Programmation et gouvernance des finances publiques (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - Nous reprenons l'examen du projet de loi organique relatif à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

Discussion des articles (Suite)

Article 17 A

M. le président.  - Amendement n°66 rectifié, présenté par M. Arthuis.

Après l'alinéa 3

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° Après le 9° du I de l'article 34, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Fixe la variation des engagements correspondant à la dette garantie par l'État, aux baux emphytéotiques et aux contrats de partenariat par lesquels l'État ou un de ses établissements publics confie à un tiers, pour une période déterminée, la gestion ou le financement de biens nécessaires au service public ; ».

M. Jean Arthuis.  - Nous devons compléter l'article 34 de la Lolf, en visant les engagements hors bilan de l'État dans la première partie de la loi de finances : partenariats public-privé et baux emphytéotiques. Vous avez déclaré récemment, monsieur le ministre, qu'après avoir eu le vent en poupe, les partenariats public-privé ont désormais le vent dans le nez et qu'ils sont une façon de masquer l'impécuniosité de l'État, dangereuse à terme.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Cet amendement est légitime, mais est-il approprié de prévoir que ces informations figurent dans un article de la loi de finances ? En outre, aux articles 5 et 14, nous avons déjà abordé cette question. Qu'en pense le Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Avis défavorable.

M. Jean Arthuis.  - Je rappelle que mon amendement a été rectifié.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - La précision est importante mais ne retire rien à mon avis. Cet état récapitulatif n'aurait aucune portée normative.

M. Jean Arthuis.  - Il s'agirait de la variation des engagements de l'année à venir. On a trop recouru à des partenariats public-privé pour dissimuler de la dette et ne pas prendre en compte certains investissements dans le bilan de l'État. Le Parlement doit pouvoir fixer l'enveloppe de variation.

M. Philippe Marini.  - Très bien !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Ces variations que vous voulez agréger seraient de nature très diverse et difficilement agrégeables. Je doute donc que l'information ainsi apportée au Parlement soit très pertinente.

Pour autant, je comprends l'intérêt de l'amendement rectifié et m'en remets à la sagesse.

M. Jean Arthuis.  - Nous pourrons revoir la rédaction d'ici la CMP. J'insiste : le Parlement doit obtenir toutes les informations sur les financements innovants. Il est trop commode pour un gouvernement de se soustraire à l'obligation d'information en recourant à un partenariat public-privé.

M. Jean-Yves Leconte.  - Je partage les préoccupations de M. Arthuis. D'où les amendements déposés par le groupe écologiste. J'avais évoqué l'an dernier la question des partenariats public-privé, largement utilisés dans le budget de la justice pour bâtir des prisons. Ils feront désormais l'objet d'une information du Parlement et du Haut Conseil, c'est déjà une avancée.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Sagesse.

L'amendement n°66 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°38, présenté par Mme Beaufils et les membres du groupe CRC.

Alinéas 8 à 16

Supprimer ces alinéas.

M. Éric Bocquet.  - Amendement de cohérence puisque nous refusons la création du Haut Conseil. Je profite de l'occasion pour évoquer les partenariats public-privé, que nous avons toujours combattus. Il semble que la Mayenne y recoure largement pour les établissements scolaires. Ce n'est pas soutenir l'amendement de M. Arthuis que dire que ces partenariats public-privé sont de véritables bombes à retardement pour les comptes publics.

M. le président.  - Amendement n°11 rectifié, présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales.

Après l'alinéa 13

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

... - La première phrase du deuxième alinéa du II de l'article L. O. 111-3 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigée : 

« Outre l'article liminaire mentionné à l'article 6 de la loi organique n°    du     relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, la loi de financement rectificative comprend deux parties distinctes. »

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Amendement de conséquence.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Défavorable à l'amendement n°38 et favorable à l'amendement n°11 rectifié puisque nous avons voté les amendements de M. Daudigny.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Idem.

L'amendement n°38 n'est pas adopté.

L'amendement n°11 rectifié est adopté.

L'article 17 A, modifié, est adopté.

