Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la réponse du Gouvernement à dix-huit questions orales.

Pollution de la porcherie industrielle de Chantegeay

M. Alain Fouché.  - Malgré l'opposition de la population locale et des municipalités concernées, exprimée à l'occasion d'une enquête publique en novembre 2007, l'arrêté préfectoral autorisant l'exploitation de la porcherie industrielle de Chantegeay sur la commune de Chauvigny, dans la Vienne, a été signé le 21 octobre 2008. Cette installation, composée de deux bâtiments d'engraissement d'une surface unitaire de 3 113 m² et d'un bâtiment de post-sevrage d'une surface de 1 237 m² pour une production annuelle de 18 720 porcs gras, doit entraîner de graves conséquences sur l'environnement. Il est prévu un épandage de la production de lisier -12 240 m3 par an- sur une surface de 563 hectares, sur le territoire de quatre communes, et à moins de 1 000 mètres de la cité médiévale de Chauvigny, haut lieu du tourisme dans le département. La pollution des eaux superficielles et souterraines par les nitrates est inévitable et la population alentour -7 600 habitants pour la seule ville de Chauvigny- devra supporter de surcroît les odeurs liées à l'épandage.

A l'heure du Grenelle de l'environnement et du développement durable, quelles dispositions le Gouvernement entend-il prendre pour éviter de telles implantations ? Envisagez-vous, madame la ministre, de modifier à l'avenir la réglementation afin que de telles situations ne se reproduisent plus, en particulier autour de fortes concentrations de population ? Je suis maire depuis vingt ans et puis vous dire que, contrairement à ce qu'affirme l'État à chaque arrêté d'implantation, les nuisances et les odeurs sont toujours au rendez-vous.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - L'installation de Chantegeay doit regrouper sur un seul site des activités existantes, sans augmentation d'effectif. Ce projet a été déposé en préfecture courant 2007 par un exploitant qualifié, qui pratique l'élevage de porcs depuis plus de vint-cinq ans et gère une équipe de treize personnes.

Les élevages intensifs sont soumis à une réglementation très stricte, à laquelle les riverains sont attentifs. Le ministère suit de près la mise en conformité des installations, d'ici à 2012, avec la directive du 20 juillet 1998 concernant la protection des animaux dans les élevages.

Avec ses 6 968 animaux équivalents porcs, cette porcherie entre dans le cadre de la directive IPPC sur la prévention et la réduction intégrées de la pollution. L'instruction du dossier par les services des installations classées a été rigoureuse et le préfet a fixé, pour minimiser l'impact de l'installation, des prescriptions détaillées qui seront soumises à un contrôle rigoureux pendant toute la durée de vie de l'exploitation.

Le dossier de demande d'autorisation a été jugé complet et régulier, tant en ce qui concerne l'étude d'impact obligatoire que les mesures envisagées par le demandeur pour limiter les nuisances. Lors des enquêtes administrative et publique, les services ou communes concernés ainsi que toute personne intéressée par le projet ont pu se faire entendre. C'est sur le fondement des avis favorables de l'enquête publique et du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques que le préfet a délivré, le 21 octobre 2008, l'autorisation d'exploiter, qui reprend les prescriptions réglementaires fixées au niveau national. Ainsi, la technique du lavage d'air, reconnue comme l'une des meilleures pour l'élevage intensif de porcs, a été mise en place. Des prescriptions complémentaires prévoient que la porcherie sera située sur un site relativement isolé, à 800 mètres des premiers tiers et à 4 kilomètres de la ville de Chauvigny ; que les parcelles d'épandage se trouveront à plus de 2 kilomètres de la ville de Chauvigny, hors du passage de ses vents dominants -quand la distance minimale réglementaire d'épandage est de 100 mètres.

Le Gouvernement est attentif à toute évolution réglementaire en la matière. Des propositions françaises sont en préparation pour actualiser le document européen de référence des meilleures techniques utilisables en élevage porcin. Nous participerons aux travaux du groupe d'experts européens chargés de cette actualisation lors d'une réunion qui doit se tenir prochainement à Séville dans le cadre de la directive IPPC.

M. Alain Fouché.  - Je vous remercie, madame la ministre, de ces précisions. Je sais combien les procédures sont difficiles à modifier. J'ai bien noté votre engagement à assurer un contrôle strict de l'État sur le fonctionnement de l'installation.

Raccordement des caravanes aux réseaux d'eau et d'électricité

Mme Anne-Marie Escoffier.  - M. Mézard, dont l'avion a été retardé, m'a priée de vous interroger, madame la ministre, sur un problème qui se pose à nombre de communes : celui des demandes de raccordement de caravanes installées sur des terrains agricoles aux réseaux d'eau potable et d'électricité. Doit-on accepter que des personnes qui ont délibérément choisi de s'établir sur des terrains impropres à l'habitation, et en l'absence de certificat d'urbanisme ou de permis de construire, puissent bénéficier de tels branchements qui, de surcroît, posent parfois des problèmes techniques difficiles à résoudre ?

Les dispositions de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme permettent au maire de s'opposer au branchement définitif aux réseaux d'eau, d'électricité, de gaz ou de téléphone d'une caravane installée en méconnaissance des règles d'urbanisme. Le Conseil d'État juge cependant qu'une commune ne peut s'opposer au raccordement provisoire aux réseaux d'eau et d'électricité. Or, toute la difficulté repose sur la notion de « provisoire », juridiquement très floue. Peut-on parler de branchement provisoire quand une caravane est installée depuis plusieurs mois, voire plusieurs années, sur un terrain agricole ? Le Conseil d'État retient également la notion de « caractère d'urgence » pour motiver l'annulation d'un refus de raccordement au réseau EDF. Mais que recouvre exactement cette notion quand une caravane est durablement installée ?

Accorder des raccordements à des personnes installées illégalement sur des terrains non constructibles ne les incite-t-elles pas à faire perdurer une situation contraire au droit ? Comment mettre fin, madame la ministre, à ces situations inextricables ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - La question que vous soulevez est complexe car elle engage à la fois les règles en matière d'occupation des sols et de stationnement, qui relèvent en général de la compétence du maire, et le droit pour toute personne d'être alimentée par les services essentiels que constituent l'électricité ou l'eau.

Dans le cadre des missions qui lui sont imparties par la loi du 10 février 2000, le gestionnaire du réseau public de distribution est tenu de faire droit à toute demande de raccordement qui lui est présentée. Il ne lui appartient pas d'apprécier la légalité des autorisations d'urbanisme ou des règles de stationnement en vigueur sur la commune considérée. C'est seulement sur réquisition du maire, lorsque ce dernier estime que le demandeur du raccordement contrevient aux règles d'occupation des sols ou de stationnement prévues à l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme qu'il est tenu de refuser le raccordement.

Mais le Conseil d'État a cependant jugé, en effet, que le maire ne peut s'opposer au raccordement électrique provisoire d'une caravane. Cette notion de raccordement provisoire s'applique au stationnement de caravanes mobiles sur des terrains aménagés à cet effet ou, en l'absence de tels aménagements, dans le respect des durées de stationnement fixées par le maire. Le branchement peut également être considéré comme provisoire lorsqu'il est demandé pour une raison particulière et une période limitée -saison froide, durée d'un chantier...

Quant aux stationnements d'une durée supérieure à trois mois, ce n'est que dans la mesure où le mode d'occupation des sols est susceptible de porter atteinte à la salubrité, à la sécurité ou à la tranquillité publique ou à la conservation des sites, des milieux ou encore aux règlements d'urbanisme que le maire peut refuser l'autorisation. Dans cette hypothèse, il doit signifier au gestionnaire de réseau son opposition au raccordement.

Le problème soulevé par l'installation de caravanes sur des terrains agricoles réside donc davantage dans la méconnaissance des règles d'urbanisme, dont l'application relève du maire, que dans le raccordement aux réseaux.

Enfin, la condition d'urgence est appréciée par le seul juge des référés, au cas par cas, dans le cadre d'une procédure de référé administratif.

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Merci de ces précisions. La complexité de la réglementation la rend difficile à appliquer pour les maires, confrontés à la mauvaise volonté de ces occupants.

Accès à la TNT dans la Creuse

M. Jean-Jacques Lozach.  - Le passage à la TNT s'effectue selon le schéma national d'extinction progressive de la diffusion analogique terrestre. Une date d'arrêt doit être annoncée au moins neuf mois à l'avance pour chaque zone géographique -délai que la loi Hadopi, si elle n'est pas censurée, ramènera à trois mois et demi. La loi du 5 mars 2007 fixe l'objectif de couverture de 95 % de la population métropolitaine fin 2011. Le CSA a certes prévu une couverture minimum de 91 % de la population par département, mais près de 10 % de la population, essentiellement rurale, restent privés d'accès !

L'argument du recours au satellite est mal reçu par la population et des élus. Le plan « France numérique 2012 » ambitionnait pourtant de réduire la fracture numérique. Or il y aura rupture de l'égalité devant le service public. Les collectivités territoriales devront financer l'implantation d'émetteurs ou d'équipements complémentaires afin d'assurer la continuité de la réception.

