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Table des matières



Projet de loi de finances pour 2019 (Suite)

Seconde partie (Suite)

SOLIDARITÉ, INSERTION ET ÉGALITÉ DES CHANCES

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Éric Bocquet, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Philippe Mouiller, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales

Mme Patricia Schillinger

M. Jean-Louis Tourenne

M. Jean-Marc Gabouty

Mme Élisabeth Doineau

M. Daniel Chasseing

Mme Laurence Cohen

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Examen des crédits des missions, des articles rattachés et de l'amendement portant article additionnel

Article 39

ARTICLE 83

M. Maurice Antiste

Articles additionnels

Article 83 ter

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial

Mme Agnès Buzyn, ministre

Article 83 quater

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial

M. Jean-Louis Tourenne

Article additionnel

SANTÉ

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial de la commission des finances

Mme Corinne Imbert, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales

M. Martin Lévrier

Mme Laurence Cohen

M. Bernard Jomier

M. Stéphane Artano

Mme Élisabeth Doineau

M. Daniel Chasseing

M. Bernard Bonne

Mme Nicole Duranton

Déclaration du Gouvernement sur la fiscalité écologique et ses conséquences sur le pouvoir d'achat

M. Édouard Philippe, Premier ministre

M. Jean-Claude Requier

M. Stéphane Ravier

M. Hervé Marseille

M. Claude Malhuret

M. Bruno Retailleau

M. François Patriat

Mme Éliane Assassi

M. Patrick Kanner

M. Édouard Philippe, Premier ministre

Projet de loi de finances pour 2019 (Suite)

Seconde partie (Suite)

SANTÉ (Suite)

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Examen des crédits de la mission, des articles rattachés et des amendements portant articles additionnels

Article 39

Article additionnel avant l'article 81 quater

Article additionnel après l'article 81 quinquies

GESTION DES FINANCES PUBLIQUES ET DES RESSOURCES HUMAINES, CRÉDITS NON RÉPARTIS, ACTION ET TRANSFORMATION PUBLIQUES, RÉGIMES SOCIAUX ET DE RETRAITE

M. Thierry Carcenac, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Claude Nougein, rapporteur spécial de la commission des finances

Mme Sylvie Vermeillet, rapporteure spéciale de la commission des finances

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales

Mme Catherine Troendlé, en remplacement de Mme Catherine Di Folco, rapporteur pour avis de la commission des lois

M. Éric Bocquet

M. Jacques Mézard

M. Dany Wattebled

M. Claude Haut

Mme Monique Lubin

M. Olivier Henno

Mme Christine Lavarde

Mme Sophie Taillé-Polian

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics

Examen des crédits des missions, des articles rattachés, de l'amendement portant article additionnel et des comptes spéciaux

Article 39 (Gestion des finances publiques et des ressources humaines)

Article additionnel avant l'article 77 bis

Article additionnel après l'article 77 ter

Article 39 (Action et transformation publiques)

Article 84 quater

IMMIGRATION, ASILE ET INTÉGRATION

M. Sébastien Meurant, rapporteur spécial de la commission des finances

M. François-Noël Buffet, rapporteur pour avis de la commission des lois

M. Jean-Yves Leconte

M. Guillaume Arnell

M. Loïc Hervé

M. Dany Wattebled

M. Thani Mohamed Soilihi

Mme Esther Benbassa

M. Roger Karoutchi

M. François Bonhomme

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur

Examen des crédits de la mission et de l'article rattaché

Article 39

SÉCURITÉS

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Philippe Paul, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

M. Yannick Vaugrenard, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

M. Henri Leroy, rapporteur pour avis de la commission des lois

Mme Catherine Troendlé, rapporteur pour avis de la commission des lois

M. Loïc Hervé

M. Dany Wattebled

M. Arnaud de Belenet

Mme Éliane Assassi

M. Guillaume Arnell

M. François Grosdidier

M. Jean-Pierre Sueur

M. François Bonhomme

M. Jean-Luc Fichet

M. Marc Laménie

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur

Examen des crédits de la mission et du compte spécial

Article 39

Compte spécial « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers »

Articles additionnels après l'article 84 bis

Annexes

Ordre du jour du vendredi 7 décembre 2018

Analyse des scrutins publics




SÉANCE

du jeudi 6 décembre 2018

37e séance de la session ordinaire 2018-2019

présidence de Mme Valérie Létard, vice-présidente

Secrétaires : Mme Mireille Jouve, M. Guy-Dominique Kennel.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Projet de loi de finances pour 2019 (Suite)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2019, adopté par l'Assemblée nationale. Au regard de notre ordre du jour, j'appelle chacun à la concision et au respect du temps de parole.

Seconde partie (Suite)

SOLIDARITÉ, INSERTION ET ÉGALITÉ DES CHANCES

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial de la commission des finances .  - La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », qui porte les politiques publiques de solidarité et de cohésion sociale de l'État en faveur des personnes les plus fragiles, est dotée de 21,1 milliards d'euros de crédits de paiement en 2019, en hausse de 7,5 % par rapport à 2018.

Cette augmentation est principalement due au dynamisme des dépenses d'intervention, qui représentent 93 % des crédits de la mission, mais s'explique également par les revalorisations dites exceptionnelles de la prime d'activité et de l'allocation aux adultes handicapés (AAH).

L'effet d'ensemble est relativisé par des mesures de paramètre qui minorent, voire neutralisent les revalorisations. Le Gouvernement donne d'une main pour reprendre de l'autre !

Ainsi, pour la prime d'activité, l'abattement sur les revenus d'activité pris en compte est passé de 62 à 61 %. Sur les 20 euros de revalorisation annoncés, une personne au Smic sans enfant n'en gagnerait que 8 euros ! Autre réforme paramétrique : l'exclusion des bénéficiaires de rentes AT-MP et de pensions d'invalidité de la prime d'activité. Enfin, est supprimée la revalorisation annuelle pour 2019 et 2020 de la prime et de son bonus, indexés jusque-là sur l'inflation.

En ce qui concerne l'AAH, le rapprochement des règles de prise en compte des revenus d'un couple dont un membre perçoit l'AAH sur celles d'un couple au RSA conduit à abaisser le plafond de ressources à 1,89. Ce plafond sera abaissé à 1,81 en 2019. Le complément de ressources, qui atteint 179 euros par mois, est supprimé par l'article 83 - que nous vous proposerons de supprimer. Enfin, la revalorisation annuelle de l'AAH sera nulle en 2019 et limitée à 0,3 % en 2020.

Le Gouvernement a su communiquer abondamment sur les coups de pouce, en oubliant les coups de ciseaux qui seront autant de mauvaises surprises pour les plus vulnérables ! Nous souhaiterions, madame la ministre, que vous nous transmettiez des simulations chiffrées pour mesurer précisément l'impact réel de ces mesures de restriction.

Malgré ces insuffisances, la commission des finances a décidé d'adopter ces crédits et de déposer un amendement sur le complément de ressources. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Éric Bocquet, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Au-delà des revalorisations et des mesures paramétriques, la mise en oeuvre du budget 2019 de la mission est entourée d'un certain nombre d'incertitudes.

En ce qui concerne le financement des mineurs non accompagnés, l'aide exceptionnelle aux départements pour la prise en charge partielle des dépenses d'aide sociale à l'enfance est reconduite, mais le niveau des dépenses prises en charge par l'État diminuerait de 30 à 15 %... Sur ce sujet qui relève de la politique nationale d'immigration, à l'État de prendre ses responsabilités en assumant les dépenses d'évaluation et de mise à l'abri et en augmentant l'aide aux départements.

Si nous saluons les objectifs du plan Pauvreté et le travail mené par le délégué interministériel, que nous avons auditionné, il demeure que la majorité des crédits repose sur une contractualisation avec les départements. La mise en oeuvre de ce plan semble ainsi compromise, au vu de la situation financière de ces derniers.

Incertitudes toujours sur la suppression de la prise en compte des rentes AT-MP et pensions d'invalidité dans le calcul du droit à la prime d'activité. Cette mesure avait été adoptée en loi de finances pour 2018, contre l'avis du Sénat, pour une application au 1er janvier 2018. Elle n'a finalement été appliquée qu'au 1er juin 2018, avant que le Gouvernement ne fasse machine arrière au vu des conséquences sur les bénéficiaires, qui perdaient entre 60 et 200 euros par mois. On ne peut que regretter la mise en oeuvre chaotique de cette mesure et l'absence de publicité auprès des bénéficiaires.

Les crédits du programme 137 relatif à l'égalité entre les femmes et les hommes sont stables à l'euro près, ce qui masque des situations contrastées. Ainsi, les crédits liés à la lutte contre la prostitution diminuent. Or le maintien de financements aux associations est essentiel : d'elles dépend la mise en oeuvre de la loi du 13 avril 2016 et des parcours d'accompagnement de sortie de la prostitution.

Enfin, le programme 124 voit ses crédits diminuer de près de 2,5 %. Les ministères sociaux, non prioritaires, sont touchés significativement depuis plusieurs années par des mesures d'économie budgétaire. Le processus de rationalisation semble avoir atteint ses limites et nous serons attentifs au maintien d'un niveau de crédits satisfaisants. Malgré mon avis défavorable à titre personnel, la commission des finances a adopté les crédits de cette mission.

M. Philippe Mouiller, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales .  - Je suis rapporteur pour avis de ces crédits depuis quatre ans. Malgré leur augmentation régulière, je constate une évolution moins solidariste des politiques financées.

L'objectif de la prime d'activité est ambigu : minimum social ou incitation financière au retour à l'emploi ? Elle repose sur deux composantes, l'une familialisée, l'autre individuelle. Le Gouvernement privilégie la seconde, c'est-à-dire l'incitation financière au retour à l'emploi, au détriment de la première, c'est-à-dire l'augmentation du niveau de vie des plus modestes.

Le plan Pauvreté sera orienté vers l'insertion dans l'activité : les efforts porteront sur les moins pauvres des plus pauvres. On réserve aux autres des prestations en nature : crèches à vocation sociale et petit-déjeuner pour tous, dénoncés par les associations comme inopérants. Curieuse répartition...

La revalorisation de l'AAH, qui passera à 900 euros fin 2019, est une excellente nouvelle. Attention toutefois à ne pas calquer cette prestation très spécifique sur les critères des minima sociaux conçus pour inciter à la reprise d'une activité. Le rapprochement initié de l'AAH et du RSA, avec la fusion des compléments de ressources, menace cette spécificité.

Enfin, la commission des affaires sociales a adopté un amendement créant un nouveau programme budgétaire spécifique à l'évaluation et à l'hébergement d'urgence des mineurs non accompagnés, afin de consacrer la compétence exclusive de l'État en la matière. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales .  - Cette mission est loin d'épuiser les moyens que la Nation consacre à la solidarité et à la réduction des inégalités.

Le PLFSS pour 2019 consacre 500 milliards d'euros au financement de la protection sociale qui est au coeur de notre système solidaire ; la mission « Travail et emploi », essentiellement consacré à l'insertion dans l'emploi, le budget de l'Éducation nationale et l'Enseignement supérieur sont autant de vecteurs de l'égalité des chances.

Le système socio-fiscal français est un puissant moteur de réduction des inégalités, qui concrétise le troisième terme de notre devise républicaine. Il y a bien un État social, auquel est consacré un tiers de la richesse nationale. Le modèle social français divise par quatre les écarts de revenu entre les 10 % les plus riches et les 10 % les plus pauvres.

Cet effort ne s'est pas démenti durant la crise, notre pays ayant fait le choix d'augmenter les impôts et le déficit, même s'il écornait le soutien aux familles.

Les Français semblaient s'accommoder d'un haut niveau de prélèvements pour garantir cette spécificité. Comment se fait-il alors que ce modèle semble craquer de toutes parts depuis quelques semaines, déchiré entre des injonctions contradictoires de plus de solidarité et de moins d'impôts ?

D'abord, nous ne sommes pas sortis de la panne de croissance. Crise économique, crise des finances publiques, crise sociale, elle est devenue une crise de confiance en l'avenir et dans les institutions.

Les gouvernements successifs n'ont pas su résister à deux écueils : le piège du pouvoir d'achat, porté en étendard alors qu'il dépend avant tout de la situation de l'emploi, et la tentation du meccano fiscal qui entretient l'illusion de l'action mais dont la complexité et les résultats limités sèment le doute quant à ses finalités.

Était-il nécessaire de chambouler à la fois la fiscalité du patrimoine, la CSG, la taxe d'habitation et les cotisations sociales ? Résultat : incompréhension, brouillage et méfiance accrue...

M. René-Paul Savary.  - Tout à fait !

M. Alain Milon, président de la commission.  - Derrière le débat sur l'affectation de telle taxe à telle dépense se profile la question du consentement à l'impôt.

Les cotisations sociales ont un sens : la contrepartie sous forme de prestation. Voilà tout le sens du rétablissement par le Sénat de la contribution salariale d'assurance chômage, qui n'est pas équivalente à une CSG indifférenciée et sans doute trop élevée.

Nous avons besoin de clarté, sur les objectifs d'abord. À quoi sert la prime d'activité ? Comme le disait François Chérèque, le débat entre soutien à la reprise d'activité et soutien au niveau de vie des familles n'est pas tranché, d'où un manque de lisibilité. Manque de clarté aussi sur les bénéficiaires, avec le retour en arrière sur la prise en compte des rentes ATMP et des pensions d'invalidité en tant que revenus professionnels. Manque de clarté sur les résultats attendus enfin. Les revenus de transfert doivent assurer une certaine dignité à ceux qui ne peuvent subvenir à leurs besoins. À tous les autres, la solidarité nationale doit garantir les moyens d'accéder à l'autonomie et à l'émancipation par la santé, l'éducation et le travail. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC et Les Indépendants)

Mme Patricia Schillinger .  - Je serai un peu plus positive et vous apporte mon soutien, mesdames les ministres, dans ces moments difficiles.

Cette mission traduit la volonté du Gouvernement de faire plus pour ceux qui ont moins, avec 21,1 milliards d'euros de CP, en hausse de 7,5 %.

Dès avril et pour la deuxième fois depuis octobre, la prime d'activité sera revalorisée de 30 euros grâce à un bonus pour les personnes entre 0,5 et 1,2 Smic ; cela augmentera le pouvoir d'achat des travailleurs et renforcera l'incitation à l'activité.

La réorganisation des prestations complémentaires à l'AAH rationalise le soutien aux personnes en situation de handicap.

L'article 83 ter, introduit à l'Assemblée nationale, expérimente la délivrance du RSA via un titre de paiement type carte prépayée en Guyane, à Mayotte et à Saint-Martin.

Notre groupe a déposé un amendement qui prévoit l'expérimentation de la distribution de protections périodiques dans les lieux accueillant les femmes les plus vulnérables. La précarité liée aux règles est trop méconnue. Lorsqu'on vit à la rue, les règles représentent des moments difficiles, humiliants pour les femmes qui doivent parfois utiliser des morceaux de vêtements pour se protéger. Cette situation critique sur le plan sanitaire ne peut durer. Testons les solutions qui s'offrent à nous !

M. Jean-Louis Tourenne .  - En cette période troublée que la violence sauvage utilise, j'aurais aimé approuver la mission « Solidarité ». Hélas, le Gouvernement fait de la mystification auprès des plus vulnérables sa méthode. Ce cynisme intolérable nourrit le ressentiment de la population et la défiance envers les élus. Christine Lagarde, que l'on ne peut taxer de gauchisme, accuse les élites d'être inconscientes. (Mme Nathalie Goulet s'exclame.)

Les crédits de l'AAH augmentent de 5,1 %, certes, mais la garantie de ressources vole en éclat par la fusion, injustifiable, du complément de ressources et de la majoration pour vie autonome. À la clé, une perte de 75 à 179 euros pour les personnes concernées.

À cela s'ajoute la baisse de 10 % de l'AAH pour les couples de bénéficiaires, la suppression de la prime d'activité aux travailleurs invalides, la hausse des frais de tutelle et la désindexation de l'AAH.

Sur la prime d'activité, la supercherie atteint des sommets : le Gouvernement annonce une revalorisation de 20 euros mais on lit dans le bleu budgétaire, page 38, qu'en parallèle le coefficient de prise en charge des revenus est abaissé d'un point, de 62 à 61 %. En réalité, pour un salarié au Smic, l'augmentation sera de 8 euros sur les 20 promis ! En-dessous d'un demi Smic, pas de prime d'activité. Ce sont toujours les plus fragiles qui sont les plus touchés...

Comment peut-on ainsi tromper, accabler des citoyens qui le sont déjà, pour quelques économies minimes au regard des cadeaux distribués aux plus riches ?

L'égalité homme-femme, grande cause du quinquennat ? Là encore, de la poudre de perlimpinpin ! Les crédits pour l'accompagnement et l'insertion des personnes en situation de prostitution baissent de 20 %, au risque de fragiliser les associations qui font un travail remarquable en la matière.

Vous baissez de 363 000 euros les crédits de l'aide alimentaire, alors que le nombre de demandes atteint quatre millions et que l'Union européenne peine à reconduire ses aides.

Le Gouvernement divise par cinquante le montant de l'aide à la réinsertion des anciens migrants dans leur pays d'origine, passant de 10 millions d'euros à 200 000 euros.

La lutte contre la pauvreté - encore une « grande priorité » de votre Gouvernement - est un alibi pour tenter de redorer votre image de Gouvernement des riches. Seulement 135 millions d'euros, pour sortir de la misère huit millions de pauvres, trois millions d'enfants ! Il est vrai que l'ambition est de faire participer les collectivités territoriales... Comment croire encore à la parole du Gouvernement ?

Après 287 suppressions de postes en 2018, les ministères sociaux en perdent 460 en 2019. Curieuse façon de prétendre mener une politique sociale ambitieuse !

Un tel acharnement contre la cohésion sociale, c'est la négation de nos valeurs de solidarité, fondement, selon Edgar Morin, d'une société civilisée.

Il est grand temps de changer d'orientation, de lutter contre les inégalités plutôt que de les accroître, de favoriser l'épanouissement de tous, de rassembler la Nation autour d'un projet pour une société plus juste, plus douce, plus harmonieuse et plus solidaire. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Marc Gabouty .  - Les crédits de la mission s'élèvent à plus de 21 milliards d'euros en 2019, en hausse de 7,5 %. C'est l'une des évolutions les plus favorables de ce budget.

La prime d'activité et l'AAH représentent 90 % des crédits. Nous sommes attachés à ces mécanismes de solidarité destinés aux plus vulnérables et aux plus précaires.

Le budget traduit en partie le plan Pauvreté annoncé par le président de la République en octobre dernier.

La prime d'activité, qui bénéficie à 2,8 millions de nos concitoyens, traduit une politique d'incitation à la reprise de l'activité et un soutien au pouvoir d'achat. Avec l'amendement du Gouvernement à l'Assemblée nationale, le Smic augmentera ainsi de 30 euros en 2019, puis de 20 euros les deux années suivantes. D'ici 2021, la hausse sera de 80 euros.

Les crédits du programme 157 sont en hausse de 5,1 %, pour porter l'AAH à 900 euros fin 2019. C'est une mesure de justice et de solidarité, même si l'on reste sous le seuil de pauvreté.

Les crédits consacrés aux mineurs non accompagnés sont passés de 15,7 millions en 2017 à 132 millions en 2018 et 141 millions en 2019. Le Gouvernement s'est engagé à avancer vers une nouvelle contractualisation avec les conseils départementaux. Philippe Mouiller juge toutefois ces crédits insuffisants et propose de créer un programme budgétaire distinct, pour inciter l'État à assumer une mission qui relève de sa compétence exclusive.

Citons aussi l'aide alimentaire, pour 51,9 millions d'euros, la protection juridique des majeurs, pour 160 millions, et l'égalité homme-femme, avec des crédits stables à 30 millions d'euros.

Une progression en masse financière de 7,5 % est remarquable, même si elle est sans doute peu audible dans le contexte actuel, et certaines critiques me semblent un peu caricaturales.

Le groupe RDSE se félicite de cet effort et votera ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

Mme Élisabeth Doineau .  - Le 13 septembre, le président de la République dévoilait son plan Pauvreté, contre les inégalités de destin et pour une égalité des chances réelles. Cette priorité se traduit par une hausse des crédits de cette mission de 7 %.

Dans le même temps, le PLFSS entérine le quasi-gel des prestations sociales pour les deux années à venir. Si le Gouvernement concentre ses efforts sur les plus fragiles, il risque de placer un certain nombre de foyers aux portes de la pauvreté. Le sentiment de déclassement grandit au sein de la population qui travaille - en témoigne le mouvement des gilets jaunes.

Le programme 157 retrace les crédits de l'AAH, en hausse de 5,1 %, portant l'enveloppe à 11,9 milliards d'euros. L'aide à taux plein passera à 900 euros fin 2019, ce qui est à saluer. Mais l'alignement des ressources prises en compte sur celles d'un couple touchant le RSA conduit à réduire le plafond - or AAH et RSA n'ont pas le même objectif.

Le programme 304 mobilise 7,7 milliards d'euros, soit 1 milliard de plus qu'en 2018. La revalorisation de la prime d'activité, de 20 euros, s'élèvera à terme à 80 euros par personne au niveau du Smic. Comme le soulignait Philippe Mouiller, la prime d'activité incite les personnes peu insérées dans l'emploi à s'y insérer davantage mais le Gouvernement semble oublier ceux qui en sont très éloignés.

Avec Jean-Pierre Godefroy, nous avions demandé, dans notre rapport d'information, une vraie prise en charge par l'État des mineurs non accompagnés. Depuis 2014, leur nombre n'a cessé d'augmenter, ce qui met les départements dans une situation inextricable. Le problème ne réside pas dans les moyens alloués mais dans leur capacité d'accueil. Les mineurs sont de plus en plus souvent logés à l'hôtel.

M. Michel Savin.  - À la rue !

Mme Élisabeth Doineau.  - Je soutiens donc l'amendement de M. Mouiller. Pourquoi ne pas créer une plateforme interdépartementale pour plus d'équité dans l'évaluation des jeunes ?

Surtout, il faut lutter contre les filières de passeurs et dissuader les candidats à la migration en travaillant avec les pays de départ.

Un mot enfin sur la grande cause du quinquennat : l'égalité femmes-hommes. Les crédits ne sont pas augmentés. Je m'interroge...

Le groupe UC votera les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les bancs des groupes UC et RDSE)

M. Daniel Chasseing .  - Les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » s'élève à 21 milliards d'euros, en hausse de 7,5 % par rapport à 2018. Nous saluons cette évolution, signe de l'attention que porte l'État aux plus vulnérables.

Le programme « Inclusion sociale et protection des personnes » augmente de 14 % avec la revalorisation de la prime d'activité dont le Gouvernement souhaite faire un instrument de retour à l'emploi.

Le programme 157 augmente de 5,13 % grâce à la revalorisation de l'AAH, que notre groupe approuve. Le doublement du nombre d'entreprises adaptées est à saluer, car la sortie de la précarité pour les personnes handicapées se fera par la création d'emplois adaptés.

Certaines réformes de paramètre minorent toutefois ces revalorisations.

Notre groupe souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur les mineurs non accompagnés, passés de 20 000 en 2017 à 30 000 en 2019, et qui font peser une charge de plus de plus lourde - et à terme intenable - sur nos départements. Certes, le budget a décuplé ces dernières années mais cela reste insuffisant ! L'État doit prendre sa part de responsabilité.

S'agissant de la mise en oeuvre de la stratégie Pauvreté, la contractualisation avec les départements est pertinente mais certains d'entre eux sont dans une situation financière très difficile.

Nous saluons les crédits consacrés à la grande cause nationale qu'est l'égalité femmes-hommes mais ils pourraient être plus élevés, notamment pour soutenir les associations qui luttent contre la prostitution et les violences sexistes.

Cette mission, sixième poste budgétaire de l'État, est au coeur de l'action publique. Le groupe Les Indépendants se félicite des efforts consentis et votera ces crédits.

Mme Laurence Cohen .  - Le projet de loi de finances pour 2019 prévoit une hausse des crédits de cette mission de 19,44 à 20,93 milliards d'euros entre 2018 et 2019. Par les temps qui courent, c'est plutôt une bonne surprise.

La revalorisation de l'AAH est à saluer, même si nous déplorons les modifications de paramètres qui réduiront le nombre de bénéficiaires. Elle ne fait pas oublier la suppression du complément de ressources de l'AAH et le rejet de notre proposition de loi pour supprimer la prise en compte des revenus du conjoint dans le calcul de l'AAH.

La revalorisation exceptionnelle de la prime d'activité est nuancée par la baisse de l'abattement, le gel des revalorisations et l'exclusion des bénéficiaires de pension d'invalidité et de rente AT-MP.

Des augmentations de crédits en trompe-l'oeil, qui masquent en réalité des mesures d'économies, le Gouvernement prenant aux uns pour donner aux autres...

Le financement du programme 304 consacré aux mineurs non accompagnés augmente certes mais est contrebalancé par la hausse du nombre de bénéficiaires. La mise en oeuvre dépend des départements, dont on sait les difficultés, or les aides de l'État sont insuffisantes. Au Gouvernement d'assurer la protection de ces mineurs en situation de grande précarité.

Le groupement d'intérêt public Enfance en danger qui gère le 119 voit ses crédits revenir à leur niveau de 2017. Nous serons vigilants pour 2020, car les professionnels doivent pouvoir exercer leurs missions dans de bonnes conditions.

Le budget de l'égalité femmes-hommes est trop faible pour être vraiment ambitieux : 30 millions d'euros, soit 0,007 % du budget de la France. Nous regrettons que la grande cause du quinquennat ne bénéficie pas de davantage de crédits.

Je regrette que l'intitulé des actions 21,22 et 23 ne mentionne pas la lutte contre la prostitution et les violences sexuelles et sexistes. Le soutien aux associations travaillant à la sortie de la prostitution diminue à nouveau. N'en déplaise au Gouvernement, nous pensons que ce dispositif peut monter en puissance à condition d'être soutenu.

Alors que la France traverse une crise profonde, vous continuez à appliquer de vieilles recettes, sans écouter ceux qui souffrent de vos choix politiques injustes. Le groupe CRCE votera contre ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé .  - J'ai l'honneur de vous présenter, avec Sophie Cluzel, le budget de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ». En cohérence avec le PLFSS, il met en oeuvre nos priorités : priorité aux plus fragiles, priorité aux salariés modestes, pour que le travail paie davantage.

Les crédits augmentent de plus de 7 %, soit 1,4 milliard d'euros supplémentaires. C'est considérable.

Ce budget est d'abord celui d'une solidarité renforcée au bénéfice de nos concitoyens les plus fragiles. La stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté, présentée le 13 septembre par le Président de la République, vise à éviter que les enfants pauvres d'aujourd'hui ne deviennent les adultes pauvres de demain.

La contractualisation avec les territoires est dotée de 171 millions d'euros pour l'accompagnement des sortants de l'aide sociale à l'enfance (ASE), l'accompagnement des bénéficiaires du RSA, la formation des travailleurs sociaux, l'accueil social de proximité.

La hausse de 5,1 % des crédits du programme 157 « Handicap et dépendance » traduit la promesse d'une société plus inclusive, donnant à tous leur juste place dans le projet national. La progression prévue de l'AAH représente 41 euros par mois. Le montant total sera porté à 900 euros par mois fin 2019, soit un effort de 2,5 milliards d'euros sur le quinquennat.

Parce que le travail conduit à l'émancipation sociale, le soutien à l'insertion professionnelle des travailleurs handicapés est également renforcé.

L'effort d'accompagnement médico-social et professionnel vers le milieu ordinaire est aussi important, en hausse de 40 % par rapport à 2018. Cette augmentation s'inscrit dans le cadre du Comité interministériel du handicap du 25 octobre qui a mobilisé tous les ministères autour du Premier ministre pour simplifier les droits des personnes et lutter contre les ruptures de parcours des personnes handicapées.

L'État reprend à sa charge le financement du RSA en Guyane et à Mayotte, pour 170 millions d'euros. Il s'agit de soulager les collectivités sans remettre en cause leurs compétences en la matière.

L'État a entendu les difficultés des départements s'agissant des mineurs non accompagnés. À compter de 2019, la compensation des dépenses des départements sera plus juste, sur la base d'un forfait par jeune évalué. Une partie sera en outre prise en charge au titre de l'ASE, le dispositif exceptionnel étant reconduit en 2019. Le Gouvernement a même souhaité aller plus loin en relevant son aide financière. L'aide forfaitaire atteindra 6 000 euros et prendra en charge le financement de 75 % des mineurs non accompagnés supplémentaires admis à l'ASE, contre 50 % auparavant. En tout, 175 millions d'euros seront consacrés à l'aide aux départements.

Nous oeuvrons à l'avènement d'une nouvelle contractualisation avec les départements dans la déclinaison des aides sociales, avec Jacqueline Gourault.

L'effort du Gouvernement vise aussi les salariés modestes. La prime d'activité, qui bénéficie à 2,8 millions de nos concitoyens, sera revalorisée de 80 euros pour un salarié au Smic à la fin du quinquennat. Cet engagement sera tenu : le gain de pouvoir d'achat sera de trente euros en 2019, puis vingt euros en 2020 et vingt euros à nouveau en 2021, qui s'ajouteront aux vingt euros par mois de gain de pouvoir d'achat du fait de la suppression des cotisations salariales. D'ici 2022, le gain pour un salarié au Smic sera donc de cent euros mensuels.

En LFI pour 2017, les crédits pour la prime d'activité n'étaient que de 4,3 milliards d'euros : ils dépassent à présent 6 milliards d'euros.

L'égalité homme-femme a été érigée par le président de la République en grande cause nationale du quinquennat. C'est l'objet du programme 137, qui n'augmente pas, mais son taux d'exécution se rapproche de 100 %.

C'est donc un budget porteur d'une ambition sociale et sanitaire exceptionnelle que nous vous présentons. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; Mme Élisabeth Doineau et M. Jacques Mézard applaudissent également.)

Examen des crédits des missions, des articles rattachés et de l'amendement portant article additionnel

Article 39

Mme la présidente.  - Amendement n°II-435, présenté par le Gouvernement.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

 

 

Handicap et dépendance

 

 

 

 

Égalité entre les femmes et les hommes

 

 

 

 

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

 

 

341 362

341 362

 

 

341 362

341 362

TOTAL

 

341 362

 

341 362

SOLDE

- 341 362

- 341 362

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - La loi de modernisation de la justice du XXIe siècle, promulguée le 19 novembre 2016, prévoit à son article 12 le transfert du ministère des solidarités et de la santé (MSS) au ministère de la justice (MJ) au 1er janvier 2019, du contentieux des tribunaux des affaires de sécurité sociale (TASS), des tribunaux du contentieux de l'incapacité (TCI), et d'une partie des commissions départementales d'aide sociale (CDAS) vers les futurs pôles sociaux des tribunaux de grande instance.

Cette réforme prendra effet le 1er janvier 2019, grâce à la mise à disposition de personnels et de moyens de fonctionnement du ministère de la santé vers celui de la justice.

Le projet de loi de finances prévoit déjà un transfert de 52 ETPT du programme 124 vers le programme 166.

Cet amendement se justifie par l'actualisation du besoin d'agents qui n'était pas stabilisé à la date de dépôt du PLF : le nombre d'emplois transférés et réalloués doit augmenter pour permettre les recrutements au sein du ministère de la justice.

Ainsi, un transfert supplémentaire d'emplois du programme 124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative » vers le programme 166 « Justice judiciaire » est nécessaire à hauteur de 5 ETPT représentant un coût chargé de 341 362 euros.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Le programme 124 a déjà subi des économies budgétaires depuis plusieurs années. Vous êtes les garants de l'adéquation des emplois aux besoins. Avis favorable.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Le Gouvernement a déjà diminué ces crédits. En retirer de nouveaux serait indécent. Nous nous y opposerons.

L'amendement n°II-435 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-297, présenté par M. Mouiller, au nom de la commission des affaires sociales.

I.  -  Créer le programme :

Évaluation et hébergement d'urgence des mineurs non accompagnés

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

141 200 000

141 200 000

Handicap et dépendance

Égalité entre les femmes et les hommes

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

Évaluation et hébergement d'urgence des mineurs non accompagnés

141 200 000

141 200 000

TOTAL

141 200 000

141 200 000

141 200 000

141 200 000

SOLDE

0

0

M. Philippe Mouiller, rapporteur pour avis.  - Cet amendement crée un nouveau programme budgétaire exclusivement dédié à l'évaluation et à l'hébergement d'urgence des mineurs non accompagnés au sein de la mission « Solidarités ». Il s'agit de consacrer par la loi ce qui n'existe pour l'heure qu'au sein des programmes annuels de performance et donc sans valeur contraignante.

Il s'agit surtout d'envoyer un signal fort à l'État en l'incitant à assumer une mission dont les conseils départementaux ont toujours estimé qu'elle relevait de sa compétence exclusive, au titre de la politique migratoire. L'évaluation et l'hébergement d'urgence de jeunes migrants doivent être pleinement conduits par l'État.

Cet amendement se contente de créer le véhicule ; le montant transféré reste égal au montant annoncé au PLF pour 2019.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Avis favorable à ce signal fort envoyé à l'État, qui l'incite à assumer cette compétence régalienne. Cela permettra de distinguer crédits d'aide à l'évaluation de la minorité des crédits d'accueil.

Madame la ministre, nous avons visité il y a quelques jours un établissement d'accueil pour les jeunes de l'aide sociale à l'enfance : vous avez vu le travail important des départements, qui ont de grandes difficultés à faire face à l'afflux de ces mineurs. Dans mon département, nous avons multiplié les crédits par douze entre 2011 et 2018 ! Venez au soutien des départements.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Nous avons entendu ces difficultés et avons augmenté les crédits de prise en charge des mineurs non accompagnés.

Le programme 304 fusionnait l'ancien programme 304 et le programme 106, dont relevait le dispositif d'évaluation de la mise à l'abri des mineurs non accompagnés. Le cadre budgétaire est donc plus lisible pour les politiques de la mission. Il s'inscrit en outre dans la ligne de la décision du comité interministériel de modernisation de l'action publique (CMAP) plaidant pour une réduction du nombre de programmes. Ne portons pas atteinte à la cohérence de l'action 17 qui regroupe les dispositifs pour la protection des jeunes, relevant ou non de l'ASE. Retrait ou avis défavorable.

Mme Laurence Cohen.  - Les explications de Mme la ministre sont surprenantes. Elle défendait un amendement pour abonder le budget de la justice, et là, cet amendement essaye de prendre en compte l'accompagnement des mineurs et ce n'est pas possible ! Les budgets sont insuffisants pour aider les plus fragiles. Encore ce jeu de vases communicants : vous retirez à des personnes fragiles au profit des encore plus fragiles ! Le Gouvernement devrait abonder ce budget. Nous nous abstiendrons.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Les départements sont submergés par l'arrivée de mineurs non accompagnés. J'ai présidé, au nom de l'ADF, une commission de répartition des dépenses et des jeunes. L'État est responsable de la politique d'immigration et a signé la Convention internationale des droits de l'enfant. C'est à lui que revient cette responsabilité !

L'effort de l'État a certes augmenté mais sur une somme de départ très réduite. L'ancien Gouvernement avait reconnu la responsabilité de l'État, même s'il avait participé de façon très insuffisante. Certains départements ne peuvent répondre concrètement à des décisions de justice en cas de maltraitance d'enfants dans leurs propres familles.

C'est un problème majeur. Le groupe socialiste votera l'amendement.

M. René-Paul Savary.  - Vous faites un pas, mais c'est insuffisant. Vous allez davantage vers une politique d'immigration que vers l'ASE.

Mon but, c'est d'éviter l'évaluation. Mettre en cause la parole des mineurs est grave. Si l'on n'évalue pas, cela peut coûter cher ; de plus, on mettra des mineurs avec des majeurs, mais il faut aussi s'en charger ! Si l'on supprime le seuil de l'âge, il n'y a plus de problème d'évaluation. Le département hébergera les migrants et l'État paiera la facture... Travaillons sur ces voies nouvelles, cette porte de sortie peut rendre service à toutes les parties prenantes, notamment les mineurs.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Ce sujet est éminemment sensible, au carrefour de l'immigration et de la protection de l'enfance.

Monsieur Tourenne, je suis troublée : les mineurs non accompagnés, une fois évalués, sont traités comme tous les autres mineurs. Ne les traitons pas différemment des autres mineurs. Je ne ferai pas ce choix. C'est donc un problème purement budgétaire : comment mieux aider les départements devant le flux de mineurs non accompagnés ?

Le PLF 2017 prévoyait 15,26 millions d'euros pour accompagner les départements dans l'accueil des mineurs non accompagnés. Deux ans après, c'est 175 millions d'euros.

Au-delà, tout n'est pas budgétaire. Nous travaillons avec l'Association des départements de France pour raccourcir les délais, notamment pour les tests osseux, très contestés. Nous travaillons avec Mme Belloubet et les départements. L'État ne veut pas dissocier cette politique de celle des mineurs en général. Il ne peut donc que faire un geste budgétaire en faveur des départements. Il ne veut pas créer une protection de l'enfance à double vitesse.

