Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat, sur le site Internet du Sénat et sur Facebook.

Au nom du Bureau du Sénat, j'appelle chacun de vous, mes chers collègues, à observer au cours de nos échanges l'une des valeurs essentielles du Sénat : le respect des uns et des autres, ainsi que le temps pour permettre à chaque collègue de bénéficier de la diffusion complète de sa question et de la réponse.

Violences à Gaza (I)

M. Hervé Marseille .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Il y a soixante-dix ans, David Ben Gourion proclamait la création de l'État d'Israël. Pour ceux qui avaient adhéré au projet d'un « État des Juifs » formulé cinquante ans auparavant par Théodore Herzl, pour ceux qui avaient échappé à la Shoah, c'était un immense espoir, une délivrance et un accomplissement.

Au lieu de cela, nous voyons depuis hier des images difficiles, des morts par dizaines, des blessés par milliers au moment même de l'inauguration de l'ambassade des États-Unis à Jérusalem, des tirs de missiles et de contre missiles dans le ciel syrien. Après avoir reçu Benyamin Netanyahou et le prince héritier saoudien, le président de la République a rencontré Donald Trump. Le président de la République a sans doute été écouté mais pas entendu ; car depuis, Donald Trump a additionné provocation, décision unilatérale et menaces. La parole européenne sera-t-elle plus audible ?

Monsieur le Premier ministre, quelles initiatives la France peut-elle engager pour que cette région tourmentée retrouve le chemin de la paix ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UC ; M. Jean-Marc Gabouty applaudit également.)

M. Édouard Philippe, Premier ministre .  - La journée d'hier à Gaza a été la plus meurtrière depuis 2014, avec 60 morts et plus de 2 700 blessés.

La France condamne ces violences sans ambiguïté. Car si nous sommes attachés à la sécurité d'Israël, nous ne saurions accepter une telle violence face au droit des Palestiniens de manifester pacifiquement. La politique de la France est connue, ancienne. Elle a pour objectif deux États, Israël et la Palestine, avec Jérusalem pour capitale commune et des frontières reconnues. C'est ce que dit le droit.

Le président de la République et le ministre des affaires étrangères ont multiplié les contacts. Le président de la République souhaite discuter avec l'ensemble des parties pour faire prévaloir la ligne du droit, seule durable. Le Conseil européen qui doit s'ouvrir ce soir à Sofia sera l'occasion de rappeler cette ligne.

Les événements d'hier ont été provoqués par la décision américaine de déplacer l'ambassade américaine de Tel Aviv à Jérusalem. Nous sommes en désaccord sur le fond, la méthode, l'opportunité. Cette décision n'apporte rien à la construction d'une solution durable.

Ce qui doit prévaloir, c'est le multilatéralisme et une ligne politique prévisible et ferme. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; MM. Philippe Bonnecarrère, Olivier Cadic et Jean-Pierre Sueur applaudissent également.)

Violences à Gaza (II)

M. Bernard Cazeau .  - Plusieurs dizaines de milliers de Palestiniens ont manifesté hier contre le transfert de l'ambassade américaine à Jérusalem.

Le bilan publié ce matin par les autorités palestiniennes est terrible : 52 morts, 2 408 blessés. Nous sommes au bord du gouffre. Il est urgent d'éviter l'escalade. Il y a tout à craindre d'une radicalisation et d'une contagion du conflit.

Nous savons que la France soutient la cause des Palestiniens mais aussi le droit d'Israël à la sécurité.

La France a condamné le transfert de l'ambassade américaine et insisté pour que les manifestations demeurent pacifiques. Lorsque la sérénité sera revenue, il faudra redonner vie au processus de paix.

Quelles initiatives le Gouvernement envisage-t-il ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; M. Jean-Marc Gabouty applaudit également.)

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères .  - Veuillez excuser M. Le Drian, qui est à Bruxelles à une réunion avec M. Zarif, le ministre des affaires étrangères iranien.

S'agissant des heurts et drames d'hier, M. le Premier ministre a rappelé la position de la France, qui est en désaccord avec la décision du président Trump. Notre désaccord porte sur le fond puisque Jérusalem a vocation à devenir la capitale de deux États - non d'un seul, sur la forme, puisque cette décision a été unilatérale, et sur l'opportunité, car cette décision intervient alors que les crises se multiplient dans cette région du monde.