La TNT doit être accessible à tous. Je vous demande d'anticiper les conséquences du basculement au tout numérique dans la Creuse et d'accroître le taux de couverture afin qu'aucun habitant de ce département, permanent ou saisonnier, ne reste à l'écart à la date d'arrêt de la diffusion analogique.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - L'objectif légal de 95 % de couverture de la population en TNT par les émetteurs terrestres créait une disparité entre les départements très accidentés et les zones urbaines, couvertes à 100 %. C'est pourquoi le CSA a imposé un minimum de 91 % de couverture dans tous les départements qui atteignaient ce niveau en mode analogique. Ce minimum départemental ne constitue nullement un recul de 10 % : dans la Creuse, la différence entre la couverture analogique de France 2 et de la TNT sera proche de 1 %, aux limites de la précision de mesure.

Vous souhaitez une couverture à 100 %. En réalité, toutes les chaînes de la TNT sont déjà disponibles gratuitement sur satellite, en tout point du territoire, sur deux positions orbitales : TNTSat et Fransat. Le prix des adaptateurs, autour de 100 euros, doit rapidement se rapprocher du prix des adaptateurs TNT terrestres.

Conformément à la loi du 5 mars 2009, le Gouvernement publiera prochainement une étude qui permettra aux collectivités locales de faire les meilleurs choix en fonction de la taille des zones blanches résiduelles à l'arrêt de l'analogique. Elles pourront se faire attribuer des fréquences pour des émetteurs terrestres complémentaires mais la réception par satellite sera souvent un meilleur choix économique.

Je partage pleinement votre souci d'aménagement du territoire. Grâce à la technologie satellitaire, la TNT est d'ores et déjà disponible partout. C'était l'une des conditions, souhaitée par le Gouvernement et le Parlement, pour que l'extinction de l'analogique débute sous les meilleurs auspices.

M. Jean-Jacques Lozach.  - Merci. Je note votre objectif de couverture intégrale, mais 2011, c'est demain ! Je me fais l'écho d'une double inquiétude : celle de populations souvent isolées et de collectivités locales souvent démunies, qui ont déjà dû mettre la main à la poche pour assurer la desserte en téléphonie mobile et internet.

Zones franches urbaines et géographie médicale

M. Alain Fouché, en remplacement de M. Chauveau.  - Le dispositif des zones franches urbaines (ZFU), créé en 1997 pour favoriser l'installation d'entreprises dans les quartiers populaires, a fait la preuve de son succès, survivant d'ailleurs à l'alternance. Mais un dispositif aussi attractif risque toujours d'être détourné. En la matière, certains sont très imaginatifs. Ainsi, profitant de l'effet d'aubaine, certains professionnels de santé déplacent abusivement leurs cabinets médicaux ou paramédicaux dans ces zones franches, entraînant une excessive concentration de ces professions, au grand dam des quartiers périphériques ou des communes voisines. C'est le cas dans la ZFU du Mans, ou dans celle d'Alençon. Toutes les professions libérales sont concernées mais le cas des professionnels de santé est le plus choquant car il entraîne une inégalité d'accès aux soins. Ce déséquilibre accélère le mouvement de désertification médicale. C'est une question d'aménagement du territoire. Au-delà des restrictions existantes, quelles sont les mesures envisagées pour limiter ces implantations abusives ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports.  - C'est la loi du 14 novembre 1996 qui définit les zones franches urbaines. D'autres textes précisent les aides à l'installation des médecins dans ces zones prioritaires, où l'exercice de la médecine est rendu difficile du fait, notamment, de la composante sociale et culturelle de la population et de sa précarisation : le praticien y tient un rôle à la fois social et médical. La sous-médicalisation conduit à des difficultés d'accès aux soins.

Sans revenir sur le dispositif des ZFU, qui relève de la politique de la ville, il faut cependant réfléchir à des dispositifs à la fois incitatifs pour les professionnels de santé, équitables entre territoires et dont l'impact sera supérieur aux effets d'aubaine.

Le projet de loi Hôpital, patients, santé et territoires, qui fait de l'accessibilité des soins une priorité, prévoit des mesures destinées à inciter les professionnels de santé à s'installer au plus près des besoins : il facilite l'orientation des jeunes médecins avant même la fin de leur cursus, favorise les coopérations, permet aux établissements de santé de créer et gérer des centres de santé et dote les schémas régionaux d'organisation des soins (SROS) d'un volet ambulatoire afin de définir une organisation des soins plus adaptée aux besoins, en lien avec les professionnels de santé, les élus et les usagers. Les agences régionales de santé fonctionneront comme un guichet unique pour les jeunes médecins qui se perdent dans le maquis des nombreuses aides existantes pour favoriser leur installation dans les zones sous-denses. Enfin, le SROS déterminera les zones de mise en oeuvre des mesures au plus près des besoins locaux, ce qui limitera d'éventuels effets d'aubaine.

M. Alain Fouché.  - Je sais que vous êtes attentive à ces questions et vous en remercie. Il faut mieux orienter les médecins vers les zones rurales ou les quartiers difficiles.

Maison médicale de garde de Saint-Affrique

M. Alain Fauconnier.  - Le centre hospitalier de Saint-Affrique a conçu, avec les praticiens libéraux, un projet de maison médicale de garde afin d'organiser la permanence des soins sur un secteur rural menacé de désertification. Des médecins libéraux y assureraient des consultations non programmées aux heures de fermeture des cabinets médicaux. Ce dispositif connaît un succès certain et sa pertinence est reconnue par le schéma régional d'organisation sanitaire 2006-2011 de la région Midi-Pyrénées.

La maison médicale de garde de Saint-Affrique doit être implantée au sein de l'hôpital, à proximité des urgences ; elle doit beaucoup à l'engagement volontaire des généralistes et à l'implication du centre hospitalier -qui peut douter du rôle éminent des hôpitaux de proximité dans l'organisation territorialisée des soins ? Ce partenariat anticipe d'ailleurs sur les dispositions du texte sur l'hôpital, actuellement en discussion devant le Sénat.

Le financement du projet est réparti entre le Fonds d'intervention pour la qualité et la coordination des soins au titre de l'organisation des soins de ville, la CPAM, par redéploiement du financement des astreintes, et le centre hospitalier, qui engage ses moyens humains et logistiques. Professionnels et usagers attendent impatiemment l'aboutissement de ce projet innovant et peu onéreux.

L'ARH et la Ddass ont donné leur accord de principe, mais la CPAM de l'Aveyron oppose aux promoteurs du projet les termes de l'avenant n°4 de la convention des médecins libéraux et refuse la mise en place d'un régime dérogatoire de rémunération des astreintes. Fixé à 176 euros pour quatre heures, le coût de l'astreinte de la maison de garde représente une économie par rapport aux 150 euros actuels par secteur et par médecin. Ce montant minimum est indispensable pour préserver l'attractivité de la permanence des soins dans des territoires peu denses. La maison médicale du Saint-Affricain couvre six cantons de moyenne montagne s'étendant sur 1 542 km² et 23 800 habitants, dont plus du quart ont plus de 65 ans. Il faut trouver une solution, sauf à dissuader encore les jeunes médecins de s'installer dans nos zones rurales. Mais souhaite-t-on encore les y attirer ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports.  - Comme vous l'indiquez, la CPAM oppose à ce projet l'impossibilité juridique de rémunérer les médecins autrement que de la façon prévue par l'avenant n°4 de la convention des médecins libéraux. Le dispositif actuel est complexe et ne permet pas la souplesse nécessaire à la mise en place de structures adaptées aux spécificités de chaque territoire. Ce que vous dénoncez, je le déplore. C'est bien pourquoi le projet de loi sur l'hôpital place les missions qui sont aujourd'hui celles du préfet sous la responsabilité de l'ARS, afin de faire disparaître les cloisonnements qui entravent la bonne organisation de la permanence des soins. C'est ainsi l'agence qui déterminera l'organisation et les rémunérations spécifiques des médecins participant à la permanence des soins, ces rémunérations pouvant être forfaitaires ou différenciées selon les modalités pratiques d'organisation de la permanence des soins sur le territoire concerné.

A partir du 1er janvier 2010, date d'entrée en fonction des ARS, des projets tels que la maison médicale de garde de Saint-Affrique pourront voir le jour.

M. Alain Fauconnier.  - Les élus se sont beaucoup investis dans ce projet, qui est à l'étude depuis plus de six mois -preuve qu'on ne peut les marginaliser dans l'organisation des soins. Je doute que le transfert des missions du préfet à l'ARS améliore vraiment les choses. Il y a urgence. Une solution a bien été trouvée en Ariège, dont la CPAM a une interprétation plus souple des textes...

