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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Accord en CMP

Sessions plénières du Parlement européen à Strasbourg (Proposition de résolution)

Politique énergétique de la France (Proposition de résolution)

Droit de la chasse

Discussion générale

Discussion des articles

Article premier

Article 2

Article 3

Article 4

Article additionnel

Article 7

Articles additionnels

Vote sur l'ensemble

Prix du livre

(Conclusions de la CMP)

Discussion générale

Vote sur le texte élaboré par la CMP

Régulation du système de distribution de la presse

Discussion générale

Discussion des articles

Article 2

Article 4

Accord en CMP

Sessions plénières du Parlement européen à Strasbourg

Politique énergétique de la France

Droit de la chasse

Discussion générale

Article 6

Article 7

Vote sur l'ensemble




SÉANCE

du jeudi 5 mai 2011

99e séance de la session ordinaire 2010-2011

présidence de M. Roland du Luart,vice-président

Secrétaires : Mme Michelle Demessine, M. François Fortassin.

La séance est ouverte à 9 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Accord en CMP

M. le président.  - La commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité est parvenue à un texte commun.

Sessions plénières du Parlement européen à Strasbourg (Proposition de résolution)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen de la proposition de résolution relative à la tenue des sessions plénières du Parlement européen à Strasbourg, présentée en application de l'article 34-1 de la Constitution.

M. Roland Ries, auteur de la proposition de résolution.  - Le 9 mars, les parlementaires européens ont voté l'amendement Fox ramenant de douze à onze le nombre de sessions plénières du Parlement européen à Strasbourg pour 2012 et 2013. Certains lobbies emmenés par les plus eurosceptiques s'évertuent depuis des années à vider le contenu des sessions du Parlement européen à Strasbourg : adopté à bulletin secret, cet amendement Fox, le bien nommé, entre dans cette logique.

Si la souveraineté du Parlement sur l'organisation de son travail ne peut être contestée, le non-respect manifeste des traités -qui sont sans équivoque sur le siège du Parlement à Strasbourg- n'est pas acceptable. Le Gouvernement a fait savoir son intention de saisir la Cour de Luxembourg.

La Cour, dès 1997, a amendé une disposition de même nature, qui réduisait à onze le nombre de sessions, jugeant que le Parlement doit se réunir à rythme régulier, ajoutant que les sessions plénières se tiennent à Strasbourg.

L'amendement Fox contrevient donc à la jurisprudence communautaire. Il est contraire aux intérêts de l'Union européenne. Un tel calendrier met à mal l'ambition démocratique de l'institution et remet en cause, par la volonté de centralisation des instances décisionnelles qu'il traduit, l'équilibre institutionnel de l'Union.

Strasbourg tient sa légitimité de l'Histoire, dès 1949, avec la fondation du Conseil de l'Europe, avant que Robert Schuman ne prononce l'acte de naissance de la construction communautaire, fondée sur la réconciliation franco-allemande dont Strasbourg est le symbole. Une responsabilité lui incombe dans la construction d'une Europe unie autour des principes de démocratie et des droits de l'homme. Symbole historique de l'humanisme, elle est aussi le siège du Conseil de l'Europe, qui incarne ces mêmes valeurs, de la Commission européenne des droits de l'homme (CEDH), du Médiateur européen.

Il ne s'agit pas d'opposer les trois capitales de l'Union mais de les associer, dans la complémentarité : l'exécutif à Bruxelles, le judiciaire à Luxembourg, le législatif à Strasbourg.

Maintes actions conjointes existent à Strasbourg, comme l'emblématique prix Sakharov.

Alors que les Européens ont besoin de repères forts pour traverser la crise, le rayonnement de Strasbourg contribue pleinement à celui de la France Cette cause nationale requiert l'engagement ferme des plus hautes autorités de l'État. D'où cette proposition de résolution, reprise par nos collègues de l'Assemblée nationale.

En matière d'accessibilité, j'ai invité les bourgmestres de Bruxelles et de Luxembourg à répondre de concert avec nous à la Commission européenne sur la réalisation d'un grand réseau de transport. Dans une déclaration commune en date du 10 septembre 2010, nous avons appelé à la réalisation rapide du projet Eurocaprail et, dès la semaine prochaine, un second Thalis va relier Strasbourg à Bruxelles via Paris.

Les conditions d'hébergement, les prix hôteliers excessifs et le dépassement des per diem suscitent le mécontentement des parlementaires et des fonctionnaires. Nous entendons, pour y remédier, lancer une charte des hôteliers.

Le temps est venu, monsieur le ministre, d'être plus offensif pour parer les attaques. M. Fillon, en 2008, à Copenhague, avait clairement défendu la place de Strasbourg : si les déplacements faisaient problème, pourquoi ne pas réunir tous les services du Parlement européen à Strasbourg, avait-il répondu à un journaliste.

Depuis 1980, dans le cadre d'un contrat triennal, la ville s'est engagée aux côtés de l'État, de la région et du département à oeuvrer en faveur de son rayonnement européen. La volonté et la détermination du Gouvernement français sont plus que jamais essentielles. Je milite pour que Strasbourg devienne le seul lieu du travail du Parlement en y regroupant tous les services : il faut, à cette fin, prendre la mesure des efforts à accomplir pour conforter la vocation européenne et internationale de la ville.

Une réserve foncière de 36 000 m² a d'ores et déjà été constituée pour accueillir les services, autour d'un parc des expositions et un palais des congrès modernisés pour accueillir des manifestations internationales, comme le sommet de l'Otan de 2009.

L'École européenne, dont sortiront les premiers bacheliers en 2014, dote en outre Strasbourg d'une infrastructure essentielle pour les parlementaires, les assistants et les fonctionnaires du Parlement européen.

Tirons parti des attaques pour pousser les feux et les retourner contre leurs auteurs pour mettre un terme à cette guerre absurde et aller au bout de la logique des traités. Je demande le soutien de tous les groupes parlementaires pour être plus fort dans cette bataille. (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Yvon Collin.  - J'associe le sénateur Bockel à mon propos.

En avril 2009, lors du sommet de l'Otan à Strasbourg, le président Obama a constaté qu'après des siècles de conflits, Strasbourg était aujourd'hui devenue le symbole du rayonnement européen.

L'amendement Fox, adopté par un vote à bulletin secret, vise à réduire les déplacements entre Bruxelles et Strasbourg des parlementaires, fonctionnaires et journalistes. Je conviens que la « transhumance parlementaire » est coûteuse mais tout transfert à Bruxelles, symbole, pour les citoyens, de la technocratie européenne, serait un mauvais signal.

En 1949, le ministre britannique Bevin s'exprimait en faveur du choix de Strasbourg, symbole de réconciliation. A ceux qui préfèrent le pragmatisme au symbole, il est bon de le rappeler.

Désignée siège du Parlement en 1958, lors de l'entrée en vigueur de la Communauté européenne du charbon et de l'acier (Ceca), Strasbourg était confirmée dans ce rôle en 1977, à la suite des élargissements. Depuis, protocoles et règlements ont confirmé cette décision, inscrite dans les traités.

Strasbourg est le symbole de l'Europe humaniste et démocrate, en un mot, de cette Europe politique qu'il nous appartient de construire.

La viser, c'est viser le fonctionnement institutionnel de l'Union qui exclut, dans un souci de proximité, la centralisation en un seul lieu.

Les membres du groupe du RDSE, tous profondément européens et tous profondément militants pour une Europe unie, forte et souveraine, approuveront le texte de cette résolution et espèrent qu'elle sera entendue par l'ensemble des 27 pays membres de l'Union. (Applaudissements sur tous les bancs)

Mme Annie David.  - L'Union européenne est de plus en plus contestée par des citoyens confrontés à des crises dont elle porte une certaine responsabilité. Dans un contexte où la dignité des travailleurs est sans cesse sacrifiée sur l'autel de la concurrence libre et non faussée, le débat sur le siège du Parlement européen m'apparaît surréaliste !

Je ne minimise pas, cependant, l'enjeu symbolique du choix de Strasbourg, qui incarne la réconciliation franco-allemande. Sa mise en cause par un vote secret ne dénote pas le plus grand courage ni la certitude du bien-fondé des arguments des partisans de Bruxelles... (« Très bien ! ») Quant aux arguments invoqués, financiers et centralisateurs, ils semblent réduire l'Union européenne à sa capitale économique. C'est oublier que l'Union a fait le choix de décentraliser ses instances.

Strasbourg, dans cette configuration, s'impose comme la capitale des droits de l'homme. C'est dans cette ville meurtrie et marquée par une double culture que l'assemblée a tenu sa première réunion en 1952. Alors que Bruxelles est devenue le symbole des politiques antisociales...

M. Guy Fischer.  - Hyper austérité !

Mme Annie David.  - ...en faire le siège du Parlement n'aurait que des conséquences négatives.

Au reste, le fonctionnement du Parlement n'est pas tant entravé par le lieu de son siège que par les pratiques malfaisantes des lobbies de plus en plus puissants. C'est contre cela qu'il convient de lutter.

Déplacer le Parlement européen vers Bruxelles ne ferait qu'enterrer l'espoir d'une Europe sociale, pour laquelle des politiques fortes en direction des populations, de l'emploi et de la solidarité sont plus que jamais attendues et nécessaires !

Nous voterons cette proposition de résolution. (Applaudissements à gauche)

M. André Reichardt.  - Je soutiens pleinement la position de M. Ries, à titre personnel et au nom du groupe UMP.

Tous les Alsaciens sont unanimes pour défendre la vocation européenne de Strasbourg. Cette ville a appris, au long des siècles, le prix de la paix, comme l'a rappelé le président de la République à Colmar le 8 mai : « L'Alsace sait ce que le mot guerre veut dire ».

Après la réconciliation d'après-guerre, c'est encore à Strasbourg que les peuples de l'Est sont venus chercher leur soutien. Ces femmes et ces hommes venus chercher la démocratie, Vaclav Havel les appelle « Génération Strasbourg ».

Des efforts sont menés pour améliorer l'accessibilité de la ville : M. Ries les a évoqués. Dire qu'elle n'est accessible qu'à dos de cigogne ne sera plus possible.

Au-delà, la ville doit oser -je regrette qu'elle ait renoncé sur la coupe du monde de football- devenir une grande métropole européenne.

Au nom de quoi devrions-nous accepter une application littérale des traités internationaux pour le siège de la Commission à Bruxelles, de la Banque Centrale à Francfort ou de la Cour de Justice à Luxembourg, mais pas pour le siège du Parlement ?

Strasbourg a besoin de vous pour la défendre. L'argument financier ? A ce compte, pourquoi ne pas rapatrier tous les organismes de l'Union à Strasbourg ? Je croyais que le modèle européen était polycentrique, que l'Europe en avait fini avec le cauchemar du centralisme bureaucratique.

Le polycentrisme est un enjeu pour l'Europe. La fixation du siège à Strasbourg a une signification politique : le Parlement, quand il choisit de voter la défiance vis-à-vis de la Commission, le fait à Strasbourg. C'est presque une loi parlementaire : un parlement existe quand il se tient à distance de l'exécutif. Imaginez que nous allions siéger à proximité de Matignon (« Non, non ! »), serions-nous toujours le même Sénat ?  (« Non, non ! »)

M. Roland Ries, auteur de la proposition de résolution.  - C'est du Montesquieu dans le texte !

M. André Reichardt.  - Un parlement a besoin d'autonomie : c'est la garantie de la liberté. Cette liberté, Strasbourg la lui offre. L'Union n'a pas besoin de bureaucratie, elle a, plus que jamais, besoin de démocratie. (« Très bien ! » et applaudissements sur tous les bancs)

M. Richard Yung.  - Je ne reviendrai pas sur les raisons institutionnelles qui font de Strasbourg le siège du Parlement européen.

J'appartiens à une race en voie d'extinction, celle des Européens convaincus. Or, s'il est un symbole de l'Europe, de l'amitié franco-allemande, c'est bien Strasbourg.

La géographie -une ville adossée au Rhin, située au carrefour de l'Europe- commande mais il y a aussi tout le travail accompli au sein de l'Eurodistrict et le fait que Strasbourg est aux portes du Bade-Wurtemberg et de la Bavière, dont le poids dans le PIB européen est considérable. Strasbourg, surtout, est une ville chargée d'histoire, de culture franco-allemande, inscrite dans l'urbanisme, dans l'université, dans le quotidien de la ville, également historiquement lieu d'accueil des religions persécutées. Elle est aussi la ville du serment de Koufra : « continuer la lutte jusqu'à ce que le drapeau français flotte sur Strasbourg ».

Pour toutes ces raisons, mon coeur, comme celui de tous les Français, bat à l'évocation de Strasbourg.

L'Europe se veut une structure décentralisée. Que ceux qui veulent la concentrer le fassent non à Bruxelles mais à Bucarest, où un dictateur fou a construit le plus grand palais du monde pour y réunir tous les pouvoirs ! Il est plus facile de contrôler le Parlement quand l'exécutif siège au 5eétage...

Surtout, la séparation des pouvoirs exige, c'est dans la logique des institutions démocratiques, que le Parlement ne siège pas au lieu de l'exécutif.

Pour toutes ces raisons, nous soutenons cette proposition de résolution. (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Serge Lagauche.  - Le vote en catimini de l'amendement Fox constitue une nouvelle attaque contre la localisation du Parlement européen à Strasbourg. On ne peut que se réjouir de la saisine, par les gouvernements français et luxembourgeois, de la Cour de justice.

La légitimité historique de Strasbourg, symbole de la réconciliation des nations européennes, est incontestable. La ville s'est, au fil des ans, posée comme capitale européenne des droits de l'homme. L'impact sur l'opinion d'une concentration des institutions sur Bruxelles serait désastreux. L'Europe a besoin plus que jamais de symboles forts : elle remet des traditions européennes diverses sur le terrain de l'amitié franco-allemande, devenue le moteur de l'Union.

La diversité de ses centres institutionnels a été voulue, d'emblée, par l'Europe, dont la force a toujours été de s'appuyer sur ses États membres afin de faire reposer la construction européenne sur les citoyens. La remettre en cause ternirait l'image de l'Europe.

L'argument financier lié aux transports et à l'immobilisme doit cependant être entendu. Notre collègue Roland Ries a d'ores et déjà engagé, en partenariat avec l'État et la région Alsace, tous les efforts nécessaires pour renforcer les moyens immobiliers du Parlement européen et l'amélioration des transports en direction de Strasbourg.

Ces efforts doivent être soutenus par une mobilisation politique forte. Le Sénat participera utilement à cette mobilisation et s'honorera en votant cette proposition de résolution. La défense de Strasbourg, capitale européenne, ne doit souffrir aucune ambiguïté. (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je me suis inscrit dans ce débat par amitié pour Roland Ries mais aussi par amitié pour ce que nous défendons tous : une certaine idée de l'Europe. Une Europe de partage, une Europe polycentrique, une Europe de l'Histoire.

La démarche de M. Fox a quelque chose d'insidieux et de subreptice. Point n'est besoin d'être grand juriste pour savoir que seul un traité peut défaire ce qu'a fait un traité. (M. Henri de Raincourt, ministre chargé de la coopération, approuve) Cet amendement a donc quelque chose d'hypocrite : défaire le traité sans le dire.

M. Richard Yung.  - La perfide Albion...

M. Jean-Pierre Sueur.  - Le vote de cet amendement a été acquis au secret. Les parlementaires français sont héritiers de la Révolution française et jamais n'a été remis en cause le principe de la publicité de nos votes. Pour une raison simple : les citoyens doivent savoir quel a été le vote de chacun des parlementaires. Notre votation n'est secrète que sur les personnes, par exemple pour l'élection du président du Sénat. La procédure du vote secret a donc, en l'espèce, quelque chose de choquant.

Dans tout ce qu'a rappelé Roland Ries, je retiens en particulier le fait que les maires de Strasbourg, Luxembourg et Bruxelles se sont accordés pour aller de l'avant, en portant l'idée d'une Europe des oeuvres communes et non de la concurrence : c'est très positif.

Nous défendons le traité, tout le traité, rien que le traité et combattons toutes les manoeuvres tendant à le contourner.

Le coeur de tous les Français bat quand on parle de Strasbourg, depuis que l'Alsace et la Lorraine avaient cessé d'être françaises. Strasbourg est le coeur battant de l'Europe. (Applaudissements)

M. Henri de Raincourt, ministre auprès du ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, chargé de la coopération.  - Étant des vôtres ce matin, je ne puis participer au séminaire gouvernemental qui se tient à cette heure même. Je n'en ai aucun regret cependant car ce que j'ai entendu depuis plus d'une heure me fait chaud au coeur. Beaucoup de talent et de passion, un mélange harmonieux du coeur et de la raison.

Le Gouvernement appuie pleinement la proposition de résolution qui vous est soumise. L'unanimité du Sénat serait un soutien de poids, qui aurait une forte portée. Je me félicite qu'une initiative similaire ait été portée à l'Assemblée nationale sur le rapport de M. Caresche.

Le 9 mars, le Parlement européen a adopté, dans un vote à bulletin secret, presque honteusement, un amendement réduisant les deux sessions plénières d'octobre et les regroupant la même semaine. C'est ni plus ni moins, une nouvelle fois, la mise en cause directe de Strasbourg comme siège du Parlement européen. Les motivations de cet amendement sont pour nous totalement inacceptables et son contenu contraire à l'esprit et à la lettre du traité. Ses auteurs le savent bien mais, comme le Petit Poucet, sèment leurs cailloux blancs... Cela ne se fera pas car le gouvernement français va porter l'affaire devant la Cour de Luxembourg dans les tout prochains jours.

Qu'on ne se méprenne pas. Nous respectons le Parlement européen, institution majeure de l'Union ; nous défendons son action. Nous ne mettons pas en cause son pouvoir d'organisation interne, lequel doit cependant s'exercer dans le cadre et le respect des traités et, au-delà, de l'esprit européen, à l'encontre duquel va cet amendement.

Le premier ministre luxembourgeois a annoncé qu'il se joindrait à notre recours. Dans des circonstances similaires, nos deux pays ont agi ensemble en 1997. Cet appui est très important car c'est la trilocalisation institutionnelle que nous défendons ensemble. Luxembourg, vous le savez tous, accueille le secrétariat général et les services du Parlement européen.

Nous défendons aussi l'efficacité du Parlement européen, dont les attributions ont été renforcées par le traité de Lisbonne. Qui peut croire qu'il pourrait accomplir toutes ses tâches en deux sessions d'à peine deux jours, dont le débat budgétaire ?

L'idéal européen que vous avez évoqué, le gouvernement français le partage. Le siège de Strasbourg est porteur de l'Histoire. Il est regrettable et dangereux de prétendre bâtir un avenir européen commun en ignorant l'Histoire. L'adhésion des citoyens doit être renforcée plutôt que fragilisée.

La diversité géographique des sièges est une nécessité. La concentration ne répond pas aux besoins d'une Union européenne élargie. Les groupes parlementaires du Parlement européen l'ont bien compris, qui organisent des journées d'études ici ou là dans les 27 pays.

Nous continuerons de défendre et de promouvoir auprès de nos partenaires le statut européen de Strasbourg. C'est l'objet, depuis 1980, d'un contrat triennal entre l'État et les collectivités territoriales alsaciennes ; l'État contribue pour 117 millions à une enveloppe de 245 millions. Nous continuerons à améliorer l'attractivité et l'accessibilité de Strasbourg.

Je me réjouis que l'exécutif et le législatif défendent ensemble cette noble cause. Du bel idéal de la construction européenne, Strasbourg représente une partie non négligeable. (Applaudissements)

M. Jean Desessard.  - Je m'abstiens.

La proposition de résolution est adoptée.

La séance est suspendue à 10 h 20.

*

*          *

La séance reprend à 11 heures.

Politique énergétique de la France (Proposition de résolution)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen d'une proposition de résolution relative à la politique énergétique de la France, présentée en application de l'article 34-1 de la Constitution.

M. Jean-Claude Danglot, auteur de la proposition de résolution.  - Il est grand temps d'avoir un débat public sur les questions énergétiques. L'accident majeur de Fukushima a révélé les inquiétudes fondées et légitimes de la société civile car l'énergie nucléaire a cristallisé les antagonismes.

Le président de la République, deux jours après le drame, a exclu toute sortie du nucléaire, tandis que d'autres militaient pour une sortie immédiate, oubliant les contraintes scientifiques et climatiques qui s'imposent à nous.

Quelle alternative au nucléaire, hors les énergies carbonées ? Ce ne sont pas les débats restreints organisés au Sénat qui ont permis d'ouvrir la discussion de fond. Toutefois, ils ont montré les méfaits de la politique de libéralisation, qui prônait, avec des conséquences délétères pour la société, la concurrence généralisée.

Plus de transparence, une meilleure association des citoyens, des salariés et des usagers s'imposaient. Au contraire de ses promesses, rappelons-nous les déclarations de Nicolas Sarkozy en 2004 ; la droite a décidé, seule, de privatiser GDF. Après le Grenelle de l'environnement, voilà que le débat rebondit sur la question de la prise de participation d'opérateurs privés dans le secteur nucléaire, rendue possible par la loi portant nouvelle organisation des marchés de l'électricité (Nome) ! Et cela tandis que le Gouvernement refuse de rendre public le rapport Roussely.

Nous devons rompre avec les logiques marchandes et financières qui aggravent, de surcroît, la pollution. On estime à 1,6 milliard le nombre d'hommes qui n'ont pas accès à l'électricité dans le monde. Cela emporte des conséquences dramatiques pour la santé et les politiques de transports, qui touchent les populations du sud.

La précarité énergétique est aussi une réalité au nord. L'Observatoire qui la mesure considère que 3,5 millions de citoyens en sont victimes. Et combien renoncent à se chauffer faute de moyens ? Le Gouvernement a supprimé la prime à la cuve, quand les factures augmentaient de 5 % par an. Et la contribution annoncée des compagnies pétrolières ne sera qu'une goutte d'eau, tandis que les grands groupes comme Total enregistrent des bénéfices record.

Les tarifs du gaz et de l'électricité ont augmenté de façon spectaculaire et les tarifs sociaux n'endiguent pas le problème. C'est la déréglementation au profit de la hausse des prix que vous organisez : plus de 61 % d'augmentation du prix du gaz depuis 2005 ! Et le Gouvernement se désengage, puisque le décret de 2009 permet à l'entreprise, entre la révision annuelle du tarif, de le modifier à sa seule initiative, après avis de la CRE.

La loi Nome organise, pour 2015, un dispositif similaire pour l'électricité. Quand cesserez-vous de faire payer aux consommateurs un déficit imaginé de toute pièce par l'entreprise, via un transfert de charges factice sur sa branche commerciale ?

Nous demandons qu'un comité associant élus, usagers et salariés ait à se prononcer sur les prix.

Selon la Commission européenne, le prix de l'électricité serait trop bas chez nous ! C'est bien plutôt le défaut d'investissement, imposé par la recherche de la rentabilité, qui a des conséquences dramatiques pour l'avenir. Et que dire de la loi Nome, qui dépouille l'usager d'un investissement que, comme citoyen, il a contribué à payer ?

Quant à la filière nucléaire, nous demandons l'arrêt de la sous-traitance qui externalise 80 % des risques professionnels. Et que l'on cesse de mettre en concurrence les opérateurs.

S'agissant de la sûreté des installations, une formation poussée des salariés s'impose. La sûreté a un aspect social : il faut revenir au modèle de l'entreprise intégrée.

Le réchauffement climatique, la raréfaction des ressources fossiles devraient être une raison suffisante de renoncer aux logiques marchandes. L'effort en faveur des économies d'énergies et du développement des énergies renouvelables est certes indispensable, mais les efforts ne sont pas à la hauteur -voir le fiasco du photovoltaïque.

Les énergies renouvelables doivent être associées à d'autres sources d'énergies et une vraie politique de l'énergie suppose un dispositif cohérent.

Le système électrique ? Vous l'avez fragilisé en le mettant à la merci des traders.

Les moyens dédiés à la recherche, notamment fondamentale, doivent être renforcés. Ceux qui sont alloués au Commissariat à l'énergie atomique (CEA) ne sont pas à la hauteur.

Le rapport d'information de M. Billout dénonce le manque de réflexion sur la spécificité du système électrique et la notion de sécurité d'approvisionnement.

L'ensemble de la politique énergétique doit être revu : sécurité, accès pour tous, recherche, formation, autant d'enjeux incompatibles avec les logiques financières.

Il est temps de mettre en oeuvre, en coopération, des logiques supranationales cohérentes et solidaires, au profit de nos concitoyens. Nous voulons une politique énergétique publique au service de l'intérêt général et respectueuse de l'environnement, porteuse d'exigences sociales fortes pour les travailleurs du secteur. (Applaudissements à gauche)

Mme Mireille Schurch.  - La sécurité nucléaire doit intégrer non seulement les risques naturels mais aussi la dimension organisationnelle, sociale et humaine.

Les collectifs de travail, la coopération, la transmission des savoir-faire sont des garanties de sûreté.

L'expérience, la compétence des opérateurs sont essentielles. La disparition de spécialistes compétents, rappelle l'OCDE, préoccupe les autorités de sûreté. Or, la formation à la maintenance a été négligée. Alors que les besoins sont de 1 200 par an, on ne forme que 300 diplômés.

D'où un risque de voir se perdre les savoir-faire, renforcé par le règne de la culture managériale.

Ceux qui ont vécu le démarrage des centrales comme celle du Blayais par exemple approchent de la retraite. Comment se transmettra leur savoir-faire ? Et la sous-traitance ne fait qu'aggraver le problème, passée, en cinq ans, pour la maintenance, de 20 % à 80 %. D'où, corrélativement, une multiplication des accidents dont est victime le personnel. Il est temps de mettre fin à cette course au moins-disant. Sans parler de la sous-traitance de la fabrication en Chine des générateurs de vapeur ou des cuves, qui menace notre industrie.

Le président de la République a dû se résoudre à demander un audit sur la sûreté à la Cour des comptes. Il devra intégrer la dimension sociale. Michel Lallier, responsable CGT, rappelle qu'alors que la sûreté nucléaire a toujours reposé sur les qualifications d'un collectif humain, la dérégulation la met à mal. Les salariés d'EDF ont dès longtemps tiré la sonnette d'alarme. Ce débat sur la sûreté nucléaire est intimement lié à celui qui touche au démantèlement des services publics. L'acceptation démocratique du nucléaire repose sur le contrat moral passé entre les Français et le Conseil national de la Résistance (CNR). Il est aujourd'hui mis en cause. C'est pourquoi nous appelons à un vaste débat public. A nos yeux, seul un grand service public de l'énergie est en mesure de répondre à toutes les exigences.(Applaudissements sur les bancs CRC)

M. René Beaumont.  - Cette proposition de résolution est l'occasion d'évoquer des questions que se posent les Français : nous serons attentifs aux éclaircissements du ministre.

