Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur le site internet du Sénat.

Je vous invite à observer le respect, du temps de parole, et des uns et des autres.

Nous sommes le jour de DuoDay, initiative de Mme la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées. Je salue Virginie, Henry et Armelle, en tribune, que nous accueillons aujourd'hui dans le cadre de cette initiative, que le Sénat soutient. (Applaudissements sur tous les bancs)

Décentralisation

M. Jean-Yves Roux .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE) À la suite du grand débat, le président de la République a annoncé un nouvel acte de décentralisation, ce qui fait partie du répertoire classique, pour nous Sénateurs, qui inquiète les acteurs locaux. La pièce n'est pas encore à l'affiche, mais des rumeurs bruissent et leur ballet donne le tournis. Il s'agirait de créer une décentralisation qui partirait du citoyen, non des élus ou de l'État. De quoi s'agit-il ? Déjà, les collectivités territoriales ont dû s'adapter à de nombreuses réformes, parfois dans des délais très courts : changements de périmètre des communes et EPCI, transferts et délégations de compétences, baisses de dotations...Tout cela, dans des délais très courts, a laissé des traces... Pourriez-vous lever les incertitudes sur le contenu de la réforme et son calendrier ?

Il faudra donner aux collectivités territoriales les moyens nécessaires et conserver un maillage de proximité.

Quelle France des territoires voulez-vous ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE et LaREM)

Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales .  - Comme vous le savez, lors du grand débat, les élus locaux ont demandé davantage de décentralisation. Le président de la République a annoncé en conséquence, le 25 avril, un nouvel acte de décentralisation, évoquant les domaines du logement, des transports et de la transition énergétique. Cette évolution se fera selon trois principes clairs : responsabilité, visibilité, financement. Elle se fera en étroite collaboration avec les associations d'élus locaux. Les discussions débuteront au mois de juin, après la fin de la période électorale. Les ministères concernés - car il s'agit d'un chantier très interministériel - devront aussi se concerter.

Une politique de contractualisation avec les collectivités territoriales sera établie dans les matières qui le nécessitent.

Nous travaillerons aussi au droit à la différenciation dans le cadre de la révision constitutionnelle. Cela devra s'articuler avec l'existant. Il ne s'agit pour autant pas d'un bouleversement, mais d'un travail collectif.

Référendum d'initiative partagée sur la privatisation d'ADP

Mme Cécile Cukierman .  - (M. Éric Bocquet applaudit.) Le 9 mai, le Conseil constitutionnel a rendu une décision historique, en validant, de manière incontestable, la première mise en oeuvre d'un référendum d'initiative partagée. La privatisation, le bradage d'ADP, service public national, sera soumis au vote de nos concitoyennes et concitoyens. Cette procédure revêt tant d'embûches que personne ne croyait à sa mise en oeuvre lorsqu'elle a été créée en 2008.

Il aura fallu l'exaspération suscitée par la politique d'Emmanuel Macron pour la faire éclore. Quelque 4,7 millions d'électeurs se prononceront sur cette procédure référendaire. Selon l'article 3 de la loi organique du 6 décembre 2013, le ministre de l'Intérieur met en oeuvre le recueil des signatures sous le contrôle du Conseil constitutionnel.

C'est pourquoi, monsieur le ministre de l'Intérieur, huit parlementaires, dont cinq présidents de groupe, ont souhaité vous rencontrer, pour évoquer le bon déroulement du scrutin. Vous avez refusé de les rencontrer et renvoyés au Conseil constitutionnel. Est-ce ainsi que vous respectez le vote populaire ? C'est inacceptable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE, ainsi que sur quelques bancs du groupe SOCR)

M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur .  - Oui, respecter le vote populaire doit nous rassembler. (Exclamations) Effectivement, le 9 mai, le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution la proposition de loi visant à affirmer le caractère de service public national de l'exploitation d'Aéroports de Paris. Il faut rassembler 4 117 396 signatures. Il appartient au Conseil constitutionnel de superviser le scrutin et de vérifier la collecte de signatures.

Le ministre de l'Intérieur n'agit, dans ce cadre, qu'en tant qu'opérateur sous son autorité. C'est pourquoi j'ai transmis la demande des parlementaires au Conseil constitutionnel.