Création d'unités d'éveil en Alsace

Mme Patricia Schillinger.  - Je souhaite relayer devant vous, madame la ministre, l'inquiétude des proches des personnes cérébro-lésées en Alsace. Ma région est en effet dépourvue d'unités d'éveil. Les personnes traumatisées crâniennes graves ont un besoin impérieux de soins et de stimulations, besoin qui ne peut être satisfait que dans de telles unités. A leur sortie des soins intensifs ou des services de réanimation, ces personnes sont aujourd'hui réorientées vers des services de neurologie ou de neurochirurgie, inadaptés.

Des recommandations ont pourtant été faites par de nombreuses circulaires ministérielles et l'ARH a reconnu, dans le schéma régional d'organisation sanitaire 2006-2011, la nécessité de créer au moins une unité d'éveil dans chaque département de la région. Les professionnels hospitaliers ont eux-mêmes élaboré des projets, dont la création à Mulhouse d'une unité de six lits qui devait être opérationnelle fin 2007 ; ce projet n'a pas encore abouti.

Cette situation suscite chez les familles des victimes frustration et indignation, et les contraint à la pire des solutions : attendre que l'état de leur proche devienne chronique pour qu'on le transfère enfin dans un service adapté. Mais pendant ce temps, de nombreuses victimes voient leur pronostic d'éveil compromis : autant de chances de guérison qui disparaissent. J'ajoute que la présence de ces malades dans des services inadaptés contribue à l'engorgement de ceux-ci et entraîne des coûts importants.

Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour remédier à cette situation ? Des démarches sont-elles déjà en cours ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports.  - L'Alsace est une des régions les mieux dotées pour la prise en charge des victimes de traumatismes crâniens ; le CHU de Strasbourg et les Hospices civils de Colmar disposent chacun de services de neurochirurgie de grande qualité. Seules manquent des unités d'éveil, que le schéma régional d'organisation sanitaire a d'ailleurs prévues. Si les malades cérébro-lésés sont aujourd'hui pris en charge dans des services dotés d'équipes et d'équipements de qualité, il est clair que la création d'unités d'éveil soulagerait ces services et permettrait à la région de disposer de la chaîne complète de traitement. Des économies pourraient même être réalisées.

Il ne s'agit donc pas d'une mesure d'économie prise au détriment des malades.

Pour renforcer cet engagement, le schéma interrégional d'organisation sanitaire a également prévu que les quatre autres régions du grand Est, non pourvues de services de ce type, développeraient une offre adaptée.

Avec l'ARH d'Alsace, nous nous sommes fixés des objectifs ambitieux pour les patients et nous financerons leur mise en oeuvre. Je ne peux encore vous donner une date précise sur l'ouverture de ce service d'éveil mais il figure au tout premier rang de nos priorités.

Mme Patricia Schillinger.  - Je suis heureuse de la prise en compte de ce dossier : il y a urgence et les familles n'en peuvent plus. J'espère que nous aurons l'occasion d'inaugurer dans les prochains mois un tel site. Nous comptons sur vous, madame la ministre.

Situation d'Airbus et évolution du dossier A400M

M. Bertrand Auban.  - Ma question s'adressait à Mme la ministre de l'économie.

Airbus est le moteur de l'industrie et de l'emploi dans la Haute-Garonne. Il s'agit surtout d'une entreprise très importante pour l'économie nationale et européenne. Or, je suis inquiet des évolutions depuis l'adoption du plan Power 8 en 2007 qui a prévu de supprimer 10 000 emplois, de réduire de 3 000 à 500 le nombre de fournisseurs de niveau 1 et d'installer diverses productions dans des zones dollar ou des pays à bas coût.

Pourtant, la situation financière et industrielle de l'entreprise n'est pas si sombre : depuis 2007, les carnets de commandes d'Airbus sont bien remplis : cette année, l'entreprise devrait enregistrer entre 300 et 400 commandes d'appareils. Le bénéfice 2008 d'Airbus avant impôts est de 1,79 milliard, soit 63 % du bénéfice d'EADS. C'est pourquoi le plan Power 8 doit faire l'objet d'un moratoire, surtout au moment où nous enregistrons des dizaines de milliers de chômeurs supplémentaires chaque mois. L'échec de la vente des sites de Méaultes et de Saint-Nazaire-Ville a conduit Airbus à créer une filiale, Aerolia, qui s'implante en Tunisie avec 750 embauches et 750 emplois supplémentaires chez des sous-traitants tunisiens, ce qui n'est certainement pas favorable à l'économie française et européenne.

Cette politique de baisse des coûts via des suppressions d'emploi, la filialisation, la pression sur les sous-traitants et les délocalisations est dangereuse pour notre économie, mais aussi pour l'entreprise.

Enfin, je suis très inquiet pour l'avenir de l'avion de transport militaire A400M pour lequel les États commanditaires envisagent d'appliquer de très importantes pénalités de retard, voire d'annuler leurs commandes, au point que le PDG d'Airbus n'exclut plus de mettre fin au programme. Si les États peuvent faire valoir le non-respect des échéances, ils ne peuvent pas pour autant s'exonérer de leurs propres responsabilités du fait des modifications des commandes qu'ils ont exigées.

Que pense le Gouvernement de la situation d'Airbus ? Compte-t-il demander à cette entreprise de mettre fin aux suppressions d'emplois et aux délocalisations ? Enfin, compte-t-il aider Airbus dans le dossier de l'A400M ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports.  - Je veux vous présenter les excuses de Mme Lagarde qui accompagne M. le Président de la République dans un très important déplacement aux Émirats Arabes Unis.

Le programme Power 8 lancé en 2007 par EADS prévoyait une économie de 2,1 milliards d'ici 2010, la suppression de 5 000 postes dans le périmètre Airbus et estimait des pertes d'emplois identiques dans la sous-traitance. Ce plan a été complété en septembre dernier par un second volet pour une économie supplémentaire de 650 millions d'ici 2012, notamment grâce à une internationalisation plus importante des activités d'engineering et de fabrication. Ce programme entrainera des sacrifices importants pour l'entreprise, pour les salariés et pour les partenaires industriels. Néanmoins, l'enjeu international est majeur et le Gouvernement estime que c'est grâce à des gains de parts de marché que le groupe pourra pérenniser des emplois à haute valeur ajoutée en France, dans son périmètre propre mais aussi chez ses sous-traitants.

Pour faire face à la concurrence très dure de Boeing, il faut gagner en compétitivité, optimiser les coûts, et donc arbitrer la localisation des activités en fonction de leur niveau technologique et des spécificités des ressources locales, d'où la création de la filiale tunisienne Aerolia. L'effort demandé à la filière est important. Fin 2008, Airbus chiffre à 5 000 le nombre de suppression de postes en interne, sans licenciements, ce qui correspond à l'objectif que s'était donné le constructeur sur la base d'une situation économique qui était plus favorable qu'aujourd'hui.

Dans le contexte d'augmentation des cadences de production des années 2007 et 2008, il n'a pas été constaté de destructions d'emplois significatives dans la sous-traitance aéronautique. Bien au contraire, des projets créateurs d'emplois à moyen terme ont été lancés, notamment pour soutenir la production du futur A 350 sur les bassins de Nantes Saint-Nazaire mais aussi de Méaultes et de Toulouse. Ces projets ne sont pas remis en cause en dépit de la situation actuelle. La crise du trafic aérien entraîne en effet une chute brutale des commandes d'avions et un ralentissement de l'activité de production. Les mutations engagées dans le cadre de Power 8 permettent à Airbus et à l'ensemble de la filière de mieux résister à la situation.

De même, les mesures du plan pour le secteur aéronautique annoncé dès 2007 par M. le Premier ministre à Marignane ont permis d'accélérer la mutation de la filière, notamment des PME qui sont très sensibles aux évolutions actuelles. L'action du Gouvernement a permis aux sous-traitants d'être plus robustes pour affronter la situation.

La France est très attachée au programme A400M et souhaite qu'il puisse aboutir car c'est à la fois une réponse adaptée aux besoins opérationnels des forces armées, c'est un projet structurant pour l'Europe de la défense, et un programme technologique important. Le ministre de la défense qui négocie ce dossier avec ses homologues répondra prochainement à une question sur ce sujet.

M. Bertrand Auban.  - Je vous remercie, madame la ministre, d'avoir répondu à la place de Mme Lagarde : vous savez également être au chevet des entreprises qui traversent des turbulences. (Sourires)

Sur l'A400M, vous venez de nous dire que M. Morin nous apportera jeudi des précisions : nous sommes inquiets car si les Anglais n'en veulent plus, le projet risque d'être abandonné, ce qui aurait un impact très négatif sur Airbus.

En ce qui concerne les délocalisations, Airbus est protégé par rapport à la parité eurodollar grâce à une couverture au change jusqu'en 2010. Le groupe n'a donc pas pâtit de la remontée de l'euro.

Avec le départ de 10 000 emplois qualifiés, si le secteur redémarre, il faudra réembaucher et on ne retrouvera pas forcément le personnel compétent. Cette entreprise est incontestablement le fleuron de la coopération européenne : il faut donc la protéger.

