SÉANCE

du jeudi 15 novembre 2012

21e séance de la session ordinaire 2012-2013

présidence de M. Jean-Claude Carle,vice-président

Secrétaires : Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, M. Jean Desessard.

La séance est ouverte à 9 h 35.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Financement de la sécurité sociale pour 2013 (Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2013. Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'amendement n°76 tendant à insérer un article additionnel avant l'article 33.

Discussion des articles (Suite)

Article additionnel avant l'article 33

M. le président.  - Amendement n°76, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Avant l'article 33

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre III du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts est complété par une section XXIII ainsi rédigée :

« Section XXIII

« Contribution exceptionnelle sur les bénéfices réalisés par les établissements de santé privés à but lucratif

« Art. 235 ter ZG.  -  I  -  Il est institué à la charge des établissements de santé privés à but lucratif, mentionnés à l'article L. 5123-1 du code de la santé publique, une contribution exceptionnelle sur les bénéfices  qu'ils ont réalisé en 2012.

« Cette contribution est due dès lors que les bénéfices excédent les 100 000 euros et est égal à 2 % de ces derniers.

« II.  -  La contribution est établie, contrôlée et recouvrée comme l'impôt sur les sociétés et sous les mêmes garanties et sanctions.

« III.  -  Le bénéfice de cette contribution est affecté aux centres de santé présentant d'importantes difficultés financières, inscrits sur une liste nationale établie par les représentants des agences régionales de santé. »

Mme Isabelle Pasquet.  - Cet amendement, qui propose d'instaurer une contribution fiscale exceptionnelle à la charge des cliniques commerciales, portant sur leurs bénéfices, n'est pas nouveau. Nous avions envisagé de faire porter cette contribution sur le chiffre d'affaires, mais M. Cahuzac avait jugé cette solution irrecevable. Il convient de taxer les bénéfices des grands groupes privés au bénéfice des centres de santé, qui éprouvent des difficultés financières.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Il n'est pas opportun d'opposer les cliniques privées et les centres de santé. Il est vrai que des groupes financiers ont racheté des cliniques ; un retour à un système plus traditionnel serait bienvenu.

La commission des affaires sociales souhaite le retrait de l'amendement, sinon son rejet.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé.  - Avis défavorable. Les établissements de santé à but lucratif lorsqu'ils font des bénéfices paient l'impôt sur les sociétés et, lorsque leur chiffre d'affaires est supérieur à 250 millions d'euros, une contribution exceptionnelle sur les bénéfices de 5 %.

Une mission a été engagée par le Gouvernement pour préciser le modèle économique des centres de santé, qui devront être confortés dans leurs missions. Attendons ses conclusions.

L'amendement n°76 n'est pas adopté.

Article 33

M. le président.  - Amendement n°210 rectifié, présenté par Mmes Procaccia et Bruguière, MM. Laménie, Milon, Cardoux et Savary, Mme Giudicelli, M. de Raincourt et Mmes Deroche, Cayeux et Debré.

I.  -  Alinéa 6

Remplacer la référence :

aux articles L. 731-30 et

par la référence :

à l'article

II.  -  Alinéa 57, première phrase

Supprimer les mots :

et par le groupement mentionné à l'article L. 731-31 du même code

Mme Catherine Deroche.  - L'article 33 prévoit la mise en place d'une gestion commune par la CCMSA de la trésorerie des organismes de mutualité sociale agricole, y compris de celle du Gamex et organise en conséquence le transfert de la propriété des réserves du Gamex à la CCMSA.

Le Gamex, créé par une loi de 1961, regroupe 17 entreprises d'assurance ; il gère le régime obligatoire de l'assurance maladie des exploitants agricoles. Son existence, au côté de la CCMSA, garantit aux assurés une liberté de choix pour la gestion de leur protection sociale en santé ; la qualité de ses services est reconnue.

Priver le Gamex de ses fonds propres et de sa trésorerie, c'est mettre en cause son fonctionnement, sa gouvernance et sa pérennité. C'est priver les exploitants agricoles de leur liberté de choix. Nous proposons en conséquence que le Gamex conserve la pleine gestion de sa trésorerie et la pleine propriété de ses réserves.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Le Gamex a été créé en 1961 pour gérer les cotisations du régime obligatoire d'assurance maladie des exploitants agricoles ; 6 % des exploitants y sont affiliés. Sa trésorerie ne lui appartient pas, il n'a aucune légitimité à la conserver. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis, pour les mêmes raisons.

