SÉANCE

du vendredi 23 novembre 2018

25e séance de la session ordinaire 2018-2019

présidence de M. Thani Mohamed Soilihi, vice-président

Secrétaires : Mme Annie Guillemot, M. Michel Raison.

La séance est ouverte à 14 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Projet de loi de finances pour 2019 (Suite)

M. le président.  - Nous reprenons la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2019, adopté par l'Assemblée nationale.

Demande de réserve

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics .  - En application de l'article 4 alinéa 6 du Règlement du Sénat, le Gouvernement demande que soient examinés le lundi 26 novembre après-midi, lors de l'examen des articles 4, 5 et 6 d'ores et déjà réservés, les amendements nos793, 725, 590 rectifié, 792 rectifié et 725 rectifié.

M. Vincent Éblé, président de la commission des finances .  - L'ensemble a sa cohérence, la commission des finances ne s'y oppose pas.

M. le président.  - Il en est ainsi décidé.

Discussion des articles de la première partie (Suite)

L'article premier est adopté.

ARTICLE 2

M. Éric Bocquet .  - Rendez-vous incontournable, nous allons parler barème et progressivité de l'impôt.

Nous pensons que l'impôt sur le revenu, présumé le plus juste de nos impôts, n'occupe pas une place suffisante dans l'architecture des prélèvements obligatoires. Il faut le réhabiliter et lui donner une vraie progressivité - en vertu du principe selon lequel chacun contribue en fonction de ses capacités  - pour en accroître le rendement et alléger la taxation indirecte de la consommation qui pénalise les plus modestes.

Le pari économique du Gouvernement est perverti par le trop vif appétit des marchés financiers et boursiers en matière d'intérêts bancaires et de dividendes.

En 1986, l'impôt sur le revenu comptait quatorze tranches, avec un taux maximal de 65 %. Aujourd'hui, il y a cinq tranches. Cela a-t-il amélioré le solde budgétaire et rendu l'impôt plus efficace ?

M. le président.  - Amendement n°I-668, présenté par MM. Delahaye, Marseille, Laugier et Lafon, Mme Vullien, MM. Janssens et Henno, Mme Billon, M. Longeot, Mme Goy-Chavent, M. Cigolotti, Mme Gatel, M. Médevielle, Mmes Guidez et Morin-Desailly, M. Détraigne, Mme C. Fournier et M. Mizzon.

I.  -  Alinéas 4 à 8

Remplacer ces alinéas par sept alinéas ainsi rédigés :

a) Le 1 est ainsi rédigé :

« 1. L'impôt est calculé en appliquant à la fraction de chaque part de revenu le taux de :

« 1 % pour la fraction inférieure à 9 964 € ;

« 10 % pour la fraction supérieure à 9 964 € et inférieure ou égale à 27 519 € ;

« 28 % pour la fraction supérieure à 27 519 € et inférieure ou égale à 73 779 € ;

« 41 % pour la fraction supérieure à 73 779 € et inférieure ou égale à 156 244 € ;

« 45 % pour la fraction supérieure à 156 244 €. » ;

II.  -  Alinéa 15

Rédiger ainsi cet alinéa :

c) Le a du 4 est abrogé ;

III.  -  Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  Les articles 62, 80 quinquies, le 6° du 1 de l'article 80 duodecies, les 2° , 2° bis, 7° , 8° , 9° ter, 14° , 14° bis, 17° , 19° ter, 24° , 29° et 37° de l'article 81, 81 bis, le troisième alinéa du 3° de l'article 83, les articles 92 A, 125 A, le III de l'article 150 U, les a et c du II de l'article 155 B, le 5° du II de l'article 156, les 6° , 9° bis et 19° de l'article 157, le dernier alinéa du III de l'article 182 A, le f du 1 et le 6 de l'article 195, le 3 du I de l'article 197, les articles 199 quater F, 199 decies E, 199 decies EA, 199 decies F, 199 decies G, 199 undecies A, le VI ter de l'article 199 terdecies-0 A, les articles 199 quindecies, 199 vicies A, 200 quater A, 200 terdecies, 200 quaterdecies du code général des impôts sont abrogés.

IV.  - Pour compenser la perte de recettes résultant des I à III, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Annick Billon.  - Se basant sur une étude de l'IFOP, cet amendement universalise l'impôt sur le revenu en remplaçant le taux zéro par un taux symbolique à 1 %. Peut-on parler de consentement à l'impôt quand seuls 43 % des foyers fiscaux payent l'impôt sur le revenu ? Cette concentration a été accentuée sous François Hollande qui a supprimé, par démagogie, la première tranche à 5,5 %.

L'amendement baisse par ailleurs respectivement de quatre et deux points les deuxième et troisième taux du barème, afin d'alléger le fardeau supporté par les classes moyennes.

Cet abattement serait financé à hauteur de 6 milliards d'euros par la suppression de certaines des 187 niches fiscales qui représentent au total 33,3 milliards d'euros, soit la moitié du produit de l'impôt sur le revenu. Seraient abrogées les seules niches jugées inefficaces par l'IGF.

La justice fiscale et la lisibilité sont au coeur des préoccupations de nos concitoyens. Cet amendement renoue avec l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, selon lequel « une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ».

M. le président.  - Amendement n°I-672, présenté par MM. Delahaye, Marseille, Laugier et Lafon, Mme Vullien, MM. Janssens et Henno, Mme Billon, M. Longeot, Mme Goy-Chavent, M. Cigolotti, Mme Gatel, M. Médevielle, Mmes Guidez et Morin-Desailly, M. Détraigne, Mme C. Fournier et M. Mizzon.

I.  -  Alinéas 4 à 8

Remplacer ces alinéas par sept alinéas ainsi rédigés :

a) Le 1 est ainsi rédigé :

« 1. L'impôt est calculé en appliquant à la fraction de chaque part de revenu le taux de :

«  -  1 % pour la fraction inférieure à 10 000 € ;

«  -  10 % pour la fraction supérieure à 10 000 € et inférieure ou égale à 25 000 € ;

«  -  28 % pour la fraction supérieure à 25 000 € et inférieure ou égale à 75 000 € ;

«  -  41 % pour la fraction supérieure à 75 000 € et inférieure ou égale à 150 000 € ;

«  -  45 % pour la fraction supérieure à 150 000 €. » ;

II.  -  Alinéa 15

Rédiger ainsi cet alinéa :

c) Le a du 4 est abrogé ;

III. -  Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Annick Billon.  - Cet amendement ne propose pas l'abrogation des niches mais simplifie le barème pour le rendre plus lisible.

M. le président.  - Amendement n°I-445, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Alinéas 4 à 8

Remplacer ces alinéas par dix alinéas ainsi rédigés :

a) Le 1 est ainsi rédigé :

« 1. L'impôt est calculé en appliquant à la fraction de chaque part de revenu qui excède 9 807 € le taux de :

« 8 % pour la fraction supérieure à 9 964 € et inférieure ou égale à 12 878 € ;

« 12 % pour la fraction supérieure à 12 878 € et inférieure ou égale à 19 002 € ;

« 16 % pour la fraction supérieure à 19002 € et inférieure ou égale à 27 519 € ;

« 22 % pour la fraction supérieure à 27 519 € et inférieure ou égale à 46 223 € ;

« 30 % pour la fraction supérieure à 46 223 € et inférieure ou égale à 73 779 € ;

« 40 % pour la fraction supérieure à 73 779 € et inférieure ou égale à 112 990 € ;

« 45 % pour la fraction supérieure à 112 990 € et inférieure ou égale à 156 243 € ;

« 50 % pour la fraction supérieure à 156 243 €. » ;

II.  -  Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par le relèvement du taux de l'impôt sur les sociétés et de l'imposition des plus - values des entreprises.

M. Pascal Savoldelli.  - Le défaut de l'impôt sur le revenu réside dans une assiette trop réduite, à la différence de la CSG, ce qui rend déterminante la question du taux marginal. La flat tax a donné une priorité aux revenus autres que ceux du travail. Il faut conserver coûte que coûte le principe constitutionnel selon chacun contribue aux charges publiques à proportion de ses facultés.

Il faut donc renforcer la progressivité et rééquilibrer le traitement de la matière fiscale, c'est-à-dire réhabiliter les vertus de l'impôt. La tranche à 30 % recouvre des situations très différentes. Les recettes supplémentaires pourraient à terme éviter à la France les travers de l'austérité.

M. le président.  - Amendement n°I-336, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 8

Remplacer le montant :

156 244 €

par le montant :

154 244 €

M. Claude Raynal.  - Notre groupe juge socialement injuste la sous-revalorisation à 0,3 % seulement des retraites, allocations familiales et aides au logement et propose d'indexer ces prestations à hauteur de l'inflation. Pour financer cette ré-indexation, nous revalorisons de seulement 0,3 % - et non de 1,6 % comme c'est le cas pour les trois autres seuils - le seuil de la tranche à 45 % du barème de l'impôt sur le revenu.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances.  - Chaque année, nous avons le même débat. Je suis déçu que manque le traditionnel amendement du RDSE à la mémoire de Joseph Caillaux, tendant à rendre l'impôt sur le revenu universel. (Sourires)

M. Philippe Dallier.  - Le centenaire est passé !

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Je pourrais y souscrire, d'ailleurs. En 2016, 20 % des foyers fiscaux ont payé 83,4 % de l'impôt : c'est dire s'il est hyper-concentré. Rajouter des tranches ou revaloriser les plus hautes, comme le propose le groupe socialiste, ne ferait qu'accroître cette hyper-concentration. Entre 2012 et 2016, les deux derniers déciles ont vu leur imposition augmenter de 10 milliards d'euros.

Nous souhaitons garder à l'impôt sur le revenu son caractère progressif mais aussi aider les classes moyennes, principales victimes de la politique fiscale du précédent gouvernement, par la revalorisation du quotient familial.

Avis défavorable à l'amendement n°I-668, qui supprimerait 37 niches d'un coup. Certaines concernent des sujets sensibles, soyons prudents !

Avis défavorable à l'amendement n°I-672, trop coûteux et qui ne tient pas avec le prélèvement à la source.

Avis défavorable à l'amendement n°I-445 qui augmente la concentration ; on se souvient de la tranche à 75 %, qui n'a rien rapporté mais a fait fuir les contribuables.