La France est en contact permanent avec le roi de Jordanie, le Premier ministre israélien, pour redire notre désapprobation quant à l'usage disproportionné de la force.

Il y a des urgences, avant les solutions à long terme : la crise humanitaire à Gaza, qui nécessite de lever les blocus, et d'assurer la sécurité d'Israël. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; M. Loïc Hervé applaudit également.)

SAMU de Strasbourg

Mme Véronique Guillotin .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE ; M. Jean-François Husson applaudit aussi.) Madame la Ministre de la santé, vous avez réuni hier les représentants des médecins urgentistes pour lancer une concertation sur les moyens d'améliorer la régulation des appels d'urgence et des soins - ceci à la suite du décès de Naomi Musenga, fin décembre à Strasbourg, dont nous connaissons tous les circonstances dramatiques.

Les médecins et assistants du SAMU traitent jusqu'à 700 appels par jour, d'une manière exemplaire dans l'immense majorité des cas. C'est parce que leur mission est primordiale, que nous devons moderniser ce service pour améliorer la prise en charge des patients.

Une formation diplômante des assistants de régulation comme le préconise le rapport de Laurence Cohen et René-Paul Savary, la création d'un numéro unique, une optimisation des moyens : telles peuvent être les pistes de réflexion.

Madame la Ministre, que ferez-vous pour améliorer ce service d'urgence ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé .  - L'événement dramatique de Strasbourg a révélé des dysfonctionnements dans les SAMU - même s'ils traitent 25 millions d'appels par an avec grande efficacité. Après m'être entretenue avec la famille de Naomi Musenga, j'ai lancé une mission de l'IGAS pour faire toute la lumière sur cet événement très grave. Le rapport sera livré à la justice et remis à la famille. J'ai convoqué les médecins urgentistes pour définir un plan d'action : une formation diplômante, un travail sur les procédures, une amélioration de l'assurance-qualité sont les points à améliorer.

Nous avions commandité un rapport conjoint de l'IGAS et de l'IGA en janvier dernier sur le numéro unique. Il doit nous être remis à l'été. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Violences à Gaza (III)

Mme Christine Prunaud .  - Je suis satisfaite que mes collègues aient déjà consacré du temps aux violences en Palestine. Quelque 59 morts, 2 400 blessés, voilà l'effroyable issue des manifestations d'hier à Gaza. La révolte du peuple de Palestine, des pierres contre des armes, est justifiée par rapport à toutes les provocations de l'État israélien. Provocations alimentées par les États-Unis, avec l'installation de leur ambassade à Jérusalem.

Un simple appel à la retenue et une simple condamnation des violences ne suffisent pas, Monsieur le Premier ministre. La communauté internationale, l'Europe, la France, doivent sanctionner lourdement l'État israélien, qui reste impuni.

Monsieur le Premier ministre, Vous avez dénoncé le transfert de l'ambassade, c'est très bien. Il faut maintenant agir contre les actions de l'État israélien. Il faut mettre les jeunes palestiniens sous protection de l'ONU, abroger le blocus de Gaza et enfin reconnaître l'État palestinien. Cette reconnaissance n'est pas que symbolique, mais aussi politique. Elle demande du courage. Quelle est votre position ? (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et sur quelques bancs du groupe SOCR)

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères .  - Il faut du courage et de la ténacité. Car depuis des décennies, la solution trouvée dans le droit, ne parvient pas à être appliquée sur le terrain. Le droit pose des principes à travers les résolutions de l'ONU qui doivent entrer en pleine vigueur.

Nous avons condamné fermement l'usage disproportionné de la force, Madame la sénatrice. Rien ne justifie ce niveau de violence. Il faut prendre notre bâton de pèlerin, de sagesse et de paix, pour parvenir à une solution face à une désespérance qui conduit à la révolte. Hier, le Sénat accueillait 25 leaders pour la paix : nous avons besoin de chacun d'eux pour porter la parole de paix, qui est celle de la France ! (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Rapport Oxfam

M. Claude Raynal .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Monsieur le Ministre des finances, Oxfam a publié ce lundi un rapport pointant les absurdités du capitalisme financier : entre 2009 et 2016, les entreprises du CAC40 ont versé 67,6 % de leurs bénéfices aux actionnaires, contre 33 % au tournant du siècle. Ces chiffres placent la France au premier rang pour l'importance des dividendes, qui augmentent plus que les salaires et les investissements. Par le passé, nous avions cherché à calquer la fiscalité des dividendes sur les revenus du travail.