L'amendement n°210 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°398, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Après l'alinéa 40

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

15° Le 6° de l'article L. 722-1, le 2° de l'article L. 722-4, le 2° de l'article L. 722-9 et le 2° de l'article L. 731-28 sont abrogés ;

16° Le 1° de l'article L. 722-20 est complété par les mots : « , et salariés des entreprises artisanales rurales n'employant pas plus de deux ouvriers de façon permanente ».

II.  -  Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

... Les dispositions des 15° et 16° du I entrent en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 1er janvier 2014.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Les artisans ruraux sont de façon générale affiliés au régime social des indépendants (RSI) pour l'ensemble des risques. Néanmoins, les artisans ruraux n'employant pas plus de deux salariés de façon permanente paient leurs cotisations famille ainsi que la CSG et la CRDS à la MSA, alors qu'ils paient leurs autres cotisations sociales au RSI.

Cette double affiliation, peu lisible, est source de complexité pour les artisans ruraux comme pour les caisses ; il arrive ainsi que ces artisans se voient réclamer deux fois les cotisations d'allocations familiales, la CSG et la CRDS.

Cet amendement procède à l'affiliation des artisans ruraux n'employant pas plus de deux salariés de façon permanente au RSI pour l'ensemble des risques. Cette solution est soutenue par les représentants de cette profession.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - La commission n'a pas pu examiner cet amendement. Il s'agit d'une mesure de bon sens, qui mettra fin aux difficultés de gestion évoquées par la ministre. Avis favorable à titre personnel.

L'amendement n°398 est adopté.

L'article 33, modifié, est adopté.

Articles additionnels

M. le président.  - Amendement n°77, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Après l'article 33

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au début du premier alinéa de l'article L. 162-1-14-1 du code de la sécurité sociale, les mots : « Peuvent faire » sont remplacés par le mot : « Font ».

Mme Isabelle Pasquet.  - Il importe que toutes les sanctions possibles puissent être prises à l'encontre de professionnels en situation de récidive.

Nous souhaitons que la possibilité d'affichage public des sanctions devienne obligatoire, afin que la « crainte de la honte » incite les professionnels de santé qui ne respectent pas les principes mentionnés dans ce titre à s'y conformer.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Cette nouvelle rédaction n'apporte pas de valeur ajoutée. Les sanctions ne peuvent être automatiques dans ces circonstances. L'avenant 8 à la convention a supprimé la référence au « tact » et à la « mesure » et organisé une nouvelle procédure de sanction, plus efficace. Retrait ou rejet.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Défavorable. L'amendement ne constitue pas une avancée significative. Le dispositif prévu dans la loi HPST n'a pas prospéré parce que le décret d'application n'est pas sorti. Il s'inscrivait dans la politique du précédent gouvernement, qui ne visait pas à limiter les dépassements d'honoraires mais à les faire prendre en charge par les organismes complémentaires.

L'approche de ce gouvernement est tout autre. L'accord qui a été conclu s'appliquera dans quelques semaines ; il vise à lutter contre les dépassements abusifs et à limiter les dépassements non abusifs ; il garantit à 10 millions de nos concitoyens le bénéfice des tarifs de la sécurité sociale.

J'ajoute que cet amendement est un cavalier. Je m'étonne qu'il apparaisse dans la partie des recettes du projet de loi de financement de la sécurité sociale, car il n'aura aucune incidence sur l'équilibre des comptes de la sécurité sociale.

L'amendement n°77 est retiré.

Mme Aline Archimbaud.  - Je retire l'amendement n°282 ; mais il faut poursuivre la réflexion sur la rémunération des médecins.

L'amendement n°282 est retiré.

Article 34

M. Dominique Watrin .  - Cet article permet à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) de fournir au régime des mines des ressources exceptionnelles de 250 millions d'euros, apport bienvenu pour compenser la diminution des crédits de la Caisse des dépôts et consignations. L'avenir du régime minier nous inquiète. La fermeture de structures qui en dépendent menace l'offre de soins ouverte à toute la population du bassin minier. Les centres de santé du régime minier sont totalement gratuits ; cette gratuité est justifiée tant par le fait que les mineurs ont cotisé pendant toute leur vie à un taux supérieur à celui du régime général que par la dangerosité de leur métier.