Même avis sur l'amendement n°I-336.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Avis défavorable aux quatre amendements. Le barème de l'impôt sur le revenu a connu de nombreuses modifications ces dernières années. La stabilité s'impose.

M. Michel Canevet.  - Le groupe UC a souhaité faire partager ses préoccupations quant au consentement à l'impôt sur le revenu, sachant qu'il est acquitté par moins de la moitié des ménages. Il est important que chacun sache que les services apportés à la population ont un coût.

Les classes moyennes ont le sentiment d'être accablées d'impôts et de taxes. Notre amendement allège leur imposition.

Enfin, vu la situation budgétaire de l'État, nous limitons les niches fiscales pour rendre le dispositif plus juste et plus lisible. Espérons que le Gouvernement étudiera ces pistes : il y va du sentiment d'appartenance à la Nation.

M. Julien Bargeton.  - C'est un débat ancien : qui contribue et à quel niveau ? Il n'y a pas que l'impôt sur le revenu qui finance les services publics : avec la TVA, la CSG, sans parler des taxes sur l'essence et le diesel, toutes les couches de la population contribuent.

L'idée que chacun contribue symboliquement sur ses revenus est séduisante. Mais, pour les personnes vivant des minima sociaux, cela supposerait d'abord d'augmenter ces derniers pour leur permettre de le faire ! Le débat mérite d'être pris sous un angle plus large.

Mme Annick Billon.  - Il s'agit d'un amendement d'appel. Avec deux avis négatifs, je doute qu'il prospère, mais nous le maintenons.

M. Roger Karoutchi.  - Monsieur Bargeton, je ne partage pas votre appréciation.

M. Julien Bargeton.  - C'est bien !

M. Roger Karoutchi.  - C'est normal : le « en même temps » n'est pas constant !

L'assujettissement à la TVA n'est pas comparable à l'impôt sur le revenu. Quand vous payez la TVA sur l'achat d'un lave-linge, vous n'avez pas le sentiment de contribuer aux services publics : cela fait simplement partie du prix. (Sourires)

M. Julien Bargeton.  - Et le diesel ?

M. Roger Karoutchi.  - Je ne suis pas sûr qu'on ait l'impression de contribuer à autre chose qu'à un racket fiscal ! (Sourires) Je voterai cet amendement car je crois qu'il vaut mieux, en effet, augmenter les minima sociaux plutôt que de laisser leurs bénéficiaires hors de l'impôt sur le revenu.

M. Julien Bargeton.  - Et le coût administratif ?

M. Roger Karoutchi.  - Cela éviterait que quiconque se sente culpabilisé de ne pas contribuer.

M. Pascal Savoldelli.  - Oui, 20 % de gens paient 83 % de l'impôt sur le revenu. On peut s'en émouvoir, mais il faut assumer les choix politiques et économiques : suppression de l'ISF pour 3,3 milliards d'euros, inversion du rapport entre l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés... Qui paie ? Point de larmes de crocodile sur le sort des hauts contributeurs à l'impôt sur le revenu, de grâce ! Tout le monde paie la CSG, la CRDS, la TVA. Nous avions proposé d'exempter de TVA les couches ou protections périodiques, sans succès... C'est un impôt qui fait mal aux plus modestes.

M. Marc Laménie.  - Il faut simplifier les niches fiscales, qui sont trop nombreuses. L'amendement n°I-668 répond à cet objectif. La première recette fiscale est la TVA, mais l'impôt sur le revenu représente, de mémoire, 86,9 milliards d'euros. C'est une recette particulièrement importante.

Les personnes assujetties à cet impôt témoignent de leur solidarité financière. L'enjeu est important. Même si je comprends les arguments de la commission des finances, à titre personnel, je voterai l'amendement n°I-668.

M. Claude Raynal.  - Je croyais que le principe d'un amendement d'appel était de le retirer, une fois qu'on avait eu le débat... Je suis étonné qu'il soit maintenu.

L'idée de faire contribuer tout un chacun s'entend - mais nous serions alors contraints d'augmenter les prestations sociales. Ce petit impôt suffirait à peine à couvrir le coût administratif de son traitement.

M. Julien Bargeton.  - Exact !

M. Claude Raynal.  - Sans compter qu'il faudrait modifier en cascade pléthore de mesures sociales réservées aux personnes non imposables ! Soyons raisonnables.

M. Emmanuel Capus.  - Le groupe CRCE nous a répété à l'envi qu'il fallait réhabiliter l'impôt, lui rendre ses lettres de noblesse. Pour cela, il faudrait qu'il soit payé par plus de 43 % des contribuables ! Que le fait d'être non-imposable ouvre des droits supplémentaires renforce encore l'inégalité. Il n'est pas incohérent, dans ces conditions, de rendre l'impôt universel.

M. Jean-Marc Gabouty.  - Que M. le rapporteur général se rassure, la volonté du groupe RDSE reste intacte. L'amendement Caillaux est absent car le passage au prélèvement à la source rendait sa mise en oeuvre un peu compliquée en cette année de transition.

La démonstration de M. Bargeton se tient, mais attention à ne pas confondre impôt sur le revenu et taxes. Si l'on vous demande combien vous payez d'impôt, vous ne répondez pas que vous payez la TVA !

M. Julien Bargeton.  - La CSG est un impôt.

M. Jean-Marc Gabouty.  - L'impôt sur le revenu est le seul dont l'utilisation n'est pas fléchée. La TICPE va à la transition énergétique...

M. Philippe Dallier.  - Non, c'est bien le problème !

M. Jean-Marc Gabouty.  - Une partie au moins. Une partie de la TVA va aux régions... L'impôt sur le revenu est généraliste et universel. Je soutiens l'amendement du groupe UC.

M. Julien Bargeton.  - Pour une fois, nous ne sommes pas d'accord !

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Le groupe centriste a dit que l'amendement n°I-668 était d'appel. Je suis incapable d'en chiffrer les conséquences. Vous proposez de supprimer X niches fiscales : c'est sympathique, mais certaines bénéficient à des personnes handicapées, à des orphelins... Soyons sérieux.

Je vous demande de ne pas voter cet amendement à l'aveugle. Le débat est nécessaire, nous l'aurons, mais pas de cette façon.

M. Éric Bocquet.  - En 2000, le produit de l'impôt sur les sociétés était de 40 milliards d'euros ; en 2009, de 37 milliards ; en 2019, il sera de 31,5 milliards d'euros. Celui de l'impôt sur le revenu était de 51 milliards en 2000, de 50 milliards en 2009 et sera en 2019 de 70 milliards. Dans le même temps, le PIB est passé de 1 485 milliards en 2000 à 2 291,7 milliards en 2017, soit une augmentation de 54 %.

M. Bruno Retailleau.  - Nous suivrons l'avis défavorable du rapporteur général. On ne peut traiter un problème aussi lourd au détour d'un amendement. Mais je remercie nos collègues centristes de nous rappeler l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

En France, l'impôt est très concentré - en témoignent les insurrections fiscales. C'est la même chose avec la suppression de la taxe d'habitation : attention à ne pas laisser croire que rien ne se paye, même ce qui paraît gratuit !

M. Vincent Capo-Canellas.  - Je n'ai pas cosigné cet amendement, porté par des membres éminents de mon groupe. Nous partageons l'idée que chacun doit contribuer à raison de ses facultés, nous déplorons la concentration de l'impôt et mesurons que les classes moyennes ont le sentiment d'être surfiscalisées. Mais l'enfer est pavé de bonnes intentions. Augmenter les minima sociaux pour permettre une contribution des plus modestes gonflerait les dépenses publiques. Je m'abstiendrai.

L'amendement n°I-668 n'est pas adopté, non plus que les amendements nosI-672, I-445 et I-336.

M. le président.  - Amendement n°I-446, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéas 9 à 14

Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :

b) Le 2 du I de l'article 197 est ainsi rédigé :

« 2. La réduction d'impôt résultant de l'application du quotient familial ne peut excéder 1 735 € par demi-part ou la moitié de cette somme par quart de part s'ajoutant à une part pour les contribuables célibataires, divorcés, veufs ou soumis à l'imposition distincte prévue au 4 de l'article 6 et à deux parts pour les contribuables mariés soumis à une imposition commune.

« Toutefois, pour les contribuables célibataires, divorcés, ou soumis à l'imposition distincte prévue au 4 de l'article 6 qui répondent aux conditions fixées au II de l'article 194, la réduction d'impôt correspondant à la part accordée au titre du premier enfant à charge est limitée à 3 675 € Lorsque les contribuables entretiennent uniquement des enfants dont la charge est réputée également partagée entre l'un et l'autre des parents, la réduction d'impôt correspondant à la demi-part accordée au titre de chacun des deux premiers enfants est limitée à la moitié de cette somme. » ;

M. Éric Bocquet.  - Nous avançons vers une réforme fiscale plus structurelle avec l'abandon du caractère déclaratif de la fiscalité française et du quotient familial. Ce dernier, qui ne s'applique pas pour la CSG et la CRDS, ne représente pas la même chose pour tout le monde.

Plus de 4 millions de foyers fiscaux bénéficient d'une demi-part amoindrie, 200 000 du quotient dit conjugal et 9 millions de ménages, souvent non imposables, ont des enfants.

Nous proposons de traiter de la même façon les personnes élevant des enfants, qu'ils vivent seuls ou en couple.

M. le président.  - Amendement n°I-905, présenté par MM. Retailleau, Allizard, Bas, Bascher et Bazin, Mme A.M. Bertrand, M. Bizet, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bonne, Mme Bories, M. Bouchet, Mme Bruguière, MM. Buffet, Calvet et Cambon, Mme Canayer, MM. Cardoux, Chaize, Charon et Chatillon, Mme Chauvin, M. Chevrollier, Mme de Cidrac, MM. Courtial, Cuypers, Dallier et Danesi, Mme L. Darcos, M. Darnaud, Mme Delmont-Koropoulis, M. del Picchia, Mmes Deroche, Deromedi, Deseyne et Di Folco, M. Dufaut, Mme Dumas, M. Duplomb, Mmes Estrosi Sassone et Eustache-Brinio, MM. B. Fournier et Frassa, Mme Garriaud-Maylam, M. Genest, Mme F. Gerbaud, MM. Gilles et Ginesta, Mme Gruny, MM. Guené, Houpert, Hugonet, Huré et Husson, Mmes Imbert et M. Jourda, M. Karoutchi, Mme Keller, MM. Kennel et Laménie, Mmes Lanfranchi Dorgal, Lassarade et Lavarde, MM. Lefèvre, de Legge, Le Gleut, Leleux, H. Leroy et Longuet, Mme Lopez, M. Magras, Mme Malet, M. Mayet, Mme M. Mercier, MM. Milon, Morisset, Mouiller, de Nicolaÿ, Nougein, Piednoir, Pillet, Pointereau et Poniatowski, Mmes Primas, Procaccia et Raimond-Pavero, MM. Rapin, Regnard, Revet, Savary, Schmitz, Sido et Sol, Mmes Thomas et Troendlé et MM. Vaspart et Vogel.

