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Table des matières



Questions orales

Action contre l'illectronisme

M. Jean-Marie Mizzon

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

École en zone rurale

M. Jean-François Husson

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

Conséquences financières de la crise sanitaire sur les communes

M. Hervé Maurey

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement

Hébergement d'urgence

Mme Éliane Assassi

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement

Réglementation environnementale 2020

Mme Anne-Catherine Loisier

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement

Surcoûts liés à la crise sanitaire pour les collectivités locales

M. Patrice Joly

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement

Aides européennes à l'agriculture biologique

Mme Noëlle Rauscent

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics

Surfaces pastorales

Mme Patricia Morhet-Richaud

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics

Financement des EPCI sans fiscalité propre

Mme Laure Darcos

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics

Concurrence déloyale des non-professionnels du tourisme

M. Max Brisson

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics

Situation des travailleurs non-salariés

M. Édouard Courtial

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics

Inquiétudes sur l'avenir de Sanofi dans le Val-de-Marne

Mme Laurence Cohen

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics

Donation au dernier vivant

Mme Jocelyne Guidez

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics

Précarité des étudiants français

Mme Marie Mercier

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Déroulement des concours durant la crise sanitaire

Mme Françoise Laborde

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Sauvetage du capillaire ferroviaire

M. Jean Bizet

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Aides à l'assainissement individuel

Mme Nadia Sollogoub

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé

Indemnisation des copropriétaires du Signal

M. Michel Vaspart

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé

L'avenir de l'enquête publique

M. Antoine Lefèvre

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé

Frais de transport en ambulance bariatrique

Mme Catherine Deroche

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé

Hôpital support en Ardèche méridionale

M. Mathieu Darnaud

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé

Déremboursement de l'Elmiron

Mme Laurence Rossignol

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé

Extension de la prime exceptionnelle au personnel médico-social

Mme Agnès Canayer

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé

Autorisation d'absence des enseignants au titre d'un mandat représentatif

M. Philippe Bonnecarrère

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé

Manque de places en instituts médico-éducatifs

M. Patrick Chaize

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées

Accompagnement des enfants handicapés

Mme Christine Herzog

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées

Prise en charge des enfants handicapés français résidant à l'étranger

Mme Jacky Deromedi

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées

Moyen de paiement des demandeurs d'asile

Mme Patricia Schillinger

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur

Connaissance par les communes du nombre de leurs habitants

M. Olivier Paccaud

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur

Avenir du fonds européen d'aide aux plus démunis

M. Didier Marie

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur

Proposition de création d'un délégué interministériel aux enjeux transfrontaliers

Mme Véronique Guillotin

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur

Écoles d'architecture

Mme Sylvie Robert

M. Franck Riester, ministre de la culture

Violences sexuelles dans les sports de montagne

M. Cyril Pellevat

Mme Roxana Maracineanu, ministre des sports

Communication des archives de la défense nationale

M. Pierre Laurent

Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d'État auprès de la ministre des armées

Rappels au Règlement

Mme Éliane Assassi

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances

Dispositions urgentes liées à la crise sanitaire (Procédure accélérée)

Discussion générale

M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes

Mme Muriel Jourda, rapporteur de la commission des lois

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis de la commission des finances

Question préalable

M. Éric Kerrouche

Discussion générale (Suite)

M. Didier Marie

Mme Josiane Costes

M. Thani Mohamed Soilihi

Mme Christine Herzog

Mme Éliane Assassi

M. Franck Menonville

M. Loïc Hervé

Mme Catherine Di Folco

Mme Monique Lubin

M. Ladislas Poniatowski

M. Marc Fesneau, ministre

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État

Exception d'irrecevabilité

Mme Muriel Jourda, rapporteur

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

M. Max Brisson

Mme Esther Benbassa

M. Jean-Pierre Sueur

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE PREMIER BIS A

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE PREMIER BIS B

M. Claude Kern

ARTICLE PREMIER BIS

ARTICLE PREMIER TER

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE PREMIER QUATER AA

ARTICLE PREMIER QUATER A

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE PREMIER QUATER BA

ARTICLE PREMIER QUATER B

ARTICLE PREMIER QUATER CA

Mme Esther Benbassa

ARTICLE PREMIER QUATER C

Mme Esther Benbassa

ARTICLE PREMIER QUATER

Annexes

Ordre du jour du mercredi 27 mai 2020




SÉANCE

du mardi 26 mai 2020

84e séance de la session ordinaire 2019-2020

présidence de M. David Assouline, vice-président

Secrétaires : M. Joël Guerriau, M. Guy-Dominique Kennel.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance est adopté.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle 34 questions orales.

Action contre l'illectronisme

M. Jean-Marie Mizzon .  - Dans une question écrite, j'avais alerté le Gouvernement sur le phénomène de l'illettrisme numérique ou illectronisme, et sur son traitement dans l'Éducation nationale.