Le moratoire est bienvenu après le fameux décret d'août 2011 qui prévoyait la disparition du régime en 2013. Une concertation a été engagée. Où en est-on ? Envisagez-vous de prolonger la durée du régime ? Je pense notamment au rétablissement du dispositif dit « 2.2.b » relatif au remboursement de frais de transport, cures et pharmacie. Les assurances données par votre prédécesseur n'ont pas été suivies d'effets, au mépris de la santé des assurés, pour la plupart des retraités usés par des conditions de travail très difficiles et en perte d'autonomie.

M. le président.  - Amendement n°9, présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales.

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

I bis- Au 5° bis de l'article L. 225-1-1 du code de la sécurité sociale, après les mots : « régimes de sécurité sociale », sont insérés les mots: « et fonds » et la référence : « au II de » est remplacée par le mot : « à ».

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Amendement de cohérence rédactionnelle.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Favorable.

L'amendement n°9 est adopté.

L'article 34, modifié, est adopté.

L'article 35 est adopté.

Article 35 bis

M. Jean-Pierre Godefroy .  - L'amendement n°395 rectifié, déposé par le Gouvernement, nous donne entière satisfaction.

L'amendement n°259 rectifié bis est retiré.

Mme Laurence Cohen .  - Cet article est censé simplifier les modalités de versement des cotisations dues sur les indemnités de congés payés, de telle sorte que la logique des articles R. 242-1 et R. 243-6 du code de la sécurité sociale se trouve inversée. Cet article vise-t-il à appliquer au BTP un mécanisme dérogatoire qui risque de compliquer la tâche des gestionnaires ? Nous souhaitons obtenir des précisions de la part du Gouvernement.

M. le président.  - Amendement n°244, présenté par M. Amoudry et les membres du groupe UDI-UC.

Supprimer cet article.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - Notre amendement est satisfait par celui du Gouvernement.

L'amendement n°244 est retiré.

M. le président.  - Amendement identique n°265 rectifié ter, présenté par MM. Gilles, Milon et Cointat, Mlle Joissains, Mmes Deroche et Cayeux, MM. Pinton, Doublet et D. Laurent, Mmes Procaccia et Debré, MM. Dulait, Saugey, Mayet, Leleux, Laménie et B. Fournier, Mme Bruguière et MM. Revet, Houpert, Lefèvre et Chauveau.

M. Bruno Gilles.  - Je fais de même, non sans souhaiter obtenir des éclaircissements sur l'amendement du Gouvernement.

L'amendement n°265 rectifié ter est retiré.

M. le président.  - Amendement n°395 rectifié, présenté par le Gouvernement.

I. - Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

II. - Alinéa 4

1° Première phrase

Remplacer les mots :

des cotisations et contributions sociales

par les mots :

des cotisations et contributions mentionnées aux articles L. 2333-64 et L. 2531-2 du code général des collectivités territoriales ainsi qu'à l'article L. 834-1 du présent code

2° Seconde phrase

Supprimer les mots :

pour chaque profession

III. - Alinéa 5

Supprimer cet alinéa. 

IV. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les conditions de l'extension du mécanisme mis en place par le présent article à l'ensemble des cotisations et contributions sociales, dont le recouvrement est assuré par les organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-4 du code de la sécurité sociale, pour les employeurs affiliés aux caisses de congés payés fait l'objet d'un rapport du Gouvernement au Parlement, remis au plus tard le 1er juillet 2013.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Il s'agit bien de simplifier la gestion des cotisations. Afin de sécuriser la mise en oeuvre de la réforme, le Gouvernement propose de n'appliquer le dispositif, dans un premier temps, qu'au versement transport et aux cotisations au Fonds national d'aide au logement (FNAL) ; un groupe de travail sera ensuite réuni avec les représentants du BTP, qui devra rendre ses conclusions au printemps prochain, afin de traiter l'ensemble des questions techniques posées par le prélèvement à la source de toutes les cotisations concernées. Ce travail donnera lieu à un rapport adressé au Parlement. Cet amendement répond à vos préoccupations et à celles des entreprises du secteur.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - L'amendement du Gouvernement répond en effet aux craintes soulevées par le secteur du BTP.