I.  -  Alinéa 10

Remplacer le montant :

1 551 €

par le montant :

1 750 €

II.  -  Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Philippe Dallier.  - Les familles ont été des cibles privilégiées sous le précédent quinquennat : elles ont été frappées par deux fois, en 2013 et 2014, par la réduction du quotient familial et le plafonnement des allocations familiales.

Sous l'actuel Gouvernement, la situation n'est guère meilleure.

Cet amendement relève le plafond du quotient familial de 1 551 euros à 1 750 euros par demi-part. Certes, il coûte 550 millions d'euros, mais nous pouvons faire ce geste envers les familles.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Chaque année, la majorité sénatoriale vote la revalorisation du quotient familial. Victimes de la politique fiscale de François Hollande, les familles ne sont guère mieux traitées dans le nouveau monde : le PLFSS a ainsi omis de revaloriser les prestations familiales... Nous commençons à voir les effets négatifs de cette politique.

Avis favorable à l'amendement n°I-905 et défavorable à l'amendement I-446.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Avis défavorable à l'amendement n°I-446 pour les raisons que chacun imagine. Défavorable également à l'amendement n°I-905. Nous avons revalorisé le barème de 1,6 %, soit le montant de l'inflation. Le plafonnement du quotient familial permet des économies qui servent à financer d'autres prestations.

M. Philippe Dallier.  - On avait compris !

M. Bruno Retailleau.  - Nous voterons l'amendement n°I-905. La baisse des naissances a atteint un record l'année dernière. La politique familiale a été méthodiquement détricotée : la désindexation et le plafonnement du quotient familial font suite à la casse du caractère universel des allocations familiales. C'est stupide ! Va-t-on refuser à quelqu'un le remboursement de soins au motif qu'il est trop riche ?

La politique familiale n'est ni de droite ni de gauche. Elle commence avec le Front populaire et s'ancre dans le Conseil national de la résistance, avec une forte impulsion gaulliste.

M. Éric Bocquet.  - C'est vrai.

M. Bruno Retailleau.  - C'était un patrimoine commun, un élément du pacte républicain. Notre modèle de retraites par répartition nous impose de préserver un certain équilibre entre actifs et inactifs : en 2050 il y aura 1,2 actif pour un retraité. La politique familiale est une politique d'investissement pour l'avenir. C'est une politique sociale ! Or les familles, comme les retraités et bien d'autres catégories de Français, sont aujourd'hui les grands perdants de la politique d'Emmanuel Macron. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Éric Bocquet.  - Le Gouvernement a émis un avis défavorable à notre amendement « pour les raisons que chacun imagine ». Je n'arrive pas à les imaginer... Quelles sont-elles ? (Rires)

M. Roger Karoutchi.  - La politique familiale a en réalité commencé en 1910, en même temps que les retraites ouvrières et paysannes. Question de puissance démographique, pour assurer l'avenir du pays ! Léon Blum a réaffirmé le caractère universel des allocations familiales. À la Libération, on a encore préservé la politique familiale. Pendant quarante ans, nous avons été fiers de notre taux de natalité qui nous permettait de rattraper l'Allemagne, de préserver nos retraites. Et voilà qu'on se met à tout détricoter, plafonnant quotient familial et allocations... C'est une politique de gribouille !

L'avenir du pays doit primer sur les équilibres financiers à court terme. Pour notre démographie, nos retraites, notre équilibre sociétal, nous avons besoin d'une politique familiale vigoureuse. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ; M. Alain Cazabonne applaudit également.)

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Monsieur Bocquet, ce que vous proposez va contre l'indexation du barème, qui permet de neutraliser les effets de l'inflation. En outre, diverses mesures, dont le plafonnement, ont amélioré la progressivité du quotient familial.

L'amendement n°I-446 n'est pas adopté.

L'amendement n°I-905 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°I-447, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéas 16 à 91

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

II. - L'article 60 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 est abrogé.

M. Pascal Savoldelli.  - Cet amendement abroge le prélèvement à la source. Nous allons le retirer.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Dommage !

M. Pascal Savoldelli.  - La place du quotient familial dans la détermination de l'impôt sur le revenu va poser problème. L'administration fiscale a d'ailleurs demandé aux contribuables de choisir leur taux, ce n'est pas un hasard.

En 2013, Bercy prédisait un impact fiscal élevé du prélèvement à la source sur les ménages modestes et moyens.

Nombre de salariés et retraités ne seront plus imposables, privant l'État de 12 milliards d'euros de recettes. Entre montée en charge de la CSG et prélèvement à la source, il y a un danger. Attention aux mouvements instinctifs, au recul de la démocratie. Il y a une petite affaire entre l'impôt sur le revenu et la CSG, entre financement de la Sécurité sociale et plan de financement de la Nation... Dites-nous les choses à l'avance, jouons cartes sur table.

Il faudra aider les collectivités territoriales. Il va falloir être aux côtés de nos concitoyens lorsqu'ils recevront leur feuille de paye de janvier.

L'amendement n°I-447 est retiré.

L'article 2, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°I-1002, présenté par MM. Gabouty, Castelli et Corbisez, Mme N. Delattre, M. Gold, Mme Jouve et MM. Menonville et Requier.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 4 bis du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Les sportifs de nationalité française, retenus en sélection nationale dans le cadre officiel d'une compétition internationale, ayant ou non leur domicile fiscal en France sauf s'ils bénéficient d'une convention internationale relative aux doubles impositions. »

M. Jean-Marc Gabouty.  - Les sportifs de haut niveau sélectionnés en équipe de France inspirent admiration et reconnaissance et représentent souvent un modèle pour les jeunes. Ils doivent donc avoir un comportement exemplaire, y compris en termes de fiscalité. Ils bénéficient déjà d'un régime spécial, avec retenue à la source et étalement sur quatre ans des primes exceptionnelles.

Il ne s'agit pas d'alourdir les contraintes mais de s'assurer que ceux qui représentent la France sont en règle, de sélectionner en équipe de France un sportif qui a son domicile fiscal en Suisse. C'est un amendement plus moral que fiscal.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Je comprends l'intention. Mais cet amendement pose un problème, car il retient le critère de la nationalité et non de la résidence pour l'impôt. Je ne suis pas sûr que cela soit compatible avec nos conventions fiscales. Retrait ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Retrait. Imposer sur la base d'un critère de nationalité est contradictoire avec les règles fiscales internationales, qui reposent sur la territorialité. C'est le domicile fiscal qui compte, et une personne résidant à l'étranger ne peut être imposée que sur ses revenus d'origine française.

Votre mesure serait rendue inopérante par les conventions fiscales internationales.

M. Éric Bocquet.  - Je salue le civisme fiscal du joueur de football N'Golo Kanté, qui joue en Angleterre, à Chelsea, et qui a refusé qu'une partie de sa rémunération soit versée depuis un trust de Jersey. Je voterai cet amendement.

M. Jean-Marc Gabouty.  - Monsieur le ministre, cet amendement ne contrevient nullement aux conventions internationales ni aux règles fiscales. Les États-Unis poursuivent sous des prétextes divers des personnes qui ont quitté les États-Unis depuis des décennies. Je ne change aucune règle fiscale, j'aménage les règles de sélection en équipe nationale.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Les États-Unis sont le seul partenaire économique de la France à appliquer un critère de nationalité. Je le répète, votre amendement est inopérant. Avis défavorable.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Sagesse.

L'amendement n°I-1002 est adopté et devient un article additionnel.

M. Éric Bocquet.  - Très bien !

M. le président.  - Amendement n°I-988, présenté par MM. Requier, Arnell, Artano, A. Bertrand, Castelli et Collin, Mme N. Delattre, M. Gabouty, Mmes Jouve et Laborde et MM. Menonville, Mézard, Roux et Vall.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  L'article 80 undecies B du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« ...  -  Par dérogation au I du présent article, les indemnités de fonction des élus, tous mandats locaux confondus, sont exonérées d'impôt sur le revenu dans la limite d'un plafond égal à trois fois l'indemnité de maire de commune de moins de cinq cents habitants. »

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Yvon Collin.  - Cet amendement va recueillir une très large unanimité. Il rétablit le plafond d'exonération d'impôt sur le revenu dont bénéficiaient les élus locaux avant la réforme du prélèvement à la source.

Avec l'alignement sur le barème commun de l'impôt sur le revenu, nombre d'élus font en effet face à d'importantes difficultés financières, alors que le mandat local reste plus que jamais le pilier de notre démocratie et de la confiance dans les institutions. Ne décourageons pas ceux qui choisissent de s'investir dans cette fonction.

M. le président.  - Amendement n°I-832, présenté par M. Bonhomme, Mme Deromedi, M. Danesi, Mmes Thomas et Bonfanti-Dossat, MM. Sol, Sido, Babary, Allizard, Brisson, de Nicolaÿ, Reichardt, Pierre et Le Gleut, Mme M. Mercier, M. Vogel, Mme Gruny, MM. Piednoir, Revet et Mayet, Mme de Cidrac, MM. Longuet, B. Fournier, del Picchia, D. Laurent, Milon, Bazin et Pointereau, Mme Berthet et M. Genest.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - La dernière phrase du premier alinéa du 1° de l'article 81 du code général des impôts est ainsi rédigée : « Il en est de même des indemnités de fonction mentionnées au I de l'article 80 undecies B, à concurrence d'un montant égal à 125 % de l'indemnité versée aux maires dans les communes de moins de 2 000 habitants et ce, quel que soit le nombre de mandats locaux. »

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Arnaud Bazin.  - Cet amendement exonère de l'impôt l'indemnité de fonction des maires des communes de moins de 2 000 habitants.