Situation des contrôleurs des impôts promus inspecteurs des impôts avant le 1er janvier 2007

Mme Jacqueline Alquier.  - Près de soixante questions écrites ou orales vous ont été adressées, monsieur le ministre, au sujet de la situation des contrôleurs des impôts promus inspecteurs des impôts avant le 1er janvier 2007. Or, jusqu'à présent, vos réponses laissent persister un fort sentiment d'injustice chez ces fonctionnaires. Le décret du 23 décembre 2006 a effectivement instauré de nouvelles règles de reclassement dans le grade d'inspecteur des impôts pour les nouveaux contrôleurs principaux des impôts promus.

Ce régime ne pose pas problème parce qu'il améliore la situation des nouveaux promus mais parce qu'il ne prévoit pas de mesures transitoires. Conséquence, les agents promus avant le 1er janvier 2007 sont défavorisés en matière de rémunération, d'avancement, de mutation, voire de retraite. Ainsi, après dix ans de carrière en catégorie A, la seule perte salariale se chiffrerait à 40 000 euros. Cette discrimination porte atteinte au principe d'égalité de traitement des fonctionnaires recrutés dans un même corps.

Certes, un décret ne peut disposer que pour l'avenir. Mais rien n'empêche de prendre des mesures transitoires pour corriger les effets négatifs d'un nouveau dispositif telles que celles dont les contrôleurs divisionnaires avaient bénéficié en 1997 après le décret de 1995. Mais le gouvernement d'alors avait peut-être un meilleur sens de l'équité !

Invoquer la jurisprudence du Conseil d'État est insuffisant. De fait, droit et justice ne coïncident pas toujours, raison pour laquelle le médiateur de la République a été créé ! Celui-ci, saisi notamment par mon intermédiaire, s'est au reste inquiété de cette inégalité de traitement frappant une centaine de fonctionnaires, inégalité qu'il a suggéré de résoudre par des mesures transitoires.

Monsieur le ministre, les solutions individuelles et partielles que vous avez prônées ne répondent pas au problème de fond. Seule une solution globale sera respectueuse de ces agents et de leur parcours professionnel, aussi méritant que celui des promus d'après le 1er janvier 2007. Une erreur a été commise, dont vous n'êtes pas responsable, mais vous le deviendrez si vous ne la réparez pas. Pour sortir de l'impasse, pourquoi ne pas négocier avec le collectif des agents une réponse globale ?

M. André Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique.  - Après avoir excusé l'absence de M. Woerth, ministre de la fonction publique, rappelons que le décret du 23 décembre 2006 constitue un dispositif plus favorable pour les agents promus sur liste d'aptitude au grade d'inspecteur avec un gain indiciaire d'une cinquantaine de points, contre 25 auparavant. J'assume cette volonté de valoriser les plus méritants d'autant que le Conseil d'État, dans une décision du 10 décembre 2004 à laquelle vous avez fait allusion, a jugé qu'une mesure s'appliquant aux agents recrutés à compter de son entrée en vigueur ne constituait pas une discrimination contraire au principe d'égalité des fonctionnaires d'un même corps.

Les agents promus avant le 1er janvier 2007 ne sont pas, contrairement à ce que vous affirmez, défavorisés. Concernant les mutations, l'administration des impôts a mis en oeuvre, en concertation avec les représentants des personnels, un suivi pour s'assurer qu'un agent issu d'une promotion antérieure ne serait pas devancé par un agent promu après le 1er janvier 2007, suivi qui a bénéficié à quatre agents en 2008. S'agissant de l'avancement, le statut prévoit un nombre d'années de services effectifs en catégorie A pour accéder au grade supérieur, ce qui neutralise les effets du décret relatifs à la reprise d'ancienneté. Enfin, les agents promus avant le 1er janvier 2007 ont été autorisés à se porter candidats, même s'ils n'ont pas atteint l'échelon requis ; 54 d'entre eux en ont profité en 2008.

Ainsi, madame le sénateur, nous valorisons les mérites individuels tout en traitant avec équité les agents promus avant le 1er janvier 2007.

Mme Jacqueline Alquier.  - Encore une fois, la question est traitée de manière parcellaire. Vous continuez de demander aux agents de consentir des efforts, de passer des concours alors qu'une normalisation aurait dû intervenir. Vous demandez également l'élaboration du statut commun des personnels de catégorie A tout en renvoyant cette réforme aux calendes grecques. Les agents ne peuvent s'en satisfaire.

Difficultés de financement des PME

M. Claude Biwer.  - Les difficultés des PME à se financer se sont aggravées avec la crise financière. Malgré les mesures prises par le Gouvernement -il a notamment enjoint les banques bénéficiaires de fonds publics à accorder des crédits aux entreprises et nommé un médiateur du crédit-, la France peine toujours à développer ses PME en raison de leur manque de fonds propres et, partant, de la réticence traditionnelle des banques à les financer par la dette.

Fort de ce constat, le conseil d'analyse économique, dans un récent rapport, propose de mettre en place des prêts garantis, plutôt que des prêts bonifiés ou des prêts fléchés, de faire émerger un marché obligataire à disposition des PME et de soustraire à l'impôt sur les sociétés une partie des frais d'affacturage qui échappent d'ailleurs au travail réel des PME car la réduction d'ISF, nous l'avons constaté, ne constitue pas une bonne solution pour les PME.

Pour renforcer leurs fonds propres, le conseil suggère de créer des marchés financiers européens pour les PME et, notamment, un marché de valeurs de croissance à réglementations allégées commun, de réorienter la dépense publique en faveur de la recherche et du développement vers les entreprises de taille moyenne et l'épargne vers les PME, notamment l'assurance vie. Une proposition de loi de la députée Mme Brunel, reprenant cette dernière suggestion, sera bientôt examinée par le Sénat ; une autre de M. Arthuis, visant opportunément à réduire de trente à six mois le délai pour réinvestir les fonds collectés auprès des contribuables afin de renforcer l'efficacité de la réduction d'ISF au titre de souscription au capital des PME, a été déposée sur le bureau du Sénat.

Parce que le financement des PME, qui représentent 66 % de l'emploi marchand et 56 % de la valeur ajoutée marchande, est essentiel, ces propositions doivent être rapidement évaluées et mises en oeuvre. Il y va de l'avenir de nos PME !

M. André Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique.  - Permettez-moi d'excuser l'absence de M. Novelli, retenu ce matin. Le rapport du conseil d'analyse économique du 3 novembre dernier inspire largement les mesures que le Gouvernement a prises pour enrayer la crise mondiale et préparer sa sortie. Pas moins de 26 milliards ont été mobilisés en faveur des PME, via la déconcentration des excédents d'épargne réglementée et la garantie d'Oseo. Celle-ci, conformément aux préconisations du rapport, s'applique désormais aux crédits de court terme, couvre jusqu'à 90 % les prêts et peut profiter aux entreprises de moins de 5 000 salariés.

La proposition de loi de Mme Brunel, que votre commission des finances examinera le 3 juin, permettra de faire la transparence sur le financement des PME avec une publication régulière des encours de crédits bancaires consentis aux PME et des investissements réalisés dans les PME par les assurances. Mais la transparence ne suffit pas, il faut accélérer les investissements. Le 6 avril, Mme Lagarde et M. Novelli ont obtenu que la communauté des investisseurs français, publics et privés, réunie autour du Médiateur du crédit, s'y engagent contractuellement.

Au reste, avant l'explosion de la crise, nous nous étions donnés les moyens de répondre à ces difficultés avec le dispositif ISF-PME, salutaire pour nombre d'entreprises, institué par la loi Tepa. Celui-ci a connu un franc succès pour sa première année d'application, avec près d'un milliard de fonds propres levés en 2008. Au regard des besoins accrus des entreprises, nous pouvons étudier l'opportunité de relever le plafond de cette mesure.

M. Claude Biwer.  - Dans votre réponse, vous avez dressé un tableau complet des mesures prise par le Gouvernement pour faire face à la crise et préparer la sortie de crise, ce dont je vous remercie : il faut désormais aller vite car certaines petites entreprises en sont aujourd'hui réduites à la mendicité pour survivre. Je souhaite vivement que ces dispositifs portent leurs fruits car les banquiers se fondent sur les fonds propres des entreprises pour leur accorder ou non des crédits.

Recensement et dotations des communes

M. Martial Bourquin.  - Depuis le 1er janvier 2009, le calcul des dotations d'État prend en compte un nouveau mode de recensement de la population, actualisé tous les ans. C'est sur cette population légale actualisée que se fondent le montant de la DGF ainsi que l'attribution ou non de la DSU et la DDU. Avec le délai de trois ans que prévoit la loi, il y a parfois un tel écart entre la population légale et la population réelle que des communes sont pénalisées.

