominati.  - Nous avions déjà abordé cet été, à l'occasion de l'examen de la loi de modernisation de l'économie, la question de la « télévision de rattrapage », c'est-à-dire des offres qui permettent aux téléspectateurs de voir ou de revoir une émission dans un délai de sept à trente jours à compter de la date de diffusion initiale. Mme Dumas, MM. Valade, de Broissia, Longuet et moi-même avions alors alerté le Gouvernement sur un accord d'exclusivité conclu à ce sujet entre France Télévisions et Orange : il nous paraissait scandaleux que les droits sur des émissions financées grâce à des fonds publics soient détenus à titre exclusif par tel ou tel fournisseur d'accès. Le Gouvernement avait promis de reconsidérer la question à l'occasion du débat sur l'audiovisuel public : nous y sommes. J'ai donc repris à l'identique le texte de l'amendement déposé en juillet, qui avait recueilli un large accord sur tous les bancs de cette assemblée.

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Nous comprenons vos arguments, mais nous avons voté à l'article 15 un amendement qui prévoit notamment que la télévision de rattrapage sera gratuite sur les chaînes publiques. Aujourd'hui, nous avons un amendement qui rend caduc l'accord d'exclusivité passé entre Orange et France Télévisions. Cet accord a été très discuté, mais le Conseil de la concurrence l'a validé, en considérant que l'exclusivité permettait de lancer des services coûteux à mettre en place.

Fin 2011, l'amendement proposé par votre commission rendra gratuite la télévision de rattrapage ; en revanche, il n'est pas bon que le législateur mette fin de lui-même à des contrats négociés dans le respect du droit existant.

Avis défavorable, compte tenu de l'amendement voté à l'article 15 et des accords en cours.

Mme Christine Albanel, ministre.  - Avis défavorable pour les raisons exposées par le rapporteur. L'exclusivité procure une ressource de diversification et n'empêche pas les programmes d'être disponibles sur le site de France Télévisions.

M. David Assouline.  - Sur le principe général, j'ai tendance à être d'accord avec M. Dominati : France Télévisions ne doit pas financer une exclusivité payante. Mais ai-je bien compris le rapporteur quand il nous dit que l'accord permettra à France Télévisions de financer la plate-forme d'une télévision de rattrapage mais qu'il ne sera pas possible de le renouveler en 2012 ?

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Nous estimons en effet qu'il vaut mieux, pour des raisons de logique économique, ne pas interrompre l'accord conclu entre France Télévisions et Orange car l'amendement voté à l'article 15 prévoit qu'à son échéance, France Télévisions devra une télévision de rattrapage gratuite à ses téléspectateurs.

Mme Christine Albanel, ministre.  - L'exclusivité s'achève en 2011 mais les ressources qu'elle apporte financent des investissements importants. Il serait dommage d'en priver France Télévisions alors que le Conseil de la concurrence vient d'approuver cet accord. Je souhaiterais donc le retrait de l'amendement.

M. Gérard Longuet.  - J'avais du mal à comprendre l'argument de la plate-forme car France Télévisions aurait pu obtenir autant en négociant sans exclusivité avec d'autres opérateurs : elle gagne de l'argent mais Orange en gagnera plus pendant trois ans. On touche là le problème, que nous retrouverons, de la distribution sélective appliquée à l'audiovisuel.

Mme Catherine Tasca.  - C'est l'intérêt de France Télévisions qui nous guide. Or la société aurait pu faire l'économie de cette mesure transitoire si nous lui avions donné les moyens de ses nouvelles missions. Nous la poussons tous à aller vers le média global et à offrir tout de suite de nombreux services mais nous ne lui assurons pas la capacité de les assumer seule. France Télévisions a donc mené avec Orange une négociation fructueuse...

M. Gérard Longuet.  - Les monopoles sont toujours fructueux...

Mme Catherine Tasca.  - Ne lui mettons pas de bâtons dans les roues. Cette situation se renouvellera : en privant France Télévisions des moyens nécessaires, nous l'obligeons à nouer des partenariats qui ne seront pas toujours conformes à nos souhaits.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis.  - Je rejoins les explications de Mme Tasca et soutiens les arguments du rapporteur. L'accord triennal est une source de financement pour France Télévisions et il a été validé par le Conseil de la concurrence, pourtant très sourcilleux sur les problèmes d'exclusivité, d'abord parce que les programmes concernés sont très limités, entre 18 et 24 heures, ensuite parce que France Télévisions VOD reste accessible à tous, de sorte que le grand public n'est pas privé d'un accès à la demande à la diffusion des programmes de France Télévisions. Attendons 2012, comme le proposent les rapporteurs, pour remettre les compteurs à zéro.

M. Jean-Pierre Plancade.  - Je découvre ce soir des choses formidables : des libéraux comme MM. Dominati et Longuet se mêlent de la gestion de l'entreprise ! C'est nouveau et je salue cette évolution intéressante. Je ne me sens pas, quant à moi, autorisé à intervenir dans la politique commerciale de France Télévisions et d'Orange. Si l'accord, d'ailleurs de courte durée, qu'elle a passé avec Orange était léonin, il pourrait être remis en cause à tout instant, mais ce n'est pas le cas. Pourquoi le Parlement s'en mêlerait-il ?

L'amendement n°431 est retiré.

Article 21

I. - Au titre II de la première partie du livre Ier du code général des impôts, il est inséré un chapitre VII octies ainsi rédigé :

« CHAPITRE VII OCTIES

« Taxe sur les services fournis par les opérateurs de communications électroniques

« Art. 302 bis KH. - I. - Il est institué une taxe due par tout opérateur de communications électroniques, au sens de l'article L. 32 du code des postes et des communications électroniques, qui fournit un service en France et qui a fait l'objet d'une déclaration préalable auprès de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en vertu de l'article L. 33-1 du même code.