M. Philippe Mouiller, rapporteur pour avis.  - Je maintiens cet amendement qui ne touche pas l'ensemble de la protection des mineurs non accompagnés. La transparence est nécessaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Monique Lubin.  - Ce sont vos propos, madame la ministre, qui me troublent. La gravité du sujet ne mérite pas cette bataille mesquine. Le nombre de mineurs non accompagnés n'a plus rien à voir avec la situation d'il y a deux ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE) Je vois la situation dans les Landes : elle est dramatique. Cette politique devrait entièrement revenir à l'État.

M. Daniel Chasseing.  - Ne dissocions pas les mineurs dans un même département.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Personne ne le fait !

M. Daniel Chasseing.  - En 2017, dans mon département éloigné des frontières, je comptais déjà beaucoup de mineurs non accompagnés. Dans une maison de l'enfance de mon canton, sur 70 mineurs pris en charge, 50 venaient d'Afrique. En 2017, à 15 millions d'euros, le budget était sous-évalué. Celui de 2019, à 141 millions d'euros, bien qu'insuffisant, est dix fois supérieur. Je voterai l'amendement.

L'amendement n°II-297 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-752 rectifié, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

25 121 620

25 121 620

Handicap et dépendance

Égalité entre les femmes et les hommes

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

25 121 620

25 121 620

TOTAL

25 121 620

25 121 620

25 121 620

25 121 620

SOLDE

0

0

M. Jean-Louis Tourenne.  - Nous regrettons que les ministères sociaux faisant partie des ministères non prioritaires soient ainsi touchés significativement depuis plusieurs années par des mesures d'économie budgétaire. Il est donc très difficile de mettre en oeuvre une politique sociale stable et ambitieuse lorsque les effectifs qui la mettent en oeuvre ne cessent de diminuer à ce niveau.

Les politiques sociales et pour les droits des femmes voient leurs crédits et donc leur personnel diminuer.

Madame la ministre, je n'accepte pas votre mauvais procès. Je n'ai pas de leçons à recevoir ! Les mineurs non accompagnés dans le département que j'ai présidé étaient très bien pris en charge.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Vous mesurez à quel point la question des mineurs non accompagnés est douloureuse pour les départements. Tout craque de partout.

Nous partageons la préoccupation des auteurs, mais cet amendement n'est pas réaliste. Avis défavorable.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Avis défavorable. Nous nous inscrivons dans une réforme de l'État pour réduire la dépense publique, mais ne souhaitons pas obérer les missions des ARS. Une revue des missions des ministères sociaux a été réalisée, pour rationaliser les actions des agences, avec les partenaires sociaux, a été réalisée.

L'amendement n°II-752 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-755, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

 

 

 

 

Handicap et dépendance

 

 

 

 

Égalité entre les femmes et les hommes

2 400 000

 

2 400 000

 

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

 

2 400 000

 

2 400 000

TOTAL

2 400 000

2 400 000

2 400 000

2 400 000

SOLDE

0

0

M. Jean-Louis Tourenne.  - Si les crédits pour le programme « Égalité entre les femmes et les hommes » sont les mêmes qu'en 2018, la répartition n'est pas la même, au détriment des associations qui accompagnent les personnes prostituées qui s'engagent dans un parcours de sortie. Il faut revenir sur cette diminution de crédits.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Éric Bocquet et moi-même avons rencontré les représentants des associations oeuvrant dans ce domaine et considérons que les crédits doivent être maintenus.

Toutefois, ils ne diminuent que de 416 000 euros, et non de 2,4 millions, et les crédits aux associations sont relativement préservés. Madame la ministre, quelle est la montée en charge prévue pour le dispositif de sortie de la prostitution et quelle est l'évolution prévue de la consommation de ces crédits ? Avis défavorable.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Le budget est sincère, il correspond aux besoins. Il y a parfois eu, dans le passé, une volonté d'affichage et une sous-exécution massive ensuite. Cette année, nous avons un objectif inverse, celui d'aller vers un taux d'exécution de 100 % et nous avons d'ailleurs dégelé les crédits de précaution. Près de 2,1 millions d'euros sont ainsi consacrés aux associations qui viennent en aide aux personnes en situation de prostitution et 2 millions à l'allocation financière d'insertion sociale et professionnelle. Avis défavorable.

Mme Michelle Meunier.  - Le hasard du calendrier fait qu'une table ronde se tient en ce moment même sur les femmes porteuses de handicap et victimes de violences sexuelles et sexistes, et je remercie Mme Cluzel pour sa présence.

Toutes les associations nous disent la même chose : les moyens n'y sont pas ! Celles qui oeuvrent dans les comités départementaux d'aide à la sortie de la prostitution ne disent pas autre chose. Je voterai l'amendement.

Mme Laurence Cohen.  - Le Gouvernement a fait de l'égalité femmes-hommes une grande cause nationale, mais les budgets qui lui sont alloués sont très insuffisants ! Heureusement que c'est une grande cause nationale !

Les associations nous appellent au secours ! L'application de la loi est remise en cause. Et le Gouvernement, qui en est responsable, dit qu'il ne comprend pas car tout va bien... Dans nos permanences, on voit tout le contraire. Nous nous abstiendrons.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Si on affiche un budget important mais sans avoir les moyens de l'exécuter, cela s'appelle un effet d'annonce, cela s'est déjà vu dans le passé. Notre objectif est l'exécution de ce budget, dont le taux a progressé de trente points !

Nous privilégions la sincérité et l'accompagnement réel des personnes engagées dans la sortie de la prostitution : au 31 août, il y avait 68 bénéficiaires et 85 personnes engagées dans un parcours de sortie de la prostitution. 35 commissions étaient installées et 59 sont prévues d'ici la fin 2018. 81 associations sont agréées pour la mise en oeuvre du parcours de sortie de la prostitution sur 62 départements.

L'amendement n°II-755 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-756, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

 

 

 

 

Handicap et dépendance

 

 

 

 

Égalité entre les femmes et les hommes

900 000

 

900 000

 

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

 

900 000

 

900 000

TOTAL

900 000

900 000

900 000

900 000

SOLDE

0

0

M. Jean-Louis Tourenne.  - Madame la ministre, avec toute la courtoisie que je vous dois, les discours revendiquant si fortement la sincérité me laissent circonspect. La loi date de 2016, sa montée en charge ne peut être que progressive. Si réduction il y a, c'est que les actions menées régressent, ce qui pénalise les personnes qui veulent sortir de la prostitution. Abolissons la prostitution : le corps des femmes n'est pas à vendre. Cet amendement le réaffirme en réinjectant les 900 000 euros qui manquent.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Avis défavorable.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°II-756 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-753, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

 

500 000

 

500 000

Handicap et dépendance

 

 

 

 

Égalité entre les femmes et les hommes

500 000

 

500 000

 

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

500 000

500 000

500 000

500 000

SOLDE

0

0

M. Jean-Louis Tourenne.  - Je vais faire mon one-man-show durant quelque temps... Nous nous inquiétons des moyens affectés aux têtes de réseau qui font un travail remarquable pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles et pour accompagner les personnes qui en sont victimes. Sans moyens, ils mettront la clé sous la porte ! Vous invoquez un principe de réalité, mais le nombre de parcours réalisés dépend au contraire des crédits qui leur sont alloués.

Nous réinjectons les 500 000 euros manquants.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - La répétition est mère de la pédagogie.... Les moyens nécessaires sont là : avis défavorable.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Même avis.

Mme Nathalie Goulet.  - Déshabiller Pierre pour habiller Paul, c'est le principe de la LOLF. J'en profite cependant pour demander à madame la ministre de nous aider à évaluer les politiques menées. Nous manquons de culture de l'évaluation. Nous comprenons l'argument de la sincérité, mais il faudrait mieux communiquer sur les actions menées pour susciter la demande ; les besoins sont extrêmement importants. Lors de la prochaine loi de finances, grâce à l'évaluation, nous saurons précisément à quoi nous en tenir.

L'amendement n°II-753 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-754, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

Handicap et dépendance

Égalité entre les femmes et les hommes

400 000

400 000

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

400 000

400 000

TOTAL

400 000

400 000

400 000

400 000

SOLDE

0

0

M. Jean-Louis Tourenne.  - Transvaser des crédits, j'en conçois les limites puisque toutes les actions sont indispensables...

Nous ne pouvons tolérer la baisse de 400 000 euros pour le financement de l'allocation financière d'insertion sociale et professionnelle.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Avis défavorable pour les mêmes raisons que précédemment. Nathalie Goulet a raison : si courant 2019, nous pouvions converger dans l'évaluation du dispositif, nous éviterions de réitérer ces débats l'an prochain.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Aujourd'hui, nous avons une vision assez parcellaire de cette politique car la loi est d'application récente et la montée en charge a été très lente. Je m'engage à revenir vers vous en 2019 avec des éléments d'évaluation plus précis. Avis défavorable pour l'heure.

Mme Michelle Meunier.  - Merci de l'intérêt que vous affichez pour cette loi, attaquée au moyen d'une QPC qui a été récemment déposée. Nous avons besoin du soutien du Gouvernement.

Pour les associations de terrain, le compte n'y est pas, hélas.

L'amendement n°II-754 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-694 rectifié, présenté par Mme Schillinger et les membres du groupe La République En Marche.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

Handicap et dépendance

Égalité entre les femmes et les hommes

150 000

150 000

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

150 000

150 000

TOTAL

150 000

150 000

150 000

150 000

SOLDE

0

0

Mme Patricia Schillinger.  - La précarité liée aux règles est un sujet assez peu connu et peu abordé en France. Il n'est pas normal de ne pas avoir les moyens de se procurer des protections hygiéniques. En France, ces dernières représentent un budget annuel allant selon les sources de 25 euros à plus de 50 euros par femme. Une femme utilise en moyenne 22 tampons ou serviettes par cycle, ce qui représente un coût estimé entre 1 500 et 2 000 euros au cours de sa vie...

Certaines mutuelles, notamment étudiantes, se sont emparées de ce problème sanitaire et social : elles proposent ainsi un forfait de 20 à 25 euros par an pour le remboursement de ces protections, sur présentation du ticket de caisse ou d'une facture. 

Néanmoins, ces dépenses sont d'autant plus importantes pour les femmes en situation de pauvreté et de précarité, dont le faible niveau de vie les contraint tout particulièrement dans leur quotidien et parfois même jusqu'au renoncement à satisfaire ce besoin de protection des plus élémentaires.

À la rue ou en centre d'hébergement, les règles restent souvent un moment difficile, humiliant, et très difficile à gérer pour beaucoup, contraintes parfois d'utiliser des morceaux de vêtements pour se protéger.

Le sujet touche aussi nos adolescentes : certaines jeunes filles manquent l'école car elles n'ont pas accès aux protections hygiéniques.

Je veux rendre hommage à l'association Règles élémentaires fondée par Tara Heuzé-Sarmini en 2015 et qui a distribué gratuitement plus de 200 000 protections hygiéniques depuis trois ans.

Par cet amendement, nous souhaitons que soient organisées en France des expérimentations, au sein de deux régions volontaires, de libre distribution de protections périodiques dans différents lieux accueillant du public, notamment les plus vulnérables. (Mme Michelle Meunier applaudit.)

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Le rapport sur l'aide alimentaire qu'Éric Bocquet et moi-même avons réalisé montre que de nombreuses associations d'aide alimentaire, système efficace et qui démultiplie l'action publique, distribuent de plus en plus des protections hygiéniques. Investissons plutôt dans le soutien à ces associations. Avis défavorable.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Madame la sénatrice, vous soulevez un problème majeur. Le programme 124 ne peut être le support d'une telle proposition. Je m'engage à trouver un vecteur pour améliorer l'accompagnement des femmes partout sur le territoire. Retrait ?

Mme Patricia Schillinger.  - Je vous fais confiance, madame la ministre. Mais il faut élargir les lieux de distribution, monsieur Bazin. Ne nous bornons pas aux seuls lieux de distribution d'aide alimentaire. Je suis disponible pour travailler avec Mme Schiappa sur le sujet.

L'amendement n°II-694 rectifié est retiré.

Les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », modifiés, sont adoptés.

L'article 82 est adopté.

ARTICLE 83

M. Maurice Antiste .  - Cet article remet en cause le dispositif de garantie de ressources, adopté en 2005, pour les personnes les plus sévèrement handicapées. Le Gouvernement entend rationaliser les prestations complémentaires de l'AAH puisque la coexistence du complément de ressources - 179,31 euros par mois - et de la Majoration pour la vie autonome - 104,77 euros par mois - nuirait à la lisibilité de l'AAH. Il estime que la fusion de ces deux compléments de ressources répond à une nécessaire simplification du dispositif et qu'elle permettra d'alléger les démarches des bénéficiaires de l'AAH.

Mais cette fusion lui permettra également de les aligner sur la prestation la moins coûteuse, la majoration pour la vie autonome qui est elle-même soumise à la condition de percevoir une aide au logement. Le Gouvernement fera ainsi des économies de l'ordre de 75 à 179 euros par mois par personne concernée.

En décembre 2016, on comptait 152 883 bénéficiaires de la majoration pour la vie autonome et 68 118 bénéficiaires du complément de ressources. Le Conseil National Consultatif des Personnes Handicapées (CNCPH) refuse cette mesure, rappelant que les deux compléments à l'AAH, s'ils ont effectivement des caractéristiques communes, ont également des motifs distincts.

Ainsi, le complétement de ressources a pour objectif de compenser l'absence durable de revenus d'activité des personnes qui sont dans l'incapacité de travailler, alors que la majoration pour la vie autonome favorise l'accès des personnes en situation de handicap à un logement autonome, sur la base d'un taux d'incapacité supérieur ou égal à 80 %.

Je voterai donc pour la suppression de cet article.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-82, présenté par M. Bazin, au nom de la commission des finances.

Supprimer cet article.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Sans revenir sur l'exposé complet de notre collègue, le complément de ressources de 179 euros par mois bénéficie à 67 000 personnes et la majoration pour la vie autonome à 150 000 personnes. Selon le Gouvernement, le manque de simplicité et de lisibilité justifie la fusion.

Or le complément de ressources, permis par la loi de 2015, constituait une avancée. Le complément de ressources compense l'absence durable de revenu, tandis que la majoration pour la vie autonome favorise l'accès à un logement autonome.

Le nombre de bénéficiaires ne constitue pas un surcroît de travail pour les MDPH qui gèrent plus de quatre millions de demandes par an et traitent automatiquement les demandes de complément de ressources et d'AAH.

Cette suppression priverait les bénéficiaires de 75 à 179 euros par mois. Enfin, les gens qui bénéficiaient de ces allocations continueraient à les percevoir tandis que les nouveaux bénéficiaires ne le pourraient pas. C'est une illustration d'un manque de cohérence de la démarche. Supprimons l'article 83.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°II-750, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

M. Jean-Louis Tourenne.  - C'est le même objet. La garantie de ressources disparaîtrait avec cette fusion. Elle donnait à chaque personne handicapée un revenu au moins égal à 998 euros.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°II-770 rectifié, présenté par MM. Corbisez, Artano et Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mmes Guillotin et Jouve et MM. Léonhardt, Requier, Roux et Vall.

M. Éric Gold.  - L'article 83 remet en cause le dispositif du complément de ressources AAH adopté en 2005.

Ce dispositif garantit les ressources des personnes les plus sévèrement handicapées qui ont une incapacité de travail inférieure à 5 %. Sous prétexte de simplifier les compléments de l'AAH, le Gouvernement supprime le complément de ressources au profit de la majoration vie autonome.

Cela entraînera une perte de 75 à 179 euros par mois pour les personnes concernées.

Certes, une mesure transitoire est prévue pour une durée de dix ans pour les bénéficiaires actuels. Mais cela aggrave leur insécurité financière à moyen terme et crée ainsi une disparité de ressources entre les personnes en situation de handicap.

La pauvreté des personnes en situation de handicap est une grave réalité que l'on ne peut ignorer.

Nous proposons donc de supprimer l'article 83.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.  - La coexistence des deux mesures soutenant un même objectif est source de complexité. Nous proposons une simplification importante, afin d'éviter une double appréciation de la preuve du handicap. Le Premier ministre a rendu possible le 25 octobre dernier la possibilité de reconnaissance à vie du handicap.

Le complément de ressources, à vrai dire, est une survivance du passé, et aurait dû disparaître en 2015, lors de la création de la prestation compensatoire du handicap (PCH).

Les bénéficiaires conserveront leurs droits actuels. Le Gouvernement soutient l'autonomie dans le logement des personnes en situation de handicap, grâce à l'habitat inclusif auquel la loi ELAN vient de donner une définition législative, et qui bénéficiera de 15 millions d'euros financés par la CNSA dès 2019.

Nous remettrons à plat la PCH dans le cadre de la Conférence nationale du handicap 2018-2019, lancée ce lundi 3 décembre, journée internationale des personnes handicapées. J'ai confié le pilotage de ce chantier à Marie-Pierre Martin, première vice-présidente du Conseil départemental de Maine-et-Loire. Avis défavorable à ces amendements.

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Nous en avons assez de la communication gouvernementale privilégiant les raccourcis et les petits arrangements avec la vérité. « On va augmenter l'AAH ! », mais l'on découvre qu'en fait il y a fusion de deux allocations ! On nous annonce une augmentation du dispositif zéro chômeur, mais les crédits n'y sont pas.

Idem pour la prime d'activité, le Smic qui augmente supposément de 3 %, alors qu'en réalité, l'augmentation n'est de 1,8 % et obligatoirement indexée sur l'inflation... Ça suffit à la fin ! C'est comme cela qu'on brise le lien de confiance car, constatant ces flous, les gens qui ne croient pas se renseignent sur Facebook, et en viennent à accepter les thèses conspirationnistes.

Arrêtez cette mauvaise foi : elle est à l'origine de la situation que nous connaissons. (Mme Laurence Cohen applaudit.)

M. Alain Joyandet.  - Ce n'est pas faux....

Mme Monique Lubin.  - Madame la ministre, il faut aménager plus de logements pour les personnes handicapées. Si ce n'est pas obligatoire, il n'y en aura pas.

Les amendements identiques nosII-82, II-750 et II-770 rectifié ter sont adoptés et l'article 83 est ainsi supprimé.

Articles additionnels

Mme la présidente.  - Amendement n°II-758, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Après l'article 83

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'avant-dernier alinéa du I de l'article 128 de la loi n°2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...  -  à l'amende prévue à l'article 621-1 du code pénal. »

M. Jean-Louis Tourenne.  - En application de l'article 4 de la loi du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, l'article 621-1 du code pénal dispose que l'outrage sexiste est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la 4e classe et précise les circonstances aggravantes pour lesquelles il est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la 5e classe.

Ce dispositif a vocation à réprimer le harcèlement dans l'espace public - à savoir un comportement qui contrevient à l'égalité entre les femmes et les hommes et à la liberté de circulation des femmes - et a donc in fine vocation à changer ces comportements.

Cet amendement propose d'assurer un suivi de ce dispositif dans le cadre du document de politique transversale relatif à la politique d'égalité femmes-hommes.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - avis favorable.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Votre proposition est déjà satisfaite. Les contributions des ministères de l'Intérieur et de la Justice au document de politique transversale traiteront de cet aspect.

La loi du 3 août 2018 a prévu qu'un rapport récapitule par ministère l'ensemble des articles, évalue la pertinence de la prévention et de la répression, présente les actions, dépenses et emplois, avec une justification au premier euro et des indicateurs de performance. Cela intègre donc le DPT. Retrait ou avis défavorable.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Une fois n'est pas coutume, je vous fais confiance, madame la ministre.

L'amendement n°II-758 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-87 rectifié, présenté par MM. Brisson, Bas et Dallier, Mmes Bonfanti-Dossat et Noël, MM. Frassa et Cardoux, Mme Gruny, M. Courtial, Mmes Bruguière et Di Folco, M. Savary, Mmes Boulay-Espéronnier et Lanfranchi Dorgal, MM. Bonne, Cuypers et Schmitz, Mmes Imbert, L. Darcos et Deromedi, MM. Pellevat, Karoutchi, Pierre, Vogel, Gremillet, Genest, Darnaud, D. Laurent, Mandelli et Rapin, Mme Keller et MM. Le Gleut, Bonhomme, Laménie et de Nicolaÿ.

Après l'article 83

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Les groupements d'intérêt public maison départementale des personnes handicapées, issus de la loi n°2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, sont exonérés de la taxe sur les salaires.

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par une majoration des taux des prélèvements sur les jeux et paris mentionnés aux articles 302 bis ZH, 302 bis ZI et 302 bis ZK du code général des impôts.

M. Max Brisson.  - Peu de temps après leurs créations, nombre de MDPH ont été déstabilisées du fait du choix laissé aux agents de l'État de ne pas rejoindre leur nouvelle affectation en MDPH ou de regagner rapidement leur administration d'origine. L'État n'a pas toujours remplacé physiquement les intéressés, les MDPH ont ainsi recruté des agents contractuels.

Afin de ne pas augmenter le nombre d'agents, certains départements ont confié les ressources financières aux GIP-MDPH pour qu'ils puissent recruter des agents supplémentaires ou remplaçants qui leur étaient nécessaires.

Ainsi, de 2014 à 2016, les dépenses de personnel réglées directement par les MDPH ont cru de 12,4 %, tandis qu'elles baissaient de 4,9 % pour les départements et 11,7 % pour l'État.

Or, contrairement aux collectivités locales et à leurs régies, le GIP-MDPH employeur n'est pas exonéré de taxes sur les salaires. Il est soumis au même régime que les entreprises privées.

Cet amendement les exonère de cette taxe afin de préserver leur situation financière fragile.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Nous partageons les inquiétudes exprimées face aux difficultés des MDPH. Cependant, une exonération pour les GIP-MDPH n'est pas justifiée car ils ont la personnalité morale et sont donc redevables de la taxe sur les salaires.

De plus, nous devons limiter le déficit. Pour autant, il convient de soutenir certaines MDPH, en difficulté financière. Avis défavorable.

M. Éric Bocquet.  - À titre personnel, je suis favorable à cet amendement dont je partage la philosophie. Généralisons l'exonération de la taxe sur les salaires à tous les établissements de santé. Certes, cela aurait un coût, mais derrière le coût, il y a des choix, et c'est l'heure des choix. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État.  - Avis défavorable. Ce serait contraire au principe d'égalité devant la loi et susciterait d'autres demandes, toutes aussi légitimes. La taxe sur les salaires ne s'applique pas aux établissements de l'État. Le coût de cette mesure serait en outre très important.

Il faut simplifier la vie des MDPH, grâce aux droits à vie. Nous ouvrons aussi le chantier de la gouvernance des MDPH. Ces groupements d'intérêt public (GIP) datent de 2005 et leur fonctionnement et leur gouvernance ne correspondant plus aux besoins actuels. Vous serez régulièrement informés de l'avancée de ce sujet. Retrait ou avis défavorable.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Je tremble quand je vous entends parler de simplification ! (Sourires) Souvent, cela se traduit par des amputations. De même, d'exonération en exonération, on ne change rien, et l'on consolide des droits acquis, comme en matière de niches fiscales, auxquelles l'on prétend s'attaquer pour finalement les laisser perdurer.

Les MDPH ont des difficultés qui ne sont pas tant liées à la taxe sur les salaires qu'au fait que l'État n'a pas revalorisé sa participation.

Je tremble encore lorsque je vous entends dire que vous voulez aussi réorienter les objectifs des départements alors que vous ne payez quasiment plus rien. Plutôt qu'une exonération, il faudrait que l'État apporte une juste participation au fonctionnement de ces établissements.

Mme la présidente.  - Veuillez être brefs dans vos prises de parole.

M. René-Paul Savary.  - Le personnel de l'État n'est plus transféré ; les MDPH doivent recruter d'elles-mêmes. C'est ceux-là qu'il faut exonérer de taxes sociales ! Sinon c'est la double peine. Car qui paie le déséquilibre ? Les départements ! La part de la CNSA atteint moins de 50 %. Faites davantage confiance aux départements ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Laurence Cohen.  - Oui à condition de leur en donner les moyens ! Or ce n'est pas le chemin emprunté par le Gouvernement. Les collectivités territoriales ont été particulièrement étranglées. La suppression de la taxe sur les salaires est une idée intéressante. Nous en avons débattu pour les hôpitaux publics lors du PLFSS. Madame la ministre de la santé, vous aviez annoncé une réflexion. J'avais retiré alors mon amendement.

M. Philippe Mouiller, rapporteur pour avis.  - Remettez à plat le fonctionnement des MDPH, au regard de leurs financements et de leurs missions. L'Éducation nationale est parfois absente pour trouver des solutions pratiques.

La traduction juridique de la simplification n'est pas toujours au rendez-vous. Les MDPH connaissent parfaitement les besoins du territoire. Allons jusqu'au bout vis-à-vis des départements.

M. Max Brisson.  - Je suis plus convaincu par MM. Mouiller, Bazin et Savary que par le Gouvernement. Je retire mon amendement d'appel. Distinguons le statut des MDPH employeurs du statut du personnel. Ouvrons une réflexion globale.

L'amendement n°II-87 rectifié est retiré.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État.  - Je suis consciente des difficultés des MDPH ; Corinne Segrétain, du département de la Mayenne, pilotera ce chantier.

J'ai accéléré la fusion des systèmes d'information des MDPH en faisant dialoguer les trois opérateurs. Les départements sont autonomes dans le choix informatique ; nous avons perdu douze ans ! (M. René-Paul Savary proteste.)

Le CNSA est aussi mobilisé. Je compte sur votre appui. 30 % des MDPH sont des maisons de l'autonomie, de proximité. (Mme Patricia Schillinger applaudit.)

L'article 83 bis est adopté.

Article 83 ter

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial .  - J'ai interrogé M. Dussopt sur le changement de modalités d'attribution du RSA en Guyane et à Mayotte.

Quelle est la période de référence : la dernière année ou les trois dernières ?

Le Gouvernement prévoit une période plus longue de domiciliation pour attribuer le RSA. Est-elle prise en compte dans le transfert ?

Mme Agnès Buzyn, ministre .  - Sur la recentralisation du RSA en Guyane et à Mayotte, nous travaillons sur le contenu de cette reprise. Nous expérimentons la carte dématérialisée, mais qui ne peut se faire en Guyane.

L'augmentation de la durée de domiciliation était demandée par les départements. Cette expérimentation est en train d'être conduite. Nous y travaillons et vous répondrons d'ici la fin du mois.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Cela a des répercussions financières. Je vous invite donc à la plus grande transparence sur les conditions de cette reprise.

L'article 83 ter est adopté.

Article 83 quater

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial .  - Cet article rétablit la prise en compte des rentes AT-MP dans le calcul de la prime d'activité jusque fin 2024 pour les seules personnes ayant bénéficié du dispositif entre le 31 décembre 2017 et le 31 décembre 2018.

Nous y sommes favorables mais avons des réserves sur la mise en oeuvre du mécanisme en 2018. Vous traitez différemment des personnes dans la même situation : c'est un droit à deux vitesses.

Vous créez une situation complexe en matière de droits, paradoxale, lorsque vous invoquez un objectif de simplification. C'est d'autant plus regrettable que ce public est particulièrement fragile.

L'article 40 de la Constitution nous interdit de déposer un amendement, mais vous nous demandez de revenir sur ce dispositif !

M. Jean-Louis Tourenne .  - Ce n'est pas juste et ce sont vraiment des économies de bouts de chandelle. C'est une double peine que l'on fait subir à ces personnes accidentées. Je vote contre cet article.

L'article 83 quater n'est pas adopté.

Article additionnel

Mme la présidente.  - Amendement n°II-407 rectifié, présenté par M. Mouiller.

Après l'article 83 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  L'article L. 5135-5 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pendant cette durée, les modalités de tarification ou de financement de l'organisme employant ou accueillant le bénéficiaire de la période de mise en situation en milieu professionnel restent inchangées. »

II.  -  L'article L. 344-2 du code de l'action sociale et des familles est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Ils signent avec les organismes mentionnés au 1° bis de l'article L. 5311-4 du code du travail une convention leur ouvrant la possibilité de prescrire les périodes mentionnées à l'article L. 5135-1 du même code. »

M. Philippe Mouiller.  - Cet amendement favorise l'emploi des personnes en situation de handicap.

En l'état actuel du droit, les périodes de mise en situation en milieu professionnel (PMSMP) sont théoriquement accessibles aux travailleurs d'ESAT intéressés par le milieu adapté, et aux travailleurs d'entreprises adaptées intéressés par le milieu ordinaire.

Néanmoins, en application du code du travail, elles peuvent entraîner, pour l'entité qui accompagne le bénéficiaire, une perte financière non compensée sur la période où ce dernier est accueilli par une autre structure.

C'est pourquoi cet amendement sécurise les financements des organismes qui accompagnent le bénéficiaire de la PMSMP, pour la durée de cette dernière, qui ne peut de toute façon excéder deux mois sur une durée d'un an.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Avis favorable. C'est une excellente initiative.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État.  - Vous connaissez ma détermination à renforcer l'accompagnement vers le milieu ordinaire, mais cet amendement est satisfait par des conventions passées par les ESAT et les entreprises. Sagesse.

L'amendement n°II-407 rectifié ter est adopté et devient un article additionnel.

SANTÉ

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Les crédits de la mission augmentent de 3,5 %, après la hausse inédite de 10 % en 2018, pour atteindre 1,423 milliard d'euros. La mission comporte deux programmes : le programme 204 est la variable d'ajustement et le programme 183, qui correspond à l'aide médicale d'État (AME), ne connaît aucune limite...

Les crédits du programme 204 diminuent de 25 % depuis 2013, tandis que le programme 183 augmente de 27 %, ce qui remet en cause la capacité des opérateurs à assumer leurs missions ; ils n'atteindront pas les objectifs de prévention.

Les crédits de l'aide médicale d'État augmentent de 38 % alors que le nombre de bénéficiaires augmente de 47 %.

En 2019, les dépenses d'assurance maladie atteindront 943,9 millions d'euros, en hausse de 53 millions d'euros, alors que vous réduisez les crédits des opérateurs. C'était 600 millions d'euros lorsque nous étions au gouvernement... Et cela ne suffit pas puisque vous avez encore viré 9,7 millions d'euros vers ce programme il y a quelques jours !

Une réforme de ce programme est urgente, pour le recentrer sur les soins gratuits urgents. Et encore faudrait-il limiter l'immigration.

Nous défendons des amendements réinstaurant un timbre fiscal, supprimé en 2012, en enlevant 300 millions d'euros à ce programme. Responsable, la commission des finances dit ainsi sa volonté de réformer en profondeur l'AME, et vous recommande, s'ils sont adoptés, de voter ces crédits. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

Mme Corinne Imbert, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) La prévention s'impose désormais comme le maître mot des annonces gouvernementales dans le domaine de la santé. Or, en termes de moyens, les intentions peinent encore à se matérialiser. Car, si les crédits de la mission « Santé » progressent globalement de 3,4 %, c'est exclusivement le fait de l'augmentation des moyens dévolus à l'aide médicale d'État.

Les crédits du programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » diminuent, eux, de 1 %. En leur sein, les moyens des agences sanitaires sont, au mieux, stabilisés. Le pilotage des opérateurs progresse mais les moyens de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) sont insuffisants.

Ces opérateurs ont fait l'objet d'une profonde réorganisation et s'engagent désormais dans un mouvement de mutualisation dans le souci d'une plus grande cohérence de nos interventions en matière sanitaire.

En matière de prévention, je souhaiterais également souligner la fragilité du financement du volet « Recherche » des plans pluriannuels de santé. L'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) participe ainsi à de nombreux plans de santé publique : le plan Maladies neuro-dégénératives, le plan France Médecine génomique, le plan Autisme ou encore le plan Maladie de Lyme

J'en viens aux crédits du programme 183 « Protection maladie » qui sont composés à 99 % des moyens alloués au dispositif de l'AME. Pour 2019, il est prévu de consacrer 935 millions d'euros au financement de l'AME, une progression de plus de 5 % par rapport à 2018. Sur le plan de la sincérité budgétaire, il faut reconnaître que, si les crédits prévus en loi de finances au titre de l'AME de droit commun ont été systématiquement sous-estimés depuis sa création par rapport à la dépense exécutée, l'écart s'est réduit en 2017.

C'est pourquoi l'amendement adopté par la commission des finances qui tend à minorer le programme 183 de 300 millions ne me semble pas aller dans le bon sens. (Mme Laurence Cohen applaudit.)

Sous réserve de ces observations, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Santé ».

M. Martin Lévrier .  - Le Gouvernement mène une politique de santé dont les objectifs sont clairs : prévention, adaptation aux besoins des territoires. La stratégie nationale de santé consiste à mobiliser les acteurs pour réduire les inégalités et coordonner tous les acteurs.

Les crédits de la mission ne forment qu'une partie des crédits de cette politique. Le PLFSS 2019, dont le Sénat s'est hélas épargné une deuxième lecture, porte plus de 200 milliards d'euros de crédits...

Cette mission porte deux programmes, le 204 et le 183. Le premier est stable, après une hausse de 10 % en 2018. En 2019, la réflexion sera poursuivie avec chacun des opérateurs pour mieux mutualiser et rationaliser, mieux servir en dépensant moins.

Les crédits destinés aux victimes de l'amiante progressent. Ceux de l'AME aussi, de 45 millions d'euros, pour répondre au problème récurrent de sous-budgetisation, mais aussi à des considérations humanitaires - le serment d'Hippocrate n'est pas négociable  - et sanitaires car la gale, la tuberculose et d'autres virus typiques des maladies infectieuses et de la précarité, peuvent se répandre. Si vous ne le faites pas par dessein humanitaire, faites-le pour vous-même et vos proches, pour éviter une contamination. Les maladies contagieuses ne choisissent ni leur pays ni leurs victimes...

Mais décider de protéger ces femmes et ces hommes n'empêche pas de lutter contre la fraude. D'où la centralisation de l'AME à Paris, Bobigny et Marseille. L'AME est un acte humanitaire de base ; comme de prévention nationale.

Depuis deux ans, le nombre de demandes d'indemnisation des victimes de l'amiante diminue, d'autres types de demandes émergent, telles celles des victimes du valproate de sodium.

Le groupe LaREM votera ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Mme Laurence Cohen .  - À 1,8 milliard d'euros, cette mission complète les politiques d'aide aux plus démunis. Elle augmente mais le PLFSS 2019 prévoit une diminution et la non-compensation de la baisse des charges.

Nous dénonçons ce double discours. Vous diminuez les crédits alors que des millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté. Dans le même temps, vous faites des cadeaux aux plus riches et vous supprimez les contrats aidés.

Alors que se tient la COP24 qui rappelle les engagements de Paris contre le réchauffement climatique, la santé environnementale doit être une priorité. Ce n'est hélas par le cas ; vous réduisez les crédits de 3,5 millions d'euros à 2,78 millions d'euros. Alors que ce devrait être une priorité, c'est une hérésie !

L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) connaîtra une diminution de 20 millions d'euros depuis 2012, soit 13 % de ses crédits et vous lui retirez encore 23 postes en 2019 et autant en 2020. Après le scandale du Lévothyrox, de l'Androcur, de la pénurie de médicaments et des implants files, est-ce raisonnable ? Sans parler des victimes potentielles de la Dépakine, entre 16 000 et 30 000 personnes. Il faut revoir l'ensemble du système d'indemnisation et se donner les moyens financiers d'y parvenir.

Les crédits du budget de l'État et de la branche AT-MP destinés au FIVA diminuent aussi ; ce n'est pas acceptable.

Notre position reste cohérente sur l'AME : les bénéficiaires doivent être intégrés au régime général : 21 % sont des mineurs ! Cela s'inscrit dans notre combat humaniste, solidaire et universaliste.

Le groupe CRCE a beaucoup de raisons de ne pas voter ces crédits.

M. Bernard Jomier .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Une mise en perspective préalable : la hausse globale de 3,4 % masque la baisse de 1 % de son programme 204.

Nous constatons l'affaiblissement du pilotage et des outils de notre politique de santé publique par le ministère au profit d'une concentration croissante par l'Assurance Maladie. L'illustrent les transferts à l'assurance maladie des financements de I'HAS, de l'ATIH, des FIR, de l'Agence de Biomédecine et, désormais acté dans la LFSS pour 2019, de I'EHESP. L'illustre en outre le fait que le reste des crédits non réservés aux agences, qui voient leurs moyens au mieux stabilisés, est en fait principalement consacré aux frais de justice notamment pour l'indemnisation des accidents médicamenteux.

Affaiblissement des outils de pilotage ou étatisation de l'assurance maladie - dont le paritarisme est devenu virtuel ? Il est difficile d'y voir clair.

Les ambitions du plan Priorité prévention ne se retrouvent guère dans ce budget. Les baisses sont à relier à la transformation du fonds sur le tabac en fonds sur les addictions, insuffisamment doté lui aussi, au regard du coût global des ravages de l'alcoolisme.