Notre industrie nucléaire est certes la plus surveillée du monde mais l'accident du Japon nous rappelle à l'exigence d'une autorité de sûreté nucléaire sans faille. Si la France est moins exposée au risque naturel à l'origine de Fukushima, le vieillissement des installations, dont certaines sont implantées sur des zones sismiques, même peu actives, doit nous alerter. De même que les risques de tempête et d'inondation, comme celle qui a frappé la centrale du Blayais, naguère, faute de travaux sur les digues.

Certaines centrales, comme Fessenheim, ont plus de trente ans. Et l'accident vient souvent où on ne l'attend pas -défaillance technique ou humaine.

Quelles décisions entendez-vous prendre, monsieur le ministre, quant à leur avenir ?

Quid de l'avenir de l'EPR ? L'hypothèse d'un moratoire sur les futurs projets est-elle envisageable, sans pourtant que soit pris du retard, dommageable, sur les projets en cours ? A Tricastin, dans la Drôme, un département qui vous est familier, est-il envisageable d'ajouter un EPR aux quatre réacteurs et à l'usine Eurodif ?

Grâce au nucléaire, les Français payent l'électricité 40 % moins cher. Sans lui, la facture supplémentaire serait de 200 milliards par an. Mais nous devons être toujours plus rigoureux sur le choix des sites, des hommes, des matériels, et plus exigeants sur la sûreté.

Je suis Bourguignon : permettez-moi de vous interroger sur le pôle nucléaire de la région et la question du démantèlement, encore mal maîtrisée.

Notre filière nucléaire, une des plus sûres du monde, doit conserver sa structure actuelle. J'ai pu constater à Teshuan, en Chine, comment les équipes d'Areva et d'Edf travaillaient en bonne complémentarité. Ne cédons pas aux tentations monopolistiques de certains.

Vous aurez compris que le groupe UMP votera contre cette résolution, qui va contre la politique énergétique du pays.

M. Marcel Deneux.  - Ce texte n'est pas sans intérêt : nous devons nous interroger sur les choix de la France, notamment en matière nucléaire. Fukushima nous a engagés à entreprendre un audit. Je souhaite, monsieur le ministre, une vraie transparence sur ses résultats.

La filière nucléaire joue un rôle essentiel dans notre autonomie énergétique : gardons-nous du catastrophisme. Les risques sismiques et la répartition du capital de l'exploitant ne sont pas les mêmes qu'au Japon. Reste qu'il faut savoir articuler les deux logiques, publique et économique. La puissance publique est le garant de leur équilibre : elle doit jouer son rôle dans les conseils d'administration, ce que, semble-t-il, elle n'a pas toujours fait.

Nous ne pouvons oublier la dimension internationale et je me réjouis de l'inscription de cette problématique à l'ordre du jour du prochain G 8.

Pour autant, l'énergie nucléaire n'est pas renouvelable. Sans précipitation, engageons donc une réflexion sur la sortie du nucléaire, du moins sur sa diminution progressive, pour développer des filières solides dans le domaine des énergies renouvelables et nous conformer à notre devoir d'exemplarité en matière d'économies d'énergie, suite aux décisions prises sous présidence française de l'Union.

Or l'État a failli, tant à structurer la filière photovoltaïque que l'éolien. Il doit reprendre les rênes. Et la géothermie me paraît sous-estimée.

Je suis loin de partager toutes les conclusions des auteurs de la proposition de résolution. Il faut pouvoir faire appel aux capitaux privés, tout en sachant conserver une maîtrise publique. (Exclamations incrédules à gauche)

En matière de prix, nous sommes entrés pour longtemps dans un cycle à la hausse. Tout gaspillage doit être évité. Il n'est pas vrai que rentabilité et préservation de l'environnement s'excluent : la puissance publique fixe des normes environnementales et les entreprises suivent leur logique dans ce cadre.

Notre groupe votera contre cette proposition de résolution, tout en restant attentif aux choix qui seront faits pour l'avenir.

Notre consommation reste encore trop carbonée. Il faudra pousser la recherche.

Il y a dans tout cela de quoi faire : c'est bien pourquoi le ministère de l'industrie a compétence sur l'énergie. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Daniel Raoul.  - Cette proposition de résolution, bienvenue, soulève le problème de la dérégulation, pensée à une époque de bas prix où l'approvisionnement n'était pas menacé. Elle arrive aujourd'hui à contre-cycle.

L'ouverture à la concurrence, qui visait la baisse des prix, est devenue une fin en soi, un toc, « trouble obsessionnel de la concurrence ». (Sourires)

Dès la loi de 2003, suivie par plusieurs autres, s'engageait une privatisation à marches forcées, qui remet en cause le statut de nos entreprises publiques -ce qui n'a jamais fait partie des exigences de Bruxelles. Mme Kroes vous a transmis le virus de la privatisation !

C'est ainsi que les Français subiront une double peine. Citoyens, ils sont victime d'une spoliation -celle de l'investissement qu'ils ont consenti dans EDF. Et la rente énergétique ne saurait être captée par le privé. Comme usagers, ils doivent subir une augmentation croissante des tarifs : 3,4 millions de ménages consacrent plus de 10 % de leurs revenus à payer leur facture de gaz et d'électricité. C'est même beaucoup plus si l'on compte ceux qui ne peuvent plus se chauffer.

Pourtant, les tarifs aménagés bénéficient aussi aux entreprises, qui profitent ainsi d'un avantage de compétitivité. Le Tartam a également donné un avantage aux gros consommateurs. Tout cela doit disparaître dans les prochaines années. Peut-on envisager un moratoire ?

Il est donc juste de souligner que la dérégulation est contraire aux exigences de sûreté et d'indépendance. Il faut, de surcroît, mettre fin à la sous-traitance. La maîtrise du nucléaire est devenue essentielle. Je vous demande, monsieur le ministre, de suspendre la loi Nome jusqu'à la remise de l'audit sur le nucléaire.

M. Jean-Pierre Chevènement.  - Cette proposition de résolution, qui intervient deux mois après Fukushima, a le mérite de mettre l'accent sur les conséquences pratiques d'une telle catastrophe, plutôt que de céder à la démagogie obscurantiste et technophobe de sortie immédiate du nucléaire.

L'accident de Fukushima tient à l'insuffisance des mesures de sécurité mises en place par Tepco. Un mur de 7 mètres face à des vagues de 23 mètres ! Les moteurs diesel de secours ont été noyés alors que l'arrêt automatique de l'alimentation électrique, en raison du séisme, a fait cesser le refroidissement du coeur des réacteurs. C'est le fait de l'imprévoyance de l'entreprise : tout le reste en a découlé.

Il est extrêmement important de comprendre l'origine de l'accident pour en tirer les leçons adéquates. Ce n'est pas s'aventurer que de pointer la responsabilité de l'exploitant qui n'a pas pris les précautions nécessaires. L'analyse de l'accident mérite sûrement d'être complétée. Dès maintenant, cependant, on peut dire, et la résolution présentée par M. Danglot a raison de le souligner, qu'il est important de soustraire le secteur énergétique, et particulièrement le secteur nucléaire, aux logiques de rentabilité qui gouvernent la libéralisation de l'énergie.

La proposition de résolution met en avant, à juste titre, la nécessité d'un grand pôle public de l'énergie. Je la voterai, d'autant que Mme Schurch a fort bien dit l'importance d'une bonne formation du personnel.

Il est admirable, au sens classique du terme, que l'intervention de l'Europe, au nom de la concurrence, aboutisse à un relèvement des prix de l'énergie. Je rappelle toutefois à M. Danglot que le processus de Lisbonne a commencé à un moment où le parti communiste était associé au Gouvernement.

M. Ladislas Poniatowski.  - Bon rappel !

M. Jean-Pierre Chevènement.  - Je ne signale ce fait que pour montrer combien il est difficile de résister à la logique de libéralisation qui se déroule implacablement depuis plus de vingt ans et qui a été acceptée par l'ensemble des forces politiques à l'exception, je dois le rappeler, du parti communiste.

Mais ceux qui ont voté, comme moi, l'Acte unique en 1987 ne pouvaient alors avoir idée de cette avalanche de directives néolibérales qui ont emballé le processus de concurrence, qui n'est plus contrôlé par personne. Cessons de libéraliser ! Il faut réglementer, remettre de la viscosité dans des marchés devenus fous.

Si le progrès procède d'erreurs corrigées, tentons d'éviter les erreurs évitables !

Le Gouvernement n'a pas fait l'effort pédagogique nécessaire pour combattre la hantise du nucléaire, née à Hiroshima et méthodiquement exploitée par tous ceux que révulse la vision cartésienne de l'Homme « possesseur et maître de la Nature ». C'est un vieux débat : Ève a été punie pour avoir mangé le fruit de l'arbre de la connaissance et Prométhée pour avoir donné le feu aux hommes.

Ceux qui proposent tout bonnement de sortir du nucléaire ont-ils mesuré la portée de leur choix ?

M. Jean Desessard.  - Oui ! (Sourires)

M. Jean-Pierre Chevènement.  - Ils doivent savoir qu'il n'est pas aisé de le remplacer. L'exploitation du charbon tue au moins 750 000 Chinois par an. Il n'est point d'activité humaine sans risque mais les inconvénients doivent être comparés. La sortie du nucléaire en vingt ans impliquerait, selon les calculs de M. René Tregouët, la pose de 2 000  kilomètres de panneaux solaires, de 3 400 éoliennes terrestres géantes et de 8 400 éoliennes marines, pour un coût de production de l'énergie deux fois plus élevée, sinon dix fois plus dans le cas du photovoltaïque.

Ce choix ne serait pas seulement hors de prix, il serait aussi contraire à l'intérêt national.

La pollution de l'air par les énergies fossiles tue, les accidents de la route tuent, quelle activité humaine ne tue pas ?

Le choix du néolibéralisme effectué il y trente ans par la France a entraîné une désindustrialisation massive et un chômage structurel. Il me semble que les choix technologiques ne doivent pas être dissociés des choix économiques et sociaux ; la sortie du nucléaire serait un choix de régression, en aucun cas un choix de société : le vrai choix, ce serait de mettre un terme à la dictature des marchés financiers.

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. Jean-Pierre Chevènement.  - En ce sens, la proposition de résolution de M. Danglot liant l'exploitation du nucléaire au choix de l'appropriation publique et visant plus généralement à reréglementer le secteur de l'énergie me paraît mériter pleinement d'être soutenue. La majorité du RDSE votera la résolution. (Applaudissements à gauche)

M. Jean Desessard.  - Je n'applaudis pas !

M. Ladislas Poniatowski.  - Cette proposition de résolution met l'accent sur le rôle du nucléaire auquel Sénat et Assemblée nationale consacrent une étude commune, dans le cadre de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. Elle évoque aussi les autres sources d'énergie, en particulier renouvelables. Je suis attaché à la biomasse, venue du bois-énergie mais pas seulement. Cette production doit progresser à 7,4 millions de tonnes équivalent pétrole d'ici à 2020 contre 1 million pour l'éolien et 0,5 million pour le photovoltaïque.

La France risque de ne pas parvenir à respecter son engagement de réaliser en 2020 23 % de notre consommation d'énergie à partir des énergies renouvelables. Seul le photovoltaïque devrait atteindre ses objectifs, bien avant 2020, mais son coût est très élevé.

Il faut donc mettre l'accent sur les autres sources alternatives d'énergie.

La biomasse permet d'économiser l'énergie fossile, sans gaz à effet de serre, tout en favorisant l'aménagement du territoire et en créant des emplois. L'action du Fonds chaleur doit donc être soutenue. L'an dernier, 31 projets ont été sélectionnés, pour 16 euros de coût de CO2 évités, ce qui est satisfaisant. L'enjeu porte moins sur l'augmentation des capacités que sur l'amélioration des appareils de chauffage.

Les possibilités d'accroître l'hydroélectricité sont limitées. Les éoliennes ont sans doute les meilleures perspectives, en combinaison avec la biomasse.

Il faudrait se demander pourquoi 45 % des projets seulement ont été mis en oeuvre.

Nous attendons le décret d'application sur le difficile problème du raccordement. Quid aussi de la détermination des prix de rachat ?

Rapporteur de la loi Nome, je ne puis m'associer aux conclusions de cette résolution.

Mme Mireille Schurch.  - C'est normal.

M. Ladislas Poniatowski.  - Il faudra effectivement des investissements importants pour prolonger la vie des centrales nucléaires et en améliorer la sûreté. La loi Nome ne doit pas être mise en cause, mais vraiment appliquée. J'attends les décrets... (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Je remercie le groupe CRC d'avoir suscité cet utile débat, après de longs mois d'augmentation des prix de l'énergie. Beaucoup de ménages n'ont pu se chauffer cet hiver, faute de moyens. Le Gouvernement s'est défaussé de ses responsabilités sur la Commission de régulation de l'énergie, en la laissant fixer les tarifs, comme si ce n'était qu'une question technique. C'est pourtant un bien de première nécessité !

Faut-il rappeler que le CNR avait fait de l'État le garant de l'accès de tous à l'électricité et au gaz ? Or, depuis la privatisation de GDF, le prix du gaz s'est accru de 55 %, pour le plus grand bénéfice des actionnaires. Quelle provocation ! Le Gouvernement a bien sorti de son chapeau l'Observatoire national de la précarité énergétique mais l'heure est à l'action, non à l'observation !

Parler de l'opacité des prix du gaz relève de l'euphémisme. Et dire que le PDG de Total n'hésite pas à annoncer, d'un air amusé, des bénéfices colossaux et le litre d'essence à 2 euros !

Quand, enfin, vous interrogerez-vous sur la loi Nome ? Il est clair qu'elle pousse à l'augmentation des tarifs. Et ce n'est pas le Tartam qui améliore vraiment les choses : réintroduisant en catastrophe une relative régulation des tarifs, il ressemble à un aveu.

Une intervention active de l'État est donc incontournable, ne serait-ce que pour imposer un moratoire sur les tarifs de l'énergie.

Nous voterons bien sûr la proposition de résolution CRC. (Applaudissements à gauche)

M. le président.  - M. Desessard a cinq minutes pour nous convaincre ! (Sourires)

M. Jean Desessard.  - Je crains que cela ne suffise pas !

Une des raisons de sortir du nucléaire, c'est qu'il nous fait entrer dans l'irrémédiable : la contamination nucléaire des sols à Tchernobyl ou a Fukushima n'aura pas de remède. De surcroît, la défense du nucléaire repose sur des allégations mensongères.

L'indépendance énergétique ? Les gisements d'uranium sont rares, exploités sur d'autres continents sans souci de la santé des mineurs.

La sûreté ? A Cadarache, le suivi rigoureux de la matière active se trouve pris en défaut ; au Tricastin, les déchets se répandent dans la nature ; Fessenheim est construite sur une faille sismique.

La transparence ? EDF exporte en Sibérie des centaines de tonnes d'uranium sans que cela soit mentionné dans le Plan de gestion des matières et déchets radioactifs.

Le coût ? Il est largement sous-estimé.

On peut sortir progressivement du nucléaire, à condition d'y être décidé. Il est possible de faire mieux et, à terme, pour moins cher ! Cessons de construire des logements énergivores et soutenons le photovoltaïque !

Un mot sur la folie des gaz de schiste.

Destructeur du sous-sol, saboteur des territoires, suicidaire pour l'eau potable, disséminateur de polluants chimiques, ce projet est une hérésie. Signée par le ministre Borloo, l'autorisation de prospection a été combattue par tous, même par le député Borloo...

A signer des autorisations irresponsables pour l'exploitation de ce gaz, on prend le risque de gaspiller l'argent public : les exploitants déboutés de la mine d'or de Kaw, en Guyane, réclament 80 millions de dommages et intérêts.

Après Fukushima et après les innombrables pollutions résultant des fracturations hydrauliques aux États-Unis, il est encore plus urgent de fonder une politique énergétique durable et responsable fondée sur les énergies renouvelables et les économies de consommation. (Applaudissements sur plusieurs bancs socialistes)

M. Jean-Louis Carrère.  - Pas mal...

M. Éric Besson, ministre auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique.  - La politique énergétique de la France vise la sécurité, la compétitivité des prix, la protection de l'environnement, la lutte contre le réchauffement climatique, l'accès de tous à l'énergie.

La loi Nome est la pierre angulaire de la nouvelle régulation ; elle tire partie de la compétitivité de notre parc nucléaire et maintient un tarif régulé pour tous les Français ; le prix du gaz n'augmentera pas dans les douze prochains mois.

Le Gouvernement agit concrètement contre la précarité énergétique. Nous avons créé un tarif social du gaz. Des mesures conjoncturelles ont été prises, comme la revalorisation du barème kilométrique ou l'aide à la modernisation des chaudières.

Nous renforçons notre effort de maîtrise énergétique afin de respecter l'objectif de 2020. Sachant que le secteur du bâtiment concentre 44 % des consommations énergétiques du pays, nous avons créé un éco-PTZ.

Nous avons défini une trajectoire précise pour atteindre l'objectif des 23 % d'énergies renouvelables à l'horizon 2020 ; c'est la raison pour laquelle nous avons créé le Fonds chaleur. De fait, monsieur Poniatowski, l'énergie ne se limite pas à l'électricité.

L'éolien est soutenu. Le tarif d'achat de l'électricité biomasse a plus que doublé. Le parc photovoltaïque a été multiplié par 73 de 2007 à 2010.

Troisième pilier de notre politique de l'énergie : le nucléaire, choix confirmé depuis un demi-siècle par tous les gouvernements. Ce choix ne peut être que renforcé par le fait qu'il s'agit d'une électricité décarbonée. Le Parlement a voté en 2006 deux lois très importantes sur le nucléaire, pour la transparence et pour la gestion des déchets. Notre autorité de sûreté nucléaire est reconnue dans le monde entier pour sa compétence.

Monsieur Danglot, il n'y a pas désengagement de l'État, bien au contraire. A la demande du président de la République, le conseil en politique nucléaire s'est réuni cinq fois depuis 2007, après dix ans de mise en sommeil. Des audits de sûreté vont être menés sur tout notre parc, dans la plus grande transparence.

Une action forte à l'échelle européenne ? Nous la menons déjà.

Mme Schurch a insisté sur la formation dans le domaine du nucléaire. Elle a raison. C'est pourquoi le président de la République a refusé tout moratoire. Le nombre de diplômés n'est pas de 300 mais de 600.

Je partage les propos de M. Beaumont. De fait, nous n'avons pas attendu Fukushima pour nous préoccuper de sûreté nucléaire. Il va de soi que nous tiendrons compte des retours d'expertise. Flamanville ne sera pas exonérée d'audit. L'enquête publique sur le deuxième EPR est en cours de préparation. Un nouveau réacteur ? La question n'est pas à l'ordre du jour. La réflexion va être lancée. D'autres constructions relèveraient du choix du futur Gouvernement. Notre expertise en matière de démantèlement n'est pas si limitée.

M. Deneux a fait une intervention très intéressante. De fait, il n'y pas de lien entre l'âge d'une centrale et le nombre d'incidents. La durée de trente ans concerne l'amortissement, non l'espérance de vie. Une centrale de plusieurs décennies est plus sûre puisqu'elle a bénéficié des améliorations de sûreté à la suite de divers incidents dont on a fait le retour d'expérience.

Créer des filières industrielles autour des énergies renouvelables ? Un comité stratégique sera installé en juin.

M. Raoul a parlé de « double peine ». L'expression m'a fait sursauter ; elle caricature notre politique.

M. Daniel Raoul.  - Je pourrais vous citer, à l'époque.

M. Éric Besson, ministre.  - Si vous critiquez la loi Nome, ayez l'honnêteté de reconnaitre que l'ouverture du marché de l'énergie est due à la droite comme à la gauche : commencez par vous auto-flageller !

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Donnez l'exemple !

M. Éric Besson, ministre.  - Le premier paquet Énergie a été mis en oeuvre sous M. Jospin.

Que serait une politique alternative ? J'ai lu avec un intérêt tout particulier le projet socialiste.

M. Daniel Raoul.  - Vous êtes un expert !

M. Éric Besson, ministre.  - Oui, car les ambiguïtés et les faux-semblants sur le nucléaire ont été une des causes de ma rupture avec le parti socialiste. Je constate que vous voulez sortir du tout nucléaire, mais j'attends toujours de voir comment ! Le temps vous a sans doute manqué...

M. Poniatowski a eu raison d'insister sur la biomasse. Le tarif de rachat a doublé depuis 2008, conformément à l'engagement du président de la République. Le décret sur la méthanisation est devant le Conseil d'État.

J'espère ne pas porter préjudice à M. Chevènement en disant mon accord avec nombre de ses propos. Je n'aurais pas osé employer certaines de ses formules, comme « démagogique, obscurantiste et technophobe ».

Malgré un séisme de magnitude 9 et un raz-de-marée, la centrale de Fukushima a résisté.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Bref, ça pouvait être pire...

M. Éric Besson, ministre.  - Ce sont les systèmes de refroidissement qui ont failli ; il faudra les consolider et installer des systèmes de secours.

On a le droit d'évoquer une sortie du nucléaire, ce n'est pas un sujet tabou, mais il faut dire par quoi on le remplace et à quel prix.

Je regrette que M. Mirassou ait encore demandé un moratoire. Je vous conseille un moratoire sur vos moratoires !

M. Jean-Jacques Mirassou.  - J'irai répéter vos propos dans les cités ouvrières !

M. Éric Besson, ministre.  - Monsieur Desessard, je reconnais votre cohérence, mais ne caricaturez pas mes propos : le risque zéro n'existe pas. Simplement, le risque, en France, est maitrisé. Et n'oubliez pas que le solaire et l'éolien sont, par essence, intermittents ni que les ménages allemands paient leur électricité deux fois plus cher que les Français et qu'un Allemand émet 40 % du gaz à effet de serre de plus qu'un Français. Il faut, un jour, se demander pourquoi... (Applaudissements sur les bancs UMP)

A la demande des groupes UMP et CRC-SPG, la proposition de résolution est mise aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 338
Majorité absolue des suffrages exprimés 170
Pour l'adoption 151
Contre 187

Le Sénat n'a pas adopté.

La séance est suspendue à 13 heures.

présidence de M. Jean-Pierre Raffarin,vice-président

La séance reprend à 15 h 5.

Droit de la chasse

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à moderniser le droit de la chasse.

Discussion générale

M. Pierre Martin, auteur de la proposition de loi.  - J'ai déposé, le 15 mars 2010, le texte que je suis heureux de présenter aujourd'hui. Ses huit articles tendent à promouvoir une gestion plus efficace de la biodiversité et à moderniser la législation afin de permettre aux chasseurs de mieux assurer leur mission d'intérêt général. Alors que 2010 a été déclarée « année de la biodiversité », il m'est apparu nécessaire de rappeler la contribution des chasseurs à la gestion des espèces et des espaces.

Tous ici, nous souhaitons une gestion équilibrée des espaces naturels. Le premier constat ayant inspiré ma proposition de loi est la forte baisse du nombre de chasses, passé de 2,4 millions à 1,3 depuis les années 1970. Il faut rendre la chasse plus attractive et plus accessible, notamment aux jeunes.

Le bilan de la loi Poniatowski de 2008 a mis en évidence l'inadaptation de notre droit. Je souhaite que l'approche du législateur soit pragmatique afin que les normes édictées soient bien appliquées ; c'est pourquoi j'ai privilégié la concertation avec tous les acteurs concernés, sans éveiller de polémiques inutiles et contreproductives.

M. Jean-Louis Carrère.  - Vous vous êtes concerté tout seul !

M. Pierre Martin, auteur de la proposition de loi.  - Le texte issu de cette concertation vient contribuer modestement, sans compromettre les équilibres acquis, à faire de la chasse une pratique démocratique, apaisée et responsable.

Ce texte a trois objectifs : reconnaître le rôle des chasseurs au service de la biodiversité, notamment en zones humides ; assurer la pérennité de la gestion cynégétique sur le territoire en révisant les modalités d'adhésion aux associations agréées ; poursuivre la modernisation du droit de la chasse.

En 2008, le Gouvernement s'était engagé à créer par décret le délit d'entrave à la chasse. C'est chose faite depuis le 4 juin 2010, ce dont je me réjouis ; l'article que j'avais rédigé demandant un rapport au Gouvernement n'ayant plus lieu d'être ; il a été supprimé par la commission avec mon accord. Celle-ci a en outre introduit un article additionnel qui rend éligible à l'agrément les fédérations régionales et départementales.

Les articles 1 et 3 reconnaissent le rôle éminent des chasseurs en matière de préservation de la biodiversité et celui des fédérations départementales et régionales pour l'information et l'éducation à l'environnement -le droit reconnaît le fait.

L'article 2 exonère de taxe foncière sur les propriétés non bâties les installations de chasse dans les zones humides ; il correspond à une réelle demande et préserve les possibilités d'action des fédérations de chasseurs. Il s'appliquera, par exemple, dans le marais charentais ou dans les lagunes des Landes.

L'article 4 aborde l'accumulation du grand gibier dans les territoires non chassés et les dégâts agricoles et accidents de circulation qu'il cause. Désormais, le préfet pourra ordonner au propriétaire des « prélèvements » -terme préféré par la commission à « plan de tir »- sauf à ce que sa responsabilité financière soit engagée. J'insiste sur le fait que le propriétaire pourra refuser le prélèvement à condition d'indemniser les dégâts occasionnés. Il n'était plus possible que les fédérations continuent d'assumer seules l'indemnisation.

Les articles 5 et 6 assouplissent l'adhésion aux associations communales de chasse agréées (Acca). La solution retenue par la commission, sur proposition des Acca elles-mêmes, est très satisfaisante.

Enfin, l'article 7 améliore le dispositif de réfaction appliqué à la redevance cynégétique due par les nouveaux chasseurs. A l'initiative de M. Pointereau, le détenteur d'un permis départemental pourra obtenir la validation de celui-ci pour un jour dans un autre département. Cette disposition sympathique, réclamée par les jeunes chasseurs, risque cependant d'être difficile à appliquer. Je rappelle qu'il existe déjà des permis de deux et de trois jours.

M. Jean-Louis Carrère.  - A quand le permis d'une heure ?

M. Pierre Martin, auteur de la proposition de loi.  - Selon le Conseil économique, social et environnemental (Cese), la chasse contribue à la restauration de la qualité écologique des territoires ruraux et au rétablissement de liens sociaux harmonieux. Cet objectif doit être le nôtre. Je vous appelle à voter le texte de la commission. Le Sénat montrera ainsi qu'il sait être une force de proposition au service de la chasse et du monde rural. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur de la commission de l'économie.  - Le 13 août, la commission de l'économie a unanimement adopté la proposition déposée par M. Martin, que j'accueille avec plaisir dans notre hémicycle après une absence de quelques semaines pour raison de santé. Je le félicite pour son initiative, qui aboutira au sixième texte relatif à la chasse en dix ans.