M. Philippe Dallier.  - Avec un franc succès !

M. Claude Raynal.  - Vous faites l'inverse, en favorisant toujours plus les dividendes, que vous faites sortir de l'ISF, ou encore avec votre prélèvement forfaitaire unique et avec la fin de l'exit tax !

Nous avons vu que vous saviez libéraliser. Mais pour ce qui est de protéger les salariés, nous attendons.

Sortirez-vous de votre fascination pour le modèle libéral anglo-saxon, le capitalisme financier au profit du modèle allemand de long terme, qui encourage l'investissement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR ; M. Éric Bocquet applaudit également.)

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances .  - Je n'ai de fascination que pour le modèle français, de rémunération du travail et du risque. (M. le Premier ministre approuve.)

Si la rémunération des dividendes est si élevée en France, c'est que l'actionnariat national ne suffit pas, et parce que nous sommes obligés de faire appel à des actionnaires étrangers qui demandent davantage.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Vous avez tout vendu ! Arrêtez de privatiser !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - L'Insee dit le contraire d'Oxfam : la rémunération du travail a été plus importante que celle des dividendes. Choisissez vos références ! Moi, je préfère l'Insee ! (Exclamations à gauche) Nous soutenons l'intéressement des salariés, en supprimant le forfait social, que vous aviez augmenté ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, UC et Les Républicains)

Vous avez augmenté les cotisations, nous les diminuons - encore une fois, dans l'intérêt des salariés ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et LaREM)

Conséquences du retrait américain de l'accord nucléaire pour les entreprises françaises en Iran

M. Emmanuel Capus .  - Donald Trump a annoncé mardi dernier le retrait des États-Unis de l'accord de Vienne et menacé de sanctions prohibitives les entreprises qui continueraient de travailler en Iran. Cette menace constitue une atteinte directe à nos intérêts nationaux.

Nos entreprises font déjà suffisamment les frais de l'extraterritorialité américaine : BNP Paribas, Alstom, Total, le Crédit agricole... Depuis 2008, les entreprises européennes ont payé 20 milliards de dollars d'amendes à la justice américaine. Nos PME et TPE sont menacées.

Benjamin Constant disait qu'il vaut mieux souffrir de l'oppression de ses ennemis que de rougir des excès de ses alliés. (Marques d'ironie à droite) Les États-Unis sont nos alliés, mais cela ne veut pas dire que nous devons tout accepter. Que comptez-vous faire ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Indépendants, RDSE et UC ; quelques applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Loïc Hervé.  - Très bien !

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances .  - Vous avez parfaitement raison : les sanctions américaines sont inacceptables. Contraires au principe de libre concurrence, elles touchent aux intérêts économiques de la France et des Européens. Nous avons pris l'initiative avec Jean-Yves Le Drian et Jean-Baptiste Lemoyne de recevoir toutes les entreprises françaises implantées en Iran.

Je me suis entretenu avec le secrétaire au Trésor américain pour lui demander des exceptions et des délais supplémentaires, ainsi que le respect des contrats signés de bonne foi entre les entreprises françaises et l'Iran.

La Commission européenne doit oeuvrer à inclure l'Iran dans le règlement de 1996 ; elle doit créer une institution financière indépendante qui garantisse aux Européens un droit d'agir économiquement partout où ils le veulent (Applaudissements des bancs du groupe LaREM jusqu'à ceux du groupe UC) et soit capable de faire respecter les règles européennes sur toute la planète.