M. Bruno Gilles.  - Les éclaircissements donnés par la ministre nous satisfont.

L'amendement n°395 rectifié est adopté.

L'article 35 bis, modifié, est adopté.

L'article 35 ter est adopté.

L'article 36 est adopté.

M. le président.  - Je vais mettre aux voix la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Je rappelle que si le Sénat ne l'adopte pas, la quatrième partie sera considérée comme rejetée.

Interventions sur l'ensemble

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales .  - Je remercie l'ensemble des participants à nos débats, riches, passionnés, parfois excessifs mais souvent fructueux. Quel est le sens de notre vote ? Au cours de la discussion, la majorité sénatoriale a su se rassembler sur des articles essentiels : le rétablissement de l'article 14, la taxation de l'huile de palme, le fléchage de la Casa vers les départements, les droits d'accise sur les bières, enfin, où nous avons su faire preuve de responsabilité.

Mme Nathalie Goulet.  - C'est vrai !

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Certaines dispositions ont été votées par des majorités à géométrie variable ; l'opposition sénatoriale a pu en faire approuver avec l'apport de voix de groupes de la majorité ; c'est la loi de la démocratie parlementaire.

Que doit-être notre vote ? Il peut être compris comme l'approbation de la politique fiscale du Gouvernement. La commission considère que la partie recettes de ce projet de loi est conforme aux engagements de la majorité sénatoriale et de son vote l'an dernier. Nous voyons bien que cela ne fait pas l'unanimité. Faut-il transformer ce vote en rejet du texte, alors qu'il nous reste plus de 200 amendements à examiner ? Je le dis avec solennité : ce serait dommage. Il ne s'agit pas de continuer la discussion pour le plaisir, mais la maladie, la famille, la vieillesse, les accidents du travail, le secteur médico-social ne méritent-ils pas un débat approfondi et sérieux ? Tous les groupes politiques n'ont-ils pas des propositions à faire ? Ayons le courage d'éviter un vote tronqué. Laissons l'examen de ce texte fondamental se poursuivre, pour le Sénat, pour notre système de protection sociale, pour les Français. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Éliane Assassi .  - Il ne peut y avoir de renforcement de la sécurité sociale, sans soutien durable à son financement sans mesures justes, solidaires, conformes aux principes fondateurs du Conseil national de la Résistance.

Des mesures positives ont été votées, l'article 11 par exemple. Mais nous regrettons que le Gouvernement ait choisi un financement assis sur la fiscalité plutôt qu'un renforcement des cotisations. La hausse du forfait social va dans le bon sens, mais l'assujettissement de l'intéressement et de la participation à cotisation sociale aurait créé des droits pour les salariés en matière de retraite et incité les employeurs à privilégier les salaires sur des rémunérations individuelles distribuées selon leur bon vouloir.

Le débat entre financement par les cotisations et financement par la fiscalité est essentiel ; il traite du modèle social que nous voulons construire. Si nous sommes tant attachés aux cotisations, c'est qu'elles sont une forme socialisée de salaire, un salaire différé, un prélèvement d'utilité sociale sur des sommes qui, sinon, iraient aux dividendes et à la spéculation. Tandis que la droite dénonce le coût du travail, nous mettons en avant le poids du capital. C'est pourquoi nous proposions une modulation des taux de cotisation en fonction des politiques salariales des entreprises et une contribution sur les dividendes. Le débat a été de qualité, il doit se poursuivre.

La majorité de gauche du Sénat et le Gouvernement pouvaient parvenir à dégager des recettes nouvelles, ne serait-ce qu'en reprenant les dispositions adoptées ici l'an dernier. Nous avons pris acte du vote par cette majorité de notre amendement sur la taxation des parachutes dorés, mais d'autres mesures étaient nécessaires parce que justes, comme l'instauration d'une cotisation patronale sur la part variable des rémunérations des opérateurs de marché ou la suppression des exonérations de charges pour les entreprises qui ne respectent pas l'égalité salariale entre les hommes et les femmes.