Face à la réduction du nombre de chasseurs, il faut rendre la chasse plus attractive et plus accessible. Les États généraux de la chasse de février 2011 ont mis l'accent sur le concept de biodiversité. L'équilibre agro-sylvo-cynégétique auquel nous sommes parvenus désormais doit être conforté.

Commençons par deux précisions. Tout d'abord, une réelle concertation a précédé le dépôt du texte puis son examen en commission. Ensuite, l'Assemblée nationale a inscrit à son ordre du jour un texte déposé un an après celui de M. Pierre Martin, dont il reprend l'essentiel du dispositif. Ce n'est guère élégant...

A mon initiative, l'article premier de la proposition de loi a été étendu aux fédérations régionales de chasseurs, qui assurent aussi des actions de formation et de sensibilisation à l'environnement.

L'article 2 étend le bénéfice de l'exonération partielle de TFNB aux installations de chasse situées dans les zones humides afin d'inciter à la préservation de celles-ci ; la commission a précisé que la préservation de l'avifaune n'excluait pas la pratique de la chasse.

L'article 3 remplace la notion d'écosystème par celle de biodiversité.

L'article 4 concerne les territoires non chassés. Il y en a 700 à 800 en France, dont le propriétaire est privé ou public. Le gibier qui s'y accumule occasionne des dégâts qu'indemnisent, à ce jour, les seules fédérations départementales, à hauteur de 1,5 million d'euros. S'ajoutent, comme l'a justement relevé M. Patriat, de nombreux accidents de circulation. Désormais, le préfet pourra ordonner des prélèvements au propriétaire, dont la responsabilité financière sera engagée s'il n'obtempère pas.

L'article 5 permet aux Acca de fusionner.

La commission a adopté à l'unanimité une nouvelle rédaction de l'article 6, fondée sur une proposition des Acca elles-mêmes, afin d'éviter que des pans entiers du territoire se trouvent privés de toute forme de gestion cynégétique. L'article prévoit deux cas de figure. L'acquéreur qui achète l'intégralité de la propriété est reconnu membre de droit de l'Acca s'il en fait la demande ; s'il n'en achète qu'une partie et si celle-ci est supérieure à 10 % du seuil d'opposition départemental, il l'est également. A défaut, le règlement interne de l'Acca peut prévoir les modalités de son admission.

L'article 7 rectifie une erreur matérielle. A l'initiative de M. Pointereau, la validation d'un jour du permis dans un autre département a été introduite ; c'est une forme de clin d'oeil en direction des chasseurs...

L'article 8, relatif au délit d'entrave à la chasse, a été supprimé puisque le Gouvernement a enfin publié le décret attendu.

Un article additionnel clôt le texte, qui rend les fédérations régionales et interdépartementales éligibles à l'agrément au titre de la protection de l'environnement.

Tel est le texte que je vous invite à voter. (Applaudissements)

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.  - Depuis une dizaine d'années, deux lois Chasse ont été votées, puis deux lois relatives aux territoires ruraux, avant une nouvelle loi Chasse. C'est dire l'importance que le Parlement reconnaît à cette pratique à multiples facettes qui anime les territoires, contribue à la gestion de la biodiversité et a une importance sociale et économique non négligeable. Elle générerait 23 000 emplois et des flux financiers de l'ordre de 2,3 milliards d'euros.

On pourrait juger suffisantes les cinq lois votées cette dernière décennie. Pourtant, M. Pierre Martin a raison car la chasse évolue. Les états généraux de la chasse ont montré que les chasseurs étaient des acteurs et des défenseurs de la biodiversité...

M. Yvon Collin.  - Ce n'est pas toujours admis !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - ...ce qui restait encore à expliciter : c'est l'objet des articles 1, 3 et 8 bis.

L'article 2 poursuit le même objectif. La loi de 2005 distinguait les terrains humides selon qu'ils procuraient ou non des revenus mais l'esprit du texte n'était pas d'exclure les zones chassées de l'exonération de TFNB. J'approuve donc la disposition proposée, sous réserve d'un amendement de précision.

M. Pierre Martin a souligné la diminution constante du nombre de chasseurs. Nous devons chercher à inverser la tendance ; c'est l'objet des articles 5 et 6.

L'article 7 est cohérent avec les dispositions réduisant le coût du permis pour les jeunes chasseurs, mais je suis réservée sur le « permis d'un jour », difficile à appliquer ; le « permis de trois jours » existe déjà, que son prix rend accessible à tous.

L'article 4 aborde un sujet important car il est injuste de rendre les fédérations responsables des dégâts occasionnés par des animaux non chassés.

A juste titre, l'article 8 a été supprimé puisque le décret créant un délit d'obstruction à la chasse a été publié et a déjà prouvé son efficacité -le nombre d'actes d'obstruction à la chasse à cour a diminué cette dernière saison.

Le Gouvernement approuve cette proposition de loi. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Joseph Kergueris.  - On n'a jamais légiféré sur la chasse autant que ces dernières années. Pourquoi ? Surtout parce que les chasseurs sont toujours moins nombreux.

Ce texte satisfait de façon pragmatique le besoin d'adapter le droit de la chasse, une activité contribuant à la bonne gestion des espèces et des espaces. De nombreuses conventions ont été passées pour encadrer la pratique des points de vue de la préservation de l'environnement et de la sécurité, avec d'excellents résultats dont je me félicite. Ce texte reconnaît la contribution des chasseurs au maintien de la biodiversité, composante essentielle du développement durable.

Les chasseurs contribuent à réguler certaines espèces ; ils participent aussi à la préservation des zones humides. La disposition fiscale proposée va dans le bon sens.

La disposition relative à l'indemnisation des dégâts occasionnés par le gros gibier vivant dans les zones non chassées et à la responsabilité du propriétaire est juste et nécessaire.

J'en viens aux Acca. Il importe de faciliter l'adhésion à ces associations, ainsi que le regroupement intercommunal. L'automaticité de l'adhésion pour les acquéreurs de terrain est bienvenue. Tout ce qui participe au développement du lien social assuré par ces associations me réjouit.

Enfin, je me félicite que l'article 8 ait été supprimé par la commission car il y avait là une rupture avec l'esprit consensuel de la proposition de loi.

Le groupe centriste votera ce texte. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jean-Louis Carrère.  - Au cours de la dernière décennie, nous avons voté la loi Voynet de 2000, puis d'autres projets ou propositions de loi. Les parlementaires, à l'initiative de nouvelles dispositions, ont toujours invoqué la simplification du droit. C'est aussi l'argument avancé par M. Pierre Martin pour justifier ce sixième texte relatif à la chasse en onze ans.

Notons qu'une proposition de loi, au dispositif similaire, a été déposée à l'Assemblée nationale par M. Bignon, député de la Somme. Elle sera examinée par nos collègues le 10 mai. Plus récente que celle de M. Martin, elle n'a pas pris en compte les conclusions des états généraux de la chasse organisés en février. Cherchez l'erreur !

Un mot de la table ronde sur la chasse. J'avais été surpris par le caractère politiquement homogène des participants. Il n'est pourtant pas interdit aux socialistes de pratiquer la chasse !

M. Yvon Collin.  - Pour l'instant ! (Sourires)

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Comptez sur moi pour que tel ne soit jamais le cas.

M. Jean-Louis Carrère.  - On m'avait promis que la sensibilité politique que je représente serait associée, il n'en a rien été. En pleine campagne électorale pour les régionales, certaines pratiques cynégétiques ont été interdites dans les Landes alors que la Picardie bénéficiait de nouvelles autorisations... Il est vrai que dans mon département, les chances de la majorité étaient minces... Ces basses manoeuvres disqualifient ce qui s'est dit dans les débats et handicapent la bonne perception de la chasse dans notre pays. Je le regrette.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Très bien dit !

M. Jean-Louis Carrère.  - J'en viens à la proposition de loi. Elle favorisera une meilleure pratique de la chasse, une activité qu'elle rendra plus attractive auprès des jeunes. La réduction du nombre de chasseurs devrait inquiéter le Gouvernement car le service public assuré par les bénévoles des fédérations pourrait retomber sur les épaules de l'État. Le permis à un jour ? Comme la ministre, je m'interroge sur son utilité...

S'agissant des dégâts occasionnés par le gros gibier, nous sommes dans un piège, que referment la diminution du nombre de chasseurs, la croissance des populations de gros gibier, l'augmentation des surfaces cultivées et l'évolution du prix des céréales, qui sert de référence au calcul des indemnisations. Les fédérations ne peuvent plus faire face, dont le budget dépend de plus en plus de taxes territoriales additionnelles. Rien ne suggère que la population de sangliers retournera au niveau des années 1980, alors que, chaque année, il y a 2 % de chasseurs en moins... Peut-être faudrait-il faire évoluer la franchise de 76 euros aujourd'hui en vigueur. Le dispositif actuel fournit une assurance gratuite au monde agricole. Sans opposer celui-ci à celui de la chasse, il faut trouver une solution.

Un zoom sur le sud-ouest et l'Aquitaine... Est-il scandaleux que les chasseurs demandent une étude scientifique pour mesurer l'évolution de certaines espèces, qui serait cofinancée par le conseil régional d'Aquitaine et le conseil général des Landes ? Les chasseurs sont courtois ; ils contestent l'origine des chiffrages qui justifient les propos des auteurs selon lesquels certaines populations seraient en danger dans les Landes. Étudions objectivement la situation des pinsons et des bruants !

Enfin, je voudrais dire que la chasse en France ne se réduit ni à la Somme, ni à l'UMP !

Nous apporterons notre soutien à ce texte qui va dans le bon sens. (Applaudissements)

M. Yvon Collin.  - Ce texte est indispensable : plus qu'un loisir, la chasse participe à la vie de notre territoire. Elle est traditionnellement accessible à tous depuis la Révolution. Grâce à la prise de conscience collective de la nécessité de respecter la nature, la chasse est investie de la fonction de protéger la biodiversité. Les chasseurs ont compris et accepté cette nouvelle mission. Cette vocation nouvelle contribue à apaiser les tensions avec ceux qui sont hostiles à la chasse.

La loi de 2005 a réaffirmé le rôle des chasseurs dans le développement des territoires ruraux. C'est une bonne manière de changer le regard porté sur les chasseurs. Nous avons allégé les procédures administratives car la chasse, activité de proximité, a besoin de souplesse. Cette proposition de loi s'inscrit dans cette perspective et je m'en félicite.

La fédération des chasseurs du Tarn-et-Garonne préfère la démarche de cette proposition de loi à celle, inopinée, des députés.

M. Jean-Louis Carrère.  - Très bien !

M. Yvon Collin.  - Je suis satisfait de voir que la commission de l'économie a respecté l'esprit du texte, que tout le RDSE votera donc. Il était, de fait, très attendu et répond aux ambiguïtés sur le permis des jeunes chasseurs -nombre d'entre eux, qui ont réussi leur examen, n'ont pas validé leur permis.

Dans un monde qui s'urbanise et se déshumanise, les chasseurs sont les gardiens des territoires. Il faut donc les encourager. (Applaudissements)

M. Gérard Le Cam.  - La chasse est un sujet si controversé que moins on en parle, mieux on se porte. A chaque fois sont réveillées les passions des chasseurs comme celles des anti-chasse de tout poil, toujours prêts à nous plumer. (Sourires) Des millions de nos concitoyens utilisent la nature durant leur loisir tout en ignorant ce qu'elle recèle. Qui mieux qu'un technicien cynégétique pourra expliquer ce qu'il en est des animaux présents sur un territoire ?

Tout se tient dans le mot « équilibre » : aucun chasseur n'a intérêt à le bouleverser. Le milieu naturel est façonné par l'homme, restructuré par les différentes formes d'activité. Les principaux dégâts causés à la diversité ne sont pas dus à la chasse : pesticides, myxomatose ont tué bien plus que les chasseurs.

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie.  - C'est bien vrai !

M. Gérard Le Cam.  - Ce sont les chasseurs qui paient les dégâts occasionnés aux agriculteurs par les gros animaux. Serons-nous encore assez nombreux, demain, pour financer les dégâts du gros gibier et éliminer les nuisibles ? Ce que nous ne ferons pas devra être payé par d'autres.

La fonte des effectifs de chasseurs est un danger réel. Nous avons encore la force du nombre et celle de l'ancrage populaire. Une nature morte, c'est bien beau -sur un tableau ; une nature vivante est encore plus belle !

Le groupe CRC votera cette proposition de loi. Il restera vigilant pour que la chasse reste une activité populaire, accessible à tous. (Applaudissements)

M. Rémy Pointereau.  - Une modernisation du droit de la chasse est nécessaire. Après les états généraux de la chasse, organisés en février, cette proposition de loi y contribuera.

Faut-il un texte annuel sur la chasse ? Oui, pour en redresser l'image caricaturale. Les chasseurs jouent un rôle important pour la biodiversité. Il faut, pour le faire reconnaître, mener de gros efforts pédagogiques. Le petit gibier doit être protégé ; les premiers à défendre une agriculture durable sont les chasseurs, qui jouent un rôle majeur dans la protection des zones humides.

Les fédérations départementales de chasse jouent un rôle majeur pour la défense de l'environnement sur le terrain. Les dégâts causés par certaines espèces augmentent avec leur prolifération. C'est ce qui a occupé principalement les chasseurs du Cher lors de leur récente assemblée générale. Ils ne peuvent être seuls à en supporter le coût. Il faudra donc une coopération entre chasseurs, agriculteurs et propriétaires. La rédaction de l'article proposé est ambiguë quant aux propriétés de l'État.

M. Jean-Louis Carrère.  - Exact !

M. Rémy Pointereau.  - Nous avons, dans le Cher, un polygone de tir sur 13 000 hectares.

M. Jean-Louis Carrère.  - Nous avons cela aussi.

M. Rémy Pointereau.  - C'est une réserve militaire mais aussi pour les sangliers. Il faut donc bien faire supporter par les propriétaires de ces terrains non chassés le coût des indemnisations. Pensons aussi aux accidents de la route, parfois mortels, causés par ce gros gibier.

Le prix du permis de chasse est prohibitif. Il nous faut faire en sorte de rendre la chasse plus attractive et plus accessible aux jeunes. Mon amendement en ce sens a été adopté par la commission et étendu à tous les chasseurs. C'était une réelle demande.

Le décret sur les extrémistes anti-chasse est enfin paru. Dix-huit actions de sabotage ont été recensées. Le décret du 4 juin 2010 est-il appliqué ? Avec quels résultats ?

Ce texte répond aux besoins d'une évolution équilibrée. Il faut beaucoup de talent pédagogique aux chasseurs.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - A nous aussi !

M. Rémy Pointereau.  - Je n'aurai garde d'oublier les bénévoles qui s'y investissent beaucoup, comme les lieutenants de louveterie, qu'il faudra songer un jour à indemniser.

M. Jean-Louis Carrère.  - Bonne idée !

M. Rémy Pointereau.  - Quand les chasseurs se font pédagogues, ils peuvent convaincre ceux qui sont hostiles à la chasse, urbains ou rurbains. J'espère que ce texte nous permettra de faire encore un pas en avant en direction de ceux qui doutent du rôle économique et de lien social de la chasse. (Applaudissements à droite et au centre)

M. François Patriat.  - Notre débat répond au rapport que j'avais fait il y a une décennie sur une chasse responsable et apaisée. Nous étions alors parvenus à un texte équilibré, faisant entrer la chasse dans le droit positif français -elle n'était que dans le droit négatif. Le vote n'avait pu avoir lieu avant 7 heures le matin. M. Poniatowski m'avait, à l'époque, fait venir au Sénat. Sommes-nous aujourd'hui dans l'urgence ? Dans l'essentiel ? Plutôt dans la chasse aux voix !

Les chasseurs, qui se sont réunis à la Maison de la chimie il y a quelques semaines, sont confrontés à de nouvelles exigences pour jouer leur rôle dans l'aménagement du territoire et la protection de l'environnement.

Les deux vrais sujets qui attendent le monde de la chasse sont les dégâts des gibiers et les surpopulations, avec des problèmes sanitaires liés, comme la tuberculose et d'autres maladies, qui créent des conflits avec les agriculteurs. Le monde de la chasse a voulu protéger les populations, il les a fait croître et l'on voit des sangliers un peu partout. Les lieutenants de louveterie ne sont pas à même de régler seuls ces problèmes. Les chasseurs et l'État doivent prendre leurs responsabilités.

Nous devrons, ces prochaines années, revenir sur le sujet. Les chasseurs doivent continuer à promouvoir leur image de gestionnaires de la biodiversité. Sans doute y a-t-il des ultras de la chasse mais aussi de la protection des animaux : faut-il vraiment défendre les cormorans ou les renards en surnombre ? J'ai vu les problèmes posés par la rage.

Le groupe socialiste soutiendra cette proposition de loi. La chasse n'est plus un sujet d'affrontement mais l'irrationnel continue d'y avoir sa part. (Applaudissements)

Mme Marie-Christine Blandin.  - J'apporte ma contribution à la biodiversité sénatoriale dans ce débat unanime.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Et viril !

Mme Marie-Christine Blandin.  - Des agriculteurs et des salariés agricoles se suicident, des écoles ferment, on manque de médecins à la campagne mais tous les trois ans, avant des élections, nous devons parler de la chasse, même si elle ne concerne qu'1,3 million de personnes, soit 2 % de la population. Les artisans, les universitaires, les PME n'ont pas cette chance.

L'unanimité, vous l'aurez sur les articles utiles et raisonnables, comme l'article 5, ou de bon sens, comme l'article 7.

Pas sur les articles inutiles, ou encourageant le prosélytisme ou tentés de limiter la liberté d'autrui. L'article premier ne nous apporte rien de plus, après la convention du 4 mars autorisant l'entrisme pédagogique. Dès 2008, co,qia,te fédérations départementales étaient intervenues à l'école, bien que 62 % des Français le réprouvent. Imagine-t-on les boulangers venir en classe montrer comment ils pétrissent leur pain et exiger que cette bonne action soit inscrite dans la loi ? Vous ne pouvez éviter que le chasseur soit un homme armé. Or, il ne faut pas rapprocher l'imaginaire des armes de l'école. Ni véhiculer le terme de « nuisible » alors que la biodiversité est une mosaïque de rôles complémentaires où l'on trouve aussi la fouine, le renard...

M. Jean-Louis Carrère.  - Et la belette !

Mme Marie-Christine Blandin.  - ...le lynx, le loup, l'ours.

Il y a la volonté des chasseurs de prouver qu'ils existent mais aussi la tentative, avec récidive, de priver les autres de liberté : convoitise sur les terrains non chassés, injonction de faire payer ceux qui ne chassent pas. Et même essai d'intimidation avec le dernier article -supprimé par la commission.

Je partage le plaisir de partir au petit matin en forêt, les bottes qui se mouillent, le soleil qui commence à chauffer, la brume qui se lève, le silence, la patience, le vol des perdrix -mais je ne tue pas et j'entends que soient respectés ceux qui ne veulent pas tuer et ne veulent pas qu'on tue sur leur terrain.

A l'heure où l'on supprime des postes d'enseignants, je ne souhaite pas que l'on fasse entrer les chasseurs à l'école.

Mme Évelyne Didier.  - Très bien !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Accorder un jour dans un autre département avec le permis de chasse ? Je n'en vois pas l'intérêt, alors que cela aurait des coûts fixes de validation. Le sujet -l'attractivité de la chasse- doit être traité autrement.

Il n'était pas question de discriminer les territoires de chasse. Je soutiendrai, à l'article 2, un amendement en ce sens.

M. Collin a rappelé l'importance des schémas départementaux cynégétiques. J'ai saisi les préfets.

Il est bon de simplifier les choses pour attirer de nouveaux chasseurs, qui doivent être en nombre suffisant dans les territoires ruraux pour lutter contre les espèces qui prolifèrent. La table ronde a été utile, monsieur Carrère. La chasse doit se faire dans le respect de la réglementation. Quel parlementaire pourrait s'y opposer ?

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Si une espèce comme l'ortolan est protégée, la chasse en est interdite et doit le rester.

M. Patriat évoque à juste titre les problèmes sanitaires.

Je salue, avec Mme Blandin, la biodiversité dans cette assemblée aujourd'hui fort virile.

Les chasseurs participent à l'entretien des milieux humides et de la faune sauvage. Ce mouvement existe bien, saluons-le aussi.

Discussion des articles

Article premier

M. le président.  - Amendement n°12, présenté par Mmes Blandin, Voynet et Boumediene-Thiery et M. Desessard.

Supprimer cet article.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Les chasseurs disposent déjà d'une convention qui leur permet de participer à des actions d'éducation. Le gradient de l'impossible et du possible n'est pas suffisamment précisé, depuis le fusil, le treillis, le gibier mort, les animaux empaillés, les « nuisibles » jusqu'à l'initiation à l'environnement.

Des élèves d'une classe de 6ème du Pas-de-Calais ont eu une initiation au « piégeage des petits puants » allant de la construction du piège à son relevage... Évidemment, l'expérience a été interrompue.

Moins de chasseurs ? Ils sont moins d'un million en Espagne et 750 000 en Italie. Vous n'êtes pas les plus mal lotis.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - L'exemple donné par Mme Blandin n'est pas représentatif de la réalité. Dans l'Eure, nous invitons les élèves du primaire dans la réserve du marais Vernier. Les lycées agricoles forment à la gestion des territoires, avec des chasseurs -qui ne viennent pas en treillis ! La formation au maniement des armes vient plus tard, pour ceux qui choisissent de passer leur permis.

La convention du 4 mars 2010 a pris acte très positivement de l'action éducative des chasseurs. Ne versez pas dans la caricature. Défavorable.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Même avis.

L'exemple de Mme Blandin est scandaleux ; il ne peut suffire à condamner tout le système. Je partage votre interrogation sur le mot « nuisible ».

M. Jean-Louis Carrère.  - Moi aussi, je regrette des comportements caricaturaux. J'invite Mme Blandin dans nos réserves naturelles des Landes où les enfants des écoles viennent observer le passage des migrateurs.

L'amendement n°12 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°13, présenté par Mmes Blandin, Voynet et Boumediene-Thiery et M. Desessard.

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Elles mènent des actions d'information en matière de connaissance de la faune sauvage et de ses habitats. »

Mme Marie-Christine Blandin.  - Cet amendement de repli ne supprime que la fin de la phrase. L'homme est souvent responsable quand une espèce animale prolifère. La biodiversité se gère très bien toute seule mais l'homme la perturbe. La pédagogie que vous revendiquez aujourd'hui n'a pas toujours bénéficié de connaissances justes : voulez-vous voir le numéro du Chasseur français consacré au croisement de la belette et de l'hermine, l'herminette ?

Quelque 9 000 infractions sont recensées en matière de chasse par l'Observatoire national de la délinquance et 2 000 en matière de pêche. Comme en matière de gestion, il faut beaucoup de temps pour faire cesser les transgressions : il a fallu vingt ans pour appliquer la loi dans la Réserve naturelle du Platier d'Oye ! Certains acteurs ne sauraient être des pédagogues de la biodiversité.

M. le président.  - Amendement n°9 rectifié, présenté par M. Carrère et les membres du groupe socialiste.

Alinéa 2

Remplacer le mot :

Elles

par les mots :

Les Fédérations départementales des chasseurs agréées associations de protection de l'environnement au titre de l'article L. 141-1

M. François Patriat.  - Le rôle des fédérations au service du patrimoine cynégétique est avéré. De nombreuses fédérations interviennent en milieu scolaire pour dispenser une information conforme au développement durable. Ces pratiques ont été formalisées dans une convention.

En 2008, une longue discussion a porté sur l'agrément des associations de protection de l'environnement, une décision qui ne doit pas être automatique au profit de toutes les fédérations de chasse. D'où la précision apportée par l'amendement, qui répond aux préoccupations de Mme Blandin.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - La commission est défavorable à l'amendement de repli n°13. Madame Blandin, vous seriez bluffée en découvrant ce que les fédérations départementales font pour gérer les espèces et les espaces !

Monsieur Patriat, 80 fédérations sur 94 conduisent des actions d'information et d'éducation. Seules deux ne sont pas agréées : celle de Seine-et-Marne, dont l'agrément est en cours, et la Ficevy, une fédération interdépartementale dont la demande est en cours d'instruction.

Il arrive que des associations écologistes tentent de retirer l'agrément à certaines fédérations. C'est arrivé en première instance dans la Manche, avant une décision inverse en appel.

Retrait ou rejet de l'amendement n°9 rectifié.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Défavorable à l'amendement n°13 ; sagesse sur l'amendement n°9 rectifié.

M. François Patriat.  - L'agrément n'est pas automatique ; il peut être retiré. Les fédérations doivent être incitées à faire en sorte de le conserver.

L'amendement n°9 rectifié est retiré.

L'amendement n°13 n'est pas adopté.

L'article premier est adopté.

Article 2

M. le président.  - Amendement n°14, présenté par Mmes Blandin, Voynet et Boumediene-Thiery et M. Desessard.

Supprimer cet article.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Cet article 2 est un nouveau cadeau accordé à certaines catégories de la population, sous forme d'exonération fiscale.

Vu la déliquescence des finances publiques, il serait judicieux d'éviter pareille évolution, contraire à la volonté de Mme Lagarde et de M. Baroin de réduire les niches fiscales et sociales. Mieux vaudrait utiliser l'argent de ces exonérations à nettoyer les zones humides : les 250 millions de cartouches tirées chaque année par les chasseurs laissent des traces !

Et le prix de location d'une couchette dans les huttes est impressionnant...

Les cadeaux budgétaires ne sauraient être à deux vitesses, d'autant que vous venez de supprimer la niche fiscale verte du photovoltaïque.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Je voudrais vous ramener à certaines réalités ! Cette mesure est à des années lumières d'une niche fiscale. Elle avait été adoptée dans le volet zones humides du DTR, que vous avez voté.

Cette mesure coûterait 30 000 euros au budget de l'État. Rien à voir avec des centaines de millions !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Je regrette presque la modestie du coût des zones humides : en dépensant plus, on les entretiendrait mieux. J'ajoute que l'usage de la grenaille au plomb est désormais interdit en zone humide, même pour les cormorans.

Vous auriez mieux fait d'évoquer, plutôt que le photovoltaïque, l'effort énorme accompli en faveur de l'éolien off shore.

L'amendement n°14 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°25, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

sous réserve que celle-ci soit associée à la préservation et à l'entretien des habitats

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Préserver l'environnement n'interdit pas de chasser.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Avis favorable, en espérant que le gage sera levé en cours de navette.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Comme l'a rappelé Mme Blandin, les finances de l'État sont un peu serrées... Un arbitrage est donc nécessaire pour chaque amendement : il sera rendu pendant la navette.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Avis très favorable !