Dans le numéro 28 de L'état de l'école rédigé fin 2018, il est indiqué que les écoles élémentaires continuent de s'équiper progressivement en matériels informatiques -  et que l'équipement informatique et numérique dans les écoles publiques du premier degré est moins généralisé que dans le second degré. Or l'apprentissage de l'outil informatique doit se faire au plus tôt et, pour certains, ne peut se faire qu'à l'école de la République. En effet, la maîtrise de l'informatique fait principalement défaut aux populations les plus fragiles et les plus défavorisées.

Pour que l'école reste une chance pour tous les enfants de la République, l'Éducation nationale entend-elle s'attaquer au problème et soutenir les communes dont les finances sont les plus fragiles ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - Il y a une fracture numérique en France comme dans d'autres pays. Elle se réduit avec le temps. Nous avons pleinement conscience du phénomène.

Durant le confinement, nous avons distribué des tablettes, engagé un plan de 15 millions d'euros avec Julien Denormandie, mis en place des opérations spéciales avec des associations comme Emmaüs Connect, ou avec La Poste, et lancé le dispositif « Nation apprenante » via la télévision.

D'autres mesures sont en cours comme la création du Capes informatique ou une formation à la programmation informatique dès le primaire. En 2017, nous avons lancé le projet Écoles numériques innovantes et ruralité (ENIR) qui a financé 3 788 écoles de 3 570 communes ; l'État a ainsi investi 20 millions d'euros au travers des projets d'investissements d'avenir. Les états généraux du numérique se tiendront à Poitiers en novembre. D'autres plans sont à l'étude pour équiper les familles, en partenariat avec Julien Denormandie.

M. Jean-Marie Mizzon.  - Toutes les administrations, y compris territoriales, dématérialisent leurs procédures. La maîtrise du numérique est essentielle pour l'accès aux droits. Pourtant 13 millions de Français sont en difficulté dans ce domaine. Il ne suffit pas de déclarer l'urgence nationale : il faut accélérer et amplifier les mesures.

École en zone rurale

M. Jean-François Husson .  - La crise a mis en lumière les fractures éducatives entre territoires urbains et ruraux. La relance peut être l'occasion de donner toute sa place à l'éducation en zone rurale. Deux rapports ont été publiés sur le sujet, l'un de la mission d'information du Sénat sur les nouveaux territoires de l'éducation, l'autre de Mme Salomé Berlioux. Quelle suite entendez-vous leur donner ?

Quel calendrier pour réformer la politique éducative dans les territoires ? Allez-vous sortir de la logique binaire qui concentre les moyens sur les zones urbaines et périurbaines ? Quelles mesures pour mieux prendre en compte le temps de l'enfant qui a considérablement évolué ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - Il faut agir de manière unie sur le sujet de la ruralité. L'Éducation nationale contribue au rebond démographique car l'école est un facteur d'attractivité des villages ; s'il n'y a pas d'enfant, il n'y a pas d'école. Via les contrats départementaux ruraux et les stratégies pluriannuelles départementales, nous sommes au plus près du terrain. Nous mettons les moyens, et le taux d'encadrement est bien meilleur en milieu rural.

Je donnerai suite au rapport de Salomé Berlioux, à celui du Sénat ainsi qu'au rapport Azéma-Mathiot. Pour développer une politique d'éducation prioritaire adaptée aux territoires ruraux, il faut une vision globale du temps de l'enfant. Avec le déconfinement, nous développons les activités périscolaires et préparons la rentrée avec l'Association des maires de France et l'Association des maires ruraux en tenant compte des enjeux sociaux, sociétaux et d'attractivité de l'école rurale.

M. Jean-François Husson.  - J'apprécie vos propos rassurants. Cependant, dans mon département, je me bats depuis des années avec l'État pour mettre l'accent sur les territoires ruraux où il reste beaucoup de carences. Pour assurer l'égalité des chances, nous devons agir ensemble. Faites donc de la Meurthe-et-Moselle un territoire pilote !

Conséquences financières de la crise sanitaire sur les communes

M. Hervé Maurey .  - La crise sanitaire entraînera une perte de recettes évaluée à 14 milliards d'euros en 2020 et 2021 pour les collectivités territoriales. Les communes subiront des baisses de ressources - taxe de séjour, droits de mutation, loyers commerciaux, etc.  - et supporteront les pertes de recettes de syndicats dont elles sont membres qui gèrent piscines, restaurants scolaires ou centres de loisirs. Il faut s'attendre également à ce que la baisse des ressources de l'État et des autres collectivités se répercute sur les concours et subventions versés aux communes par un effet cascade.

La mobilisation exceptionnelle des communes face au Covid-19 a également conduit à des dépenses supplémentaires importantes, notamment pour la réouverture des écoles. Nombre d'entre elles risquent de connaître de réelles difficultés particulièrement en milieu rural. L'impact financier de la crise sera-t-il pris en charge par l'État ? Les maires ont besoin d'être rassurés.