« II. - La taxe est assise sur le montant, hors taxe sur la valeur ajoutée, des abonnements et autres sommes acquittés par les usagers aux opérateurs mentionnés au I en rémunération des services de communications électroniques qu'ils fournissent.

« Sont toutefois exclues de l'assiette de la taxe :

« 1° Les sommes acquittées par les opérateurs au titre des prestations d'interconnexion et d'accès faisant l'objet des conventions définies au I de l'article L. 34-8 du même code ;

« 2° Les sommes acquittées au titre des prestations de diffusion ou de transport des services de communication audiovisuelle ;

« 3° Les sommes acquittées au titre de l'utilisation de services universels de renseignements téléphoniques mentionnés à l'article R. 10-7 du code des postes et des communications électroniques.

« III. - L'exigibilité de la taxe est constituée par l'encaissement du produit des abonnements et autres sommes mentionnées au II.

« IV. - La taxe est calculée en appliquant un taux de 0,9 % à la fraction du montant des encaissements annuels taxables, hors taxe sur la valeur ajoutée, qui excède 5 millions d'euros.

« V. - Les redevables procèdent à la liquidation de la taxe due au titre de l'année civile précédente lors du dépôt de la déclaration mentionnée au I de l'article 287 du mois de mars ou du premier trimestre de l'année civile.

« VI. - La taxe est recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe. »

II. - A la section 2 du chapitre Ier du livre II du même code, il est inséré un II sexies ainsi rédigé :

« II sexies. - Régime spécial des redevables de la taxe sur les services fournis par les opérateurs de communications électroniques

« Art. 1693 sexies. - Les redevables de la taxe prévue à l'article 302 bis KH acquittent cette taxe par acomptes mensuels ou trimestriels au moins égaux, respectivement, au douzième ou au quart du montant de la taxe due au titre l'année civile précédente.

« Le complément de taxe exigible au vu de la déclaration mentionnée au V de l'article 302 bis KH est versé lors du dépôt de celle-ci.

« Les redevables qui estiment que les acomptes déjà payés au titre de l'année atteignent le montant de la taxe dont ils seront en définitive redevables peuvent surseoir aux paiements des acomptes suivants. Si le montant de la taxe est supérieur de plus de 20 % au montant des acomptes versés, l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 et la majoration prévue à l'article 1731 sont applicables. »

III. - Dans un délai d'un an à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l'application du présent article, portant notamment sur le rendement effectif de la taxe prévue à l'article 302 bis KH du code général des impôts. Ce rapport propose, le cas échéant, les adaptations nécessaires de la présente loi.

M. Jack Ralite.  - Cet article introduit dans le code général des impôts un nouvel article afin d'instituer la taxe sur les opérateurs de communications électroniques, expliquent les rapporteurs. Son rendement sera autrement plus important que celui de la taxe dont nous venons de débattre à l'article précédent car les opérateurs de téléphonie mobile et fournisseurs d'accès à internet réalisent un chiffre d'affaires de 42,5 milliards et des marges particulièrement importantes. L'annonce de l'attribution de tout ou partie d'une quatrième licence UMTS -on murmure le nom de Free- crée les conditions d'une nouvelle progression de ce chiffre d'affaires. Une assiette large mais un impôt le plus faible possible, telle est l'esprit de cet article 21 qui restreint l'assiette de plusieurs milliards. Bien que l'Assemblée nationale ait réduit son taux, les trois quarts de la compensation proviendront de cette nouvelle taxe. Ne nous inquiétons donc pas outre mesure : elle représentera 27 centimes pour un abonnement mensuel de 30 euros. Les petits ruisseaux formant les grandes rivières, les opérateurs, attachés à leur modèle économique, souhaitent continuer à distribuer de généreux dividendes à leurs actionnaires.

Cette logique anime la rédaction de l'article 21.

La question essentielle est celle de la légitimité des opérateurs de communications électroniques à s'acquitter d'une nouvelle taxe sur le chiffre d'affaires. La réponse est positive si l'on considère leurs marges financières car il y a belle lurette que les investissements nécessaires au développement de la téléphonie sont amortis puisque l'argent public en a porté l'effort depuis 1945.

M. Gérard Longuet.  - Ce sont les usagers qui les ont financés ! L'État n'a pas versé un sou.

M. Jack Ralite.  - Et la logique de concurrence entre opérateurs s'oppose aux investissements nécessaires pour accroître justement la qualité de service. Douze ans après la loi sur la réglementation des télécoms, des zones demeurent plus ou moins blanches pour l'accès à la téléphonie mobile et à internet.

La taxe prévue par l'article 21 est dédiée sans l'être. Elle ira abonder les caisses de l'État qui compensera la suppression de la publicité, mais on substitue une recette à une autre sans résoudre le problème du sous-financement des sociétés nationales de programme. Les opérateurs de téléphonie ne sont que des fournisseurs d'accès, des « tuyaux » sans obligation de programme : il faudra bien qu'ils contribuent au financement des contenus.

Il aurait été préférable que cette taxe ne vise pas seulement à compenser la perte de ressources de l'audiovisuel public après réalisation des desiderata présidentiels. Elle n'apporte aucunes ressources supplémentaires aux sociétés nationales de programmes, rien ne leur garantit le versement de la compensation en temps et en heure, et elles risquent de subir des frais de trésorerie.

In fine, c'est au profit du compte de soutien à l'industrie des programmes (Cosip) et non du budget général que nous devrions créer cette nouvelle taxe.

Mme Bernadette Bourzai.  - La mise en place d'une taxe sur les services des opérateurs de communications électroniques aura pour conséquence une baisse des investissements, comme vient de l'exposer M. Ralite, ou une hausse de la facture de l'abonné. Il s'opérera en outre une distorsion de concurrence, car seules les sociétés ayant leur siège en France l'acquitteront. Les conséquences se feront sentir sur le développement de la fibre optique, du haut débit mobile et du numérique dans les zones les moins rentables, rurales ou de montagne notamment. Cette situation va aggraver la fracture numérique entre nos territoires.