Que veut l'Europe ? Avec le président de la République, le Premier ministre et le Gouvernement, nous défendrons la souveraineté économique européenne. (Applaudissements depuis les bancs des groupes LaREM et RDSE jusqu'à la droite)

Terrorisme

Mme Jacqueline Eustache-Brinio .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Dimanche, la barbarie islamiste a volé la vie d'un jeune homme de 29 ans. L'horreur se répète, et les belles phrases. Un philosophe a parlé de « sidération virtuelle ». L'accoutumance à l'horreur nous guette, qui est pire que l'horreur ! Les réponses, techniques, existent : la police et le renseignement. La qualité du travail des forces de l'ordre doit être saluée. Nous devons aussi réarmer moralement et culturellement notre pays.

Nous ne gagnerons la guerre contre l'islam politique et radical que si nous défendons toujours et partout les valeurs républicaines. Nous ne réglerons pas la question du terrorisme islamiste si nous ne désignons pas clairement les causes et racines du mal, si nous n'intervenons pas dans certains quartiers pour imposer partout les valeurs de la République.

Il est urgent de lutter fermement contre une certaine police de la pensée qui entrave notre liberté et conduit certains esprits vers l'islam radical.

N'est-il pas temps, pour la France, de déclarer l'état d'urgence culturel et moral ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur .  - Oui, samedi dernier, la barbarie a encore frappé. Elle a tué un jeune homme de 29 ans et fait plusieurs blessés. Sans la réaction rapide de nos policiers, en moins de neuf minutes, nous aurions déploré plus de morts et de blessés. Je leur rends hommage et je signale en particulier l'action décisive de ce jeune gardien de la paix, qui était il y a peu adjoint de sécurité.

Oui, il faut combattre l'islamisme, en faisant en sorte qu'il n'y ait pas dans nos grandes villes d'un côté des quartiers aisés qui prospèrent, de l'autre des quartiers pauvres qui se ghettoïsent.

À force de vivre côte à côte, on risque de vivre face à face. D'où la nécessité, en complément de l'action policière, de l'action culturelle, de la bataille intellectuelle, que nous gagnerons tous ensemble. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Les Indépendants et RDSE)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - C'est l'islam radical qui cherche à imposer sa loi. Pour gagner cette bataille, il faut d'abord le nommer. Pourquoi le président de la République ne l'a-t-il pas fait, dans sa réaction twittée après l'attentat ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Fonds d'urgence pour les abeilles

M. Joël Labbé .  - Monsieur le Ministre de l'agriculture, il y a dix jours, j'étais à l'arrivée d'un convoi mortuaire à Rennes pour alerter sur les pertes de ruches qui se comptent par milliers : 20 000 colonies en Bretagne ; 3 000 en Dordogne, 1 000 en Charente. Cela représente 400 euros par ruche. Imaginez la détresse des apiculteurs ! La mortalité est liée au modèle agricole intensif.

Quelles aides prévoyez-vous pour reconstituer les cheptels ?

Quelles mesures mettrez-vous en place pour accélérer la mutation de notre agriculture ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE, LaREM)

M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation .  - Les apiculteurs bretons ont en effet alerté sur une dégradation - même si les services de l'État ne le corroborent pas. (MM. Ronan Dantec et Joël Labbé s'exclament.) La situation sanitaire est préoccupante. En 2017, l'État a mis en place en pilote en Bretagne et en Pays de la Loire un observatoire de la mortalité et des affaiblissements des abeilles mellifères, l'Omaa, qui appréhende les facteurs de risques. Les apiculteurs sont invités à déclarer les pertes au guichet unique ainsi créé, ce qui déclenchera une visite vétérinaire. Les résultats de la première année de fonctionnement de cet observatoire seront présentés au dernier trimestre 2018.

En France, la révision du dispositif de surveillance de la mortalité des abeilles est engagée depuis plusieurs années. Le 25 avril dernier, le Gouvernement a présenté un plan d'action sur les insectes pollinisateurs.

M. Joël Labbé.  - Derrière les abeilles, il y a tous les pollinisateurs, les insectes, les oiseaux, les vers de terre, le sol, la vie même !

Il faut remettre en cause les pratiques. Les études, il y en a beaucoup, dont une récente du CNRS et du Muséum national d'histoire naturelle qui fait clairement le lien avec les pratiques agricoles.