La commune de Grand-Charmont, dans le Doubs, est classée parmi les 100 communes de plus de 5 000 habitants les plus pauvres de notre pays. Elle est éligible à la DSU et à la DDU. Sa population légale a légèrement diminué en 2006 et 2007 et est passée en-deçà du seuil de 5 000 habitants. La raison en est que cette ville s'est engagée dans un programme de démolition-construction de 161 logements. Doit-elle payer cette initiative par une forte baisse de dotations ? Ce serait incompréhensible. D'autant que, depuis 2007, Grand-Charmont bénéficie d'un potentiel de 516 habitants et que 287 permis de construire sont en cours d'instruction. Ces faits sont attestés par un recensement complémentaire et reconnus par l'administration fiscale. Attestés mais pas pris en compte ! La ville subit en effet, en 2009, une baisse de 391 856 euros sur un budget de fonctionnement de 4,7 millions. Or c'est maintenant qu'elle a besoin d'investir pour assurer des services à ses nouveaux habitants, pas dans trois ans, quand son dynamisme sera enfin pris en compte, et c'est maintenant qu'elle se retrouve pieds et poings liés avec une chute brutale de ses recettes.

Ne nous y trompons pas, ce sont les petites communes et les villes les plus pauvres qui souffrent d'une application tatillonne de ce mode de calcul. Les collectivités ont besoin de stabilité et de continuité pour mener à bien leurs missions dans la cohérence.

Comment allez-vous prendre en compte les écarts entre population légale et population réelle ? Les dispositifs de lissage prévus par la loi ne sont, à l'évidence, pas suffisants. Comment allez-vous régler la situation de Grand-Charmont ? Nous ne vous demandons pas l'aumône mais de faire en sorte qu'une commune très active puisse continuer à investir pour ses habitants.

M. Yves Jégo, secrétaire d'État chargé de l'outre-mer.  - Le dispositif de recensement, rénové par la loi du 27 février 2002, repose sur un cycle pluriannuel d'enquêtes qui permet d'actualiser tous les ans la population à prendre en compte dans le calcul des dotations de l'État. Pour garantir l'égalité de traitement entre les communes, la population légale, qu'elle soit recensée au début ou à la fin de la période de recensement, est calculée par référence à l'année du milieu du cycle. C'est ainsi qu'en 2009, à l'issue d'un cycle d'enquêtes réalisées de 2004 à 2008, l'année de référence est 2006.

Le Gouvernement reste cependant très attentif à la situation des communes qui subissent d'importantes pertes de population. Des mécanismes correctifs ont été mis en place pour le calcul de leurs dotations. Ainsi, pour les communes qui perdent plus de 10 % de leur population entre 2008 et 2009, la dernière loi de finances prévoit que la dotation de base des communes est augmentée en 2009 de 50 % de la différence entre le montant de dotation perçu en 2008 et le montant calculé sur la base des nouveaux chiffres pour 2009.

Les communes qui subissent une perte de population pour l'exercice 2009 mais dont le dynamisme démographique est réel sur les dernières années connaîtront une augmentation pour l'exercice suivant puisque, au 1er janvier 2010, seront pris en compte les chiffres de la population légale estimée au 1er janvier 2007.

Maire d'une commune qui a les mêmes problèmes que la vôtre, j'imagine que vous pourrez demander un lissage aux services fiscaux...

M. Martial Bourquin.  - Je connais le dispositif prévu par la loi ; je souhaite qu'on fasse quelque chose pour des communes qui ont perdu puis regagné des habitants. On ne peut nous priver ainsi de 10 % de notre budget de fonctionnement, ce n'est pas tenable ! Le préfet de région ne pourrait-il geler une telle disposition pour les communes qui connaissent une situation analogue ? Celles-ci doivent pouvoir investir pour les habitants dont elles ont la charge.

Sapeurs-pompiers volontaires

Mme Esther Sittler.  - Les sapeurs-pompiers volontaires constituent le coeur de notre sécurité civile. Or, leur nombre baisse depuis une dizaine d'années. Dans le Bas-Rhin, leur nombre est passé de 11 000 il y a dix ans à 5 922. Cette crise de l'engagement se traduit par un vieillissement des volontaires : dans mon département, la moyenne d'âge des pompiers exerçant dans les centres de première intervention est de 39 ans et de 45 ans pour l'encadrement. Outre le fait que les deux tiers des jeunes ne deviennent pas pompiers, leur nombre est passé de 1 200 il y a cinq ans à 710.

Reconnaissant, lors du congrès des sapeurs-pompiers de France au mois d'octobre 2008, que « le volontariat n'échappe pas aux profondes mutations sociales, économiques et culturelles de notre pays », la ministre de l'intérieur a annoncé la mise en place d'une commission Ambition volontariat, chargée de mener une « réflexion pragmatique et prospective pour encourager et consolider le volontariat ».

Cette commission a-t-elle rendu ses conclusions ? Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour régler ce grave problème à très court terme, notamment dans le domaine de la formation ?

M. Yves Jégo, secrétaire d'État chargé de l'outre-mer.  - Les collectivités locales et l'État, notamment au travers de la loi du 13 août 2004 et du plan d'action signé en 2006 avec les employeurs des sapeurs-pompiers volontaires, ont déjà apporté des réponses. Pour autant, il est impératif d'asseoir le volontariat dans la durée, c'est pourquoi la commission Ambition volontariat a été chargée d'apporter une vision prospective.

Présidée par M. Luc Ferry, ancien ministre, président délégué du conseil d'analyse de la société, elle réunit, depuis le 2 avril, parlementaires, élus locaux, sapeurs-pompiers volontaires, employeurs, universitaires. Fondée sur une étude sociologique qui, dans huit départements, donne la parole à plusieurs centaines de sapeurs-pompiers volontaires, d'élus locaux ou d'employeurs, elle va analyser en profondeur le volontariat, ses forces et ses faiblesses pour les années à venir. Son rapport, qui doit être rendu en septembre 2009, posera les bases d'une charte du volontariat, qui constituera un guide pour les politiques conduites par l'État et les collectivités locales jusqu'en 2020.

Mme Esther Sittler.  - Je patienterai donc jusqu'en septembre...

J'espère que cette commission se souviendra des tempêtes de 1999 et des enseignements qu'on a dû en tirer. J'ai vu dans ma commune à quels travaux de déblaiement ont dû se livrer les pompiers volontaires, et ce que cela suppose pour leur formation, qui devrait être adaptée.

Emploi en Guyane

M. Georges Patient.  - Je reviens sur l'exigence de développement économique qu'impose la situation de la Guyane. Le taux de chômage, déjà très élevé en raison de la faiblesse de l'activité économique, ne cesse de s'amplifier en raison d'une croissance démographique exponentielle -avec 3,9 %, nous sommes parmi les plus forts taux d'accroissement du monde !- et de la chute vertigineuse que subissent les principaux secteurs productifs. Pour que l'offre globale d'emploi et la demande d'emploi évoluent de façon raisonnablement parallèle, il faudrait créer plusieurs milliers d'emplois par an, dont entre 1 500 et 2 000 dans les activités productives. On en est très loin. La filière rizicole, qui constituait un des fers de lance de l'économie guyanaise, connaît une chute vertigineuse de sa production : celle-ci est passée de 30 000 tonnes en 2006 à 8 000 tonnes en 2007 alors que la demande mondiale est en forte hausse.

Dans le secteur de la pêche, essentiel en Guyane, l'activité est aussi en chute libre, notamment pour des raisons financières : les aides Oseo et les prêts de la BEI aux PME ne parviennent pas jusque chez nous... Quant au bois, alors que la forêt couvre 96 % du département, nous en exportons pour 2,6 millions d'euros mais en importons pour 10 millions. La concurrence du Brésil, mais aussi de la France métropolitaine, est de plus en plus vive. La filière aurifère est affectée par l'orpaillage clandestin et les exigences mal comprises de la Drir. Au 31 décembre 2006, la production officielle atteignait à peine 1 tonne, contre 4 tonnes au début de la décennie. Et pourtant, ces secteurs représentent des atouts pour le développement endogène dont vous faites la clé de voûte de votre politique ultramarine. Que compte faire l'État pour accompagner l'essor de ces filières ?

M. Yves Jégo, secrétaire d'État chargé de l'outre-mer.  - Le Gouvernement est soucieux d'apporter des réponses concrètes ; il a confié une mission à M. Dehecq, qui vient de remettre un rapport au Gouvernement comportant des orientations stratégiques pour développer les activités productrices d'emplois. Je songe à la pêche, au bois, à la production aurifère, à la recherche, à la riziculture... Le Gouvernement s'engage dans le soutien aux filières. Le 4 avril dernier, j'étais dans votre commune, monsieur Patient, et je vous remercie d'avoir accepté une mission de bons offices portant sur la culture du riz. Souvent, la panne économique tient à l'insuffisante structuration des filières et à des blocages. Le Gouvernement envisage de désigner un commissaire au développement économique et à la production, à l'image des commissaires à l'industrialisation mis en place par la Datar dans les secteurs en grande difficulté, pour soutenir les filières, favoriser leur professionnalisation et attirer les investisseurs. Des décisions seront prises lors de la réunion en octobre prochain du conseil interministériel de l'outre-mer. Au-delà des discours et des rapports, nous passons aux actes, pour créer de l'activité et des emplois.