La loi de finances pour 2017 a supprimé la retenue à la source libératoire des indemnités de fonction perçues par les élus locaux. Or l'intégration fiscale de ces indemnités dans les traitements et salaires va à l'encontre de l'idée que ces indemnités modestes correspondent non à des salaires mais à des défraiements. Il en est résulté une augmentation significative de l'imposition alors même que le mandat de maire devient une mission de plus en plus lourde avec l'accroissement des responsabilités et la diminution de la reconnaissance publique. On a largement eu l'occasion d'en parler au Congrès des maires.

En outre, les indemnités des maires sont destinées à couvrir les frais qu'ils engagent dans le cadre de leurs fonctions. Il s'agit d'une mesure de justice.

Il apparaît indispensable de revenir au système antérieur. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains)

M. le président.  - Amendement n°I-238 rectifié, présenté par MM. Guené, Retailleau, Genest et Darnaud, Mme Di Folco, M. Calvet, Mme Lavarde, MM. Cardoux et Pillet, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Daubresse et Bascher, Mme Estrosi Sassone, M. B. Fournier, Mme Procaccia, M. Morisset, Mme Puissat, MM. D. Laurent, Charon, Chaize, Hugonet, Brisson, Buffet, Schmitz, Danesi et Courtial, Mme Bruguière, M. Sol, Mme L. Darcos, MM. Cambon et Meurant, Mme M. Mercier, MM. Bazin et Sido, Mme Primas, MM. Lefèvre et Dufaut, Mme Deseyne, M. Milon, Mme Imbert, M. Émorine, Mmes Gruny et Dumas, M. Piednoir, Mme Morhet-Richaud, MM. Chatillon, Poniatowski et Houpert, Mme Lassarade, MM. Vaspart et Bonhomme, Mme Deromedi, MM. Kennel, Mayet, Revet, Bouchet, de Nicolaÿ, Vogel, Raison, Perrin, Chevrollier et Laménie, Mme Lherbier, MM. Pointereau, Rapin et Bonne, Mmes A.M. Bertrand, F. Gerbaud, Keller et Canayer, MM. Reichardt, Saury et Savin, Mmes Delmont-Koropoulis, Chauvin et de Cidrac, M. de Legge, Mme Deroche, MM. Mandelli, Priou, Gremillet et Gilles, Mme Berthet et M. Magras.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - La dernière phrase du premier alinéa du 1° de l'article 81 du code général des impôts est ainsi rédigée : « Il en est de même des indemnités de fonction mentionnées au I de l'article 80 undecies B, à concurrence d'un montant égal à 125 % de l'indemnité versée aux maires dans les communes de moins de 1 000 habitants et ce, quel que soit le nombre de mandats locaux. »

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Charles Guené.  - Les élus locaux, en particulier les maires des petites communes, assurent le lien de proximité dont les Français, spécialement dans les territoires les plus reculés, ont besoin. Ils sont disponibles à toute heure et doivent assumer leurs fonctions dans des conditions de plus en plus difficiles. Ils se sentent délaissés par l'État, découragés.

Ils ont subi en 2017 une hausse d'imposition considérable, jusqu'à 350 %. Pourtant ces indemnités ne correspondent nullement à un salaire, mais à la contrepartie des sujétions imposées par la fonction et à l'absence de remboursement d'une grande partie des frais engagés. La circulaire du 15 avril 1992 précisait que l'indemnité de fonction allouée aux élus locaux « ne présente ni le caractère d'un salaire, ni d'un traitement, ni d'une rémunération quelconque ». Or, lorsque la retenue à la source a été instaurée, ce dispositif légitime a été réduit et limité aux seules communes de 500 habitants et moins.

L'amendement rétablit partiellement le régime antérieur en instaurant un abattement à hauteur de 125 % de l'indemnité de fonction pour les communes de 1 000 habitants.

M. le président.  - Amendement n°I-21, présenté par MM. Delahaye, Marseille, Laugier et Lafon, Mme Vullien, MM. Janssens et Henno, Mme Billon, M. Longeot, Mme Goy-Chavent, M. Cigolotti, Mmes Gatel et Guidez, MM. Maurey et Delcros, Mme Morin-Desailly, M. Détraigne, Mme C. Fournier et M. Mizzon.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  À la dernière phrase du premier alinéa du 1° de l'article 81 du code général des impôts, le nombre : « 500 » est remplacé par le nombre : « 1 000 ».

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Annick Billon.  - En cette semaine de Congrès des maires, je vous invite à voter cet amendement.

Il vise à porter le plafond d'exonération des frais d'emplois des élus locaux à concurrence d'un montant égal à l'indemnité versée aux maires des communes de moins de 1 000 habitants en cas de mandat unique - 1199,90 euros bruts mensuels - ou, en cas de cumul de mandats, à une fois et demie ce montant.

L'article 10 de la loi de finances pour 2017 a supprimé le dispositif de retenue à la source et a prévu l'imposition de ces sommes dans la catégorie des traitements et salaires. Ce qui a augmenté l'imposition des indemnités et la progressivité de l'impôt.

Comment s'étonner du blues des élus ?

M. le président.  - Amendement n°I-437 rectifié bis, présenté par MM. Kern, Maurey, Détraigne et Luche, Mme Sollogoub, MM. Laugier, Bockel, Canevet, Le Nay, Henno et Moga, Mmes C. Fournier et Billon et M. L. Hervé.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  À la dernière phrase du premier alinéa du 1° de l'article 81 du code général des impôts, le nombre : « 500 » est remplacé par le nombre : « 1000 ».

II.  -  Le I s'applique à compter du 1er janvier 2019.

III.  -  La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Annick Billon.  - Les indemnités de fonction perçues par les élus locaux étaient jusqu'en 2017 imposées soit en application d'une retenue à la source soit du barème progressif de l'impôt sur le revenu.

La retenue à la source était assise sur le montant net de l'indemnité après application d'un abattement représentatif de frais d'emplois à concurrence d'un montant égal à l'indemnité versée aux maires des communes de moins de 500 habitants en cas de mandat unique ou, en cas de cumul de mandats, à une fois et demie ce montant soit 11 844 euros.

Pour mémoire, le barème de la retenue sur les indemnités était identique au barème de l'IR, et l'abattement ne s'appliquait pas à défaut d'option pour la retenue à la source. En choisissant la retenue à la source, les élus pouvaient limiter la progressivité de leur impôt et bénéficier de l'abattement.

Défendons les élus qui exercent des mandats peu reconnus. Accordons-leur une reconnaissance méritée.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Les indemnités ne sont ni des salaires ni des traitements. Elles sont très éloignées du salaire minimum horaire. Les soumettre à la même fiscalité que les salaires est d'une grande injustice. Revenons à la situation antérieure. J'ai une préférence pour l'amendement n°I-238 rectifié.

En 2016, nous n'avions pas examiné le projet de loi de finances, et nous n'avions donc pas pu supprimer ces dispositions...

Demande de retrait des amendements nosI-988, I-832, I-21 et I-437 rectifié bis au profit de l'amendement n°I-238 rectifié.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - La décision de traiter les indemnités des élus selon un régime proche du traitement des salaires classiques, avec une déduction à 100 % pour les communes de moins de 500 habitants, et une majoration de 50 % pour les élus en situation de cumul, à quoi on ajoute une déduction de 10 % comme pour les frais professionnels, est suffisante. Avis défavorable aux quatre amendements, qui conduisent à multiplier par trois ou quatre le montant de la déduction d'assiette dont bénéficient aujourd'hui les élus.

Mme Annick Billon.  - J'ai entendu et compris la demande de retrait du rapporteur général.

Les amendements nosI-21 et I-437 rectifié bis sont retirés.

M. Jean-Marc Gabouty.  - Je fais la même chose pour l'amendement n°I-988.

Un examen bien plus approfondi serait nécessaire. Le maire d'une grande ville touche une indemnité que l'on peut qualifier de nette, puisqu'il a un chauffeur, que ses notes de restaurant sont payées, etc. Pour le maire d'une commune de 1 000 habitants, cette indemnité est brute car tout est de sa poche. Alors que le Premier ministre a annoncé au Congrès de maires une réforme du statut des maires, pourquoi ne pas inclure ce sujet dans la réflexion ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Absolument !

L'amendement n°I-988 est retiré.

M. Arnaud Bazin.  - Je ne me sens pas autorisé à retirer l'amendement de M. Bonhomme.

Tandis que l'anarchie se répand sur les voiries, il serait bon de faire un geste fort envers les maires qui tiennent la République. Ils l'apprécieraient.

M. Jérôme Bascher.  - Je soutiendrai l'amendement n°I-238 rectifié de M. Guené. Je ne céderai ni au cynisme ni au populisme. À Paris, on a tendance à penser que les petites communes devraient se regrouper, cela économiserait des postes de maires et des indemnités. Pour ma part, je crois en l'histoire de France, en nos clochers, en nos territoires. Je crois dans l'action des maires auxquels on demande tant et que l'on sollicite sur tous sujets, y compris pour retrouver un chien perdu !

Quand plus de 50 % des maires disent ne pas vouloir se représenter à nouveau, parce que les responsabilités s'alourdissent et les pouvoirs diminuent, entendons-les. Un peu de courage ! Ne craignons pas la réaction populiste... (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

M. Bruno Retailleau.  - Nous avons eu en vingt-quatre heures la preuve de la tartufferie du Gouvernement sur le sujet. Le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement a répondu à M. Guené hier la main sur le coeur qu'il agirait pour un statut des élus locaux et à présent, vous donnez un avis défavorable, vous refusez de réparer une injustice...

Les maires de petites communes utilisent leur indemnité pour payer du gazole. La surfiscalisation qu'ils subissent est une honte. Ces amendements ne visent pas à augmenter les indemnités, j'y insiste, mais à corriger une injustice.

C'est votre Gouvernement qui était à l'origine de la stigmatisation « BalanceTonMaire ». Le listing est parti de Bercy ! Vous avez encouragé la crise de la démocratie et de la représentation. Les fantassins de la République sont devenus les bonnes à tout faire de la République.