Le ministre de l'Intérieur n'a en effet nullement vocation à le court-circuiter dans l'exercice de sa mission. Ce n'est pas faire insulte aux parlementaires que de respecter la procédure. Il appartiendra au Conseil constitutionnel de déclarer si la proposition a recueilli l'assentiment de suffisamment d'électeurs. (M. François Patriat applaudit.)

Discours écologiste et liste « Renaissance »

M. Didier Marie .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Dans dix jours, les Français éliront leurs députés européens. Le Gouvernement est en campagne, cela se voit et s'entend.

On a parlé d'un « tournant vert » d'Emmanuel Macron. C'est moins évident. Le vide de la dernière déclaration de Sibiu marque le manque d'ambition de la France. Le président de la République n'a jamais évoqué la Banque du climat en deux ans. La suppression du train de fruits et légumes Perpignan-Rungis, qui se solde par 25 000 camions en plus sur les routes par an, est aussi éloquente. (Bravos ironiques à droite)

Les trous dans la raquette sont nombreux au plan national et nous sommes loin du « Make our planet great again » ! Un an et demi après le discours de la Sorbonne, les actes se font toujours attendre. Pire, des signaux contraires ont été envoyés sur des avancées sociales et démocratiques européennes, comme le congé parental qui a été torpillé, et les lanceurs d'alerte. Comment expliquer ce décalage ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR ; M. Michel Savin applaudit également.)

M. François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - Je vous le confirme : oui, nous nous engageons pour la construction européenne, et j'en suis fier ; je serai d'ailleurs ce soir dans le Tarn.

Il est de bon ton de crier haro sur l'Europe ; nous, nous y croyons. L'union fait la force et une politique écologiste est évidemment bien plus forte quand elle rassemble les 500 millions d'Européens.

Vous avez manqué l'essentiel de la motion signée à Sibiu où la France finit par convaincre l'Allemagne.

Il y a des batailles à gagner et nous les conduisons, par exemple sur l'industrie automobile : nous avons obtenu que les constructeurs européens produisent des véhicules qui consomment moins et soient moins polluants. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe laREM)

M. Didier Marie.  - Vous avez organisé un rencard avec Mme Le Pen, kidnappant le projet européen. (Marques d'approbation à droite) Or nous avons besoin d'une majorité de gauche pour changer de cap. (On le conteste sur les mêmes bancs.)

Unité pour détenus violents de la prison de Sequedin

M. Jean-Pierre Decool .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants) Les détenus violents rendent difficile la cohabitation avec les autres détenus et, a fortiori, avec le personnel pénitentiaire.

Pour y remédier, une première unité ad hoc a été créée à Lille-Sequedin, prison qui dispose du savoir-faire nécessaire. J'ai eu l'occasion de la visiter la semaine dernière. Une dizaine de détenus, accueillis pour neuf mois maximum, y bénéficient d'un suivi personnalisé, de la part de psychologues, de conseillers pénitentiaires et de surveillants.

Cette initiative est intéressante et motive le personnel. Pensez-vous la mettre en oeuvre ailleurs, à Strasbourg, à Marseille, notamment ? À quel coût et avec quels moyens ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Indépendants et LaREM)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice .  - Votre question montre en elle-même l'intérêt de cette structure. L'unité de Lille-Sequedin s'inscrit en effet dans un projet plus vaste de prise en charge individualisée des détenus les plus violents.

À Sequedin, une dizaine de détenus sont ainsi pris en charge. L'objectif est de réduire les comportements violents pour les réintégrer dans un régime classique. À terme, quatre - fin juin - puis six nouvelles unités seront créées - à Metz, Strasbourg, ou encore Rennes - pour un coût de 1,5 million d'euros. Les moyens nécessaires ont été prévus par la loi de programmation de la justice que vous avez votée. Le personnel est spécialement formé et le dispositif évalué par un comité d'évaluation et de suivi. Si l'impact est positif, nous continuerons à déployer ces quartiers pour détenus violents. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Les Indépendants)

Militaires tués en opération

M. Christian Cambon .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Mardi, aux Invalides, autour du président de la République, la France, bouleversée, a rendu un hommage solennel à Cédric de Pierrepont et Alain Bertoncello qui ont, avec leurs camarades du Commando Hubert, sauvé deux touristes inconscients au Nord-Bénin. Auteurs d'un exploit, ils l'ont payé de leur vie. Ils ont montré que la France n'abandonne jamais ses enfants. Nous ne les oublierons pas et pensons en cet instant à leurs familles, à leurs camarades de combat et aux milliers de soldats qui assurent au Sahel la sécurité de l'Europe entière.