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement .  - Je vous prie d'excuser Mme Gourault.

Le Gouvernement porte une attention toute particulière à la situation des collectivités territoriales, dont les équilibres budgétaires sont remis en cause par les dépenses nouvelles et par la baisse prévisionnelle de plusieurs recettes fiscales.

Des facteurs de complexification s'ajoutent comme l'impossibilité de réunir les conseils municipaux durant le confinement pour adopter le budget primitif 2020.

Dès le mois de mars, des ordonnances ont décalé les dates limites d'adoption des budgets et l'arrêté des comptes pour 2020 et permis des dérogations et assouplissements en matière d'exécution budgétaire. Mme Gourault et M. Lecornu ont encouragé les préfets à utiliser les mesures de soutien à la trésorerie des collectivités fragilisées, comme les avances de fiscalité, de DGF et les acomptes de FCTVA. Une centaine de communes y ont eu recours.

Le Gouvernement s'est engagé à contribuer à hauteur de 50 % aux achats de masques effectués par les collectivités territoriales. Une mission a été confiée à Jean-René Cazeneuve, président de la délégation aux collectivités territoriales à l'Assemblée nationale, sur les conséquences de l'épidémie sur les collectivités territoriales. Le Gouvernement attend ses conclusions, qui seront remises très prochainement, pour adapter et accentuer l'accompagnement des collectivités.

M. Hervé Maurey.  - Je ne suis pas complètement rassuré. Décaler le calendrier d'adoption du budget ne suffira pas. J'aurai aimé un engagement sur la prise en charge des dépenses liées à la réouverture des écoles. Or l'État ne fait que financer les masques, à hauteur de 50 %.

Les communes, déjà victimes de la baisse des dotations sous le précédent quinquennat, représentent une part importante de l'investissement public, qui sera nécessaire pour la relance. Elles ne doivent pas faire les frais de cette terrible épidémie.

Hébergement d'urgence

Mme Éliane Assassi .  - Face à l'urgence sanitaire, le Gouvernement a dû mettre à l'abri les personnes sans domicile via le Service intégré d'accueil et d'orientation (SIAO), mais de nombreuses questions demeurent. Le 115 nous fait part d'une hausse significative d'appelants : 119 personnes laissées à la rue faute de place, le 13 mai en Seine-Saint-Denis. Les places d'hôtel réquisitionnées seront occupées dès la reprise de l'activité, ce qui nous inquiète.

Les structures d'hébergement pérennes ont dû réduire leurs capacités d'accueil pour se conformer aux mesures sanitaires : la place va bientôt cruellement manquer. Nous craignons pour la période hivernale. Les services de l'État manquent de réponses, les structures de visibilité.

Les personnes mises à l'abri sont les plus vulnérables, familles monoparentales et enfants déscolarisés. Quel plan le Gouvernement va-t-il mettre en place ?

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement .  - Depuis le premier jour du confinement, nous avons travaillé d'arrache-pied pour apporter l'assistance nécessaire aux personnes à la rue ou dans des abris de fortune et ouvert plus de 20 000 places supplémentaires d'hébergement d'urgence. Hier soir, l'État a mis à l'abri près de 180 000 personnes - l'équivalent d'une grande ville ! Le dispositif d'hébergement d'urgence est conséquent et nécessaire vu la très grande précarité de nombre d'hommes, de femmes et d'enfants.

Nous avons réquisitionné des chambres d'hôtel, qui ont été très rapidement mises à disposition. Il faut désormais accompagner la sortie du confinement. Limiter la propagation du virus est essentiel. Nous nous y employons dans les centres ou via les maraudes, par la distribution de 5 000 masques par semaine et la mise en place de tests de dépistage.

Pour éviter une remise à la rue sèche, nous avons décalé la fin de la trêve hivernale au 10 juillet et donné instruction aux préfets d'y veiller. Enfin, nous poursuivons l'accompagnement social.

Réglementation environnementale 2020

Mme Anne-Catherine Loisier .  - J'attire votre attention sur les difficultés rencontrées par les industriels du bois et de la construction concernant la réglementation environnementale (RE) 2020.

Les matériaux bois et biosourcés ont la spécificité de séquestrer du carbone pendant toute la vie du bâtiment. Or le Conseil supérieur de la construction et de l'efficacité énergétique (CSCEE) préconise de tenir compte de l'empreinte carbone de la construction, mais sans niveau d'exigence concernant le stockage.

Les professionnels du bois construction demandent la mise en place d'un indicateur consolidé, prenant en compte l'empreinte carbone globale, y compris la capacité de stocker du carbone dans le bâtiment.

Ne passons pas à côté de l'opportunité de décarboner le secteur de la construction, à l'origine de 20 % des émissions de gaz à effet de serre.

Une méthode de calcul plus favorable au bois est-elle écartée ? L'indicateur en matière de stock de carbone sera-t-il réglementaire et assorti d'un seuil ?