Nous espérons des réponses concrètes. (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE, CRCE, SOCR et sur quelques bancs des groupes Les Républicains et UC)

Situation du fret

M. Pierre Cuypers .  - La grève des cheminots impacte des secteurs entiers de l'activité nationale. Le potentiel des nuisances de cette grève pour nos entreprises est inacceptable. La France perd des marchés notamment de céréales - secteur qui représente 450 000 emplois, 70 000 tonnes et 9 milliards d'euros de balance commerciale. Les entreprises doivent trouver des modes de transport alternatifs.

Le pire est à venir. Les récoltes de juillet risquent d'engorger les silos déjà saturés.

Je vous demande de mettre en place un service minimum de fret en cas de grève et d'autoriser exceptionnellement la circulation des camions le dimanche. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Éliane Assassi.  - Ben voyons ! Où est la sécurité ?

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - J'ai à plusieurs reprises souligné le caractère pénalisant pour les voyageurs du mouvement social à la SNCF. L'on parle moins des conséquences, qui sont réelles, sur les activités économiques et agricoles en particulier, mais aussi industrielles, notamment dans la sidérurgie ou la construction.

Les jours de grève, un tiers des trains circulent ; pas notre fret, deux jours de grève, c'est une semaine de perdu dans ce secteur. J'ai demandé aux préfets de signaler les situations les plus critiques et d'accorder une autorisation de circulation des poids lourds le dimanche, dans les cas nécessaires.

Les organisations syndicales plaident avec raison pour le fret ferroviaire, au regard de la lutte contre le changement climatique, ou de la sécurité routière : un train, c'est 50 camions en moins. Mais chacun doit prendre ses responsabilités. Il y a un paradoxe à plaider la relance du fret ferroviaire tout en le fragilisant. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; M. Pierre Laurent proteste.)

M. Pierre Cuypers.  - Votre réponse ne suffit pas. Des mesures urgentes s'imposent. Agriculteurs et industriels attendent des décisions immédiates pour remédier à la faiblesse de ce qui était un fleuron de notre économie.

M. le président.  - Concluez !

M. Pierre Cuypers.  - N'ajoutez pas une crise à la crise ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Organisation de la semaine scolaire

Mme Frédérique Puissat .  - Par décret du 27 juin 2017, vous avez autorisé les adaptations à la semaine de quatre jours. Les élus avaient un an pour s'y atteler. Ils tombent de leur chaise, en découvrant les décisions de vos services. Nonobstant celles des conseils municipaux et conseils d'écoles s'appuyant sur la consultation des parents, nonobstant les enjeux territoriaux, nous assistons à une cacophonie locale avec des élus et des parents désemparés : sur un même territoire, il y aura des écoles à quatre jours et d'autres à quatre jours et demi. Certains parents d'élèves ont même signalé un regroupement, pédagogique où la maternelle fonctionne sur quatre jours et l'élémentaire sur quatre jours et demi.

Les élus écopent d'une double peine : des charges budgétaires qu'ils n'avaient pas prévues avec une baisse des dotations de l'État qui est aujourd'hui une évidence et que nous ne cesserons de rappeler !

Dès lors qu'un décideur-payeur n'aura pas été écouté, cette double peine persistera. Comment l'État assumera-t-il la charge décidée par ses seuls soins ? Quid de la cohérence éducative ? Pourquoi ne pas davantage associer les élus, qui sont les principaux porte-parole de la cohérence des territoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale .  - Votre présentation des choses me surprend. Je n'attendais pas qu'on me reproche sur les bancs du groupe Les Républicains de laisser de la liberté aux acteurs locaux.

M. François Grosdidier.  - Et le financement !

M. Jean-Michel Blanquer, ministre.  - Les enquêtes de satisfaction, qui dépassent 80 % sur cette mesure, ont montré que 40 % des communes ont fait un choix de la semaine des quatre jours et que 30 % à 40 % le feront à la rentrée prochaine.

Nous avons conforté ce qui fonctionnait et changé ce qui ne marchait pas. Vous citez le cas d'une maternelle à quatre jours et d'une élémentaire à quatre jours et demi. Ce choix relève de la communauté éducative quand il y a un consensus local. Il ne s'agit pas d'une contrainte, mais d'une souplesse. En l'occurrence, la Dasen a décidé de relancer une consultation. C'est une mesure de liberté plébiscitée par les acteurs de terrain.