D'autres mesures auraient pu se substituer à l'article 16. Nous souhaitons comme vous, madame la ministre, une réforme de la dépendance ; son financement ne peut reposer sur les futurs bénéficiaires. Ce mécanisme d'inspiration assurantielle va au rebours des principes de notre protection sociale. Pourquoi le capital est-il moins soumis à cotisation que les salaires ?

Le débat sur l'huile de palme et la bière a été surréaliste. Le citoyen lambda, qui constaterait que nous y avons passé deux heures et demi -mais seulement une demi-heure sur la taxe des retraités- n'y verrait-il pas quelque indécence ?

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.  - Absolument !

Mme Éliane Assassi.  - Une partie des ressources prévues vient de mesures prises par le gouvernement précédent. Nous sommes encore nombreux à continuer à combattre les franchises médicales, la taxe sur les mutuelles, après avoir été si nombreux, à gauche, à en demander la suppression.

Les choix du Gouvernement ne permettent ni de desserrer l'étau de la crise financière, ni d'augmenter le niveau de la protection sociale des Français. Le groupe CRC prend toutes ses responsabilités. Il n'a d'autre choix que de rejeter cette troisième partie. (Applaudissements sur les bancs CRC ; Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales, applaudit aussi)

M. Alain Milon .  - La quasi-totalité des médecins généralistes n'appliquent pas de dépassements d'honoraires ; 90 à 95 % des spécialistes qui les pratiquent le font avec tact et mesure. Les propos que j'ai entendus me choquent, madame la ministre. Les médecins ne sont pas des escrocs, ils sont là pour soigner la population ; et la plupart d'entre eux appliquent les tarifs opposables. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est construit sur une contrevérité : les hypothèses de croissance du Gouvernement sont irréalistes. La Commission européenne anticipe une croissance de seulement 0,4 % en 2013, au lieu des 0,8 % retenus par le Gouvernement. Pour 2013, elle est aussi moins optimiste que le Gouvernement : 1,2 % contre 2 %. Selon le Commissaire aux affaires économiques et monétaires, les entreprises devront limiter leurs créations d'emplois pour maintenir leur profitabilité ; tandis que le chômage et les hausses d'impôt pèseront sur le pouvoir d'achat des ménages.

Ce texte est caractérisé par une avalanche de taxes qui touche tous les Français comme les entreprises. Il va ralentir l'activité et aggraver la situation de l'emploi. Je pense à l'article 11, qui va coûter 1 milliard aux commerçants et artisans -un gisement d'emplois non délocalisables- à l'article 15, qui pénalisera les classes moyennes, à l'article 20 ou encore au matraquage des entreprises du médicament.

Vous avez été élus sur la promesse de ne pas augmenter la TVA et, six mois plus tard, vous faites l'inverse. Vous refusez toute réforme structurelle. La logique de la TVA sociale que vous avez tant décriée était inverse. L'augmentation des taxes et le démantèlement des dispositifs existants ne font pas une stratégie de sauvegarde de notre système de protection sociale.

Le groupe UMP votera contre le volet recettes du projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Gérard Roche .  - L'acte parlementaire que nous nous apprêtons à poser n'est pas anodin. Il n'est pas question de condamner par principe l'augmentation des recettes : quel que soit le gouvernement aux affaires, elle sera critiquée. Mais nous regrettons l'absence de mesures d'économies et l'insuffisance de mesures éco-environnementales.

Le sort de ce texte s'est joué sur l'article 16 qui crée la Casa : c'est de la prise en charge de la dépendance qu'il est question. Le bilan de l'APA est excellent. Le seul problème, c'est son financement, véritable serpent de mer ; après la création de la journée de la solidarité, de la CNSA, il reste entier et les départements sont exsangues ; il faudra à l'évidence y revenir. Ma proposition de loi a été adoptée le 25 octobre, j'en remercie les groupes qui ont rendu possible ce vote positif, malgré l'avis du Gouvernement et l'opposition du groupe socialiste. Même scénario avant-hier sur l'article 16. Le Gouvernement fait fausse route. Voilà trois ans que nous travaillons tous ensemble au sein de l'ADF pour trouver une solution ; ma proposition de loi comme mon amendement à l'article 16 sont dans la droite ligne de ce travail. Il ne s'agit pas de défendre les départements mais l'excellence sociale de l'APA. Votre comportement m'a déçu. J'ai mal vécu cet abandon. Alors que la majorité n'est pas assurée, on laisse entendre que ma proposition de loi pourrait prospérer... Pourquoi ouvrir maintenant les discussions que vous avez refusées naguère ? Vous auriez pu montrer votre volonté de sauver l'APA. Faites ce qu'il faut, maintenant ! Ne reportez pas les solutions à 2014 ou 2015. Il faut agir, comme l'a dit M. Le Menn.