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement .  - Le bâtiment représente 20 % des émissions de gaz à effet de serre, parfois plus. La RE 2020 se veut protectrice de l'environnement. Ministre du Logement et ingénieur des eaux et forêts, je crois beaucoup à la construction en bois qui tirera la filière en amont.

La RE 2020 doit être l'occasion de lui donner plus de place. Le diable est dans les détails, en l'occurrence la technicité de l'élaboration des indicateurs. La loi ELAN impose de prendre en compte l'ensemble du cycle de vie du matériel. Je serai intransigeant sur le sujet.

Le matériau biosourcé n'émet pas au moment de sa production, et a un bilan global meilleur que les autres matériaux.

Faut-il fixer une obligation de moyens, c'est-à-dire imposer un matériau en amont, ou de résultat, à travers un objectif d'émissions ? Bien que très attaché au bois, je suis favorable à la seconde solution. La filière du BTP réalise d'énormes efforts d'innovation, soutenons-la.

Mme Anne-Catherine Loisier.  - Je suis rassurée, je connais votre intérêt pour le matériau bois. Mais le diable se cache dans les détails, notamment les indicateurs sur le stockage effectif et la prise en compte de tout le cycle de vie. Nous attendons les décrets.

Surcoûts liés à la crise sanitaire pour les collectivités locales

M. Patrice Joly .  - Le Premier ministre a annoncé le 30 avril que l'État prendrait en charge 50 % du coût des masques achetés par les collectivités territoriales entre le 13 avril et le 1er juin.

Vu l'urgence et les difficultés d'approvisionnement, certaines collectivités avaient anticipé : le conseil départemental de la Nièvre a ainsi acquis dès le 25 mars des masques FFP2 pour 300 000 euros, à destination notamment des maisons médico-sociales, des maisons de retraite, des travailleurs médico-sociaux et des aides à domicile. Elles ne peuvent prétendre à aucune aide à ce titre, alors qu'elles ont compensé l'imprévoyance de l'État ! Une prise en charge serait-elle possible ?

Le remboursement de l'État n'est pas à la hauteur, et pénalise des collectivités dont la situation budgétaire déjà tendue : hausse prévisible des dépenses, notamment du RSA, baisse des ressources fiscales - droits de mutation, CVAE notamment.

Le département de la Nièvre devra ainsi absorber plus de 7 millions d'euros, sur un budget de 300 millions.

Il faut revoir les modalités de calcul de la participation de l'État et lancer un vaste plan de soutien aux collectivités pour financer la relance depuis les territoires.

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement .  - Je salue l'action des collectivités territoriales en matière d'accompagnement social et de protection de nos concitoyens. Ministre de la Ville, j'ai travaillé constamment avec elles.

L'ensemble de ces dépenses ont pu fragiliser certaines collectivités. J'ai détaillé précédemment les mesures prises par le Gouvernement, dont la prise en charge d'une partie des commandes de masques. Le Premier ministre a retenu la date du 13 avril pour le remboursement contre le 28 avril initialement.

Le Gouvernement veut aller plus loin dans cet accompagnement. Des facilités financières ont été accordées dès le premier jour. Les conclusions de la mission du député Cazeneuve seront rendues dans quelques jours, le Gouvernement apportera des réponses rapidement. Mme Gourault a en outre adressé une circulaire aux préfets pour les inciter à mobiliser la DETR et la DSIL sur les projets d'investissement prioritaires en cette période.

Aides européennes à l'agriculture biologique

Mme Noëlle Rauscent .  - L'agriculture biologique se développe, sous l'impulsion d'un marché porteur et d'une politique de soutien dans le cadre de la PAC. Ces dernières années, les retards de paiements de ces aides ont mis en difficulté de nombreuses fermes. 2019 aura heureusement été l'année du rattrapage - mais certaines situations restent problématiques. Certains producteurs se voient refuser le paiement de leurs aides, voire infliger des pénalités, sous prétexte qu'ils n'ont pas respecté une règle de rotation des cultures - dont ils n'avaient pas connaissance. La règle n'étant communiquée que deux à trois ans après la demande d'aide, les producteurs n'ont eu aucune marge de manoeuvre pour adapter leurs assolements. Les demandes de remboursement peuvent mettre en péril l'équilibre financier des fermes.

Ces producteurs, qui respectent les cahiers des charges, demandent au ministère de trouver des solutions. L'annulation des demandes de remboursement semble être un préalable, ainsi que le versement des aides demandées.

L'arbitrage ministériel rendu ne donne de solution que pour les éleveurs et prive les céréaliers des aides au bio, ce qui va les fragiliser.

Les producteurs souhaitent tourner la page des retards de paiement, qui ont poussé certains à saisir la justice.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics .  - Je vous prie d'excuser Didier Guillaume.