S'agissant du VIH, le dépistage des populations clés est essentiel pour vaincre un virus sans vaccin, ce qui serait une première.

Avec des crédits en baisse de 20 %, l'ambition de trouver une vraie politique de santé environnementale n'est pas crédible.

L'affaire des malformations congénitales dans l'Ain, en Bretagne et les pays de Loire a aussi nui à la crédibilité de nos institutions sanitaires.

L'enjeu à court terme est de mettre en oeuvre les moyens d'une réduction efficace des facteurs de risque mais aussi de consolider notre système de veille sanitaire. Cela passe par un renforcement budgétaire et par une réévaluation des méthodologies d'expertise épidémiologiques, peu adaptées aux enjeux environnementaux.

L'État doit assumer le pilotage opérationnel d'une vraie politique de santé environnementale, en lien avec les collectivités territoriales.

Le programme 183 sur l'AME fait l'objet d'une estimation sincère. Entre 80 et 140 millions d'euros vont être économisés grâce à l'alignement de la tarification des séjours hospitaliers ; les efforts de rationalisation, préconisés par l'IGF dans son rapport de 2010, plaident pour une mutualisation avec les services de l'assurance maladie. La rationalité économique converge avec la rationalité médicale. L'IGAS recommande depuis des années l'intégration de l'AME dans l'assurance maladie, l'Académie de médecine aussi. Seuls ceux qui regardent l'AME avec les lunettes de la politique migratoire rêvent de la liquider...

La mission « Santé » ne porte certes pas toute la politique du Gouvernement, mais il est difficile de détecter un cap clair, une vision. La politique de prévention, notamment, doit être améliorée.

Sous réserve du maintien des crédits de l'AME, nous adopterons les crédits de la mission. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Stéphane Artano .  - Le 19 septembre, le président de la République rappelait que le système de santé était un pilier de notre République sociale, meilleure concrétisation de la solidarité nationale. La mission « Santé » y concourt.

Je regrette la baisse des crédits de prévention de 6 millions d'euros. C'est peu, mais comme le disait le Premier ministre, « on meurt trop souvent trop jeune en France ». Nous regrettons la baisse de 13 % des dépenses dédiées à la prévention des addictions. La France est l'un des pays européens où les adolescents consomment le plus de stupéfiants.

Je salue en revanche la hausse des crédits destinés à la lutte contre le VIH et les hépatites. Selon Santé publique France, 28 % des personnes diagnostiquées pour une infection au VIH l'ont découvert tardivement ; 49 % n'avaient jamais été testées.

S'agissant de l'ANSM, je ne peux que souscrire aux propos du rapporteur pour avis. Le maintien de la dotation de l'État ne suffira pas alors que les missions de l'agence augmentent pour couvrir l'accès aux innovations thérapeutiques ou la gestion des ruptures d'approvisionnement des médicaments.

L'AME concentre 99 % des moyens du programme « Protection maladie » avec 935 millions d'euros. Comme l'an dernier, la commission des finances propose de réduire ces crédits de 300 millions d'euros. Cela ne nous convient pas : il faudra de toute façon prendre en charge cette dépense. L'accès de tous à la santé est conforme à notre démarche humaniste, au coeur du pacte républicain. Il n'est pas envisageable de refuser de soigner. C'est enfin une nécessité de santé publique.

La commission des finances nous propose aussi une franchise, mais l'IGAS et l'IGF avaient déjà estimé cette mesure inadaptée, complexe et porteuse de risques sanitaires. La centralisation de l'attribution des droits dans trois caisses primaires d'assurance maladie - Paris, Bobigny et Marseille - permettra un traitement plus homogène et un meilleur contrôle des demandes.

Nous voterons ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

Mme Élisabeth Doineau .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Le 18 septembre, le Gouvernement a présenté le plan Ma Santé 2022, qui vise à prévenir les situations à risque et à accompagner. Je salue le cap choisi.

Le modèle du tout curatif n'est pas adapté aux enjeux du vieillissement. La France peut être fière de son système, qui nous permet de jouir de l'une des meilleures espérances de vie : 79,5 ans pour les hommes et 85,4 ans pour les femmes, mais l'espérance de vie en bonne santé n'est que de 62,6 ans pour les hommes et 64,1 ans pour les femmes. On vit plus longtemps, mais en mauvaise santé, notamment après le départ en retraite. La prévention est plus que jamais une nécessité.

La mission « Santé », c'est 1,4 milliard d'euros, répartis entre deux programmes, dont un tiers pour le programme 204. La hausse de 3,4 % est uniquement due à l'augmentation de l'AME ; il y aura même 5,5 millions de moins pour la prévention. Une telle évolution est regrettable. Nous saluons toutefois l'augmentation de 2 millions d'euros des crédits de l'ANSP, mais malheureusement ceux de l'ANSM stagnent, alors qu'elle doit gérer plusieurs crises sanitaires majeures - Lévothyrox, Dépakine, pénuries - qui alimentent la défiance des Français.

L'AME fait chaque année l'objet d'un débat animé. Je serai tentée de reprendre mon discours de l'année dernière...

Je félicite notre rapporteur pour avis, Corinne Imbert, pour sa prise de position digne et responsable, à laquelle je me rallie. L'AME est une nécessité sanitaire, humanitaire et économique. Nous pouvons regretter la difficulté que l'État a à contenir ces dépenses et leur sous-budgétisation régulière mais ne nous enfermons pas dans le déni. Les amendements de la commission des finances ne me paraissent pas opportuns. Sur ce point, les analyses diffèrent au sein du groupe centriste. Je salue la gestion de l'AME par les trois caisses primaires d'assurance maladie de Paris, Bobigny et Marseille. La mutualisation dégagera des économies de gestion et permettra un renforcement du pilotage et du contrôle des dossiers.

Si la priorité est donnée à la prévention, les moyens budgétaires restent limités. Malgré cette déception, le groupe UC votera ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

M. Daniel Chasseing .  - Les crédits de la mission « Santé » s'élèvent à 1,422 milliard d'euros. Les ressources sont modestes mais les objectifs poursuivis sont déterminants. Cette hausse est principalement due à celle de l'AME.

Après une hausse de 10 % en 2018, les crédits du programme 204 sont stables, malgré une multiplication des plans de prévention ; ainsi, le fonds de lutte contre le tabac sera élargi à l'ensemble des addictions.

Nous nous félicitons de la réorganisation du paysage sanitaire et de la mise en place du comité d'animation du système d'agence : c'est un effort de cohérence louable pour mieux piloter les opérateurs sanitaires.

L'ANSM se voit contrainte de repenser son fonctionnement pour faire face à l'accroissement de ses missions. Il lui faut être réactive face à la multiplication des crises sanitaires, gérer les ruptures d'approvisionnement de médicaments mais aussi les conséquences sanitaires du Brexit. Ses crédits sont stabilisés en 2019 à 118 millions d'euros. Il faudrait renforcer son pouvoir de sanction, comme le préconise le rapport de la mission présidée par Jean-Pierre Decool.

Santé publique France et l'Anses vont se pencher sur l'impact de l'usage des produits phytosanitaires sur les agriculteurs, mais aussi sur les malformations congénitales observées dernièrement. Renforçons les moyens des agences de veilles sanitaires pour rétablir la confiance.

L'Inserm participe à de nombreux plans de santé publique : maladies neurodégénératives, médecine génomique, autisme, maladie de Lyme. Trop de programmes ont hélas des plans de financement incomplets. Seulement 4,5 millions d'euros sont inscrits, quand 15 millions sont nécessaires.

Le programme 183 est essentiellement consacré à l'AME, dotée de 935 millions d'euros, en hausse de 45 millions d'euros sur un an. Ces crédits sont sous-budgétisés au regard de la dette envers l'assurance maladie, de 50 millions d'euros. Ils ne tiennent pas compte des frais engagés par les hôpitaux pour soigner en urgence les étrangers en situation irrégulière. Pas moins de 475 millions d'euros restent à charge des hôpitaux depuis 2005.

Je soutiendrai la rapporteure pour avis sur le maintien des crédits ; rétablir un timbre fiscal freinerait l'accès aux soins. Je me réjouis que la lutte contre la fraude progresse, c'est le seul moyen de prévenir les abus.

Le groupe Les Indépendants votera ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants ; M. Yvon Collin applaudit également.)

M. Bernard Bonne .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Les rapporteurs ont parfaitement souligné le déséquilibre entre les deux programmes et les difficultés que rencontrent les opérateurs. Rappelons que ces crédits ne représentent qu'une toute petite partie des moyens de notre politique de santé.

Administrateur de Santé publique France, je mesure le champ toujours plus vaste de cet opérateur et de l'Anses sur la veille sanitaire. Après le dossier de l'amiante, ils se penchent aujourd'hui sur les conséquences des produits phytosanitaires et investiguent les récents cas de malformations congénitales.

Actuellement, ses agents sont en Haute-Savoie pour des cas de toxi-infection alimentaire à la salmonellose. On ne peut à la fois augmenter les missions de ces opérateurs et diminuer de 2,5 % leur plafond d'emplois...

L'implication des professionnels de santé dans la veille sanitaire est un maillon essentiel de la politique de prévention.

Les médecins généralistes sont témoins des inégalités de santé. C'est dans la proximité que la prévention sera efficace. Or les généralistes sont débordés, il faut des mois pour obtenir un rendez-vous chez un spécialiste. Lutter contre les déserts médicaux est une priorité, en zone rurale mais aussi en ville où le coût d'installation est rédhibitoire pour les jeunes médecins. Le lien est clair entre approvisionnement pharmaceutique et présence de professionnels de santé sur un territoire. Vous avez proposé de nombreuses mesures comme l'aide à l'installation dans les zones sous-dotées, l'encouragement à l'exercice mixte, le remboursement de la télémédecine ou le recours aux médecins retraités. Mais ces dispositifs ne sont pas évalués. Qu'en est-il ?

Ces crédits s'inscrivent dans le cadre de la stratégie nationale de santé et du plan Santé 2022. Nous serons vigilants. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Nicole Duranton .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Nous avons la chance d'avoir un système de solidarité qui protège les plus vulnérables. L'État assure une mission de service public auprès des citoyens les plus fragiles.

L'AME a pour but de soigner les étrangers dans un souci d'action sociale et humanitaire. Son principe n'est pas en cause, mais la répartition de son budget est à revoir : 95 % vont aux étrangers en situation irrégulière, dont 85 % sont réservés à l'aide médicale de droit commun et aux soins de confort, non urgents. Celle-ci a augmenté de 11 % depuis 2015, avec un nombre de bénéficiaires toujours en hausse.

Dans mon département rural, l'accès aux soins - dentaires ou optiques notamment - est un luxe. Les crédits de l'AME ne cessent d'augmenter, alors que vous réduisez ceux de la prévention. La dynamique des dépenses n'est pas maîtrisée, le mécanisme n'est pas piloté. La commission des affaires sociales appelle à établir un référentiel d'évaluation et de projection solide de la dépense de l'AME. Point positif, sa dette diminue à 49 millions d'euros, et la lutte contre la fraude progresse.

Soulignons aussi que ces crédits sont inférieurs au plafond inscrit en loi de programmation. C'est heureux, après les dépassements de 2015 et 2017.

Sous réserve de l'adoption des amendements, je voterai ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur plusieurs bancs du groupe UC)

La séance est suspendue à 13 heures.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 14 h 30.

Déclaration du Gouvernement sur la fiscalité écologique et ses conséquences sur le pouvoir d'achat

M. le président.  - L'ordre du jour appelle une déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, en application de l'article 50-1 de la Constitution, sur la fiscalité écologique et ses conséquences sur le pouvoir d'achat.

Je souhaite que ce débat soit à la hauteur de l'intérêt de notre pays. J'appelle chacune et chacun à se montrer respectueux de la diversité des opinions qui vont s'exprimer dans notre hémicycle. Nous devons contribuer, les uns et les autres, à préserver l'unité de la Nation. (Applaudissements prolongés sur tous les bancs)

M. Édouard Philippe, Premier ministre .  - Dans chacun des territoires que vous représentez, depuis trois semaines, des groupes de Français ayant enfilé un gilet jaune, parfois des groupes restreints, parfois des groupes plus larges, organisent des barrages filtrants, ouvrent des péages, occupent des ronds-points. Ces actions se déroulent en général dans le calme ; un calme qui contraste avec l'extrême violence constatée à Paris, à Marseille, à Toulouse, au Puy-en-Velay, où le président de la République s'est rendu mardi, ou encore à La Réunion, où Annick Girardin s'est rendue la semaine dernière pour dialoguer avec les élus et les manifestants et apporter des réponses à leurs questions et à leur colère.

Vous avez été, vous êtes des élus locaux ; moi aussi. Vous ne découvrez pas cette colère ; moi non plus. Nous l'avons sentie monter, année après année, élection après élection, qu'elle s'exprime par l'abstention massive ou des coups de semonce.

Contrairement à certains, je ne désigne pas de coupables, je constate simplement qu'elle vient de loin ; qu'elle a longtemps été muette, tue par pudeur ou par fierté. Certains l'ont reconnu, avec beaucoup de sagesse et d'honnêteté, et je les en remercie. Loin des surenchères, ils recherchent, sans rien renier de leurs convictions, une issue républicaine à cette crise qui a surpris tout le monde.

Marc Bloch que je cite souvent, que j'ai déjà cité ici, évoque, dans l'un de ses plus célèbres ouvrages, l'importance de la lucidité ; la lucidité, cet exercice permanent qui exige d'être constant lorsqu'on croit que ce que l'on fait est juste et d'avoir le courage de se corriger lorsque la situation l'exige. Tous les maires, tous ceux qui ont présidé un exécutif local ont vécu au moins une fois cette expérience. C'est à cet exercice de lucidité que nous nous sommes attelés.

Lucidité, d'abord, sur la situation d'extrême tension que connaît notre pays. Aucune taxe ne vaut que l'on mette en danger la paix civile. Nous avons donc décidé, avec le président de la République, de renoncer aux mesures fiscales concernant le prix des carburants et les prix de l'énergie qui devaient entrer en vigueur le 1er janvier 2019. Le Sénat a voté la suppression de ces taxes dans le projet de loi de finances pour 2019, elles ne seront pas réintroduites. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC et RDSE)

M. Ladislas Poniatowski.  - Très bien !

M. Édouard Philippe, Premier ministre.  - Lucidité sur la méthode, aussi. Une bonne méthode s'adapte à une situation qui, par nature, n'est jamais figée. C'est l'objectif de ce débat que le président de la République m'a demandé de conduire. Nous devons répondre à trois questions très concrètes.

La première concerne le rythme, les modalités et le calendrier de la transition écologique qui, pour notre pays, pour nos territoires, pour notre économie, pour notre agriculture, pour notre pouvoir d'achat demeure un horizon ni négligeable ni négociable. J'ai proposé une première série de mesures d'accompagnement. Massives par leur montant, elles ont prouvé leur efficacité, tout du moins pour une partie de la population, si l'on en juge par le recours à la prime à la conversion automobile - il est supérieur à ce qui avait été initialement envisagé. Le débat doit permettre de les compléter avec les Français, les professionnels, avec les élus et tous ceux qui pourront exprimer un besoin précis et travailler à des réponses adaptées.

Deuxième sujet : les trajets entre domicile et travail, parfois qualifiés d'impôt caché sur le travail. J'ai chargé Muriel Pénicaud, Élisabeth Borne et Jacqueline Gourault d'y travailler avec les organisations syndicales et les élus en approfondissant la concertation qui a été menée sur les mobilités, pour apporter des solutions adaptées, territoire par territoire.

Dernier thème, la fiscalité et la dépense publique. Les Français qui portent un gilet jaune l'ont dit, ils veulent moins d'impôts et de taxes et savoir à quoi ces impôts et ces taxes servent. Il faut donc ouvrir un débat. Certes, le débat budgétaire a lieu chaque année au Parlement mais sa technicité rend difficile la perception des enjeux. Ce débat apportera de la clarté et de la transparence sur cette question très passionnelle en France. J'y fixe deux limites : que le débat ne crée pas de nouvelles taxes et qu'il n'aggrave pas la dette publique. Ne léguons pas à nos enfants des taxes futures, des dettes qui grèveront leur pouvoir d'achat. Mais soyons vigilants que cette baisse de la dépense publique préserve les territoires et les Français qui en ont le plus besoin.

Je souhaite aussi que ce débat nous fasse prendre conscience de notre chance de disposer de services publics de qualité ; des services qui, à l'étranger, se paient souvent très chers et directement. Nous avons certes un haut niveau de prélèvement, mais c'est grâce à ces impôts que nous consacrons 6 200 euros par an à chaque élève du primaire, 8 500 à chaque collégien et 12 000 à chaque lycéen de lycée professionnel.

Ce débat doit être national mais aussi territorial. Il s'appuiera sur les deux assemblées, bien sûr, le Conseil économique, social et environnemental, les institutions régionales, mais ce débat doit être aussi informel, direct. Que chacun sache qu'il pourra y prendre part et être entendu. Je souhaite aussi que l'on évoque les dépenses contraintes qui, sans être des impôts et des taxes, pèsent aussi sur ce qu'il reste à la fin du mois.

Il est impératif que les maires (Murmures sur les bancs du groupe Les Républicains ; M. Bruno Retailleau obtient le retour au calme.) prennent toute leur part dans ce débat. Je remercie tous ceux qui ont relayé ce message d'apaisement, l'association des maires d'Île-de-France qui a ouvert des cahiers de doléances, les maires ruraux qui organisent ce samedi une journée « mairie ouverte » pour dialoguer. Pour moi, la vraie démocratie directe, celle qui allie la proximité et la légitimité, c'est celle-là. Les maires sont, encore une fois, en première ligne pour répondre à la colère ; certains ont demandé des effectifs de police supplémentaires en prévision de samedi prochain, nous travaillons à satisfaire leurs besoins.

Cette lucidité doit aussi nous conduire à apporter des solutions concrètes à nos territoires, des solutions qui ne sont pas toujours spectaculaires mais soient durables. Les territoires n'ont ni les mêmes atouts ni les mêmes besoins. Nous travaillons avec les élus alsaciens à une structuration qui prenne en compte leurs aspirations sans négliger celles des autres élus du Grand-Est. Nous travaillons avec les élus des Ardennes pour construire un pacte, trouver des solutions concrètes et des moyens. Nous poursuivons l'initiative prise des financements aux bassins miniers. Ce sont des solutions sur mesure ; comme celles dont nous discutons pour élaborer le pacte avec la Bretagne et bientôt avec les Pays-de-la-Loire.

Des solutions concrètes, ce sont aussi le déploiement de la police de sécurité du quotidien, le raccordement haut débit avec 2 800 pylônes équipés en 4G ; pour la santé, la suppression du numerus clausus et les 1 500 jeunes médecins qui se sont installés en zones sous-denses, le remboursement de la téléconsultation depuis septembre 2018. Aucun de ces instruments ne constitue à lui seul une réponse, bien sûr, ce sont des éléments de la réponse.

Je citerai également le plan Action coeur de ville doté de 5 milliards d'euros dont bénéficieront 222 villes petites et moyennes ; la réorientation des investissements du TGV vers les trains du quotidien, question délicate pour les territoires qui attendaient depuis longtemps la grande vitesse mais priorité doit aller au désengorgement des métropoles et au désenclavement des territoires ruraux par des trains de proximité.

Que dire des routes ? Nous allons réaliser la RN164 en Bretagne promise par le Général de Gaulle, la RN122 à Aurillac (Exclamations amusées) annoncée par Édouard Balladur, le tronçon de la RN88 entre le Puy et Rodez, la RN2 entre Hirson et Maubeuge, la RN21 vers Périgueux, la RN19 vers Langres et Vesoul ainsi que l'autoroute vers Castres.

La lucidité doit aussi conduire à mieux rémunérer le travail parce que, derrière la question du pouvoir d'achat, il y a celle de la rémunération du travail en France qui, durant de nombreuses années, n'a pas assez augmenté. Depuis octobre, des millions de salariés bénéficient d'une hausse de leur salaire net, elle n'est pas forcément très importante mais elle est réelle. Dès le mois de janvier 2019, le Smic augmentera de 1,8 %. En un an, grâce à l'action conjuguée de l'indexation, de la baisse des cotisations sociales et de la prime d'activité, la hausse est de l'ordre de 3 % par rapport à janvier 2018. La hausse de la prime d'activité que nous avons décidée pour avril 2019 amplifiera encore cet effet. Je suis prêt à examiner toutes les mesures qui augmenteraient les rémunérations au niveau du Smic sans pénaliser excessivement la compétitivité de nos entreprises. Les salariés pourront gagner encore davantage grâce à la suppression des cotisations sociales sur les heures supplémentaires.

Enfin, vous aurez rapidement l'occasion d'acter, dans la loi Pacte, le développement massif de l'épargne salariale, de l'intéressement et de l'actionnariat salarié.

Nous continuons à nous battre pour l'égalité des chances parce que la colère qui s'exprime naît aussi de ce sentiment qu'ont des millions de familles de ne pas avoir les mêmes chances que les autres de réussir. Pour elles, nous avons décidé le dédoublement des classes de REP et REP+, - les retours des parents et enseignants sont positifs, le dispositif « Devoirs faits » au collège, la scolarisation obligatoire dès 3 ans - belle réforme républicaine, la réforme de l'apprentissage, la refonte de la formation professionnelle, l'investissement massif dans les compétences.

La lucidité, toujours, nous oblige à continuer de réduire la dépense publique pour baisser les impôts. Ces deux baisses, parce qu'elles sont liées, sont urgentes. Depuis mai 2017, la France réduit ses déficits ; elle réduit les dépenses de l'État et, grâce aux élus, des collectivités. Les efforts de nos prédécesseurs et, surtout, des Français, permettent de voter un budget de la sécurité sociale à l'équilibre.

Depuis octobre, des millions de contribuables ont bénéficié d'une baisse de 30 % de leur taxe d'habitation, une taxe que tout le monde dit injuste depuis des années. Nous la supprimons par tranche et la compenserons aux collectivités, comme cela est bien naturel et, surtout, comme cela est bien constitutionnel, à l'euro près.

Nous avons choisi de simplifier la fiscalité sur le capital, c'était un engagement des campagnes présidentielle et législative. Nos entreprises, pour se développer, ont besoin de capitaux. Ce choix, nous sommes prêts à l'évaluer. Nous n'avons pas peur du débat, il permettra de documenter, de démontrer le bien-fondé de cette décision.

La lucidité, c'est poursuivre le combat pour les solidarités réelles. Ce ne sont pas les mesures dont on parle le plus et pourtant, quand l'on est élu, on sait à quel point elles changent la vie. C'est le cas de la revalorisation des minima sociaux, du tiers payant pour le complément du mode de garde, des petits-déjeuners en REP+, des repas à 1 euro dans les cantines des communes rurales et de la prise en charge à 100 % des lunettes, prothèses dentaires et auditives.

Un mot, pour finir, des violences déplorées samedi et de la sécurisation des manifestations de samedi prochain. Nos forces de l'ordre ont été victimes d'un déchaînement de violence. Ces hommes, ces femmes ont été les gardiens, les incarnations, les défenseurs de la République. En mon nom personnel, au nom du Gouvernement, et je le crois, des Français, je leur dis ma reconnaissance. (Applaudissements prolongés sur les bancs des groupes Les Républicains, UC, Les Indépendants, LaREM, RDSE et SOCR et sur quelques bancs du groupe CRCE)

Nos autorités judiciaires ont su apporter une réponse pénale rapide et ferme. Je voudrais aussi dire mon dégoût devant le saccage de l'Arc de triomphe et la profanation de la tombe du Soldat inconnu ; ce dégoût, des millions de Français l'ont ressenti dans leur chair tout comme ils condamnent les menaces ou les agressions contre les représentants de la Nation, élus ou fonctionnaires. Nous retrouverons les auteurs de ces violences ; ils seront traduits en justice et, je l'espère, sévèrement punis.

Depuis le début des contestations, nous n'avons jamais interdit un rassemblement. Cela étant, les événements de samedi dernier doivent nous conduire à faire preuve de la plus grande prudence. C'est pourquoi le ministre de l'Intérieur a conseillé à ceux qui comptaient manifester de ne pas le faire. Le Gouvernement déploiera des moyens exceptionnels qui s'ajouteront aux 65 000 forces de sécurité qui seront déployées dans toute la France. Nous continuerons d'interpeller et de traduire en justice quiconque sera pris en flagrant délit de violences ou de dégradations. Nous nous battrons contre la haine et contre cette incroyable violence.

Dans la situation à laquelle nous faisons face, le devoir de lucidité et de responsabilité s'impose à tous : membres du Gouvernement, élus locaux, parlementaires, responsables de formations politiques, éditorialistes, commentateurs, citoyens. Car la liberté va de pair avec la responsabilité. Je veux remercier ici tous ceux qui ont lancé un appel au calme, élus ou responsables syndicaux. Cette responsabilité les honore, elle les grandit.

En France, dans toutes les rues, la République doit toujours avoir le dernier mot, et puisque nous l'aimons, nous devons la préserver. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Les Indépendants et RDSE et sur la plupart des bancs des groupes UC et Les Républicains ; M. Jean-Michel Houllegatte applaudit également.)

M. Jean-Claude Requier .  - Notre pays traverse un de ces moments de fièvre politique qui ont émaillé son histoire. Nul ne saurait s'en réjouir, sauf ceux qui utilisent la haine à des fins électoralistes.

La réponse doit d'abord être politique - et le Sénat doit y prendre toute sa place. Un impératif absolu cependant : le maintien de l'ordre public. Mon groupe le dit : force doit être donnée aux lois de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

Nos démocraties occidentales sont soumises à des forces qui combattent l'héritage des Lumières - aux États-Unis, en Italie, en Pologne, en Hongrie. Réseaux sociaux, chaînes d'information en continu, jamais l'information n'a circulé aussi rapidement, jamais il n'y a eu autant de désinformation.

Pour autant, cette crise ne ressemble à aucune autre car elle se rattache à l'un des plus grands défis de l'humanité. Comme l'immense majorité de nos concitoyens, mon groupe est convaincu depuis longtemps de la menace que fait peser le réchauffement climatique sur l'homme ainsi que de l'urgence d'une transition écologique et énergétique. C'est aussi notre modèle de croissance qui doit être interrogé tout comme la redistribution des richesses. Mais cette transition doit être pensée à l'échelle de nos concitoyens.

Réformer, oui, mais avec pragmatisme. Les revendications d'une grande partie des gilets jaunes sont hétéroclites et parfois contradictoires, mais il est certain qu'il faut répondre aux demandes de ceux qui souffrent - et nous nous étonnons que la parole soit donnée à ceux qui appellent à la sédition.

Nous voyons encore dans cette crise le symptôme de la déconnexion qui s'est progressivement installée entre gouvernants et citoyens. Suppression de la hausse de la fiscalité des carburants, gel de la hausse des prix du gaz et de l'électricité, suspension du nouveau contrôle technique... Nous en prenons acte, ainsi que de l'annonce de la grande concertation à venir. Mais nous notons surtout que le Sénat, et le groupe RDSE en particulier, travaille sur ces questions depuis longtemps, sans être dans la posture ou le tweet permanent. Nous cherchons d?abord à répondre aux besoins spécifiques des territoires, dans leur diversité. Non, tout le monde n'a pas vocation à créer une start-up ! Commençons par déployer partout la 1G... (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE et UC et sur quelques bancs du groupe Les Républicains ; Mme Angèle Préville applaudit également.)

Mon groupe RDSE a toujours privilégié le dialogue à l'exercice vertical du pouvoir. Pour nous, l'empathie est une méthode de gouvernement, sans doute parce que nous avons tous été élus locaux et fiers de l'être... (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE et UC et sur quelques bancs des groupes Les Républicains et Les Indépendants)

Il faut redonner voix aux corps intermédiaires, il faut écouter les Français, ceux qui subissent le recul continu des services publics, ceux qui ont vécu l'instauration technocratique des 80 km/h. (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE, UC et Les Républicains ; M. Vincent Éblé applaudit également.) Dans ces zones rurales, on a plus besoin de sa voiture que d'une trottinette électrique ! (Rires et applaudissements sur les mêmes bancs) Il faut comprendre ces retraités à faibles revenus, à qui l'on a brutalement annoncé qu'ils devraient changer leur chaudière à fioul et ne trouvent pas de banques pour les y aider. Il faut, encore, que la technostructure fasse montre d'un peu moins de certitudes et d'un peu plus d'humilité. (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE, UC et Les Républicains et sur quelques bancs des groupes SOCR et CRCE)

Nous appelons à des mesures pragmatiques et simples : valorisation du travail, services publics, lutte contre les inégalités territoriales. Pour tout cela, nous vous soutiendrons. Pierre Mendès France disait : « la démocratie est d'abord un état d'esprit. » Le groupe RDSE est fier de le porter chaque jour. (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE, UC et Les Républicains et sur quelques bancs du groupe SOCR ; M. Alain Richard applaudit également.)

M. Stéphane Ravier .  - Dix-huit mois après, le chouchou, pour ne pas dire le joujou de la finance, encensé par la presse et prêt à régner, ce président de la République tout puissant est contraint de fuir une France en colère qui scande « Macron, démission ! ».

Pourquoi ? D'abord, la hausse des insultes : « illettrés », « fainéants », « cyniques », « Gaulois réfractaires », « lépreux » pour 11 millions d'entre eux... Ensuite, la hausse vertigineuse des taxes - 60 % du prix du carburant. Enfin, la hausse du mépris d'un mouvement pacifique, (Protestations sur les bancs des groupes LaREM et UC) apolitique et populaire... Qui sème l'insulte, récole la colère. Des millions de Français sur la bande d'arrêt d'urgence sociale sont contraints de puiser dans leur épargne et d'enfiler le gilet jaune, signe extérieur de détresse. Ces Français qui manifestent, ce sont ceux qui travaillent. Ce ne sont ni les très aidés, ces bataillons de l'immigration, (Protestations sur les bancs des groupes CRCE et SOCR) ni les gavés de cadeaux fiscaux. La France des gilets jaunes, des Champs-Élysées, c'est celle de la Madeleine. C'est la France de Johnny Hallyday, (On le réfute sur de nombreux bancs.) la France enracinée, la France périphérique, la France des terroirs et des clochers, contrainte de payer des taxes pour financer des services publics qui profitent à l'immigration.

M. David Assouline.  - C'est une honte !

M. Stéphane Ravier.  - Selon votre logique pollueur-payeur, pourquoi ne taxe-t-on pas les compagnies aériennes et maritimes ? Le Gouvernement protège les forts et matraque les faibles. Pourtant, l'Allemagne et la Chine polluent deux et trente fois plus. Passons au tout électrique et nous sauverons la planète ? Sauf que les batteries polluent plus et nous nous placerons dans la dépendance de la Chine... Vous culpabilisez les Français pour mieux les taxer. Tout est bon, même les plus gros bobards. Et Emmanuel Macron s'apprête à signer le pacte mondial de Marrakech qui fera de l'immigration un droit. Il faudra aider ces gens en tout car ils sont démunis en tout ! C'est délirant et suicidaire. (Vives marques de protestations sur les bancs des groupes CRCE et SOCR)

Nous vous invitons à tourner la page de l'ultralibéralisme au profit d'un modèle national et protecteur. (La voix de l'orateur est couverte par les protestations sur les bancs des groupes CRCE et SOCR, ainsi que sur quelques bancs du groupe LaREM où l'on décompte, seconde par seconde, la fin de son temps de parole.)

M. David Assouline.  - Fasciste !

M. Rachid Temal.  - Au revoir !

M. Hervé Marseille .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Au moment où nous engageons ce débat, l'atmosphère est étrange, pesante, souvent inquiétante. Nous avons l'impression d'une veillée d'armes. Certains jettent de l'huile sur le feu, nous venons de le constater, tandis que le Gouvernement revoit sa doctrine d'emploi des forces de l'ordre.

Comment a-t-on pu en arriver là ? À une France aussi fracturée, parfois désespérée, souvent colérique ? Comment a-t-on pu profaner la tombe du soldat inconnu et saccager l'Arc de triomphe ? Je veux rendre hommage à mon tour aux forces de l'ordre. (Applaudissements)

Oui, votre Gouvernement a eu raison d'engager des réformes trop longtemps repoussées. Oui, votre Gouvernement a raison de vouloir une Europe plus protectrice, Nous subissons non pas trop d'Europe mais une insuffisance d'ambition européenne. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC, M. François Patriat applaudit également.)

Les intentions sont louables mais que d'erreurs de jugement et de maladresses ! Toutes les critiques sont fondées, sauf peut-être celles qui viennent de ceux qui ont le plus rempli la cruche et dénoncent avec cynisme les dernières gouttes versées. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

La France n'a pas l'exclusivité de telles manifestations. En 2013 en Italie, le mouvement des fourches a donné lieu au mouvement Cinq Étoiles et vous savez la suite.... Un nouveau samedi de chaos nous rapproche d'un bilan dramatique. Le vandalisme, le déchaînement de violence y conduisent ; les réactions de peur et d'autodéfense, tout autant.

Dans cette situation, la question d'un abandon des nouvelles taxes carburant ne se posait même plus. Que n'avez-vous pas écouté le Sénat l'an dernier ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UC et Les Républicains) Le problème demeure entier pour le pouvoir d'achat. Et la hausse du prix de l'électricité va se poursuivre, on connaît la doctrine du Conseil d'État en la matière.

La crise doit être une opportunité pour repartir sur de nouvelles bases. Quelques certitudes que je tire de mon expérience : les réformes doivent avoir un sens, le ressenti est aussi important en politique que la réalité, l'égalité des chances à moyen terme ne compense pas l'injustice immédiate, le discrédit partiel des corps intermédiaires ne justifie pas la verticalité du pouvoir et, enfin, les responsabilités de vos prédécesseurs ne vous exonèrent pas de vos propres erreurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC ; Mme Catherine Troendlé applaudit également.)

Monsieur le ministre, les réformes structurelles produisent des ennuis tout de suite et des dividendes différés. Nous vous reconnaissons le courage de les avoir lancées.

L'insuffisance du pouvoir d'achat est une source terrible de frustration et de colère. C'est une humiliation qui se renouvelle chaque mois pour des millions de Français, renforcée par l'indécence de certains revenus ou de comportements issus d'un capitalisme outrageusement financiarisé. Notre groupe propose une réponse immédiate : diminuer l'impôt sur le revenu sur les deuxième et troisième tranches et exonérer les heures supplémentaires sur les faibles revenus en finançant cela par le rétablissement d'une contribution exceptionnelle sur les très hauts revenus. La baisse des APL a aussi été vécue difficilement : il faut les revaloriser.

Fouquet's, Leonarda, président des riches, les symboles sont cruciaux en politique et le sont plus encore à l'ère des réseaux sociaux et des chaînes d'information en continu. Pour votre Gouvernement, la réussite des uns sert aux autres. Ce raisonnement se défend et vous avez raison d'essayer puisque tout le reste a échoué ! Mais la mise en oeuvre importe autant que la justesse intention.

Alors que notre société est assaillie par la précarisation, la peur du déclassement, il faut mettre sous conditions ce que nos compatriotes ressentent comme des cadeaux accordés aux plus favorisés. Leur légitimité dépend de leur utilité sociale. Les entreprises ont été matraquées, souvenons-nous du mouvement des pigeons. L'ampleur des dégâts a conduit à diminuer leurs charges. Les mesures prises en leur faveur doivent être non seulement évaluées mais également assujetties à des obligations sociales. (Applaudissements sur les bancs des groupes UC et SOCR ; M. Martin Lévrier applaudit également.) Les aides ne sont pas là pour augmenter les rémunérations des dirigeants ou les dividendes, comme chez Vallourec. Pour nous, l'impôt sur les entreprises devrait varier en fonction du respect d'un partage équilibré des excédents d'exploitation. L'optimisation fiscale est devenue moralement inacceptable. Il faut passer à la majorité en Europe ; l'unanimité empêche d'avancer sur la taxation des GAFA. (Applaudissements sur les bancs des groupes UC, SOCR, Les Indépendants et LaREM, ainsi que sur quelques bancs du groupe CRCE)

Abandonner l'icône qu'est l'ISF aurait dû s'accompagner d'un geste pour favoriser le financement des petites entreprises.

Le sentiment d'injustice repose encore sur l'empilement des dispositions dérogatoires et la fraude. Rien n'est plus dévastateur que de compter un à un ses euros lorsque d'autres trichent sans vergogne ou abusent sans scrupule. La lutte contre la fraude ne doit pas être qu'un slogan. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

Le sujet central est pourtant celui de la réforme de l'État et des politiques publiques. Il n'y a que sous cet angle que nous pourrons diminuer la dépense publique. Trop d'impôts et trop de prélèvements pour trop peu de résultats. La table rase dont rêvent certains est un fantasme. Néanmoins, on ne réforme pas sans écoute, sans considération et sans relais d'opinion. Plutôt que de contourner ces supposés enquiquineurs, il faut les revivifier. La réforme des 80 km/h est l'archétype de la mauvaise méthode : sans concertation, sans expérimentation. Nous demandons plus de consultations directes des populations. Nos référendums sont trop binaires, trop tardifs ; nous proposons de les transformer pour mener des sortes de sondages citoyens à choix multiples.