Article 17 B

M. le président.  - Amendement n°12, présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales.

Alinéa 1

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

I. - L'article 50 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 précitée est ainsi rédigé :

« Art. 50. - En vue de l'examen et du vote du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale de l'année suivante par le Parlement, le Gouvernement présente à l'ouverture de la session ordinaire un rapport sur la situation et les perspectives économiques, sociales et financières de la nation.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Nous précisons que le rapport sur la situation et les perspectives économiques, sociales et financières de la Nation est d'intérêt conjoint pour l'examen du projet de loi de finances et du projet de loi de financement.

M. le président.  - Sous-amendement n°83 à l'amendement n° 12 de M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales, présenté par le Gouvernement.

Amendement n° 12, alinéa 4

1° Remplacer les mots :

à l'ouverture de la session ordinaire

par les mots :

avant le premier mardi d'octobre

2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Il comprend notamment la présentation des hypothèses, des méthodes et des projections sur la base desquels sont établis le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Nous précisons le calendrier.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Favorable à l'amendement et au sous-amendement.

Le sous-amendement n°83 est adopté, ainsi que l'amendement n°12 sous-amendé.

L'article 17 B, modifié, est adopté.

L'article 17 C est adopté.

Article additionnel

M. le président.  - Amendement n°13, présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales.

Après l'article 17 C

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au 3° du B du V de l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale, les mots : « modifiant les règles relatives aux cotisations » sont supprimés.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Il s'agit de réparer une erreur matérielle commise lors de la modification du code de la sécurité sociale par la loi organique du 13 novembre 2010 relative à la gestion de la dette sociale.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - L'expertise de la commission des affaires sociales doit être encouragée : favorable.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°13 est adopté et devient un article additionnel.

Article 17

M. le président.  - Amendement n°39, présenté par Mme Beaufils et les membres du groupe CRC.

Rédiger ainsi cet article :

La présente loi organique s'applique à compter du 1er mars 2013.

M. Éric Bocquet.  - Notre dernière cartouche ! Proposons une date d'application claire et compréhensible par tous, celle retenue comme butoir dans le TSCG.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Le groupe CRC est cohérent, nous aussi. Donc, rejet.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°39 n'est pas adopté.

L'article 17 est adopté.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Je souhaite une suspension de séance de dix minutes pour que le groupe UMP puisse se concerter.

M. le président.  - Soit.

La séance, suspendue à 17 h 45, reprend à 17 h 55.

Interventions sur l'ensemble

M. Richard Yung .  - Après de longs débats, nous avons fait un bon travail en prévoyant la publication des hypothèses d'élasticité et des hypothèses de croissance, mieux pris en compte les dépenses et les soldes de tous les comptes sociaux. C'est un travail de fond, consensuel, ce dont nous nous réjouissons.

Nous avons longuement discuté de la composition du Haut Conseil et avons proposé une mesure révolutionnaire : la parité, sans toutefois en donner le mode d'emploi au Gouvernement. (Sourires)

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - C'est le moins que l'on puisse dire !

M. Richard Yung.  - Le directeur de la FED, M. Greenspan, disait : « Si vous m'avez compris, c'est que je me suis mal exprimé ! » (Rires) Tel est l'état des choses en matière financière. Dans ces conditions, tout notre travail était une longue quête de sincérité.

Une dernière citation ? « Les hommes sont toujours sincères ; ils changent de sincérité, voilà tout ! ». Notre travail devrait faire mentir Tristan Bernard. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. André Gattolin .  - Si le groupe des écologistes était partagé sur le vote du traité, il est unanime à voter cette loi organique qui l'applique. Même si nous avons subi quelques déconvenues, la moitié de nos amendements ont été adoptés.

Une dépossession de la souveraineté nationale ? Je parlerai plutôt d'une dérégalisation de nos institutions. Tout dépendra ensuite de ce que nous ferons de ce texte, des personnalités qui sont nommées au Haut Conseil. Je suis, en tout état de cause, convaincu que c'est dans le cadre de l'Union européenne que la puissance de la France peut s'incarner le mieux. (Applaudissements sur les bancs écologistes et certains bancs socialistes)

Mme Marie-France Beaufils .  - Ce texte fait partie d'un tout, après le traité, et avant la loi de programmation des finances publiques, le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Nous avons voté contre le TSCG et contre le traité constitutionnel en 2005. Nous récusons cette priorité donnée à la maîtrise des comptes publics aux dépens des acquis sociaux. Ce texte sera un nouveau carcan pour le Parlement : nous le rejetons.