Comme pour toutes les aides de la PAC, la réglementation européenne prévoit pour les mesures agro-environnementales et climatiques un régime de sanction dissuasif mais proportionné en cas d'anomalie. Du fait des retards de versements des aides, les sanctions n'ont été appliquées qu'à l'été 2019. Certaines s'avèrent disproportionnées. Il est anormal de pénaliser des erreurs commises de bonne foi, plusieurs années de suite, du fait des retards d'instruction.

Les services du ministère de l'Agriculture ont donc revu leurs critères, tout en restant compatibles avec la réglementation européenne. Pour les campagnes 2015-2018, les sanctions seront allégées en cas de répétition. La publication d'un nouveau décret est imminente. Environ 1 500 agriculteurs bénéficieront de ces mesures dès cet été.

Mme Noëlle Rauscent.  - Merci mais vos réponses ne sont pas entièrement satisfaisantes car on impose aux producteurs de rembourser des aides perçues en toute bonne foi, sur la base de règles qu'ils ne connaissaient pas. Encourageons plutôt ceux qui font l'effort de se convertir au bio !

Surfaces pastorales

Mme Patricia Morhet-Richaud .  - L'admissibilité des surfaces pastorales peu productives aux aides PAC est un sujet de préoccupation notamment dans les Alpes du Sud, en raison du relief et des spécificités locales.

Malgré des améliorations, il faut faciliter les déclarations des exploitants et mieux prendre en compte certains critères. La prise en compte des surfaces pastorales a été confirmée par le règlement « Omnibus » du 18 juillet 2018. Mais où en sont les négociations de la PAC 2021-2027 ? La France peut-elle garantir l'éligibilité de ces surfaces pastorales ? Les agriculteurs craignent pour la survie de leurs exploitations et de l'agropastoralisme.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics .  - Veuillez excuser Didier Guillaume.

L'élevage extensif maintient une activité économique cruciale et participe à la biodiversité et à la préservation des paysages. C'est pourquoi la France a défendu et obtenu leur reconnaissance dans le cadre de la PAC actuelle.

Le Gouvernement a étendu la prise en compte de ces surfaces dans 38 départements. Nous nous battons au niveau européen pour conserver cette reconnaissance.

Une réunion avec les professionnels sera reprogrammée prochainement pour faciliter et sécuriser la gestion de ces surfaces. Nous y travaillons collectivement, avec les élus et les organisations professionnelles agricoles.

Mme Patricia Morhet-Richaud.  - Je connais la détermination de Didier Guillaume. Ces aides sont indispensables pour nos territoires, fragilisés par la baisse du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) dans le budget de la future PAC ; la période 2021-2022 s'annonce catastrophique.

La répartition État-région proposée en avril prévoirait une baisse d'un tiers du Feader pour la région Sud PACA, ce qui mettrait fin aux investissements nécessaires au soutien au pastoralisme.

Financement des EPCI sans fiscalité propre

Mme Laure Darcos .  - Les EPCI sans fiscalité propre sont financés par une contribution budgétaire des communes membres. Toutefois, le comité d'un syndicat peut décider de lever les différentes taxes locales - taxes foncières, la taxe d'habitation et la cotisation foncière des entreprises (CFE) - en lieu et place de ces contributions budgétaires.

En 2018, le montant de la taxe d'habitation perçu par les EPCI sans fiscalité propre s'élevait à 90 millions d'euros. Avec la large suppression de la taxe d'habitation, l'imposition sera concentrée sur les taxes foncières et la CFE - donc sur les propriétaires et les entreprises. Dans le contexte actuel de déroute économique, le consentement à l'impôt risque d'être considérablement affaibli. Les entreprises sont exsangues. Des mesures de compensation à la suppression de la taxe d'habitation seront-elles prévues ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics .  - Vous m'avez adressé plusieurs courriers à ce sujet. Un syndicat de communes n'est pas un EPCI à fiscalité propre, donc n'a pas de pouvoir de taux ni la possibilité d'exonérer des contribuables. Son financement provient de la contribution des communes associées.

Dans le silence des statuts, le comité du syndicat est compétent pour réorganiser la répartition entre ces communes. Il peut lever une taxe additionnelle aux quatre taxes directes locales en remplacement de la contribution des communes. Le code général des impôts fixe le taux applicable et la répartition entre les communes - je vous ferai parvenir les détails par écrit.

La suppression de la taxe d'habitation sur la résidence principale conduit à une nouvelle répartition pour permettre la compensation. Le taux de taxe d'habitation est gelé à son niveau de 2019. Il y a bien un report de pression fiscale sur les derniers redevables de la taxe d'habitation, sur la taxe foncière et la CFE. Nous n'avons pas prévu de modifier les règles en la matière, même si j'entends votre interrogation sur l'acceptabilité de l'impôt par le tissu économique.

M. le président.  - Vous avez très largement dépassé votre temps de parole, monsieur le ministre.

Mme Laure Darcos.  - Merci de vos précisions. Cette compensation est indispensable. Les EPCI ont joué leur rôle pour pallier les manques de l'Agence régionale de santé (ARS), notamment pour la fourniture de masques... Ils sont aux abois. Nous serons très vigilants pour le prochain projet de loi de finances.