Laissons ici de côté les polémiques sur les conditions d'accueil à Villacoublay ou sur les couleurs des cartes du Quai d'Orsay.

Dans cet hémicycle, nous votons la prolongation des missions des soldats et les crédits budgétaires nécessaires à leurs équipements. Nous sommes aussi responsables de leur sort et devons être économes de leur vie.

Puisque des touristes inconscients continueront à chercher des sensations fortes dans des contrées dangereuses, ne peut-on demander à ces pays de durcir leur politique de visas ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC, Les Indépendants et LaREM ; M. Jean-Pierre Sueur applaudit aussi.)

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères .  - Nous nous associons à votre hommage poignant aux deux maîtres décédés. Ce fut aux Invalides un moment de communion très fort. Nous envoyons un message très fort aux pays accueillant des Français établis hors de France, qui sont plusieurs millions, notamment sur le continent africain, ou des touristes. Il faut une vigilance accrue des voyageurs et des opérateurs de voyage, alors que les foyers de crise et les zones de tension se multiplient dans le monde.

Je rends hommage au centre de crise du Quai d'Orsay qui assure la meilleure information possible. J'incite nos compatriotes à l'étranger à s'inscrire sur la plateforme Ariane. Les deux ex-otages ont reconnu qu'ils auraient dû suivre plus scrupuleusement certaines recommandations. Je réunirai par ailleurs les plateformes de voyage prochainement.

La politique des visas relève de la souveraineté de chaque État. Mais Européens et Africains doivent dialoguer davantage pour réduire les risques de celles et ceux qui, sous l'uniforme, ont déjà fort à faire pour traquer les djihadistes. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM, ainsi que sur quelques bancs du groupe RDSE)

Situation au Sahel

M. Olivier Cigolotti .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Ma question prolonge celle de M. Cambon. Cédric de Pierrepont et Alain Bertoncello ont été au bout de leur mission, jusqu'au sacrifice de leur vie, pour la libération de quatre otages. Le groupe UC s'incline devant leur courage et leur détermination. Nos pensées vont vers leurs proches, leurs familles et leurs frères d'armes.

L'heure n'est pas à la polémique mais aux questions de sécurité dans cette zone sahélo-saharienne, immense, équivalente à l'Europe. Elle n'est pas assurée pour l'heure par la stratégie de la force conjointe G5 Sahel. Les groupes armés terroristes ont des connexions entre eux et s'en jouent.

Nos forces font un travail remarquable mais semblent bien seules, même aidées par nos alliés historiques britanniques et américains.

La lutte contre le terrorisme est un enjeu international. Quand pourrons-nous compter sur un engagement européen au Sahel ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères .  - Mardi, alors que nous étions rassemblés autour de nos deux héros, les membres du G5 Sahel leur rendaient aussi hommage à Bruxelles aux côtés des ministres des Affaires étrangères et de la Défense de l'Union européenne. Cela montre la prise de conscience européenne sur ce sujet.

La réponse est d'abord sécuritaire, avec la montée en puissance de cette force : 100 millions d'euros supplémentaires ont été consacrés à une meilleure formation de ces troupes de 4 000 hommes issus de cinq pays aujourd'hui.

Deuxième réponse : l'alliance Sahel, pour rassembler, à l'initiative du président de la République et d'Angela Merkel, plus vite les bailleurs de fonds et les donneurs, pour combattre le radicalisme à la racine, en ayant un impact sur l'éducation et l'emploi.

Enfin, la réponse est politique. Le dialogue avec les acteurs locaux est impératif pour que la réponse soit pérenne. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Les Indépendants)

Initiative « DuoDay »

Mme Patricia Schillinger .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe laREM) Aujourd'hui, se tient le DuoDay, lancé par un établissement et service d'aide par le travail (ESAT) du Lot-et-Garonne, qui permet à une personne en situation de handicap d'être accueillie dans une entreprise, une association ou une collectivité territoriale. Pour la quatrième édition, 12 000 duos se sont formés, qui partageront leur expérience.

L'objectif est de développer l'insertion professionnelle des personnes handicapées en luttant contre les préjugés. La tâche est vaste. Comme le disait Albert Einstein, dont la citation figurant sur le site de l'événement, « Il est plus facile de désintégrer un atome qu'un préjugé. »

Le changement de regard doit s'accompagner d'une politique volontariste. Le taux de chômage des personnes handicapées atteint 19 % et le niveau de qualification de trois quarts d'entre eux est inférieur au bac.