L'élection d'Emmanuel Macron incarnait l'acceptation d'une remise à plat de notre action publique sans dogmatisme. Le Sénat, loyalement, a sonné plusieurs fois l'alerte et persévérera dans cette attitude responsable.

Pour finir, une question : les mesures annoncées vont coûter dans les 4 milliards, sans doute plus. Il a été question de moratoire, puis d'annulation. Quelle est la ligne du Gouvernement, quelle est votre politique ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UC et RDSE et sur quelques bancs des groupes SOCR et Les Républicains)

M. Claude Malhuret .  - La France est le plus révolutionnaire des pays conservateurs. Et la crise politique et sociale qui nous guette depuis trente ans est arrivée. Nous avions senti venir cette colère dans nos campagnes, nos quartiers et nos territoires. Et pourtant, année après année, nous n'avons pas su relever le défi. Par lâcheté peut-être, par faiblesse sûrement, par renoncement c'est certain. Nous n'avons pas réformé alors que tous les autres autour de nous réformaient. Et en punition nous avons eu le pire des deux mondes : plus de dépenses publiques et moins de service public, plus de dette et moins de justice, plus de mots et moins d'actes. Les évènements nous mettent au pied du mur. Allons-nous sortir de cette crise, comme de tant d'autres auparavant, avec un rafistolage qui ne changera rien ou est-ce que nous allons profiter de cet électrochoc pour poser enfin, et résoudre, le sujet essentiel, soigneusement mis de côté depuis des années ? Est-ce que nous allons continuer la politique du chien crevé au fil de l'eau avec toujours plus de taxes et toujours plus de dépenses ou est-ce que nous allons enfin parvenir dans notre pays recordman du monde de la fiscalité, à faire ce que plusieurs de nos voisins ont réussi : l'optimisation et la rénovation des services publics, seul moyen de parvenir à la baisse des impôts et donc à la hausse du pouvoir d'achat réclamé aujourd'hui ? (Exclamations sur les bancs du groupe CRCE) Vous êtes favorables à la hausse des impôts ?

Ce défi concerne le Gouvernement comme le Parlement. Le Gouvernement tout d'abord. Cette grande consultation que vous annoncez, Monsieur le Premier Ministre, vous devez vous assurer qu'elle sera suivie d'effets. Si ce Grenelle de la fiscalité et de la transition écologique devait déboucher sur l'application de la formule de Queuille : « La politique ce n'est pas de résoudre les problèmes, c'est de faire taire ceux qui les posent », si elle devait consister à noyer le poisson, à mettre la tête dans le sable en attendant des jours meilleurs, alors la colère d'aujourd'hui ne sera rien en comparaison de celle qui saisira les Français qui n'en peuvent plus des autruches.

Si au contraire vous saisissez cette occasion que l'histoire vous présente, alors peut-être avez-vous une chance de réformer vraiment ce pays qui crève de ne pas avoir été réformé. Quant à nous parlementaires, notre responsabilité n'est pas moindre. Si notre participation au débat n'est que l'occasion de propositions démagogiques et contradictoires, du genre baisse des impôts couplées à une augmentation des dépenses, ce qui revient à essayer de soulever un seau alors qu'on a les deux pieds dedans (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE), s'il s'agit de demander la démission du Président de la République depuis un trottoir des Champs-Élysées ou la dissolution de l'Assemblée Nationale par ceux qui rêvent d'un grand soir en croyant qu'ils ont rendez-vous avec l'histoire alors qu'ils n'ont rendez-vous qu'avec le journal de TF1, (Mêmes mouvements) je ne crois pas que les Français nous pardonneraient de prendre en otage nos institutions et d'aboutir à un nouveau quinquennat pour rien. Le Gouvernement et le Parlement ont la responsabilité de retrouver leurs prérogatives. Chacun a le droit d'aimer ou de ne pas aimer les gilets jaunes, chacun a le droit de soutenir leurs revendications ou de les trouver confuses et irréalisables, chacun a le droit de penser qu'on peut bloquer les routes ou, comme c'est mon cas, d'être allergique aux atteintes à la liberté d'aller et venir, mais à la fin des fins, dans une démocratie représentative, la loi se fait au Parlement et pas sur les ronds-points. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, UC et Les Républicains)

Pour les mêmes raisons que dans une démocratie il est préférable de mettre des bulletins dans les urnes que des pierres dans les vitrines. Nous devons nous interroger avec gravité, mes chers collègues, sur le fait que l'une des premières revendications du mouvement actuel, c'était la suppression du Sénat.

M. Ladislas Poniatowski.  - Ce n'est pas la première revendication !

M. Claude Malhuret.  - Est-ce que nous allons nous taire là-dessus ? Est-ce que nous ne voyons pas ce que ça signifie ?

Nous sommes pris entre deux feux : d'un côté un Président de la République qui, dans son obsession de la verticalité, a cru qu'il pouvait enjamber les corps intermédiaires, les parlementaires, les élus locaux... (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC et sur quelques bancs du groupe SOCR) .... et qui se retrouve aujourd'hui logiquement, ayant fait le vide de ses interlocuteurs institutionnels, en confrontation directe avec une base radicalisée. De l'autre côté un mouvement qui pense que sans aucune organisation et grâce à Facebook on peut se passer de la représentation nationale, voire demander sa disparition. Ce que nous savons, nous, c'est qu'un pays ne peut se diriger par les réseaux sociaux avec une seule devise : « Je hais, donc je suis ». Lorsqu'une base radicalisée s'oppose sans aucun intermédiaire au Gouvernement et au Président, au point qu'un des leaders n'a pas hésité hier à appeler à envahir l'Élysée samedi prochain, une telle situation ne peut se terminer que de deux manières : soit l'insurrection, soit en cas de pourrissement, la dispersion d'un mouvement et l'oubli de ses objectifs dont il ne resterait pas plus que ce qui reste d'un moineau ayant traversé un ventilateur. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

S'il y a une chose que nous devons rappeler au Président de la République comme aux gilets jaunes, c'est que la dernière chose dont la France a besoin c'est l'affaiblissement du Sénat et plus généralement de tous les corps que l'on appelle à tort intermédiaires et que l'on ferait mieux d'appeler indispensables car ils constituent la colonne vertébrale de notre pays. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Indépendants, UC et Les Républicains et sur quelques bancs du groupe SOCR)

Il me reste à évoquer le sujet des violences, car la crainte de ce qui pourrait se passer samedi prochain est en train de devenir la préoccupation majeure. Ces violences ne sont pas seulement graves en elles-mêmes. Elles sont graves par leurs conséquences sur ceux que les casseurs prétendent défendre, ceux qui travaillent dans les commerces ou les entreprises détruits et qui ont les mêmes problèmes de fin de mois que les autres. Elles sont graves pour l'image de la France à l'étranger qui est en train, une fois encore, de plonger. Elles sont graves enfin par le lieu choisi. L'Arc de triomphe, comme l'Assemblée, le Sénat, la Concorde, ce sont les lieux emblématiques de l'histoire de France, ce sont les symboles de la mère-patrie. Taguer l'Arc de triomphe, casser ses bas-reliefs, dévaster son intérieur, c'est comme donner une gifle à sa mère. Ceux qui sont capables de faire ça, et je ne les confonds pas bien sûr avec l'ensemble des gilets jaunes, ne sont pas seulement des casseurs, ils ne dégradent pas seulement un monument, ils dégradent notre identité nationale. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Indépendants, LaREM, UC et Les Républicains et sur quelques bancs du groupe SOCR)

C'est pourquoi appeler à une nouvelle manifestation à Paris samedi, dans les mêmes conditions d'impréparation et d'irresponsabilité que celle de samedi dernier, c'est prendre une lourde responsabilité. Il y aura, en face des manifestants, ceux qui sont eux aussi le rempart de notre identité nationale et de notre sécurité, les forces de l'ordre, dont je voudrais à mon tour saluer le courage dans des circonstances particulièrement difficiles, alors même qu'elles sont depuis trois ans constamment sur la brèche dans la lutte contre le terrorisme.

Dans ce moment crucial, je souhaite que nous puissions faire preuve du même courage. D'abord le courage des mots, le courage de dire la vérité aux Français, la vérité sur l'état de nos finances publiques, sur nos choix de société et sur l'avenir de la planète. Ensuite le courage des actes, celui de prendre les décisions difficiles dont le pays et les Français ont besoin. C'est notre mission aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Indépendants, LaREM, UC et Les Républicains et sur quelques bancs du groupe SOCR)

M. Bruno Retailleau .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) En cet instant, nous avons tous conscience de la gravité de la situation et de la portée des mots. Je vous parlerai d'homme à homme, avec mon coeur de Français, dans une situation difficile qui peut déraper.

Je veux vous parler avec une conscience et un sens aigu de responsabilité, du devoir, du courage, de la lucidité, sans complaisance. Regardons la vérité en face.

Nous devons nous rassembler sur une exigence de fermeté en face de la violence. Nous, élus de la République, nous ne devons supporter aucune atteinte aux forces de l'ordre, à la sécurité civile, ne tolérer aucun acte de vandalisme, aucun acte qui profane les symboles les plus sacrés de la République et de la France.

Bien sûr, l'Arc de triomphe, mais aussi la tombe sacrée du Soldat inconnu qui a été profanée. Mon grand-père était un poilu, et je pense que nombre d'entre vous ont eu un aïeul dans ce cas. Ce ne sont pas des actes de résistance, mais de barbarie, qu'il faut punir de la plus sévère des façons. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC) Cassez les casseurs, monsieur le Premier ministre. (On s'exclame sur les bancs du groupe CRCE.)

Ils n'ont droit à aucune excuse. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs du groupe UC) La force de la loi doit passer. L'important, c'est d'agir vite. Selon Foch, il n'y a qu'une seule faute qui soit infamante : l'inaction.

Le droit à manifester dans le calme est gravement blessé. L'État régalien ne doit plus s'excuser de protéger nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Nous avons le devoir de condamner ces violences, nous le faisons depuis le début, en appelant au calme, sur tous les bancs. Nous faisons la différence entre la France du grand déclassement, qui travaille dur, qui n'arrive pas à boucler ses fins de mois, qui plante des drapeaux tricolores sur des ronds-points et chante la Marseillaise ; et la France de l'ensauvagement (Mme Esther Benbassa proteste.) qui pille, et qui crie sa haine de la République. Tous les groupes devraient condamner cela. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur une partie des bancs du groupe UC)

M. David Assouline.  - Pompier pyromane !

M. Bruno Retailleau.  - Pour ramener le calme, le Gouvernement doit aussi revenir à une certaine réalité. Depuis le début de cette grande colère, il semble en décalage. Cette colère sociale est inédite dans son mode d'expression. Vous courrez après les événements, car vous vous êtes installés dans une situation de déni, croyant que le cap était forcément bon et qu'il fallait répondre d'en haut avec un Haut Conseil du climat, c'est-à-dire une instance technocratique, comme si cette promesse d'un nouveau monde était le remplacement d'un gouvernement empathique des hommes par une administration froide.

Dans une lettre ouverte, j'ai écrit que les racines de cette crise étaient lointaines. Nous tenons le record européen de la dépense publique et le record mondial de l'impôt et des taxes. Le déficit public va encore croître. Cette colère, c'est d'abord le ras-le-bol fiscal des Français qui se sont sentis piégés, trompés.

Et puis, il y a l'arrogance, le mépris. Les Français savent pertinemment ce qu'est une taxe, un impôt. Alors que nous traversons une crise de la représentation, les maires, les partenaires sociaux, les présidents d'associations se sentent méprisés. Pour paraphraser Péguy, ce nouveau monde, c'est ce monde qui fait le malin, ce monde de ceux qui savent, de ceux qui n'ont plus rien à apprendre. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Ce qui imprime dans la mémoire des Français, c'est moins les grands discours que les petites phrases, semées au vent de l'improvisation, de la caricature.

Le déni, le mépris, mais aussi le sursis... Le Sénat a annulé la hausse des taxes. Il est incompréhensible que vous ayez accordé un moratoire : vous auriez dû savoir que c'était trop peu, trop tardif. Après le moratoire, on allait vous demander la suppression. Ce geste qui aurait pu apparaître comme une main tendue ressemble désormais à un aveu de faiblesse. Vous pourriez vous inspirer du Sénat qui, lors du PLFSS, a réindexé les retraites et les allocations familiales sur l'inflation.

Ce mécontentement traduit des forces à l'oeuvre en France, mais aussi ailleurs. Vous avez ouvert les portes de l'abîme du mécontentement. Dans ce cri de colère, j'entends le cri d'un peuple qui ne veut plus qu'on l'ignore, qui veut qu'on tienne compte de ses choix. La crise de la démocratie s'étend partout en Europe car les peuples ont le sentiment que ceux qui les gouvernent ne les entendent plus, qu'ils sont insensibles à leurs souffrances. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ; M. Olivier Henno applaudit également.) Les choix des dirigeants ne sont pas les choix des peuples. Tant de grandes décisions ont été prises dans le dos des peuples... le Traité de Lisbonne, l'accord de Marrakech sur l'immigration dont j'espère qu'il ne sera pas signé par le Gouvernement. (Exclamations sur les bancs du groupe CRCE, tandis qu'on applaudit sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. Philippe Pemezec.  - Tout à fait !

M. Bruno Retailleau.  - Que dire de ces grandes juridictions internationales et de leur vision anglo-saxonne du droit, qui ne nous correspond pas ?

Les peuples ne supporteront pas éternellement qu'on leur dise que leur diagnostic est faux, qu'ils doivent être rééduqués.

Mme Éliane Assassi.  - Et l'ISF ?

M. Bruno Retailleau.  - Entendons leur colère. Redonnons du sens à la Nation, à l'unité nationale, à la République française. Recréons du commun.

D'abord, réformons notre modèle social sans le déformer. Après la Seconde Guerre mondiale, la sécurité sociale a été créée par tous les partis, comme un instrument de démocratie, avec une belle devise « À chacun, selon ses moyens ; à chacun, selon ses besoins ». (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Éliane Assassi et M. Rachid Temal.  - Et l'ISF !

M. Bruno Retailleau.  - Ne recentrez pas les aides sur les plus bas revenus - comme le dit M. Pisani-Ferry, sinon vous créerez une fracture entre ceux qui paient et ceux qui reçoivent. Notre modèle social n'est pas celui-là.

Faites des réformes justes : baisses d'impôts, oui, mais pour tous !

Voix sur les bancs du groupe CRCE.  - Et l'ISF !

M. Bruno Retailleau.  - La transition écologique ne doit pas être payée par les plus modestes. Ce n'est pas en ajoutant des impôts aux taxe qu'on parviendra à rendre riches les plus pauvres. Souvenez-vous aussi de l'universalité des politiques familiales. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs du groupe UC) Ne touchez pas à la loi de 1905. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs des groupes UC et SOCR) Les religions doivent s'adapter à la République et non la République aux religions.

Sortez par le haut, oubliez votre projet d'émancipation individualiste qui affaiblit le commun. Il y a un besoin de France, de protection, de sens. Le président de la République devra s'adresser aux Français. Il doit retisser les liens avec nos compatriotes : l'amour de la patrie doit brûler dans le coeur de chaque Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ; les sénateurs du groupe Les Républicains se lèvent.)

M. François Patriat .  - Pourquoi sommes-nous réunis aujourd'hui ? (Marques d'ironie) À défaut de respecter ma personne, respectez au moins notre institution. La République est menacée, avec des actes de barbarie. Cette colère, légitime sans doute, fait suite à nos renoncements successifs.

Le Gouvernement doit assurer le redressement du pays, le réparer.

M. Jean-Marc Todeschini.  - Ah oui !

M. François Patriat.  - Le Gouvernement montre la voie de l'ouverture.

Le moment est décisif pour notre démocratie. Regardons la colère de notre pays. Il convient de la comprendre et d'y répondre. Après quarante ans d'injustices non résolues, fiscales, sociales, territoriales, nous avons senti monter la colère depuis longtemps ; elle a commencé à s'installer à la fin des Trente Glorieuses. Ce mal-être s'est développé. Beaucoup ont dénoncé la fracture sociale, certains ont dit que la maison brûlait, alors que s'installaient des fractures territoriales, favorisant l'abstention, le sentiment d'abandon, la montée des extrêmes ; ce qui a entraîné un rejet de la classe politique et des corps intermédiaires.

La critique des institutions n'est pas passagère. Notre responsabilité en ce jour est historique : soyons à la hauteur. Cette France invisible se sent dénigrée et reléguée.

Monsieur le Premier ministre, à vous la responsabilité de répondre à cette colère, non pour l'exploiter comme le tentent certains, mais pour apporter des solutions à ces Français lassés des grandes lâchetés et qui ne veulent plus être exclus du monde qui vient.

Depuis dix-huit mois, nous préparons une révolution numérique, économique et écologique de grande ampleur. Nous devons la vérité aux Français : il faut du temps pour que les réformes structurelles portent leur fruit. Un seul but : construire une société où l'on vit mieux de son travail, avec plus de pouvoir d'achat et une protection sociale. Faisons preuve de sagesse, d'humilité, de discernement et de responsabilité. Un seul mot d'ordre : ni entêtement, ni résignation.

La main tendue du Premier ministre doit être saisie. Le Gouvernement entend la France des oubliés. La suppression de la hausse des taxes, accompagnée des mesures d'aide au pouvoir d'achat, est bienvenue. Chaque Français sera entendu durant cette période de consultation. Il ne peut y avoir deux France, une qui gagne et une qui perd.

Des signes positifs commencent à poindre. La confiance des investisseurs étrangers est plus élevée que jamais, l'emploi industriel redémarre, le financement des TPE s'améliore, le taux d'emploi n'a jamais été aussi élevé, mais il faut faire plus, plus vite, plus fort.

L'urgence climatique n'appartient pas au Gouvernement, mais à tous les Français. Ne distinguons pas fin du monde et fin du mois.

Nous vous renouvelons notre entière confiance.

Les violences et les saccages doivent cesser. Les déclarations de certains politiques sont irresponsables, insupportables, outrancières, inadmissibles. Ils pensent recueillir les fruits du désordre mais ne recueilleront que les cendres du chaos.

Saluons les forces de l'ordre, qui doivent être respectées à la hauteur de la République.

Face à la colère, l'écoute ; face à la violence, la fermeté. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Mme Éliane Assassi .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE) Nous vivons un moment d'une grande gravité. La parole vraie, sincère, libérée des Françaises et des Français a été entendue, remettant en cause le concept même du capitalisme libéral.

Avez-vous entendu cette aide-soignante qui peine à joindre les deux bouts ? Avez-vous entendu ces pères de famille, meurtris, incapables d'offrir à leurs enfants des cadeaux de Noël ? Avez-vous entendu ces retraités contraints de faire les poubelles des supermarchés pour se nourrir ? Avez-vous vu ces gens à découvert le 10 de chaque mois et dans l'incapacité de se nourrir, de se vêtir, de vivre ?

Il y a une colère que vous-même, monsieur le Premier ministre et surtout le président de la République, ne comprenez-pas. C'est le résultat d'un profond aveuglement et d'une politique voulue pour et par les riches. Vous avez abaissé de 17 % l'imposition du 0,1 % les plus riches ! Rétablissez l'ISF et rendez-le plus efficace ! (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et sur quelques bancs du groupe SOCR)

Bernard Arnault, grand ami et protecteur d'Emmanuel Macron, quatrième fortune mondiale, a payé 2,9 millions d'IFI alors qu'il aurait dû payer 550 millions d'ISF ! Et vous l'avez complètement exonéré ! Il vole de paradis fiscal en paradis fiscal, insatiable, tel un oiseau de proie. M. Macron, muet en public, vous a recadré hier en Conseil des ministres. Il ne veut pas rétablir l'ISF. La clé de voute du président, c'est l'injustice fiscale au profit des plus riches. C'est cette violence qui est contestée aujourd'hui.

Monsieur le Premier ministre, vous payez l'addition de colères accumulées depuis des décennies. L'ISF, l'atteinte aux retraités par l'augmentation de la CSG, aux classes populaires par la baisse des APL... Vous avez repoussé notre proposition de loi qui augmentait modestement les retraites des agriculteurs, qui ont travaillé toute leur vie sans épargner ! (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et sur quelques bancs du groupe SOCR ; Mme Sonia de la Provôté, M. Olivier Henno, Mme Nathalie Goulet et M. Daniel Laurent applaudissent également.)

Vous oubliez de parler du mépris à l'encontre du Parlement et des élus, monsieur le Premier ministre.

Depuis trente ans, le bien commun est bradé aux intérêts privés. Et vous continuez avec la SNCF, la FDJ, ADP ! Alors que la SNCF pourrait porter la transition écologique, vous l'offrez au secteur privé. La privatisation, c'est la spoliation des Français !

Rendre sa force avec la puissance publique, c'est aussi garantir une transition énergétique efficace et l'égalité entre tous nos concitoyens. Argent et écologie ne font pas bon ménage. Le sursaut n'a pas eu lieu lors de votre élection contre l'extrême droite. Il a lieu aujourd'hui, et contre le libéralisme qui se révèle jusque dans la politique de sélection désormais menée dans l'éducation.

Il faut revenir à la paix et à la sérénité, en manifestant pacifiquement. La colère a mené à la violence, dont les fonctionnaires de la police sont les premières victimes. Nous condamnons l'usage de la violence. Et cela inclut les tirs de flash ball contre les lycéens et lycéennes. (On se récrie à droite.) Ou la mort de cette vieille dame à Marseille, tuée par un éclat de grenade.

Il vous reste peu de temps, monsieur le Premier ministre, pour convaincre votre président - mais en êtes-vous convaincu vous-même ? - pour prendre des décisions fortes sur le pouvoir d'achat et la justice fiscale. Le Smic doit augmenter de 200 euros par mois et l'augmentation de la CSG sur les retraites doit cesser. Ces mesures seraient une première réponse concrète à la détresse du peuple.

Un homme est élu pour cinq ans non pas sur son programme - inexistant  - mais contre l'autre candidate. L'Assemblée a été élue dans la foulée mais le scrutin ne rend pas compte de la réalité de la Nation.

Aujourd'hui le peuple est de retour, et le transfert du politique à l'économique vacille.

Votre Gouvernement et les suivants sont placés sous contrôle citoyen. C'est une bonne nouvelle car c'est le retour aux sources, celui du peuple souverain. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE ; Mme Martine Filleul applaudit également.)

M. Patrick Kanner .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) J'ose espérer, monsieur le Premier ministre, que vos engagements ne seront pas remis en cause ce soir par un de vos ministres en ligne directe avec le président de la République, rendant ainsi illusoire la notion de cap. Il y a cinq mois, nous l'avons écouté à Versailles. Il avait annoncé un changement de méthode pour plus de dialogue. Je lui avais dit, à l'époque, que savoir écouter n'était pas un signe de faiblesse. Je le maintiens.

Protéger, libérer, unir : où en est ce slogan ? Vous auriez dû écouter plus tôt, engager un débat respectueux avec les partenaires sociaux ; le dialogue direct avec les Français, s'il a pu fonctionner, n'a qu'un temps et sombre avec cette crise de confiance.

Nous n'avons pas assez de recul pour comprendre ce qui se passe dans notre pays. La colère des gilets jaunes est multiforme, jusqu'au vandalisme intolérable. Paris ne peut pas brûler !

La France ne peut être en état de siège. Je salue nos forces de l'ordre républicain (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) qui assurent la cohésion nationale. La contestation doit s'exprimer dans le calme.

Nous avons aussi entendu la colère des Mahorais, des Guyanais, puis des Réunionnais qui disent leur sentiment d'abandon touchés qu'ils sont par les mesures du Gouvernement contre le pouvoir d'achat.

La colère des gilets jeunes est en grande partie silencieuse mais le mouvement est large. Nous le constatons tous en voyant les gilets jaunes sur les pare-brise, dans les parkings des supermarchés. C'est le lien entre ceux qui soutiennent en silence et les plus radicaux qui doit nous inquiéter.

Nous voulons que le calme revienne ; mais il vous incombe de prendre les décisions pour y parvenir.

Les urgences sont multiples. Les gilets jaunes ne sont pas anti-écologiques - ils veulent seulement de la justice. Or vos mesures font financer la transition écologique par les classes moyennes et modestes. Inversez votre politique : mettez à contribution les plus riches. (Applaudissements par une partie du groupe SOCR)

Le moratoire d'un an sur la fiscalité du carbone n'est qu'un préalable au dialogue, tellement vous avez tardé. Mais l'urgence sociale reste totale. C'est aussi celle de la stagnation des salaires depuis plus de dix ans.

Votre politique fiscale est injuste, elle réduit les impôts des 1 % les plus riches, tout en augmentant les taxes des classes moyennes et pauvres. L'impôt doit être juste. Non à l'État pénitence ! Les prix progressent, mais pas les salaires. Monsieur le Premier ministre, engagez des négociations salariales, organisez une conférence sociale nationale avec les syndicats, avant le financement de la transition écologique, donnez un coup de pouce au Smic dès le 1er janvier 2019 et la prime d'activité, réindexez les retraites sur l'inflation, revalorisez le point d'indice des fonctionnaires ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) La théorie du ruissellement ne fonctionne pas. La suppression de l'ISF n'a pas bénéficié à l'économie. Entendez ces propos, comme j'ai entendu votre candidat, messieurs de la droite !

M. Philippe Dallier.  - Avec le bilan de Hollande, merci !

M. Patrick Kanner.  - Rehaussez les tranches d'impôt sur les hauts revenus. Ces propositions, nous les portons depuis un an.

M. Alain Joyandet.  - Au secours, Hollande revient !

M. Patrick Kanner.  - À quoi servent les premiers de cordée s'il n'y a pas de corde ?

Saisissez l'occasion d'une réponse sociale pour engager ensuite un dialogue sur le financement de la transition écologique. Sinon, vous ne réglerez pas l'urgence démocratique et citoyenne.

La colère des gilets jaunes est celle d'un peuple qui se sent abandonné, méprisé, déclassé. Le président jupitérien a cru qu'il avait tous les droits depuis son élection. Il en a oublié qu'il avait surtout des devoirs à l'égard des citoyens de notre pays. Il gouverne comme un roi nu. L'écoute, le dialogue, la concertation sont les sources de l'unité nationale.

Les associations, les élus locaux, les maires, les parlementaires sont des digues sociales. (M. Loïc Hervé approuve.) Appuyez-vous sur les écharpes bleu-blanc-rouge, faites confiance aux maires ruraux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR et sur quelques bancs du groupe UC) Répondez ! Sachez entendre les angoisses de vos concitoyens. Le temps est court, très court, monsieur Philippe. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Édouard Philippe, Premier ministre .  - Merci aux orateurs, dont je salue le ton, la qualité et le talent des interventions. J'ai dit aux présidents de formations politiques que j'ai reçus à Matignon que je souhaitais ce débat. Il a eu lieu à l'Assemblée nationale hier, et a été suivi d'un vote. Il est essentiel que les mises en cause, les défenses éventuelles soient présentées ici.

La mise en perspective internationale, soulignée par plusieurs orateurs, montre que la crise n'est pas seulement française. Ces crises sociale et politique arrivent dix ans après une crise financière qui a profondément secoué notre économie et nos systèmes occidentaux. Cette crise est comparable à celle qui a touché l'Italie, agité les États-Unis.

Les réformes structurelles nécessaires ne sont pas les mêmes pour tous, certes, mais je ne crois pas qu'il faille uniquement faire peser le poids de la faute sur le passé. Néanmoins, les réformes du passé n'ont pas réglé les problèmes. Un exemple : depuis dix ans, la dette s'est accrue de près de 35 points de PIB, jusqu'à 100 % du PIB. Alors qu'elle augmentait, nous préférions, par pudeur, prudence ou lâcheté - disons-le - ne pas le voir. Nous avons ainsi demandé à RFF et à la SNCF de s'endetter - en sachant que cette dette deviendrait un jour celle de l'État. Ce choix a été fait, collectivement, par des gouvernements successifs.

Alors, le Gouvernement a assumé la reprise de cette dette, acceptant d'augmenter, ce faisant, la dette publique. Collectivement, nous n'avons pas été à la hauteur des engagements. Le dire, c'est être lucide.

Je retiens vos appels à la concertation ; le soutien aux forces de l'ordre ; le souci d'apaisement et l'appel à la responsabilité.

De responsabilité, je ne m'exonère aucunement. Je m'exprime avec calme et nuance, sans simplifier ou caricaturer, ce qui, au regard des canons actuels, n'est pas toujours spectaculaire. J'assume les mesures que je sais impopulaires, car je pense qu'elles sont bonnes.

Le Gouvernement s'estime tenu par les engagements du président de la République et les parlementaires de la majorité.

C'est notre cap, celui de la maîtrise des dépenses publiques.

Beaucoup de mesures ont été proposées : en peu de mots, on dépense beaucoup d'argent public Il faudra veiller, collectivement, à l'équilibre des dépenses publiques pour éviter que la dette explose et que nous transmettions après nous une charge et une dette dont nul ne pourra s'exonérer.

Apaisement, débat, appel à la responsabilité et détermination à protéger les Français. Merci pour la qualité de ce débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe UC ; MM. Jean-Michel Houllegatte et Yannick Vaugrenard applaudissent également.)

La séance est suspendue à 16 h 30.

présidence de Mme Hélène Conway-Mouret, vice-présidente

Projet de loi de finances pour 2019 (Suite)

Seconde partie (Suite)

SANTÉ (Suite)

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé .  - Après ce moment très dense, républicain, nous revenons au budget de la mission « Santé ». Il s'inscrit dans la continuité du budget pour 2018. Les crédits atteignent 1,4 milliard d'euros, en hausse de 3,5 %. Ils ne représentent toutefois qu'une petite partie des financements que nous consacrons à la politique de santé, l'essentiel étant retracé dans la loi de financement de la sécurité sociale.

Le programme 204 est doté de 500 millions d'euros. Les deux tiers sont consacrés à l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), l'Agence nationale de santé publique (ANSP), l'Institut national de lutte contre le cancer et l'Anses. Ils progressent de 2,4 millions d'euros, à périmètre inchangé. En 2018, les dotations de l'Agence de la biomédecine et de l'École des hautes études en santé publique ont été transférées à la sécurité sociale, terminant ainsi le décroisement des crédits.

Au-delà des crédits retracés dans ce programme, les financements dédiés à la prévention augmentent de façon significative. Toutes les décisions que j'ai prises vont dans ce sens : 379 millions d'euros pour le Fonds national de prévention d'éducation et d'information sanitaire, en hausse de 20 % dans la COG 2018-2022 ; 100 millions d'euros pour le Fonds tabac, contre 30 millions en 2017, qui sera élargi à d'autres addictions ; 515 millions d'euros pour le Fonds d'intervention régional (FIR), en hausse de 3,3 % en 2018 et de 4,8 % en 2019 ; doublement des crédits du Fonds national de prévention des accidents du travail qui atteint 100 millions d'euros dans le cadre de la COG 2018-2022.

Tous ces crédits sont au service du plan Priorité prévention présenté le 26 mars dernier par le Premier ministre. Sa mise en oeuvre est soutenue par le déploiement du service sanitaire, qui verra 47 000 étudiants participer à des actions de prévention auprès des jeunes.

Le programme 204 porte également les crédits d'indemnisation des victimes de la Dépakine, assurée par l'Oniam. Outils et méthodes sont désormais en place, et les premiers avis seront rendus avant la fin 2018. Les reports d'un exercice sur l'autre, à hauteur de 30 millions d'euros, garantiront un financement cohérent de l'Oniam. Le Gouvernement soutiendra l'amendement du groupe LaREM permettant le réexamen des demandes d'indemnisation rejetées quand l'évolution des connaissances scientifiques le justifie.

Mme Nathalie Goulet.  - Très bien.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Le programme 183 est consacré essentiellement à l'AME, dispositif à la fois humanitaire, conforme à nos valeurs républicaines, et sanitaire. Les crédits, en hausse, s'établissent à 893 millions pour l'AME de droit commun, en ligne avec la hausse attendue du nombre de bénéficiaires. Le financement des prestations de santé dispensées par nos hôpitaux évite que ceux-ci ne supportent seuls la charge. Une baisse des crédits de l'AME, tel que le propose votre commission des finances, se traduirait par un report de charge sur les hôpitaux.

Reste que nous devons progresser dans la connaissance des bénéficiaires. J'ai demandé à la CNAM de développer les remontées d'information afin d'améliorer les prévisions. La centralisation à Paris, Bobigny et Marseille de l'instruction des demandes d'AME permettra une connaissance plus fine du dispositif.

Les crédits du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante sont reconduits. C'est normal de la part de l'État employeur et relève de la solidarité nationale envers les victimes non professionnelles. Il s'agit d'une contribution annexe, le FIVA étant principalement financé par la branche ATMP, pour 260 millions d'euros. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Examen des crédits de la mission, des articles rattachés et des amendements portant articles additionnels

Article 39

Mme la présidente.  - Amendement n°II-35, présenté par M. Joyandet, au nom de la commission des finances.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

Protection maladie

300 000 000

300 000 000

TOTAL

300 000 000

300 000 000

SOLDE

- 300 000 000

- 300 000 000

M. Alain Joyandet.  - Cet amendement diminue de 300 millions d'euros les crédits de l'AME.

Nous ne sommes pas les méchants qui refusent de soigner les immigrés irréguliers et exposent la France aux risques épidémiologiques...

M. Yves Daudigny.  - Quand même !

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Nous tentons de trouver une cote mal taillée pour revenir à une inscription budgétaire cohérente. Chaque année, les crédits de l'AME augmentent, sans discussion... Cette année encore, de 50 millions d'euros. Quand on n'y consacrait que 600 millions d'euros, les gens étaient pourtant soignés ! Sans doute faisait-on un peu plus attention...

Président pendant 23 ans, bénévolement, d'un hôpital départemental, je n'ai pas de leçon à recevoir. Quand on sait le mal qu'ont nombre de nos compatriotes à boucler leurs fins de mois, pourquoi y aurait-il une ligne budgétaire sur laquelle on ne pourrait discuter ? D'autant que les crédits du programme 204, eux, baissent !

Nous vous proposons un amendement raisonnable, pas un gel des crédits. Il maintient une AME fidèle à notre tradition, mais appelle l'attention du Gouvernement sur la nécessité d'une refonte.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Avis défavorable - mais je veux apporter quelques explications pour nos concitoyens qui entendent ces arguments.

Le panier de soins couvert par l'AME est beaucoup plus faible que celui de la CMU-C. Aucun soin de confort n'est pris en charge par l'AME. Seuls les médicaments remboursés à 30 % ou 60 % par l'assurance-maladie sont pris en charge, et non ceux remboursés à 15 %.

J'entends que l'on voudrait réserver l'AME aux soins urgents. Mais, en tant que médecin, je puis vous dire que toutes les maladies gagnent à être soignées tôt, avant que l'état clinique ne se dégrade : on dépensera beaucoup plus pour un patient en réanimation. Ce serait faire fi de toute la politique de prévention. Médicalement, l'argument ne tient pas.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Je ne l'ai pas avancé.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - J'agis pour rationaliser, mieux connaître les bénéficiaires, mieux piloter, centraliser l'instruction des demandes, améliorer les remontées d'information. Mais réserver l'AME aux soins urgents reviendrait à augmenter le coût pour les hôpitaux.

M. Roger Karoutchi.  - J'ai souvenir d'un débat en commission avec Marisol Touraine il y a cinq ans, alors que j'étais rapporteur de la mission « Immigration ». Je m'inquiétais que les crédits de l'AME ne finissent par atteindre le milliard d'euros ; grands cris en réponse, accusation d'alarmisme et promesses de rationalisation. Nous y sommes à présent.

Certes, il y a toujours d'excellentes raisons pour augmenter les crédits ; certes, il vaut mieux traiter au fil de l'eau que dans l'urgence...

Le vrai sujet, c'est que le nombre de sans-papiers augmentant, la charge de l'AME augmente. La ministre de la Santé entend les soigner, puisqu'ils sont là, et le ministre de l'Intérieur décline toute responsabilité. La représentation nationale, elle, est prise en étau.

C'est un amendement d'appel... à la cohérence ! Il est bien de faire des efforts de rationalisation : poursuivez-les.

M. Olivier Henno.  - C'est un amendement équilibré, je n'en critique pas le fondement. Il ne s'agit pas d'opposer approches budgétaires et sentiments humains. Mais comprenez que nous soyons partagés sur ces questions. Dans la « jungle », les risques d'épidémie sont réels. La vraie question, ce n'est pas l'AME mais les risques de l'immigration illégale.