M. Jean-Louis Carrère.  - En commission, le rapporteur avait fourni des garanties de bonne gestion mais l'amendement du Gouvernement nous donne toute satisfaction. Les chasseurs propriétaires de postes fixes pour la chasse nocturne au gibier d'eau doivent déjà participer à la protection des zones humides.

Nos voterons l'amendement, qui va dans le même sens.

L'amendement n°25 est adopté, ainsi que l'article 2, modifié.

Article 3

M. le président.  - Amendement n°15, présenté par Mmes Blandin, Voynet et Boumediene-Thiery et M. Desessard.

Supprimer cet article.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Les chasseurs se proclament premiers gestionnaires de la biodiversité mais leur démarche à courte vue peut conduire à exterminer certains prédateurs, considérés comme des concurrents. Lâcher du petit gibier n'est pas gérer la biodiversité. Plus de 48 % des oiseaux chassables sont classés « vulnérables ». Pendant les migrations, les oiseaux ont besoin d'endroits pour se reposer, alors que les zones humides abritent des huttes de chasse.

J'ajoute que le terme « écosystème » convient parfaitement. Si le choix de « biodiversité » est justifié par la référence à l'année de la biodiversité, il y a un an de retard !

M. le président.  - Amendement n°16, présenté par Mmes Blandin, Voynet et Boumediene-Thiery et M. Desessard.

Rédiger ainsi cet article :

I. - La deuxième phrase du second alinéa de l'article L. 420-1 du code de l'environnement est supprimée.

II. - En conséquence, au début de la troisième phrase du second du même article, le mot : « Ils » est remplacé par les mots : « Les chasseurs ».

Mme Marie-Christine Blandin.  - Amendement de repli.

Monsieur le rapporteur, merci de votre invitation mais lorsque je présidais le conseil régional, j'avais d'excellentes relations avec certains de vos collègues ; nous avons financé ensemble des trames vertes innovantes.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Les chasseurs ne prétendent pas être les pionniers de la biodiversité mais ils veulent en être des acteurs. Le nier, c'est reprendre un combat que je croyais fini depuis dix ans...

Vos collègues Verts du Parlement européen ont voté la Charte européenne de la biodiversité, qui reconnaît la possibilité pour les chasseurs de contribuer à la biodiversité.

Avis défavorable aux deux amendements.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Je ne suis pas certaine que la biodiversité se gère toute seule... Avis défavorable aux deux amendements.

M. François Fortassin.  - Madame Blandin, pour protéger la biodiversité, il faut la connaître. Incontestablement, les chasseurs, avec les agriculteurs, connaissent parfaitement la nature !

N'oubliez-pas que le mieux est parfois l'ennemi du bien. La chasse est interdite dans les parcs naturels. Le coq de bruyère a quasiment disparu du parc naturel des Pyrénées. Pourquoi ? Pour avoir des petits, le mâle doit s'accoupler à trois femelles. Seule la chasse -limitée aux mâles- permet d'assurer la bonne proportion des sexes car une couvée comporte autant de mâles et de femelles. Les ennemis du coq de bruyère, ce ne sont pas les chasseurs mais les skieurs qui le dérangent en hiver pendant son sommeil.

M. François Patriat.  - La prolifération de l'aulne vert empêche les coqs de prendre leur envol ; là encore, quand les chasseurs ouvrent des milieux, ils permettent la survie de nombreuses espèces...

Aujourd'hui, le terme de « biodiversité » tend à remplacer celui d'« écosystème », tombé en désuétude.

Nous ne voterons pas les amendements nos15 et 16.

L'amendement n°15 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°16.

L'article 3 est adopté.

Article 4

M. le président.  - Amendement n°17, présenté par Mmes Blandin, Voynet et Boumediene-Thiery et M. Desessard.

Supprimer cet article.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Ainsi les chasseurs sont indispensables à la reproduction du coq de bruyère... Comme cet oiseau existait avant l'apparition de l'homme, comment faisait-il pour se reproduire avant les chasseurs ? (Sourires)

Le droit à l'opposition cynégétique est reconnu depuis l'arrêt Chassagnon rendu par la Cour européenne des droits de l'homme.

Avec cet article, les fédérations de chasseurs reprendraient la main via le préfet !

Plutôt que d'accuser les propriétaires, il vaudrait mieux s'interroger sur les raisons des dégâts sur les cultures. Faut-il rappeler la pratique de l'agrainage ?

Utilisons les textes existants et observons les pratiques !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Avis très défavorable.

Madame Blandin, cet article ne compromet pas le droit à l'opposition cynégétique. Il institue simplement la responsabilité financière des intéressés.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - La rédaction de l'amendement n°27 du Gouvernement devrait répondre à vos préoccupations et permettrait de réduire les tensions.

M. Jean-Louis Carrère.  - Comme le rapporteur, j'estime que l'article ne compromet pas le droit d'opposition.

Des sangliers se réfugient dans le camp d'entrainement au tir de la base aérienne de Mont-de-Marsan, avant de ressortir la nuit pour dévaster les cultures de maïs. Il faut conserver l'article...

J'ajoute que l'agrainage a pour but de réguler la population, non de la conserver.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Pas toujours !

M. Jean-Louis Carrère.  - Dans les Landes, nous sommes très bien ! (Sourires)

L'amendement n°17 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°27, présenté par le Gouvernement.

Rédiger ainsi cet article :

La section 2 du chapitre V du titre II du livre IV du même code est complétée par un article L. 425-5-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 425-5-1. -  Lorsque le détenteur du droit de chasse d'un territoire ne procède pas ou ne fait pas procéder à la régulation des espèces présentes sur son fonds et qui causent des dégâts de gibier, il peut voir sa responsabilité financière engagée pour la prise en charge de tout ou partie des frais liés à l'indemnisation mentionnée à l'article L. 426-1 et la prévention des dégâts de gibier mentionnée à l'article L. 421-5.

« Lorsque l'équilibre agro-sylvo-cynégétique est fortement perturbé autour de ce territoire, le représentant de l'État dans le département, sur proposition de la fédération départementale ou interdépartementale des chasseurs, après avis de la Commission départementale de la chasse et de la faune sauvage, peut notifier à ce détenteur du droit de chasse un nombre d'animaux non prélevés dans un délai donné servant de référence à la mise en oeuvre de la responsabilité financière mentionnée à l'alinéa précédent. »

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Comme le président de la commission des affaires économiques, je ne partage pas totalement l'optimisme de M. Carrère à propos de l'agrainage.

Les problèmes d'indemnisation des dégâts causés par le gibier créent d'énormes tensions dans les campagnes : je vous invite à voter cet amendement.

M. le président.  - Sous-amendement n°28 à l'amendement n°27 du Gouvernement, présenté par M. Poniatowski.

Amendement n° 27, alinéa 4

Après les mots :

faune sauvage

insérer les mots :

réunie dans sa formation spécialisée pour l'indemnisation des dégâts de gibier aux cultures et aux récoltes agricoles

M. Ladislas Poniatowski.  - L'amendement n°27 accepte la logique de la responsabilité financière des personnes opposées à la chasse, en substituant à juste titre la notion de titulaire du droit de chasse à celle de propriétaire. J'approuve également l'intervention de la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage.

La commission a donné un avis de sagesse sur l'amendement (Mme le ministre, s'étonne), déposé un quart d'heure avant la réunion.

Si ce sous-amendement, que je présente à titre personnel, est adopté, je transformerai l'avis de sagesse en avis favorable.

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie.  - Bien que la commission n'ait pas examiné le sous-amendement, je formulerai un avis favorable, ainsi qu'à l'amendement n°27, sous-amendé.

M. le président.  - Amendement n°6, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission.

Alinéa 2

Après le mot : 

chasseurs

insérer les mots :

et après avis de la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage

M. Ladislas Poniatowski.  - Cet amendement est identique aux amendements nos11 rectifié et 8 ; je laisserai leurs auteurs le défendre.

M. le président.  - Amendement identique n°11 rectifié, présenté par M. Carrère et les membres du groupe socialiste.

M. Jean-Louis Carrère.  - Le principe de responsabilité financière serait étendu à l'ensemble du territoire national. Actuellement, la charge des indemnisations est insupportable pour les fédérations de chasseurs. Bien sûr, il faudra respecter le droit à l'objection de conscience des propriétaires concernés, mais il importe que l'État aussi soit soumis à l'obligation ou à la responsabilité financière.

Nous voterons le sous-amendement.

M. le président.  - Amendement identique n°18, présenté par Mmes Blandin, Voynet et Boumediene-Thiery et M. Desessard.

Mme Marie-Christine Blandin.  - L'amendement du Gouvernement, sous-amendé, nous convient ; mais la formation spécialisée est-elle aussi ouverte que la commission départementale ?

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par M. Pointereau.

Alinéa 2

Après le mot :

territoire

insérer les mots :

, y compris à l'État,

M. Rémy Pointereau.  - Amendement de précision. Le ministère de la défense, en particulier, possède d'immenses terrains où les sangliers prolifèrent. L'État doit être exemplaire.

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par M. Pointereau.

Alinéa 2

Après le mot :

procéder

insérer le mot :

suffisamment

M. Rémy Pointereau.  - Je l'ai déjà présenté.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Avis favorable aux amendements nos11 rectifié et 18, défavorable aux amendements nos3 et 4 car tous les territoires non chassés sont bien sûr concernés, quel que soit le propriétaire. En outre, l'adverbe « suffisamment » est inutile et peu conforme à nos efforts incessants de clarification et de simplification !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Je dois à la vérité de dire que les formations spécialisées sont moins ouvertes que les commissions départementales !

Mais le rapporteur tient à son sous-amendement, et la vie est faite de compromis : j'accepte donc le sous-amendement.

Monsieur Pointereau, les territoires appartenant à l'État sont bien sûr concernés par l'article 4 ; vos amendements sont inutiles.

M. Rémy Pointereau.  - Vous m'avez rassuré... en espérant que l'État ait les moyens de verser les indemnités aux agriculteurs.

Les amendements nos3 et 4 sont retirés.

M. Jean-Louis Carrère.  - Après les explications du rapporteur, nous voterons le sous-amendement ; après celles du ministre, qui a confirmé que les terrains de l'Etat seront concernés, nous voterons l'amendement n°27 avec enthousiasme. (Sourires)

Le sous-amendement n°28 est adopté. L'amendement n°27, sous-amendé, est adopté et devient l'article 4.

Les amendements nos6, 11 rectifié et 18 deviennent sans objet.

L'article 4 est adopté.

Article additionnel

M. le président.  - Amendement n°24 rectifié, présenté par M. Carrère.

Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la fin du premier alinéa de l'article L. 426-3 du code de l'environnement, les mots : « à un minimum fixé par décret en Conseil d'État » sont remplacés par les mots : « à 3 % de la surface des cultures ou récoltes agricoles, par îlot ou partie de l'îlot concerné par la même culture et par campagne cynégétique. Ce seuil peut être réévalué, par arrêté du ministre chargé de la chasse »

M. Jean-Louis Carrère.  - Le nombre de chasseurs décroît, alors que leur âge s'accroît. Parallèlement, leur appétence pour certaines pratiques cynégétiques diminue alors que la population de certains gibiers augmente.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Quel poète !

M. Jean-Louis Carrère.  - Dans ces conditions, la Fédération départementale des Landes a demandé l'autorisation d'utiliser les chevrotines et l'agrainage pour réguler la population des sangliers.

J'en viens à l'amendement. Si nous n'y prenons garde, nous découragerons les chasseurs, ce qui placera les fédérations dans une situation catastrophique envers nos amis agriculteurs. Mme la ministre peut-elle prendre l'engagement qu'une vraie concertation aura lieu sur la question des dégâts provoqués par le gros gibier et leur indemnisation ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Je soutiens totalement la demande de M. Carrère, bien que je souhaite le retrait de son amendement -le seuil des 3 % n'est pas la bonne solution. On ne peut aider le monde de la chasse sur le dos des agriculteurs. Il faut une solution pour traiter les dossiers des dégâts que subissent les tout petits propriétaires.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - J'invite M. Carrère à lire la circulaire distinguant l'agrainage dissuasif et l'agrainage de nourrissage. De fait, 76 euros, c'est peu pour une grande exploitation et beaucoup pour une petite. Je m'engage à conduire une réflexion avec tous les acteurs.

M. Jean-Louis Carrère.  - Je ne suis pas totalement satisfait.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Oh !

M. Jean-Louis Carrère.  - J'ai été échaudé par l'affaire de la table ronde... Nous avons là une assurance bénévole, gratuite pour certains mais payés par d'autres qui ne sont pas parmi les plus aisés du monde rural. Il faut arrêter de prendre les chasseurs populaires pour des vaches à lait. On a plus de considération pour les assureurs de véhicules...

L'amendement n°24 est retiré.

L'article 5 est adopté, ainsi que l'article 6.

Article 7

M. le président.  - Amendement n°10 rectifié, présenté par M. Patriat et les membres du groupe socialiste.

Alinéas 2 et 3

Supprimer ces alinéas.

M. François Patriat. - La validation du permis de chasse départemental est déjà possible pour trois jours, deux fois par campagne cynégétique ou neuf jours consécutifs, une seule fois. Ces validations donnent lieu au paiement d'une redevance cynégétique et d'une cotisation fédérale, non cumulables.

La nouvelle disposition n'a pas du tout été encadrée ; elle aura, pour les fédérations, un coût non encore évalué. Nous pourrions retirer notre amendement au profit de celui du rapporteur.

M. le président.  - Amendement n°5, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission.

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Le titulaire d'une validation départementale de son permis de chasser peut obtenir de sa fédération, une seule fois dans l'année et dans des conditions fixées par voie réglementaire, une validation de un jour valable dans un autre département. » ;

M. Ladislas Poniatowski.  - La logique de ce permis d'un jour, c'est le département voisin. Je pense aux gabionneurs, qui sont des gens modestes. Ceux de l'Eure doivent pouvoir se rendre dans le Calvados, ne serait-ce qu'à l'invitation de leurs amis. Nous avons proposé une rédaction mieux encadrée que celle de M. Pointereau pour éviter le nomadisme. Notre amendement est un petit clin d'oeil chaleureux adressé au monde de la chasse. C'est tout autre chose que le permis de trois jours, qui concerne, par exemple, des expatriés qui reviennent chasser en France.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Le Gouvernement n'est pas très favorable à cette rédaction, trop proche de celle du permis de trois jours : on va créer une complexité administrative. Il faudrait au moins écrire « une seule fois par campagne cynégétique »... (M. Ladislas Poniatowski, rapporteur, donne son accord)

M. le président.  - Ce sera l'amendement n°15 rectifié.

M. Jean-Louis Carrère.  - Une autre solution consisterait à diminuer le prix du permis de trois jours...

L'amendement n°10 rectifié est retiré.

M. Rémy Pointereau.  - On se plaint qu'il y a de moins en moins de chasseurs... Le jeune qui n'est pas fils de chasseur ou d'agriculteur n'a pas les moyens d'aller à la chasse. Il faut envoyer un signe fort à nos jeunes. Le permis de trois jours coûte 50 euros...

L'amendement n°5 rectifié est adopté, ainsi que l'article 7, modifié.

Articles additionnels

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié, présenté par MM. Houpert et Pointereau.

Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l'article L. 423-6 du code de l'environnement, les mots : « un certificat médical attestant que son état de santé physique et psychique est compatible avec la détention d'une arme. Il doit en outre présenter » sont supprimés.

M. Alain Houpert.  - L'obligation de présenter un certificat est déjà exigée lors de l'acquisition d'une arme. Évitons aux jeunes chasseurs des dépenses supplémentaires.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - De fait, il faut un certificat médical pour acheter une arme. Mais certains chasseurs qui passent leur permis ne possèdent pas d'arme. Ce certificat doit être exigé dans les deux cas de figure.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Défavorable.

L'amendement n°1 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°2, présenté par M. Houpert.

Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article L. 423-8 du code de l'environnement est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Les fédérations départementales des chasseurs ne peuvent obliger, directement ou indirectement, les candidats à adhérer à la fédération qui a organisé l'examen du permis de chasser à l'issue de l'examen. »

M. Alain Houpert.  - Certaines fédérations obligent les candidats à adhérer à l'issue de l'examen ou à passer l'examen dans un certain délai, à travers des mécanismes de caution. Excédant la mission de service public qui leur incombe, ce comportement contribue à diminuer le nombre de jeunes chasseurs.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Il n'y a pas assez d'inspecteurs. Les chasseurs s'inscrivent donc dans plusieurs fédérations pour passer leur examen. Ce nomadisme doit cesser. Une des solutions est d'augmenter le nombre de sessions par département, comme il a été fait en Côte-d'Or. Ce n'est en tout cas pas de niveau législatif.

L'amendement n°2 est retiré.

L'article 8 demeure supprimé.

L'article 8 bis est adopté.

M. le président.  - Amendement n°20, présenté par Mmes Blandin, Voynet et Boumediene-Thiery et M. Desessard.

Après l'article 8 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 424-2 du code de l'environnement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La pratique de la chasse à tir est interdite le mercredi. »

Mme Marie-Christine Blandin.  - La loi sur la chasse votée en 2000 prévoyait une journée sans chasse ; la majorité actuelle ne lui a pas laissé le temps de s'appliquer.

Le partage des usages est une exigence sociale. Il appartient à chacun d'accepter certaines restrictions. Les chasseurs peuvent bien respecter les promeneurs, les enfants, les ornithologues ou les poètes... Je rappelle qu'au final, c'est le Conseil constitutionnel qui avait choisi le mercredi.

M. le président.  - Amendement n°21, présenté par Mmes Blandin, Voynet et Boumediene-Thiery et M. Desessard.

Après l'article 8 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 424-2 du code de l'environnement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La pratique de la chasse à tir est interdite un dimanche par mois. »

Mme Marie-Christine Blandin.  - Si vous n'êtes pas sensibles au mercredi, à cause de votre article premier, peut-être accepterez-vous un dimanche par mois... Cela éviterait de voir certains pique-niques se transformer en retraites précipitées. Ce serait aussi admettre que la chasse ne condamne pas l'activité ludique des autres.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Le Conseil constitutionnel avait émis des réserves sur le choix d'un jour précis.

Ne rouvrons pas cette polémique. La provocation n'est pas de notre style. Plus de la moitié des départements ont un jour de non-chasse, certains en ont deux, trois. Il y en a cinq dans le Tarn ! Laissons les fédérations de chasse décider, selon les jours ou selon les lieux. Certains schémas départementaux ont prévu qu'on ne chasse ni le mercredi ni le samedi ni le dimanche dans les forêts périurbaines mais tous les jours ailleurs. Ces schémas sont de bons outils dont les fédérations de chasse font un bon usage.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Pour éviter les accidents de chasse, le mieux est de faire selon les circonstances locales, plutôt qu'avec une loi générale. C'est ce qui se pratique aujourd'hui.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Vexée par le mot « provocation » du rapporteur, je retire l'amendement n°20. (Sourires)

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Merci de m'avoir entendu ! (Sourires)

L'amendement n°20 est retiré.

L'amendement n°21 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°8 rectifié, présenté par MM. Vasselle, Martin, de Montesquiou et Milon, Mme Sittler et MM. Mayet, Pinton et Lardeux.

Après l'article 8 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le troisième alinéa (II) de l'article L. 424-3 du code de l'environnement est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Les dispositions des articles L. 425-3 et L. 425-15 ne s'appliquent pas à la pratique de la chasse dans les établissements de chasse à caractère commercial. »

M. Pierre Martin, auteur de la proposition de loi.  - Il existe environ 400 établissements de chasse à caractère commercial, qui accueillent 600 000 chasseurs. Ce sont près de 5 000 emplois directs auxquels s'ajoutent les emplois indirects. Un contrôle total de leurs activités avec le contrôle de la garderie, même en enclos, doit être mis en oeuvre.

Ces établissements doivent aussi pouvoir exercer leur activité économique de l'ouverture générale à la fermeture générale de la chasse sur gibier d'élevage uniquement, bien entendu, et indépendamment des opérations de gestion du gibier naturel mises en place sur les territoires des sociétés communales. Les volatiles qui échappent au tir servent souvent à la reproduction dans les chasses voisines !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Favorable à une condition non négligeable, que M. Vasselle, contacté, a acceptée : que l'amendement vise exclusivement l'article L. 425-15. Les chasses commerciales doivent respecter les règles de sécurité inscrites au schéma départemental. Il faut supprimer la référence à l'article L. 425-3.

M. Pierre Martin, auteur de la proposition de loi.  - Cela va de soi. Je remercie le rapporteur.

M. le président.  - Ce sera l'amendement n°8 rectifié bis.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Même avis que le rapporteur.

L'amendement n°8 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°19, présenté par Mmes Blandin, Voynet et Boumediene-Thiery et M. Desessard.

Après l'article 8 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 424-15 du code de l'environnement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Un décret en Conseil d'État détermine les règles de sécurité s'imposant sur l'ensemble du territoire national. »

Mme Marie-Christine Blandin.  - Les règles de sécurité concernant notamment le tir à balle sont fixées par les chasseurs eux-mêmes dans les schémas départementaux. Cette subsidiarité n'est pas, ici, positive. Plus de 95 % des accidents se produisent pendant des actions de chasse, particulièrement en groupe. En janvier, un enfant de 11 ans a perdu la vie en accompagnant son père à une battue au sanglier ; même observateur, ce n'était pas sa place. Durant les périodes de chasse, il y a un mort par semaine et un blessé par jour. Il faut des règles communes, notamment sur la présence des enfants.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Ce n'est pas nécessaire, les règles départementales sont soumises à l'imprimatur du préfet. Celui-ci peut fort bien refuser un schéma départemental. Et les problèmes de sécurité ne sont pas les mêmes pour les tirs à balle en montagne et pour la chasse au gibier d'eau en zone marécageuse. Retrait, sinon rejet.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Je ne suis pas opposée à des règles nationales déclinées localement ; mais un dispositif de ce type a existé de 2000 à 2008, jamais appliqué faute d'accord. Dans mon courrier aux préfets, j'insiste tout particulièrement sur les règles de sécurité.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Sur la présence des enfants, il n'y a pas de particularité locale qui tienne.

L'amendement n°19 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°23, présenté par Mmes Blandin, Voynet et Boumediene-Thiery et M. Desessard.

Après l'article 8 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 6 du chapitre IV du titre II du livre IV du code de l'environnement est complétée par deux articles ainsi rédigés :

« Art. L. 424-16.  - Même en l'absence de tout signe d'ivresse manifeste, le fait de pratiquer une activité de chasse sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par une concentration d'alcool dans le sang égale ou supérieure à 0,80 gramme par litre ou par une concentration d'alcool dans l'air expiré égale ou supérieure à 0,40 milligramme par litre est puni de deux ans d'emprisonnement et de 4 500 euros d'amende.

« Le fait de pratiquer une activité de chasse en état d'ivresse manifeste est puni des mêmes peines. »

« Art L. 424-17.  -  I.  - Toute personne coupable de l'un des délits prévus à l'article L. 424-16 encourt également les peines complémentaires suivantes :

« 1º la suspension, pour une durée de trois ans au plus, du permis de chasser ;

« 2º l'annulation du permis de chasser avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis pendant trois ans au plus ;

« 3º la peine de travail d'intérêt général selon des modalités prévues à l'article 131-8 du code pénal et selon les conditions prévues aux articles 131-22 à 131-24 du même code ;

« 4º la peine de jours-amende dans les conditions fixées aux articles 131-5 et 131-25 du code pénal.

« II.  -  La suspension du permis de chasse prévue au présent article ne peut être assortie du sursis, même partiellement. »

Mme Marie-Christine Blandin.  - La consommation d'alcool est moins réprimée pour un chasseur que pour un automobiliste alors même qu'il est armé ! L'alcool altère la vigilance ; elle peut faire commettre des erreurs d'évaluation. On suspend le permis de conduire d'un chasseur conduisant en état d'ébriété mais pas son permis de chasse. Ce qui ne veut pas dire que tous les automobilistes ou tous les chasseurs boivent au-delà du raisonnable...

M. Jean-Louis Carrère.  - Faisons de même pour les sénateurs en séance ! (Sourires)

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - La provocation, ce n'est pas de traiter du problème de l'alcool mais de présenter les chasseurs comme des alcooliques. Il en est de vertueux et d'autres qui ne le sont pas. Il y a des élus vertueux, d'autres non. Idem pour les ministres. (Marques amusées d'interrogation)

Cette affaire de taux d'alcoolémie est traitée dans le code de la santé publique. Ne reprenons pas les mêmes dispositions dans tous les codes... Et il y a d'autres types d'armes que celles des chasseurs.

M. Jean-Louis Carrère.  - Et le président de la République a le nucléaire ! (Sourires)

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Le Gouvernement n'a rien bu... (Sourires) Il reste que porter une arme après avoir bu est prendre une lourde responsabilité. Sagesse.

L'amendement n°23 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°22, présenté par Mmes Blandin, Voynet et Boumediene-Thiery et M. Desessard.

Après l'article 8 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Après l'article L. 427-8 du code de l'environnement, il est inséré un article L. 427-8-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 427-8-1.  -  L'utilisation du grand duc artificiel est autorisée pour la destruction des animaux déclarés nuisibles par arrêté préfectoral. »

II. - L'article 18 de la loi n° 2008-1545 du 31 décembre 2008 pour l'amélioration et la simplification du droit de la chasse est abrogé.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Amendement de clarification. L'article 18 de la loi du 31 décembre 2008 a été interprété comme permettant de chasser avec un grand duc artificiel des espèces chassables.

M. le président.  - Sous-amendement n°26 à l'amendement n° 22 de Mme Blandin, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 3 de l'amendement n° 22

Remplacer les mots :

la destruction des animaux déclarés nuisibles par arrêté préfectoral

par les mots :

la chasse des animaux nuisibles ainsi que pour leur destruction

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - De fait, la loi de 2008 manquait de clarté. La proposition de Mme Blandin doit être améliorée pour que soit complètement retrouvés l'esprit et la lettre de cette loi.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Venez voir mon grand duc artificiel ! Savez-vous ce que c'est et à quoi cela sert ? A tuer les corbeaux en période de non-chasse, particulièrement en avril-mai, moment où ils sont très agressifs parce qu'ils défendent leurs nids. Le grand duc artificiel ne bouge pas les ailes, seulement la tête, et il ne pèse généralement que deux ou trois kilos. Ce faisant, il attire les corbeaux, qu'il reste à tirer.

Le corbeau est le plus grand destructeur de petits oeufs, de faisan ou de canard. Venez vous promener à la campagne ! Vous verrez que les corbeaux sont nuisibles et doivent être traités comme tels.