Que compte faire le Gouvernement pour améliorer l'accès à l'emploi, la formation professionnelle et la sécurisation des parcours professionnels des personnes handicapées ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées .  - Merci, monsieur le président, pour le dialogue que nous avons eu avec les deux duos ici présents. Près de 25 000 personnes participeront en effet à cet événement de découverte de métiers. Il faut passer à la vitesse supérieure, comme nous le faisons avec Muriel Pénicaud et Olivier Dussopt en simplifiant la vie des entreprises, par exemple en automatisant les déclarations sociales nominatives, pour plus d'efficacité et de lisibilité.

Nous offrons des prestations de services aux entreprises pour accueillir les personnes handicapées. Nous allons aussi créer une plateforme numérique avec la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) et la Caisse des dépôts.

Il faut aussi maintenir les personnes handicapées dans l'emploi.

Le handicap est la priorité du quinquennat. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM, ainsi que sur quelques bancs du groupe UC)

Résilience alimentaire et sécurité nationale

Mme Françoise Laborde .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE) Les scandales sanitaires récurrents placent le bien-manger au premier plan des préoccupations de nos concitoyens. Pourtant, l'articulation entre ordre public et continuité alimentaire n'est jamais évoquée.

Par le passé, notre modèle agricole reposait sur un foncier nourricier et multiple et les élus étaient préoccupés par la sécurité alimentaire. Aujourd'hui, même les zones rurales sont dépendantes des camions de la grande distribution et vulnérables en matière alimentaire. Le moindre blocage routier vide les rayons alimentaires. En outre-mer, des pénuries ont même provoqué des émeutes.

Assurer un niveau minimum d'approvisionnement alimentaire est un devoir pour les autorités qui devraient garantir la résilience de notre chaîne d'approvisionnement. Il s'agit d'un risque stratégique ! Les autorités doivent assurer la chaîne de distribution entre le foncier agricole nourricier et le consommateur.

Notre sécurité alimentaire est cruciale, à l'heure où l'État perd de plus en plus la main sur les services publics. Cette question fait-elle l'objet d'une réflexion au sein de votre ministère ou du Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE)

M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur .  - La probabilité est faible mais le risque majeur. Notre modèle en la matière est celui des catastrophes naturelles. Les plans Orsec le prévoient, avec le pilotage du SGDSN et du préfet. Un plan d'accès à l'eau potable, à l'alimentation et aux énergies est immédiatement mis en oeuvre. C'est ce qui s'est passé aux Antilles après le passage d'Irma avec 4 millions de litres d'eau et 375 tonnes de denrées distribués.

Les points d'approvisionnement peuvent être particulièrement visés, mais nos forces ont montré leur capacité à les libérer sans trouble majeur. (Quelques applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE)

Fichiers de « gilets jaunes »

M. Bernard Jomier .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Cent médecins dont Bernard Debré, Xavier Emmanuelli, Philippe Denormandie, Irène Kahn-Bensaude, ont appelé à ne pas renseigner le fichier Sivic. « Nos parcours, nos opinions, sont très différents mais nous ne saurions accepter que des informations médicales nominatives soient transmises à des personnes qui ne concourent pas directement aux soins », disent-ils.

Le fichier Sivic a été détourné de son objet lors du mouvement des gilets jaunes. L'AP-HP a fini par admettre la réalité des faits.

Madame la ministre, allez-vous désavouer cette collecte qui ne respecte pas les règles de la CNIL et diligenter une enquête indépendante ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR, de même que sur plusieurs bancs des groupes UC et Les Républicains)

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - Le système d'information Sivic aide les hôpitaux à faire face à des flux inhabituels, comme une arrivée exceptionnelle de blessés, et est désactivé quand l'évènement qui a motivé son déclenchement prend fin. Il a été activé lors de l'explosion au gaz dans le 9e arrondissement de Paris ou des inondations dans l'Aude.

Il est utile aux hôpitaux, aux agences régionales de santé (ARS) et facilite le renseignement des familles.

Plusieurs voix sur les bancs du groupe SOCR.  - Et les gilets jaunes ?