M. Georges Patient.  - Quand il existe une volonté politique forte, on peut progresser. Ainsi, la base spatiale de Kourou est une réussite locale, due à une volonté forte de l'État. Les secteurs que j'ai évoqués existent, il faut les soutenir. Une délégation de sénateurs s'est rendu compte, sur place, des réalités guyanaises. Il faut un engagement convaincu de l'État, mais aussi des moyens, pour développer notre économie.

Délocalisation de services pénitentiaires

M. Roland Ries.  - Le Gouvernement a décidé de délocaliser de Strasbourg à Nancy la direction interrégionale des services pénitentiaires Est. C'est un coup dur pour la ville dont je suis le maire, pour la communauté urbaine de Strasbourg, pour la région Alsace. Et tous les élus, quelle que soit leur appartenance politique, de Mme Keller, l'ancien maire, à M. Zeller, le président de la région, ainsi que nos trois députés, sont plongés dans la stupeur et l'indignation. La décision a été prise sans aucune concertation entre le ministre de la justice et la ville de Strasbourg, ni entre le ministère et le personnel concerné. Elle est dispendieuse, puisque le déménagement coûtera 11 millions d'euros, alors que 3,6 millions d'euros ont été consacrés à la rénovation des locaux qui abritent actuellement 145 agents. Ceux-ci vivent bien sûr très mal la nouvelle de la délocalisation, d'autant que des villes de taille comparable à la nôtre ne sont pas soumises au même couperet et que Strasbourg est la capitale européenne de la justice, abritant la Cour européenne des droits de l'homme et le Conseil de l'Europe, qui élabore les règles pénitentiaires européennes. Nous demandons au Gouvernement de revenir sur cette décision inacceptable.

M. Yves Jégo, secrétaire d'État chargé de l'outre-mer.  - Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, le comité de modernisation des politiques publiques a décidé, en décembre 2007, de revoir l'implantation sur le territoire des services déconcentrés de la justice et de regrouper sur neuf plateformes mutualisées les agents des directions interrégionales de l'administration pénitentiaire, ceux de la protection judiciaire de la jeunesse et les agents administratifs des cours d'appel. Les sièges retenus pour ces plateformes sont Bordeaux, Dijon, Lille, Lyon, Marseille, Nancy, Paris, Rennes et Toulouse.

Pourquoi Nancy ? Parce que s'y trouve déjà la cour d'appel et la direction interrégionale de la PJJ et parce que la ville occupe une situation plus centrale au sein de l'inter-région du Grand Est. Il est néanmoins envisageable de laisser à Strasbourg une antenne pour gérer les fonctions qui n'ont pas vocation à être mutualisées, comme la sécurité. La décision du Gouvernement a été guidée par un souci de bonne administration de la justice.

M. Roland Ries.  - Vous concevrez bien que cette réponse ne me satisfait pas. Elle ne satisfait pas non plus les 145 personnes qui devront quitter Strasbourg sans avoir été consultées. Quelle est la motivation profonde de cette décision ? Certes, la RGPP commande tout, mais les coûts de la délocalisation sont importants et 145 agents vont devoir quitter Strasbourg sans avoir été consultés...

Vous parlez de maintenir une antenne dans notre ville : j'espère obtenir des précisions à ce sujet, notamment le nombre de fonctionnaires concernés.

Avenir des IUT

M. Philippe Madrelle.  - Créés il y a quarante ans, les IUT sont une originalité enviée du système universitaire français. Faudra-t-il bientôt en parler à l'imparfait ? Entendant l'inquiétude des enseignants, j'avais demandé à Mme Pécresse, il y a quelques mois, que les IUT continuent à être dotés selon des modalités respectant leurs spécificités.

Dans sa réponse du 20 janvier dernier, la ministre rappelait que les IUT « sont les piliers de notre système d'enseignement supérieur » et que la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU) devait profiter à ces instituts dont les budgets, loin de baisser, devaient au contraire être consolidés.

La réalité est tout autre. A titre d'exemple, en application de la LRU et du nouveau système d'allocation des ressources budgétaires pour les établissements publics (Sympa), l'IUT de l'université de Bordeaux III se trouverait amputé de près de 37 % de sa dotation et d'un quart de ses emplois, ce qui représente une perte de 300 000 euros sur un budget de 820 000 euros. Les directeurs d'IUT dénoncent l'inadaptation de ce nouveau système d'allocation aux besoins de l'enseignement supérieur technologique. Le précédent système, Sanremo, était basé sur les besoins déterminés à partir d'un programme pédagogique national, ce qui avait le mérite de préserver l'aspect national et la valeur du diplôme, quel que soit l'IUT, quelle que soit la région de France.

Face à une telle paupérisation, l'inquiétude des professeurs, mais aussi des étudiants et de leurs familles, est grande. Privés de moyens et de budget, les IUT sont en péril. Malgré la charte de bonne conduite -pour les relations université-IUT-, malgré le contrat d'objectifs et de moyens à négocier en 2009 par chaque IUT avec son université et malgré la création d'un comité de suivi quadripartite -présidents d'université et d'IUT, directeur d'IUT et DGESIP du ministère-, le système Sympa fera baisser de 35 % en moyenne la dotation globale de fonctionnement et d'investissement et supprimera de 15 à 25 % de postes statutaires qui ne sauraient être compensés par des contrats précaires. Tout cela menace la pérennité des IUT, alors que toutes les enquêtes nationales montrent la réussite professionnelle de leurs diplômés. Depuis quarante ans, ces instituts forment des techniciens supérieurs et des cadres intermédiaires et cette filière universitaire et professionnelle est unanimement reconnue par les entreprises. Les 116 IUT de France, qui ont été un des vecteurs essentiels de la démocratisation et de la professionnalisation de l'enseignement supérieur, accueillent plus de 140 000 étudiants dont 36 % de boursiers qui réussissent à plus de 75 %. Ce partenariat entre l'Université et les milieux professionnels les plus variés est, en France, un exemple original qui fonctionne bien.

Décidément, le désengagement de l'État n'épargne aucun domaine, ni les collectivités locales, ni l'hôpital public, ni les transports, ni aucun service public. Après quatre mois de conflit, les universités françaises semblent toujours dans l'impasse et sont très affaiblies. On a l'impression d'un grand gâchis. Que propose la ministre pour assurer la survie des IUT ? Elle ne peut prendre la responsabilité de casser ainsi quelque chose qui marche et que nous envient les universités étrangères. Sa réponse est attendue avec fébrilité.

M. Yves Jégo, secrétaire d'État chargé de l'outre-mer.  - Je vous prie d'abord d'excuser Mme Pécresse, retenue au Collège de France. Vous parlez d'une diminution potentielle de crédits. C'est le contraire qui est vrai et votre présentation de la situation de l'IUT de Bordeaux III ne correspond pas aux décisions du Gouvernement issues de la loi LRU. Cet institut dépend de l'université de Bordeaux III, laquelle dispose d'un budget que, désormais, elle administre librement. Or, le budget de cette université augmente, en 2009, de 17 %, ce qui ne s'est jamais vu dans son histoire récente ! Même pour créer de la fébrilité, ce qui peut être utile à certaines périodes pour certains combats politiques, il ne faut pas dire n'importe quoi : la réalité, c'est que le budget de Bordeaux III augmente de 17,6 % et que de nombreuses garanties ont été apportées pour stabiliser les relations entre les universités et leurs IUT.

La ministre ne peut que vous confirmer le grand attachement du Gouvernement pour ces instituts, qui l'a poussée à faire adopter des mesures comme, en décembre dernier, les chartes de bonnes relations entre les universités et leurs IUT. En outre, toutes les universités travaillent en ce moment à des contrats d'objectifs, finalisés en juin, tendant à la bonne allocation de crédits à leurs IUT ; les présidents d'université se sont engagés à maintenir leurs crédits jusqu'en 2010.

Vous n'avez donc aucune raison d'être inquiet sur la volonté du Gouvernement, sur sa volonté politique -que vous ne partagez pas- de faire vivre l'autonomie des universités et, donc, de laisser le conseil d'administration de Bordeaux III décider de l'affectation de crédits pour son IUT.

M. Philippe Madrelle.  - Le budget de l'IUT pour 2009 est reconduit sur les bases de celui de 2008. Mais le système Sympa, qui entre en vigueur en 2009, aura, en 2010, de graves conséquences sur les budgets et l'emploi. Comment certaines universités, comme celle de Bordeaux III, pourront-elles accorder autant à leurs IUT alors qu'elles recevront moins ? Le problème de fond, c'est le désengagement de l'État.