Défavorable tant à l'amendement qu'au sous-amendement.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - Avec mon sous-amendement, M. Poniatowski pourra utiliser son grand duc artificiel toute l'année pour chasser les corbeaux, et seulement à cette fin.

Mme Marie-Christine Blandin.  - J'approuve le sous-amendement. Je voulais seulement éviter de cautionner le mot « nuisible ». Je sais ce qu'est l'action du grand duc artificiel. Il est difficile même de manger un cornet de frites quand les corbeaux sont déchaînés.

Le sous-amendement n°26 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°22.

(Mme la ministre marque vivement sa déception)

Vote sur l'ensemble

Mme Marie-Christine Blandin.  - Cette loi ne change pas grand-chose à l'état des lieux, elle consiste pour l'essentiel à faire des moulinets pour dire « nous existons, ne nous ennuyez pas ». Je voterai contre.

M. Joseph Kergueris.  - Je ne suis pas chasseur et j'ai beaucoup écouté. L'élu local que je suis sait ce qu'ont apporté les textes précédents : des relations pacifiées. Ce texte emprunt de sérénité facilitera encore la cohabitation entre les chasseurs et les autres ; je le voterai. (Applaudissements à droite)

M. Jean-Louis Carrère.  - Le groupe socialiste votera cette proposition de loi. Je prends acte une nouvelle fois que le Gouvernement s'est engagé à travailler à une solution équitable sur l'indemnisation des dégâts de gros gibier.

M. Pierre Martin, auteur de la proposition de loi.  - Je remercie la commission. Je suis heureux que le débat ait été apaisé. Oui, la sécurité est au premier rang des exigences ; la rattente ne doit plus exister là où il y a chasse à balles.

L'ensemble de la proposition de loi, modifié, est adopté.

La séance est suspendue à 18 h 55.

*

*          *

La séance reprend à 19 h 5.

Prix du livre

(Conclusions de la CMP)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions de la CMP sur la proposition de loi relative au prix du livre numérique.

Discussion générale

Mme Colette Mélot, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.  - La navette législative a permis d'améliorer le texte de la proposition de loi Dumas-Legendre tendant à accompagner l'évolution du marché du livre, au moins homothétique. Il s'agit de réguler, pour préserver la diversité culturelle et pour respecter la propriété intellectuelle.

Maintenir le maillage territorial des libraires suppose qu'ils s'adaptent. A cette fin, il faut insister auprès de la Commission de Bruxelles sur le caractère complémentaire des livres papier et numériques.

Bien des clients des librairies ne savent pas, en entrant, quel ouvrage fera leur bonheur. En outre, une partie importante de la population n'accède pas à internet. L'offre en ligne ne peut donc suffire.

Sur les dix articles de la proposition de loi, seuls quatre restaient en discussion.

L'article 2 a été adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale, qui prend en compte les avis circonstanciés de la Commission européenne.

En revanche, l'article 3 reprend la rédaction du Sénat : il s'appliquera donc à tous les libraires exerçant sur le territoire national.

La CMP a repris la rédaction convenable de l'Assemblée nationale à l'article 5 bis, qui sera codifié dans le code de la propriété individuelle.

Enfin, l'article 7 a été adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale, qui préserve l'objectif majeur de diversité culturelle.

Ce texte est une loi de police au sens du Règlement européen. Cette qualification est justifiée par référence à la Convention de l'Unesco sur la diversité culturelle.

La France fait figure de pionnière en la matière. L'unanimité montre notre conviction partagée de la nécessité de poursuivre le combat politique et de convaincre Bruxelles et nos partenaires. Il s'agit de savoir quelle société nous construirons au bénéfice des citoyens européens. Le Comité de suivi jouera un rôle crucial.

Je vous invite à adopter les conclusions de la CMP. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication.  - Trente ans après la loi Lang, cette proposition de loi constitue une avancée historique pour la filière du livre et une loi fondatrice pour la régulation des industries culturelles à l'heure du numérique.

Je salue la contribution de la Haute assemblée, de Mme Mélot, du président Legendre et de Mme Dumas. Vous avez su trouver un remarquable consensus en CMP à l'image de la loi Lang.

Nous avions raison de définir sans attendre un cadre adapté à l'évolution numérique, afin qu'elle reste harmonieuse, sans captation de valeur.

Grâce au texte de la CMP, les distributeurs établis en France joueront à armes égales avec ceux établis à l'étranger.

Cette loi devra donc s'appliquer à toute situation entrant dans son champ. Cette loi historique est un point de départ : elle ne crée pas de rente mais contribuera au développement d'une offre légale abondante assurant la rémunération, juste et équitable, des auteurs.

Elle doit provoquer une mobilisation renouvelée en faveur de la promotion de la diversité culturelle.

Le Gouvernement et le président de la République poursuivront leur action en ce sens auprès des autorités européennes.

Cette proposition de loi répond à un impératif impérieux d'intérêt général, la protection de la diversité culturelle, consacrée par l'Unesco, devant être renforcée à l'ère du numérique.

A la réduction de l'offre sur les best-sellers, nous opposons « la propension archipélique à soutenir le divers du monde » selon la formule d'Édouard Glissant.

Parce qu'elle contribue à un marché civilisé du livre numérisé, cette loi recueille le plein soutien du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs de la commission)

Mme Catherine Morin-Desailly.  - Je félicite Mme Dumas et M. Legendre pour leur travail, tout comme Mme Mélot.

Nous avons souvent exprimé notre position sur le livre numérique, au nom d'une certaine idée de la culture.

A l'issue du débat parlementaire, nous avons trouvé un compromis satisfaisant pour toute la chaîne du livre : rémunération juste et équitable des auteurs et éditeurs, rôle confirmé des libraires, offre diversifiée pour les lecteurs, à un prix unique.

Je me réjouis que les députés aient accepté la clause d'extraterritorialité inscrite à l'article 3 du texte. Bravo pour la TVA à 5,5 % pour le livre numérique ! Ce n'était pas gagné parce qu'au départ, le Gouvernement y était opposé.

Il reste à gagner la bataille de conviction dans le cadre européen. Ce n'est pas gagné d'avance puisque la réglementation européenne sur la TVA n'est pas exempte d'effets pervers.

L'Europe doit en outre mettre fin aux situations de dumping permettant à certaines entreprises de se délocaliser au sein de l'Union européenne pour échapper à leurs obligations culturelles.

Nous devons nous battre au plan communautaire pour arriver à une harmonisation, sauf à élaborer en désespoir de cause des solutions inadaptées. Comme j'ai eu l'occasion de le dire, la taxe Google est une mauvaise réponse à une bonne question !

L'harmonisation européenne a un enjeu clair : le maintien de la diversité culturelle. Invoquons la Convention de l'Unesco.

Un Livre vert sur la TVA a été récemment ouvert à Bruxelles. Il est donc possible d'engager le débat. Que notre ambassadeur, Jacques Toubon, s'y emploie.

Le domaine numérique est évolutif. Ces dernières années, les tenants des « tuyaux » et des « contenus » se sont affrontés au cours des débats parlementaires.

J'ai apprécié, monsieur le ministre, que vous ayez lancé une mission de réflexion sur la télévision connectée mais pas du tout la disparition du forum des droits sur internet. Initialement, M. Besson promettait de lui substituer une structure plus performante mais le Conseil national du numérique institué la semaine dernière n'est qu'un club d'hommes d'affaires. Créateurs et consommateurs sont donc exclus. Demain, toute notre vie passera toujours plus par internet. Il faut donc éviter que la régulation dépende d'une représentation partielle. Je trouve étrange que le Parlement ne soit pas mieux représenté.

Mon groupe votera ce texte fondateur. (Applaudissements au centre et à droite)

M. David Assouline.  - Je me félicite avec enthousiasme du vote unanime intervenu en CMP, après le vote lui aussi unanime du Sénat, grâce auquel nous avons pu convaincre les députés.

Il était urgent de légiférer pour encadrer l'évolution du secteur du livre. Légiférer le dos au mur n'est pas de bonne méthode !

La loi Lang a préservé le livre en France et a sauvegardé sa vitalité. Le livre numérique représente 1 % du secteur du livre en France, mais déjà 10 % aux États-Unis. Il va sans doute se développer de façon considérable. D'où la nécessité d'adapter la loi Lang, pour ne pas nous retrouver dans la même situation que pour la loi Hadopi ; en réagissant trop tard, on est réduit à une répression inadaptée. Je note à ce propos que le président de la République a fini par se rallier à notre avis sur l'inefficacité de la loi Hadopi.

J'ai été dépité moi aussi : Mme Morin-Desailly a raison lorsqu'elle critique la composition du Conseil national du numérique. Il n'y a pas que les tuyaux, il y a aussi les contenus, à ne pas sacrifier ! C'est un recul. Il faudra très vite corriger ce qui a été fait !

Il y a eu deux débats avec l'Assemblée nationale. Le premier a porté sur l'extraterritorialité ; la majorité de l'Assemblée nationale a fini par admettre que les opérateurs situés à l'étranger devaient respecter les obligations imposées aux distributeurs nationaux.

Le second débat concernait la rémunération juste et équitable des auteurs, sans lesquels il n'y a ni éditeurs ni lecteurs. Ils se sont retrouvés en position difficile à l'heure du numérique, malgré les économies de coûts de fabrication. Et ils ont craint de surcroît que leurs droits acquis ne soient remis en cause. Sur ce point, M. Gaymard avait tort... Nous avons donc modifié le code de la propriété intellectuelle.

Le consensus politique me réjouit et devra perdurer car la révolution numérique va encore chambouler la réalité.

Il y a là des opportunités et des menaces.

Le soutien consensuel dont bénéficie ce texte est gage de sa portée européenne. Je salue Mme Mélot et M. Legendre qui ont travaillé à obtenir ce consensus politique, que nous retrouverons, j'espère, sur d'autres textes.

Mme Françoise Laborde.  - La représentation nationale devrait agir vite pour adapter notre législation afin de ne pénaliser ni les auteurs, ni les éditeurs, ni les libraires, ni les consommateurs.

Vous nous donnez l'occasion de légiférer en anticipant un bouleversement majeur. Ce texte est le fruit de longues réflexions.

Toute la chaîne de production est bousculée. J'espère que les engagements seront tenus et que nous obtiendrons bien que la TVA sur le livre numérique soit identique à celle du livre papier. C'est un dossier à défendre à Bruxelles.

La loi Lang a sauvé les librairies indépendantes. Le texte d'aujourd'hui s'en inspire. Il exclut les oeuvres multimédias ou hybrides, ce qui limite sa portée à la production homothétique du livre imprimé.

Face à l'évolution technique, nous devons rester vigilants. Nous le serons à l'occasion du rendez-vous annuel organisé par l'article 7 et avec le comité de suivi.

L'extraterritorialité a été particulièrement discutée entre les deux assemblées, de même que la rémunération des auteurs.

Face à la disparition des frontières, il serait impensable d'imposer des contraintes aux seuls distributeurs établis en France. Grâce au Sénat, l'article 3 s'applique aussi aux personnes établies hors de France. C'est une victoire.

D'autre part, la rémunération juste et équitable des auteurs est préservée.

Je profite de ce débat pour insister sur les mérites de la navette par rapport à la procédure accélérée : par le dialogue, elle a permis de concilier les positions des deux assemblées pour adopter une loi complexe en quelques mois.

La France est la première à se doter d'une telle législation. J'espère que son exemple sera suivi, en Europe et dans le monde.

Le RDSE sera unanime à voter cette proposition de loi. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jack Ralite.  - La convention de l'Unesco sur la diversité culturelle n'a soulevé que deux votes contre : ceux des États-Unis et d'Israël. Je retrouve ce soir une pareille unanimité, qui m'est agréable.

Nous avons mené un travail sérieux, qui a laissé place aux contradictions tout en sachant faire une synthèse efficace. Il est bon que la France offre une expérience bien pensée, efficace. Le vote unanime des deux assemblées, rare, est un geste politique d'autant plus fort qu'il est pluraliste, gage de son autorité.

Il nous a fallu empêcher le contournement de la diversité culturelle, d'où qu'il vienne, y compris du sein de l'Union.

L'ouverture de la création est à la base de ce dont nous discutons. D'où la nécessité d'une rémunération juste et équitable des auteurs, prenant en compte l'économie de fabrication obtenue par les éditeurs. Ce non-retard législatif nous oblige.

Il y a visiblement une offensive contre le droit d'auteur. Des lobbies puissants sont à l'oeuvre, en Europe et dans le monde. Les professionnels sont encore un peu divisés...

Il nous faut des actes. Dans la grande période de Seattle, de Télévisions sans frontières, de l'exception culturelle, les autorités françaises ont fait le nécessaire pour que cela avance. J'entends encore le président Mitterrand à Gdansk, ou le président Chirac au Louvre.

J'aimerais aussi que la commission ait une démarche avec le ministère de la culture pour affiner les choses. Il y a un chemin, des venelles peut-être, mais même les venelles permettent de déboucher.

Lors d'une récente réunion à l'Assemblée nationale, avec le commissaire Barnier, ce n'était pas très brillant. Il a dit « Venez me voir ». Allons-y, monsieur le président Legendre ! Envoyons une délégation à Bruxelles pour dire ce dont professionnels de la culture ont besoin.

Je suis content ce soir d'être un parlementaire heureux. (Sourires et applaudissements)

Vote sur le texte élaboré par la CMP

Mme Lucienne Malovry.  - Je remercie le ministre, le président de la commission et notre rapporteur pour leur engagement constant.

Le secteur du livre connait une révolution technologique sans précédent depuis Gutenberg. La législation doit anticiper certaines dérives qui pourraient être dévastatrices. Pour le 30e anniversaire de la loi Lang, il était bon de créer un cadre juridique sécurisant pour le livre numérique. Comme l'a expliqué notre rapporteur, cette loi devrait être qualifiée de « loi de police » en vertu des engagements internationaux de la France et de l'Union européenne, au titre de la convention de l'Unesco de 2005 sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles.

Le groupe UMP votera ce texte, le premier au monde à réguler le commerce du livre numérique.

M. Yann Gaillard.  - Je voterai avec enthousiasme cette proposition de loi mais j'appuie la mise en garde de M. Ralite sur les risques de contournement en Europe. M. Barroso m'a dit que le livre numérique n'était « pas un livre mais un service ». Vous mesurez le risque !

M. Jacques Legendre, président de la commission de la culture.  - Comme vous tous ce soir, je suis heureux : ce débat aboutit à un accord unanime de l'Assemblée nationale et du Sénat. C'est un geste politique fort pour manifester notre volonté.

Le livre numérique ne doit plus être traité comme un service. C'est un bien culturel, qui doit être internationalement reconnu pour tel. L'action de M. Toubon sur la fiscalité du livre doit donc être soutenue, même si nous sommes conscients que la conjoncture n'est pas très favorable...

La Commission européenne a ratifié la Convention de l'Unesco de 2005. Cette loi s'inscrit dans cette perspective et la Commission européenne doit donc la soutenir.

La commission de la culture va bientôt vous soumettre, en liaison avec la commission des affaires culturelles, une résolution en ce sens.

« Je n'ai jamais eu de chagrin qu'une heure de lecture n'ait dissipé » disait Montesquieu. Ce soir, je n'ai pas besoin de lecture car je n'ai pas de chagrin ! (Applaudissements)

La proposition de loi est adoptée.

M. le président.  - A l'unanimité !

La séance est suspendue à 20 h 10.

*

* *

présidence de M. Jean-Pierre Raffarin,vice-président

La séance reprend à 22 h 15.

Régulation du système de distribution de la presse

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen de la proposition de loi relative à la régulation du système de distribution de la presse.

Discussion générale

M. Jacques Legendre, auteur de la proposition de loi.  - La loi du 2 avril 1947 réglementant la distribution de la presse, dite « loi Bichet », est une de ces grandes lois sacrées aux côtés des lois de 1881 sur la liberté de la presse ou celle de 1957 sur l'Agence France-Presse (AFP). On ne doit y toucher que d'une main tremblante. Ce n'est pas un hasard si ces icônes de la République ont perduré jusqu'à nos jours.

La loi Bichet est un héritage précieux de la Résistance, que nous devons préserver dans un environnement bouleversé par les mutations technologiques. Ma proposition de loi se cantonne, dans le strict cadre de son titre II, à rénover la gouvernance opérationnelle de la distribution de la presse. J'ai pris en compte, pour l'élaborer, les différentes réflexions sur la modernisation des mécanismes de la distribution de la presse du Livre vert qui faisait suite aux états généraux au rapport Mettling, en passant par le rapport Lasserre.

En collaboration avec M. Assouline, nous avons entrepris une démarche constructive de dialogue avec tous les acteurs. Mon texte reprend le principe d'une régulation bicéphale préconisée par M. Mettling, en renforçant le Conseil supérieur des messageries de presse (CSMP), désormais intégralement professionnalisé, et en lui adossant une nouvelle autorité de régulation chargée de régler les différends en cas d'échec de la procédure de conciliation -conformément au souhait exprimé par le ministre devant les diffuseurs de presse en février 2011- et de donner un caractère exécutoire aux décisions normatives du CSMP afin de garantir l'impartialité et la transparence des règles applicables à l'ensemble du secteur.

La commission a adopté des amendements afin de prévenir tout risque de conflit d'intérêt ou d'entente tacite au sein du CSMP. Le principe d'une organisation bicéphale a été voulu par le CSMP lui-même, qui n'est aucunement mis sous tutelle ; si nous avons tenu à préserver sa prééminence en matière normative, l'intervention de l'Autorité de régulation de la distribution de la presse (ARDP) renforcera la légitimité de ses décisions, notamment auprès des minoritaires et petits diffuseurs.

Notre texte, équilibré, pose les fondations solides d'une gouvernance active. Je remercie M. Assouline avec qui j'ai eu plaisir à travailler. Notre commission a su démontrer que les exigences de liberté, de pluralisme et d'indépendance pouvaient nous rassembler au-delà des clivages partisans. (Applaudissements)

M. David Assouline, rapporteur de la commission de la culture.  - Je rends hommage à la loi Bichet, dont la pertinence ne s'est jamais démentie. Adoptée dans un climat consensuel, ce joyau législatif de la Résistance consacre des principes fondamentaux indispensables à la vitalité de la démocratie, en particulier la liberté de diffusion de la presse et l'égalité de traitement de tous les titres, quel que soit leur poids économique, au sein d'un système coopératif de distribution.

Aboutissement législatif de mes préconisations budgétaires, notre travail s'est concentré sur le seul titre II, c'est-à-dire la gouvernance ; nous n'avons pas touché au titre I, qui fixe les principes fondamentaux en vigueur depuis l'après-guerre. Je souhaite que les travaux dans les deux assemblées suivent le même chemin.

Le développement de la diffusion sur supports numériques bouleverse le rapport du lecteur à l'acte d'achat ; le secteur est exposé à des déséquilibres industriels majeurs -tandis que les diffuseurs restent le parent pauvre de la régulation, les messageries sont soumises à de fortes tensions ; faute de légitimité dans la loi, le CSMP ne peut adopter que des recommandations, d'où la multiplication des contentieux.

Sur le fondement de ces constats, tous les acteurs sont convenus qu'il fallait mettre en place un CSMP professionnalisé, qui garantisse la représentation de tous les acteurs ; ils ont, en contrepartie, accepté le principe de l'adosser à une autorité indépendante. Ce mécanisme bicéphale, en cohérence avec les préconisations du rapport Mettling, préserve la prééminence du CSMP en matière normative.

Les modifications adoptées par notre commission, avec l'accord du président Legendre, tendent à garantir la pérennité du système coopératif, en précisant que le respect du principe de solidarité est une mission fondamentale de l'instance de régulation. Nous avons rééquilibré les rapports entre le CSMP et l'ARDP afin de garantir l'effectivité des principes d'indépendance, d'impartialité et de transparence. En matière de contrats de groupage, nous avons travaillé à éviter aux éditeurs la tentation de ne confier que les activités les moins rentables au système mutualiste. Nous entendons également prévenir tout risque d'entente, en précisant que toutes les décisions de portée générale seront transmises à l'autorité de régulation. Nous avons conféré deux nouvelles compétences à l'autorité de régulation, contrôle comptable et surveillance de l'évolution des conditions tarifaires. Les éditeurs restent cependant parfaitement libres de fixer leurs tarifs ; l'ARDP ne formulera qu'un avis.

Il fallait veiller à ne pas instituer une autorité indépendante de pure façade : je le dis à ceux qui militent pour un CSMP puissant. Les petits éditeurs avaient besoin de garanties d'indépendance et de transparence. Cela supposait un équilibre subtil, que je crois atteint.

Je me félicite du travail de concertation approfondi mené avec le président Legendre. Avec de la bonne volonté et des principes chevillés au corps, il est possible de faire converger les points de vue. Continuons à travailler en ce sens. (Applaudissements)

M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication.  - Un kiosque qui ouvre, un diffuseur de presse qui ouvre, c'est un acteur du lien social qui se crée ou renaît, un lieu de sociabilité, une chance de plus pour l'exercice de la démocratie. C'est dire que cette proposition de loi a une signification culturelle et politique très importante. Dans l'ère de l'entre-soi, dans la société des écrans, c'est un signal fort en faveur de la culture de l'écrit.

Ce texte tend à améliorer le système de diffusion de la presse écrite. Nos concitoyens n'ont pas abandonné le support papier, loin de là. Mais un journal demande à être distribué. Or, la situation de la presse est extrêmement préoccupante ; la baisse de la vente au numéro -moins 8,2 % en volume en 2010- est liée à la disparition de nombreux titres mais aussi de points de distribution : 455 sur environ 30 000 ont fermé en l'an dernier, après la stabilisation de 2009. L'activité des points de vente a reculé de 6,1 %, et même 7,8 % pour la presse quotidienne.

Nous poursuivons une politique volontariste en faveur des diffuseurs de presse. Ainsi le soutien exceptionnel aux diffuseurs spécialisés, qui doit être reconduit ; ou encore la convention signée en mars afin de parvenir à la création de 300 nouveaux kiosques et points de vente en trois ans. Il faut aller plus loin afin de clarifier et d'alléger les règles en vigueur pour leur installation sur le domaine public. Une proposition de loi de M. Warsmann est à venir. Le diffuseur est au coeur de la relation que l'éditeur entretient avec son lecteur ; son métier mérite d'être revalorisé.

La modernisation de la distribution, vous l'avez rappelé, s'inscrit dans le système coopératif institué par la loi Bichet de 1947. Au terme des états généraux de 2008, le président de la République s'est prononcé pour une réforme audacieuse des instances de régulation. M. Lasserre, sollicité, préconise, dans son rapport, la création d'une autorité indépendante chargée de la régulation et du règlement des différends, sans lien avec les professionnels du secteur cantonnés dans des commissions consultatives. Ce choix innovant traduisait l'ancrage de la régulation dans la sphère publique. Cependant, la profession a exprimé ses réticences, craignant de voir déstabiliser un secteur fragile et y voyant un frein aux réformes déjà engagées. La concertation s'est donc poursuivie sous l'égide du ministère pour définir une voie médiane et équilibrée. C'est cette voie que propose votre commission. Elle associe étroitement une instance professionnelle, le CSMP rénové, et une autorité indépendante. Elle répond au souhait de la profession de conserver son expertise sur la régulation tout en assurant la transparence et un contrôle objectif des décisions de l'instance professionnelle.

Je rends hommage au remarquable travail de la commission. Grâce à une meilleure régulation, nous aiderons le lecteur à relever le défi : il a besoin d'un solide outil de référence. C'est le sens de cette réforme, que je soutiens dans ses dispositions essentielles. Je ne proposerai que quelques amendements pour revenir à la composition initiale de l'ARDP ou donner un caractère facultatif à la consultation publique sur les décisions du CSMP. Le texte a su trouver le juste milieu, si cher à Aristote. Il préserve les acquis issus de la Résistance tout en créant les outils indispensables à une distribution de la presse modernisée, instrument essentiel de la démocratie. (Applaudissements)

Mme Françoise Laborde.  - Les difficultés financières de la presse peuvent entraîner le prix fort pour sa liberté. La filière de distribution n'est pas épargnée. Les défis ne manquent pas ! La révolution numérique est un facteur aggravant. Malgré ces difficultés, il faut conserver le principe fondamental, garant du pluralisme, qui veut que tout éditeur, quels que soient sa taille et son poids économique, puisse être distribué sur l'ensemble du territoire : il est inscrit dans la loi Bichet, icône de la République.

Au fil du temps, les missions du CSMP ont été élargies mais il ne bénéficie plus aujourd'hui, pour des raisons historiques, d'une confiance suffisante des acteurs. Soulignant l'opacité de certaines procédures de régulation, M. Lasserre préconisait de confier celles-ci à une activité indépendante. Un autre choix a été fait, faire confiance à l'autorégulation, toute en créant une autorité indépendante pour assurer l'équilibre. Le dispositif a été fort bien décrit par le rapporteur, que je remercie, ainsi que le président Legendre ; ils ont su mener à bien ce délicat travail.

Ce texte très attendu réforme la loi Bichet sans toucher à ses fondamentaux : avec la majorité du RDSE, je le voterai. (Applaudissements)

M. Ivan Renar.  - La liberté d'expression et de la presse est un fondement de notre démocratie. La distribution des journaux, qui ne sont pas un bien comme les autres, y participe. La loi Bichet a consacré des principes fondamentaux qui gardent aujourd'hui toute leur valeur. L'égalité de traitement pour tous les titres est assurée par le système coopératif, à la bonne application duquel le CSMP est chargé de veiller.

Cependant, l'essor du numérique met en cause le modèle économique de la presse écrite et la lutte pour la répartition de la valeur fait rage entre les acteurs, qui peinent à s'accouder sur une réforme jugée pourtant par tous nécessaire. Le CSMP, dépourvu de pouvoirs contraignants, n'a pu élaborer de solution pérenne. Une réforme de la régulation est donc indispensable.

Ce texte prévoit un CSMP rénové de vingt professionnels, où les éditeurs ont une place importante au côté des messageries de presse. Il est adossé à une autorité indépendante, l'ARDP. L'architecture semble pertinente mais tout tient à l'équilibre entre ces deux instances. On peut ainsi s'interroger sur la légitimité de l'autorité de régulation à exercer son autorité sur le CSMP, qui doit sans doute être réformé mais doit rester l'instance principale de régulation : il est le dernier rempart contre la marchandisation. L'effacer, c'est introduire la concurrence dans le système coopératif avec, à la clé, la disparition des plus petits. Rien ne garantit que l'ARDP soit fidèle au principe de solidarité, tandis qu'on cherche à transformer le CSMP en coquille vide. De fait, les modifications apportées à l'article 4 portent une atteinte grave au système coopératif, ce qui risque de déstabiliser le modèle économique existant. La mise sous tutelle du CSMP, c'est la fin du système coopératif.