On le voit bien : ce n'est pas demain que le Gouvernement va s'atteler à la réforme du statut de l'élu. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Éric Bocquet.  - Nous voterons cet amendement, même s'il n'est pas une réponse globale au malaise sans précédent des élus locaux. Le ministre des relations avec le Parlement a répondu à M. Collombat hier en s'engageant à élaborer un statut de l'élu : ce statut ne doit pas rester une arlésienne.

M. Vincent Capo-Canellas.  - Je voterai l'amendement de M. Guené. Monsieur le ministre, je regrette que vous n'ayez pas dit que cet amendement n'était peut-être pas la solution mais que vous entendiez traiter le sujet. Je sais votre attachement au rôle des élus locaux. Je ne comprends pas que vous répondiez que les dispositions actuelles sont « suffisantes », car les indemnités sont notoirement insuffisantes !

M. Dominique de Legge.  - J'ai ici le compte rendu (l'orateur brandit le Compte rendu analytique de la séance du jeudi 22 novembre) des propos de M. Fesneau : « Le Gouvernement veut aboutir. Le Gouvernement veut travailler avec le Sénat ». Et vous dites aujourd'hui : « Circulez, il n'y a rien à voir ». Monsieur le ministre, votre réponse est l'illustration de l'hypocrisie, de l'escroquerie du « en même temps ». Hier le président de la République se livrait à la câlinothérapie avec les maires. Aujourd'hui, c'est « circulez »... Les maires hier disaient : il est peut-être brillant mais il faut passer aux actes. Aujourd'hui, allez-y ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Charles Guené.  - Mon amendement, contrairement à celui de M. Bonhomme, revient au statu quo ante. Dans la période actuelle, gardons-nous d'en rajouter ! Curieusement, le président de la République, interrogé sur l'indemnité des élus, s'y est dit favorable mais il précise qu'il faut attendre. Quand, alors ? Il est temps ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Julien Bargeton.  - Ce n'est pas l'intervention la plus facile...

M. Vincent Éblé, président de la commission.  - Sauf si LaREM se rallie à ces amendements ! (Sourires)

M. Julien Bargeton.  - Je partage les propos d'Éric Bocquet. Le sujet des indemnités concerne en réalité le statut de l'élu. La fin du cumul des mandats aurait dû susciter la réflexion sur le statut de l'élu. Avec le double non-cumul, la question sera d'autant plus prégnante. Je m'abstiendrai.

Mme Frédérique Espagnac.  - Le groupe socialiste soutiendra l'amendement de M. Guené. Les socialistes sont revenus au prélèvement à la source. Ne pas protéger les plus petits maires fut cependant une erreur. Le Gouvernement va mener une réflexion, nous aussi. Pensons à la vie quotidienne des maires des petites communes qui oeuvrent nuit et jour pour leurs administrés. Nous souhaitons ni plus ni moins le retour à ce qui existait.

M. Jean-Marc Gabouty.  - N'instrumentalisons pas les contradictions. Ne disons pas que les engagements du président de la République, du Premier ministre ou du ministre des relations avec le Parlement n'ont aucune sincérité ni valeur.

Le Premier ministre s'est engagé devant les maires à ouvrir le chantier de l'élu au premier semestre 2019 en s'appuyant sur les travaux de la délégation aux collectivités territoriales du Sénat. Attendons et soyons modestes sur le sujet, car tous les gouvernements précédents, sur cette question, ont « patiné ».

M. Philippe Dallier.  - Le grand soir du statut de l'élu local... On en parlait déjà lorsque j'ai commencé en politique en 1983 ! Cet amendement corrige simplement les effets du prélèvement à la source sur les maires des petites communes. Qui en 2016 avait mesuré cette conséquence malheureuse ? À l'époque, pas une ligne dans le journal pour la déplorer ; en sens inverse, voter une correction risque de susciter une abondante couverture presse ! Monsieur le ministre, dites clairement qu'il ne s'agit que de corriger l'effet du prélèvement à la source. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

M. Jean-François Husson.  - Il y a un an moins un jour, nous débattions de la taxe sur l'énergie : la trajectoire carbone n'était pas bonne, il ne fallait pas bloquer son raidissement. Ronan Dantec et moi-même prédisions pourtant un nouvel épisode de type « bonnets rouges », un soulèvement des territoires. Le Gouvernement avait balayé nos propos d'un revers de manche. Qu'il nous entende aujourd'hui. Sinon, la révolte viendra de partout. Vouloir contourner tous les corps intermédiaires est insupportable pour les élus. Notre demande est raisonnable et responsable, et la mesure est nécessaire... mais pas suffisante. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Marc Laménie.  - Tout est parfaitement résumé sur l'engagement des élus de toutes nos communes, y compris les plus petites. En 1983, j'ai commencé mon engagement de conseiller municipal. En 2017, j'ai malheureusement dû cesser d'être maire. C'est un regret quotidien.

La tâche des maires est de plus en plus lourde. Ils sont responsables de tout ! Il convient donc de revenir au système antérieur, dans un souci de justice et d'équité.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Merci à MM. Gabouty et Capo-Canellas d'avoir rappelé l'engagement de M. Fesneau hier, qui n'est pas antinomique avec la position du Gouvernement sur cet amendement.

J'ai été maire et parlementaire en même temps. Si je n'avais pas été parlementaire, je n'aurais pas pu exercer mes fonctions de maire comme je l'ai fait. Au-delà de la seule question fiscale, la réalité est que les indemnités d'élus locaux ne donnent droit à aucune protection sociale digne de ce nom.

Le débat sur le statut de l'élu va bien au-delà de la question de l'indemnité.

Au président Retailleau, je rappelle que j'ai eu la chance d'être maire pendant dix ans. Je ne stigmatiserai jamais les élus. Je connais les contraintes du mandat de maire, même si elles varient selon la taille de la commune.

Je réprouve par ailleurs le parallèle entre « BalanceTonMaire » et un mouvement désignant des comportements ignobles et inqualifiables.

L'amendement n°I-832 n'est pas adopté.

L'amendement n°I-238 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

(Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et RDSE et sur quelques bancs du groupe SOCR)

M. le président.  - Amendement n°I-959, présenté par MM. Collin, Requier, Gabouty, Arnell, Artano, Castelli, Roux et A. Bertrand, Mmes Jouve et Laborde et M. Corbisez.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le premier alinéa du 1° de l'article 81 du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ces dispositions ne s'appliquent qu'aux journalistes, rédacteurs, photographes, directeurs de journaux et critiques dramatiques et musicaux dont le revenu brut annuel n'excède pas 93 510 €. »

II.  -  Le I est applicable au 1er janvier 2019.

M. Yvon Collin.  - Cet amendement réserve l'exonération prévue au 1° de l'article 81 du code général des impôts aux seuls journalistes, rédacteurs, photographes, directeurs de journaux et critiques dramatiques et musicaux dont le revenu mensuel est inférieur à 6 000 euros nets. L'amendement vise les vedettes et les patrons de médias, pas les journalistes qui galèrent.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Je salue la constance du groupe RDSE. Monsieur le ministre, qu'est-ce qui justifie cette différence de traitement entre les élus et les journalistes ? Sagesse.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Le Gouvernement à l'Assemblée nationale a donné un avis défavorable à un amendement identique : les dispositions fiscales actuelles encouragent la pluralité de la presse.

M. Alain Joyandet.  - Je suis très gêné par cet amendement. Soit la profession de journaliste ne mérite pas cet avantage qui perdure, et on supprime tout, soit on le maintient entièrement. Pourquoi un seuil à 6 000 euros ?

L'amendement n°I-959 est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°I-812, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le 19° ter de l'article 81 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« c. En l'absence de prise en charge prévue à l'article L. 3261-2 du code du travail, l'avantage résultant de la prise en charge, par une collectivité territoriale, par un établissement public de coopération intercommunale ou par Pôle emploi, des frais de carburant ou d'alimentation de véhicules électriques engagés par les salariés pour leurs déplacements entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail lorsqu'ils sont situés à une distance d'au moins trente kilomètres l'un de l'autre, ou pour leurs déplacements entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail en tant que conducteur en covoiturage quelle que soit la distance, dans la limite de 240 € par an ; ».

II.  -  Le e du 4° du III de l'article L. 136-1-1 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : « , ainsi que l'avantage mentionné au c du 19° ter de cet article précité, dans la limite prévue au même c ».

III.  -  L'article L. 3261-3-1 du code du travail est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est complété par les mots : « ou, lorsque les salariés effectuent ces déplacements en tant que passagers en covoiturage, sous la forme d'une "indemnité forfaitaire covoiturage" dont les modalités sont précisées par décret » ;

2° Au second alinéa, les mots : « cette prise en charge » sont remplacés par les mots : « ces indemnités » et le mot : « celle » est remplacé par les mots : « la prise en charge ».

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Cet amendement reprend dans la première partie du projet de loi de finances pour 2019 l'article 58 ter adopté par l'Assemblée nationale en première lecture à l'initiative du Gouvernement.

L'entrée en vigueur de ces dispositions, initialement prévue au 1er janvier 2020, est avancée. L'article 58 ter sera, en conséquence, supprimé. Ainsi, l'exonération des aides des collectivités territoriales sera applicable dès l'imposition des revenus de l'année 2018 et l'extension au covoiturage de l'aide facultative versée par l'employeur sera applicable à compter de la publication de la présente loi.

L'article 58 ter adopté par l'Assemblée nationale limite les inégalités de traitement entre les modes de transport, en donnant la possibilité aux employeurs qui souhaitent accompagner le développement du covoiturage de rembourser une partie des frais engagés par leurs salariés lorsqu'ils se déplacent en covoiturage, en tant que passagers.

Vertueux sur le plan social et environnemental, le covoiturage contribue aussi à préserver le pouvoir d'achat en permettant de partager les frais du déplacement.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - La question de la fiscalité du carburant n'a pas été bien traitée. Résultat : tous les jours, nous voyons arriver un nouveau bricolage, une nouvelle exonération. Ce n'est pas sérieux.