Actuellement, la fourniture de services audiovisuels par des opérateurs de communications électroniques représente moins de 1 % de leur chiffre d'affaires : on veut faire d'un secteur peu concerné par ce projet de loi un des principaux contributeurs. Certaines de ces sociétés devraient être exclues du périmètre de la taxe, et l'assiette reposera sur le chiffre d'affaires et non sur la capacité contributive : ces éléments présentent un risque d'inconstitutionnalité, ainsi que Guy Carcassonne l'a signalé.

Il aurait été préférable de demander aux opérateurs de s'engager à réaliser les investissements nécessaires à la couverture numérique du territoire, au lieu d'en laisser souvent la charge aux collectivités territoriales : mon département finance une boucle haut débit qui permettra de couvrir 99 % de la zone. Ces investissements auraient pu s'intégrer au plan de relance de l'économie, qui ne comporte aucune mesure concernant l'économie numérique. Vous avez donc choisi d'instituer une taxe bien compliquée à mettre en oeuvre et juridiquement infondée, qui n'assurera peut-être pas la compensation intégrale des pertes de recettes de l'audiovisuel public.

M. le président.  - Amendement n°219 rectifié, présenté par MM. Maurey, Amoudry, Pozzo di Borgo et Deneux.

Supprimer cet article.

M. Hervé Maurey.  - J'ai déjà dit combien je trouve cette taxe inopportune et inadaptée. Il n'y a pas de rapport entre les télécommunications et la télévision, et la partie audiovisuelle des activités de ces opérateurs a été soustraite de la taxe.

Je citerai à l'appui de mon propos le rapport pour avis de la commission des affaires économiques, qui « s'étonne que, par l'institution de cette taxe, les opérateurs de communications électroniques assument 85 % du poids financier du changement de modèle économique de France Télévisions », d'autant plus qu'ils n'ont aucun bénéfice à en attendre. Ils contribuent en outre, depuis un an, au Cosip. « Il est paradoxal, à l'heure où la crise économique s'installe, de taxer un secteur que le Gouvernement lui-même qualifie de levier de la croissance pour l'avenir » et qui est décrit, dans le plan « France numérique 2012 », comme le « principal facteur de gain de compétitivité des économies développées ». « Le Gouvernement lui-même estime qu'un doublement des investissements dans l'économie numérique représenterait un point de croissance supplémentaire. »

La commission des affaires économiques craint que l'instauration de cette taxe n'ait pour effet de limiter les investissements réalisés par les opérateurs « dans le cadre du développement de leurs réseaux de communications électroniques, ce qui serait particulièrement préjudiciable à la croissance de demain » et aurait des conséquences en matière d'aménagement du territoire. Cela représenterait chaque année « l'équivalent de 380 000 foyers de moins raccordés à la fibre ».

La répercussion de la taxe sur les factures engendrerait « une hausse moyenne par foyer de 14,6 euros par an ». Les effets se feraient également sentir sur la compétitivité des opérateurs français face à la concurrence mondiale.

M. Gilles Carrez, rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale, a fait observer le défaut de cohérence de la stratégie fiscale des pouvoirs publics : « Alors que nous nous efforçons de supprimer les impôts qui pèsent sur le compte d'exploitation des entreprises, on créerait des taxes sur le chiffre d'affaires qui, à l'heure de la mondialisation et de la concurrence, ne devraient plus être à l'ordre du jour ! » Et je ne reviendrai pas sur les aspects constitutionnels.

J'ajouterai que l'Insee annonce la suppression de 170 000 emplois : il n'est pas très logique, dans ce contexte, de taxer un secteur qui réussit. Certains collègues de l'UMP, partisans des nouvelles technologies, sont mécontents que l'on taxe les ordinateurs, ce qui affectera plus particulièrement les jeunes. J'espère les retrouver avec moi contre cet article.

M. le président.  - Amendement identique n°377, présenté par M. Antoinette et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

M. David Assouline.  - Tant que le Gouvernement ne prendra pas ses responsabilités et ne trouvera pas un moyen de financement pérenne, garanti et affecté de l'audiovisuel public, nous restons attachés au mode de financement actuel de l'audiovisuel public.

La taxation des opérateurs de téléphonie pour compenser la perte de recettes publicitaires préalablement collectées par les chaînes du service public relève du bricolage et revient à faire supporter au téléphone le coût du cadeau fait à TF1 et M6. Comment justifier la création d'un impôt opposable à une catégorie d'acteurs économiques afin de financer la seule volonté présidentielle ? Pourquoi ne pas taxer les industries qui fabriquent des téléviseurs, plus étroitement liées au développement de la télévision que les opérateurs de télécommunications ? Seuls certains d'entre eux proposent une offre d'accès aux programmes de télévision, correspondant parfois à une obligation de transport au titre du must carry.

Il est économiquement indifférent pour l'opérateur que ses abonnés regardent une chaîne plutôt qu'une autre, de sorte que la suppression de la publicité sur France Télévisions leur est indifférente, d'autant plus que leur modèle économique est fondé sur les abonnements et les consommations.

Cette taxe, qui rompt l'égalité dans les charges publiques, pourrait bien s'attirer les foudres du Conseil constitutionnel.

J'ajoute que les conséquences, les opérateurs ne s'en cachent pas, en seront supportées par les consommateurs. Le manque à gagner se répercutera sur la facture et sur les décisions d'investissement. Si la facture des consommateurs augmente, les opérateurs se feront un plaisir de signaler dessus qu'il s'agit d'une taxe de l'État. Si les investissements destinés à la couverture terrestre sont affectés, ce seront les zones les moins rentables qui en feront les frais.