Concurrence déloyale des non-professionnels du tourisme

M. Max Brisson .  - Depuis le 14 mars 2020, cafés, restaurants et hébergements touristiques sont fermés. Les hôtels et campings se sont exécutés - mais certains hébergeurs individuels ont continué à louer leur logement via les plateformes malgré les arrêtés préfectoraux interdisant toute location touristique saisonnière. C'est une distorsion de concurrence inacceptable pour les professionnels de l'hôtellerie qui ont fait montre d'exemplarité.

Le même protocole sanitaire doit être appliqué partout. Les hôteliers ont établi leur protocole exigeant. Mais il n'y a aucun contrôle pour les non-professionnels, qui mettent à disposition des piscines par exemple, sans contrainte particulière ! Sans approche équitable, les inégalités perdureront. Allez-vous renforcer les contrôles sur les hébergements non professionnels ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics .  - Je salue l'engagement des professionnels du tourisme, durement frappés par la crise du sanitaire, qui ont fait preuve de solidarité en mettant des chambres à disposition des soignants ou des personnes sans domicile fixe.

Les propriétaires de meublés de tourisme comme les locataires ayant violé la loi ont été sanctionnés.

La limite des 100 kilomètres freine la reprise de l'activité, mais le Gouvernement se mobilise pour aider la filière, via des mesures d'urgence : exonération de cotisations sociales patronales, crédit de cotisations de 20%, chômage partiel prolongé jusqu'à septembre, prêt garanti par l'État renforcé, fonds de solidarité prolongé jusqu'à fin 2020. L'enveloppe tourisme de Bpifrance est portée de 250 millions d'euros à un milliard et les banques proposeront le report de mensualité sur douze mois.

M. Max Brisson.  - L'activité hôtelière est encore affectée dans les grandes métropoles. Les mesures d'urgence étaient bienvenues, mais cette crise a révélé un problème structurel de distorsion de concurrence entre la profession hôtelière et une économie plus spéculative que collaborative, qui n'est pas soumise aux mêmes règles.

Situation des travailleurs non-salariés

M. Édouard Courtial .  - Artisans, commerçants, professions libérales, agriculteurs, micro-entrepreneurs représentent près d'un emploi sur dix en France. L'Insee parle de travailleurs non-salariés et non pas de travailleurs indépendants. Ces derniers ont en partage une absence de lien de subordination et une prise de risques professionnels et personnels qui les rend très vulnérables dans ce contexte de crise. La période de confinement les a, pour certains, grandement fragilisés.

Je pense aux auto-écoles de l'Oise partenaires du Pass Permis, dispositif que j'avais mis en place lorsque j'étais président du conseil départemental, qui ont bénéficié de mesures d'urgence : une aide d'urgence de 500 euros leur a été accordée par le département.

Avec mon collègue Arnaud Bazin, j'ai déposé une proposition de loi prévoyant un soutien aux entreprises en cas de catastrophe sanitaire. Y êtes-vous favorable ?

Allez-vous prolonger certains dispositifs au-delà de mai pour les travailleurs non-salariés et surtout supprimer le conditionnement du Fonds de solidarité dans son second volet à l'emploi d'au moins une personne ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics .  - Le Fonds de solidarité est réservé aux petites entreprises et aux travailleurs non-salariés en difficulté financière. Le premier volet permet de compenser la perte de chiffre d'affaires par une aide de 1 500 euros et le second volet prévoit une aide complémentaire de 2 000 à 5 000 euros, pour éviter les licenciements massifs d'où la condition d'emploi d'au moins un salarié, qui a été récemment levée.

Le Fonds de solidarité est sans précédent par son ampleur et son périmètre. Au 24 mai, plus de 2,4 millions de demandes d'aides ont été traitées pour un montant de 3,2 milliards d'euros pour le premier volet et 10 700 aides pour un montant de 30 millions d'euros pour le deuxième volet.

En plus du report de charges fiscales et sociales, nous prévoyons notamment des exonérations ciblées et des reports de paiement de loyers et de factures d'eau, de gaz et d'électricité.

Inquiétudes sur l'avenir de Sanofi dans le Val-de-Marne

Mme Laurence Cohen .  - Depuis 2008, plus de 4 500 emplois ont été supprimés sur les 30 000 du groupe Sanofi, dont 2 500 en R&D qui constitue pourtant le coeur du métier. Un nouveau plan de restructuration vient d'être annoncé, avec 2 milliards d'euros d'économies d'ici à 2022, alors que les bénéfices s'élèvent à 7,5 milliards d'euros en 2019 et que le chiffre d'affaires a progressé de plus de 4 % cette même année. Sanofi a, en effet, décidé d'axer l'essentiel de son activité sur la biotechnologie et d'abandonner le secteur recherche « de petites molécules », se désengageant d'axes thérapeutiques majeurs en termes de santé publique anti-infectieux, neurologie, maladie Alzheimer, diabète, cardiovasculaire...