CAF du Val-de-Marne

Mme Odette Terrade.  - Ma question porte sur les Caisses d'allocations familiales. Depuis plusieurs mois, les allocataires subissent des retards inadmissibles dans le traitement de leur situation et le paiement de leurs prestations, ce qui ajoute encore à leurs difficultés sociales quotidiennes. Plusieurs de mes collègues de différents départements ont déjà interpellé Mme Létard à ce sujet. Par exemple, la CAF de Rouen, fréquentée quotidiennement par 800 à 900 personnes, a fermé l'accueil du public un jour par semaine pour traiter ses dossiers en retard. En Val-de-Marne, pour tenter de résorber ses 230 000 dossiers en attente, la caisse a fermé ses guichets durant trois semaines en avril dernier. En effet, aux 136 000 dossiers non traités -soit deux mois de retard- se sont ajoutés, en janvier, les ratés de la transmission automatique des ressources des familles via les fichiers des impôts. Aujourd'hui, l'accueil du public est assuré trois jours sur cinq mais il reste encore 110 000 dossiers en attente -ce qui équivaut à onze jours de retard- alors que, dans les prochains jours, la CAF du Val-de-Marne devra, comme toutes les autres, faire face à la mise en oeuvre du Revenu de solidarité active, soit environ, pour le département, 80 000 dossiers dont 50 000 nouveaux non encore connus de ses services.

Les files d'attente ne diminuent donc pas et les conditions d'accueil sont déplorables pour les usagers comme pour le personnel, à qui on demande d'effectuer des heures supplémentaires chaque jour. Nul doute que la suppression au plan national de 10 000 postes en deux ans contribue à cette situation qui illustre les méfaits de la révision générale des politiques publiques, que l'on devrait plutôt appeler réduction générale des politiques publiques. Pourtant, dès octobre 2008, le personnel de la caisse nationale et ses représentants syndicaux avaient alerté sur les dangers de la réorganisation imposée par leur direction, dénonçant notamment le manque d'effectifs récurrent depuis plusieurs années. Beaucoup de salariés sont à saturation. Dans un département qui compte 325 000 allocataires et 8 000 dossiers entrants chaque jour, les 109 recrutements en remplacement des départs en retraite et les 22 prévus pour la mise en place du RSA ne suffiront pas. La législation est complexe, il existe plus de 15 000 textes réglementaires, si bien que le personnel recruté doit être formé pendant un an avant d'être opérationnel. Aujourd'hui, 30 personnes étant toujours en formation, seulement 79 sont réellement en activité, dont 15 depuis le lundi 25 mai.

Pourtant, l'organisme de tutelle des CAF affichait, pour 2007, 40 millions d'excédents budgétaires. Les moyens existent donc de répondre à la demande immédiate de moyens exceptionnels pour faire face à la situation actuelle et pour doter les caisses des emplois pérennes nécessaires à une gestion efficace, respectueuse des allocataires et du personnel. A la veille de la mise en place du Revenu de solidarité active, quels moyens urgents le Gouvernement compte-t-il mettre en oeuvre pour que la CAF du Val-de-Marne et toutes les autres puissent fonctionner correctement et assurer dans de bonnes conditions le service public que les usagers sont en droit d'en attendre.

M. Yves Jégo, secrétaire d'État chargé de l'outre-mer.  - Le Gouvernement suit avec beaucoup de vigilance la situation des caisses d'allocations familiales et tient également à saluer le travail exceptionnel de leurs agents. Au premier trimestre 2009, 81 % des personnes étaient accueillies en moins de vingt minutes et 92,5 % des minima sociaux ont été traités en moins de dix jours, ce qui est une performance.

Il est vrai que la charge d'activité des CAF a récemment sensiblement augmenté du fait des mesures de solidarité décidées par le Président de la République, au premier rang desquelles la création du RSA et la réforme de la déclaration de ressources. Il faut se réjouir de la mise en oeuvre du RSA, effort sans précédent qui fera sortir près d'un million de nos compatriotes de la pauvreté.

Pour que sa mise en place se déroule dans les meilleures conditions, la Cnaf a donné son autorisation pour 1 007 embauches, auxquelles s'ajouteront les 614 emplois supplémentaires prévus par redéploiements internes grâce aux gains de productivité réalisés par la branche famille.

La convention d'objectifs et de gestion signée pour la période 2009-2012 prévoit en outre la mise en place, en plus des 1 621 emplois déjà accordés au titre du RSA, de 250 emplois supplémentaires dès avril 2009.

Le Gouvernement a demandé à la Cnaf d'établir une cartographie des points de tension sur le territoire. Rendez-vous est fixé avant l'été pour assurer la coordination en vue de la rentrée et décider, le cas échéant, des moyens supplémentaires à accorder aux caisses les plus en difficulté.

La CAF du Val-de-Marne, dont vous évoquez la situation, a été réorganisée et les processus de traitement adaptés. Je puis vous confirmer que 80 000 foyers ont reçu, début avril, la prime exceptionnelle de 200 euros. Au 15 avril, 19 % des demandes de minima étaient traitées en moins de dix jours et le stock en instance était déjà réduit de moitié fin avril.

La CAF du Val-de-Marne, comme les 122 autres, a donc été mise en mesure de remplir ses missions et je puis vous assurer que le Gouvernement fait toute diligence pour leur assurer les moyens humains et technologiques pour faire face à leur mission sociale.

Mme Odette Terrade.  - J'aurais pu également exposer la situation dans les DOM, où la situation des CAF a été évoquée au cours de toutes les auditions qu'a conduites notre récente mission d'information. Vouloir toujours faire plus avec moins a ses limites, on le voit ici. Le caractère à la fois spécialisé et polyvalent des agents des CAF ne permet pas de pallier le manque d'effectifs. J'ai bien pris note du rendez-vous fixé fin juin. Les salariés et leurs représentants alertent sur les risques d'engorgement : souhaitons qu'ils soient entendus. Refuser des moyens que tous les partenaires réclament serait organiser la faillite d'un service public indispensable à nos concitoyens.

Soutien aux crèches interentreprises

M. Charles Gautier.  - Depuis la conférence de la famille en 2003, les établissements de gardes d'enfants sont accessibles au secteur privé. Pour augmenter le développement de places en crèche, le Gouvernement a mis en place deux dispositifs. Le contrat enfance jeunesse (CEJ), tout d'abord, est destiné aux établissements privés d'accueil de jeunes enfants. La Cnaf, qui verse cette subvention permettant de financer 55 % du montant restant à charge pour ces structures, n'a pas souhaité que les entreprises de crèches, soit les gestionnaires d'établissement de garde d'enfants, bénéficient de ce financement.

Une mesure fiscale destinée aux employeurs qui prennent en charge une quote-part des frais de garde des enfants de leur personnel a également été mise en place. Depuis 2009, ce crédit impôt famille (CIF) correspond à 50 % des dépenses engagées dans ce domaine.

La combinaison de ces deux mesures, incitatives pour les employeurs, permettait de diminuer le coût d'une place en crèche. Les petites entreprises pouvaient ainsi se fédérer et créer un établissement de garde. Ce plan les encourageait à participer à la fois au financement de l'investissement et au fonctionnement des crèches.

Aujourd'hui, le Gouvernement semble revoir sa position. Soumis à la pression du lobbying des entreprises de crèches, il demande aux structures d'accueil de choisir entre ces deux dispositifs. Si l'entité choisit le contrat enfance jeunesse, elle diminue le coût de revient d'une place mais sanctionne son client « entreprise » en le privant du crédit d'impôt. Inversement, si elle renonce au financement de la Cnaf, elle augmente irrémédiablement le prix de la place, malgré l'avantage fiscal.

Enfin, il ne faut pas oublier qu'à l'intérieur d'une crèche interentreprises, la typologie des entreprises peut être variée : entreprises privées soumises à l'impôt sur le revenu, à l'impôt sur les sociétés, mais également associations participant à l'économie locale, embauchant du personnel mais non fiscalisées. En modifiant la politique familiale, le Gouvernement n'a pas pris conscience de l'impact d'une telle mesure sur le développement des crèches. Un exemple : à l'annonce de ces modifications, un projet très avancé de crèche associative à Saint-Nazaire, dans mon département, réunissant des entreprises et deux associations du secteur médical, non éligible au CIF, a été abandonné.

Sans un soutien, via le CEJ, aux projets interentreprises, la promesse gouvernementale de créer 350 000 places de crèche d'ici à 2012 ne pourra être tenue. Comment les employeurs, en particulier dans les PME et PMI déjà affaiblies par la crise économique, pourraient-ils s'engager sur de tels montants ?

Afin de favoriser l'ensemble des modes de garde d'enfants, et sans remettre en cause les avantages obtenus par les entreprises de crèche, il serait bon que soit maintenu, pour les crèches interentreprises, le bénéfice du CEJ, dans le cadre d'un contrat d'objectifs avec la Cnaf, couplé au crédit impôt famille, à hauteur, au minimum, de 25 %.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité.  - Pour accompagner notre fort taux de natalité, couplé à un taux d'activité des femmes élevé, de l'ordre de 82 %, nous devons créer 200 000 offres de garde supplémentaires. Cet objectif peut être atteint grâce à la diversification des modes de garde, à l'assouplissement des normes et à l'optimisation des capacités existantes.