Les opérateurs ont des obligations, mais beaucoup de collectivités observent qu'ils se défaussent sur elles. Si on leur évite la taxe en se rendant à leurs arguments, ce sera le moment de les rappeler à leurs obligations.

M. le président.  - Amendement n°208, présenté par M. Retailleau.

Dans le IV du texte proposé par le  de cet article pour l'article 302 bis KH du code général des impôts, après le taux :

0,9 %

insérer les mots :

en 2009, 0,7 % en 2010 et 0,5 % en 2011

M. Bruno Retailleau.  - Quand il s'agit de taxer, on est saisi de deux reflexes : faire payer les gros ou les méchants. Dans le premier cas, le raisonnement économique n'est pas rationnel : parce qu'un secteur est dynamique, on prendrait sur lui pour compenser un autre secteur qui souffre de la suppression, que j'estime justifiée, de la publicité ? L'argument avancé pour justifier le deuxième est que les FAI vont faire de l'argent grâce aux programmes culturels. Je rappelle qu'ils payent une contribution au Cosip (compte de soutien à l'industrie des programmes audiovisuels), ainsi que le prévoit la loi de mars 2007 sur la télévision du futur. Ils payent aussi des droits d'accès pour la vidéo à la demande. Ils ont, M. Legendre pardonnera mon vocabulaire, une obligation de must carry, c'est-à-dire de véhiculer les contenus.

La décision de suppression de la publicité sera supportée à 85 % par des acteurs économiques qui n'ont rien à gagner de la suppression de la publicité sur les antennes du service public, à la différence des chaînes privées qui bénéficient d'un effet de transfert, puisque les entreprises télécom fonctionnent avant tout, non par la publicité, mais par les forfaits et les abonnements.

Surtout, l'assiette taxée n'a rien à voir avec l'image, puisqu'on a retiré tout ce qui est multiservice -ce qu'on appelle le « triple play ». L'assiette ne comprend que 3 % de services audiovisuels.

Je propose donc que la taxe soit dégressive. Son objectif, après tout, n'est pas de permettre à Bercy de trouver des moyens nouveaux de réduire l'endettement de l'État. M. Thiollière a raison de dire qu'elle n'a pas vocation à perdurer telle quelle et devra être ajustée, pour tenir compte des dynamiques engagées par ce texte. J'espère qu'à la fin de la CMP, les calculs nécessaires seront faits pour prévoir les ajustements d'une taxe qui n'a pas vocation à prospérer d'année en année.

M. le président.  - Amendement n°209 rectifié, présenté par MM. Retailleau, Maurey et Hérisson.

Dans le texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KH du code général des impôts :

A. Compléter le premier alinéa du II par les mots :

, déduction faite du montant annuel des investissements desdits opérateurs dans les infrastructures et les réseaux de communications électroniques établis sur le territoire national.

B. En conséquence, au IV, remplacer les mots :

du montant des encaissements annuels taxables, hors taxe sur la valeur ajoutée,

par les mots :

de l'assiette visée au II

M. Bruno Retailleau.  - Mettons au moins un peu de vertu dans cette taxe, pour qu'elle ne décourage pas les investissements et ne pénalise pas la croissance. Plus de taxe, cela veut dire moins d'investissement, sauf si on les exonère. Encourager la couverture terrestre et le développement de la fibre fait partie des priorités gouvernementales. Le Premier ministre a réuni un comité gouvernemental lundi sur ce sujet. Qui, d'entre les élus que nous sommes, n'a pas, sur son territoire, des zones mal couvertes ?

M.Le président  - Sous-amendement n°459 à l'amendement n° 209 rectifié de M. Retailleau, présenté par Mme Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires culturelles.

Après les mots :

faite du

rédiger comme suit la fin du second alinéa du A de l'amendement n°209 rectifié:

montant des dotations aux amortissements comptabilisés au cours de l'exercice clos au titre de l'année au cours de laquelle la taxe est devenue exigible, lorsqu'ils sont afférents aux matériels et équipements acquis à compter de l'entrée en vigueur de la loi n°      du      relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision par les opérateurs pour les besoins des infrastructures et réseaux de communications électroniques établis sur le territoire national et dont la durée d'amortissement est au moins égale à dix ans.

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Je souhaite présenter un sous-amendement à votre proposition, en rappelant auparavant la position de la commission sur cet article. Elle n'est ni taxophile, ni taxophobe et ne va à rien d'autre qu'à rechercher les moyens de financer l'audiovisuel public.

M. Jacques Legendre, président de la commission.  - Eh oui !

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Il faut trouver une ligne pragmatique pour que chacun s'y retrouve. C'est pourquoi nous serons défavorables à la suppression de l'article -avec les FAI, on arrive à 380 millions sur un budget de 450 millions- de même que nous ne suivrons pas les amendements visant à restreindre l'assiette ou à réduire le taux.

Sur cet amendement, nous avons beaucoup réfléchi. Il faut tenir compte des réalités territoriales. Certaines zones ne sont pas couvertes, des investissements lourds sont prévus. Les citoyens, qui acquittent des impôts substantiels, ont le droit de vivre sur des territoires équipés.

L'argument de l'équipement harmonieux du territoire nous a touchés et l'amendement n°209 rectifié nous a intéressés. Mais nous ne voulons pas que soit mis en péril ce que nous avons voté aujourd'hui, en particulier l'augmentation de deux euros de la redevance pour un produit de 40 millions d'euros. Or la proposition de M. Retailleau revient à diminuer le produit de la taxe de 20 millions. D'où notre sous-amendement qui rend l'amendement opérationnel sans remettre en cause ni nos votes antérieurs, ni les efforts politiques que certains ont dû faire pour les obtenir.

M.le président.  - Amendement n°188 rectifié, présenté par M. Retailleau, au nom de la commission des affaires économiques.