Le Sénat appelait à la stabilité des taxes, alors que le Gouvernement faisait voter une augmentation du prélèvement fiscal de 46 milliards supplémentaire d'ici 2022. Mardi, tandis que nous voterons la première partie du projet de loi de finances, le président de la République annoncera de nouvelles mesures. Il y a une erreur manifeste à corriger, tout le monde le reconnaît, M. Hulot, M. Darmanin,... Écoutez le Sénat, car après mardi, il sera trop tard pour revenir sur les mesures fiscales, à moins que vous n'envisagiez un nouveau projet de loi de finances rectificative d'ici la fin de l'année ? Sagesse.

M. Roger Karoutchi.  - Le Parlement est-il un théâtre d'ombres ? Toute la politique énergétique du Gouvernement sera modifiée mardi, avec entrée en application au 1er janvier 2019 : le président de la République annoncera en effet mardi le nouveau cap qu'il aura décidé. À quoi servent nos votes ? Quel intérêt ont ces débats ?

Aux prochaines questions d'actualité, on nous exposera placidement la logique de l'ensemble. C'est surréaliste ! Je rappelle que, théoriquement, le Parlement vote l'impôt.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - C'est la base de la démocratie !

M. Roger Karoutchi.  - Mardi, on nous dira de tout recommencer ? (Applaudissements à droite)

M. Philippe Dallier.  - Que certaines régions veuillent aider les automobilistes, pourquoi pas, mais veillons à ce que l'État ne se défausse pas sur les collectivités territoriales.

Attendons de voir mardi. J'ai bien peur d'une grande remise à plat, alors que nous aurons consacré beaucoup de temps d'ici là à discuter de ces sujets.

M. Alain Joyandet.  - On peut suspendre la séance.

M. Roger Karoutchi.  - Et revenir mardi (Sourires)

M. Julien Bargeton.  - Le Gouvernement embraye sur l'initiative intéressante des Hauts-de-France avec le chèque transport. Les régions reçoivent 200 millions d'euros supplémentaires avec la hausse des recettes de TVA qui leur sont dédiées et du FCTVA. Il est positif d'encourager les initiatives locales.

Le covoiturage n'est pas un gadget. Pas moins de 14 % des Français sont inscrits sur une plateforme de covoiturage - c'est 8 millions d'utilisateurs, mais une part réduite des déplacements domicile-travail. Je soutiens cet amendement.

M. Bruno Retailleau.  - Il est une tentative de partager le fardeau avec les collectivités territoriales. Un président des États-Unis avait souligné qu'en France, tout ce qui bouge, on le taxe, tout ce qui bouge encore, on le réglemente, et ce qui ne bouge plus du tout, on le subventionne...

Un amendement, qu'il soit déposé à l'Assemblée nationale ou au Sénat, doit respecter le droit parlementaire. Je suis très réservé sur cet amendement du Gouvernement.

M. Jérôme Bascher.  - Je le voterai. Ce matin, mes amis distribuaient sur le marché de Senlis un tract expliquant les dispositifs mis en place dans la région des Hauts-de-France : je constate que le Gouvernement nous emboîte le pas.

Mais il y a quelque chose de scandaleux dans la méthode : il y a un an, le Gouvernement a annoncé une politique énergétique - que M. Husson a jugée très imprudente. Quatre jours avant la démonstration de force des gilets jaunes, le Premier ministre annonçait des mesures nouvelles ; d'autres apparaissent aujourd'hui, et il en arrivera d'autres encore mardi prochain. C'est une politique de Gribouille !

M. Jean-François Husson.  - Les changements de cap du Gouvernement et les volte-face se multiplient. Pourquoi ne pas reporter ce débat à mardi ? Est-ce bien sérieux de travailler ainsi ? On aurait gagné du temps si l'on avait ouvert l'an dernier, comme le président de la République l'avait évoqué à la Conférence des territoires, la réflexion sur les difficultés de la politique énergétique.

Votre amendement n'est que la traduction d'une absence de stratégie pour l'écologie. C'est une mystification. Le candidat Macron n'avait pas de feuille de route en la matière. Le recrutement de Nicolas Hulot a été une mystification. Depuis son départ, le roi est nu... De grâce, travaillez à une feuille de route à la hauteur des enjeux !

M. Dominique de Legge.  - Très bien !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - L'amendement du Gouvernement est facultatif pour les collectivités territoriales et les incite à mettre en place un dispositif comparable à celui des Hauts-de-France.

M. Jean-François Husson.  - Ubuesque !

M. Pascal Savoldelli.  - C'est une mesure gadget !

M. Jean-François Husson.  - Pif Gadget ! (Sourires)

M. Pascal Savoldelli.  - Ce n'est pas très sérieux. Le mieux serait de reporter la discussion. La crise de confiance est telle dans le pays qu'il faut geler l'existant et remettre l'ouvrage sur le métier. On ne sait même pas combien ça coûte, pour reprendre une objection que l'on entend souvent.

On rembourserait les déplacements domicile-travail de plus de 30 kilomètres. Mais les Français l'ont déjà payé ! C'est un gadget technocratique. L'aide ne sera que de 1,6 centime par kilomètre parcouru et sera décroissante avec la distance. Alors, remballons le gadget et réfléchissons, en responsabilité, à la situation de crise où se trouve notre pays ! (Applaudissements sur les bancs des groupes CRCE et Les Républicains ; M. Joël Bigot applaudit également.)

M. Vincent Capo-Canellas.  - Cet amendement n'épuise pas le sujet. Certaines collectivités territoriales souhaitent mettre en oeuvre ce dispositif. Mais d'autres mesures ont été envisagées par le Premier ministre et le président de la République.

Il faut rendre acceptable pour nos concitoyens l'effort pour la transition énergétique en en lissant les effets. Cet amendement n'est en tout état de cause pas suffisant.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Lorsque l'on dépose des amendements, le Gouvernement nous rétorque qu'ils ne sont pas chiffrés. Quel est le coût de cette mesure ? Le Gouvernement ne répond pas...

M. Alain Joyandet.  - Les indemnités kilométriques des entreprises seront fiscalisées mais pas les subventions versées par les régions. On crée donc deux catégories de contribuables. Dans la région où je suis vice-président aux finances, les pressions se multiplient. En outre, les contribuables régionaux devront mettre la main au portefeuille. Double peine !

Nous sommes arrivés à un moment où les Français ne supportent plus les injustices. Or cet amendement en crée !

M. Claude Raynal.   - Je rejoins M. Joyandet. L'idéal serait d'attendre les annonces qui seront faites mardi.

M. Roger Karoutchi.  - Alors on s'en va ?

M. Claude Raynal.  - Quid aussi des gens qui ne sont pas imposables ? L'amendement ne prévoit pas de crédit d'impôt. Le mieux serait de retirer cet amendement.

M. Jean-François Husson.  - Le ministre n'a pas répondu sur le coût de son amendement, toujours inconnu.

M. Philippe Dallier.  - Oui, combien ça coûte ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Rien, car nous ne voterons pas cet amendement !

L'amendement n°I-812 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°I-228 rectifié, présenté par Mmes Canayer et Bonfanti-Dossat, MM. Bascher, J.M. Boyer, Bouchet, Bonhomme et Brisson, Mme Bruguière, MM. Chevrollier et Chaize, Mme Chauvin, MM. Courtial, Charon et Cuypers, Mmes L. Darcos, Deseyne, Deromedi, Delmont-Koropoulis et Di Folco, M. B. Fournier, Mme F Gerbaud, MM. Genest et Gremillet, Mme Gruny, MM. Gilles et Huré, Mmes Imbert et Keller, MM. Le Gleut et D. Laurent, Mmes Lavarde et Lherbier, M. Mandelli, Mme A.M. Bertrand, M. Mouiller, Mme Morhet-Richaud, MM. Pellevat, Piednoir, Poniatowski et Perrin, Mmes Procaccia et Primas, MM. de Nicolaÿ, Rapin, Raison, Savary, Schmitz, Sido et Milon, Mme Thomas et M. Vaspart.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I  -  Après l'article 81 ter du code général des impôts, il est inséré un article 81... ainsi rédigé :

« Art. 81...  -  La contrepartie financière tirée du contrat de cohabitation intergénérationnelle solidaire tel que prévu par le chapitre VIII du titre I du livre premier du code de l'action sociale et des familles, et par l'article L. 631-17-1 du code de la construction et de l'habitation est exonérée d'impôt sur le revenu. »

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Christine Lavarde.  - Pour favoriser la cohabitation intergénérationnelle, cet amendement, tout comme le suivant, tend à exonérer de l'impôt sur le revenu la contrepartie financière perçue par les personnes âgées qui accueillent chez elles des étudiants, ce qui permet d'offrir à ceux-ci des logements et à celles-là un maintien à domicile.

M. le président.  - Amendement n°I-229 rectifié bis, présenté par Mmes Canayer et A.M. Bertrand, MM. Bascher, Bonhomme, J.M. Boyer, Bouchet et Brisson, Mme Bruguière, MM. Charon, Chevrollier, Chaize et de Nicolaÿ, Mmes Bonfanti-Dossat, Deromedi, Deseyne, Di Folco, Delmont-Koropoulis, L. Darcos et Chauvin, M. Courtial, Mme F. Gerbaud, MM. Gilles et Genest, Mmes Gruny et Imbert, MM. Gremillet et D. Laurent, Mme Lavarde, M. Le Gleut, Mme Lherbier, MM. Mandelli et Milon, Mme Morhet-Richaud, M. Mouiller, Mme Keller, MM. Pellevat, Perrin, Piednoir et Poniatowski, Mme Primas, M. B. Fournier, Mme Procaccia, MM. Rapin et Raison, Mme Thomas et MM. Vaspart, Sido, Schmitz, Cuypers et Savary.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Aux a, b, et e du 1 de l'article 195 du code général des impôts, après les mots : « Vivent seuls », sont insérés les mots : « ou avec une personne hébergée dans les conditions à l'article L. 631-17-1 du code de la construction et de l'habitation ».

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Christine Lavarde.  - Défendu.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Avis défavorable à l'amendement I-228 rectifié : en effet la contrepartie financière perçue par la personne âgée qui loge un étudiant bénéficie d'une exonération d'impôt sur le revenu, prévue à l'article 35 bis du code général des impôts, en faveur des personnes qui louent une partie de leur résidence principale. En effet, d'autres personnes, âgées ou handicapées, rencontrent également des difficultés pour se loger.

Avis défavorable à l'amendement n°I-229 rectifié bis qui est satisfait par l'article L. 631-17 du code de la construction.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Avis favorable à l'amendement n°I-228 rectifié et demande de retrait de l'amendement n°I-229 rectifié bis.