La grande majorité du groupe UDI-UC, 28 sur 32, votera contre les recettes du projet de loi de financement de la sécurité sociale 2013. (Applaudissements sur les bancs UDI-UC)

M. Jacky Le Menn .  - Le vote est joué, semble-t-il. Mais ce projet de loi de financement de la sécurité sociale s'inscrit dans la recherche de l'intérêt général pour tous nos citoyens ; il renforce la protection des Français ; il contribue à redresser les comptes sociaux et modernise notre système de santé.

Le redressement des comptes sociaux est une ardente obligation. Mes chers collègues de l'ex-majorité, vous nous avez laissé une situation catastrophique.

M. Henri de Raincourt.  - Encore !

Mme Éliane Assassi.  - Eh oui !

M. Jacky Le Menn.  - Nous avançons des solutions fortes pour aller de l'avant.

M. Charles Revet.  - Vous reculez plutôt !

M. Jacky Le Menn.  - 4,6 milliards d'euros en plus...

M. Henri de Raincourt.  - Par les impôts !

M. Jacky Le Menn.  - ...1,9 milliard pour l'hôpital, 650 millions pour le secteur médico-social, ce n'est pas rien !

Il me revient en mémoire le débat sur la loi HPST ; on nous promettait monts et merveilles : on a vu ce que cela a donné ! Il fallait supprimer la convergence tarifaire entre secteurs public et privé qui était une catastrophe ; il fallait prendre des mesures d'économies raisonnées et raisonnables, mais pas au détriment des malades. J'ai un grand regret pour le corps médical, mais aussi pour les malades...

M. Jean-Claude Lenoir.  - Ce n'est guère original !

M. Jacky Le Menn.  - Sur la Casa, nous ne partageons pas votre sentiment, chers collègues du groupe CRC. Nos propositions s'inscrivent dans notre volonté commune de prendre en charge nos concitoyens les plus âgés et les plus vulnérables.

Toutes les conditions étaient sur la table depuis des années pour résoudre le problème de la prise en charge de la dépendance. Une multitude de rapports ont été produits -du Cese, au président de la République, de l'Assemblée nationale dont celui qui proposait la suppression du GIR 4 ! Le problème est celui du financement : les propositions du Gouvernement sont raisonnables. Les financements doivent être trouvés, là où ils sont, dès 2013. Des garanties ont été apportées : ceux qui ne payent pas d'impôts seront exonérés de cotisation. La solidarité doit jouer. Je suis moi-même retraité : cela ne me gêne pas de contribuer, pour autant que les agents de mon hôpital, par exemple, sont épargnés... (Exclamations sur les bancs CRC)

Il n'y a pas de recette miracle : il faut avoir le courage de trancher.

Pendant trois jours on a tout entendu et certains confondaient défense de l'emploi et santé publique. J'ai retiré tous mes amendements en faisant confiance au précédent gouvernement quand il nous a annoncé une grande loi de santé publique : on l'attend toujours.

Mme Catherine Procaccia.  - On verra la vôtre !

M. Jacky Le Menn.  - Le courage est du côté de ce Gouvernement qui présentera cette loi et l'on verra alors qui défend l'intérêt général Oui, c'est la gauche qui présentera cette loi. N'allez pas nous donner de leçons, à droite !

M. Charles Revet.  - Nous en avons à donner !

Mme Catherine Procaccia.  - On en reparlera !

M. Jacky Le Menn.   - Nous sommes fiers de voter ce budget au service des Français. (Applaudissements sur les bancs socialistes et du RDSE)

M. Jean-Marie Vanlerenberghe .  - Ce texte manque de l'essentiel : le calendrier de retour à l'équilibre. Il ne peut nous convenir. Pourtant, nous ne faisions aucun procès d'intention. La fameuse anaphore de François Hollande pendant la campagne annonçait un changement d'attitude. Hélas, les mêmes défauts qu'hier se répètent aujourd'hui : les ministres arrivent toujours bardés de certitudes, mais sans aucune marge de manoeuvre financière. Comment le Parlement peut-il exister dans ces circonstances ? Les amendements, s'ils proviennent de l'opposition, seront vite invalidés par la CMP, quand ils ne sont pas retoqués d'emblée...