Mme Frédérique Puissat.  - C'est une pseudo-liberté. Vous faites le choix délibéré de ne pas assumer le choix de la semaine à quatre jours et demi. Le conseil d'école ne détient pas seul la vérité. Écoutez plutôt les élus ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Finances des collectivités territoriales

M. Yannick Botrel .  - Lors d'une intervention récente, à l'occasion de sa visite à Berd'huis, le président de la République a déclaré que le montant des dotations aux collectivités territoriales se maintiendrait en 2018, notamment pour les communes.

Aux dires des maires, la Dotation de solidarité rurale (DSR) subit une érosion, voire une chute sensible, sans explication claire. Les communes n'ont pas vu leur situation changer, dans les Côtes-d'Armor en tout cas.

Au sein des nouvelles intercommunalités, les communes les plus pauvres sont ponctionnées quand les plus riches gagnent. (M. Jean-Pierre Sueur le confirme.)

M. Martial Bourquin.  - C'est la vérité !

M. Yannick Botrel.  - L'on constate qu'au plus haut niveau des services de l'État, on ne communique pas les éléments qui permettraient de comprendre le mécanisme d'évolution des dotations en jeu.

Madame la Ministre, êtes-vous déterminée à ce que la plus grande clarté soit faite ? Quelles corrections sont envisageables pour éviter des redistributions qui ne sont pas souhaitables, pour une DSR plus équitable ? Il en va de la crédibilité de la parole de l'État. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur .  - Dans la Dotation globale de fonctionnement (DGF), il y a une part forfaitaire et une part péréquatrice. La part péréquatrice représente la moitié du montant de la DGF. Le Gouvernement a choisi de la renforcer - avec plus de 200 millions d'euros en 2018. La DSR augmente de 80 millions d'euros. Elle est répartie en fonction de certains critères. On enregistre donc des sorties et des entrées.

Certaines communes ayant dépassé le seuil de 10 000 habitants sont sorties du dispositif, comme Luçon ou Lamballe, par exemple. Elle peut profiter de la Dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU) si elle a des quartiers relevant de la politique de la ville. Le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) a aussi été maintenu au même montant que les années précédentes. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; exclamations sur les bancs du groupe SOCR ; protestations sur les bancs du groupe CRCE)

Classement en zone de catastrophe naturelle

Mme Évelyne Perrot .  - Le dimanche 29 avril, l'Aube a été frappée par une tempête très intense qui a touché plus de 140 maisons et détruit une entreprise, ce qui laisse 60 personnes au chômage technique.

Les communes les plus sinistrées ont demandé la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle prévu par la loi du 13 juillet 1982. Elles ne l'ont pas obtenu, le préfet arguant que la vitesse du vent observé - 115 kilomètres-heure était en deçà de celle qui permet de le déclencher, soit 145 kilomètres-heure.

En 1999, la France a été touchée par une grande tempête. Ce sont désormais des mini tornades d'une violence inouïe qui sévissent, en un temps très bref. La vitesse des vents au centre de la tornade n'a pas été mesurée mais elle peut atteindre des pointes à 215 kilomètres-heure. Ne faudrait-il pas revoir les critères de classement en catastrophe naturelle ? Que ferez-vous dans le cas d'espèce ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur .  - Les dégâts provoqués par le vent ne sont pris en compte dans le cadre de l'état de catastrophe naturelle que lorsqu'ils dépassent 145 kilomètres-heure. C'est dans le code des assurances. Cela n'a pas été le cas dans l'Aube le 29 avril dernier d'après la préfecture.

Les particuliers et entreprises sinistrés seront indemnisés par leurs assurances dans le cadre de la garantie dite TNG (tempête, neige, grêle), obligatoire en France métropolitaine, pour leurs dommages dus à des vents dépassant 100 kilomètres-heure.

Les entreprises dont les activités ont été perturbées et qui bénéficient d'une garantie perte d'exploitation seront aussi indemnisées par leur assurance. (M. François Patriat applaudit.)

La séance est suspendue à 17 h 50.

présidence de M. Philippe Dallier, vice-président

La séance reprend à 18 h 5.