M. Bernard Jomier.  - Un amendement d'appel n'est pas fait pour être voté ! (Sourires) D'autant que celui-ci rendrait le budget insincère. Si vous voulez réduire l'impact budgétaire de l'AME, il faut revoir le panier de soins, alors que les soins de confort n'en font déjà pas partie. Écoutez donc la commission des affaires sociales. Nous nous préoccupons tout autant de la bonne gestion des deniers publics mais soyez-en sûrs : les maladies non soignées évoluant négativement, l'AME coûtera, au bout du compte, beaucoup plus cher !

On ne peut adopter un tel amendement en responsabilité, en comptant sur l'Assemblée nationale pour revenir dessus.

Mme Nathalie Goulet.  - Chaque année, nous avons le même débat, le même scrutin public. Le groupe UC est partagé entre vote pour, contre et abstention. Pour ma part, je suis défavorable à la baisse des crédits de l'AME.

Il y a 1,8 million de faux numéros Insee, 14 milliards d'euros de fraude documentaire via le logiciel Service administratif national d'immatriculation des assurés (Sandia). De telles sommes seraient plus à leur place dans votre budget ! En cinq ans, votre prédécesseur avait éliminé 5 000 faux numéros - sur 1,8 million !

M. Sébastien Meurant.  - Oui, cette question est liée à celle de l'immigration, Roger Karoutchi l'a dit. Année après année, on nous dit : circulez, il n'y a rien à voir. Mais la sécurité sociale, notre bien commun, est en péril, et les Français s'en rendent compte. Il est de plus en plus difficile de trouver un médecin traitant, des médicaments, un spécialiste...

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Pas à cause des migrants !

M. Sébastien Meurant.  - Dans mon département, on demande aux familles des patients en réanimation d'apporter leurs propres médicaments à l'hôpital ! Nous en sommes là !

Mme Laurence Rossignol.  - Quel rapport avec l'AME ?

M. Sébastien Meurant.  - Le rapport, c'est que la générosité ne peut être illimitée ! La sécurité sociale, fruit du labeur des Français, est une construction fragile. Il est temps de regarder les erreurs du passé.

En 2014, d'aucuns ont voté une loi scélérate sur les produits structurés, invalidant une décision de justice, contraignant les hôpitaux à payer les emprunts toxiques et exonérant les banques de toute responsabilité !

M. Alain Milon, président de la commission.  - Les 14 milliards d'euros de fraude documentaire auxquelles Mme Goulet fait référence ne sont pas uniquement liés à la santé ; c'en est une infime minorité.

Consacrer quelques centaines de millions à l'AME peut paraître provocateur dans le contexte actuel de manifestations liées à la baisse du niveau de vie. C'est en réalité courageux.

Imaginez qu'un patient arrive aux urgences avec la tuberculose, ou avec un enfant souffrant de bronchiolite : le médecin va-t-il le laisser mourir ? (M. Alain Joyandet, rapporteur spécial, s'exclame.) Il le soigne, naturellement. Le coût en sera pris en charge, forcément ; sans AME, cela pèsera sur la sécurité sociale ou l'hôpital. En tant que médecin, je vous garantis que la maladie coûte de plus en plus cher à mesure qu'elle s'aggrave. Je n'arriverai sans doute pas à convaincre les tenants de la rigueur financière, mais les professionnels de santé soignent les humains, quels qu'ils soient.

Le problème n'est pas l'AME mais la lutte contre l'immigration clandestine. Comme le disait Charles Pasqua : Si vous voulez lutter efficacement contre l'immigration clandestine, aidez les pays de départ pour que les gens s'y sentent mieux. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR, CRCE, LaREM et RDSE et sur plusieurs bancs du groupe UC ; M. Marc Laménie applaudit également.)

Mme Laurence Cohen.  - Il est ici question de l'AME, non de la politique migratoire de la France.

M. Roger Karoutchi.  - C'est lié !

Mme Laurence Cohen.  - Oui, mais nous parlons de santé. Une prise en charge tardive coûte plus cher puisque la maladie s'est aggravée. La commission des finances fait de l'affichage avec cet amendement, que la commission des affaires sociales a rejeté unanimement.

Confondre l'AME et les charges de la sécurité sociale, c'est créer un faux problème. La sécurité sociale est certes un bien commun, mais ce n'est pas l'AME qui est responsable du trou, de la fermeture des hôpitaux, du manque de médecins ! Si vous voulez être logique, ne votez pas les PLFSS. Il est important de maintenir l'AME, pour la santé de la population.

M. Yves Daudigny.  - Plusieurs intervenants ont invoqué des arguments solides contre cet amendement. Je veux exprimer mon opposition résolue, non pour donner des leçons de morale mais pour exprimer une divergence politique.

Dans le contexte actuel de révolte, on entend trop souvent des allusions aux avantages dont bénéficieraient les étrangers. Ayons le courage politique de ne pas restreindre les droits mais de préserver la santé de ceux que nous accueillons, pour le bien être de ces personnes mais aussi pour la santé de tous nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR ; M. Bernard Buis applaudit également.)

M. François-Noël Buffet.  - Le budget 2019 de l'AME sera supérieur de 5 % à celui de 2018, et le nombre de bénéficiaires a plus que doublé depuis 2011. Voilà la réalité !

Je n'entrerai pas dans le débat médical, mais j'attire votre attention sur l'amendement suivant de la commission des finances, qui propose une participation financière aux soins. Mise en place en 2011, elle a été promptement supprimée par le Gouvernement de François Hollande. Dommage : c'est utile pour le budget et plus encore pour responsabiliser ceux qui bénéficient des soins. Indépendamment de l'aspect sanitaire, des réseaux sont souvent impliqués dans l'utilisation de l'AME et ils n'y jouent pas un rôle très sympathique.

Mme Véronique Guillotin.  - Le groupe RDSE votera contre l'amendement. La maîtrise des dépenses de santé veut que l'on traite le plus tôt possible la maladie : une journée de réanimation coûte très cher !

Les soignants soigneront tous ceux qui se présenteront, comme ils en ont fait le serment : c'est ce qui fait la grandeur de la politique de santé. La santé a un coût, qui sera répercuté sur le budget de l'hôpital ou du médecin. Soyons vigilants, mais demander une réduction sans en mesurer impact n'est pas acceptable.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Pour faire comprendre notre démarche, j'aurais dû évoquer les deux amendements. L'amendement n°II-43 rétablit un droit de timbre ; cela va dans le sens d'une meilleure gestion. Il y a de nombreux abus dans l'AME qui peuvent être un appel d'air pour l'immigration clandestine.

Pour en bénéficier, il faut trois mois de résidence irrégulière en France. Avec l'attestation de la préfecture, on peut ensuite se faire soigner gratuitement. Monsieur Daudigny, vous avez dit entendre qu'on donnerait plus aux étrangers qu'aux Français. Eh bien parfois, oui ! (On le conteste à gauche.) Ayons un langage de vérité, sans caricatures. C'est la noblesse du débat.

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Il n'y a aucune noblesse dans vos propositions.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - On ne va pas laisser mourir un enfant de bronchiolite, ni remettre en cause la tradition humaniste française. Mais cette mission est la seule du budget dans laquelle on inscrit des crédits supplémentaires sans compter, ni réguler. La commission des affaires sociales est dans son rôle, la commission des finances aussi. Je refuse d'être taxé d'antisocial ou antihumaniste. Lorsqu'on a instauré le droit de timbre, le nombre de bénéficiaires est descendu à 600 000. Ce n'est pas un amendement d'appel ! Pas plus que l'amendement du Sénat à 2,9 milliards sur la fiscalité, qui va être confirmé par l'Assemblée nationale. (On s'impatiente sur les bancs du groupe SOCR.)

Mme la présidente.  - Veuillez conclure.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Je maintiens donc cet amendement raisonnable. Vous pourrez considérer que le deuxième a été défendu.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Je suis consciente de l'augmentation des dépenses ; nous luttons contre la fraude, nous rationalisons l'accès à l'AME.

En effet, l'introduction du droit de timbre a entrainé une diminution quantitative du nombre de bénéficiaires, qui ont du coup attendu d'être très malades pour aller aux urgences et ont par conséquence grevé le budget des hôpitaux publics. Cela revient à réserver l'AME aux soins urgents - et ce sont les hôpitaux publics qui payent la facture.

Nous centralisons l'instruction des demandes pour mieux connaître les bénéficiaires, nous augmentons le nombre de dossiers contrôlés, nous croisons les demandes d'AME et de visa pour s'assurer que des gens ne viennent pas en France uniquement pour se faire soigner. Mais rétablir le droit de timbre est une très mauvaise idée. Avis défavorable.

À la demande du groupe Les Républicains, l'amendement n°II-35 est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente.  - Voici le résultat du scrutin n°34 :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 305
Pour l'adoption 154
Contre 151

Le Sénat a adopté.

(MM. Sébastien Meurant et Henri Leroy applaudissent.)

Mme Laurence Rossignol.  - Rendez-vous l'année prochaine !

Mme la présidente.  - Amendement n°II-962, présenté par le Gouvernement.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

500 000

500 000

Protection maladie

500 000

500 000

TOTAL

500 000

500 000

500 000

500 000

SOLDE

0

0

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Cet amendement tire les conséquences de l'amendement n°II-762 du groupe LaREM qui ouvre la possibilité de réexamen des demandes d'indemnisation des victimes de la Dépakine si l'évolution des connaissances scientifiques le justifie - amendement auquel la commission des finances a donné un avis favorable.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Ne faudrait-il pas d'abord examiner l'amendement n°II-762, dont celui-ci est la conséquence ?

Mme la présidente.  - L'amendement porte sur les crédits ; nous devons donc l'examiner séparément.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Soit. Très peu de dossiers d'indemnisation des victimes de la Dépakine ont été acceptés jusqu'à présent. La commission des finances a émis un avis favorable sur l'amendement qui étend les possibilités de réexamen mais s'interroge sur le chiffrage à 500 000 euros. Comment en êtes-vous arrivés à ce montant ? Sagesse sur cet amendement qui nous est arrivé la nuit dernière.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - L'amendement du groupe LaREM étend le droit de recours des victimes en cas d'amélioration des connaissances scientifiques. Actuellement, peu de victimes ont été indemnisées. La méthode d'indemnisation a été calée, les premiers dossiers commencent tout juste à être instruits, d'où cette somme relativement modérée. Les commissions d'enquête de l'Oniam qui examinent les dossiers avec une logique de guichet. Sans doute ce montant sera-t-il appelé à augmenter à l'avenir.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Compte tenu des explications, avis favorable.

L'amendement n°II-962 est adopté.

Les crédits de la mission « Santé », modifiés, sont adoptés.

Article additionnel avant l'article 81 quater

Mme la présidente.  - Amendement n°II-43, présenté par M. Joyandet, au nom de la commission des finances.

Avant l'article 81 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  La section II du chapitre II du titre IV de la première partie du code général des impôts est complétée par un VII ainsi rédigé :

« VII : Aide médicale d'État

« Art. 963 bis.  -  Le droit aux prestations mentionnées à l'article L. 251-2 du code de l'action sociale et des familles est conditionné par le paiement d'un droit annuel par bénéficiaire majeur, dont le montant est fixé par décret. »

II.  -  Le premier alinéa de l'article L. 251-1 du code de l'action sociale et des familles est complété par les mots : « , sous réserve, s'il est majeur, de s'être acquitté, à son propre titre et au titre des personnes majeures à sa charge telles que définies ci-dessus, du droit annuel mentionné à l'article 963 bis du code général des impôts ».

III.  -  Le I et le II entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2019.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial.  - Défendu.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Avis défavorable.

À la demande du groupe Les Républicains, l'amendement n°II-43 est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin public n°35 :

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 302
Pour l'adoption 152
Contre 150

Le Sénat a adopté.

L'article 81 quater est adopté, de même que l'article 81 quinquies.

Article additionnel après l'article 81 quinquies

Mme la présidente.  - Amendement n°II-762, présenté par M. Amiel et les membres du groupe La République En Marche.

Après l'article 81 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le premier alinéa de l'article L. 1142-24-15 du code de la santé publique, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« Sous réserve que le premier avis de rejet n'ait pas donné lieu à une décision juridictionnelle irrévocable dans le cadre de la procédure mentionnée au dernier alinéa, un nouvel avis peut être rendu par le comité dans les cas suivants :

« 1° Si des éléments nouveaux sont susceptibles de justifier une modification du précédent avis ;

« 2° Si les dommages constatés sont susceptibles, au regard de l'évolution des connaissances scientifiques, d'être imputés au valproate de sodium ou à l'un de ses dérivés. »

M. Martin Lévrier.  - Défendu.

L'amendement n°II-762, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté et devient un article additionnel.

La séance est suspendue quelques instants.

GESTION DES FINANCES PUBLIQUES ET DES RESSOURCES HUMAINES, CRÉDITS NON RÉPARTIS, ACTION ET TRANSFORMATION PUBLIQUES, RÉGIMES SOCIAUX ET DE RETRAITE

M. Thierry Carcenac, rapporteur spécial de la commission des finances .  - L'administration fiscale représente trois quarts des crédits de cette mission qui accuse une légère baisse de 0,7 %.

Nous sommes à la veille d'un bouleversement inédit, du moins si l'on en croit les ambitions affichées par le Gouvernement Le rapport Action publique 2022 a donné le cap : création d'une agence unique de recouvrement regroupant la DGFiP, les douanes et les Urssaf, généralisation des téléprocédures, réorganisation territoriale pour séparer le back du front office et recours au data mining pour le contrôle fiscal. Trouve-t-on trace de ces réformes dans le budget ? Non, pourtant, elles se préparent en amont et certaines ont été lancées.

Je ne voudrais pas, pour autant, sous-estimer l'effort consenti, cette année encore, par la DGFiP. En 2019, 2 130 suppressions de postes. Cette année encore, Bercy est le principal contributeur aux réductions d'effectifs dans la fonction publique d'État, juste devant le ministère de l'Éducation nationale et très loin devant tous les autres.

Parce qu'il ressemble aux précédents, ce budget présente aussi les mêmes défauts. Premier défaut, la navigation à vue dans la réorganisation territoriale. Les services comptant moins de cinq agents étaient au nombre de 890 en 2012, ils ne sont plus que 506 ; sur les 42 services qui ne comptaient qu'un seul agent en 2012, il n'en reste que 6. Mais, ce chantier est mené de façon opportuniste, au gré des départs en retraite et des mutations individuelles, sans stratégie d'ensemble et sans concertation. En pratique, chaque directeur régional est prié chaque année de rendre un certain nombre de postes pour atteindre le schéma d'emplois. M. Darmanin dit vouloir une déconcentration de proximité, mais les agents ont besoin de lisibilité. Or les tâches vont augmenter avec le prélèvement à la source, la suppression de la taxe d'habitation, l'IFI. Le Gouvernement fait preuve de légèreté, voire d'un manque de transparence.

Les systèmes d'information sont la clef-de-voûte des réformes structurelles qui s'annoncent. Les treize grands projets rattachés à la mission représentent un quart du coût total des grands projets de l'État. Leur dérapage budgétaire est très préoccupant, avec un surcoût global de 95 %. Faut-il rappeler le précédent fâcheux de l'opérateur national de paye ?

Le budget informatique de la DGFiP a été divisé par dix en dix ans et 80 % des dépenses d'investissement de la DGFiP vont à la maintenance d'applications obsolètes, dont certaines datent des années 1980. Rien ne pourra se faire sans rendre les systèmes interopérables et évolutifs. Peut-être faudra-t-il même tout recommencer à zéro ou presque, tant les systèmes actuels sont hétérogènes, sédimentés et « défendus » par les services qui les ont conçus et qui les utilisent.

Un mot sur la gestion du patrimoine immobilier. Le Gouvernement envisagerait de mettre en location des biens non utilisés mais pour lesquels la vente n'est pas envisageable. Pouvez-vous nous en dire plus ? Une foncière publique serait utile pour valoriser les biens de l'État. Une structure de portage faciliterait la rénovation de l'immobilier pénitentiaire et les créations de places.

M. Claude Nougein, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Depuis trois ans, la DGDDI est une exception, avec des crédits et des effectifs en hausse. En 2019, les crédits augmentent de 2,6 % pour atteindre 1,6 milliard d'euros.

Les douanes se préparent au Brexit. Pas moins de 350 postes seront créés pour contrôler voyageurs et marchandises dans les ports, à la gare du Nord et dans les petits aéroports régionaux.

Pour l'an prochain, la priorité va aussi au soutien des buralistes et à la lutte contre la contrebande de tabac, deux actions d'autant plus nécessaires que le Gouvernement a décidé de porter progressivement le prix du paquet de cigarettes à 10 euros. Le nouveau protocole 2018-2021, signé en février avec les buralistes, se traduit par 111 millions d'euros de crédits d'intervention en plus sur le programme 302 ; une partie servira à aider les buralistes, dont le rôle social dans nos territoires n'est plus à démontrer, à diversifier leurs activités en accueillant, par exemple, un point Poste. Le pendant de cette politique est une action résolue contre la contrebande. La douane travaille à la mise en place d'un système de traçabilité indépendant des fabricants.

Les résultats des douanes en matière de lutte contre les trafics sont bons, quoique très variables d'une année sur l'autre. Toutefois, je regrette que les indicateurs de performance ne rendent compte que des « dossiers à enjeu ». Cela incite les douaniers à se concentrer sur les fraudes les plus graves quand l'e-commerce est caractérisé par une multitude de petits envois.

La dernière caractéristique de ce budget est le quasi-achèvement du programme de renouvellement de ses moyens opérationnels. Sa flotte aérienne est maintenant au complet : trois des sept nouveaux avions Beechcraft sont déjà opérationnels et les autres le seront bientôt. La douane a finalement fait le choix de louer trois hélicoptères, dont deux aux Antilles. À court terme, cela libère la douane des coûts de maintenance.

Les progrès de la dématérialisation et de l'exploitation des données, le nouveau code des douanes de l'Union, le droit à l'erreur et, surtout, la création de l'agence unique du recouvrement ; si les transformations sont importantes, elles ne devraient pas avoir l'ampleur de celles de la DGFiP, ne serait-ce que parce que la douane est une administration plus petite, avec environ 17 000 agents.

La mission « Action et transformation publiques » constitue le vecteur budgétaire du plan « Action publique 2022 ». En pratique, cette mission comporte essentiellement des crédits dédiés à la rénovation des cités administratives - nos préfectures. Les besoins sont réels, tous ne pourront pas être financés.

J'en viens aux crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ». Dans la mesure où vous trouverez l'essentiel des informations dans notre rapport, je concentrerai mon propos sur un préalable et deux points essentiels.

Pour finir, la mission « Crédits non répartis ». La dotation pour les dépenses accidentelles et imprévisibles est maintenue à son niveau de 2018. Les 53 millions d'euros qui restent inscrits sur la dotation provision relative aux rémunérations publiques me laissent en revanche plus circonspect. Une partie des crédits initiaux a certes été répartie, en seconde délibération à l'Assemblée, mais pas ceux concernant la revalorisation du barème de monétisation des jours épargnés sur un compte épargne temps. Pourtant, le rendez-vous salarial a déjà eu lieu il y a cinq mois.

Mme Sylvie Vermeillet, rapporteure spéciale de la commission des finances .  - La contribution de l'État aux régimes sociaux et de retraite, de 6,28 milliards, couvre les deux tiers des retraites versées aux pensionnés des régimes de la SNCF, de la RATP, des marins et des mineurs. Ces régimes se caractérisent par un nombre de cotisants inférieur à celui des pensionnés : le ratio est de 1,3 actif pour 1 pensionné dans le régime général, de 0,65 dans le régime de la SNCF et de 0,85 à la RATP.

La contribution de l'État couvre également des avantages dérogatoires. L'âge de départ est de 52 ans pour les agents de conduite de la SNCF et la durée de service d'une pension atteint 40 ans à la RATP, soit plus que la période d'activité.

Le CAS Pensions bénéficie de la sous-revalorisation des retraites, l'économie est de 600 millions d'euros par point d'inflation non pris en compte. Les recettes augmentent peu en l'absence de revalorisation générale du point d'indice et du nombre de contractuels en hausse : 11,8 % en 2006, 16,5 % aujourd'hui. Le solde du CAS reste très positif à 1,6 milliard.

Les soldes financiers des régimes couverts par le CAS devraient rester positifs à l'horizon 2070, au contraire du solde du régime général qui exigera que la croissance soit supérieure à 1,5 %.

Sans surprise, le niveau de vie des fonctionnaires retraités reculera par rapport à celui des actifs. La perspective du taux de remplacement pose problème puisqu'elle incite les intéressés à épargner davantage, avec des effets probablement assez discriminants.

L'adoption du pacte ferroviaire crée un nouveau régime spécial de retraite pour la SNCF, appelé à s'effacer à très long terme puisqu'il n'y aura plus de nouveaux cotisants.

L'un des objectifs de la réforme est un système de retraites plus juste, soit, mais le principe d'uniformité des rendements contributifs nécessitera le maintien d'un certain niveau de solidarité. La transition entre les deux systèmes pose plusieurs questions : quelle durée, quelle compensation, quelle prise en compte de la dangerosité et de la pénibilité des métiers ? Comment sera pilotée la valeur fondamentale du point dans le futur système ? Comment annoncer aux fonctionnaires que la valeur du point va baisser ? Je n'ai pas les réponses à ces questions mais, en toute hypothèse, la date de juin 2019 pour y répondre paraît bien proche...

Compte tenu de ces remarques, je vous propose d'adopter les crédits.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales .  - La commission des affaires sociales a souligné cet automne que la sous-revalorisation des retraites - -0,3 % en 2019 et 2020  - est insoutenable. Elle générera 2,4 milliards d'euros d'économies pour la sécurité sociale et 800 millions d'euros d'économies pour l'État, principalement pour les pensions de retraite et les régimes spéciaux. Si l'on y ajoute la hausse de la CSG, votre politique a le rendement de la réforme de 2010 mais vous la menez sur le dos des seuls retraités. C'est contraire à votre discours sur une réforme qui ne serait pas financière et ne concernerait pas les retraités actuels. La réforme doit maintenir, à l'avenir, le niveau des pensions et n'exclure aucun paramètre de justice intergénérationnelle.

Seconde remarque, les régimes spéciaux. Malgré les réformes de convergence vers le régime général, trois spécificités des régimes spéciaux demeurent : l'architecture de ces régimes intégrant base et complémentaire, les règles de calcul des pensions et l'existence des catégories actives, qui correspondent aux emplois particulièrement dangereux ou pénibles.

Le débat sur la prise en compte de la pénibilité pour toute la population active doit être ouvert rapidement, il faut le faire sans stigmatiser personne et en tirant les leçons de l'échec du compte Pénibilité.

Le Sénat continuera de se montrer constructif. (M. Jackie Pierre applaudit.)

Mme Catherine Troendlé, en remplacement de Mme Catherine Di Folco, rapporteur pour avis de la commission des lois .  - Veuillez excuser Mme Di Folco, retenue au centre de gestion du Rhône pour les élections professionnelles. Son avis porte sur la fonction publique de l'État et plus précisément sur le programme 148, destiné à compléter les actions des ministères en matière de ressources humaines.

Le programme 148 est doté de 206,91 millions d'euros, soit une baisse de 0,91 % par rapport à la loi de finances pour 2018, à périmètre constant.

Concernant la formation interministérielle, les projets de réforme des instituts régionaux (IRA) et de l'ENA génèrent 1,92 million d'euros d'économies. La commission des lois a salué le plan de transformation de l'ENA pour un retour à l'équilibre budgétaire dès 2020.

En 2019, les aides pour le recrutement des apprentis dans la fonction publique de l'État ont été réparties dans les budgets de chaque ministère. Dommage car nous y perdons en lisibilité.

Un mot de la réduction des effectifs. Seuls 5 824 ETP supprimés en deux ans : on est loin de l'objectif de 50 000 en cinq ans.

La mise en oeuvre du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (Rifseep) a pris du retard dans la fonction publique d'État ; c'est regrettable car c'est le préalable à son déploiement dans la fonction publique territoriale. Pourquoi des corps de la haute fonction publique en sont-ils exclus ?

Enfin, le recours aux contractuels exige de sécuriser les procédures de recrutement et les règles de déontologie. Les employeurs veulent de la souplesse sur les missions spécifiques, non sur les emplois fonctionnels.

M. Éric Bocquet .  - La question du recouvrement de nos impôts, les relations avec les contribuables, la qualité de nos services publics locaux et hospitaliers, tels sont les enjeux.

Le Gouvernement supprime plus de 1 800 postes à la DGFiP. La lutte contre la fraude nécessite pourtant des moyens financiers et humains, la dématérialisation ne saurait suffire ! Le prélèvement à la source non plus ne nous garantit contre la fraude. Ce sont les agents qui détectent les mensonges sophistiqués. La lutte contre la fraude et l'évasion fiscales n'est pas un combat à fleuret moucheté... Elles nous coûtent 80 milliards d'euros et se concentrent sur l'impôt sur les sociétés, la TVA et l'impôt sur les revenus les plus élevés. Il faut, pour les détecter, un maillage territorial dense et des agents formés. Tout le contraire de ce que fait le Gouvernement.

En rejetant les crédits de la mission, le groupe CRCE exprime son opposition au démembrement de cette administration.

M. Jacques Mézard .  - Ces missions portent sur le pôle économique et financier de l'État, sur la politique de l'État employeur et sur la gestion de l'État propriétaire. L'Assemblée nationale a ajouté quatre articles rattachés sur l'expérimentation du compte financier unique et le transfert de la propriété de l'hôtel de la Marine de Polynésie.

Avec près de 2 millions de fonctionnaires, l'État est le premier employeur. Ses activités ont un impact sur la cohésion sociale, il n'est pas besoin de le démontrer. Près de 1 500 suppressions de postes auront lieu, d'abord à Bercy -  quoi de plus normal lorsque l'on demande des efforts aux autres.

Si les retraites des régimes spéciaux restent largement subventionnées, leur situation tend à converger vers le régime général. Le solde du compte Pensions des fonctionnaires est nettement excédentaire, à 1,6 milliard d'euros.

Retards et surcoûts semblent caractériser le déploiement des programmes informatiques dans l'administration. Cela doit changer et l'amélioration passe aussi par des organisations repensées, une meilleure gestion des ressources humaines et des carrières, une autre utilisation des compétences au sein des services et une meilleure négociation des contrats avec les prestataires.

La DGFiP connaît des changements importants avec le prélèvement à la source. La lutte contre la fraude doit rester la priorité des priorités. Les douanes sont en première ligne pour la préparation du Brexit. Dématérialisation, gestion des dossiers en back-office, agence unique de recouvrement avec l'Urssaf sont des enjeux que DGFiP et douanes ont en commun.

Le poids des indus dans le budget de l'État est considérable : plusieurs milliards d'euros. Il faut accentuer l'effort.

Sur l'immobilier, il y aurait beaucoup à dire. Il serait bon que Bercy fasse preuve de plus de célérité sur les dossiers : tout le monde s'en réjouirait, surtout ceux qui veulent bâtir.

Le groupe RDSE votera ces crédits.

M. Dany Wattebled .  - La maîtrise des effectifs doit être saluée. Avec 1 947 ETP supprimés, cette mission est le premier contributeur à la réduction du nombre de fonctionnaires. Moins de personnel pour un service toujours de qualité, voilà quel doit être l'objectif. C'est d'ailleurs l'honneur de la fonction publique d'avoir traversé les réformes successives de la RGPP à la MAP en adaptant son action pour servir avec la même excellence et la même efficacité.

Nous sommes cependant loin du but de 50 000 suppressions de postes durant le quinquennat : seulement 6 000 environ l'ont été sur deux ans. Il ne faut toutefois pas de coupes brutales, mais une réflexion d'ampleur sur les missions de service public ou les dépenses peu utiles.

Nous fondons de grands espoirs dans le processus Action publique 2022. Il devra d'abord redonner aux agents publics le goût de leur métier. Nous attendons du projet de loi qui viendra en début d'année prochaine une simplification de la mobilité, des instances de représentation et des retraites.

Les retraites, c'est justement l'objet des 6,3 milliards d'euros de la contribution de l'État aux régimes spéciaux. Ces régimes ne sont pas pérennes, nous attendons beaucoup du travail de Jean-Paul Delevoye. Cette réforme ne devra faire aucun perdant.

Nous soutenons les efforts du Gouvernement et voterons ces crédits en restant vigilants sur les résultats de l'Action publique 2022, qui se font attendre...

M. Claude Haut .  - Le service public est au coeur du pacte républicain. Le service public, c'est ce Lazare juridique, comme le dit le président du Conseil d'État Roger Latournerie, capable de renaître de ses cendres. Le service public, critiqué pour son manque d'égalité, son coût et son inadaptation aux réalités, doit renaître. Je salue les efforts du Gouvernement qui, avec la loi Essoc, veut l'adapter aux attentes des usagers.

Égalité veut dire adapter : dédoubler les classes de CP, accompagner davantage les plus précaires, ceux qui sont le plus éloignés de l'emploi, que les cadres A... Étendre les horaires d'ouverture des services, dématérialiser, « dites-le nous une fois » : voici les premiers principes mis en oeuvre. Simplifier la vie des Français comme celle des entreprises, contrôler non plus pour sanctionner mais pour orienter, tout cela ne pointe pas vers le laxisme - la surveillance des trafics illégaux a été renforcée.

Les Français attendent aussi que la fonction publique évolue. Cela implique de renverser le paradigme vertical, d'inciter les managers publics à prendre des risques. Le fonds de transformation de l'action publique de 700 millions d'euros est un outil utile. Nous défendons une rémunération plus individualisée pour récompenser le travail et l'efficacité, l'ouverture aux contrats pour aller plus vite lorsque c'est nécessaire, une meilleure mobilité entre les trois fonctions publiques, un dialogue social renforcé. Contrairement à ce qu'avait fait la RGPP, les fonctionnaires, sève de la cohésion sociale, méritent d'être les parties prenantes des transformations engagées.

Le groupe LaREM votera ces crédits.

Mme Monique Lubin .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) C'est en préparation d'une année singulière, à un moment particulier, que nous discutons du projet de loi de finances 2019. Moment particulier, car, s'expriment des craintes sur le pouvoir d'achat des Français. Année particulière, car année de réforme des retraites.

La question des régimes spéciaux en sera un élément clé. Des interrogations perdurent, notamment celle relative à l'imputation de la retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles sur cette mission plutôt que sur la mission « Agriculture ».

M. Delevoye, Haut-Commissaire en charge de la réforme des retraites, a présenté les prémices de la réforme devant la commission des affaires sociales du Sénat. Il s'est montré clair et bienveillant. Mais la bienveillance et la compétence ne font pas tout. Il va nous falloir être particulièrement vigilants. La colère gronde, le mécontentement se fait jour.

Je n'imagine pas qu'une transformation aussi profonde ne fasse l'objet d'un temps de réflexion important. Je m'interroge donc sur le vote programmé pour 2019, surtout si la discussion ne démarre qu'au troisième trimestre. Une acceptation des Français sera indispensable.

Quid des carrières longues, quid de la valeur du point, de son évolution ? Il n'y a pas de petite ni de grande réforme sans concertation avec les corps intermédiaires, et le consentement de nos concitoyens est le préalable à toute réforme. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE et sur quelques bancs du groupe SOCR)

M. Olivier Henno .  - Trois missions et deux comptes spéciaux... La mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » rassemble l'essentiel des effectifs du ministère de l'Économie et des finances, dans un objectif de baisse des coûts de fonctionnements et des effectifs qui devrait s'accompagner d'une hausse de l'efficacité des services, dans la droite ligne de la trajectoire engagée l'année dernière dans le cadre du comité Action publique 2022.

Le programme 302 « Facilitation et sécurisation des échanges » est le seul programme en hausse, avec la création de 350 emplois supplémentaires dans la surveillance du dédouanement pour anticiper le Brexit. Dès ce PLF, nous mesurons le changement de paradigme qu'il représente, avec les surcoûts engendrés par le bilatéralisme commercial dont nous découvrons, avec la fragilisation du multiralisme, les inconvénients...

La mission « Action et transformation publiques » s'inscrit dans le renouvellement de la relation avec l'usager, avec des mesures comme le droit à l'erreur ou le guichet unique. Repensons l'action publique avec les nouvelles techniques d'information et de communication, qui ont transformé nos habitudes. Il suffit de nous voir en séance avec nos portables pour s'en convaincre...

Demain, le service public, plus numérique, sera-t-il toujours humain ?

Mme Nathalie Goulet.  - Remettons de l'humain !

M. Olivier Henno.  - Ayant déménagé ma permanence, j'ai regretté le bon vieux temps, où l'on avait affaire à des personnes chez EDF ou Orange, après avoir été balloté de plateforme téléphonique en plateforme téléphonique.

Cette transformation, bien que nécessaire, ne pourra se faire que dans une amélioration de la qualité du service rendu aux usagers. Nous serons au Sénat, notamment au groupe Union centriste, les garants vigilants et exigeants de cette mutation. La transformation de notre service public ne peut aggraver encore notre fracture territoriale. Plus que jamais, nos concitoyens ont besoin de sentir un État de proximité.

Enfin, pour la mission « Régimes sociaux et de retraite », je salue le travail de nos rapporteurs. En effet, le sujet des régimes sociaux et de retraite est presque un tabou dans notre pays. À l'aube d'une réforme systémique qui s'annonce plus que difficile pour le Gouvernent, il est toujours passionnant de se replonger dans les chiffres.

Engagée depuis plus de quinze ans, la convergence des régimes spéciaux vers le régime général est encore un véritable défi pour la réforme à venir. Les dépenses de rééquilibrage, bien qu'en baisse, sont toujours très importantes, près de 7 milliards d'euros. Les régimes spéciaux font partie de l'histoire de notre pays et l'attachement culturel des assurés à leur régime spécial est très fort. Si leur existence provoque toujours de vifs débats dans notre société, il conviendra de travailler à leur évolution sans en stigmatiser les bénéficiaires. J'appelle le Gouvernement au dialogue et à la concertation pour cette réforme qui touchera au quotidien des Français.

En attendant ces débats passionnants, le groupe UC votera ces missions et comptes spéciaux amendés par le Sénat. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

Mme Christine Lavarde .  - Le Gouvernement s'est résolument engagé dans une transformation importante de l'action publique. Il s'est doté des moyens d'investissement nécessaires à des réformes structurelles et ambitieuses.

Je retrouve dans ces mots l'ambition du Premier ministre lorsqu'il lançait le Comité Action publique 2022 le 13 octobre 2017 : « Durant trop longtemps, on a recherché les économies avant de penser l'organisation. Notre démarche propose l'inverse : d'abord mieux s'organiser, plus simplement, plus clairement, avec de nouveaux outils pour redonner du sens à l'action publique et mieux dépenser l'argent des Français ». Au-delà des mots, j'ai cherché dans les programmes et les actions de la mission des propositions concrètes. Je note un progrès par rapport à 2018 : il y a désormais un préambule et une présentation des actions. Mais, en même temps, j'avoue une grande déception. Les trois-quarts des AE et le tiers des CP de la mission sont consacrés à la rénovation thermique et à l'accessibilité des bâtiments administratifs. Certes, ce n'est pas du luxe. Selon la direction de l'immobilier de l'État, les besoins du parc des cités administratives dépassent le montant total du programme. Ce qui est vrai pour l'État, l'est aussi pour les collectivités. Faites donc un geste en leur faveur et maintenez l'article introduit par le Sénat leur reversant une partie des recettes fiscales sur l'énergie.

Quel lien entre la maquette budgétaire et la transformation de l'action publique ? J'ai eu l'impression de revivre la déception du Comité Action Publique 2022. Les discours ne se traduisent pas en acte. Pendant plusieurs mois, les membres dudit Comité ont conduit des auditions pour faire foisonner des idées pour répondre à la modernisation de l'action publique. Mais pourquoi les faire travailler sur des sujets tels l'agriculture ou le logement alors que les projets de loi EGALIM ou ELAN étaient déjà rédigés ? Pourquoi leur avoir refusé la lecture du rapport auquel ils étaient censés avoir contribué ? La direction interministérielle à la transformation publique a fini par prendre la plume et bien au-delà dans la phase finale.

Le président de la commission des finances a dû expressément demander la communication de ce rapport. Là encore, quelle cohérence avec les propos du ministre Darmanin devant la commission des finances en septembre 2017 qui assurait que « Le Parlement se saisira de ce travail et nous pourrons alors définir collectivement ce que sont les missions de l'État, ainsi que les moyens humains et les crédits budgétaires correspondants ». Nous ne devons pas avoir la même définition du mot « collectivement » !

La transformation de l'action publique est la pierre angulaire de la stratégie budgétaire du quinquennat. Si les économies annoncées ne sont pas au rendez-vous, l'objectif de réduction du déficit structurel ne sera jamais atteint. Le chemin à accomplir jusqu'en 2022 est encore long. La présentation du PLF pour 2019 liste les premières étapes : réforme des aides personnelles au logement, réduction des contrats aidés, réforme de l'audiovisuel public, mise en place du nouveau service public de l'emploi, ou encore réorganisation des services de l'État et de ses opérateurs à l'étranger.