J'étais favorable au texte initial : les remaniements introduits en commission limitent et minorent le rôle du CSMP au profit de l'autorité de régulation, à laquelle est confiée une fonction de contrôle exorbitante. On entre dans un système de distribution administré par l'État : cela a un étrange parfum d'Union soviétique. Je réprouve un texte dangereux pour la liberté de la presse.

Mme Catherine Dumas.  - La crise de la presse écrite est profonde, aggravée par l'émergence des nouvelles technologies. La presse, essentielle à la démocratie, n'est pas un produit économique comme un autre. Les états généraux voulus par le président de la République ont permis de poser un diagnostic partagé. Le réseau de distribution joue un rôle stratégique pour les éditeurs : tous les titres doivent bénéficier d'une garantie contre une distribution arbitraire. Ce principe est inscrit dans la loi Bichet.

Les acteurs s'accordent sur le fait que le CSMP demande à être réformé. Faute pour celui-ci de disposer de moyens juridiques suffisants pour régler les différends, l'Autorité de la concurrence est régulièrement saisie de contentieux dont l'enjeu n'est pas exclusivement concurrentiel. Ce n'est pas satisfaisant.

Je me réjouis donc de cette réforme de la gouvernance qui crée un système bicéphale sans porter atteinte aux principes de la loi Bichet.

Nous souscrivons aux modifications apportées par la commission. Les solutions proposées amélioreront notre système de distribution de la presse, en accord avec tous les acteurs. Nous suivrons son évolution de près.

Je remercie M. Legendre pour cette réforme pragmatique, engagée avec un grand sens de l'écoute. J'espère que son adoption donnera un signal fort pour la culture de l'écrit. (Applaudissements)

Mme Catherine Morin-Desailly.  - Le contexte de la distribution de la presse a fortement évolué, notamment avec la révolution numérique. Sur internet, chacun peut diffuser de l'information via les réseaux sociaux. Or « quantité » n'est pas synonyme de « fiabilité ».

En 2011, 400 millions d'euros ont été versés par l'État pour soutenir la distribution de la presse. Aujourd'hui, des réformes structurelles sont indispensables.

La réflexion engagée depuis trois ans a mis en évidence les faiblesses de notre système, à commencer par le déséquilibre dans le partage de la valeur entre les différents échelons ; le dernier d'entre eux n'est pas toujours aussi performant que celui de nos voisins, britanniques par exemple. Les kiosques sont des lieux d'accès à l'information mais aussi à la démocratie. Les maisons de la presse jouent un grand rôle d'animation et d'accès à la culture en général. Il faut multiplier les points de vente, assouplir les règles qui les régissent, assurer leur rentabilité.

Les propositions issues des milieux professionnels ont contribué à la maturité du débat ; des mesures législatives sont désormais possibles.

L'Autorité de la concurrence prévoyait d'ériger le CSMP en autorité indépendante ; notre commission a opté pour un système bicéphale. Cette solution était souhaitée par les professionnels mais les distributeurs se sont émus du pouvoir conféré à l'autorité indépendante, pourtant indispensable pour éviter les conflits d'intérêt dans un contexte peu concurrentiel.

Je me félicite de cette modernisation partielle de la loi Bichet. Elle permettra de mener à bien trois chantiers : donner aux diffuseurs des marges de manoeuvre commerciales pour adapter les modalités de commercialisation à la demande ; revaloriser le métier de diffuseur de presse et régler, de manière gracieuse, le plus grand nombre possible de conflits opposant les distributeurs.

Les sénateurs centristes voteront cette proposition de loi afin que nos concitoyens continuent d'accéder à une presse pluraliste, diversifiée et de qualité. (Applaudissements)

M. David Assouline.  - Je me bornerai à quelques observations. Tout d'abord, nous voulons conforter les fondements de la loi Bichet, donc une distribution équitable et coopérative. Les professionnels souhaitent que la gouvernance soit adaptée pour mieux assurer le respect de ses principes. C'est ce que nous faisons. De façon comparable, la meilleure défense de l'AFP passera par une réforme de sa gouvernance, sans toucher aux principes qui l'ont fondée. Je me félicite que cette façon de procéder soit unanimement approuvée.

On ne saurait sérieusement prétendre que la régulation bicéphale porterait un coup fatal au système coopératif. Dès lors que le CSMP est professionnalisé, la création d'une autorité indépendante s'impose pour échapper aux accusations d'entente ou de conflits d'intérêt. Contrairement à ce qui se passe aujourd'hui, le CSMP aura les moyens d'agir. Pour que les minoritaires n'engagent pas en permanence des contentieux, la rénovation du SCMP doit être complétée par la création d'une autorité indépendante de régulation.

Le groupe socialiste se félicite que les principes de la loi issue de la Résistance soient préservés ; il souhaite qu'ils le soient dans les décennies à venir. (Applaudissements)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

L'article premier est adopté.

Article 2

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par M. Renar et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer cet article.

M. Ivan Renar.  - La réforme du CSMP est nécessaire ; nous ne contestons pas la création d'une autorité indépendante. En revanche, nous contestons la totale mainmise exercée par l'autorité indépendante sur le CSMP.

La législation de 1947 a confié aux éditeurs la maîtrise de la distribution, ce à quoi l'article 2 met un point final, au profit d'une distribution administrée.

L'avenir montrera que nos critiques n'ont rien d'outrancier.

M. David Assouline, rapporteur.  - Ce qui est outrancier, c'est de prétendre que la régulation bicéphale mettrait à bas le système coopératif.

Comment pouvez-vous accepter le principe d'une autorité de régulation et supprimer l'article qui la crée ?

Loin d'instituer une tutelle, nous organisons une harmonie, qui renforce l'autorité du CSMP. Dès lors que cette instance devient purement professionnelle, il est indispensable de l'équilibrer par une autorité de régulation garantissant l'impartialité des normes édictées.

Je pense que l'avenir nous donnera raison. Avis défavorable à l'amendement.

M. Frédéric Mitterrand, ministre.  - Même avis : la régulation ne porte pas atteinte aux principes de la loi Bichet. Retrait ?

M. Ivan Renar.  - Non : cet amendement, dans son imperfection, tire la sonnette d'alarme. Il faut y voir le soupir de la créature accablée (sourires appréciateurs), mais aussi son cri de protestation !

Je reconnais la qualité du travail accompli par la commission mais la navette me donnera raison.

L'amendement n°1 n'est pas adopté.

L'article 2 est adopté.

L'article 3 est adopté.

Article 4

M. le président.  - Amendement n°2, présenté par M. Renar et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer cet article.

M. Ivan Renar.  - Nous nous élevons contre la mise sous tutelle du CSMP car la régulation bicéphale compromet le système coopératif de la loi Bichet. Il faut rééquilibrer les compétences.

M. David Assouline, rapporteur.  - Retrait ou rejet, précisément pour satisfaire les objectifs énoncés par M. Renar, notamment pour défendre le système coopératif.

M. Frédéric Mitterrand, ministre.  - Même motif, même peine.

L'amendement n°2 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°6, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 3° Un magistrat de la Cour des comptes désigné par le premier président de la Cour des comptes.

M. Frédéric Mitterrand, ministre.  - La proposition de loi initiale disposait que l'Autorité de régulation de la distribution de la presse (ARDP) serait composée d'un conseiller d'État, d'un magistrat à la Cour de cassation et d'un magistrat à la Cour des comptes. La commission a remplacé ce dernier par « une personnalité indépendante désignée par le président de l'Autorité de la concurrence à raison de sa compétence en matière de droit de la concurrence ». On peut comprendre cette substitution, eu égard aux enjeux concurrentiels, mais elle introduit de l'hétérogénéité dans la composition de l'Autorité. De plus, il peut paraître délicat qu'un membre d'une autorité indépendante soit désigné par le président d'une autre autorité indépendante. Enfin, la présence d'un magistrat de la Cour des comptes semble tout à fait pertinente au sein de cette Autorité. Pour ces motifs, il serait préférable de revenir à la composition initialement prévue de l'Autorité de régulation de la distribution de la presse.

M. David Assouline, rapporteur.  - M. Lasserre avait souhaité qu'un membre de l'ARDP soit nommé par le président de l'Autorité de la concurrence. L'amendement donne plus de cohérence et plus de crédit à l'autorité ; et on peut certainement trouver à la Cour des comptes un magistrat connaissant bien le secteur... J'accepte donc l'amendement.

M. Serge Lagauche.  - Compte tenu de l'harmonie de ce débat, et comme la question n'est pas essentielle, nous avons conseillé au rapporteur d'accepter l'amendement n°6.

L'amendement n°6 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par M. Renar et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 26

Supprimer cet alinéa.

M. Ivan Renar.  - Cet alinéa remet en cause les contrats d'exclusivité dans la distribution, donc le système coopératif.

On sait les difficultés économiques que traversent les messageries de presse, y compris Presstalis. C'est tenter le diable que de permettre, comme vous le faites, à un distributeur de ne maintenir dans le système coopératif que les segments non rentables. Cette mise en concurrence est une atteinte à la loi Bichet.

M. David Assouline, rapporteur.  - Je rappelle que des dérogations existent aujourd'hui, en application de la loi Bichet, et que la rédaction initiale du texte mentionnait aussi la « distribution non exclusive ». Pour éviter les dérives, nous proposons d'encadrer cette faculté, pour garantir l'équilibre économique des coopératives. L'amendement est contraire à l'objectif poursuivi par son auteur.

M. Frédéric Mitterrand, ministre.  - Je fais mienne la position du rapporteur, puisque le texte préserve la solidarité coopérative et l'équilibre économique des messageries.

M. Ivan Renar.  - Nous échangeons des pétitions de principe mais vous ne me répondez pas. Vous savez comme moi, monsieur le rapporteur, que derrière les dispositions techniques se cachent souvent des enjeux politiques. Mais comme le dirait Jacques Legendre, qui fut maire de la cité de Fénelon, « Tout est dans tout, et le reste dans Télémaque ». (Sourires)

L'amendement n°3 n'est pas adopté.

Jeudi 5 mai 2011

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Sommaire

Accord en CMP1

Sessions plénières du Parlement européen à Strasbourg1

Politique énergétique de la France5

Droit de la chasse10

Discussion générale11

SÉANCE

du jeudi 5 mai 2011

99e séance de la session ordinaire 2010-2011

présidence de M. Roland du Luart,vice-président

Secrétaires : Mme Michelle Demessine, M. François Fortassin.

La séance est ouverte à 9 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Accord en CMP

M. le président.  - La commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité est parvenue à un texte commun.

Sessions plénières du Parlement européen à Strasbourg

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen de la proposition de résolution relative à la tenue des sessions plénières du Parlement européen à Strasbourg, présentée en application de l'article 34-1 de la Constitution.

M. Roland Ries, auteur de la proposition de résolution.  - Le 9 mars, les parlementaires européens ont voté l'amendement Fox ramenant de douze à onze le nombre de sessions plénières du Parlement européen à Strasbourg pour 2012 et 2013. Certains lobbies emmenés par les plus eurosceptiques s'évertuent depuis des années à vider le contenu des sessions du Parlement européen à Strasbourg : adopté à bulletin secret, cet amendement Fox, le bien nommé, entre dans cette logique.

Si la souveraineté du Parlement sur l'organisation de son travail ne peut être contestée, le non-respect manifeste des traités -qui sont sans équivoque sur le siège du Parlement à Strasbourg- n'est pas acceptable. Le Gouvernement a fait savoir son intention de saisir la Cour de Luxembourg.

La Cour, dès 1997, a amendé une disposition de même nature, qui réduisait à onze le nombre de sessions, jugeant que le Parlement doit se réunir à rythme régulier, ajoutant que les sessions plénières se tiennent à Strasbourg.

L'amendement Fox contrevient donc à la jurisprudence communautaire. Il est contraire aux intérêts de l'Union européenne. Un tel calendrier met à mal l'ambition démocratique de l'institution et remet en cause, par la volonté de centralisation des instances décisionnelles qu'il traduit, l'équilibre institutionnel de l'Union.

Strasbourg tient sa légitimité de l'Histoire, dès 1949, avec la fondation du Conseil de l'Europe, avant que Robert Schuman ne prononce l'acte de naissance de la construction communautaire, fondée sur la réconciliation franco-allemande dont Strasbourg est le symbole. Une responsabilité lui incombe dans la construction d'une Europe unie autour des principes de démocratie et des droits de l'homme. Symbole historique de l'humanisme, elle est aussi le siège du Conseil de l'Europe, qui incarne ces mêmes valeurs, de la Commission européenne des droits de l'homme (CEDH), du Médiateur européen.

Il ne s'agit pas d'opposer les trois capitales de l'Union mais de les associer, dans la complémentarité : l'exécutif à Bruxelles, le judiciaire à Luxembourg, le législatif à Strasbourg.

Maintes actions conjointes existent à Strasbourg, comme l'emblématique prix Sakharov.

Alors que les Européens ont besoin de repères forts pour traverser la crise, le rayonnement de Strasbourg contribue pleinement à celui de la France Cette cause nationale requiert l'engagement ferme des plus hautes autorités de l'État. D'où cette proposition de résolution, reprise par nos collègues de l'Assemblée nationale.

En matière d'accessibilité, j'ai invité les bourgmestres de Bruxelles et de Luxembourg à répondre de concert avec nous à la Commission européenne sur la réalisation d'un grand réseau de transport. Dans une déclaration commune en date du 10 septembre 2010, nous avons appelé à la réalisation rapide du projet Eurocaprail et, dès la semaine prochaine, un second Thalis va relier Strasbourg à Bruxelles via Paris.

Les conditions d'hébergement, les prix hôteliers excessifs et le dépassement des per diem suscitent le mécontentement des parlementaires et des fonctionnaires. Nous entendons, pour y remédier, lancer une charte des hôteliers.

Le temps est venu, monsieur le ministre, d'être plus offensif pour parer les attaques. M. Fillon, en 2008, à Copenhague, avait clairement défendu la place de Strasbourg : si les déplacements faisaient problème, pourquoi ne pas réunir tous les services du Parlement européen à Strasbourg, avait-il répondu à un journaliste.

Depuis 1980, dans le cadre d'un contrat triennal, la ville s'est engagée aux côtés de l'État, de la région et du département à oeuvrer en faveur de son rayonnement européen. La volonté et la détermination du Gouvernement français sont plus que jamais essentielles. Je milite pour que Strasbourg devienne le seul lieu du travail du Parlement en y regroupant tous les services : il faut, à cette fin, prendre la mesure des efforts à accomplir pour conforter la vocation européenne et internationale de la ville.

Une réserve foncière de 36 000 m² a d'ores et déjà été constituée pour accueillir les services, autour d'un parc des expositions et un palais des congrès modernisés pour accueillir des manifestations internationales, comme le sommet de l'Otan de 2009.

L'École européenne, dont sortiront les premiers bacheliers en 2014, dote en outre Strasbourg d'une infrastructure essentielle pour les parlementaires, les assistants et les fonctionnaires du Parlement européen.

Tirons parti des attaques pour pousser les feux et les retourner contre leurs auteurs pour mettre un terme à cette guerre absurde et aller au bout de la logique des traités. Je demande le soutien de tous les groupes parlementaires pour être plus fort dans cette bataille. (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Yvon Collin.  - J'associe le sénateur Bockel à mon propos.

En avril 2009, lors du sommet de l'Otan à Strasbourg, le président Obama a constaté qu'après des siècles de conflits, Strasbourg était aujourd'hui devenue le symbole du rayonnement européen.

L'amendement Fox, adopté par un vote à bulletin secret, vise à réduire les déplacements entre Bruxelles et Strasbourg des parlementaires, fonctionnaires et journalistes. Je conviens que la « transhumance parlementaire » est coûteuse mais tout transfert à Bruxelles, symbole, pour les citoyens, de la technocratie européenne, serait un mauvais signal.

En 1949, le ministre britannique Bevin s'exprimait en faveur du choix de Strasbourg, symbole de réconciliation. A ceux qui préfèrent le pragmatisme au symbole, il est bon de le rappeler.

Désignée siège du Parlement en 1958, lors de l'entrée en vigueur de la Communauté européenne du charbon et de l'acier (Ceca), Strasbourg était confirmée dans ce rôle en 1977, à la suite des élargissements. Depuis, protocoles et règlements ont confirmé cette décision, inscrite dans les traités.

Strasbourg est le symbole de l'Europe humaniste et démocrate, en un mot, de cette Europe politique qu'il nous appartient de construire.

La viser, c'est viser le fonctionnement institutionnel de l'Union qui exclut, dans un souci de proximité, la centralisation en un seul lieu.

Les membres du groupe du RDSE, tous profondément européens et tous profondément militants pour une Europe unie, forte et souveraine, approuveront le texte de cette résolution et espèrent qu'elle sera entendue par l'ensemble des 27 pays membres de l'Union. (Applaudissements sur tous les bancs)

Mme Annie David.  - L'Union européenne est de plus en plus contestée par des citoyens confrontés à des crises dont elle porte une certaine responsabilité. Dans un contexte où la dignité des travailleurs est sans cesse sacrifiée sur l'autel de la concurrence libre et non faussée, le débat sur le siège du Parlement européen m'apparaît surréaliste !

Je ne minimise pas, cependant, l'enjeu symbolique du choix de Strasbourg, qui incarne la réconciliation franco-allemande. Sa mise en cause par un vote secret ne dénote pas le plus grand courage ni la certitude du bien-fondé des arguments des partisans de Bruxelles... (« Très bien ! ») Quant aux arguments invoqués, financiers et centralisateurs, ils semblent réduire l'Union européenne à sa capitale économique. C'est oublier que l'Union a fait le choix de décentraliser ses instances.

Strasbourg, dans cette configuration, s'impose comme la capitale des droits de l'homme. C'est dans cette ville meurtrie et marquée par une double culture que l'assemblée a tenu sa première réunion en 1952. Alors que Bruxelles est devenue le symbole des politiques antisociales...

M. Guy Fischer.  - Hyper austérité !

Mme Annie David.  - ...en faire le siège du Parlement n'aurait que des conséquences négatives.

Au reste, le fonctionnement du Parlement n'est pas tant entravé par le lieu de son siège que par les pratiques malfaisantes des lobbies de plus en plus puissants. C'est contre cela qu'il convient de lutter.

Déplacer le Parlement européen vers Bruxelles ne ferait qu'enterrer l'espoir d'une Europe sociale, pour laquelle des politiques fortes en direction des populations, de l'emploi et de la solidarité sont plus que jamais attendues et nécessaires !

Nous voterons cette proposition de résolution. (Applaudissements à gauche)

M. André Reichardt.  - Je soutiens pleinement la position de M. Ries, à titre personnel et au nom du groupe UMP.

Tous les Alsaciens sont unanimes pour défendre la vocation européenne de Strasbourg. Cette ville a appris, au long des siècles, le prix de la paix, comme l'a rappelé le président de la République à Colmar le 8 mai : « L'Alsace sait ce que le mot guerre veut dire ».

Après la réconciliation d'après-guerre, c'est encore à Strasbourg que les peuples de l'Est sont venus chercher leur soutien. Ces femmes et ces hommes venus chercher la démocratie, Vaclav Havel les appelle « Génération Strasbourg ».

Des efforts sont menés pour améliorer l'accessibilité de la ville : M. Ries les a évoqués. Dire qu'elle n'est accessible qu'à dos de cigogne ne sera plus possible.

Au-delà, la ville doit oser -je regrette qu'elle ait renoncé sur la coupe du monde de football- devenir une grande métropole européenne.

Au nom de quoi devrions-nous accepter une application littérale des traités internationaux pour le siège de la Commission à Bruxelles, de la Banque Centrale à Francfort ou de la Cour de Justice à Luxembourg, mais pas pour le siège du Parlement ?

Strasbourg a besoin de vous pour la défendre. L'argument financier ? A ce compte, pourquoi ne pas rapatrier tous les organismes de l'Union à Strasbourg ? Je croyais que le modèle européen était polycentrique, que l'Europe en avait fini avec le cauchemar du centralisme bureaucratique.

Le polycentrisme est un enjeu pour l'Europe. La fixation du siège à Strasbourg a une signification politique : le Parlement, quand il choisit de voter la défiance vis-à-vis de la Commission, le fait à Strasbourg. C'est presque une loi parlementaire : un parlement existe quand il se tient à distance de l'exécutif. Imaginez que nous allions siéger à proximité de Matignon (« Non, non ! »), serions-nous toujours le même Sénat ?  (« Non, non ! »)

M. Roland Ries, auteur de la proposition de résolution.  - C'est du Montesquieu dans le texte !

M. André Reichardt.  - Un parlement a besoin d'autonomie : c'est la garantie de la liberté. Cette liberté, Strasbourg la lui offre. L'Union n'a pas besoin de bureaucratie, elle a, plus que jamais, besoin de démocratie. (« Très bien ! » et applaudissements sur tous les bancs)

M. Richard Yung.  - Je ne reviendrai pas sur les raisons institutionnelles qui font de Strasbourg le siège du Parlement européen.

J'appartiens à une race en voie d'extinction, celle des Européens convaincus. Or, s'il est un symbole de l'Europe, de l'amitié franco-allemande, c'est bien Strasbourg.

La géographie -une ville adossée au Rhin, située au carrefour de l'Europe- commande mais il y a aussi tout le travail accompli au sein de l'Eurodistrict et le fait que Strasbourg est aux portes du Bade-Wurtemberg et de la Bavière, dont le poids dans le PIB européen est considérable. Strasbourg, surtout, est une ville chargée d'histoire, de culture franco-allemande, inscrite dans l'urbanisme, dans l'université, dans le quotidien de la ville, également historiquement lieu d'accueil des religions persécutées. Elle est aussi la ville du serment de Koufra : « continuer la lutte jusqu'à ce que le drapeau français flotte sur Strasbourg ».

Pour toutes ces raisons, mon coeur, comme celui de tous les Français, bat à l'évocation de Strasbourg.

L'Europe se veut une structure décentralisée. Que ceux qui veulent la concentrer le fassent non à Bruxelles mais à Bucarest, où un dictateur fou a construit le plus grand palais du monde pour y réunir tous les pouvoirs ! Il est plus facile de contrôler le Parlement quand l'exécutif siège au 5eétage...

Surtout, la séparation des pouvoirs exige, c'est dans la logique des institutions démocratiques, que le Parlement ne siège pas au lieu de l'exécutif.

Pour toutes ces raisons, nous soutenons cette proposition de résolution. (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Serge Lagauche.  - Le vote en catimini de l'amendement Fox constitue une nouvelle attaque contre la localisation du Parlement européen à Strasbourg. On ne peut que se réjouir de la saisine, par les gouvernements français et luxembourgeois, de la Cour de justice.

La légitimité historique de Strasbourg, symbole de la réconciliation des nations européennes, est incontestable. La ville s'est, au fil des ans, posée comme capitale européenne des droits de l'homme. L'impact sur l'opinion d'une concentration des institutions sur Bruxelles serait désastreux. L'Europe a besoin plus que jamais de symboles forts : elle remet des traditions européennes diverses sur le terrain de l'amitié franco-allemande, devenue le moteur de l'Union.

La diversité de ses centres institutionnels a été voulue, d'emblée, par l'Europe, dont la force a toujours été de s'appuyer sur ses États membres afin de faire reposer la construction européenne sur les citoyens. La remettre en cause ternirait l'image de l'Europe.

L'argument financier lié aux transports et à l'immobilisme doit cependant être entendu. Notre collègue Roland Ries a d'ores et déjà engagé, en partenariat avec l'État et la région Alsace, tous les efforts nécessaires pour renforcer les moyens immobiliers du Parlement européen et l'amélioration des transports en direction de Strasbourg.

Ces efforts doivent être soutenus par une mobilisation politique forte. Le Sénat participera utilement à cette mobilisation et s'honorera en votant cette proposition de résolution. La défense de Strasbourg, capitale européenne, ne doit souffrir aucune ambiguïté. (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je me suis inscrit dans ce débat par amitié pour Roland Ries mais aussi par amitié pour ce que nous défendons tous : une certaine idée de l'Europe. Une Europe de partage, une Europe polycentrique, une Europe de l'Histoire.

La démarche de M. Fox a quelque chose d'insidieux et de subreptice. Point n'est besoin d'être grand juriste pour savoir que seul un traité peut défaire ce qu'a fait un traité. (M. Henri de Raincourt, ministre chargé de la coopération, approuve) Cet amendement a donc quelque chose d'hypocrite : défaire le traité sans le dire.

M. Richard Yung.  - La perfide Albion...

M. Jean-Pierre Sueur.  - Le vote de cet amendement a été acquis au secret. Les parlementaires français sont héritiers de la Révolution française et jamais n'a été remis en cause le principe de la publicité de nos votes. Pour une raison simple : les citoyens doivent savoir quel a été le vote de chacun des parlementaires. Notre votation n'est secrète que sur les personnes, par exemple pour l'élection du président du Sénat. La procédure du vote secret a donc, en l'espèce, quelque chose de choquant.

Dans tout ce qu'a rappelé Roland Ries, je retiens en particulier le fait que les maires de Strasbourg, Luxembourg et Bruxelles se sont accordés pour aller de l'avant, en portant l'idée d'une Europe des oeuvres communes et non de la concurrence : c'est très positif.

Nous défendons le traité, tout le traité, rien que le traité et combattons toutes les manoeuvres tendant à le contourner.

Le coeur de tous les Français bat quand on parle de Strasbourg, depuis que l'Alsace et la Lorraine avaient cessé d'être françaises. Strasbourg est le coeur battant de l'Europe. (Applaudissements)

M. Henri de Raincourt, ministre auprès du ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, chargé de la coopération.  - Étant des vôtres ce matin, je ne puis participer au séminaire gouvernemental qui se tient à cette heure même. Je n'en ai aucun regret cependant car ce que j'ai entendu depuis plus d'une heure me fait chaud au coeur. Beaucoup de talent et de passion, un mélange harmonieux du coeur et de la raison.

Le Gouvernement appuie pleinement la proposition de résolution qui vous est soumise. L'unanimité du Sénat serait un soutien de poids, qui aurait une forte portée. Je me félicite qu'une initiative similaire ait été portée à l'Assemblée nationale sur le rapport de M. Caresche.

Le 9 mars, le Parlement européen a adopté, dans un vote à bulletin secret, presque honteusement, un amendement réduisant les deux sessions plénières d'octobre et les regroupant la même semaine. C'est ni plus ni moins, une nouvelle fois, la mise en cause directe de Strasbourg comme siège du Parlement européen. Les motivations de cet amendement sont pour nous totalement inacceptables et son contenu contraire à l'esprit et à la lettre du traité. Ses auteurs le savent bien mais, comme le Petit Poucet, sèment leurs cailloux blancs... Cela ne se fera pas car le gouvernement français va porter l'affaire devant la Cour de Luxembourg dans les tout prochains jours.