L'amendement n°I-228 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

L'amendement n°I-229 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°I-1027, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Au premier alinéa du 1 du I de l'article 155 B du code général des impôts, les mots : «, et pour les salariés et personnes autres que ceux appelés par une entreprise établie dans un autre État » sont supprimés.

II. - Le I s'applique à raison des rémunérations dues à compter du 1er janvier 2019 aux personnes dont la prise de fonction en France intervient à compter du 16 novembre 2018.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - L'article 51 sexies modifie le régime fiscal de l'impatriation pour généraliser l'option pour l'évaluation forfaitaire de la prime d'impatriation à tous les modes de recrutement, y compris dans le cadre d'une mobilité à l'intérieur d'un groupe. Il s'applique à raison des rémunérations dues à compter du 1er janvier 2020 aux personnes dont la prise de fonction en France intervient à compter du 16 novembre 2018.

Il est proposé d'en étendre le bénéfice, pour les personnes dont la prise de fonction en France intervient à compter du 16 novembre 2018, à raison des rémunérations dues à compter du 1er janvier 2019.

En vertu de l'article 34 de la LOLF, cette mesure relève de la première partie du projet de loi de finances. Un amendement de suppression de l'article 51 sexies est prévu en conséquence.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Vous remontez en première partie cet amendement voté à l'Assemblée nationale en seconde partie. L'amendement prendra effet pour les rémunérations perçues à partir du 1er janvier 2020.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Nous proposons justement une application dès 2019, ce qui justifie l'adoption de cet amendement en première partie.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Avis favorable a priori. Mais je m'étonne que le Gouvernement découvre le Brexit à 1 heure du matin...Donc, sagesse !

L'amendement n°I-1027 est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°I-886, présenté par M. Bargeton et les membres du groupe La République En Marche.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Au premier alinéa du 1 de l'article 200 du code général des impôts, après la référence : « 4 B », sont insérés les mots : « , effectués à compter du jour suivant la date limite de dépôt de la déclaration mentionnée à l'article 170 au titre de l'année précédant celle de l'imposition et jusqu'à la date limite de dépôt de cette même déclaration au titre de l'année d'imposition, ».

II. -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Julien Bargeton.  - La commission des finances a organisé une conférence sur la générosité des Français. Les associations et la Fondation de France, notamment, souhaitent un élargissement de la période au titre de laquelle les dons sont pris en compte au titre de la déduction fiscale, qui est actuellement limitée par la fin de l'année et coïncide avec la période de Noël.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Il est vrai que les dons sont concentrés en fin d'année. Mais s'agit-il d'une remise en cause du principe d'annualité de l'impôt sur le revenu ? Qu'en pense le Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Avis défavorable. Cet amendement constitue en effet une entorse au principe d'annualité de l'impôt sur le revenu.

De plus, votre mesure conduirait à octroyer un avantage fiscal sur 17 mois et non plus sur 12, ce qui entraînerait un coût important ; or l'avance versée par les contribuables le 15 janvier à hauteur de 60 % tiendra compte des dons.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Retrait ?

L'amendement n°I-886 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°I-504 rectifié, présenté par MM. Poadja et Laurey, Mmes Tetuanui, Billon et Doineau, MM. Genest, Kern, Henno, Laugier et Bockel, Mme Dindar, MM. Le Nay et Détraigne, Mme de la Provôté, M. Moga et Mme Guidez.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Après l'article 204 A du code général des impôts, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017, il est inséré un article 204 A ... ainsi rédigé :

« Art. 204 A ...  -  Les contribuables résidant en Nouvelle-Calédonie avant la date du 1er janvier 2019 et redevables de l'impôt sur le revenu en Nouvelle-Calédonie au titre des revenus de l'année précédant l'établissement de leur résidence fiscale en métropole, bénéficient, à raison des revenus non exceptionnels entrant dans le champ du prélèvement mentionné à l'article 204 A, perçus ou réalisés pendant l'année de l'établissement de leur résidence fiscale en métropole, d'un crédit d'impôt modernisation du recouvrement destiné à assurer, pour ces revenus, l'absence de double contribution aux charges publiques au titre de l'impôt sur le revenu.

« Ce crédit d'impôt est égal au montant de l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année précédente résultant de l'application des règles du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie, dans la limite du montant de l'impôt dû au titre de l'année en cours en vertu de l'article 204 A du présent code. »

II.  -  Le I n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.

III.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Gérard Poadja.  - Avec l'instauration du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu, au 1er janvier 2019, un contribuable qui réside en métropole paie en 2018 l'impôt sur ses revenus de 2017. En revanche, il ne paie pas en 2019 l'impôt sur ses revenus de l'année 2018 mais sur ses revenus de l'année 2019.

Or cette « année blanche fiscale » ne bénéficiera pas aux contribuables résidents fiscaux en Nouvelle-Calédonie appelés à s'installer en métropole à compter du 1er janvier 2019. Ces contribuables seront soumis, l'année de l'établissement de leur résidence fiscale en métropole, à une double imposition : ils devront payer au cours de la même année l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année précédente en vertu du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie et l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année en cours en vertu du code général des impôts.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Cette question est technique. Qu'a prévu le Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Quels que soient les territoires de la République, il n'y a aucun risque de double imposition sur la même année. Avis défavorable. Le prélèvement à la source mettra fin à l'année noire des Français qui s'expatrient et doivent s'acquitter la même année de l'impôt français sur l'année précédente et de l'impôt étranger, le plus souvent perçu à la source.

Cet amendement a créé un crédit d'impôt pour traiter le cas des personnes quittant la Nouvelle-Calédonie cette année, correspondant à la différence entre l'impôt calédonien et l'impôt sur le revenu français perçu. Rien ne justifie de créer une réforme spécifique pour les contribuables résidant en Nouvelle-Calédonie : ils ne seront pas taxés lorsque leurs revenus sont inférieurs au seuil d'impôt sur le revenu. Ils paieront l'impôt en France en 2019 pour leurs revenus perçus en Métropole. Il y a donc bien deux régimes d'imposition différents selon l'endroit et la date où sont perçus les revenus. L'adoption de votre amendement créerait un effet d'aubaine et présenterait des risques de contagion, en faveur de contribuables revenant de territoires n'appliquant pas la retenue à la source.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Avis défavorable.

L'amendement n°I-504 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°I-1036, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° L'article 1119 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « la loi du 20 juin 1920, modifiée par la loi du 6 février 1941 » sont remplacés par les mots : « l'article 46 du code civil » ;

b) Le second alinéa est complété par les mots : « ainsi qu'à l'article 4 de la loi n°68-671 du 25 juillet 1968 relative à l'état civil des Français ayant vécu en Algérie ou dans les anciens territoires français d'outre-mer ou sous tutelle devenus indépendants » ;

2° L'article 1120 est rétabli dans la rédaction suivante :

« Art. 1120.  -  Les actes prévus à l'article 311-20 du code civil et à l'article L. 2141-6 du code de la santé publique sont enregistrés gratuitement. »

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Cet amendement étend l'exonération des droits d'enregistrements pour les actes de notoriété en matière d'état civil et le recueil de certains consentements en matière d'état des personnes pour les Français d'Algérie.

Cet amendement a été déposé tardivement car son idée est venue lors de l'élaboration du texte de réforme de la justice. Mieux vaut le voter en projet de loi de finances.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Avis très réservé, en raison du dépôt très tardif de cet amendement et aussi parce que nous aurions souhaité que la commission des lois ait pu se prononcer sur cet amendement, qui relève de la loi d'orientation et de programmation pour la justice.

Mme Gisèle Jourda, pour la commission des lois.  - Justement, la commission des lois examine en ce moment même cette disposition. Nos rapporteurs, François-Noël Buffet et Yves Détraigne, avaient estimé que l'assistance médicale à la procréation devait être examinée dans le cadre des lois de bioéthique et qu'il n'était pas opportun d'anticiper les débats à venir.

L'Assemblée nationale a choisi d'intégrer cette réforme dans ce texte. C'est étonnant, car les projets de loi de finances n'ont pas le monopole des mesures fiscales.

Avis défavorable par cohérence aux positions de la commission des lois.

L'amendement n°I-1036 n'est pas adopté.

Rappel au Règlement

M. Claude Raynal .  - M. Darmanin vient d'écrire dans un tweet que le Sénat venait de voter une augmentation de 125 % de la déduction fiscale des élus, permettant d'exonérer d'impôt les élus jusqu'à 1 500 euros par mois sur leurs indemnités. Et d'ajouter qu'il s'opposera en seconde lecture à cette disposition. Le mépris total de ce Gouvernement à l'égard des élus est ainsi confirmé. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR, CRCE, RDSE et Les Républicains)

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Absolument. Quel mépris pour le Parlement !

M. Pierre Ouzoulias.  - Quel double langage !

M. le président. - Acte est donné de ce rappel au Règlement.

Discussion des articles de la première partie (Suite)

M. le président.  - Amendement n°I-836, présenté par MM. Daubresse, Morisset et Le Gleut, Mme L. Darcos, M. H. Leroy, Mme M. Mercier, MM. Revet, Vogel et Lefèvre, Mme Lopez, M. Piednoir, Mme Deromedi, MM. Kern, Hugonet, Mayet, Saury, del Picchia, Karoutchi et Guerriau, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Rapin, Genest, Magras et Meurant, Mme N. Delattre et M. Mandelli.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Au premier alinéa du A du II de l'article 28 de la loi n°2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificatives pour 2017, le mot : « particulièrement » est supprimé et après le mot : « logements », sont insérés les mots : « entraînant des difficultés d'accès au logement sur le parc locatif existant ».

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Roger Karoutchi.  - Cet amendement met le régime d'imposition des plus-values immobilières en faveur des opérations de logements, en cohérence avec les choix opérés par ailleurs pour les outils de soutien à l'augmentation d'offre de logements (dispositifs Pinel et PTZ).

Dans la loi de finances 2018, le Gouvernement a souhaité les recentrer et leur donner de la visibilité, pour le logement neuf, dans les zones dites « tendues » : A bis, A et B1. Face à cette demande soutenue, il est nécessaire de créer les conditions d'un choc d'offre qui, outre des simplifications réglementaires et une lutte accrue contre les recours abusifs prévus dans le projet de loi ELAN, nécessite la libération de davantage de foncier.