Parce que le développement des crèches d'entreprise, et plus généralement du secteur privé de l'accueil de la petite enfance, constitue un vecteur de développement de l'offre de garde approprié, de nombreuses mesures sociales et fiscales sont prises en faveur de ce secteur. Ainsi, l'État et la branche famille ont souhaité développer un partenariat entre les CAF et les entreprises afin d'accroître et de diversifier l'offre d'accueil. Trois mesures ont ainsi été prises.

Les crèches d'entreprises peuvent désormais bénéficier, comme les autres opérateurs, des prestations de service servies par les CAF. Elles fonctionnent donc généralement grâce à un financement de l'employeur, parfois complété par des subventions de la CAF, des collectivités territoriales et une participation financière du salarié calquée sur les barèmes établis par la Cnaf.

Les entreprises de crèches, c'est-à-dire les entreprises souhaitant faire de la gestion d'un ou plusieurs établissements d'accueil de jeunes enfants leur activité principale, ont, quant à elles, été rendues éligibles aux différents plans d'aide à l'investissement.

Enfin, les entreprises qui construisent des structures de garde ou participent aux frais de garde de leurs salariés peuvent déduire ces dépenses du montant de leur impôt sur les sociétés, dans le cadre du crédit impôt famille, qui vient d'être porté, pour plus d'efficacité, à 50 % du montant des dépenses éligibles.

Une évaluation de l'efficacité de cet ensemble de dispositifs paraît nécessaire avant d'envisager une nouvelle adaptation. Elle portera notamment sur la question qui vous préoccupe, soit celle du cumul entre avantage fiscal et subventions de fonctionnement versées par la branche famille au bénéfice d'une crèche de salariés. Mme Morano a demandé à ce qu'un travail d'expertise et de concertation soit mené en liaison avec les diverses administrations et organismes sociaux concernés. Il conviendra de tenir compte, parmi les éléments d'appréciation, du fait que les crèches publiques ne bénéficient que du CEJ et pas du crédit impôt famille, fortement revalorisé récemment : toute décision prise en faveur des structures privées ne bénéficierait pas aux crèches publiques.

Sur cette question, qui soulève d'importants enjeux pour le développement de la garde d'enfants, le Gouvernement est pleinement mobilisé. Je ferai part à Mme Morano des propositions que vous venez de formuler.

M. Charles Gautier.  - Nous partageons tous cette volonté de favoriser l'accueil des jeunes enfants, au coeur de nos projets économiques et sociaux locaux. Je serais attentif aux résultats de l'évaluation, dont j'aimerais connaître les délais de publication.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État.  - Je m'engage à vous les indiquer au plus vite.

Aide aux entreprises adaptées

M. Gilbert Barbier.  - Les entreprises adaptées permettent aux personnes handicapées d'exercer une activité professionnelle qui, leur apportant expérience et qualification, peut les aider à retrouver le chemin de l'emploi. Si leur finalité sociale est donc indéniable, il ne faut pas oublier qu'elles sont aussi, à part entière, des entreprises du secteur marchand concurrentiel. Au nombre de 600, elles emploient 25 000 salariés dont 20 000 handicapés dans tous les domaines de l'industrie et des services.

La réduction générale de cotisations patronales de sécurité sociale, dite réduction Fillon, prévue par la loi du 17 janvier 2003, ne bénéficie pas aux entreprises adaptées gérées par des établissements publics, auxquelles a toutefois été accordé une dérogation. Or celle-ci doit prendre fin au 31 décembre 2009, ce qui menace la survie de ces entreprises. Une modification du dispositif réglementaire serait la bienvenue pour étendre la réduction Fillon à toutes les entreprises adaptées.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité.  - Depuis 2005, les 648 entreprises adaptées relèvent du milieu ordinaire de travail. Elles sont soumises aux mêmes obligations que les entreprises du milieu concurrentiel mais conservent leur mission sociale. En contrepartie, elles bénéficient d'une aide au poste forfaitaire pour chaque travailleur handicapé et d'une aide à la structure, soit près de 300 millions par an.

Les allégements Fillon ne s'appliquent pas aux établissements publics administratifs. Toutefois, le Gouvernement a autorisé les 19 entreprises adaptées concernées à en bénéficier, à titre dérogatoire, le temps de passer, si elles le souhaitent, à un statut d'établissement public industriel et commercial ou d'association. La délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle a rencontré en février le groupe national des établissements publics sociaux et médico-sociaux afin de définir les modalités d'accompagnement.

Le Gouvernement attend les conclusions de l'étude sur cette évolution statutaire, financée par le secrétariat d'État à l'emploi, qui seront connues en juin 2009. Il veillera à ne pas porter préjudice à ces entreprises et cherchera avec elles des solutions pérennes.

M. Gilbert Barbier.  - Merci de votre réponse, mais l'inquiétude est réelle. La dérogation sera-t-elle reconduite ? Les EPA devront-ils se séparer de ces entreprises adaptées ? Je vous interrogerai à nouveau une fois les conclusions de l'étude connues.

Suppression de la taxe professionnelle

M. René-Pierre Signé.  - Nous aurons un débat plus approfondi sur ce sujet le 10 juin ; la longueur du délai entre le dépôt d'une question et son inscription à l'ordre du jour explique ce doublon...

Les réformes successives de la taxe professionnelle ces dernières années ont conduit l'État à exonérer nombre de redevables et à compenser partiellement la baisse de recettes pour les collectivités par une majoration des dotations. Toute exonération nouvelle entamerait les budgets des collectivités en supprimant leur recette principale.

Début mars, le Gouvernement a évoqué plusieurs pistes pour la compensation de la suppression de la taxe professionnelle : majoration de la part de la taxe spéciale sur les conventions d'assurance et de la Tipp affectée aux collectivités, relèvement des bases foncières industrielles, création d'une taxe sur la valeur ajoutée. Certains impôts énergétiques pourraient être relevés, tout comme la taxe spéciale sur les pylônes et la taxe sur l'installation nucléaire de base. Toutes ces propositions entretiennent l'impression de flou et nourrissent l'inquiétude des élus. Pouvez-vous nous donner des détails sur les mesures compensatoires pour les collectivités ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité.  - Le Président de la République a annoncé le 5 février la suppression de la taxe professionnelle sur les investissements productifs, prélèvement qui n'existe dans aucun autre pays développé. En taxant l'outil de production, que l'entreprise soit rentable ou non, la taxe professionnelle dissuade les entreprises d'investir sur notre territoire et encourage les délocalisations.

Le Premier ministre a garanti une compensation intégrale et a demandé à Mme Lagarde d'engager la concertation avec les élus et les entreprises afin de les associer pleinement aux travaux préparatoires. Christine Lagarde et Michèle Alliot-Marie ont rencontré les représentants des associations d'élus une première fois le 10 avril dernier et ceux des entreprises le 22 avril pour leur présenter des pistes possibles de compensation.

Celles-ci sont multiples : transfert de ressources fiscales, dotations budgétaires, augmentation ou création de taxes locales. Aucune nouvelle taxe sur la valeur ajoutée n'a été proposée, même si la cotisation minimale repose sur la valeur ajoutée. Concernant les impôts énergétiques, le Gouvernement n'a pas été aussi précis que vous. L'objectif est de mettre en place des taxes locales sectorielles qui bénéficient aux collectivités en évitant les effets d'aubaines.

Les travaux sont en cours, les hypothèses ne sont pas figées. La concertation se poursuit dans un climat de confiance. La volonté d'aboutir est partagée car chacun a conscience de la nécessité de cette réforme. En tout état de cause, les collectivités ne verront pas leurs ressources diminuer. Le Premier ministre l'a garanti.

M. René-Pierre Signé.  - Merci de cette réponse rassurante. La taxe professionnelle est la principale ressource des collectivités locales, qui représentent 73 % de l'investissement public, et aucun économiste n'a démontré l'intérêt de sa suppression...

Nous sommes favorables à une réforme globale de la fiscalité locale, si elle est mesurée et responsable. Il ne peut être question de réduire les recettes des collectivités, ni de faire peser la compensation sur les ménages. Vous faites un cadeau aux entreprises, sans contrepartie, en supprimant qui plus est le lien entre territoires et entreprises. Enfin, les élus ne sont guère favorables aux impôts énergétiques, qui n'assurent pas des ressources régulières. Nous attendons donc de connaître les propositions du Gouvernement pour donner notre accord.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État.  - Je préside une communauté d'agglomération de 200 000 habitants, qui investit 70 millions pour accompagner le plan de relance. Comment beaucoup d'élus membres du Gouvernement, je tiens à ce que les collectivités disposent de ressources fiscales dynamiques. (Applaudissements à droite)

M. René-Pierre Signé.  - Vive le cumul des mandats !

La séance est suspendue à midi.

présidence de M. Roland du Luart,vice-président

La séance reprend à 15 heures.