Qu'on ne se méprenne pas. Nous respectons le Parlement européen, institution majeure de l'Union ; nous défendons son action. Nous ne mettons pas en cause son pouvoir d'organisation interne, lequel doit cependant s'exercer dans le cadre et le respect des traités et, au-delà, de l'esprit européen, à l'encontre duquel va cet amendement.

Le premier ministre luxembourgeois a annoncé qu'il se joindrait à notre recours. Dans des circonstances similaires, nos deux pays ont agi ensemble en 1997. Cet appui est très important car c'est la trilocalisation institutionnelle que nous défendons ensemble. Luxembourg, vous le savez tous, accueille le secrétariat général et les services du Parlement européen.

Nous défendons aussi l'efficacité du Parlement européen, dont les attributions ont été renforcées par le traité de Lisbonne. Qui peut croire qu'il pourrait accomplir toutes ses tâches en deux sessions d'à peine deux jours, dont le débat budgétaire ?

L'idéal européen que vous avez évoqué, le gouvernement français le partage. Le siège de Strasbourg est porteur de l'Histoire. Il est regrettable et dangereux de prétendre bâtir un avenir européen commun en ignorant l'Histoire. L'adhésion des citoyens doit être renforcée plutôt que fragilisée.

La diversité géographique des sièges est une nécessité. La concentration ne répond pas aux besoins d'une Union européenne élargie. Les groupes parlementaires du Parlement européen l'ont bien compris, qui organisent des journées d'études ici ou là dans les 27 pays.

Nous continuerons de défendre et de promouvoir auprès de nos partenaires le statut européen de Strasbourg. C'est l'objet, depuis 1980, d'un contrat triennal entre l'État et les collectivités territoriales alsaciennes ; l'État contribue pour 117 millions à une enveloppe de 245 millions. Nous continuerons à améliorer l'attractivité et l'accessibilité de Strasbourg.

Je me réjouis que l'exécutif et le législatif défendent ensemble cette noble cause. Du bel idéal de la construction européenne, Strasbourg représente une partie non négligeable. (Applaudissements)

M. Jean Desessard.  - Je m'abstiens.

La proposition de résolution est adoptée.

La séance est suspendue à 10 h 20.

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La séance reprend à 11 heures.

Politique énergétique de la France

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen d'une proposition de résolution relative à la politique énergétique de la France, présentée en application de l'article 34-1 de la Constitution.

M. Jean-Claude Danglot, auteur de la proposition de résolution.  - Il est grand temps d'avoir un débat public sur les questions énergétiques. L'accident majeur de Fukushima a révélé les inquiétudes fondées et légitimes de la société civile car l'énergie nucléaire a cristallisé les antagonismes.

Le président de la République, deux jours après le drame, a exclu toute sortie du nucléaire, tandis que d'autres militaient pour une sortie immédiate, oubliant les contraintes scientifiques et climatiques qui s'imposent à nous.

Quelle alternative au nucléaire, hors les énergies carbonées ? Ce ne sont pas les débats restreints organisés au Sénat qui ont permis d'ouvrir la discussion de fond. Toutefois, ils ont montré les méfaits de la politique de libéralisation, qui prônait, avec des conséquences délétères pour la société, la concurrence généralisée.

Plus de transparence, une meilleure association des citoyens, des salariés et des usagers s'imposaient. Au contraire de ses promesses, rappelons-nous les déclarations de Nicolas Sarkozy en 2004 ; la droite a décidé, seule, de privatiser GDF. Après le Grenelle de l'environnement, voilà que le débat rebondit sur la question de la prise de participation d'opérateurs privés dans le secteur nucléaire, rendue possible par la loi portant nouvelle organisation des marchés de l'électricité (Nome) ! Et cela tandis que le Gouvernement refuse de rendre public le rapport Roussely.

Nous devons rompre avec les logiques marchandes et financières qui aggravent, de surcroît, la pollution. On estime à 1,6 milliard le nombre d'hommes qui n'ont pas accès à l'électricité dans le monde. Cela emporte des conséquences dramatiques pour la santé et les politiques de transports, qui touchent les populations du sud.

La précarité énergétique est aussi une réalité au nord. L'Observatoire qui la mesure considère que 3,5 millions de citoyens en sont victimes. Et combien renoncent à se chauffer faute de moyens ? Le Gouvernement a supprimé la prime à la cuve, quand les factures augmentaient de 5 % par an. Et la contribution annoncée des compagnies pétrolières ne sera qu'une goutte d'eau, tandis que les grands groupes comme Total enregistrent des bénéfices record.

Les tarifs du gaz et de l'électricité ont augmenté de façon spectaculaire et les tarifs sociaux n'endiguent pas le problème. C'est la déréglementation au profit de la hausse des prix que vous organisez : plus de 61 % d'augmentation du prix du gaz depuis 2005 ! Et le Gouvernement se désengage, puisque le décret de 2009 permet à l'entreprise, entre la révision annuelle du tarif, de le modifier à sa seule initiative, après avis de la CRE.

La loi Nome organise, pour 2015, un dispositif similaire pour l'électricité. Quand cesserez-vous de faire payer aux consommateurs un déficit imaginé de toute pièce par l'entreprise, via un transfert de charges factice sur sa branche commerciale ?

Nous demandons qu'un comité associant élus, usagers et salariés ait à se prononcer sur les prix.

Selon la Commission européenne, le prix de l'électricité serait trop bas chez nous ! C'est bien plutôt le défaut d'investissement, imposé par la recherche de la rentabilité, qui a des conséquences dramatiques pour l'avenir. Et que dire de la loi Nome, qui dépouille l'usager d'un investissement que, comme citoyen, il a contribué à payer ?

Quant à la filière nucléaire, nous demandons l'arrêt de la sous-traitance qui externalise 80 % des risques professionnels. Et que l'on cesse de mettre en concurrence les opérateurs.

S'agissant de la sûreté des installations, une formation poussée des salariés s'impose. La sûreté a un aspect social : il faut revenir au modèle de l'entreprise intégrée.

Le réchauffement climatique, la raréfaction des ressources fossiles devraient être une raison suffisante de renoncer aux logiques marchandes. L'effort en faveur des économies d'énergies et du développement des énergies renouvelables est certes indispensable, mais les efforts ne sont pas à la hauteur -voir le fiasco du photovoltaïque.

Les énergies renouvelables doivent être associées à d'autres sources d'énergies et une vraie politique de l'énergie suppose un dispositif cohérent.

Le système électrique ? Vous l'avez fragilisé en le mettant à la merci des traders.

Les moyens dédiés à la recherche, notamment fondamentale, doivent être renforcés. Ceux qui sont alloués au Commissariat à l'énergie atomique (CEA) ne sont pas à la hauteur.

Le rapport d'information de M. Billout dénonce le manque de réflexion sur la spécificité du système électrique et la notion de sécurité d'approvisionnement.

L'ensemble de la politique énergétique doit être revu : sécurité, accès pour tous, recherche, formation, autant d'enjeux incompatibles avec les logiques financières.

Il est temps de mettre en oeuvre, en coopération, des logiques supranationales cohérentes et solidaires, au profit de nos concitoyens. Nous voulons une politique énergétique publique au service de l'intérêt général et respectueuse de l'environnement, porteuse d'exigences sociales fortes pour les travailleurs du secteur. (Applaudissements à gauche)

Mme Mireille Schurch.  - La sécurité nucléaire doit intégrer non seulement les risques naturels mais aussi la dimension organisationnelle, sociale et humaine.

Les collectifs de travail, la coopération, la transmission des savoir-faire sont des garanties de sûreté.

L'expérience, la compétence des opérateurs sont essentielles. La disparition de spécialistes compétents, rappelle l'OCDE, préoccupe les autorités de sûreté. Or, la formation à la maintenance a été négligée. Alors que les besoins sont de 1 200 par an, on ne forme que 300 diplômés.

D'où un risque de voir se perdre les savoir-faire, renforcé par le règne de la culture managériale.

Ceux qui ont vécu le démarrage des centrales comme celle du Blayais par exemple approchent de la retraite. Comment se transmettra leur savoir-faire ? Et la sous-traitance ne fait qu'aggraver le problème, passée, en cinq ans, pour la maintenance, de 20 % à 80 %. D'où, corrélativement, une multiplication des accidents dont est victime le personnel. Il est temps de mettre fin à cette course au moins-disant. Sans parler de la sous-traitance de la fabrication en Chine des générateurs de vapeur ou des cuves, qui menace notre industrie.

Le président de la République a dû se résoudre à demander un audit sur la sûreté à la Cour des comptes. Il devra intégrer la dimension sociale. Michel Lallier, responsable CGT, rappelle qu'alors que la sûreté nucléaire a toujours reposé sur les qualifications d'un collectif humain, la dérégulation la met à mal. Les salariés d'EDF ont dès longtemps tiré la sonnette d'alarme. Ce débat sur la sûreté nucléaire est intimement lié à celui qui touche au démantèlement des services publics. L'acceptation démocratique du nucléaire repose sur le contrat moral passé entre les Français et le Conseil national de la Résistance (CNR). Il est aujourd'hui mis en cause. C'est pourquoi nous appelons à un vaste débat public. A nos yeux, seul un grand service public de l'énergie est en mesure de répondre à toutes les exigences.(Applaudissements sur les bancs CRC)

M. René Beaumont.  - Cette proposition de résolution est l'occasion d'évoquer des questions que se posent les Français : nous serons attentifs aux éclaircissements du ministre.

Notre industrie nucléaire est certes la plus surveillée du monde mais l'accident du Japon nous rappelle à l'exigence d'une autorité de sûreté nucléaire sans faille. Si la France est moins exposée au risque naturel à l'origine de Fukushima, le vieillissement des installations, dont certaines sont implantées sur des zones sismiques, même peu actives, doit nous alerter. De même que les risques de tempête et d'inondation, comme celle qui a frappé la centrale du Blayais, naguère, faute de travaux sur les digues.

Certaines centrales, comme Fessenheim, ont plus de trente ans. Et l'accident vient souvent où on ne l'attend pas -défaillance technique ou humaine.

Quelles décisions entendez-vous prendre, monsieur le ministre, quant à leur avenir ?

Quid de l'avenir de l'EPR ? L'hypothèse d'un moratoire sur les futurs projets est-elle envisageable, sans pourtant que soit pris du retard, dommageable, sur les projets en cours ? A Tricastin, dans la Drôme, un département qui vous est familier, est-il envisageable d'ajouter un EPR aux quatre réacteurs et à l'usine Eurodif ?

Grâce au nucléaire, les Français payent l'électricité 40 % moins cher. Sans lui, la facture supplémentaire serait de 200 milliards par an. Mais nous devons être toujours plus rigoureux sur le choix des sites, des hommes, des matériels, et plus exigeants sur la sûreté.

Je suis Bourguignon : permettez-moi de vous interroger sur le pôle nucléaire de la région et la question du démantèlement, encore mal maîtrisée.

Notre filière nucléaire, une des plus sûres du monde, doit conserver sa structure actuelle. J'ai pu constater à Teshuan, en Chine, comment les équipes d'Areva et d'Edf travaillaient en bonne complémentarité. Ne cédons pas aux tentations monopolistiques de certains.

Vous aurez compris que le groupe UMP votera contre cette résolution, qui va contre la politique énergétique du pays.

M. Marcel Deneux.  - Ce texte n'est pas sans intérêt : nous devons nous interroger sur les choix de la France, notamment en matière nucléaire. Fukushima nous a engagés à entreprendre un audit. Je souhaite, monsieur le ministre, une vraie transparence sur ses résultats.

La filière nucléaire joue un rôle essentiel dans notre autonomie énergétique : gardons-nous du catastrophisme. Les risques sismiques et la répartition du capital de l'exploitant ne sont pas les mêmes qu'au Japon. Reste qu'il faut savoir articuler les deux logiques, publique et économique. La puissance publique est le garant de leur équilibre : elle doit jouer son rôle dans les conseils d'administration, ce que, semble-t-il, elle n'a pas toujours fait.

Nous ne pouvons oublier la dimension internationale et je me réjouis de l'inscription de cette problématique à l'ordre du jour du prochain G 8.

Pour autant, l'énergie nucléaire n'est pas renouvelable. Sans précipitation, engageons donc une réflexion sur la sortie du nucléaire, du moins sur sa diminution progressive, pour développer des filières solides dans le domaine des énergies renouvelables et nous conformer à notre devoir d'exemplarité en matière d'économies d'énergie, suite aux décisions prises sous présidence française de l'Union.

Or l'État a failli, tant à structurer la filière photovoltaïque que l'éolien. Il doit reprendre les rênes. Et la géothermie me paraît sous-estimée.

Je suis loin de partager toutes les conclusions des auteurs de la proposition de résolution. Il faut pouvoir faire appel aux capitaux privés, tout en sachant conserver une maîtrise publique. (Exclamations incrédules à gauche)

En matière de prix, nous sommes entrés pour longtemps dans un cycle à la hausse. Tout gaspillage doit être évité. Il n'est pas vrai que rentabilité et préservation de l'environnement s'excluent : la puissance publique fixe des normes environnementales et les entreprises suivent leur logique dans ce cadre.

Notre groupe votera contre cette proposition de résolution, tout en restant attentif aux choix qui seront faits pour l'avenir.

Notre consommation reste encore trop carbonée. Il faudra pousser la recherche.

Il y a dans tout cela de quoi faire : c'est bien pourquoi le ministère de l'industrie a compétence sur l'énergie. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Daniel Raoul.  - Cette proposition de résolution, bienvenue, soulève le problème de la dérégulation, pensée à une époque de bas prix où l'approvisionnement n'était pas menacé. Elle arrive aujourd'hui à contre-cycle.

L'ouverture à la concurrence, qui visait la baisse des prix, est devenue une fin en soi, un toc, « trouble obsessionnel de la concurrence ». (Sourires)

Dès la loi de 2003, suivie par plusieurs autres, s'engageait une privatisation à marches forcées, qui remet en cause le statut de nos entreprises publiques -ce qui n'a jamais fait partie des exigences de Bruxelles. Mme Kroes vous a transmis le virus de la privatisation !

C'est ainsi que les Français subiront une double peine. Citoyens, ils sont victime d'une spoliation -celle de l'investissement qu'ils ont consenti dans EDF. Et la rente énergétique ne saurait être captée par le privé. Comme usagers, ils doivent subir une augmentation croissante des tarifs : 3,4 millions de ménages consacrent plus de 10 % de leurs revenus à payer leur facture de gaz et d'électricité. C'est même beaucoup plus si l'on compte ceux qui ne peuvent plus se chauffer.

Pourtant, les tarifs aménagés bénéficient aussi aux entreprises, qui profitent ainsi d'un avantage de compétitivité. Le Tartam a également donné un avantage aux gros consommateurs. Tout cela doit disparaître dans les prochaines années. Peut-on envisager un moratoire ?

Il est donc juste de souligner que la dérégulation est contraire aux exigences de sûreté et d'indépendance. Il faut, de surcroît, mettre fin à la sous-traitance. La maîtrise du nucléaire est devenue essentielle. Je vous demande, monsieur le ministre, de suspendre la loi Nome jusqu'à la remise de l'audit sur le nucléaire.

M. Jean-Pierre Chevènement.  - Cette proposition de résolution, qui intervient deux mois après Fukushima, a le mérite de mettre l'accent sur les conséquences pratiques d'une telle catastrophe, plutôt que de céder à la démagogie obscurantiste et technophobe de sortie immédiate du nucléaire.

L'accident de Fukushima tient à l'insuffisance des mesures de sécurité mises en place par Tepco. Un mur de 7 mètres face à des vagues de 23 mètres ! Les moteurs diesel de secours ont été noyés alors que l'arrêt automatique de l'alimentation électrique, en raison du séisme, a fait cesser le refroidissement du coeur des réacteurs. C'est le fait de l'imprévoyance de l'entreprise : tout le reste en a découlé.

Il est extrêmement important de comprendre l'origine de l'accident pour en tirer les leçons adéquates. Ce n'est pas s'aventurer que de pointer la responsabilité de l'exploitant qui n'a pas pris les précautions nécessaires. L'analyse de l'accident mérite sûrement d'être complétée. Dès maintenant, cependant, on peut dire, et la résolution présentée par M. Danglot a raison de le souligner, qu'il est important de soustraire le secteur énergétique, et particulièrement le secteur nucléaire, aux logiques de rentabilité qui gouvernent la libéralisation de l'énergie.

La proposition de résolution met en avant, à juste titre, la nécessité d'un grand pôle public de l'énergie. Je la voterai, d'autant que Mme Schurch a fort bien dit l'importance d'une bonne formation du personnel.

Il est admirable, au sens classique du terme, que l'intervention de l'Europe, au nom de la concurrence, aboutisse à un relèvement des prix de l'énergie. Je rappelle toutefois à M. Danglot que le processus de Lisbonne a commencé à un moment où le parti communiste était associé au Gouvernement.

M. Ladislas Poniatowski.  - Bon rappel !

M. Jean-Pierre Chevènement.  - Je ne signale ce fait que pour montrer combien il est difficile de résister à la logique de libéralisation qui se déroule implacablement depuis plus de vingt ans et qui a été acceptée par l'ensemble des forces politiques à l'exception, je dois le rappeler, du parti communiste.

Mais ceux qui ont voté, comme moi, l'Acte unique en 1987 ne pouvaient alors avoir idée de cette avalanche de directives néolibérales qui ont emballé le processus de concurrence, qui n'est plus contrôlé par personne. Cessons de libéraliser ! Il faut réglementer, remettre de la viscosité dans des marchés devenus fous.

Si le progrès procède d'erreurs corrigées, tentons d'éviter les erreurs évitables !

Le Gouvernement n'a pas fait l'effort pédagogique nécessaire pour combattre la hantise du nucléaire, née à Hiroshima et méthodiquement exploitée par tous ceux que révulse la vision cartésienne de l'Homme « possesseur et maître de la Nature ». C'est un vieux débat : Ève a été punie pour avoir mangé le fruit de l'arbre de la connaissance et Prométhée pour avoir donné le feu aux hommes.

Ceux qui proposent tout bonnement de sortir du nucléaire ont-ils mesuré la portée de leur choix ?

M. Jean Desessard.  - Oui ! (Sourires)

M. Jean-Pierre Chevènement.  - Ils doivent savoir qu'il n'est pas aisé de le remplacer. L'exploitation du charbon tue au moins 750 000 Chinois par an. Il n'est point d'activité humaine sans risque mais les inconvénients doivent être comparés. La sortie du nucléaire en vingt ans impliquerait, selon les calculs de M. René Tregouët, la pose de 2 000  kilomètres de panneaux solaires, de 3 400 éoliennes terrestres géantes et de 8 400 éoliennes marines, pour un coût de production de l'énergie deux fois plus élevée, sinon dix fois plus dans le cas du photovoltaïque.

Ce choix ne serait pas seulement hors de prix, il serait aussi contraire à l'intérêt national.

La pollution de l'air par les énergies fossiles tue, les accidents de la route tuent, quelle activité humaine ne tue pas ?

Le choix du néolibéralisme effectué il y trente ans par la France a entraîné une désindustrialisation massive et un chômage structurel. Il me semble que les choix technologiques ne doivent pas être dissociés des choix économiques et sociaux ; la sortie du nucléaire serait un choix de régression, en aucun cas un choix de société : le vrai choix, ce serait de mettre un terme à la dictature des marchés financiers.

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. Jean-Pierre Chevènement.  - En ce sens, la proposition de résolution de M. Danglot liant l'exploitation du nucléaire au choix de l'appropriation publique et visant plus généralement à reréglementer le secteur de l'énergie me paraît mériter pleinement d'être soutenue. La majorité du RDSE votera la résolution. (Applaudissements à gauche)

M. Jean Desessard.  - Je n'applaudis pas !

M. Ladislas Poniatowski.  - Cette proposition de résolution met l'accent sur le rôle du nucléaire auquel Sénat et Assemblée nationale consacrent une étude commune, dans le cadre de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. Elle évoque aussi les autres sources d'énergie, en particulier renouvelables. Je suis attaché à la biomasse, venue du bois-énergie mais pas seulement. Cette production doit progresser à 7,4 millions de tonnes équivalent pétrole d'ici à 2020 contre 1 million pour l'éolien et 0,5 million pour le photovoltaïque.

La France risque de ne pas parvenir à respecter son engagement de réaliser en 2020 23 % de notre consommation d'énergie à partir des énergies renouvelables. Seul le photovoltaïque devrait atteindre ses objectifs, bien avant 2020, mais son coût est très élevé.

Il faut donc mettre l'accent sur les autres sources alternatives d'énergie.

La biomasse permet d'économiser l'énergie fossile, sans gaz à effet de serre, tout en favorisant l'aménagement du territoire et en créant des emplois. L'action du Fonds chaleur doit donc être soutenue. L'an dernier, 31 projets ont été sélectionnés, pour 16 euros de coût de CO2 évités, ce qui est satisfaisant. L'enjeu porte moins sur l'augmentation des capacités que sur l'amélioration des appareils de chauffage.

Les possibilités d'accroître l'hydroélectricité sont limitées. Les éoliennes ont sans doute les meilleures perspectives, en combinaison avec la biomasse.

Il faudrait se demander pourquoi 45 % des projets seulement ont été mis en oeuvre.

Nous attendons le décret d'application sur le difficile problème du raccordement. Quid aussi de la détermination des prix de rachat ?

Rapporteur de la loi Nome, je ne puis m'associer aux conclusions de cette résolution.

Mme Mireille Schurch.  - C'est normal.

M. Ladislas Poniatowski.  - Il faudra effectivement des investissements importants pour prolonger la vie des centrales nucléaires et en améliorer la sûreté. La loi Nome ne doit pas être mise en cause, mais vraiment appliquée. J'attends les décrets... (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Je remercie le groupe CRC d'avoir suscité cet utile débat, après de longs mois d'augmentation des prix de l'énergie. Beaucoup de ménages n'ont pu se chauffer cet hiver, faute de moyens. Le Gouvernement s'est défaussé de ses responsabilités sur la Commission de régulation de l'énergie, en la laissant fixer les tarifs, comme si ce n'était qu'une question technique. C'est pourtant un bien de première nécessité !

Faut-il rappeler que le CNR avait fait de l'État le garant de l'accès de tous à l'électricité et au gaz ? Or, depuis la privatisation de GDF, le prix du gaz s'est accru de 55 %, pour le plus grand bénéfice des actionnaires. Quelle provocation ! Le Gouvernement a bien sorti de son chapeau l'Observatoire national de la précarité énergétique mais l'heure est à l'action, non à l'observation !

Parler de l'opacité des prix du gaz relève de l'euphémisme. Et dire que le PDG de Total n'hésite pas à annoncer, d'un air amusé, des bénéfices colossaux et le litre d'essence à 2 euros !

Quand, enfin, vous interrogerez-vous sur la loi Nome ? Il est clair qu'elle pousse à l'augmentation des tarifs. Et ce n'est pas le Tartam qui améliore vraiment les choses : réintroduisant en catastrophe une relative régulation des tarifs, il ressemble à un aveu.

Une intervention active de l'État est donc incontournable, ne serait-ce que pour imposer un moratoire sur les tarifs de l'énergie.

Nous voterons bien sûr la proposition de résolution CRC. (Applaudissements à gauche)

M. le président.  - M. Desessard a cinq minutes pour nous convaincre ! (Sourires)

M. Jean Desessard.  - Je crains que cela ne suffise pas !

Une des raisons de sortir du nucléaire, c'est qu'il nous fait entrer dans l'irrémédiable : la contamination nucléaire des sols à Tchernobyl ou a Fukushima n'aura pas de remède. De surcroît, la défense du nucléaire repose sur des allégations mensongères.

L'indépendance énergétique ? Les gisements d'uranium sont rares, exploités sur d'autres continents sans souci de la santé des mineurs.

La sûreté ? A Cadarache, le suivi rigoureux de la matière active se trouve pris en défaut ; au Tricastin, les déchets se répandent dans la nature ; Fessenheim est construite sur une faille sismique.

La transparence ? EDF exporte en Sibérie des centaines de tonnes d'uranium sans que cela soit mentionné dans le Plan de gestion des matières et déchets radioactifs.

Le coût ? Il est largement sous-estimé.

On peut sortir progressivement du nucléaire, à condition d'y être décidé. Il est possible de faire mieux et, à terme, pour moins cher ! Cessons de construire des logements énergivores et soutenons le photovoltaïque !

Un mot sur la folie des gaz de schiste.

Destructeur du sous-sol, saboteur des territoires, suicidaire pour l'eau potable, disséminateur de polluants chimiques, ce projet est une hérésie. Signée par le ministre Borloo, l'autorisation de prospection a été combattue par tous, même par le député Borloo...

A signer des autorisations irresponsables pour l'exploitation de ce gaz, on prend le risque de gaspiller l'argent public : les exploitants déboutés de la mine d'or de Kaw, en Guyane, réclament 80 millions de dommages et intérêts.

Après Fukushima et après les innombrables pollutions résultant des fracturations hydrauliques aux États-Unis, il est encore plus urgent de fonder une politique énergétique durable et responsable fondée sur les énergies renouvelables et les économies de consommation. (Applaudissements sur plusieurs bancs socialistes)

M. Jean-Louis Carrère.  - Pas mal...

M. Éric Besson, ministre auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique.  - La politique énergétique de la France vise la sécurité, la compétitivité des prix, la protection de l'environnement, la lutte contre le réchauffement climatique, l'accès de tous à l'énergie.

La loi Nome est la pierre angulaire de la nouvelle régulation ; elle tire partie de la compétitivité de notre parc nucléaire et maintient un tarif régulé pour tous les Français ; le prix du gaz n'augmentera pas dans les douze prochains mois.

Le Gouvernement agit concrètement contre la précarité énergétique. Nous avons créé un tarif social du gaz. Des mesures conjoncturelles ont été prises, comme la revalorisation du barème kilométrique ou l'aide à la modernisation des chaudières.

Nous renforçons notre effort de maîtrise énergétique afin de respecter l'objectif de 2020. Sachant que le secteur du bâtiment concentre 44 % des consommations énergétiques du pays, nous avons créé un éco-PTZ.

Nous avons défini une trajectoire précise pour atteindre l'objectif des 23 % d'énergies renouvelables à l'horizon 2020 ; c'est la raison pour laquelle nous avons créé le Fonds chaleur. De fait, monsieur Poniatowski, l'énergie ne se limite pas à l'électricité.

L'éolien est soutenu. Le tarif d'achat de l'électricité biomasse a plus que doublé. Le parc photovoltaïque a été multiplié par 73 de 2007 à 2010.