Le dispositif d'abattement exceptionnel sur les plus-values de cession immobilières introduit par l'article 28 de la loi du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017 poursuit cet objectif, mais sur un zonage très restrictif, puisqu'il ne vise que les zones A bis et A. Il n'est donc pas opérant dans les métropoles.

L'élargissement de ce dispositif exceptionnel d'abattement à la zone B1, proposé par le présent amendement, permet de rétablir la cohérence entre les choix opérés sur le soutien de la demande de logement et la libération de l'offre de terrains nécessaire pour y répondre.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Avis défavorable. Cet amendement créerait un effet d'aubaine. Évaluons le coût de cet amendement avant de modifier le dispositif.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Même avis.

L'amendement n°I-836 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°I-546 rectifié bis, présenté par MM. Kern, Maurey, Détraigne et Luche, Mme Sollogoub, MM. Laugier, Bockel, Canevet, Le Nay et Henno, Mmes Férat et de la Provôté, M. Moga, Mmes Guidez, C. Fournier et Billon et M. L. Hervé.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Sont déductibles de la base imposable au titre de l'impôt sur le revenu, les frais de déplacement engagés par les conseillers municipaux dans le cadre de leur mission, lorsque ces frais, dûment justifiés, n'ont fait l'objet d'aucun remboursement. 

II.  -  Les modalités de cet abattement sont définies par décret en Conseil d'État.

III.  -  La perte de recettes résultant pour l'État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Annick Billon.  - Claude Kern propose de permettre aux conseillers municipaux non défrayés de déduire fiscalement les frais de déplacement effectués dans le cadre de leur mandat. C'est une juste mesure.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Retrait ? L'amendement I-238 rectifié a été adopté. Je suis d'ailleurs scandalisé par la réaction de M. Darmanin. Pour commenter, il devrait au moins être là ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, SOCR et CRCE ; M. Vincent Capo-Canellas et Mme Annick Billon applaudissent également.)

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Avis défavorable.

Mme Annick Billon.  - La grande majorité des élus sont des bénévoles. Lorsqu'ils se déplacent, ils en sont de leur poche.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°I-546 rectifié bis, mis aux voix par assis et debout, est adopté et devient un article additionnel.

M. Vincent Capo-Canellas.  - Prévenez M. Darmanin pour qu'il tweete !

ARTICLE 2 BIS

M. le président.  - Amendement n°I-7 rectifié, présenté par MM. Lefèvre, Mouiller, Charon et Vaspart, Mme Micouleau, M. Brisson, Mmes Morhet-Richaud, Imbert et Bonfanti-Dossat, MM. Courtial et Schmitz, Mme Gruny, MM. B. Fournier et Morisset, Mme Bruguière, M. Longuet, Mmes Lanfranchi Dorgal, Deromedi et Garriaud-Maylam, MM. Bonhomme et Cambon, Mmes Procaccia et Malet, M. Bascher, Mmes A.M. Bertrand et M. Mercier, MM. Sido, Piednoir, Revet, Vogel et Poniatowski, Mme Lherbier et MM. Rapin, Laménie, D. Laurent, Bouchet et Genest.

Supprimer cet article.

M. Michel Vaspart.  - Réglementée au code de l'action sociale et des familles, l'activité des accueillants familiaux agréés par les départements fait l'objet de contreparties financières décomposées en quatre volets, dont « l'indemnité représentative de mise à disposition de la ou des pièces réservées à la personne accueillie ».

N'étant ni un loyer, faute de contrat de bail, ni une sous-location, cette indemnité, contrairement aux trois autres, n'a pas fait l'objet de précisions réglementaires quant à son régime fiscal. Ainsi, elle peut relever des revenus fonciers (location nue), du BNC (sous-location nue), du BIC (location ou sous-location meublée).

Aucun de ces cas de figure n'est adapté à l'accueil familial.

Sous réserve que le montant prévu entre les parties contractantes soit fixé « dans des limites raisonnables » dont l'absence de contours pose problème depuis des années, la solution pour traiter ce cas particulier de l'accueil familial a consisté à référer l'IMAD à l'article 35 bis du code général des impôts. Au titre d'une exonération d'impôt sur le revenu et de TVA.

Cet article fait disparaître cette exonération.

Pourtant, 10 000 accueillants familiaux sont concernés, prenant en charge, à leur domicile, des personnes âgées ou en situation de handicap. Ils ne sont ni artisans, ni commerçants, ni industriels. Encore moins hébergeurs de touristes en chambre d'hôtes.

Ils sont indispensables, au quotidien, à la prise en charge de personnes en difficultés du fait de l'âge et/ou du handicap.

Supprimons cet article, dans l'attente d'une formule cohérente pour les familiaux hébergeurs.

M. le président.  - Amendement identique n°I-230 rectifié bis, présenté par Mmes Canayer et Bories, MM. J.M. Boyer, Chevrollier, Cuypers et de Nicolaÿ, Mmes Delmont-Koropoulis, Deseyne, L. Darcos et F. Gerbaud, MM. Gremillet, Gilles et Huré, Mmes Keller et Lavarde, M. Le Gleut, Mme Di Folco, MM. Milon, Mouiller, Mandelli, Pellevat, Perrin, Raison et Savary et Mmes Thomas et Primas.

Mme Christine Lavarde.  - Défendu.

L'amendement n°I-244 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°I-337, présenté par Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain.

Supprimer cet article.

Mme Maryvonne Blondin.  - L'activité des accueillants familiaux doit être valorisée. Elle est source d'économie pour les familles comme les collectivités territoriales et permet aux personnes âgées de ne pas aller dans un établissement spécialisé.

M. le président.  - Amendement identique n°I-569, présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

M. Éric Bocquet.  - Défendu

L'amendement n°I-659 rectifié ter n'est pas défendu, non plus que les amendements nosI-862 rectifié bis, I-960 rectifié et I-1007 rectifié bis.

M. le président.  - Amendement identique n°I-1012, présenté par MM. Mézard, Collin, Gabouty et Requier.

M. Yvon Collin.  - L'Assemblée nationale a supprimé les exonérations prévues à l'article 35 bis du code général des impôts au motif que cette dépense fiscale n'était pas évaluée et que la mesure en faveur des chambres d'hôtes favorisait les locations de type AirBnB au détriment de l'hôtellerie.

Si le Sénat ne peut que partager le souhait d'une meilleure évaluation des dépenses fiscales et d'une meilleure équité dans le secteur de la location touristique, la suppression de l'article 35 bis ne semble pas être une réponse adéquate.

Cette mesure incite à la mise à disposition à des étudiants ou des travailleurs saisonniers de chambres à un tarif très raisonnable. C'est également un outil favorisant la cohabitation intergénérationnelle.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - C'est une niche fiscale, limitée à 760 euros. Mais au moment où la question de la dépendance se pose de manière vive, sagesse.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Le Gouvernement avait émis un avis de sagesse à l'Assemblée nationale à l'adoption de l'article 2 bis que cet amendement veut supprimer. Cet article mérite un examen attentif. Sagesse.

M. Emmanuel Capus.  - La question des aidants familiaux est très importante. Angers compte 40 000 étudiants pour quelque 170 000 habitants. Beaucoup sont logés dans des familles. Cette mesure est bonne à la fois parce qu'elle permet d'économiser de nombreuses et coûteuses constructions de logements ; elle est bonne aussi pour les personnes âgées, qui peuvent conserver leur logement en accueillant des étudiants qui remplacent les enfants qui l'ont quitté ; elle est bonne encore pour les étudiants qui trouvent un logement et pour leurs parents qui sont rassurés par le fait qu'il soit situé ainsi chez l'habitant. N'oublions pas le dynamisme des villes étudiantes. Angers a connu cette année, pour la première fois, des difficultés pour loger les étudiants. Le développement d'AirBnB, plus lucratif pour certains propriétaires que la location à l'année, n'y est pas étranger.

Les amendements identiques nosI-7 rectifié, I-230 rectifié bis, I-337, I-569 et I-1012 sont adoptés et l'article 2 bis est supprimé.

Les amendements nosI-587 rectifié bis, I-588 rectifié bis, I-338 et I-570 n'ont plus d'objet.

Les amendements identiques nosI-15 rectifié, I-339, I-522 rectifié bis et I-883 rectifié n'ont plus d'objet.

M. Bruno Retailleau.  - Je demande une suspension de séance. Le tweet de M. Darmanin est une nouvelle provocation et une incitation au populisme. C'est lui qui a enclenché le mouvement « BalanceTonMaire » en publiant la liste des maires qui ont augmenté la taxe d'habitation. Je rappelle que le Sénat n'a pas augmenté les indemnités ni créé un quelconque privilège en faveur des élus. Après avoir constaté les effets d'une mesure adoptée il y a deux ans sans aucune étude d'impact et qui a conduit à un matraquage fiscal des maires des petites communes, il a simplement demandé de rétablir le régime prévalant antérieurement à cette réforme, M. Darmanin, n'étant pas au banc. Comme d'autres outre-Atlantique font de la diplomatie du tweet, il fait de la politique du tweet, pour taper sur les élus.

M. Vincent Éblé, président de la commission.  - C'est le Trump français !

M. Bruno Retailleau.  - Il y en marre, qu'on vienne la main sur le coeur, au congrès des maires ou à l'Élysée, déclarer qu'on les aime, alors qu'on n'a de cesse de les dénigrer, car tel est bien le fil rouge de ce Gouvernement. C'est intolérable ! Il ne s'agit pas de nous, mais des élus de France...

M. Roland Courteau.  - Très bien !

M. Pierre Ouzoulias.  - C'est la République !

M. Bruno Retailleau.  - Oui, c'est bien de la République dont il s'agit. (Applaudissements sur tous les bancs à l'exception de LaREM)

Je demande une suspension de séance... (Marques d'approbation unanimes)

M. le président. - De combien de temps ?

M. Bruno Retailleau.  - Le temps pour M. Dussopt de demander au Premier ministre si ce tweet reflète la position officielle du Gouvernement et de faire venir ici le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement pour qu'il nous dise ce qu'il en est.

La séance, suspendue à 17 h 20, reprend à 18 heures.