Compléter le I du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KH du code général des impôts par les mots :

, et qui réalise un chiffre d'affaires annuel supérieur à 200 millions d'euros.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis.  - Nous avons en France une dizaine d'opérateurs mobiles virtuels qui n'ont pas de réseau propre et achètent des minutes de communication aux trois grands opérateurs ; ils sont petits mais ils font vivre le marché et la concurrence, ce qui est bon pour le pouvoir d'achat. Leur part de marché est d'à peine 5 % et elle a tendance à se réduire. Il faut les encourager.

M. le président.  - Amendement n°221 rectifié, présenté par MM. Maurey, Biwer, Amoudry, Deneux, Détraigne, Pozzo di Borgo et Jean-Léonce Dupont.

Compléter le premier alinéa du II du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KH du code général des impôts par les mots :

, déduction faite des investissements réalisés par les opérateurs pour poursuivre et améliorer la couverture numérique du territoire, tant en téléphonie mobile qu'en Internet haut débit et très haut débit

M. Hervé Maurey.  - Tous les sénateurs, tous les élus, hélas, connaissent des problèmes de couverture numérique, ce qui n'est pas sans conséquence pour l'aménagement du territoire, le développement économique, et parfois la sécurité. On peut regretter que l'État n'ait pas pris le problème à bras-le-corps et que les collectivités territoriales aient été contraintes de réaliser des investissements coûteux.

Le Gouvernement a lancé en octobre un plan ambitieux, France numérique 2012, qui reconnaît enfin l'internet haut débit comme une commodité au même titre que l'eau et l'électricité. Mais on ne peut vouloir améliorer la couverture du territoire et taxer les opérateurs d'une manière qui pourrait l'empêcher. D'où cet amendement qui rend la taxe vertueuse, comme l'a dit M. Retailleau. La mission des opérateurs est d'assurer cette couverture, non de financer l'audiovisuel.

M. le président.  - Amendement n°159, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer les deuxième à dernier alinéas du II du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KH du code général des impôts.

M. Jack Ralite.  - Cet amendement porte sur l'assiette de la taxe, le suivant portera sur sa quotité.

Nous sommes sans équivoque partisans de la taxation des opérateurs. Si j'ai bien compris, on nous demande d'être vertueux avec France Télécom ; ma priorité, c'est d'être vertueux avec France Télévisions. Cette taxation apparaît à certains comme un alourdissement des prélèvements obligatoires ; mais ceux qui poussent des cris d'orfraie n'ont de cesse d'augmenter les taxes frappant la consommation populaire et les ménages les plus modestes...

Le secteur des télécommunications est à part, qui bat année après année des records de rentabilité des investissements -la valeur ajoutée y représente les trois quarts du chiffre d'affaires-, ce qui laisse songeur quand on connaît le coût des services offerts. Nous avons affaire à des sociétés de réseaux, exploitant des infrastructures largement amorties, dont les coûts d'exploitation sont très faibles au regard du nombre de clients servis. Si les opérateurs doivent faire face à des investissements importants, ils profitent très vite d'une réduction accélérée des coûts marginaux. Rien ne justifie en conséquence les prix des services facturés aux usagers.

Leur surface financière est suffisamment importante pour leur permettre de faire face à la nouvelle taxe. La conséquence du passage d'un taux de 0,9 % à 2 %, c'est une augmentation de 27 à 60 centimes de l'abonnement mensuel d'un usager de l'internet... Comment expliquer qu'on regimbe aujourd'hui sur quelques millions d'euros, avec l'argument éculé de la nécessité de financer des investissements, alors qu'au temps lointain du budget annexe des PTT, c'étaient les abonnés qui finançaient la couverture du territoire par le réseau. C'est leur argent qui a permis le développement du téléphone automatique, puis celui de l'électronique et de la télématique. L'argent du budget annexe permettait aussi de solder les comptes du budget général... Et voici qu'aujourd'hui, il faudrait faire autrement.

A écouter le choeur des pleureuses, la taxe de l'article 21 va empêcher les opérateurs d'investir. La réalité est qu'il faut préserver les dividendes des actionnaires ! Sortons de cette logique. La taxe doit exister ; mais autre chose est de la créer pour compenser les ressources qui vont manquer. Nous devons veiller à ce qu'elle aille à la création audiovisuelle, et non servir de variable d'ajustement à un budget 2009 qui aura sans doute, dans les semaines à venir, une toute autre allure que lors de son vote.

J'ajoute que j'ai pris soin de rencontrer, avant nos débats, des ingénieurs des télécommunications qui ont connu le privé comme le public. Aucun n'a contesté les arguments que je viens de développer, certains me les ont même suggérés. Alors ne parlons pas d'une taxe qui deviendrait vertueuse parce qu'on la diminuerait au nom du profit !

J'écoute toujours attentivement M. Retailleau car il connaît bien les questions techniques, mais ses options politiques invalident sa définition du vertueux. (Rires à gauche) D'autant que, dans les circonstances actuelles, ceux qui sont vertueux de son côté s'enfoncent, tandis que nous, nous progressons ! (Applaudissements à gauche)

L'amendement n°101 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°160, présenté par M. Ralite et les membres du groupe CRC-SPG.

Dans le IV du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KH du code général des impôts, remplacer le taux :

0,9 %

par le taux :

2 %

M. Jack Ralite.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°278, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, Voynet, MM. Desessard et Muller.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Avec quelque 42,5 milliards de chiffre d'affaires selon l'Arcep, le secteur de la téléphonie n'est vraiment pas en détresse. Bien au contraire, il a de beaux jours devant lui pour peu que les fournisseurs d'accès traitent plus correctement leurs clients -certains d'entre eux se sont rendus célèbres par leur façon de ne jamais répondre aux nombreuses doléances de leurs abonnés lésés... Sur ces 42,5 milliards, 11 milliards proviennent de la téléphonie fixe, 17,8 de la téléphonie mobile et 2,6 des seuls SMS et renseignements, soit un montant équivalant au budget de France Télévisions.