Troisième pilier de notre politique de l'énergie : le nucléaire, choix confirmé depuis un demi-siècle par tous les gouvernements. Ce choix ne peut être que renforcé par le fait qu'il s'agit d'une électricité décarbonée. Le Parlement a voté en 2006 deux lois très importantes sur le nucléaire, pour la transparence et pour la gestion des déchets. Notre autorité de sûreté nucléaire est reconnue dans le monde entier pour sa compétence.

Monsieur Danglot, il n'y a pas désengagement de l'État, bien au contraire. A la demande du président de la République, le conseil en politique nucléaire s'est réuni cinq fois depuis 2007, après dix ans de mise en sommeil. Des audits de sûreté vont être menés sur tout notre parc, dans la plus grande transparence.

Une action forte à l'échelle européenne ? Nous la menons déjà.

Mme Schurch a insisté sur la formation dans le domaine du nucléaire. Elle a raison. C'est pourquoi le président de la République a refusé tout moratoire. Le nombre de diplômés n'est pas de 300 mais de 600.

Je partage les propos de M. Beaumont. De fait, nous n'avons pas attendu Fukushima pour nous préoccuper de sûreté nucléaire. Il va de soi que nous tiendrons compte des retours d'expertise. Flamanville ne sera pas exonérée d'audit. L'enquête publique sur le deuxième EPR est en cours de préparation. Un nouveau réacteur ? La question n'est pas à l'ordre du jour. La réflexion va être lancée. D'autres constructions relèveraient du choix du futur Gouvernement. Notre expertise en matière de démantèlement n'est pas si limitée.

M. Deneux a fait une intervention très intéressante. De fait, il n'y pas de lien entre l'âge d'une centrale et le nombre d'incidents. La durée de trente ans concerne l'amortissement, non l'espérance de vie. Une centrale de plusieurs décennies est plus sûre puisqu'elle a bénéficié des améliorations de sûreté à la suite de divers incidents dont on a fait le retour d'expérience.

Créer des filières industrielles autour des énergies renouvelables ? Un comité stratégique sera installé en juin.

M. Raoul a parlé de « double peine ». L'expression m'a fait sursauter ; elle caricature notre politique.

M. Daniel Raoul.  - Je pourrais vous citer, à l'époque.

M. Éric Besson, ministre.  - Si vous critiquez la loi Nome, ayez l'honnêteté de reconnaitre que l'ouverture du marché de l'énergie est due à la droite comme à la gauche : commencez par vous auto-flageller !

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Donnez l'exemple !

M. Éric Besson, ministre.  - Le premier paquet Énergie a été mis en oeuvre sous M. Jospin.

Que serait une politique alternative ? J'ai lu avec un intérêt tout particulier le projet socialiste.

M. Daniel Raoul.  - Vous êtes un expert !

M. Éric Besson, ministre.  - Oui, car les ambiguïtés et les faux-semblants sur le nucléaire ont été une des causes de ma rupture avec le parti socialiste. Je constate que vous voulez sortir du tout nucléaire, mais j'attends toujours de voir comment ! Le temps vous a sans doute manqué...

M. Poniatowski a eu raison d'insister sur la biomasse. Le tarif de rachat a doublé depuis 2008, conformément à l'engagement du président de la République. Le décret sur la méthanisation est devant le Conseil d'État.

J'espère ne pas porter préjudice à M. Chevènement en disant mon accord avec nombre de ses propos. Je n'aurais pas osé employer certaines de ses formules, comme « démagogique, obscurantiste et technophobe ».

Malgré un séisme de magnitude 9 et un raz-de-marée, la centrale de Fukushima a résisté.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Bref, ça pouvait être pire...

M. Éric Besson, ministre.  - Ce sont les systèmes de refroidissement qui ont failli ; il faudra les consolider et installer des systèmes de secours.

On a le droit d'évoquer une sortie du nucléaire, ce n'est pas un sujet tabou, mais il faut dire par quoi on le remplace et à quel prix.

Je regrette que M. Mirassou ait encore demandé un moratoire. Je vous conseille un moratoire sur vos moratoires !

M. Jean-Jacques Mirassou.  - J'irais répéter vos propos dans les cités ouvrières !

M. Éric Besson, ministre.  - Monsieur Desessard, je reconnais votre cohérence, mais ne caricaturez pas mes propos : le risque zéro n'existe pas. Simplement, le risque, en France, est maitrisé. Et n'oubliez pas que le solaire et l'éolien sont, par essence, intermittents ni que les ménages allemands paient leur électricité deux fois plus cher que les Français et qu'un Allemand émet 40 % du gaz à effet de serre de plus qu'un Français. Il faut, un jour, se demander pourquoi... (Applaudissements sur les bancs UMP)

A la demande des groupes UMP et CRC-SPG, la proposition de résolution est mise aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 338
Majorité absolue des suffrages exprimés 170
Pour l'adoption 151
Contre 187

Le Sénat n'a pas adopté.

La séance est suspendue à 13 heures.

présidence de M. Jean-Pierre Raffarin,vice-président

La séance reprend à 15 h 5.

Droit de la chasse

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à moderniser le droit de la chasse.

Discussion générale

M. Pierre Martin, auteur de la proposition de loi.  - J'ai déposé, le 15 mars 2010, le texte que je suis heureux de présenter aujourd'hui. Ses huit articles tendent à promouvoir une gestion plus efficace de la biodiversité et à moderniser la législation afin de permettre aux chasseurs de mieux assurer leur mission d'intérêt général. Alors que 2010 a été déclarée « année de la biodiversité », il m'est apparu nécessaire de rappeler la contribution des chasseurs à la gestion des espèces et des espaces.

Tous ici, nous souhaitons une gestion équilibrée des espaces naturels. Le premier constat ayant inspiré ma proposition de loi est la forte baisse du nombre de chasses, passé de 2,4 millions à 1,3 depuis les années 1970. Il faut rendre la chasse plus attractive et plus accessible, notamment aux jeunes.

Le bilan de la loi Poniatowski de 2008 a mis en évidence l'inadaptation de notre droit. Je souhaite que l'approche du législateur soit pragmatique afin que les normes édictées soient bien appliquées ; c'est pourquoi j'ai privilégié la concertation avec tous les acteurs concernés, sans éveiller de polémiques inutiles et contreproductives.

M. Jean-Louis Carrère.  - Vous vous êtes concerté tout seul !

M. Pierre Martin, auteur de la proposition de loi.  - Le texte issu de cette concertation vient contribuer modestement, sans compromettre les équilibres acquis, à faire de la chasse une pratique démocratique, apaisée et responsable.

Ce texte a trois objectifs : reconnaître le rôle des chasseurs au service de la biodiversité, notamment en zones humides ; assurer la pérennité de la gestion cynégétique sur le territoire en révisant les modalités d'adhésion aux associations agréées ; poursuivre la modernisation du droit de la chasse.

En 2008, le Gouvernement s'était engagé à créer par décret le délit d'entrave à la chasse. C'est chose faite depuis le 4 juin 2010, ce dont je me réjouis ; l'article que j'avais rédigé demandant un rapport au Gouvernement n'ayant plus lieu d'être ; il a été supprimé par la commission avec mon accord. Celle-ci a en outre introduit un article additionnel qui rend éligible à l'agrément les fédérations régionales et départementales.

Les articles 1 et 3 reconnaissent le rôle éminent des chasseurs en matière de préservation de la biodiversité et celui des fédérations départementales et régionales pour l'information et l'éducation à l'environnement -le droit reconnaît le fait.

L'article 2 exonère de taxe foncière sur les propriétés non bâties les installations de chasse dans les zones humides ; il correspond à une réelle demande et préserve les possibilités d'action des fédérations de chasseurs. Il s'appliquera, par exemple, dans le marais charentais ou dans les lagunes des Landes.

L'article 4 aborde l'accumulation du grand gibier dans les territoires non chassés et les dégâts agricoles et accidents de circulation qu'il cause. Désormais, le préfet pourra ordonner au propriétaire des « prélèvements » -terme préféré par la commission à « plan de tir »- sauf à ce que sa responsabilité financière soit engagée. J'insiste sur le fait que le propriétaire pourra refuser le prélèvement à condition d'indemniser les dégâts occasionnés. Il n'était plus possible que les fédérations continuent d'assumer seules l'indemnisation.

Les articles 5 et 6 assouplissent l'adhésion aux associations communales de chasse agréées (Acca). La solution retenue par la commission, sur proposition des Acca elles-mêmes, est très satisfaisante.

Enfin, l'article 7 améliore le dispositif de réfaction appliqué à la redevance cynégétique due par les nouveaux chasseurs. A l'initiative de M. Pointereau, le détenteur d'un permis départemental pourra obtenir la validation de celui-ci pour un jour dans un autre département. Cette disposition sympathique, réclamée par les jeunes chasseurs, risque cependant d'être difficile à appliquer. Je rappelle qu'il existe déjà des permis de deux et de trois jours.

M. Jean-Louis Carrère.  - A quand le permis d'une heure ?

M. Pierre Martin, auteur de la proposition de loi.  - Selon le Conseil économique, social et environnemental (Cese), la chasse contribue à la restauration de la qualité écologique des territoires ruraux et au rétablissement de liens sociaux harmonieux. Cet objectif doit être le nôtre. Je vous appelle à voter le texte de la commission. Le Sénat montrera ainsi qu'il sait être une force de proposition au service de la chasse et du monde rural. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur de la commission de l'économie.  - Le 13 août, la commission de l'économie a unanimement adopté la proposition déposée par M. Martin, que j'accueille avec plaisir dans notre hémicycle après une absence de quelques semaines pour raison de santé. Je le félicite pour son initiative, qui aboutira au sixième texte relatif à la chasse en dix ans.

Face à la réduction du nombre de chasseurs, il faut rendre la chasse plus attractive et plus accessible. Les États généraux de la chasse de février 2011 ont mis l'accent sur le concept de biodiversité. L'équilibre agro-sylvo-cynégétique auquel nous sommes parvenus désormais doit être conforté.

Commençons par deux précisions. Tout d'abord, une réelle concertation a précédé le dépôt du texte puis son examen en commission. Ensuite, l'Assemblée nationale a inscrit à son ordre du jour un texte déposé un an après celui de M. Pierre Martin, dont il reprend l'essentiel du dispositif. Ce n'est guère élégant...

A mon initiative, l'article premier de la proposition de loi a été étendu aux fédérations régionales de chasseurs, qui assurent aussi des actions de formation et de sensibilisation à l'environnement.

L'article 2 étend le bénéfice de l'exonération partielle de TFNB aux installations de chasse situées dans les zones humides afin d'inciter à la préservation de celles-ci ; la commission a précisé que la préservation de l'avifaune n'excluait pas la pratique de la chasse.

L'article 3 remplace la notion d'écosystème par celle de biodiversité.

L'article 4 concerne les territoires non chassés. Il y en a 700 à 800 en France, dont le propriétaire est privé ou public. Le gibier qui s'y accumule occasionne des dégâts qu'indemnisent, à ce jour, les seules fédérations départementales, à hauteur de 1,5 million d'euros. S'ajoutent, comme l'a justement relevé M. Patriat, de nombreux accidents de circulation. Désormais, le préfet pourra ordonner des prélèvements au propriétaire, dont la responsabilité financière sera engagée s'il n'obtempère pas.

L'article 5 permet aux Acca de fusionner.

La commission a adopté à l'unanimité une nouvelle rédaction de l'article 6, fondée sur une proposition des Acca elles-mêmes, afin d'éviter que des pans entiers du territoire se trouvent privés de toute forme de gestion cynégétique. L'article prévoit deux cas de figure. L'acquéreur qui achète l'intégralité de la propriété est reconnu membre de droit de l'Acca s'il en fait la demande ; s'il n'en achète qu'une partie et si celle-ci est supérieure à 10 % du seuil d'opposition départemental, il l'est également. A défaut, le règlement interne de l'Acca peut prévoir les modalités de son admission.

L'article 7 rectifie une erreur matérielle. A l'initiative de M. Pointereau, la validation d'un jour du permis dans un autre département a été introduite ; c'est une forme de clin d'oeil en direction des chasseurs...

L'article 8, relatif au délit d'entrave à la chasse, a été supprimé puisque le Gouvernement a enfin publié le décret attendu.

Un article additionnel clôt le texte, qui rend les fédérations régionales et interdépartementales éligibles à l'agrément au titre de la protection de l'environnement.

Tel est le texte que je vous invite à voter. (Applaudissements)

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.  - Depuis une dizaine d'années, deux lois Chasse ont été votées, puis deux lois relatives aux territoires ruraux, avant une nouvelle loi Chasse. C'est dire l'importance que le Parlement reconnaît à cette pratique à multiples facettes qui anime les territoires, contribue à la gestion de la biodiversité et a une importance sociale et économique non négligeable. Elle générerait 23 000 emplois et des flux financiers de l'ordre de 2,3 milliards d'euros.

On pourrait juger suffisantes les cinq lois votées cette dernière décennie. Pourtant, M. Pierre Martin a raison car la chasse évolue. Les états généraux de la chasse ont montré que les chasseurs étaient des acteurs et des défenseurs de la biodiversité...

M. Yvon Collin.  - Ce n'est pas toujours admis !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre.  - ...ce qui restait encore à expliciter : c'est l'objet des articles 1, 3 et 8 bis.

L'article 2 poursuit le même objectif. La loi de 2005 distinguait les terrains humides selon qu'ils procuraient ou non des revenus mais l'esprit du texte n'était pas d'exclure les zones chassées de l'exonération de TFNB. J'approuve donc la disposition proposée, sous réserve d'un amendement de précision.

M. Pierre Martin a souligné la diminution constante du nombre de chasseurs. Nous devons chercher à inverser la tendance ; c'est l'objet des articles 5 et 6.

L'article 7 est cohérent avec les dispositions réduisant le coût du permis pour les jeunes chasseurs, mais je suis réservée sur le « permis d'un jour », difficile à appliquer ; le « permis de trois jours » existe déjà, que son prix rend accessible à tous.

L'article 4 aborde un sujet important car il est injuste de rendre les fédérations responsables des dégâts occasionnés par des animaux non chassés.

A juste titre, l'article 8 a été supprimé puisque le décret créant un délit d'obstruction à la chasse a été publié et a déjà prouvé son efficacité -le nombre d'actes d'obstruction à la chasse à cour a diminué cette dernière saison.

Le Gouvernement approuve cette proposition de loi. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Joseph Kergueris.  - On n'a jamais légiféré sur la chasse autant que ces dernières années. Pourquoi ? Surtout parce que les chasseurs sont toujours moins nombreux.

Ce texte satisfait de façon pragmatique le besoin d'adapter le droit de la chasse, une activité contribuant à la bonne gestion des espèces et des espaces. De nombreuses conventions ont été passées pour encadrer la pratique des points de vue de la préservation de l'environnement et de la sécurité, avec d'excellents résultats dont je me félicite. Ce texte reconnaît la contribution des chasseurs au maintien de la biodiversité, composante essentielle du développement durable.

Les chasseurs contribuent à réguler certaines espèces ; ils participent aussi à la préservation des zones humides. La disposition fiscale proposée va dans le bon sens.

La disposition relative à l'indemnisation des dégâts occasionnés par le gros gibier vivant dans les zones non chassées et à la responsabilité du propriétaire est juste et nécessaire.

J'en viens aux Acca. Il importe de faciliter l'adhésion à ces associations, ainsi que le regroupement intercommunal. L'automaticité de l'adhésion pour les acquéreurs de terrain est bienvenue. Tout ce qui participe au développement du lien social assuré par ces associations me réjouit.

Enfin, je me félicite que l'article 8 ait été supprimé par la commission car il y avait là une rupture avec l'esprit consensuel de la proposition de loi.

Le groupe centriste votera ce texte. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jean-Louis Carrère.  - Au cours de la dernière décennie, nous avons voté la loi Voynet de 2000, puis d'autres projets ou propositions de loi. Les parlementaires, à l'initiative de nouvelles dispositions, ont toujours invoqué la simplification du droit. C'est aussi l'argument avancé par M. Pierre Martin pour justifier ce sixième texte relatif à la chasse en onze ans.

Notons qu'une proposition de loi, au dispositif similaire, a été déposée à l'Assemblée nationale par M. Bignon, député de la Somme. Elle sera examinée par nos collègues le 10 mai. Plus récente que celle de M. Martin, elle n'a pas pris en compte les conclusions des états généraux de la chasse organisés en février. Cherchez l'erreur !

Un mot de la table ronde sur la chasse. J'avais été surpris par le caractère politiquement homogène des participants. Il n'est pourtant pas interdit aux socialistes de pratiquer la chasse !

M. Yvon Collin.  - Pour l'instant ! (Sourires)

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur.  - Comptez sur moi pour que tel ne soit jamais le cas.

M. Jean-Louis Carrère.  - On m'avait promis que la sensibilité politique que je représente serait associée, il n'en a rien été. En pleine campagne électorale pour les régionales, certaines pratiques cynégétiques ont été interdites dans les Landes alors que la Picardie bénéficiait de nouvelles autorisations... Il est vrai que dans mon département, les chances de la majorité étaient minces... Ces basses manoeuvres disqualifient ce qui s'est dit dans les débats et handicapent la bonne perception de la chasse dans notre pays. Je le regrette.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Très bien dit !

M. Jean-Louis Carrère.  - J'en viens à la proposition de loi. Elle favorisera une meilleure pratique de la chasse, une activité qu'elle rendra plus attractive auprès des jeunes. La réduction du nombre de chasseurs devrait inquiéter le Gouvernement car le service public assuré par les bénévoles des fédérations pourrait retomber sur les épaules de l'État. Le permis à un jour ? Comme la ministre, je m'interroge sur son utilité...

S'agissant des dégâts occasionnés par le gros gibier, nous sommes dans un piège, que referment la diminution du nombre de chasseurs, la croissance des populations de gros gibier, l'augmentation des surfaces cultivées et l'évolution du prix des céréales, qui sert de référence au calcul des indemnisations. Les fédérations ne peuvent plus faire face, dont le budget dépend de plus en plus de taxes territoriales additionnelles. Rien ne suggère que la population de sangliers retournera au niveau des années 1980, alors que, chaque année, il y a 2 % de chasseurs en moins... Peut-être faudrait-il faire évoluer la franchise de 76 euros aujourd'hui en vigueur. Le dispositif actuel fournit une assurance gratuite au monde agricole. Sans opposer celui-ci à celui de la chasse, il faut trouver une solution.

15

M. le président.  - Amendement n°9, présenté par M. Assouline, au nom de la commission.

Alinéa 29

1° Remplacer le mot : « Décide » par les mots : « Délègue, dans des conditions fixées par son règlement intérieur, à une commission spécialisée composée d'éditeurs le soin de décider » ;

2° Supprimer la seconde phrase.

M. David Assouline, rapporteur.  - Il convient de clarifier, dans la loi, les responsabilités de l'actuelle commission du réseau du CSMP dont les décisions, qui doivent être suffisamment réactives à l'évolution du réseau, n'obéissent pas au même rythme que l'assemblée générale du CSMP.

L'amendement n°9, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°10, présenté par M. Assouline, au nom de la commission.

Alinéa 33, deuxième phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Il s'assure en particulier que les sociétés coopératives de messageries de presse et les entreprises commerciales mentionnées à l'article 4 qui distribuent des quotidiens d'information politique et générale opèrent une distinction claire, le cas échéant dans le cadre d'une comptabilité par branche, entre la distribution de ces quotidiens et celle des autres publications.

M. David Assouline, rapporteur.  - Cette formulation permet de viser l'entreprise Presstalis, entreprise commerciale au sens de l'article 4 de la loi Bichet ; de tenir compte du fait que les aides publiques en faveur de la distribution des quotidiens sont versées aux entreprises éditrices et non aux messageries et de remplacer le terme « magazine », juridiquement flou.

L'amendement n°10, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président. - Amendement n°5, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 34, seconde phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Ce droit d'opposition ne s'exerce pas si le commissaire du Gouvernement  mentionné à l'article 18-4 émet un avis défavorable.

M. Frédéric Mitterrand, ministre.  - Le droit d'opposition institué par l'article 21 de la loi du 2 avril 1947 est exercé par le représentant de l'État ayant qualité de commissaire, après avis du CSMP. Ce commissaire veille ainsi au respect des principes consacrés par la loi

Dans le nouveau système de régulation, cette compétence relève désormais du CSMP qui veille au « respect des principes de solidarité coopérative et des équilibres économiques du système collectif de distribution de la presse ».

Dans la rédaction proposée par la commission, le commissaire du Gouvernement apparaît comme l'« instrument juridique » du CSMP et serait dans l'obligation d'exercer le droit d'opposition au nom et à la demande du CSMP.

Il paraît préférable d'autoriser le commissaire du Gouvernement à émettre un avis défavorable à l'exercice du droit d'opposition du CSMP.

M. David Assouline, rapporteur.  - Nous avons voulu que le CSMP exerce le contrôle comptable mais sans réduire le commissaire du Gouvernement à un simple instrument du CSMP. L'amendement apporte une garantie supplémentaire : avis favorable.

L'amendement n°5 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°4 rectifié, présenté par le Gouvernement.

Alinéas 38 et 39

Supprimer ces alinéas.

M. Frédéric Mitterrand, ministre.  - L'article 18-6 bis, introduit par amendement du rapporteur en commission, dispose que le CSMP organise une consultation publique avant de prendre toute mesure « ayant une incidence importante sur le marché de la distribution de la presse ». On ne peut que louer le souci du rapporteur de permettre à l'ensemble des acteurs concernés de s'exprimer mais l'organisation d'une consultation publique supposerait, pour chacune des décisions concernées, que le CSMP se réunisse deux fois, avant et après la consultation publique, au risque de ralentir ses travaux. Enfin, la notion d'« incidence importante » risque de susciter des difficultés d'interprétation. Il semble donc préférable de supprimer cette disposition, étant observé qu'il demeurera loisible au CSMP, lorsqu'il l'estimera utile, de consulter les professionnels non-membres du CSMP.

M. David Assouline, rapporteur.  - Avis défavorable. Dans l'équilibre délicat mis en place, nous avons souhaité que chaque maillon de la chaîne puisse se faire entendre.

La procédure visée par l'amendement ne sera pas systématiquement mise en oeuvre mais son existence confortera la transparence des décisions. J'ajoute que la durée de la consultation ne pourra excéder un mois.

Le cas échéant, l'ARDP demandera l'organisation de cette procédure. Le risque de contentieux ne semble donc pas réel.

M. Jacques Legendre, président de la commission de la culture.  - Je demande au Gouvernement de retirer son amendement.

Le CSMP jouera un rôle majeur dans la production normative. C'est pourquoi nous souhaitons la plus grande transparence. 

M. Frédéric Mitterrand, ministre.  - Dans un souci d'apaisement et de consensus, je retire l'amendement.

L'amendement n°4 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°8, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 41, première phrase

Après le mot :

presse

insérer les mots :

pour avis

M. Frédéric Mitterrand, ministre.  - Lorsque l'autorité de la concurrence communique des saisines à l'autorité de régulation de la distribution de la presse, cette dernière doit formuler un avis sur ces saisines.

M. David Assouline, rapporteur.  - Cette précision est la bienvenue.

L'amendement n°8 est adopté, de même que l'article 4, modifié.

L'article 5 est adopté.

Article 6

M. le président.  - Amendement n°7, présenté par le Gouvernement.

Compléter cet article par les mots :

et au plus tard dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi

M. Frédéric Mitterrand, ministre.  - L'article 11 de la loi du 27 janvier 1987 institue une rémunération ad valorem des agents de la vente.

Vu ses inconvénients, l'amendement dispose que le CSMP adoptera de façon prioritaire un nouveau dispositif de rémunération des agents de la vente.

M. David Assouline, rapporteur.  - Cet amendement a le mérite de faire un geste important vers le niveau 3, le parent pauvre de la chaîne. Donner un délai de six mois permettra de ne pas traîner. Avis favorable.

L'amendement n°7 est adopté, de même que l'article 6, modifié.

Article 7

M. le président.  - Amendement n°11, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

M. Frédéric Mitterrand, ministre.  - Le Gouvernement lève le gage de la proposition de loi.

L'amendement n°11 est adopté etl'article 7 supprimé.

Vote sur l'ensemble

M. Serge Lagauche.  - Opposition et majorité travaillent toujours de façon très constructive au sein de la commission de la culture.

Après Hadopi et le livre numérique, nous en avons un nouvel exemple ce soir. Tout cela va dans le bon sens et correspond à l'intérêt du pays.

M. Ivan Renar.  - On peut être constructif, sans approuver un texte donné. Une réforme était nécessaire, mais pas celle-là.

J'espère que la navette permettra de faire évoluer les choses et que nous pourrons, pour finir, voter ce texte ; ce n'est pas le cas aujourd'hui. Je salue néanmoins l'effort de consensus ... Et ce n'est qu'un au revoir ! (Sourires)

M. Jacques Legendre, président de la commission de la culture.  - Avant le dîner, nous avons adopté les conclusions d'une CMP sur le livre numérique, une première législative mondiale, grâce à une volonté unissant la majorité et l'opposition des deux assemblées.

Ce soir aussi, les principales forces de la majorité et de l'opposition se sont unies pour actualiser la loi Bichet, issue des travaux du CNR. A son propos, j'ai parlé d'une icône.

Que M. Renar marque une divergence au nom de son groupe n'a rien de choquant mais je suis heureux qu'une large majorité soutienne cette rénovation de la loi Bichet. Nous avons accompli notre travail d'élus républicains, et je m'en réjouis profondément.

M. David Assouline, rapporteur.  - Ce texte, bien que très technique, n'est pas anodin : il doit donner au secteur les moyens de réagir face à une situation difficile. Il donne des outils supplémentaires pour sauver le système coopératif malmené par les évolutions économiques.

Il fallait à la fois défendre l'intérêt général, donc la loi Bichet, et nous montrer très ouverts à la concertation, en prenant en compte les positions de chacun des acteurs. J'ai la même volonté que vous, monsieur Renar, de conforter le système. Je comprends mal votre opposition : tous les acteurs nous ont dit que ce texte allait dans le bon sens. J'espère que la navette ira vite. Le Gouvernement peut y aider, il y a urgence. Ce texte nous reviendra de l'Assemblée nationale : j'espère que ce sera l'occasion de le parfaire et d'aboutir au consensus.

La proposition de loi est adoptée.

Prochaine séance mardi 10 mai 2011, à 9 h 30.

La séance est levée à minuit vingt.

René-André Fabre,

Directeur

Direction des comptes rendus analytiques

ORDRE DU JOUR

du mardi 10 mai 2011

Séance publique

A 9 heures 30

1. Questions orales.

A 14 heures 30, le soir et, éventuellement, la nuit

2. Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge (n°361, 2010-2011).

Rapport de Mme Muguette Dini, fait au nom de la commission des affaires sociales (n°487, 2010-2011).

Avis de M. Jean-René Lecerf, fait au nom de la commission des lois (n°477, 2010-2011).