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.  - Ce n'est pas nouveau !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - Au non que nous n'avons cessé de vous opposer, nous répondons, à notre tour, par un non. (Applaudissements au centre et sur quelques bancs à droite)

Mme Aline Archimbaud .  - Ce débat fut riche. Merci à notre rapporteur général pour sa démarche positive.

M. Didier Guillaume.  - Il le mérite !

Mme Aline Archimbaud.  - Le groupe écologiste votera cette troisième partie. Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale de transition ne remet en cause aucune prestation. Il met un terme, enfin, à la convergence tarifaire qui asphyxiait l'hôpital public, qui assume des missions de formation et de recherche et qui accueille 24 heures sur 24 tous les patients, ce qui a un coût, à assumer. Le remboursement de l'IVG à 100 % est également à saluer.

Nous nous félicitons du rétablissement, ici, de l'article 14. Le Sénat s'est aussi prononcé en faveur de la santé environnementale, en votant la taxation de l'huile de palme et de l'aspartame, dangereux pour la santé, décision qui mérite autre chose que des remarques ironiques. Dans l'attente de la loi de santé publique, ces mesures donnent un signal en direction d'une politique de prévention, essentielle en matière de santé publique. Et ces mesures répondent à l'impérative nécessité de rétablir les comptes sociaux. (Applaudissements sur les bancs socialistes et du RDSE)

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis de la commission des finances .  - Malgré ses imperfections, je considère avec mon groupe, que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale courageux répond à l'intérêt général. Notre protection sociale est malade de sa dette, accumulée au cours des dix années de gouvernements de droite : 160 milliards d'euros, dont 130 milliards transférés à la Cades, donc aux générations futures ! Il n'est pas extravagant que ce gouvernement s'attaque aux déficits, et inscrive notre protection sociale dans l'impératif de rétablissement des comptes publics de notre pays. Sans maîtrise -et c'est une tentation d'une part de la droite- le système va exploser, et la porte sera ouverte à la privatisation de pans entiers de l'assurance maladie. (Applaudissements sur les bancs socialistes) Le Gouvernement prend les mesures nécessaires pour l'empêcher.

Mme Éliane Assassi.  - C'est sa responsabilité !

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis.  - À l'issue de ce débat, nous sortons avec 800 ou 900 millions de recettes en moins ! On ne peut continuer ainsi. La droite a systématiquement refusé les articles de rééquilibrage, comme l'article 11, alors que le conseil d'administration du régime social des indépendants avait accepté ces mesures, justes, qui mettaient fin à une injustice invraisemblable. Nous ne faisons pas suffisamment, dites-vous ? Mais vous avez tout fait pour contrer nos mesures en ce sens ! Avons-nous décidé des déremboursements, comme les précédents gouvernements ?

M. Didier Guillaume et M. Jacky Le Menn.  - Non !

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis.  - De nouvelles franchises médicales ?

M. Didier Guillaume et M. Jacky Le Menn.  - Non !

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis.  - Au contraire, l'Ondam à 2,7 %, ce sont 350 millions d'euros de plus, dont 150 pour les investissements hospitaliers.

Oui, il faudra un débat de fond sur les ressources de la protection sociale, qui portent à 80 % sur les revenus d'activité. Était-il dont extravagant d'instaurer la Casa pour que certains retraités -ceux qui sont assujettis à la CSG- participent au financement de la dépendance ? Je regrette que nous ne puissions mener ces débats en abordant la quatrième partie.

Je rends hommage à notre rapporteur général, pour sa compétence et sa constance. Nous aussi, nous prenons nos responsabilités. (Applaudissements sur les bancs socialistes et du RDSE)

M. Robert Tropeano .  - En ce contexte de crise, le texte amorce le redressement des comptes sociaux, en rupture avec la politique irresponsable du gouvernement précédent. Nous sommes favorables à l'équilibre de ce texte et nous réjouissons du sort favorable réservé à cinq de nos amendements.