Cet amendement tire toutes les conséquences de la réforme gouvernementale : puisque vous coupez les vivres à l'audiovisuel public, nous proposons d'aller chercher l'argent là où il se trouve et, quitte à donner des émotions à M. Retailleau (sourires), de porter la taxe de 0,9 à 2 %. Le produit serait donc de 747 millions, au lieu de 370. Les libéraux ne manqueront pas d'y voir un hold-up. Que dis-je ! C'est la révolte des gueux affamés ! (Marques d'amusement au banc de la commission) M. Retailleau lui-même reconnaît que l'audiovisuel public souffre... Et pourtant, les opérateurs doivent bénéficier de toute votre sollicitude et obtenir une réduction de la taxe pour que ces « bons maîtres » respectent enfin leurs engagements en matière de couverture du territoire. Vous avez créé une injustice, il faut maintenant réparer les dégâts collatéraux !

M. le président.  - Amendement n°220 rectifié, présenté par MM. Maurey, Amoudry, Pozzo di Borgo et Deneux.

Dans le IV du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KH du code général des impôts, remplacer le taux :

0,9 %

par le taux :

0,5 %

M. Hervé Maurey.  - Il s'agit de revenir au taux de 0,5 % proposé par la commission Copé. Je suis prêt à retirer cet amendement selon le tour que prendront nos débats.

M. le président.  - Amendement n°230 rectifié, présenté par MM. Maurey, Amoudry, Détraigne, Pozzo di Borgo, Jean-Léonce Dupont et Deneux.

Supprimer le III de cet article.

M. Hervé Maurey.  - Dans la logique de nos amendements déposés aux articles 18 et 20, nous proposons que le Gouvernement remette un rapport global sur les conséquences de la réforme plutôt que sur chacune de ses dispositions.

L'amendement n°93 rectifié quater n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°189 rectifié, présenté par M. Retailleau, au nom de la commission des affaires économiques.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le présent article n'est applicable aux opérateurs de communications électroniques dans les départements de Guadeloupe, de Martinique, de Guyane, et de la Réunion que sous réserve de la disparition des messages publicitaires dans les programmes de télévision de la société mentionnée au I de l'article 44 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication diffusés sur le territoire de la collectivité en cause.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis.  - Mme Blandin verra certainement un inconvénient à ma proposition... Mais force est de reconnaître que l'outre-mer accuse un retard en matière de couverture et de pénétration dans les foyers -20 % en moyenne, parfois seulement 5 %, contre plus de 50 % en métropole- et que les tarifs y sont plus élevés. En outre, les ultramarins reçoivent seulement RFO, chaîne sur laquelle la publicité ne sera supprimée qu'en 2011. Donc : pas de « pub », des taxes ; mais de la « pub », pas de taxe !

M. Gérard Longuet.  - Logique !

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis.  - Tenons compte des spécificités de l'outre-mer.

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Avis défavorable aux amendements de suppression nos219 rectifié et 377, nous avons longuement expliqué en quoi cette taxe est nécessaire. Rejet de l'amendement n°188 rectifié. Favorable au n°209 rectifié sous réserve de l'adoption du sous-amendement n°459. Avis défavorable aux amendements nos221 rectifié, 159, 160 et 278 et 220 rectifié. Rejet de l'amendement n°208 : maintenir un taux de 0,9 % est plus judicieux mais il pourra être adapté, si besoin est, dans les années à venir. Avis défavorable à l'amendement n°230 rectifié, favorable au n°189 rectifié.

Mme Christine Albanel, ministre.  - Taxer les télécommunications n'a rien d'absurde : le secteur, pour renforcer son attractivité, produit et diffuse de plus en plus d'images : Orange, Free, Bouygues Télécom et Vivendi sont tous très actifs en ce domaine. De plus, les FAI acquittent une TVA réduite de 5,5 % sur 50 % de l'abonnement, l'autre moitié portant sur la télévision, ce qui souligne l'étroitesse des liens entre opérateurs et télévision. Enfin, si ces opérateurs sont peu nombreux et riches, ils ne sont pas des « méchants », je le sais pour les fréquenter... Nous sommes heureux que notre pays compte de grands champions ! J'apprécie donc la délicatesse des auteurs de certains amendements, mais ces entreprises sont solides : leurs bénéfices sont de 15 à 20 %, soit 6,3 milliards pour Orange en 2007. Bref, cette taxe, dont le produit attendu est de 370 millions sur les 450 destinés à compenser la suppression de la publicité, a du sens. Je suis donc défavorable à sa suppression, à une réduction de son assiette ou de la base taxable comme à une diminution de son taux. Autrement dit, rejet des amendements nos219 rectifié et 377, 188 rectifié, 209 rectifié, au sous-amendement n°459, aux amendements nos220 rectifié et 208. L'amendement n°159 supprime un mécanisme qui permet d'éviter la double imposition, rejet. Porter le taux à 2 % est excessif : avis défavorable aux amendements nos160 et 278.

Sagesse sur les amendements nos230 et 189 rectifiés.

M. le président.  - Je vais mettre aux voix par scrutin public les amendements nos219 rectifié et 377.

L'amendement n°219 rectifié est retiré.

M. Jacques Legendre, président de la commission.  - A minuit, on peut parfois commettre des crimes... (sourires) ou se tromper, mais je souhaite que nous en revenions au coeur du débat, à savoir l'audiovisuel public que nous voulons et les moyens dont il a besoin.

Il n'est pas facile, ni nécessairement populaire, de demander un effort supplémentaire aux téléspectateurs, mais nous avons été très nombreux à voter en ce sens, malgré la répugnance que bien des sénateurs éprouvent envers des contributions accrues.