Alors qu'en 2008, notre pays comptait onze sites de R&D, il n'en reste plus que quatre aujourd'hui. Dans le Val-de-Marne, c'est notamment le site de Vitry-Alfortville qui est touché, avec la suppression de 124 emplois et 142 transferts inter-sites. Fermer ce site est une aberration qui nous mettrait dans une situation de dépendance vis-à-vis des autres pays pour l'approvisionnement en médicaments.

C'est le devenir d'une industrie majeure pour le pays et l'indépendance thérapeutique de la France qui est en jeu. Les sites de recherche sont en train de disparaître de notre territoire, avec un impact direct sur les sites de production au profit d'autres pays, tels que la Chine ou l'Inde.

Allez-vous mettre un terme à ce sacrifice industriel et pharmaceutique ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics .  - Sanofi dispose de 34 sites en France et de 25 000 salariés. Le Gouvernement a récemment rappelé l'entreprise à ses obligations en matière d'accès au vaccin contre le Covid. Sanofi a depuis lors précisé ses intentions.

Concernant notre dépendance aux produits de santé de première nécessité, nous allons engager la relocalisation avec les acteurs du secteur, dont Sanofi, comme nous le faisons dans d'autres secteurs comme les batteries.

Quant aux effectifs de R&D, 5 000 employés de Sanofi y travaillent en France, soit 40 % des effectifs mondiaux. La R&D nécessite une grande réactivité et il n'est pas anormal que ce groupe les réajuste régulièrement.

Le site de Vitry-sur-Seine a reçu plus de 300 millions d'euros d'investissements pour devenir un site de référence en matière de biotechnologie. L'État soutient également le campus Bioproduction dont Sanofi est pilote, porté par un consortium académique et industriel, et implanté à Vitry.

J'espère avoir pu vous rassurer sur l'avenir de la R&D de Sanofi en France.

Mme Laurence Cohen.  - J'ai été agréablement surprise par le début de votre réponse, et patatras... La fermeture du site d'Alfortville ne vous gêne pas. Il faut développer un pôle public du médicament et de la recherche, et donc suivre les préconisations de mon groupe.

En dix ans, Sanofi a reçu 1,5 milliard d'euros de crédit impôt recherche (CIR) ; cela mérite des compensations autres que des licenciements. Le rapport de Mme Gonthier-Maurin sur le CIR a malheureusement été enterré...

Donation au dernier vivant

Mme Jocelyne Guidez .  - Je regrette l'absence de Mme la Garde des Sceaux pour me répondre.

Joseph Joubert définissait la justice comme le droit du plus faible, d'où ma question. Certains enfants, en cas de décès d'un parent, réclament leur part au parent restant, ce qui peut l'amener à vendre une voiture ou sa maison. Les époux peuvent opter pour la donation au dernier vivant : le conjoint hérite certes de la quotité disponible, qui peut être très réduite en fonction du nombre d'enfants. En outre, les frais notariaux de tels actes peuvent paraître rédhibitoires pour certains.

Dès lors que le patrimoine a été constitué par les deux parents, il n'est pas juste que les enfants puissent demander leur part avant le décès du dernier conjoint.

Pour protéger le parent survivant, il conviendrait de modifier le droit en vigueur pour faire de la clause au dernier vivant le principe de droit commun, en ne visant que les couples mariés. Que compte faire le Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics .  - Veuillez excuser Mme la garde des Sceaux.

La loi du 3 décembre 2001 fait du conjoint survivant un héritier légal de premier ordre en l'absence d'un testament : il vient à la succession aux côtés des enfants du défunt et reçoit soit le quart de la succession en pleine propriété, soit l'usufruit de l'intégralité de la succession. La loi du 23 juin 2006 permet au défunt d'en faire son héritier privilégié, à un coût très réduit voire nul. Une donation au dernier vivant devant notaire est possible : les frais sont fixes et encadrés par l'État. Il est possible également de le faire par testament, ce qui est gratuit. La loi fiscale est très avantageuse puisque le conjoint survivant est exonéré de droits de succession.

Aller plus loin n'est pas souhaitable, notamment au regard des évolutions de la société - je songe aux droits des enfants issus d'une précédente union, qui pourraient perdre tout droit à l'héritage si le conjoint survivant héritait en premier.

Le rapport sur la réserve héréditaire remis le 13 décembre nourrira la réflexion à ce sujet.

Mme Jocelyne Guidez.  - J'entends votre réponse mais je ne la partage pas entièrement. Quand mon père est décédé, on m'a demandé si je voulais récupérer la voiture de mes parents... Des améliorations sont donc souhaitables.