M. Philippe Marini .  - Je m'exprimerai à deux titres. D'abord, au nom de l'UMP. Après mûre réflexion et compte tenu de l'excellent climat dans lequel nous avons débattu, nous voterons ce texte. Il résulte du traité européen que nous assumons. Il marque une volonté de réduire les déficits publics dans quoi nous voyons une condition de notre souveraineté nationale. Enfin, ce sera un outil d'intérêt général, un instrument de travail.

M. le ministre a su être à l'écoute. Notre opposition politique est forte et nous le montrerons lors de la discussion des lois financières. Mais nous devons savoir aussi dépasser ces attitudes. La question est trop grave pour se livrer à de petits jeux de politique politicienne quand l'intérêt général est en jeu.

M. Jean-Pierre Raffarin.  - Très bien !

M. Philippe Marini.  - En ma qualité de président de la commission des finances, je salue le rapporteur général et le rapporteur pour avis pour la manière dont ils ont su poser le problème en termes d'intérêt général. Ils ont fait prévaloir la pédagogie sur la méfiance que pouvaient susciter des concepts nouveaux pour les finances publiques.

Merci de ce débat pluraliste qui éclairera les conditions de la mise en place du Haut Conseil. (Applaudissements)

M. Jean-Claude Requier .  - Sans surprise, le groupe RDSE votera ce texte comme il l'a fait pour le TSCG. Notre groupe ne s'embarrasse pas d'explications alambiquées pour justifier des revirements. D'aucuns, qui ont refusé de voter le TSCG, votent cette loi organique qui en résulte. (On réclame des noms, à droite) À croire qu'écologisme rime avec contorsionnisme.

Ce texte renforcera l'information et les prérogatives du Parlement. Nous nous en réjouissons. Il crédibilisera nos engagements européens. Sans crédibilité, pas de confiance et, donc, pas de croissance. Par ce vote positif, la majorité du groupe RDSE -et la totalité des radicaux de gauche- soutient le Gouvernement dans son combat pour la croissance et l'emploi en France et en Europe. (Applaudissements sur les bancs RDSE et socialistes)

M. Jean Desessard.  - Moi, je ne dis pas bravo ! (Sourires)

M. Jean Arthuis .  - La discussion, constructive, ne dissipe pas les réserves que j'ai exprimées en discussion générale. À défaut d'une règle d'or, qui n'était certes pas une garantie absolue, nous aurons un ensemble de dispositions. Cela suffira-t-il à nous guérir de notre addiction bien française à la dépense publique et à l'endettement ? Tout dépendra de la volonté du Gouvernement et de sa majorité.

Tenant compte du geste du Gouvernement sur les partenariats public-privé, le groupe UDI-UC votera ce texte. Ce dernier résulte d'un traité européen, qu'il a soutenu. Je me livre à un acte de confiance. Cette procédure parlementaire peut être un outil bivalent, comme le couteau qui peut être l'instrument du repas familial ou d'un crime.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances .  - Tous les groupes qui ont déposé des amendements en ont vu certains adoptés. Preuve que chacun a apporté sa contribution. Je remercie la commission des finances, son président et tous les intervenants, en particulier le rapporteur pour avis, pour leur grande technicité. Restera à préserver les avancées du Sénat en CMP pour un texte complètement efficace. La loi de programmation, que nous examinerons dès demain, le met en musique. (Applaudissements)

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué .  - Merci au Sénat et aux présidents de ces séances qui se sont déroulées dans d'excellentes conditions. Des amendements importants ont été adoptés à l'initiative de M. Gattolin, de M. Caffet, de M. Daudigny qui a insisté à raison sur une juste prise en compte des finances sociales, et du rapporteur général, bien sûr. M. le président de la commission des finances nous a éclairés, ainsi que M. Arthuis dont le scepticisme, je le souhaite, se dissipera bientôt.

M. le président.  - Le scrutin public sur un projet de loi organique est de droit aux termes de l'article 59 du Règlement. En voici les résultats :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 342
Majorité absolue des suffrages exprimés 172
Pour l'adoption 320
Contre 22

Le Sénat a adopté.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Beau résultat ! (Applaudissements)