Et voilà que des démonstrations souvent brillantes concluent à la nécessité de réduire les recettes destinées à l'audiovisuel public ! Mais si on réduit très significativement la sollicitation envers des secteurs qui disposent de moyens importants, ou bien l'audiovisuel public ne pourra remplir sa mission, ou bien il faudra à nouveau se tourner vers l'État, c'est-à-dire taxer le contribuable.

Je remercie M. Maurey, qui a retiré son amendement, mais je suis étonné que, sur d'autres bancs, on propose de réduire substantiellement les moyens de l'audiovisuel public. N'allons pas rompre l'équilibre qui avait été trouvé sinon nous nous retrouverions devant des contradictions insurmontables.

M. Jack Ralite.  - A en croire la présentation de l'amendement n°219 rectifié, les opérateurs de téléphonie mobile et les fournisseurs d'accès à internet seraient dans une situation financière particulièrement tendue.

Si cet amendement -que je n'ose pas qualifier de téléphoné- (sourires) n'avait pas été retiré, nous ne l'aurions pas voté. Je vais citer deux exemples douloureux, ceux d'Orange et de SFR.

En effet, la maison mère d'Orange, France Telecom, affiche une capitalisation boursière supérieure à 50 milliards d'euros, bien que le cours de son action, peu dynamique, soit très sensiblement inférieur au consensus des analystes. Selon France Telecom, le bénéfice net par action atteindra 2,02 euros en 2008, 2,10 euros en 2009 et 2,21 en 2010, alors que les dividendes passeront de 1,40 euro par action en 2008 à 1,48 en 2009 et 1,54 en 2010, offrant un rendement compris entre 7,5 % et 8 % par an, soit trois à quatre fois celui du livret A, tel qu'il vient d'être fixé après la fin du numéro de duettistes entre MM. Sarkozy et Fillon sur la question « 2 % ou 2,5 % ? ».

Si arbitrage il doit y avoir pour couvrir les zones blanches, France Telecom pourra verser aux actionnaires des dividendes un petit peu inférieurs aux 3,5 à 4 milliards prévus ! Cette somme avoisine dix fois le produit de la taxe dont nous parlons.

Des observations analogues peuvent être faites au sujet de Vivendi, la maison mère de SFR, qui distribuera en 2009 à ses actionnaires 60 % des bénéfices réalisés, soit plus d'un milliard et demi d'euros !

L'amendement ayant été retiré, nous ne pouvons saluer son souvenir.

Pourtant, il faut soigner cette maladie particulière où chacun mesure une température différente. A cette fin, nous avons proposé une taxe de 1 % assise sur l'ensemble des investissements de publicité. C'est simple et égalitaire. Paieraient aussi ceux qui remplissent quotidiennement nos boîtes aux lettres, sauf pour les produits culturels, comme l'édition, le cinéma ou le spectacle vivant.

D'autre part, nous avons proposé qu'une loi totalement différente établisse une responsabilité publique nationale, entre la société et sa télévision, la publique mais aussi les privées... Une autre bataille aboutirait à une responsabilité publique européenne, avant qu'un combat encore plus large porte sur une responsabilité mondiale. On inventerait alors par le rassemblement, au lieu de la division et de son cortège de petites solutions, qui font que France Telecom n'a plus que ses yeux pour pleurer -et ça, nous ne le laisserons pas faire.

M. Philippe Dallier.  - Malgré l'heure, je ne commettrai pas de crime, encore que l'envie m'en vienne parfois...

Mais, puisqu'il a été fortement question de fracture numérique, j'attire votre attention sur le fait qu'elle n'est pas réservée aux zones rurales. Voyez ce qui se passe en Seine-Saint-Denis : les deux tiers de ma commune sont exclus de l'offre dite « triple play ». Lorsque les Parisiens viennent s'installer, ils s'adressent à Orange, où on leur répond que la commune n'a pas fait le nécessaire. Et on ne se prive pas de les adresser au maire. Je leur redis que la commune n'a pas les moyens de réaliser pareil investissement. Le département non plus d'ailleurs. Qui s'en occupe ? Personne ! Un syndicat thématique a bien élaboré un projet de fibres noires, mais il n'avance guère. En Seine-Saint-Denis, nous en avons assez d'être des laissés-pour-compte !

Les entreprises concernées ne sont tentées d'investir ni en milieu rural, ni dans les quartiers défavorisés, car -M. Ralite a raison- ce n'est pas rentable. Peut-être que le grand Paris, s'il est fait, nous sortira de l'ombre en partageant les richesses, mais la taxe supplémentaire n'y contribuera pas, même si elle est nécessaire pour financer France Télévisions.

M. David Assouline.  - Je veux expliquer la position originale du groupe socialiste.

M. Michel Thiollière, rapporteur.  - Très originale ! (Sourires)

M. David Assouline.  - Je veux éviter toute confusion avec les libéraux, qui protègent les secteurs où l'on gagne beaucoup d'argent, en disant qu'il faut consolider la production de richesses.

Notre amendement de suppression est cohérent avec notre refus de mettre fin à la publicité sur les chaînes de l'audiovisuel public. Vous avez adopté cette mesure ce matin, mais nous restons conséquents.

M. le rapporteur a tenu un propos quelque peu inexact car nous avons voté l'augmentation de la redevance, dont le produit va directement à France Télévisions. Mais les taxes dont il est question iront, elles, au budget de l'État. Quel qu'en soit le produit, l'État devra honorer l'engagement pris dans le cadre de la loi de finances de verser 450 millions d'euros à France Télévisions. Les moyens ne lui manquent pas.

Il est donc faux de prétendre que l'on a voté une augmentation de 2 euros mais que si l'on refuse une de ces taxes, c'est un euro de moins pour la télévision publique. Non, l'État devra donner les 450 millions, monsieur Thiollière.

Mais, pour qu'il n'y ait aucune confusion, nous retirons notre amendement de suppression.