Il vous reste trois ans pour réduire de 50 000 le nombre des emplois dans la fonction publique d'État, l'année 2018 ayant été une année blanche. À première vue, les efforts réalisés en 2019 seront quatre fois plus importants avec une réduction de 4 164 ETP. Mais quand on y regarde de plus près et que l'on raisonne en équivalent temps plein travaillé, le solde des plafonds d'emplois sur le périmètre de l'État et des opérateurs progresse de 1 322 ETPT.

Le chemin est encore long pour transformer notre pays. Les événements des derniers jours nous rappellent que cette transformation ne pourra se faire sans concertation avec les corps intermédiaires et sans un souci de maintenir des services publics de proximité. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Sophie Taillé-Polian .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) La baisse du plafond d'emplois est le signal inverse de celui qu'il faudrait envoyer pour lutter contre la fraude et l'évasion fiscale. Quand le peuple se mobilise contre l'injustice fiscale, ce serait un signal fort. Il faudrait augmenter les contrôles, or ce budget diminue le nombre de postes.

Nous assistons à une baisse du nombre de contrôles entraînant mécaniquement une baisse du taux de couverture fiscale.

Ainsi, concernant l'impôt sur les sociétés, le taux de couverture du contrôle fiscal externe est passé de 3,17 % en 2008 à 2 % en 2016. On constate une baisse similaire du taux de couverture du contrôle sur pièces sur ce même impôt passant de 7,16 % en 2008 à 3,37 % en 2016.

Cette baisse, nous la constatons aussi sur la TVA et en matière d'impôt sur le revenu pour les foyers fiscaux. Elle s'accompagne, ces dernières années, d'une baisse des droits nets notifiés lors des opérations de contrôle fiscal. Les statistiques 2018 de la DGFiP nous indiquent que les droits nets notifiés sont passés de 16,1 milliards en 2015 à 13,9 milliards en 2017. La lutte contre la fraude fiscale doit s'intensifier et ces postes ne doivent pas être supprimés. Dans la rue, on entend demander un retour du service public. Or on constate des fermetures de trésoreries.

À y regarder de plus près, ce budget comporte un fond doté de 50 millions pour soutenir les coûts de transition nécessaires à la mise en oeuvre des réformes structurelles ; en clair, des suppressions de postes et des réorganisations. Ces 50 millions sont destinés à la formation des agents et aux bilans de compétence pour les reclasser. Pourquoi ne pas utiliser cet argent pour augmenter les plafonds d'emplois afin de lutter contre la fraude et l'évasion fiscale ?

Mme Nathalie Goulet.  - Mieux que la police de Bercy !

Mme Laurence Rossignol.  - Bravo !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics .  - Je ferai un point d'étape sur la transformation publique que nous entreprenons, notamment dans les deux grandes administrations : la DGFiP et la direction générale des douanes et des droits indirects.

Depuis un an et demi, nous avons remis à plat l'action publique. Sur le plan législatif, cette politique s'est traduite dans de nombreux textes, notamment la loi ESSOC, afin d'améliorer la relation avec l'usager et le droit à l'erreur. Nous avons aussi amélioré la lisibilité de notre politique fiscale, à commencer par la suppression d'une vingtaine de petites taxes.

Votre assemblée a judicieusement supprimé deux taxes supplémentaires. Nous transférons le recouvrement de certaines taxes de la DGDDI à la DGFiP pour recentrer les douanes sur leurs missions premières.

Nous avons choisi de prendre le temps de la concertation avec les agents, escamotés par certains de vos amendements qui instaurent trois jours de carence dans la fonction publique ou encore des coupes massives dans les effectifs de la DGFiP. Nous avons identifié quatre leviers d'action : simplification du dialogue social, recours accrus aux contrats qui donne plus de souplesse aux encadrants tout en améliorant les conditions de recrutements des agents contractuels, individualisation de la rémunération des agents et accompagnement renforcé des mobilités et des transitions professionnelles. Ces leviers sont essentiels pour refonder le contrat social avec les fonctionnaires. Un projet de loi relatif à la fonction publique sera présenté au cours du premier semestre de l'année prochaine.

Sur le plan opérationnel, de nombreuses réformes ont été lancées et ne correspondent en rien à la logique de rabot que vous évoquez. Parmi celles-ci, je citerai le transfert à la DGFiP du recouvrement de l'essentiel de la fiscalité relevant de l'État, avec l'objectif que la mission fiscale de la DGDDI soit concentrée sur la fiscalité proprement douanière. Ce mouvement s'inscrit dans une logique plus large d'unification du recouvrement pour les entreprises et les particuliers d'ici la fin du quinquennat, avec potentiellement la constitution d'une agence unique de recouvrement pour la sphère de l'État et la sphère sociale

Je veux aussi citer la mise en place, avec les collectivités locales, du compte financier unique qui se substituera aux actuels comptes administratifs et de gestion. Ce sera source de lisibilité et de meilleur usage des crédits.

La création de l'Agence comptable affirme le principe de la séparation de l'ordonnateur et du comptable. Enfin, notre objectif des zéro espèces dans l'administration d'ici 2022. Nous sommes ici dans une démarche expérimentale.

J'en viens à vos remarques et critiques.

Selon la commission des finances, la priorité à la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales ne se retrouverait pas dans le budget. Or les lois ESSOC et fraude transforment le contrôle, pour qu'il soit plus rapide, plus précis et mieux recouvré. La loi relative à la fraude fiscale renforce les instruments de détection avec la création d'une police fiscale, avec l'augmentation du montant des sanctions et le recours au name and shame. Les services utilisent de nouveaux outils comme le data mining et l'analyse risque pour mieux cibler les entreprises et les particuliers. La lutte contre la fraude est donc bien la priorité du Gouvernement.

Concernant les résultats du contrôle, certains chiffres cités sont inexacts. Le montant des droits et pénalités après les contrôles s'élève à 16,6 milliards d'euros en 2017 et non 13,5 milliards. Avec le STDR, le montant total s'élève à 17,9 milliards d'euros. Il est vrai que l'on constate une baisse de 8,2 % entre 2017 et 2018. Mais ces résultats fluctuent en fonction d'affaires exceptionnelles selon les années. Le STDR explique aussi cette baisse car les dossiers les plus importants ont été traités en début de son existence. Enfin, certains redressements finissaient au contentieux où ils pouvaient ne donner lieu à aucun recouvrement. Depuis 2017, le Gouvernement a préféré sincériser les contrôles fiscaux.

Le pilotage au rabot ne serait plus tenable, dites-vous. Une réorganisation territoriale des services est en cours, avec la multiplication des points de contact avec les usagers. Compte tenu de la taille du réseau et des enjeux, sept expérimentations pilotes seront organisées dans les départements. Vous y serez associés.

Les crédits informatiques sont en hausse de 15 millions depuis 2017, après une baisse continue entre 2015 et 2017. En 2019, 37 millions d'euros accompagnent le prélèvement à la source, et 20 millions d'euros pour la transformation du ministère de l'économie et des finances. Ce sera un levier de plus pour la transformation de ce ministère en complément des projets de transformation présentés sur le fonds de transformation de l'action publique qui s'élève à 245 millions, dont 50 millions pour le fonds d'accompagnement interministériel des ressources humaines et 7,2 millions pour le fonds pour l'accélération du financement des start up.

Monsieur Carcenac, la SOVAFIM fera l'objet d'une réflexion dans le cadre de la réforme de la politique immobilière de l'État avec pour objectif de mieux louer et de céder certains biens.

Enfin, la réforme des retraites des fonctionnaires s'inscrira dans le cadre de la concertation de Jean-Paul Delevoye. Cela nécessite du temps de travail et de mise en oeuvre pour plus d'équité et de transparence dans les secteurs privé et public. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Examen des crédits des missions, des articles rattachés, de l'amendement portant article additionnel et des comptes spéciaux

Article 39 (Gestion des finances publiques et des ressources humaines)

Mme la présidente.  - Amendement n°II-49, présenté par M. Nougein, au nom de la commission des finances.

Modifier ainsi les crédits du programme :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local

dont titre 2

2 200 000 000

2 200 000 000

2 200 000 000

2 200 000 000

Conduite et pilotage des politiques économiques et financières

dont titre 2

Facilitation et sécurisation des échanges

dont titre 2

Fonction publique

dont titre 2

TOTAL

2 200 000 000

2 200 000 000

SOLDE

- 2 200 000 000

- 2 200 000 000

M. Claude Nougein, rapporteur spécial.  - Cet amendement a déjà été adopté par le Sénat lors du PLF pour 2018. Selon l'Enquête emploi de l'Insee, la durée habituelle de travail de l'ensemble des actifs serait proche de 37,5 heures par semaine.

L'alignement du temps de travail dans la fonction publique sur cette durée se traduirait par une augmentation moyenne de la durée hebdomadaire de travail dans le secteur public de 7 %.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Comme l'année dernière, l'avis est défavorable sur le fond et la forme. Votre amendement fait peser sur la DGFiP un effort considérable. Cet amendement amputerait de 32 % sa masse salariale, ce qui serait insoutenable. La répartition des crédits ne peut être modifiée qu'à la marge.

Sur le fonds, le temps de travail des fonctions publiques d'État, territoriale et hospitalière est déjà aligné sur celui du secteur privé, soit 35 h/semaine.

Cet amendement est insoutenable pour la DGFiP. Avis défavorable.

L'amendement n°II-49 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-51, présenté par M. Nougein, au nom de la commission des finances.

Modifier ainsi les crédits du programme :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local

dont titre 2

216 000 000

216 000 000

216 000 000

216 000 000

Conduite et pilotage des politiques économiques et financières

dont titre 2

Facilitation et sécurisation des échanges

dont titre 2

Fonction publique

dont titre 2

TOTAL

216 000 000

216 000 000

SOLDE

- 216 000 000

- 216 000 000

M. Claude Nougein, rapporteur spécial.  - Cet amendement a déjà été adopté par le Sénat en 2015, 2016 et 2018. Il augmente de 1 à 3 jours le délai de carence dans la fonction publique. Les crédits sont imputés au programme 156 et devront être répartis sur l'ensemble des missions.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Cet amendement est incompatible avec l'article 12 de la LOLF. Sur le fond, le Gouvernement est opposé à cet amendement. Les complémentaires santé sont très hétérogènes voire rares dans la fonction publique. Une mission étudie actuellement la possibilité de les étendre. Ce n'est qu'ensuite que nous pourrions éventuellement envisager d'augmenter le nombre de jours de carence.

L'amendement n°II-51 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-52 rectifié, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances.

Modifier ainsi les crédits du programme :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local

dont titre 2

 

45 400 000

45 400 000

 

45 400 000

45 400 000

Conduite et pilotage des politiques économiques et financières

dont titre 2

 

 

 

 

Facilitation et sécurisation des échanges

dont titre 2

 

 

 

 

Fonction publique

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

 

45 400 000

 

45 400 000

SOLDE

- 45 400 000

- 45 400 000

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances.  - Le président de la République s'est engagé à supprimer 50 000 emplois dans la fonction publique. Il reste 90 % des efforts à réaliser d'ici la fin du quinquennat.

Cet amendement l'aide en réduisant les effectifs des administrations centrales. Certes, il faut plus de médecins, d'infirmières, de policiers, de gendarmes, tous en conviennent.

Mais le service public est de moins en moins assuré sur le terrain, y compris à la DGFiP : des trésoreries ont fermé, des postes ont été supprimés.

En revanche, les effectifs continuent à croître en contrôle : nous sommes suradministrés tout en ayant moins d'effectifs sur le terrain. C'est pourquoi cet amendement maintient les effectifs là où nous en avons le plus besoin. (Mme Catherine Troendlé approuve.) Un exemple : il y a trois niveaux de contrôle pour les aides à l'agriculture : au niveau européen, au niveau national et au niveau régional.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - C'est sans doute un amendement d'appel.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - Pas seulement !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - En tout cas, il porte sur la seule DGFiP, ce qui n'est pas soutenable. Nous travaillons, sur la base d'une circulaire du Premier ministre du 24 juillet 2018, à la réorganisation de l'administration territoriale de l'État en retenant l'échelon départemental comme le plus pertinent. Retrait ?

M. Marc Laménie.  - Nous sommes devant un dilemme permanent. La DGFiP est l'une des directions les plus touchées par les pertes d'emplois, notamment sur le terrain. Nous avons tous vécu les fermetures de trésorerie, interlocuteurs privilégiés des maires, des DGS et des chefs d'entreprises.

L'administration des douanes a, elle, reçu quelques centaines de postes - mais cela pèse peu au regard de la lutte contre la fraude.

L'administration centrale compte trop de fonctionnaires alors qu'il en manque sur le terrain : ce constat m'invite à voter l'amendement.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général.  - J'aurais pu déposer le même amendement, en effet, pour chacune des missions.

Les ministères de l'environnement et de l'agriculture ne produisent-ils pas trop de normes ? Quoi qu'il en soit, je veux que le débat ait lieu.

M. Dominique de Legge.  - Je voterai cet amendement, d'abord parce que je suis convaincu par le rapporteur général, ensuite parce que je suis convaincu par vous, monsieur le ministre ! Vous avez dit que votre objectif était une politique de proximité, laissant entendre qu'il fallait rééquilibrer les niveaux national et local. Pour vous y encourager, je voterai l'amendement.

L'amendement n°II-52 rectifié est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-423, présenté par M. Vaugrenard, Mme Meunier, MM. Raynal et Féraud et Mme Taillé-Polian.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local

dont titre 2

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiques économiques et financières

dont titre 2

 

3 000 000

 

3 000 000

Facilitation et sécurisation des échanges

dont titre 2

 

 

 

 

Fonction publique

dont titre 2

3 000 000

 

3 000 000

 

TOTAL

3 000 000

3 000 000

3 000 000

3 000 000

SOLDE

0

0

M. Yannick Vaugrenard.  - L'immeuble Le Tripode à Nantes a été évacué en 1993 pour cause de présence d'amiante à tous les étages. Il a depuis été détruit mais l'État n'a pas encore décidé si l'immeuble est un site amianté ou pas. Il convient de mettre fin à cette situation dramatique car 1 800 personnes ont travaillé dans ces locaux, relevant à la fois du ministère des affaires étrangères, de l'Insee et du Trésor public en 22 ans d'exploitation.

Les agents ayant contracté des maladies liées à la présence d'amiante sont au nombre de 200 toujours en exercice sur les 850 agents en service lors de l'évacuation du site. Ces crédits permettraient d'accorder l'allocation spéciale amiante pour les agents nantais ayant eu à travailler sur le site en 2019.

M. Claude Nougein, rapporteur spécial.  - L'article 146 de la loi de finances pour 2016 prévoit que les agents dont l'incapacité au service est reconnue et le lieu à l'exposition établi peuvent demander une cessation d'activité avec une allocation spécifique. Retrait ou avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Entre 1972 et 1993, ce bâtiment a accueilli 1 800 agents des ministères des finances et des affaires étrangères. Les deux chambres ministérielles ont mis en place une procédure simplifiée de reconnaissance de maladie professionnelle, un suivi médical renforcé, un dispositif de cessation anticipée d'activité et présenter une demande d'indemnisation au FIVA.

Les deux ministères ont commandité plusieurs études épidémiologiques concernant la population des agents présente au Tripode. Les trois études menées ne mettent pas en évidence un abaissement sensible de l'espérance de vie au-delà des cas cités. L'IGAS, dans un rapport du 17 mars, s'est dite défavorable au classement du site. Mais nous allons poursuivre l'expertise épidémiologique et dans l'attente de ses résultats, retrait ou avis défavorable.

M. Yannick Vaugrenard.  - Le Tripode a été détruit en 1993 après évacuation. C'est Pierre Bérégovoy qui était à l'époque ministre de l'Économie et des finances. Je vous suggère, monsieur le ministre, de rencontrer les organisations syndicales pour leur détailler votre argumentation. Jusqu'à présent, elles n'ont pas été reçues à Bercy.

L'amendement n°II-423 n'est pas adopté.

Les crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », modifiés, sont adoptés.

Article additionnel avant l'article 77 bis

Mme la présidente.  - Amendement n°II-50, présenté par M. Nougein, au nom de la commission des finances.

Avant l'article 77 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au I de l'article 115 de la loi n°2017-1837 du 30décembre 2017 de finances pour 2018, le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « quatrième ».

M. Claude Nougein, rapporteur spécial.  - Cet amendement tire les conséquences de l'amendement n°II-49 pour augmenter les délais de carence.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Avis défavorable.

L'amendement n°II-50 est adopté et devient un article additionnel.

L'article 77 bis est adopté, de même que l'article 77 ter.

Article additionnel après l'article 77 ter

Mme la présidente.  - Amendement n°II-973, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 77 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 5424-1 du code du travail s'applique aux personnels mentionnés aux 1°, 2° et 5° de cet article, à l'exception de ceux relevant de l'article L. 4123-7 du code de la défense, lorsque ces personnels sont involontairement privés de leur emploi.

Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application du présent article, y compris les cas dans lesquels la privation d'emploi est assimilée à une privation involontaire ainsi que les éléments de rémunération pris en compte pour le calcul de l'allocation mentionnée au premier alinéa de l'article L. 5424-1 du code du travail.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Cet amendement sécurise juridiquement le droit à l'allocation-chômage des agents publics, à la suite du vote de la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel. En effet, un vide juridique pourrait s'ouvrir à partir du 1er janvier 2019.

M. Claude Nougein, rapporteur spécial.  - L'allocation de retour à l'emploi des agents publics est financée par leur employeur, et non par l'assurance chômage. La loi du 5 septembre 2018 a accidentellement supprimé ce droit.

Avis favorable à l'amendement n°II-973 qui, bien que déposé très tardivement, est de bon sens.

L'amendement n°II-973 est adopté et devient un article additionnel.

Les crédits de la mission « Crédits non répartis », modifiés, sont adoptés.

Article 39 (Action et transformation publiques)

Mme la présidente.  - Amendement n°II-445 rectifié, présenté par Mme L. Darcos, MM. Piednoir, Grosperrin, Longuet, Daubresse, Karoutchi et Milon, Mme Estrosi Sassone, MM. Rapin et Allizard, Mme A.M. Bertrand, M. Bonhomme, Mme Boulay-Espéronnier, MM. Bouloux et Brisson, Mme Bruguière, MM. Chaize et Cuypers, Mmes Deroche, Deromedi, Deseyne et Di Folco, MM. Dufaut, B. Fournier et Gremillet, Mmes Gruny et Imbert, MM. Laménie et D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre et Le Gleut, Mmes M. Mercier et Micouleau, MM. Panunzi, Pellevat et Poniatowski, Mme Procaccia et MM. Revet, Savary, Savin, Vaspart et Vogel.

I.  -  Créer le programme :

Rénovation énergétique des établissements à caractère scientifique, culturel et professionnel

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Rénovation des cités administratives et autres sites domaniaux multi-occupants

300 000 000

33 000 000

Fonds pour la transformation de l'action publique

dont titre 2

Fonds d'accompagnement interministériel Ressources humaines

dont titre 2

Fonds pour l'accélération du financement des start-up d'État

dont titre 2

Rénovation énergétique des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel

300 000 000

33 000 000

TOTAL

300 000 000

300 000 000

33 000 000

33 000 000

SOLDE

0

0

Mme Laure Darcos.  - Cet amendement crée un programme budgétaire dédié à la rénovation énergétique des établissements publics d'enseignement supérieur. Le patrimoine immobilier des universités représente 18,6 millions de m², soit le deuxième parc de l'État.

Véritable passoire énergétique, il constitue une source de dépenses considérable, faute d'ambition politique pour l'entretenir, le réhabiliter, l'adapter aux évolutions d'usage ou le valoriser. Le coût énergétique de ces bâtiments pénalise durablement la compétitivité de nos universités.

En parachevant l'autonomie universitaire dans son volet immobilier, l'État pourra concevoir ce patrimoine comme un actif valorisable plutôt qu'une charge de fonctionnement. L'engagement de l'État portera sur 300 millions d'euros, les études opérationnelles étant réalisées en 2019 pour des travaux engagés en 2020 et 2021.

M. Claude Nougein, rapporteur spécial.  - Cet amendement nous alerte à juste titre sur la situation dégradée du patrimoine des universités. Toutes les universités non propriétaires seraient concernées. Or les crédits du programme 348 ne suffiront déjà pas pour les cités administratives. Inutile de le ponctionner. Je suis défavorable à l'idée de déshabiller Pierre pour habiller Paul.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Je partage cet avis. Pas moins de 400 millions sont prévus dans le grand plan d'Investissement d'avenir pour les bâtiments universitaires. Le programme 348 permettra la relance des projets de rénovation énergétique dans 56 cités administratives, et de reconstruire les grandes cités de Lille, Lyon, Nantes et Amiens. Préservons ces projets. Retrait ou avis défavorable.

Mme Laure Darcos.  - Je vais le retirer mais cette question devra être traitée à l'avenir. La transition énergétique impose de rénover ces bâtiments.

L'amendement n°II-445 rectifié est retiré.

Les crédits de la mission « Action et transformation publiques» sont adoptés.

Les crédits du compte d'affectation spécial « Gestion du patrimoine immobilier de l'État» sont adoptés.

L'article 84 ter est adopté.

Article 84 quater

Mme la présidente.  - Amendement n°II-959, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 1

Remplacer les mots :

L'hôtel du commandement de la Marine, situé boulevard Pomaré, à Papeete (Tahiti) implanté sur la parcelle cadastrée section AE n°19 est transféré

par les mots :

La parcelle cadastrée section AE n°19, située sur la commune de Papeete et sur laquelle se trouve l'hôtel du commandement de la Marine, est transférée

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Cet amendement spécifie la consistance du bien transféré, qui comprend le bâtiment de l'hôtel du commandement de la Marine de Papeete et de l'ensemble de la parcelle sur laquelle il est implanté.

Un accord a été trouvé pour que l'ancien hôtel du commandement de la Marine abrite le Mémorial des essais nucléaires.

M. Thierry Carcenac, rapporteur spécial.  - C'est une mission de mémoire importante. Avis favorable.

L'amendement n°II-959 est adopté.

L'article 84 quater, modifié, est adopté.

Les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » sont adoptés.

Les crédits du compte d'affectation spécial « Pensions» sont adoptés.

La séance est suspendue à 19 h 40.

présidence de M. Philippe Dallier, vice-président

La séance reprend à 21 h 15.

IMMIGRATION, ASILE ET INTÉGRATION

M. Sébastien Meurant, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Le 3 octobre, le ministre de l'Intérieur, l'homme le mieux informé de France, décrivait des quartiers sensibles aux mains des islamistes et des narcotrafiquants. Comment en est-on arrivé là ? La France paraissait paisible, il y a trente ans.

Mme Esther Benbassa.  - Vraiment ?

M. Sébastien Meurant, rapporteur spécial.  - Le budget Immigration, asile et intégration, à hauteur d'1,5 milliard d'euros, n'a aucune ambition de traiter ces immenses défis. Les trois termes de l'intitulé n'ont rien à voir les uns avec les autres ! Lier ces trois notions, c'est ne rien comprendre aux dangers que fait peser l'absence de politique migratoire.

Dans le document de politique transversale, le coût estimé de l'immigration en France est de 6,2 milliards d'euros, réparti entre neuf ministères. À France Terre d'asile, le directeur général m'a affirmé qu'il n'y a pas de crise migratoire. Les effectifs de son association sont pourtant passés de 30 en 1998 à 900 et il dit manquer de moyens !

De 100 millions d'habitants en 1900, l'Afrique est passée à 1,2 milliard d'habitants, et elle en comptera 2,5 milliards en 2050. La situation de ce continent, à nos portes, a été bouleversée. Il faut sortir du silence ! Stephen Smith, dans La Ruée vers l'Europe, considère qu'on n'a jamais connu une telle pression : 42 % des jeunes Africains veulent émigrer ! Or le budget des retours à la frontière est resté stable, à 30 millions d'euros depuis quatre ans ; et le taux d'exécution des mesures d'éloignement a chuté pour atteindre 12,5 % : que deviennent les déboutés ?

Les chiffres des demandes d'asile sont sous-évalués : estimés à 97 300 en 2017, les demandes se sont élevées à plus de 100 000. L'enveloppe de l'allocation pour demandeur d'asile (ADA) sera insuffisante. Au premier semestre, la demande d'asile a augmenté de 16,16 %. On enregistre en France une hausse des demandeurs d'asile sous procédure Dublin, conséquence de notre politique d'asile.

Asile, mineurs isolés, admission au séjour régulier et immigration clandestine, au total, nous dépassons 450 000 entrées. À ce rythme, sur cinq ans, nous accueillons l'équivalent de la ville de Paris. Avons-nous la capacité de les accueillir ? La réponse est dans la question.

Nous avons été élus par les Français, ne laissons pas faire ceux qui se jouent de nos faiblesses. Ayons le courage de reprendre la maîtrise de nos frontières. Le président de la République serait bien inspiré de refuser le pacte pour l'immigration. Je vous invite à refuser ce budget, insincère. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. François-Noël Buffet, rapporteur pour avis de la commission des lois .  - Trois minutes, c'est bref ! À périmètre constant, ce budget augmente de 12 %. Un effort substantiel a été fait, de 0,6 %. La commission des lois regrette de retrouver ici des incohérences relevées lors de la loi Asile en septembre dernier.

Des efforts : en matière d'intégration, qui est toujours le parent pauvre des politiques migratoires, les mesures d'insertion professionnelle, les cours de langue, correspondent à ce que demandait le Sénat. La création de places d'hébergement est bienvenue.

Mais les hypothèses fondant ce budget sont peu plausibles. Le projet de loi prévoit une stabilisation des demandes d'asile en 2019 et 2020. Or elles augmentent en France, contrairement à ce qui se passe dans les autres pays, avec en particulier les flux secondaires en provenance d'Espagne. Les budgets alloués à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) et la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) ne permettront pas de tenir les délais cibles pour le traitement des dossiers, ni l'objectif d'hébergement des demandeurs.

Les demandes de séjour ont cru. La circulaire Valls représente 30 % des régularisations et n'a pas été abrogée. Près de 8 % des crédits de la mission sont consacrés à l'immigration irrégulière.

Un effort sur la rétention a été réalisé avec 450 places, mais sur l'éloignement, des efforts restent à faire. Il n'y a aucun suivi des déboutés du droit d'asile. Sur les six premiers mois de 2018, 12,6 % seulement des décisions d'obligation de quitter le territoire français (OQTF) ont été exécutées. Le système de Dublin sera-t-il revu ? Il n'y a pas eu d'accord sur ce point hier. Le commissaire européen Arramopoulos est pessimiste à ce sujet ; cela nous place dans une grande difficulté. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Jean-Yves Leconte .  - Le rapporteur pour avis regrette que la circulaire Valls ne soit pas abrogée ou révisée, mais c'est, comme toute circulaire, une simple compilation de textes réglementaires et législatifs. Il ne dit pas ce qu'il veut changer dans la circulaire. Les critères d'admission au séjour y sont plus stricts encore que dans les circulaires Sarkozy et Hortefeux...

Un éloignement coûte en moyenne 4 Smic en raison de la détention. Mais le problème est moins celui du coût que celui de la méthode : le tout rétention n'est pas efficace.

Nous ne sommes pas seuls à rencontrer ces problèmes : en Allemagne, en Turquie, en Grèce, au Maroc, on constate cette hausse.

Le rapport de la commission des finances confond les crédits de pilotage de la mission avec le coût de l'immigration. Il omet de souligner la contribution de cette population à l'économie, car les impôts, les cotisations, sont supérieurs aux dépenses sociales.

Pour lutter contre les passeurs et les trafics, mieux vaut créer un cadre de dialogue, non contraignant, à la disposition des différents États, dans le respect de leur souveraineté. C'est tout l'intérêt du pacte de Marrakech.

La France n'est pas seule. L'Europe a fait beaucoup : en 2015, il y avait 800 000 franchissements irréguliers par an de la frontière européenne ; on n'en compte plus que 150 000. C'est le résultat de politiques utiles. Le budget de Frontex a été doublé en 2018...

Monsieur le ministre, attention au budget de l'Ofpra, inférieur à trois semaines de fonctionnement de l'ADA. L'office doit pouvoir étudier les demandes d'asile rapidement, pour des raisons humanitaires et pour l'efficacité. Moins de cent jours de délai, c'est un beau résultat. Pour aller plus loin, il faudrait donner aux demandeurs le droit de travailler et veiller à l'application de la nouvelle loi en améliorant l'accueil dans les préfectures, la formation des agents, la cohérence des informations délivrées.

Les conditions de travail des agents de la police de l'air et des frontières pèsent sur les personnes retenues. L'Italie et l'Espagne manquent sans doute de solidarité, mais nous avons tous participé à cette catastrophe. Désormais, des bateaux marchands qui respectent le droit de la mer et sauvent des vies ne savent plus, ensuite, où aller déposer les naufragés recueillis. La coopération avec les garde-côtes libyens est aléatoire, et d'ailleurs à qui répondent-ils ? Nous refusons un élargissement de la procédure Dublin obligeant les demandeurs d'asile à végéter pendant dix-huit mois avant de pouvoir engager une procédure. Ce sont des conditions indignes.

Pourquoi des personnes ayant travaillé avec l'armée française en Afghanistan n'obtiennent pas plus rapidement un visa ?

Mme Nathalie Goulet.  - Très bien !

M. Jean-Yves Leconte.  - Avec le discours du rapporteur spécial, rien ne sera possible. La France inclusive que nous voulons n'a pas besoin d'une pluie de milliards d'euros mais d'un respect des droits, d'un refus de la discrimination, elle a besoin d'aimer et de faire vivre ses valeurs, faire que d'une génération sur l'autre, les enfants nés en France se sentent français. (M. Jean-Pierre Sueur et Mme Esther Benbassa applaudissent.)

M. Guillaume Arnell .  - Les crédits de cette mission sont en hausse par rapport à 2018 de 22,7 % en CP. Mais comme d'autres missions, le périmètre de celle-ci s'est élargi : l'augmentation est de 12 % à périmètre constant. Elle vise à faire face à la progression de 17 % des demandes d'asile.

La majorité des crédits est consacrée à l'action 2, « garantie du droit d'asile ». Les crédits sont insuffisants pour traiter toutes les questions relatives à l'immigration et à l'asile. Mais la mission ne reflète pas à elle seule toute la politique d'immigration et d'asile, qui atteint 6 milliards d'euros.

Conscient qu'il faut totalement repenser notre système d'accueil, j'avais accueilli très favorablement le projet de loi consacré à ce sujet, d'autant que le populisme gagne du terrain, nourri par un sentiment de déclassement et de renforcement des inégalités.

Le projet de loi, s'il corrigeait certains dispositifs, laissait certaines questions sans réponse. Les zones frontalières et nos îles de l'outre-mer sont particulièrement touchées, comme Mayotte, la Guyane, Saint-Martin. Les migrations fragilisent les populations locales. La précarité de ces migrants s'est accrue après l'ouragan Irma.

Le récent texte ne contient cependant aucune disposition contraignante sur les réfugiés climatiques ou pour lutter contre la traite des êtres humains à laquelle se livrent les trafiquants.

Dans ce projet de loi de finances, pas de moyens supplémentaires pour traiter ces problématiques : l'augmentation des CP est un simple ajustement budgétaire pour absorber l'augmentation des demandes d'asile.

Le groupe RDSE dans sa grande majorité votera les crédits. Mais nous vous mettons en garde : le Gouvernement devra mobiliser des moyens supplémentaires à l'avenir.

M. Loïc Hervé .  - La qualité de notre politique d'intégration détermine celle de notre politique d'immigration. Nous voulons une politique plus efficace pour les migrants réguliers. Ainsi parlait le Premier ministre au comité interministériel à l'intégration l'été dernier.

Votre Gouvernement veut mettre en oeuvre l'ensemble des moyens nécessaires. Nous saluons cette volonté. Les demandes d'asile enregistrent une augmentation sans précédent. Entre 2007 et 2017, elles ont presque triplé, bondissant de 183 %. L'immigration irrégulière a été très dynamique. La nouvelle loi connaît ses premiers effets, assurant une meilleure intégration, via une formation en langue française par exemple.

Mais la commission des lois signale que les moyens programmés sont fondés sur des hypothèses irréalistes. Les délais cibles et l'hébergement de 85 % des demandeurs d'asile ne sont pas tenables.

L'action 3, lutte contre l'immigration irrégulière, ne tient pas compte de l'augmentation des demandes et des flux secondaires. Denise Saint-Pé avait déjà alerté sur les Pyrénées, nouvelle route migratoire. Monsieur le ministre, vous avez dit vouloir nommer un coordonnateur pour travailler avec les autorités espagnoles. Cela s'est-il concrétisé ?

L'effort sur les mesures d'éloignement est quasi nul, stagnant à 30 millions d'euros. Près de neuf obligations de quitter le territoire sur dix ne sont pas exécutées. C'est certes une question complexe... La France doit continuer à protéger les populations en danger qui demandent asile. Mais trouvons de nouvelles solutions pour que les déboutés ne restent pas sur notre territoire.

La baisse des crédits correspondants est en contradiction avec la volonté affichée par le Gouvernement de faciliter l'accès aux places de rétention partout sur le territoire, pour favoriser la sécurité et lutter contre l'immigration irrégulière.

Le groupe UC ne pourra pas apporter son soutien à ces crédits. (Applaudissements sur les bancs des groupes UC et Les Républicains)

M. Dany Wattebled .  - La mission « Immigration, asile et intégration » voit ses ressources augmenter fortement ; les AE s'établissent à 1,7 milliard d'euros et les CP à 1,9 milliard d'euros.

Mais la crise est toujours là et les programmes de relocalisation sont insuffisants. Ne nous y trompons pas : c'est un budget d'affichage.

Je salue l'effort sur le dispositif d'accueil des migrants réguliers, d'hébergement d'urgence et les formations linguistiques. On peine toutefois à comprendre le refus d'abroger la circulaire Valls de novembre 2012. En 2017, nous avons eu 1 065 éloignements de moins qu'en 2012, alors que la pression migratoire est supérieure.

La pression migratoire s'accroît, l'exécution des OQTF recule ! À 17,6 %, nous avons atteint un plancher historique.

Pourquoi de telles mesures, quand seulement 36 % des déboutés en reçoivent la notification ? Le règlement Dublin doit être réformé. Le laxisme du Gouvernement l'empêche même d'éloigner 3 391 étrangers fichés et radicalisés.

Le groupe Les Indépendants ne votera pas ces crédits.

M. Thani Mohamed Soilihi .  - Malgré un environnement budgétaire contraint et un contexte difficile, le budget de cette mission augmente de 22 %. Cette hausse, cohérente avec le dispositif du Gouvernement et la loi du 10 septembre dernier, permettra de faire face aux défis.

La refonte du dispositif d'accueil des demandeurs d'asile va de pair avec l'augmentation du nombre de place : 97 000 en 2019.

Certes, ce budget a été construit sur des hypothèses de stabilité des flux, mais il n'est pas insincère. Aucun décret d'avance n'a été pris - ce n'était pas arrivé depuis neuf ans !

Les crédits alloués permettront de renforcer l'insertion professionnelle et l'apprentissage du français pour les primo-arrivants.

En matière d'immigration irrégulière, l'essentiel concerne l'accueil, mais 30 millions d'euros tout de même sont fléchés vers l'éloignement. Ce n'est pas rien, quoiqu'insuffisant.

La moitié des reconduites à la frontière depuis la France sont faites à Mayotte. Ma proposition d'adaptation des conditions d'acquisition de la nationalité française a reçu l'aval du Conseil d'État et a été validée par le Conseil constitutionnel. Cela concerne 45 % des naissances à Mayotte.

Mme Éliane Assassi.  - Bravo !

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Ces dix derniers mois, les rapports entre autorités françaises et comoriennes se sont tendus. Le 23 mars dernier par exemple, un bateau transportant une centaine de reconduits à la frontière était renvoyé d'Anjouan à Mayotte par l'Union des Comores. Fort heureusement, le dialogue a été renoué par Jean-Yves Le Drian. Le dialogue devrait déboucher prochainement sur un document cadre visant notamment la sauvegarde de vies humaines.

J'espère que ce budget permettra au Gouvernement de mener des politiques ambitieuses.

Le groupe LaREM votera ces crédits.

Mme Esther Benbassa .  - Il y a quelques mois, la Haute Assemblée adoptait un texte facilitant les expulsions, autorisant l'enfermement des mineurs en centres de rétention administrative, alors que nous connaissons tous le terrible destin de personnes arrachées à leur pays par le réchauffement climatique, la guerre ou la misère.

Sous des apparences flatteuses, le budget cache une sombre réalité. Le Gouvernement mise sur une stabilisation très hypothétique des demandes d'asile : cette mission est en conséquence gravement sous-budgétisée. Rien d'étonnant si nous voyons apparaître des campements de fortune.

Le Gouvernement lutte contre l'immigration irrégulière, en témoignent les places créées en centre de rétention, au détriment de l'intégration des étrangers en situation régulière.