M. Ladislas Poniatowski.  - Et la question ?

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État.  - Il s'agit de mieux prendre en charge les blessés. Mme Buzyn l'a dit : jamais nous n'accepterons de ficher les gilets jaunes. (Mouvements divers) Il y a eu un malentendu. Toutes les personnes soignées en marge des manifestations ont pu être entrées dans ce fichier. Une enquête a été demandée par l'ARS.

M. Bernard Jomier.  - Demander à ceux qui sont susceptibles d'avoir commis l'infraction de mener l'enquête est curieux... (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes SOCR et Les Républicains) Le problème a déjà été posé avec un autre fichier croisé avec celui du ministère de l'Intérieur.

Madame la ministre, les fondements de notre éthique du soin ne sont pas un mercato. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR et sur plusieurs bancs des groupes CRCE, UC et Les Républicains)

Accès aux soins

M. Hugues Saury .  - Les Français se préoccupent de l'accès aux soins au plus près de chez eux. Dans certains territoires, comme le département du Loiret, l'un des plus défavorisés à cet égard, cela est difficile. Il faut plusieurs mois pour obtenir un rendez-vous chez un médecin spécialiste. Les communes, départements et régions se mobilisent en vain, car les spécialistes manquent. Nous avons été consternés par les chiffres du numerus clausus en première année commune aux études de santé (Paces) pour la rentrée prochaine. Certes, il augmente de 13,5 %, mais ne profitera qu'aux grandes métropoles : Paris, Lyon, Aix, Marseille.

Qu'en est-il des facultés dans les territoires plus ruraux, Dijon, Poitiers, Reims, Caen, Clermont ? Une stagnation. C'est le cas dans 17 des 30 facultés en métropole.

En bref, les déshérités d'aujourd'hui le seront encore demain...

Quels critères ont présidé à la définition du numerus clausus ?

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation .  - Le plan « Ma Santé 2022 » et le projet de loi Santé, en cours d'examen en commission ici au Sénat, visent à améliorer l'accès aux soins. Certaines mesures seront applicables aux collectivités territoriales, d'autres plus tard.

Les jeunes pourront débuter leurs études de médecine et réaliser leurs stages de troisième cycle sur l'ensemble du territoire. Nous créons des assistants médicaux, 400 postes de médecins généralistes, et le système de santé sera également réorganisé au plus proche des territoires.

Certains établissements, à titre expérimental, appliquent les nouvelles formes de Paces prévues à la rentrée 2020, qui permettront à l'ensemble des territoires de bénéficier d'une augmentation du numerus clausus. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; Mme Josiane Costes applaudit également.)

Activités « caritatives » et ordre public

Mme Nathalie Goulet .  - Interdit de séjour dans de nombreux pays, le leader des Frères musulmans, Youssouf Al Qaradawi, a lancé une application, dite Euro Fatwa App, brûlot antisémite déversant sa haine à longueur de pages, et disponible sur Applestore ! Nous avons obtenu son retrait par Google le 11 mai.

Un dîner « caritatif » aura lieu le 25 mai, à Saint-Denis, en faveur de « l'institut des oulémas mauritaniens », interdit en Mauritanie même, chef de file du G5 Sahel, parce qu'il prêche un islam radical antisémite. Cet événement a été précédé de douze conférences et de collectes de fonds par le même organisme, dont il est précisé, dans des documents que je tiens à votre disposition, qu'elles ouvrent droit à réduction d'impôt !

Comment pouvons-nous accepter ce type d'événement ? Interdirez-vous cette manifestation et cette application ? (Applaudissements sur la plupart des bancs, à l'exception de ceux du groupe CRCE)

M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur .  - J'ai demandé quelques renseignements sur ce dîner, qui a été annulé. Il ne nous appartient pas d'autoriser un dîner « caritatif », toutefois nous pouvons intervenir quand il y a trouble à l'ordre public. C'est ce que nous avons fait. Quant à la déduction fiscale, elle est contrôlée. Nous portons une attention toute particulière à la diffusion de ces idées qui menacent l'ordre public.