M. Jean-Pierre Plancade.  - Nous avons la même position sur cet article que sur l'article 20 : le financement ne nous convient pas, mais on ne peut empêcher France Télévisions d'obtenir des recettes. C'est pour cela que nous nous serions abstenus et je félicite M. Assouline d'avoir retiré cet amendement.

L'amendement n°377 est retiré.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis.  - Nous sommes face à une bonne réforme : l'affaissement du marché publicitaire conduisait à l'affaiblissement du service public audiovisuel mais aussi de la création, car les ressources de cette dernière sont indexées sur le marché publicitaire.

Quand nous proposons d'exonérer les opérateurs de réseau mobile virtuel, c'est pour améliorer la concurrence, dans un esprit de responsabilité. Avec les décisions que nous avons prises, nous avons les ressources suffisantes pour compenser les 450 millions nécessaires au service public de l'audiovisuel. Ce n'est pas avec quelques millions de moins qu'on déséquilibre le dispositif.

Madame Blandin, les opérateurs en téléphonie mobile qui se sont lancés dans la 3G se sont engagés à couvrir 75 % de la population et ils ont payé 619 millions pour cela -il n'y a pas eu de cadeau. Mais que fait-on des 25 % restants ? On oublie trop souvent que les zones d'ombre ne concernent pas seulement le monde rural : la Seine-Saint-Denis est en effet également touchée par ce phénomène. Il faut apporter un peu plus de concurrence et de dynamisme au marché.

L'amendement n°188 rectifié n'est pas adopté.

Le sous-amendement n°459 est adopté.

L'amendement n°209 rectifié, sous-amendé, est adopté.

L'amendement n°221 rectifié devient sans objet.

L'amendement n°159 n'est pas adopté.

Les amendements identiques nos160 et 278 ne sont pas adoptés.

L'amendement n°220 rectifié est retiré.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis.  - M. le rapporteur m'a dit qu'il y aura un ajustement en fonction des besoins. Cette explication m'a convaincu.

L'amendement n°208 est retiré.

L'amendement n°230 rectifié n'est pas adopté.

L'amendement n°189 rectifié bis est adopté.

Mme Catherine Tasca.  - Au terme de l'examen de cet article, je souhaite revenir sur ce qu'ont dit M. Legendre et notre rapporteur sur la nature des sources de financement de l'audiovisuel public : avec la redevance, c'est le contribuable qui paye, alors qu'il en va tout autrement avec les taxations. Mais ces taxes ne seront pas prélevées sur le capital des opérateurs : elles augmenteront simplement les factures des usagers ! Arrêtez de faire comme si vous vouliez protéger les faibles ! Au bout du compte, ce seront bien évidemment les usagers qui payeront.

Nous avons proposé divers amendements qui n'ont d'ailleurs pas été retenus parce que nous étions face à un choix impossible : ayant renoncé aux recettes publicitaires pour l'audiovisuel public, nous devions nous livrer à mille et une contorsions et créer de nouvelles taxes. Mais compte tenu des contraintes économiques qui pèsent sur les entreprises, nous étions contraints d'imaginer des « trucs » pour alléger le poids de ces taxes sur les opérateurs.

Cet article illustre parfaitement la supercherie de cette réforme.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Un mot sur la méconnaissance et l'impréparation de ce projet de loi. Tout à l'heure, Mme la ministre a évoqué un rendement de 370 millions. Or, en excluant les services de renseignements de cette taxe, l'Assemblée nationale en a réduit le rendement à 347 millions. Et son produit continue à fondre, jour après jour, puisque les exonérations se poursuivent.

L'article 21, modifié, est adopté.

Prochaine séance, aujourd'hui, vendredi 16 janvier 2009, à 9 h 30.

La séance est levée à minuit vingt-cinq.

Le Directeur du service du compte rendu analytique :

René-André Fabre

ORDRE DU JOUR

du vendredi 16 janvier 2009

Séance publique

A 9 HEURES 30, A 15 HEURES ET LE SOIR

- Suite de la discussion du projet de loi organique (n°144, 2008-2009), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France et du projet de loi (n°145, 2008-2009), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.

Rapport (n°150, 2008-2009) de Mme Catherine Morin-Desailly et M. Michel Thiollière, fait au nom de la commission des affaires culturelles.

Avis (n°152, 2008-2009) de M. Bruno Retailleau, fait au nom de la commission des affaires économiques.

Avis (n°151, 2008-2009) de M. Joseph Kerguéris, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

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DÉPÔTS

La Présidence a reçu de :

- M. Bernard Angels un rapport d'information fait au nom de la délégation du Sénat pour la planification sur la relation macroéconomique entre la consommation des ménages et les importations ;

- M. François Autain, Mme Annie David, M. Guy Fischer, Mmes Gélita Hoarau, Eliane Assassi, Marie-France Beaufils, M. Michel Billout, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, M. Jean-Claude Danglot, Mmes Michelle Demessine, Evelyne Didier, M. Thierry Foucaud, Mme Brigitte Gonthier-Maurin, MM. Robert Hue, Gérard Le Cam, Mme Josiane Mathon-Poinat, M. Jean-Luc Mélenchon, Mme Isabelle Pasquet, MM. Jack Ralite, Ivan Renar, Mmes Mireille Schurch, Odette Terrade, MM. Bernard Vera et Jean-François Voguet une proposition de loi visant à la suppression de la publicité pour les vaccins auprès du public ;

- M. Hugues Portelli une proposition de loi modifiant le régime des retenues sur salaires en cas de grèves dans les services publics de transport terrestre régulier de personnes à vocation non touristique.

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ERRATUM

Compte rendu du mercredi 14 janvier 2009, page 4, dans l'intervention de Mme Marie-Christine Blandin, bien lire :

« Aminata Traoré, dans L'Étau, dénonce les contraintes imposées par le FMI dont les cahiers des charges sont irréalisables, ce qu'elle appelle la danse impossible. »