La Cimade, Coallia et tant d'autres associations pâtiront de cette politique, elles qui travaillent dans l'accès aux droits et aux soins. Le Gouvernement préfère agiter les peurs ! Pourtant, les mouvements de population au plan mondial ne sont pas prêts de s'estomper. Votre prédécesseur Gérard Collomb estimait l'Europe submergée, reprenant les termes du Rassemblement national !

M. François Bonhomme.  - Il va être content !

Mme Esther Benbassa.  - Avec les 250 millions de migrants climatiques supplémentaires, c'est le principe de frontière qui sera remis en cause. Il faut en conséquence traiter les dossiers de manière plus fluide et soutenir les associations qui font un travail remarquable. Soyons à la hauteur des enjeux et de l'histoire. Lors de l'arrivée des boat people en France, Jean-Paul Sartre et Raymond Aron n'avaient-ils pas dépassé leurs oppositions personnelles pour agir ensemble ? Les 120 000 réfugiés alors accueillis s'intégrèrent parfaitement. Pourquoi ne pourrions-nous pas faire de même à nouveau ? (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE ; Mme Nathalie Goulet applaudit également.)

M. Roger Karoutchi .  - Monsieur le ministre, nous parlons, mais vous avez sans doute l'esprit davantage tourné vers samedi... Puissiez-vous avoir la ténacité nécessaire pour assurer la sécurité des Français.

Je serai bref. Tout État a le droit de décider qui entre sur son territoire. Il y a bien sûr les obligations européennes, mais je pense qu'elles seront revues après les élections européennes ; le pacte de Marrakech n'apportera rien, à mon avis, à notre politique migratoire.

Le droit d'asile est imprescriptible et sacré, certes, mais il est détourné. Nous ne sommes plus au XIXe siècle, nous n'accueillons plus des gens fortunés, mais des personnes que la guerre, les drames climatiques ou la misère chassent loin de chez elles. D'ailleurs, plus de 80 % des demandeurs ne se voient pas reconnaître le droit d'asile.

Il serait normal que le Sénat fixe des quotas. Mais les réfugiés qui obtiennent le droit d'asile n'obtiennent en réalité pas grand-chose : un peu de cours de français par ci, un petit film par-là, qui retrace l'évolution de notre pays de la préhistoire au général de Gaulle ; et pas même d'examen. Tout cela n'est pas digne. Sursaturés, nous traitons mal tout le monde, réguliers, irréguliers, demandeurs d'asile.

Je ne voterai pas, non plus que l'ensemble du groupe Les Républicains, les crédits de cette mission.

M. François Bonhomme .  - Notre pays, comme de nombreux pays européens, fait face à une crise migratoire majeure. Cette mission est donc prioritaire. L'Espagne est devenue le premier point d'entrée dans l'Union européenne, avec 41 000 migrants début 2018, soit une hausse de 143 % par rapport à 2017.

Ces flux donnent lieu à un rebond vers la France, qui est confrontée non à un mais à des flux migratoires. Les crédits pour y faire face augmentent de 36 % en AE à périmètre constant, de 12 %.

Mais les crédits sont loin de suffire. En 2017, près de 36 % des demandes d'asile, soit 35 900, ont été formulées dans le cadre du régime Dublin, contre 22 300 en 2016.

Ne faudrait-il pas abroger la circulaire Valls ou à tout le moins la durcir ?

Or le Gouvernement a retenu une hypothèse de 10 % de flux supplémentaire en 2018 et 0 % en 2019 et 2020... Comment parvient-il à ces estimations ?

Notre groupe Les Républicains ne votera pas les crédits de la mission. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur .  - Les crédits de la mission s'élèvent à 1,694 milliard d'euros, soit 13 % de hausse à périmètre constant, après une hausse de 26 % en 2018. C'est que la pression migratoire reste forte dans notre pays. C'est aussi la traduction budgétaire de priorités politiques claires, définies lors du comité interministériel à l'intégration de juin et inscrites dans le plan de maîtrise des flux migratoires.

Ce budget est robuste, sincère, il assume des ressources nouvelles pour éloigner les étrangers en situation irrégulière et améliore l'intégration de ceux qui ont vocation à rester en France. (Mme Esther Benbassa en doute.)

La pression migratoire est paradoxale. En 2016 et 2017, elle avait baissé de moitié dans l'Union européenne mais augmenté de 17 % en France avec 100 000 demandes. En 2017, la première nationalité des demandeurs d'asile était l'Albanie dont les ressortissants n'ont que 6 % de chance d'obtenir l'asile. Même constat en Guyane, avec la hausse des demandeurs d'asile haïtiens. En 2018, les demandes d'Albanais ont diminué de 41 %, grâce à un plan d'action négocié avec le gouvernement albanais. En Guyane, un décret a réduit à deux mois le délai d'examen des dossiers : les demandes ont baissé aussi de 49 %.

Reste que la France est confrontée à une situation migratoire délicate.

La France est prisée des demandeurs d'asile venant de Géorgie, en hausse de 289 %. Le phénomène relève aussi d'une immigration économique et n'a rien à voir avec la protection : nous ferons tout pour en tarir le flux. La France subit aussi les dysfonctionnements du règlement de Dublin, elle est très exposée aux flux secondaires. Le règlement doit être réformé ; je viens de le redire au Conseil Justice et affaires intérieures à Bruxelles.

Nous comptons respecter nos objectifs en conduisant un dialogue ferme avec les pays d'origine, en formulant des réponses aux défis migratoires, qu'il s'agisse du rebond ou de la situation en Méditerranée, en garantissant la dignité de l'accueil, en éloignant les déboutés mais en donnant à ceux qui sont reconnus comme réfugiés les moyens de s'intégrer.

Les conditions de vie dignes doivent être assurées pendant l'examen de la demande d'asile. Conformément aux engagements du président de la République, pas moins de 1 000 places sont créées en CADA et 2 500 en hébergement d'urgence pour demandeurs d'asile auxquelles il faut ajouter 2 000 places en centres provisoires d'hébergement.

Ce budget met fin à une anomalie en transférant les 7 800 places d'hébergement pour demandeurs d'asile en Ile-de-France vers les programmes 104 et 303 pour 113 millions d'euros.

M. le président.  - Enfin !

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État.  - Pour atteindre, fin 2019, notre objectif d'un délai de traitement de six mois en moyenne de la demande d'asile, nous allouons 170 titulaires aux préfectures et, pour tous les personnels en fonction dans les services chargés des étrangers, un plan d'attractivité ; 25 effectifs à l'OFII pour armer les équipes mobiles prévues par la circulaire du 12 novembre 2017 ; 10 ETP à l'Ofpra - qui compte 280 nouveaux collaborateurs depuis 2015 ; et, enfin, je le cite même si cela est hors du champ de cette mission, 122 ETP à la CNDA, chargé de statuer sur les recours.

Ce projet de loi prévoit la poursuite du rebasage de l'ADA, dont les crédits sont en hausse de 5,7 %.

Ce budget traduit l'attachement du Gouvernement à une politique crédible de lutte contre l'immigration irrégulière. Les éloignements ont crû de 14 % en 2017, après des années de fléchissement. La tendance se maintient en 2018 avec une hausse de 20 % mais les éloignements contraints, qui augmentent de 9 %, sont en deçà de la mobilisation, que je sais forte, des services. Nous manquons cruellement de place en centres de rétention administrative. L'engagement de 400 places supplémentaires a été tenu pour moitié depuis octobre 2017 ; il faut poursuivre les efforts, d'où le plan d'investissement dans la rétention de 40 millions d'euros. Le ministre de l'Intérieur et moi faisons du cousu main pour obtenir davantage de laissez-passer consulaires.

En parallèle, nous devons offrir des perspectives à ceux qui arrivent légalement en France pour combattre leur assignation à certaines identités, à certains quartiers que nous ne connaissons que trop bien. L'intégration passe par la maîtrise de la langue, des cours d'éducation civique en hausse de 12 à 24 heures et le travail.

M. le président.  - Il faut conclure.

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État.  - Un seul chiffre pour finir : 89 millions d'euros sont prévus pour mettre en oeuvre les décisions du comité interministériel. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE et quelques bancs du groupe Les Républicains)

Examen des crédits de la mission et de l'article rattaché

Article 39

M. le président.  - Amendement n°II-696, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Immigration et asile

 

20 000 000

 

20 000 000

Intégration et accès à la nationalité française

20 000 000

 

20 000 000

 

TOTAL

20 000 000

20 000 000

20 000 000

20 000 000

SOLDE

0

0

Mme Esther Benbassa.  - Le Gouvernement augmente les crédits du programme « Intégration » de 46,3 %. C'est heureux. Grâce à ces dotations, l'OFII aura les moyens nécessaires à ses missions. La citoyenneté ne s'invente pas, elle s'acquiert. Pour ces primo-arrivants qui ont fui la guerre et le marasme économique, la priorité est de retrouver la sécurité d'un foyer. Ne laissons pas se développer sur notre territoire de nouveaux bidonvilles, comme à Calais. L'association Aurore accomplit un travail remarquable, dans le XVIe arrondissement de Paris, dans le centre Exelmans que j'ai visité. De tels dispositifs devraient se multiplier. Le Gouvernement prévoit 3 500 places dans les centres hébergements d'urgence, allons jusqu'à 7 500 places. Le droit au logement est un objectif à valeur constitutionnelle.

M. Sébastien Meurant, rapporteur spécial.  - Avis défavorable. Diminuer les crédits destinés à la politique de l'éloignement est une mauvaise idée.

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État.  - La majeure partie des réfugiés ont vocation à accéder au logement dans les dispositifs de droit commun. Pour les plus vulnérables, nous aurons, entre 2017 et 2019, quadruplé le nombre de places en centres hébergements d'urgence, pour le porter à 8 707 places au niveau national. Priver le programme 303 de crédits serait dommage. Avis défavorable.

L'amendement n°II-696 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-697, présenté par Mmes Benbassa, Apourceau-Poly et Assassi, M. Bocquet, Mmes Brulin, Cohen et Cukierman, MM. Gay et Gontard, Mme Gréaume, M. P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Prunaud et M. Savoldelli.

I.  -  Créer le programme :

Fonds de soutien à la garantie de l'exercice du droit d'asile

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Immigration et asile

 

20 000 000

 

20 000 000

Intégration et accès à la nationalité française

 

 

 

 

Fonds de soutien à la garantie de l'exercice du droit d'asile

20 000 000

 

20 000 000

 

TOTAL

20 000 000

20 000 000

20 000 000

20 000 000

SOLDE

0

0

Mme Esther Benbassa.  - Dans un contexte budgétaire contraint, le Gouvernement a retenu l'hypothèse d'une stabilisation des demandes d'asile, entraînant un risque de sous-budgétisation de la mission et, donc, d'insincérité budgétaire. L'Ofpra risque un engorgement. Cet amendement crée un fonds de soutien à la garantie du droit d'asile.

M. Sébastien Meurant, rapporteur spécial.  - Je partage votre point de vue sur l'insincérité budgétaire mais, encore une fois, priver de crédits la politique de l'éloignement n'est pas une bonne idée. Avis défavorable.

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État.  - Avis défavorable pour les mêmes raisons. Depuis 2015, les crédits de l'Ofpra ont augmenté de 65 % depuis 2015, pour atteindre 70 millions d'euros, et 280 emplois y ont été créés.

L'amendement n°II-697 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-698, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Créer le programme :

Fonds de soutien à l'accompagnement des troubles psychotraumatiques

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Immigration et asile

 

10 000 000

 

10 000 000

Intégration et accès à la nationalité française

 

 

 

 

Fonds de soutien à l'accompagnement des troubles psychotraumatiques

10 000 000

 

10 000 000

 

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

Mme Esther Benbassa.  - Le 23 novembre, au TGI de Paris, un jeune Burkinabé de 15 ans s'est défénestré après avoir été entendu par le juge. La cécité du Gouvernement sur la fragilité psychique des migrants, qui ont subi les pires violences dans leur pays puis pendant leur traversée, nous inquiète. Les migrants souffrent de stress post-traumatique, d'amnésie post-traumatique, qui complique le travail de l'Ofpra. Sans suivi médical, les individus peuvent développer des pathologies mentales graves, comme la schizophrénie. Nous proposons de créer un fonds pour prendre en charge les pathologies de ces personnes brisées par l'exil.

M. Sébastien Meurant, rapporteur spécial.  - Nous accueillons mal car nous accueillons trop. Avis défavorable.

Mme Esther Benbassa.  - Ce n'est pas un argument !

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État.  - Les primo-arrivants font l'objet d'une prise en charge au titre de l'intégration mais aussi parce qu'il s'agit d'un impératif de santé publique. En 2018, l'État a accordé 500 000 euros à des associations qui interviennent spécifiquement dans ce champ. Les préfets bénéficient aussi de moyens supplémentaires. La création d'un fonds n'est donc pas opportune. Avis défavorable.

M. Roger Karoutchi.  - L'OFII a créé massivement, depuis deux ans, des postes de médecins et a développé un programme d'accueil et de contrôle médical. Je ne dis pas que c'est merveilleux et magnifique mais c'est mieux qu'avant. Laissons l'OFII continuer son travail.

Mme Esther Benbassa.  - Cela suppose un budget !

L'amendement n°II-698 n'est pas adopté.

L'amendement n°II-574 rectifié bis n'est pas défendu.

Les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » ne sont pas adoptés.

L'article 77 quater n'est pas adopté.

SÉCURITÉS

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Les récents dérapages que nous avons connus en matière de maintien de l'ordre démontrent l'importance de cette mission.

Le projet de loi prévoit une hausse de 1,62 % des CP et la création de 2 378 ETP. Malheureusement, ce n'est pas la même chose pour les crédits de fonctionnement et d'investissement. Les dépenses de personnel représentent 89,39 % de l'ensemble des crédits pour la police nationale, c'est 84,39 % pour la gendarmerie nationale. Il y a dix ans, le chiffre était de 80 %. Les revalorisations générales et notamment l'application du protocole d'accord de mai 2016 se traduisent par 200 millions d'euros de dépenses supplémentaires en 2018 et 92 millions d'euros en 2019.

En France, on compte un gendarme ou un policier pour 280 habitants, notre pays n'est pas en sous-effectif. Il y a un policier pour 273 habitants en Allemagne, 1 pour 220 en Italie, 1 pour 427 en Angleterre. Et encore, sans tenir compte des polices municipales ni des 7 000 militaires du plan Sentinelle.

Avec des dépenses de personnel qui représentent plus de 87 % des crédits de la mission, les crédits de fonctionnement sont insuffisants, et n'augmentent que de 0,88 %. Les crédits d'investissement, eux, baissent de 13,37 % !

Des efforts ont pourtant été faits, comme l'a montré le rapport que notre commission des finances a demandé à la Cour des comptes, sur l'équipement des forces de sécurité. Par exemple, pour que les primo-intervenants sur une scène d'attentat soient bien équipés, chaque brigade anticriminalité dispose maintenant d'une arme lourde et d'une protection assortie.

Des points noirs subsistent, à commencer par le manque de formation : en 2017, seuls 51 % des policiers et gendarmes ont effectué leurs trois séances de tir par an. Quant au vieillissement du parc automobile, le contraste entre les chiffres avancés et la réalité est flagrant : en 2017, seulement 1 500 véhicules sur les 3 000 annoncés. Depuis 2010, le nombre de véhicules achetés ne permet pas de garantir le maintien à niveau de la flotte.

L'état du parc immobilier, aussi, est très préoccupant. Dans la gendarmerie, l'état des logements influe sur le moral des troupes et, dans la police, le délabrement est tel qu'il faudrait des crédits d'investissement de 650 millions d'euros - et de 300 à 400 millions d'euros dans la gendarmerie. Or le niveau de ces crédits est respectivement de 165 et 100 millions d'euros.

Certaines réorganisations ont mis à mal les dispositifs opérationnels. La directive européenne de 2003 sur le temps de travail, applicable à la gendarmerie nationale depuis le 1er septembre 2016, implique la création de 4 000 ETPT. Seuls 2 500 sont prévus durant le quinquennat. Pour la police nationale, les protocoles de mai 2016 prévoient que les troupes peuvent disposer d'un week-end sur deux, au lieu d'un sur six. Appliquer cette vacation forte était si difficile qu'il a fallu décréter un moratoire, dans l'attente d'un rapport de l'IGA et de l'IGF prévu pour mars 2019. Elle supposerait la création de 4 160 ETPT et la mobilisation de 205 millions d'euros supplémentaires par an. Le fait qu'elle ne puisse pas être mise en oeuvre dans la région capitale, où les conditions de travail sont si dures, est révélateur, l'expérimentation menée à Boissy-Saint-Léger a été abandonnée.

Le stock d'heures supplémentaires a crû de 18 % en trois ans pour atteindre 21,7 millions. Ce problème ne concerne pas les gendarmes, qui sont sous statut militaire. C'est une véritable épée de Damoclès car ces congés qui, cumulés, peuvent représenter une année entière, sont pris avant le départ à la retraite sans que l'on puisse prévoir de remplacements.

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial.  - Les tâches indues demeurent constantes. Ainsi, de la garde de 24 préfectures ou de 450 postes au palais de justice de Paris.

M. le président.  - Il faut conclure.

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial.  - La commission des finances propose le rejet des crédits de la mission « Sécurités ».

M. le président.  - Il faut terminer l'examen de la mission ce soir. J'invite chacun à la concision.

M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur spécial de la commission des finances .  - L'objectif de la politique de sécurité routière est clair : réduire le nombre de morts. La valeur d'une vie brisée est inestimable, le coût matériel des accidents de la route l'est davantage : 39,7 milliards d'euros.

Comment évaluer la politique de sécurité routière ? Si nous suivons l'objectif de l'Union européenne de moins de 2 000 morts, 2017 a laissé entrevoir une éclaircie. Après trois années consécutives de hausse, le nombre de morts sur la route a diminué : 3 600 tués en 2017 sur les routes. Mais cette embellie est fragile. La France est en 14e position des pays de l'Union européenne. L'Allemagne, le Royaume-Uni affichent de meilleurs résultats.

Les crédits du programme 207, qui ne représentent que 0,2 % du montant de la mission, augmentent de 3,9 %. Les coûts d'organisation du permis en représentent plus de la moitié. L'opération Permis à 1 euro, connaît un succès relatif. Une mission de deux députés est en cours, le projet de loi LOM a été déposé au Sénat. Monsieur le ministre, quelles pistes pour aider les jeunes à décrocher leur permis, qui est indispensable pour trouver un emploi ?

S'agissant du compte spécial « Radars », l'estimation du produit total des amendes de la police de la circulation et du stationnement me semblait frileuse : l'an dernier, l'exécution était nettement supérieure à la prévision. Mais au cours de ces trois dernières semaines, 20 % du parc a été vandalisé. Un mot sur les décisions prises lors du comité interministériel du 9 janvier 2018. J'aurais préféré que la limite de 80 km/h soit précédée d'une concertation avec les élus locaux et davantage ciblée sur les routes accidentogènes. Je note, avec satisfaction, que les propositions de Vincent Delahaye dans son rapport de contrôle budgétaire en 2017 ont été, pour partie, suivies. L'objectif des 4 700 radars et des 200 itinéraires sécurisés, qui devait être atteint le 31 décembre 2018, est reporté d'un an. Ce décalage, qui serait en partie lié à une phase d'homologation plus longue que prévue, m'interroge sur la nécessité d'augmenter encore les crédits du programme 751. Quoique, cette hausse pourrait être absorbée par la remise en état des radars détériorés. Quel en sera le coût, monsieur le ministre ?

S'agissant des collectivités locales, les crédits du programme 754, diminuent de nouveau en 2019, environ 7 %. Cette baisse est certes justifiée par l'entrée en vigueur de la décentralisation du stationnement payant. Depuis le 1er janvier 2018, les communes et intercommunalités peuvent définir le montant du forfait post-stationnement et en recueillir le produit. Ce n'est pas le cas, cependant, des départements, auxquels incombe l'entretien de quelque 370 000 km de voiries. D'où l'amendement que le Sénat a adopté, en première partie, pour opérer un prélèvement au profit des départements ; je vous proposerai un amendement pour en tirer les conséquences.

La politique routière, pour être efficace, doit être comprise par nos concitoyens. L'architecture tarabiscotée du compte spécial ne facilite pas sa compréhension, je préconise sa refonte complète.

La commission propose les crédits de la prévention routière et du compte spécial « Radars ».

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Si l'on neutralise l'impact de l'acquisition d'avions multi-rôles, ce budget est stable en autorisations d'engagements et en baisse en crédits de paiement. Par rapport à la programmation triennale, les crédits de paiements sont inférieurs de 10 millions d'euros, ce qui s'explique par les économies réalisées à l'occasion de la passation du marché de renouvellement des Tracker.

La situation des SDIS est préoccupante. Leur activité s'accroît, de 2 % en un an, tandis que le soutien de l'État aux investissements structurants des SDIS s'affaiblit.

Mme Catherine Troendlé, rapporteur pour avis.  - Exactement !

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial.  - Cette dotation de soutien aux SDIS, dont le financement s'élevait à 25 millions d'euros en 2017, n'est dotée que de 10 millions d'euros en 2019, comme ce fut le cas en 2018. La dotation sera consacrée, en 2019, au système d'information des SDIS, qui est jugé stratégique, le SGA-SGO ; elle est très insuffisante.

Outre un problème de finances, les SDIS vont devoir s'adapter aux conséquences de l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne du 21 février 2018, qui pourrait conduire à appliquer la directive de 2003 aux sapeurs-pompiers volontaires. Appliquer la durée maximale de travail hebdomadaire de 48 heures et le repos journalier de 11 heures consécutives mettrait en cause le modèle français de secours qui s'appuie à 79 % sur des sapeurs-pompiers volontaires -  et ce chiffre s'élève à 90 % dans les départements les moins peuplés. Cela entraînerait un surcoût de plus de 2 milliards d'euros. Une initiative forte du Gouvernement français vis-à-vis de la Commission européenne est nécessaire.

Le budget 2018 est marqué par la poursuite du déploiement du système d'alerte et d'information des populations (SAIP). Je vous avais alerté sur le danger qu'il y avait à concentrer près de 80 % des crédits prévus sur le volet « sirènes » au détriment de la téléphonie mobile. Après un an de fonctionnement, l'application smartphone, dont j'avais relevé les insuffisances, a finalement été abandonnée le 29 mai 2018, sans qu'aucun projet de remplacement ne soit prévu. Le volet « téléphonie mobile » aura ainsi coûté 1,6 million d'euros sans faire preuve de la moindre utilité. Il me semble nécessaire de procéder à une réorientation stratégique plus large de ce projet avant que l'affectation des crédits de la phase 2, qui débute en 2020, ne soit effectuée. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Philippe Paul, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées .  - Outre les succès obtenus dans le combat contre la délinquance du quotidien et la prévention du terrorisme, la gendarmerie a montré sa capacité à répondre à des crises de grande ampleur. En témoignent l'évacuation de Notre-Dame-des-Landes et son intervention aux Antilles après l'ouragan Irma.

Soulignons le rôle important de la réserve opérationnelle, une aide précieuse pour les collectivités. Elle a fait les frais de la régulation budgétaire en 2018, la suppression de 900 emplois jusqu'en septembre a constitué un handicap sérieux pour le bon accomplissement des missions de la gendarmerie.

La commission d'enquête sénatoriale sur l'état des forces de sécurité intérieures l'a montré ; les conditions d'exercice du métier sont difficiles du fait de relations souvent tendues avec certains publics, de tâches administratives de plus en plus lourdes et d'une procédure judiciaire devenue trop complexe. La gendarmerie n'est pas protégée contre la crise par son statut militaire.

Ce budget n'est pas à la hauteur : 2 800 véhicules légers, un plan immobilier très insuffisant. La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées recommande de ne pas adopter les crédits du programme 152.

M. Yannick Vaugrenard, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées .  - Nos forces de sécurité sont, une fois de plus, soumises à rude épreuve, elles affrontent les agressions de personnes ou de groupes extrémistes organisés. Les travaux de la commission d'enquête sénatoriale l'ont montré : la Nation doit consentir un effort important si elle veut éviter une crise profonde. Rendons-leur hommage et témoignons-leur reconnaissance.

Or le compte n'y est pas. Les crédits de fonctionnement stagnent, 100 millions d'euros sont prévus pour l'immobilier là où il en faudrait 300. N'est-il pas temps d'envisager une loi de programmation pluriannuelle des forces de sécurité qui serait le parallèle de la loi de programmation militaire ?

La directive européenne de 2003 a fait perdre l'équivalent de 4 000 emplois à la gendarmerie nationale. Il faut en finir avec les tâches indues et opérer des mutualisations. La création de directions générales des achats et du numérique est une bonne chose à condition de préserver ce qui fonctionne bien - au sein de la gendarmerie, les innovations dans le numérique, par exemple.

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis défavorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Henri Leroy, rapporteur pour avis de la commission des lois .  - La commission des lois partage le constat de nos collègues de la commission des finances. La trajectoire financière demeure déséquilibrée et insuffisante.

L'accent a été mis sur le renforcement des effectifs : 1 735 dans la police et 643 dans la gendarmerie nationale. Cela suffira-t-il ? J'en doute. Cette hausse est optique, elle ne compensera pas les conséquences de la directive européenne sur le temps de travail qui nécessiterait de recruter 8 000 ETP dans les deux forces. Cette hausse est aussi inefficiente, faute de dispositions pour alléger la charge administrative importante, complexe et fastidieuse qui pèse sur nos forces.

Ce budget n'est à la hauteur ni des annonces ni des besoins. Je déplore que les crédits d'investissements fassent office de variable d'ajustement. Vous réduisez la formation, renouvelez les véhicules mais 8 000 restent en service alors qu'ils devraient être réformés, temporisez sur la rénovation des casernes avec seulement 105 millions d'euros contre 300 millions d'euros nécessaires.

À quoi bon renforcer les effectifs s'ils manquent de moyens, d'équipements et de munitions ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Catherine Troendlé, rapporteur pour avis de la commission des lois .  - Je m'associe en tout point aux propos de Jean-Pierre Vogel. Le budget ouvre la voie d'une sécurité civile à deux vitesses : l'une d'État, l'autre territoriale qui est laissée en marge.

Nous partageons les choix faits pour la première. La baisse des crédits pour la seconde est inadmissible alors qu'il avait été décidé de sanctuariser la dotation aux investissements structurants des SDIS. Elle n'est plus que de 10 millions d'euros, contre 25 millions d'euros en 2017 ; c'est une véritable perte sèche pour la sécurité civile des territoires.

En première partie, le Sénat a voté à l'unanimité le remboursement d'une partie de la TICPE sur le gasoil des SDIS ; espérons que l'Assemblée nationale conserve cet apport précieux !

La commission des lois a émis un avis défavorable à l'adoption de ces crédits. Quelles mesures prendrez-vous pour soutenir nos SDIS, monsieur le ministre ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

M. Loïc Hervé .  - L'examen de cette mission intervient dans une actualité brûlante. Nos forces sont en première ligne, une fois encore, pour protéger nos concitoyens d'individus qui ont fait preuve d'une violence inouïe la semaine dernière. Nous rendons hommage à leur sang-froid, leur courage et leur engagement. Depuis 2015, la pression sur leurs épaules n'a cessé de croître. Aujourd'hui plus que jamais, les forces de l'ordre sont à bout.

Des efforts doivent être faits sur cette mission donc. Les dépenses de personnel représentent 89,39 % pour la police et 84,39 % pour la gendarmerie. Or ce n'est pas la seule priorité. Nos forces n'ont pas moins de personnel que nos voisins, rapportés à la population.

Des grands chantiers restent à conduire. D'abord, en réinvestissant dans le patrimoine immobilier. Ces crédits sont 450 et 650 millions inférieurs aux besoins de la gendarmerie et de la police nationales. En matière de formation continue, d'équipements, de munitions, ces crédits sont insuffisants. La Cour des comptes l'a relevé.

Autre bombe à retardement : les 21,7 millions d'heures supplémentaires non payées ayant vocation à être récupérées avant la retraite. Ne peut-on pas les racheter tant que cela est encore soutenable ? Le coût est estimé à 271 millions d'euros. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

M. Dany Wattebled .  - Au regard des besoins, renforcement de la lutte contre le terrorisme, sécurité du quotidien, ce budget est en trompe-l'oeil, augmentant seulement de 1,67 %, soit 300 millions d'euros par rapport à 2018. Comme en 2018, l'accent est mis sur l'augmentation des effectifs avec la création de plus de 2 300 emplois dans la police et la gendarmerie. Toutefois ce nécessaire renforcement des effectifs, s'il n'est pas accompagné d'un important redressement des crédits d'équipements et des moyens de fonctionnement des forces de l'ordre ainsi que de réformes structurelles adéquates, ne provoquera pas un effet de levier pour renforcer sur le terrain la présence des forces de sécurité.

Cette hausse apparaît également très insuffisante au vu des violences urbaines récurrentes auxquelles les forces de l'ordre sont confrontées. En outre, émerge un phénomène nouveau, les Black Bloc, ou encore des faits qui se sont déroulés à l'occasion des manifestations des gilets jaunes.

Ces hausses d'effectifs semblent, en effet, servir de prétexte pour dissimuler un manque de vision politique et une pénurie organisée car les dépenses d'investissement diminuent de près de 47 %. Dès lors, pourquoi augmenter les effectifs des forces de l'ordre si les moyens et équipements ne suivent pas ?

Je souhaite attirer votre attention sur les grands oubliés de votre ministère : les sapeurs-pompiers, dont les agressions en intervention augmentent de façon intolérable, + 18 % entre 2015 et 2016, alors qu'ils voient leurs marges budgétaires se réduire dangereusement.

Mme Catherine Troendlé, rapporteur pour avis.  - Tout à fait.

M. Dany Wattebled.  - Enfin, je veux évoquer la question de la gratuité des autoroutes pour les véhicules d'intérêt général prioritaires en intervention, notamment ceux des sapeurs-pompiers, de la police et de la gendarmerie. L'année dernière, cette gratuité avait été décidée mais aujourd'hui, rien n'a changé, faute de décret d'application ! C'est inadmissible. D'autant plus que ce budget laisse en marge la sécurité civile territoriale au moment où les départements et les intercommunalités se heurtent à de graves difficultés financières. Bien que les SDIS soient financés principalement par les collectivités territoriales, le PLF pour 2019 ne prévoit pas les adaptations fiscales et les concours ciblés nécessaires à l'amélioration de leurs investissements.

Avant de conclure, je veux rendre hommage aux hommes et aux femmes qui, tous les jours, souvent au péril de leur vie, assurent notre sécurité, et saluer, ici, leur engagement au service des citoyens. Je souhaite également saluer les sapeurs-pompiers dont les interventions de secours à la personne ont considérablement augmenté : 40 % au cours de ces dix dernières années, en raison de l'affaiblissement du maillage territorial du système de santé.

Ce budget n'apporte ni à la police, ni à la gendarmerie nationales les moyens, matériels et humains, à la hauteur de leurs missions et de leurs niveaux de sollicitation. Il ne prend pas non plus la pleine mesure de la dégradation du contexte sécuritaire dans notre pays.

Pour toutes ces raisons, le groupe Les Indépendants ne votera pas les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Arnaud de Belenet .  - Je salue avec sobriété le professionnalisme, le dévouement, l'humilité de nos forces de sécurité et de secours. Je pense aux blessés par nos concitoyens venus en découdre, peu républicains.

Le débat budgétaire est l'affaire de tous, il doit redevenir un outil d'instruction populaire et d'information politique. Or on identifie difficilement les enjeux de ce budget, malgré les efforts de maquette.

Revenons à des marqueurs politiques consistants.

La progression des effectifs pour 2019 se fait au bénéfice des policiers et gendarmes, conformément au plan quinquennal de recrutement. Place est donnée au terrain et au lien quotidien avec la population. Les procédures indues doivent être éliminées. La procédure pénale sera révisée, rationalisée.

À ces gains de disponibilité s'ajouteront les moyens alloués à la police du quotidien et l'expérimentation des brigades territoriales et de contact. Un effort particulier des conditions de travail doit être salué. Pas moins de 137 millions d'euros seront consacrés à l'achat de 5 800 véhicules neufs, investissement le plus important depuis huit ans. Les commissariats et les gendarmeries bénéficieront de la poursuite du plan triennal 2018-2022. Le protocole de valorisation des corps, des carrières et des métiers se poursuit à hauteur de 61 millions d'euros.

Le moral des troupes dépend aussi des matériels, comme le soulignait la commission d'enquête sénatoriale relative au malaise des forces de sécurité. Outre les véhicules, 14 000 caméras et 50 000 tablettes équiperont nos policiers. En outre, le dispositif Nexis pour les sapeurs-pompiers sera déployé.

Nous prenons acte du risque terroriste et de la délinquance quotidienne. C'est un budget inscrit dans la durée des efforts passés et présents. Nous renouvelons notre confiance au ministre de l'Intérieur et voterons ces crédits.

Mme Éliane Assassi .  - Depuis de nombreuses années, les membres du groupe CRCE déplorent les conditions de travail de nos forces de sécurité. La différence est nette entre les priorités des gouvernements successifs et les moyens alloués.

Ce budget poursuit l'augmentation des effectifs constatée depuis 2013 avec le financement de 2 378 équivalents temps plein en 2019. Hausse positive bien évidemment, mais qui nourrit un déséquilibre important entre dépenses de personnel et ensemble des crédits. Cette augmentation du nombre d'emplois intervient alors même que les comparaisons internationales ne témoignent d'aucun sous-dimensionnement des forces de sécurité intérieure de notre pays, et notre parc automobile est marqué par une augmentation de l'âge moyen des véhicules et une dégradation de leur état. En outre, le parc immobilier des forces de sécurité intérieure est préoccupant.

Au-delà de ces données quantitatives, il est urgent de réfléchir à la doctrine d'emploi que nous souhaitons pour nos forces de sécurité intérieure, notamment dans le but de renouer les liens entre forces de l'ordre et populations.

La gestion de la crise actuelle lors des manifestations des gilets jaunes révèle l'état de désoeuvrement de nos agents de police, obéissant à des ordres parfois contestables... Tout en condamnant sévèrement les violences et les dégradations, nombre d'entre eux estiment que la meilleure façon de mettre fin aux violences dans les manifestations est d'accéder aux revendications légitimes des manifestants, que, d'ailleurs, beaucoup d'entre eux partagent, habités par la même colère sociale. Un syndicat de policiers déclarait hier : « Nous, salariés du ministère de l'Intérieur, sommes impactés par la baisse du pouvoir d'achat à travers le gel du point d'indice pour les fonctionnaires et l'absence de coup de pouce pour le Smic pour les contractuels, par l'injustice fiscale, et plus largement par la politique de modération salariale que nous subissons depuis plus de 20 ans [...] Pour nous le Gouvernement doit entendre et répondre positivement aux revendications des salariés, retraités, privés d'emploi, étudiants. Ç'est la seule solution pour retrouver la paix sociale ». Nous partageons cette analyse. Le rôle des forces de l'ordre n'est pas d'être le dernier rempart d'un pouvoir politique sourd aux revendications populaires, mais bien d'assurer la sécurité des personnes et des biens.

La sécurité civile territoriale continue à être sous-dotée par rapport à la sécurité civile d'État, alors que les collectivités territoriales sont fortement sollicitées.

Nous voterons contre le budget alors que l'urgence est d'assurer la sécurité. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE. M. Jean-Pierre Sueur applaudit aussi.)

M. Guillaume Arnell .  - Après deux exercices exceptionnels de 2016 et 2017 pour le ministère de l'Intérieur, les crédits de la mission « Sécurités » traduisent la réorientation des efforts vers la sécurité des Français au quotidien.

Pourtant, la menace terroriste a muté, devenant endogène. Le cadre légal évolue, plus favorable à la lutte contre le terrorisme. Empêchons absolument la pérennisation de sentiment de défiance généralisée et rétablissons la concorde. Tel est l'objectif de l'amendement de Nathalie Delattre.

Les rapporteurs ont relayé les craintes pour l'équipement et le temps de travail des forces de police, après la décision de la CJUE qui invalide le système d'astreinte.

Le système de passation des commandes est-il suffisamment réactif ? La flotte des véhicules et les tenues ignifugées sont insuffisantes.

Il faut de nouveaux outils technologiques comme des téléphones portables équipés de logiciels spécifiques ou des caméras mobiles.

Pour répondre à la CJUE, ne faut-il pas mieux répartir le temps de travail ? Le mouvement Action publique 2022 doit réorganiser les services du ministère de l'Intérieur entre administration centrale hypertrophiée et administration déconcentrée, en métropole et outre-mer.

La réduction des tâches indues doit être recherchée pour redéployer les agents vers des actions vraiment utiles.

J'avais constaté l'importance du dispositif d'escorte nécessaire au CRA de Vincennes. Le renforcement de l'accompagnement psychologique paraît nécessaire et ne doit pas se limiter aux associations. L'évolution des attentes de la société contre les violences sexuelles et familiales doit faire l'objet d'une réflexion avec le ministère de la Justice.