Depuis 2018, 27 lieux de culte ont été fermés - 20 le sont toujours. Quatre écoles hors contrat, huit lieux culturels ou associatifs et 89 débits de boissons ont également été fermés. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Mme Nathalie Goulet.  - Le dîner a été déplacé au 25 mai. Il est bel et bien prévu. (Exclamations sur plusieurs bancs à droite, où l'on interpelle le ministre.) Après la déclaration de Christchurch, soyons vigilants ! L'application Euro Fatwa App est un brûlot antisémite inacceptable ! (Applaudissements sur la plupart des bancs des groupes UC et Les Républicains)

Mercosur

Mme Marie-Christine Chauvin .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) La Commission européenne paraît déterminée à conclure au plus vite un accord commercial avec le Mercosur : le Brésil, l'Argentine, l'Uruguay et le Paraguay.

Le ministre brésilien du commerce, Lucas Ferraz, a confirmé qu'un accord n'avait jamais été aussi proche.

Cet accord conduirait le citoyen français à consommer toujours plus de viande ne correspondant pas à nos normes écologiques et sanitaires et porterait préjudice à nos agriculteurs en instaurant une concurrence déloyale. Est-il raisonnable de brader ainsi notre souveraineté alimentaire ?

La Commission européenne opère des choix de plus en plus curieux. Est-il cohérent de s'engager dans la transition écologique et, en même temps, de faciliter une telle circulation de produits alimentaires sud-américains au détriment des Européens ? Défendrez-vous les intérêts des producteurs et consommateurs français ? Quelle est la position du Gouvernement ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UC et Les Républicains)

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation .  - La Commission européenne relance des discussions avec le Mercosur, c'est exact. Cela me donne l'occasion de préciser à nouveau la position claire, ferme et nette de la France. Elle a été exposée par le président de la République à M. Juncker. Je l'ai moi-même relayée à M. Elkann.

La France est opposée à cet accord qui se ferait au détriment de nos standards sanitaires, alimentaires et environnementaux et au détriment des accords de Paris. La France, défavorable à la négociation de cet accord, votera contre si la question se pose.

En attendant, les discussions politiques et négociations diplomatiques se poursuivent. Il faut que la Commission infléchisse sa position. L'accord avec le Mercosur n'aboutira pas s'il doit affaiblir les producteurs français. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Les Indépendants)

Mme Marie-Christine Chauvin.  - Merci. J'espère vraiment que cette fermeté sera maintenue devant les instances européennes. On ne peut imposer toujours plus de normes à nos seuls agriculteurs et ouvrir nos marchés au Mercosur. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et UC)

Services publics en milieu rural

M. Olivier Paccaud .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) « Plus de proximité », réclament les Français. Le Premier ministre veut faire vite et mieux. Voici l'équation à résoudre par le Gouvernement pour rétablir efficacité et crédibilité.

Avec la délivrance des titres d'identité, notre État parvient à faire pire, lentement, au mépris de la proximité.

Jadis, chacun pouvait effectuer des démarches dans sa commune, coeur battant de la démocratie. Ce n'est plus le cas. Dans l'Oise, seules 27 communes sur 679, soit 4 %, sont équipées pour le dépôt des demandes. Il faut parfois attendre trois mois ! Cela multiplie les distances pour beaucoup, ce qui exige de l'essence...C'est le passage à l'ère biométrique, une incontestable régression du service public ! Bel exemple pour un Gouvernement qui donne des leçons d'écologie ! (Mme Brigitte Lherbier applaudit.)

Ce système n'a fait que des mécontents. À l'heure où le président de la République redécouvre les vertus de la proximité, ne faudrait-il pas revenir au système existant ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur .  - Ne polémiquez pas : vous avez posé la même question mardi matin, je vous ferai donc la même réponse que celle que vous avez eue alors. Vous savez en outre que la mise en place de ces outils numériques pour les cartes nationales d'identité ne relève pas de l'actuel Gouvernement.

Les machines exigées par la nature biométrique des titres ont un coût moyen de 30 000 euros. Pas moins de 3 526 ont été déployées dans les mairies, mais elles ne sont utilisées qu'à 35 % de leurs capacités. Cela explique les délais que vous dénoncez : 22 jours dans l'Oise, ce qui est proche de la moyenne nationale. J'ai proposé au Premier ministre l'installation de 100 nouvelles machines pour mailler les territoires.

M. Olivier Paccaud.  - Un ancien président de la République a promis un choc de simplification, un autre a dit vouloir arrêter d'emmerder les Français. Méditez la devise de Pierrefonds, belle ville de l'Oise, « Qui veult peult ». (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

La séance est suspendue à 16 heures.

présidence de M. Vincent Delahaye, vice-président

La séance reprend à 16 h 15.