Nous avons supprimé l'article 15, qui n'aurait pas renforcé les droits sociaux des salariés. Nous nous félicitons du compromis sur la bière et du signal envoyé sur les boissons énergisantes.

Le RDSE votera dans sa très grande majorité cette troisième partie. (Applaudissements sur les bancs socialistes et du RDSE)

Mme Marisol Touraine, ministre .  - Il flotte ici comme un parfum de fin de débat... Je remercie le rapporteur général pour son travail et son engagement. J'espère que nos concitoyens seront mieux éclairés sur nos choix.

M. Charles Revet.  - Nous aussi !

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même si j'en doute...

Puissent les Français s'y retrouver ! Car que restera-t-il de ce débat, puisque nous n'allons pas le poursuivre ?

Pour nous, il est décisif de s'inscrire dans la perspective d'une trajectoire de rétablissement des comptes publics. Nous voulons, au terme de la mandature, avoir rétabli l'équilibre des comptes sociaux.

M. Charles Revet.  - Nous aussi !

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Faute de quoi c'est le privé qui prendra le relais.

Nos hypothèses financières, monsieur Milon, sont crédibles, sincères, et toute notre politique va à faire en sorte que la croissance soit au rendez-vous -ainsi du pacte de compétitivité. Elle va aussi à mettre en place des réformes structurelles -c'était l'objet de la quatrième partie- pour consolider les retraites, conforter l'hôpital public en le réorientant sur des tâches centrales grâce à la réhabilitation de la médecine de proximité. Nous étendons les droits des femmes, engageons une réforme ambitieuse pour accompagner la perte de l'autonomie.

Je ne laisserai pas dire certaines contrevérités. Les revenus du capital ne seraient pas mis à contribution ? Je le conteste.

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis.  - Très bien. (Mme Éliane Assassi s'exclame)

Mme Marisol Touraine, ministre.  - De même, certains nous opposent que nous asseyons le financement sur l'impôt plutôt que sur les cotisations. Mais cela a toujours été le cas. Une part repose sur l'impôt au nom de la solidarité, comme la CMU. Nous ne remettons pas en cause l'équilibre d'ensemble entre mesures fiscales et cotisations. Il reviendra au Haut conseil de définir ce que doit être cet équilibre à l'avenir, mais ce texte ne préjuge pas de ses conclusions.

On peut être opposé à la cotisation exceptionnelle sur les revenus des retraites. Pour moi, j'estime qu'elle est juste et équilibrée. Elle engage, par un acte de solidarité intergénérationnelle, la réforme de la dépendance.

Nous n'allons pas calibrer le cadre financier de cette réforme sur le produit de la contribution, comme je l'ai entendu dire. La seule chose que ce texte définisse, c'est la volonté d'aller vers un financement solidaire de l'autonomie.

Quant au reste à charge, ce nous est une priorité. Nous avons encouragé la signature d'un accord sur les dépassements d'honoraires. Il faudra aller au-delà. Mais on ne peut, eu égard au contexte, être au front sur tous les terrains, supprimer d'un coup les franchises. Il faudra que le rétablissement des comptes soit au rendez-vous pour aller plus loin...

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis.  - Très bien ! (Mme Éliane Assassi s'exclame)

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Merci aux groupes socialiste et écologiste d'avoir souligné que ce texte est de justice et de protection. Il étend les droits de nos concitoyens. Nous assumons nos responsabilités et continueront inébranlablement. (Applaudissements sur les bancs socialistes, écologistes et du RDSE)

La troisième partie du projet de loi est mise aux voix par scrutin public de droit.

M. le président. - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 341
Majorité absolue des suffrages exprimés 171
Pour l'adoption 155
Contre 186

Le Sénat n'a pas adopté.

M. le président.  - La troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale ayant été rejetée, la quatrième partie est considérée comme rejetée.

L'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale est mis aux voix par scrutin public de droit.

M. le président. - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 346
Nombre de suffrages exprimés 342
Majorité absolue des suffrages exprimés 172
Pour l'adoption 156
Contre 186

Le Sénat n'a pas adopté.

L'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale est rejeté.

La séance est suspendue à 11 h 15.

présidence de M. Jean-Pierre Bel

La séance reprend à 15 heures.