Un continuum de sécurité doit être assuré avec les polices privées et les 21 500 policiers municipaux. La sécurité privée est un acteur à part entière de la sécurité de la Nation. 365 000 cartes professionnelles de cinq ans ont été délivrées entre 2012 et 2017 avec 7 milliards d'euros de chiffre d'affaires et 165 000 salariés de la sécurité privée.

Prenons garde à ne pas sous-estimer la portée de ces changements, notamment l'extension du port d'armes. Attention à la multiplication des armes sans contrôle suffisamment rigoureux. Le recours aveugle à des agents contractuels à des fonctions support pourrait mettre en danger les effectifs des policiers et gendarmes. La plupart des membres du RDSE voteront ces crédits. Selon Clemenceau : « un homme de gouvernement qui doit agir à d'autres soucis que l'homme d'opposition dont la parole n'engage que lui et dont les théories ne s'inquiètent pas du possible ». (M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur spécial, applaudit)

M. François Grosdidier .  - Le 19 novembre dernier, j'étais à l'enterrement de Maggy Biskupski, présidente de l'association des policiers en colère. Elle était la 33e policière à mettre fin à ses jours en 2018, comme 31 gendarmes. Sa maman m'a dit : « ma fille demandait si peu ». Je lui ai répondu : « Si peu et si juste » : des conditions matérielles minimales, un peu de considération et de respect, du soutien moral et juridique que doit tout employeur à ses employés. Entendons les policiers qui souffrent plutôt que d'envoyer l'IGPN à ceux qui expriment cette souffrance. Place Beauvau, on met depuis trop longtemps la poussière sous le tapis. (M. le ministre le confirme.) Le secret, c'est bon pour la DGSI !

Au sein de la commission d'enquête, nous n'avons rien dissimulé de la réalité ni des responsabilités antérieures : RGPP, pression par les chiffres pour la droite, faiblesse pénale et sous-investissement pour la gauche ; ce qui nous importe désormais, c'est la situation actuelle. Menons la réflexion du management. Révolution culturelle, déblocage idéologique, volonté politique pour une réponse pénale adaptée. Les policiers et les gendarmes courent de plus en plus de risque pour rien ou pas grand-chose : cela les mine. Les procédures pénales leur prennent deux tiers de leur temps. En cinq ans, vous créerez 7 500 postes de policiers et 2 500 postes de gendarmes. Vous en gagneriez des dizaines de milliers en allégeant la procédure pénale. Le projet de loi Justice ne répond qu'à un cinquième des demandes. Selon Nicolas Hulot le Gouvernement se ment à lui-même et donc aux autres. Ce budget ne résorbera pas le stock des 22 millions d'heures supplémentaires impayées qui vont continuer à augmenter, les dizaines de millions d'euros d'arriérés de loyers dus aux collectivités territoriales qui logent les gendarmes, bien mieux que l'État. Nous avons vu comment ce dernier loge ses gendarmes par exemple à Satory, dans des logements indignes, insalubres, avec baignoire sabot des années 1950 et des installations électriques pas aux normes. Vous allez envoyer samedi les blindés de la gendarmerie, 45 ans d'âge. C'est simple : quand j'étais enfant, je jouais avec des VBRG solido, c'est dire qu'ils ne sont pas jeunes ! Les hélicoptères vieillissent aussi : c'est dangereux. Les équipements les plus modernes manquent. Le courage des forces de l'ordre nous oblige. Manteaux et munitions manquent. Les crédits augmentent, certes, mais moins que l'inflation. Les parcs automobile et immobilier vont vieillir. En un an ou deux, vous ne comblerez pas une décennie de retard. En 2019, vous arriverez tout juste à stabiliser la situation.

Pour redonner le moral, il faut une loi de programmation pour la sécurité intérieure, comme la LPM. Ces investissements, sans commune mesure, sont pourtant indispensables. Les forces ont droit à la protection de la République dont elles sont le seul rempart. Nous ne ferons pas semblant de croire à ce budget en trompe-l'oeil : nous refuserons de le voter. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Jean-Pierre Sueur .  - Plus on avance dans la soirée, plus on est condamné à redire les mêmes choses. La grande convergence des interventions me frappe.

Bien sûr, il y aura 2 260 emplois supplémentaires, 1 735 policiers et 632 gendarmes. Le président de la République a annoncé pendant la campagne électorale 10 000 effectifs de plus pendant le quinquennat.

Pendant le quinquennat précédent, 9 000 emplois ont été créés. Mais n'oublions pas que de 2007 à 2012....

M. François Grosdidier.  - Vous avez sous-investi !

M. Jean-Pierre Sueur.  - ... 13 720 postes avaient été supprimés : 6 930 policiers et 6 730 gendarmes.

M. François Grosdidier.  - Et avant ?

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je ne ferai pas d'archéologie.

Le nombre d'emplois augmente, mais je crains que l'annonce des 10 000 postes dans le quinquennat soit compromise. Il n'y a que 832 postes dans le projet annuel de performance (PAP), si l'on tient compte des reports de l'année précédente. Il faudra de gros efforts les années prochaines.

Les charges indues, on en parle depuis quelques décennies, profitent des créations de postes pour obtenir plus d'effectifs opérationnels. Plusieurs centaines de transfèrements judiciaires par mois mobilisent des policiers. Un accord a été conclu avec le ministère de la Justice, mais nous n'ignorons pas les problèmes de personnel de ce ministère. Je ne vois pas les effets concrets de cette reprise de charge.

Le problème, ce sont les investissements, les locaux, les véhicules, les matériels. La masse salariale augmente mais les crédits d'investissements de la police diminuent de 11,7 % en AE et 18,6 % en CP. Les véhicules sont anciens : 6 ans et 4 mois pour la police nationale, 7 ans et 4 mois pour la gendarmerie nationale. On ne peut continuer comme cela.

Nous affirmons notre total soutien et notre totale solidarité à l'égard des policiers et gendarmes. Ce n'est pas la violence qui règle les problèmes. Nous sommes dans une démocratie où il est possible de parler. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. François Bonhomme .  - Avec une augmentation des crédits, ce budget affiche un soutien renouvelé aux forces de l'ordre, mais il est déséquilibré.

Les programmes Police nationale et Gendarmerie nationale ont augmenté de 18 % en AE et de 17 % en CP entre 2010 et 2018. L'ambition est cependant insuffisante au regard des enjeux et du contexte sécuritaire particulièrement tendu.

Leur parc automobile est préoccupant : dégradé, âgé -  l'âge moyen est passé de trois ans et huit mois à six ans et quatre mois depuis 2012. Un récent rapport de la Cour des comptes en appelait à la nécessaire remise à plat de la gestion du parc automobile.

Les logements des policiers et gendarmes n'ont pas été rénovés en moyenne depuis quarante-cinq ans. Cela illustre le déficit d'investissement de l'État. Certes, 76 opérations immobilières nouvelles sont annoncées pour les trois ans à venir, mais on n'en voit pas la trace budgétaire.

En 2019, les dépenses de fonctionnement et d'investissement sont identiques à celles de 2007 dans la police. Pour la gendarmerie, ces dernières ont même été réduites de plus de 8 %. Cette évolution est préoccupante car la capacité opérationnelle des forces de sécurité intérieure repose, outre sur le nombre de personnels actifs, sur l'aptitude de l'État à équiper et entretenir ses forces.

J'en viens à la question de la formation. En 2019, les crédits alloués au financement de la formation des forces de sécurité intérieure s'élèveront à 19 millions d'euros dans la police et à 13 millions d'euros dans la gendarmerie. Par rapport à 2018, ces crédits sont en baisse de 15 % pour la police et stagnent pour la gendarmerie. Ils ont diminué, depuis 2017, de 23 % pour la police nationale et de 1,7 % pour la gendarmerie. Eu égard au contexte sécuritaire dégradé et aux défis auxquels les forces de sécurité intérieure sont confrontées, la formation continue devrait constituer une priorité budgétaire. La commission d'enquête sénatoriale sur l'état des forces de sécurité intérieure a relevé qu'en 2017, moins des deux tiers des agents actifs de la police nationale avaient effectué leurs séances réglementaires de tir.

Les crédits sont gravement insuffisants. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Jean-Luc Fichet .  - J'évoquerai les crédits de sécurité civile. On peut se satisfaire de la légère augmentation de ces crédits, même diminués de 1,7 million d'euros par l'Assemblée nationale en première lecture. Certes, l'acquisition de six appareils multi rôle - bombardier d'eau, transport de personnes et de fret et évacuation sanitaire - avait nécessité l'ouverture de 400 millions d'euros de crédits l'an dernier.

Le budget de la sécurité civile est traditionnellement peu impactant pour les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) qui sont financés en quasi-totalité par les collectivités territoriales, pour un montant de près de 5 milliards d'euros.

Mais dans un contexte marqué à la fois par la hausse budgétaire et par l'augmentation constante du nombre d'interventions, je déplore la baisse de 20 millions d'euros en deux ans du soutien à l'investissement des SDIS apporté par l'État alors qu'il s'était engagé à pérenniser son engagement financier. En effet, suite à la réforme de la prestation de fidélisation et de reconnaissance (PFR) intervenue en 2016, les fonds devaient être en partie réaffectés aux investissements des SDIS.

Or, après avoir chuté de 60 % en 2018 pour atteindre 10 millions d'euros, la dotation de soutien aux investissements structurants des SDIS subit une nouvelle baisse drastique de 10 millions d'euros et 70 % de ces crédits sont destinés au projet NexSis : seuls 3 millions d'euros seront au final destinés au financement des projets locaux retenus en 2017. Cela n'est pas acceptable.

Au-delà de ces chiffres, nos débats sont marqués par la menace que fait planer la directive européenne de 2003 sur le temps de travail, suite à l'arrêt Matzak rendu le 21 février dernier par la CJUE, qui considère le volontariat comme du temps de travail. Selon la Fédération nationale des sapeurs-pompiers français, une application de cette directive européenne aux sapeurs-pompiers volontaires conduirait la France à se priver des pompiers volontaires exerçant une activité professionnelle à titre principal, soit environ 60 % de leurs effectifs.

Les 120 000 pompiers volontaires devraient être remplacés par 60 000 pompiers professionnels, pour un montant de 2,5 milliards d'euros soit 50 % du budget actuel des SDIS.

Cela est d'autant plus préoccupant que les sapeurs-pompiers volontaires composent l'essentiel des effectifs des SDIS, en particulier dans les zones rurales. Dans mon département du Finistère, il y a 600 pompiers professionnels pour 2 200 pompiers volontaires qui s'engagent en dehors de leurs heures de travail et qui, pour ce faire, acceptent de suivre une formation contraignante.

Nous devons à tout prix préserver notre modèle français de sécurité civile qui est internationalement reconnu. C'est pourquoi mon groupe avait soutenu l'amendement déposé par Mme Troendlé en première lecture du PLFSS 2019 et adopté par le Sénat, instaurant une exonération de charges patronales d'un montant de 3 000 euros pour toute embauche d'un employé sapeur-pompier volontaire, dans la limite de 15 000 euros par an et par structure.

Cette disposition a malheureusement été supprimée en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale, suite à un amendement du gouvernement. (Mme Catherine Troendlé le confirme.)

Enfin, il convient d'améliorer les conditions de travail et la protection de l'ensemble des sapeurs-pompiers, surtout lorsque l'on sait que les agressions à leur encontre ont été multipliées par deux et demi en dix ans. Le groupe socialiste a déposé le 30 octobre une proposition de loi renforçant la sécurité des sapeurs-pompiers, qui vise à permettre l'anonymat pour les sapeurs-pompiers qui portent plainte afin d'éviter qu'ils se trouvent exposés à des risques de représailles de la part des personnes mises en cause. Cette proposition s'inspire du droit en vigueur qui s'applique au bénéfice des agents de la police ou de la gendarmerie nationale.

Dans un contexte où les sapeurs-pompiers font face à une demande croissante de secours et de protection de la population, les crédits dévolus à la sécurité civile dans nos territoires nous paraissent largement insuffisants. Nous voterons donc contre ce projet de budget.

M. Marc Laménie .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Je tiens d'abord à remercier nos collègues rapporteurs et à saluer Mme Duranton, qui m'a confié son temps de parole sur cette mission qui me tient à coeur.

Je veux saluer les forces de sécurité : police et gendarmerie, sapeurs-pompiers, mais j'y associerai aussi les militaires, les personnels des collectivités territoriales, de santé, des douanes, du ministère de l'Économie et des finances et de la Justice.

Nos gendarmes et policiers font face à des engagements de plus en plus difficiles et dangereux.

Nous notons avec satisfaction la création de 2 378 ETP. Les policiers et les gendarmes sont de plus en plus sollicités, nous le vivons à Paris comme en province, ou en outre-mer. Gérard Larcher l'a dit : « Il faut préserver l'unité de notre Nation ».

Nos forces de l'ordre remplissent de plus en plus de missions à caractère social. Dans les Ardennes, je peux mesurer leur dévouement, et je n'oublie pas les jeunes sapeurs-pompiers : dans le cadre de la mission du Centenaire, nous avons mesuré leur implication.

La situation reste difficile : personnel épuisé, postes non pourvus, équipements en mauvais état. Il est indispensable de susciter des vocations, notamment chez les jeunes.

Le groupe Les Républicains ne votera pas les crédits de la mission. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur .  - Ces crédits représentent près de 80 % de ceux du ministère de l'Intérieur. Comme en 2018, ce budget est sincère, solide et réaliste. C'est pour nos concitoyens, une priorité absolue. Les évènements récents le démontrent une fois encore, si cela était nécessaire.

Fortement mobilisées dans la lutte contre la délinquance, le terrorisme et l'immigration irrégulière, nos forces doivent encore assurer l'ordre public et je veux solennellement leur rendre hommage.

Cette année, la hausse est de 2,6 %. Depuis 2015, la hausse des crédits est de 12 % soit 1,4 milliard d'euros supplémentaires. Nous accentuons les efforts en faveur de la sécurité, c'était l'engagement pris. Ce budget est donc dépourvu de surprises, en tous points conformes aux engagements pris.

Nous bénéficions des recrutements de 2 000 agents en 2018 et des 2 500 au titre de 2019. Le vivier de la réserve est de 37 000 volontaires pour la garde nationale ; 130 millions d'euros sont prévus pour la réserve dans les deux forces. Ce n'est qu'à la fin de 2019 que nous aurons reconstitué le corps d'encadrement et d'application dans la police nationale tel qu'il était en 2007.

J'entends parfois dire que le budget d'équipement n'a pas suivi. Je le conteste : 26 millions d'euros financeront le « sac à dos » pour équiper, armer et installer nos deux forces.

Les travaux de la commission d'enquête l'ont montré : il faut accentuer les efforts sur l'immobilier. La programmation est précisément renforcée jusqu'en 2020 pour améliorer les conditions de travail de nos fonctionnaires. Cette priorité à l'entretien, la rénovation voire la construction - 196 millions pour la police et 105 millions pour la gendarmerie - n'excluent pas des travaux sur le site de la DGSI ; l'objectif est de bâtir un site unique en 2019 : 450 millions d'euros sont budgétés à cette fin d'ici à 2022.

En matière d'équipements, 5 800 véhicules neufs sont prévus pour 137 millions d'euros. Avec 1 600 véhicules de plus que la moyenne de ces dernières années, c'est un effort inédit et qui nous permettra de réduire l'âge moyen du parc.

Le budget d'équipement atteindra 143 millions d'euros ; 50 000 tablettes et smartphones dans la police nationale et 67 000 dans la gendarmerie nationale pour 5,4 millions d'euros ; le plan de diffusion des caméras piétons se poursuit... Un plan d'investissement technologique sera déployé à la DGSI, et 22,5 millions d'euros seront consacrés au réseau de la radio du futur.

La première procédure pénale numérique sera expérimentée en 2019 dans les TGI d'Amiens et de Blois, afin d'alléger les tâches indues des policiers et gendarmes. Le plan concernant les extractions et non les transfèrements...

M. Jean-Pierre Sueur.  - Excusez-moi !

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État.  - ...sera achevé en 2019 monsieur Sueur. L'allègement des gardes statiques se poursuivra.

La sécurité civile doit renforcer le contrat opérationnel avec la Nation. Le marché des six avions multi-rôles Dash a été complètement engagé pour un coût de 380 millions d'euros. Ils seront livrés du 1er semestre 2019 jusqu'en 2022. Nous poursuivons le renforcement des moyens nationaux avec 4,8 millions d'euros pour le déminage et les formations militaires de sécurité civile.

Le projet Nexis assurera l'interopérabilité des services des SDIS, grâce à 10 millions d'euros investis. Nous prônons la mutualisation, gage d'économies pour les SDIS, de modernisation et d'interopérabilité des services de secours avec ceux des Samu et de la sécurité publique. L'État créera en 2019 une Agence du numérique, de la sécurité civile qui lancera les premiers développements applicatifs.

Je confirme que le Gouvernement a engagé plusieurs chantiers sur la décision de la Cour de justice de l'Union européenne, notamment l'exploitation des dérogations offertes par la directive et sa renégociation. Nous sommes en train d'examiner le pourcentage de sapeurs-pompiers concernés... Nous restons attachés à notre modèle. Il ne faut pas que cette jurisprudence s'applique, car elle remettrait en cause notre modèle.

En matière de sécurité routière, il est important de disposer d'un budget à la hauteur des enjeux en augmentant le plafond des crédits.

C'est un très bon budget. La sécurité compte pour la deuxième année consécutive comme la priorité du Gouvernement qui veut faire baisser la mortalité routière en-deçà de 2 000 morts par an.

Nous augmentons de 32 millions le plafond des crédits du compte d'affectation spécial utilisé pour financer les structures et dispositifs de sécurité routière et nous assurons à hauteur de 36 millions le financement des mesures d'accompagnement décidées par le Premier ministre à la diminution de la vitesse autorisée sur le réseau national secondaire.

Voilà ce que je retiens du budget de la mission « Sécurités », qui est en tous points un très bon budget. Je sais que vous saurez mesurer combien l'effort est grand, et combien il est également important que le niveau de crédits atteint en 2019 soit une base pérenne et consolidée, sur laquelle nous appuyer pour mettre en oeuvre les politiques de sécurité.

Concernant les agressions contre les pompiers, il existe dans tous les départements des protocoles pour les accompagner par les forces de sécurité sur les terrains difficiles. Nous expérimentons en outre les caméras piétons, très attendues par la profession.

Le Gouvernement a lancé un certain nombre de doctrines en matière d'antiterrorisme ou de PSQ. Nous laissons beaucoup d'initiatives aux échelons territoriaux pour construire ce partenariat avec l'ensemble des acteurs de la sécurité sur le territoire. M. Arnell a parlé à juste titre du continuum de sécurité. Je ne peux pas laisser dire qu'il n'y a pas de doctrine, madame Assassi.

Monsieur Grosdidier, oui, il y a un plan de prévention et de suivi des suicides dans la gendarmerie nationale et la police nationale. L'IGPN ne doit pas être mêlée à cela, elle assure la déontologie des services. Ne faisons pas de raccourcis !

L'investissement en matière de formation est stable, je ne sais pas d'où vous tirez vos chiffres. Pour la police nationale, il est stable par rapport à 2018.

M. François Grosdidier.  - Il était insuffisant !

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État.  - Il faudra retricoter la procédure pénale, la police nationale nous le demande chaque jour.

Mme Catherine Troendlé, rapporteur pour avis.  - Et le décret que je propose sur les péages ?

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État.  - Il est à l'étude, il souffre de quelques illégalités.

Examen des crédits de la mission et du compte spécial

Article 39

L'amendement n°II-761 rectifié bis n'est pas défendu.

Les crédits de la mission « Sécurités » ne sont pas adoptés.

Compte spécial « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers »

M. le président.  - L'amendement n°II-612 rectifié ter, qui vide cette action de l'ensemble de ses crédits, tombera en cas d'adoption de l'amendement n°II-971 ; mais pas l'amendement n°II-610 rectifié ter, qui prélève 50 millions d'euros.

Amendement n°II-971, présenté par M. Gabouty, au nom de la commission.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Structures et dispositifs de sécurité routière

 

 

 

 

Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers

 

 

 

 

Contribution à l'équipement des collectivités territoriales pour l'amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières

 

 

 

 

Désendettement de l'État

45 000 000  

 

45 000 000  

TOTAL

 

 45 000 000  

 

45 000 000  

SOLDE

 - 45 000 000  

- 45 000 000  

M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur spécial.  - Cet amendement tire les conséquences de l'adoption par le Sénat, en première partie, d'un amendement portant article additionnel après l'article 31 du projet de loi de finances.

Le programme 754 « Contribution à l'équipement des collectivités territoriales pour l'amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières » du compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » voit ses crédits diminuer d'environ 7 % dans le projet de loi de finances pour 2019. Cette baisse est justifiée par la dépénalisation et la décentralisation du stationnement payant, entrée en vigueur le 1er janvier 2018 qui permet désormais aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de fixer le montant du forfait de post-stationnement (FPS) et d'en recueillir le produit.

Par contre, les départements, auxquels incombe l'entretien d'un réseau routier de plus de 370 000 kilomètres, ne bénéficient pas directement de cette réforme.

Afin de renforcer les moyens affectés aux collectivités territoriales pour entretenir leur réseau routier et ainsi contribuer à la lutte contre l'insécurité routière, le Sénat a adopté, en première partie, un amendement n°I-1046 visant à créer un prélèvement sur recettes au profit des départements.

Ce prélèvement sur recettes serait opéré sur la fraction du produit des amendes forfaitaires - qui ne sont pas issues du contrôle automatisé - et de l'ensemble des amendes forfaitaires majorées de la police et de la circulation, versée chaque année au budget général. L'amendement permet de porter le montant de ce produit, actuellement de 45 millions d'euros, à 90 millions d'euros.

M. le président.  - Amendement n°II-612 rectifié ter, présenté par M. Raison, Mme Vullien, MM. Bas, Milon et Perrin, Mme Estrosi Sassone, MM. Dallier, Longuet, Husson, Vaspart, Cornu, Rapin, Pointereau et Darnaud, Mme Micouleau, M. Brisson, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Louault et Maurey, Mme Deromedi, MM. Sido et Longeot, Mme Morhet-Richaud, M. Pellevat, Mme Garriaud-Maylam, MM. Chaize et Reichardt, Mmes Procaccia, Di Folco, Puissat et Gruny, M. Kern, Mme M. Mercier, M. Joyandet, Mmes Deseyne et Lassarade, MM. Charon et D. Laurent, Mmes Goy-Chavent et Canayer, MM. Courtial, Revet et Piednoir, Mmes A.M. Bertrand, Imbert, Chain-Larché et Chauvin, MM. Morisset et Regnard, Mme Sollogoub, MM. Lefèvre, Vogel, Bonhomme, Dufaut, Chatillon, Détraigne, Savary, Moga, Luche et Chevrollier, Mme Férat, MM. Gremillet, Pierre, Mizzon et Huré, Mmes Bories et de Cidrac, MM. Genest et Priou, Mme C. Fournier, MM. B. Fournier et de Nicolaÿ, Mme Duranton, M. Mayet et Mmes Malet et Lanfranchi Dorgal.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Structures et dispositifs de sécurité routière

 

 

 

 

Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers

 

 

 

 

Contribution à l'équipement des collectivités territoriales pour l'amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières

452 435 730

 

452 435 730

 

Désendettement de l'État

 

452 435 730

 

452 435 730

TOTAL

452 435 730

452 435 730

452 435 730

452 435 730

SOLDE

0

0

M. François Bonhomme.  - Notre amendement s'inscrit dans le prolongement du rapport sénatorial intitulé « Sécurité routière : mieux cibler pour plus d'efficacité » du 18 avril 2018.

Déplorant la méthode précipitée retenue par le Gouvernement et le manque de concertation préalable à sa décision de limiter à 80 km/h la vitesse maximale autorisée, le groupe de travail recommandait d'appliquer la réduction de vitesse de manière décentralisée afin de l'adapter aux réalités des territoires, c'est à dire sur les tronçons de route accidentogènes.

Il proposait une mesure affinée, concertée, responsabilisant les acteurs et surtout, empreinte d'acceptabilité sociale. Cette recommandation du Sénat n'a toutefois pas été retenue par le Gouvernement.

Si les effets de la réduction de la vitesse ne sont pas encore scientifiquement exploitables, le niveau d'acceptabilité de la mesure reste très insatisfaisant : la majorité des Français y voit toujours un prétexte sournois de l'exécutif pour financer le désendettement de l'État.

Ainsi, afin de lever ces soupçons, nous proposons de consacrer les recettes des « amendes radars » à l'amélioration du réseau routier et de ses zones les plus accidentogènes, et ainsi, favoriser les politiques de prévention, conformément aux souhaits exprimés tant par le Gouvernement que par les usagers de la route et les associations de prévention de la sécurité routière.

M. le président.  - Amendement n°II-610 rectifié ter, présenté par M. Raison, Mme Vullien, MM. Bas et Milon, Mme Estrosi Sassone, MM. Perrin, Vaspart, Husson, Dallier, Longuet, Pointereau, Darnaud et Maurey, Mme Duranton, MM. Mayet, Cornu et Rapin, Mme Micouleau, M. Brisson, Mme Bonfanti-Dossat, M. Louault, Mmes Garriaud-Maylam et Morhet-Richaud, MM. Longeot et Sido, Mme Deromedi, MM. Pellevat, Chaize et Reichardt, Mmes Procaccia, Di Folco, Puissat et Gruny, M. Kern, Mme M. Mercier, M. Joyandet, Mmes Deseyne et Lassarade, M. Charon, Mmes Goy-Chavent et Canayer, MM. Courtial et Revet, Mme A.M. Bertrand, M. Piednoir, Mmes Imbert, Chain-Larché et Chauvin, MM. Morisset et Regnard, Mme Sollogoub, MM. Lefèvre, Vogel, Bonhomme, Dufaut, Chatillon, Détraigne, Savary, Moga, Luche et Chevrollier, Mme Férat, MM. Gremillet et Priou, Mme C. Fournier, MM. B. Fournier, de Nicolaÿ, Mizzon, Pierre et Huré, Mmes Bories et de Cidrac, M. Genest et Mmes Malet et Lanfranchi Dorgal.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Structures et dispositifs de sécurité routière

 

 

 

 

Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers

 

 

 

 

Contribution à l'équipement des collectivités territoriales pour l'amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières

50 000 000

 

50 000 000

 

Désendettement de l'État

 

50 000 000

 

50 000 000

TOTAL

50 000 000

50 000 000

50 000 000

50 000 000

SOLDE

0

0

M. François Bonhomme.  - Amendement de repli.

M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur spécial.  - Je comprends l'intention de l'amendement n°II-612 rectifié ter, mais la barre est un peu haute. Ce n'est pas raisonnable et cet amendement est incompatible avec l'amendement de la commission.

L'amendement n°II-610 rectifié ter est satisfait, puisque situé dans le même ordre de grandeur que celui de la commission des finances. Le département ne bénéficie pas de la dépénalisation et de la décentralisation du stationnement payant.

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État.  - Avis défavorable à l'amendement n°II-612 rectifié ter. Il existe une compensation des charges d'entretien. Depuis 2016, les départements sont éligibles au FCTVA pour ces charges. Une partie du produit des amendes de circulation contribue aussi au financement. Il y a d'autres ressources, comme la dotation de soutien à l'investissement des départements, instauré par le présent projet de budget : la voirie y est éligible.

Les règles d'affectation du produit des amendes sont fixées par l'article 49 de la LFI pour 2006 et ne peuvent être modifiées que par des amendements de première partie.

La limite à 80 km/h a été expérimentée. L'impact sur l'accidentalité sera évalué au 1er juillet 2020.

L'amendement n°II-971 est adopté.

L'amendement n°II-612 rectifié ter n'a plus d'objet.

L'amendement n°II-610 rectifié ter est retiré.

Les crédits du compte spécial « Contrôle de la circulation » sont adoptés.

Articles additionnels après l'article 84 bis

M. le président.  - Amendement n°II-613 rectifié ter, présenté par M. Raison, Mme Vullien, MM. Bas, Perrin, Milon, Husson, Pointereau, Longuet et Rapin, Mme Estrosi Sassone, MM. Darnaud et Dallier, Mme Micouleau, MM. Vaspart et Cornu, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Brisson, Louault et Maurey, Mme Deromedi, MM. Sido et Longeot, Mmes Morhet-Richaud et Garriaud-Maylam, MM. Pellevat, Chaize et Reichardt, Mmes Procaccia, Di Folco, Puissat et Gruny, M. Kern, Mme M. Mercier, M. Joyandet, Mmes Deseyne et Lassarade, MM. Charon et D. Laurent, Mmes Goy-Chavent et Canayer, MM. Courtial, Revet et Piednoir, Mmes A.M. Bertrand, Imbert, Chain-Larché et Chauvin, MM. Morisset et Regnard, Mme Sollogoub, MM. Lefèvre, Vogel, Bonhomme, Dufaut, Chatillon, Détraigne, Savary, Moga, Luche et Chevrollier, Mme Férat, MM. Gremillet, Pierre, Huré et Mizzon, Mmes de Cidrac, Bories et Malet, MM. Genest et Priou, Mme C. Fournier, MM. B. Fournier et de Nicolaÿ, Mme Duranton, M. Mayet et Mme Lanfranchi Dorgal.

A. Après l'article 84 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  L'article 49 de la loi n°2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 est ainsi modifié :

1° La seconde phrase du quinzième alinéa est supprimée ;

2° Les seizième et dix-neuvième alinéas sont supprimés ;

3° La première phrase du dix-septième alinéa est supprimée.

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

B. En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

M. François Bonhomme.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°II-611 rectifié ter, présenté par M. Raison, Mme Vullien, MM. Bas, Milon et Perrin, Mmes Estrosi Sassone et Micouleau, MM. Dallier, Pointereau, Rapin, Husson, Longuet, Vaspart, Cornu et Brisson, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Louault et Maurey, Mme Deromedi, M. Sido, Mme Garriaud-Maylam, M. Longeot, Mme Morhet-Richaud, MM. Pellevat, Chaize et Reichardt, Mmes Procaccia, Puissat, Di Folco et Gruny, M. Kern, Mme M. Mercier, M. Joyandet, Mmes Deseyne et Lassarade, MM. Charon et D. Laurent, Mmes Goy-Chavent et Canayer, MM. Courtial, Revet et Piednoir, Mmes A.M. Bertrand, Imbert et Chain-Larché, M. Morisset, Mme Chauvin, M. Regnard, Mme Sollogoub, MM. Lefèvre, Vogel, Bonhomme, Dufaut, Chatillon, Détraigne, Savary, Moga, Luche et Chevrollier, Mme Férat, MM. Mizzon, Gremillet, Pierre et Huré, Mme Bories, MM. Genest, Priou et Darnaud, Mme C. Fournier, MM. B. Fournier et de Nicolaÿ, Mmes Duranton et Malet, M. Mayet et Mmes de Cidrac et Lanfranchi Dorgal.

A. Après l'article 84 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Après la troisième phrase du dix-neuvième alinéa de l'article 49 de la loi n°2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Pour 2019, le montant de cette perte de recettes est calculé de sorte que le montant des versements au budget général soit égal à celui prévu par la loi de finances initiale pour 2017. »

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

B. En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

M. François Bonhomme.  -   Défendu.

M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur spécial.  - Avis défavorable, ces amendements sont satisfaits par l'amendement n°II-971.

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État.  - Avis défavorable pour les mêmes raisons.

Les amendements n°II-613 rectifié ter et n°611 rectifié ter sont retirés.

Prochaine séance, aujourd'hui, vendredi 7 décembre 2018, à 9 h 30.

La séance est levée à minuit et demi.

Jean-Luc Blouet

Direction des comptes rendus

Annexes

Ordre du jour du vendredi 7 décembre 2018

Séance publique

À 9 h 30, à 14 h 30 et le soir

Présidence : M. David Assouline, vice-président M. Vincent Delahaye, vice-président M. Thani Mohamed Soilihi, vice-président

Secrétaires : M. Dominique de Legge - Mme Annie Guillemot

Projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2019 (n°146 rectifié, 2018-2019)

- Relations avec les collectivités territoriales (+ articles 79 à 81 ter)

Suite de l'examen des articles rattachés et du compte spécial

- Discussion des missions et des articles rattachés reportés

- Discussion des articles de la seconde partie non rattachés aux crédits.

Analyse des scrutins publics

Scrutin n°34 sur l'amendement n°II-35, présenté par M. Alain Joyandet au nom de la commission des finances, à l'article 39 (crédits de la mission) (État B) du projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2019

Résultat du scrutin

Nombre de votants :340

Suffrages exprimés :305

Pour :154

Contre :151

Le Sénat a adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (145)

Pour : 134

Abstentions : 10 - MM. Bernard Bonne, Gérard Dériot, Mmes Catherine Deroche, Corinne Imbert, Fabienne Keller, Florence Lassarade, MM. Alain Milon, Jean-François Rapin, René-Paul Savary, Jean Sol

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat

Groupe SOCR (74)

Contre : 73

N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Hélène Conway-Mouret, Président de séance

Groupe UC (51)

Pour : 14 - Mme Annick Billon, MM. Olivier Cigolotti, Vincent Delahaye, Daniel Dubois, Mmes Françoise Férat, Françoise Gatel, MM. Michel Laugier, Nuihau Laurey, Mme Anne-Catherine Loisier, MM. Jean-François Longeot, Hervé Marseille, Hervé Maurey, Jean-Pierre Moga, Mme Évelyne Perrot

Contre : 16 - MM. Michel Canevet, Bernard Delcros, Yves Détraigne, Mmes Nassimah Dindar, Élisabeth Doineau, Nathalie Goulet, MM. Loïc Hervé, Claude Kern, Jean-Claude Luche, Mmes Catherine Morin-Desailly, Sonia de la Provôté, Denise Saint-Pé, Nadia Sollogoub, M. Jean-Marie Vanlerenberghe, Mmes Dominique Vérien, Michèle Vullien

Abstentions : 19

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Jacques Le Nay, Mme Lana Tetuanui

Groupe RDSE (22)

Contre : 22

Groupe LaREM (23)

Contre : 23

Groupe CRCE (16)

Contre : 16

Groupe Les Indépendants (12)

Pour : 4 - MM. Emmanuel Capus, Jean-Pierre Decool, Alain Marc, Dany Wattebled

Contre : 1 - M. Daniel Chasseing

Abstentions : 6

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Claude Malhuret

Sénateurs non inscrits (5)

Pour : 2

N'ont pas pris part au vote : 3 - Mme Claudine Kauffmann, MM. Jean Louis Masson, Stéphane Ravier

Scrutin n°35 sur l'amendement n°II-43, présenté par M. Alain Joyandet au nom de la commission des finances, tendant à insérer un article additionnel avant l'article 81 quater du projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2019

Résultat du scrutin

Nombre de votants :338

Suffrages exprimés :302

Pour :152

Contre :150

Le Sénat a adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (145)

Pour : 134

Abstentions : 10 - MM. Bernard Bonne, Gérard Dériot, Mmes Catherine Deroche, Corinne Imbert, Fabienne Keller, Florence Lassarade, MM. Alain Milon, Jean-François Rapin, René-Paul Savary, Jean Sol

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat

Groupe SOCR (74)

Contre : 73

N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Hélène Conway-Mouret, Président de séance

Groupe UC (51)

Pour : 14 - Mme Annick Billon, MM. Olivier Cigolotti, Vincent Delahaye, Mmes Françoise Férat, Catherine Fournier, Françoise Gatel, MM. Michel Laugier, Nuihau Laurey, Mme Anne-Catherine Loisier, MM. Jean-François Longeot, Hervé Marseille, Hervé Maurey, Jean-Pierre Moga, Mme Évelyne Perrot

Contre : 15 - MM. Michel Canevet, Bernard Delcros, Mmes Nassimah Dindar, Élisabeth Doineau, M. Daniel Dubois, Mme Nathalie Goulet, MM. Loïc Hervé, Claude Kern, Jean-Claude Luche, Mmes Sonia de la Provôté, Denise Saint-Pé, Nadia Sollogoub, M. Jean-Marie Vanlerenberghe, Mmes Dominique Vérien, Michèle Vullien

Abstentions : 20

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Jacques Le Nay, Mme Lana Tetuanui

Groupe RDSE (22)

Contre : 22

Groupe LaREM (23)

Contre : 23

Groupe CRCE (16)

Contre : 16

Groupe Les Indépendants (12)

Pour : 4 - MM. Emmanuel Capus, Jean-Pierre Decool, Alain Marc, Dany Wattebled

Contre : 1 - M. Daniel Chasseing

Abstentions : 6

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Claude Malhuret

Sénateurs non inscrits (5)

N'ont pas pris part au vote : 5 - M. Philippe Adnot, Mmes Christine Herzog, Claudine Kauffmann, MM. Jean Louis Masson, Stéphane Ravier