Précarité des étudiants français

Mme Marie Mercier .  - Les étudiants français sont beaucoup trop nombreux à vivre sous le seuil de pauvreté. Il y a eu en outre la baisse des APL, l'augmentation du ticket-restaurant, le coût des mutuelles à acquitter. Certains étudiants en sont réduits à s'adonner à la prostitution. Avec le confinement, ils sont rentrés chez leurs parents : le coût des repas a donc augmenté pour les familles et les jeunes n'ont pas pu s'adonner aux petits boulots qu'ils faisaient d'habitude, tandis que leurs loyers continuaient de courir, loyers à la charge des parents.

Ces parents font partie de la grande famille de ceux que j'appelle les travailleurs payeurs : il s'agit de ces personnes qui travaillent mais qui ne peuvent percevoir aucune aide, étant juste au-dessus des seuils d'éligibilité...

Certes, l'aide de 200 euros a été la bienvenue, mais pourquoi ne pas envisager une compensation fiscale pour les bailleurs privés qui réduiraient leurs loyers ?

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation .  - La précarité étudiante est une de nos priorités depuis 2017. J'ai remplacé la cotisation à la sécurité sociale étudiante - plus de 200 euros par an - par une contribution vie étudiante et campus (CVEC) et élargi les aides spécifiques pour les étudiants, qu'ils soient boursiers ou non. J'ai également augmenté les bourses sur critères sociaux de 46 millions cette année.

L'épidémie a rendu encore plus prégnante la précarité étudiante. Avec les représentants étudiants, les établissements d'enseignement supérieur, les Cnous et Crous, nous avons envisagé des aides pour tous les étudiants, qu'ils soient boursiers ou non.

Dès la fin mars, la CVEC a été élevée à plus de 139 millions d'euros pour faciliter les mesures matérielles les plus urgentes : alimentation et numérique.

L'aide spécifique aux étudiants précaires a été augmentée de 10 millions d'euros et une autre aide est réservée aux étudiants qui ont perdu leur stage rémunéré et qui ne bénéficient pas de l'assurance chômage. Enfin, les frais d'inscription seront gelés à la rentrée.

Toutes ces mesures sont prises pour que l'ensemble de la jeunesse, y compris celle issue des classes moyennes, puisse avoir accès à l'enseignement supérieur.

Mme Marie Mercier.  - Merci pour ces précisions. Madame la ministre, je vous encourage à continuer dans cette voie, sans oublier les loyers.

Déroulement des concours durant la crise sanitaire

Mme Françoise Laborde .  - Le déroulement des examens et des concours dans l'enseignement supérieur durant la crise sanitaire fait l'objet de vives inquiétudes.

Pour les concours des classes préparatoires, il y a de fortes incertitudes sur l'hébergement des concurrents, notamment en Île-de-France, en raison de la fermeture des internats. En outre-mer, l'isolement des élèves en raison du décalage horaire est remis en question, ce qui inquiète également.

Les épreuves de première année commune aux études de santé (Paces) ont été maintenues ; à Toulouse, elles ont été modifiées et vidées de leur sens, alors qu'elles réuniront près de 3 000 candidats en lieu clos. Comment assurer le respect des mesures sanitaires ?

Enfin, il n'y a pas de directive claire concernant les étudiants dits à risques ou possiblement atteints du Covid-19. Que compte faire le Gouvernement ?

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation .  - Je salue le travail exceptionnel des établissements du supérieur et des services du ministère face au Covid-19.

Pour les concours, il fallait assurer la sécurité sanitaire des étudiants et des personnels en maintenant l'égalité des chances entre les candidats.

Dès le 24 mars, un comité opérationnel de pilotage interministériel pour les examens et les concours a été institué, dirigé par Caroline Pascal. L'entrée dans l'enseignement supérieur se fera sur dossier et sur la seule base du contrôle continu.

Pour des raisons d'équité, les concours d'entrée aux grandes écoles ont été maintenus : ils se dérouleront entre le 20 juin et le 7 août, parfois sans épreuves orales. Pour les concours d'accès en deuxième année de Paces, ils seront organisés à partir de la troisième semaine de juin. Nous avons préparé un protocole sanitaire validé la semaine dernière par la mission de Jean Castex et le ministère de la Santé.

Je comprends les interrogations mais l'engagement des établissements est à saluer.

Mme Françoise Laborde.  - Je sais que la situation est exceptionnelle mais les problèmes des 1 900 étudiants de Toulouse reste entier : ils se trouveront tous ensemble dans un hall d'exposition : comment dans ce cadre respecter les normes sanitaires ? Quel stress pour eux alors que le Paces reste un concours très difficile et qu'il en va de leur avenir professionnel !

Concernant les futurs professeurs de langues, j'espère que les oraux seront maintenus !

Sauvetage du capillaire ferroviaire

M. Jean Bizet .  - Je souhaiterais interroger Mme la ministre de la Transition écologique et solidaire sur l'enjeu que représente le sauvetage du capillaire ferroviaire pour le fret agricole et alimentaire.

Le fret ferroviaire est un levier majeur de la compétitivité des entreprises de l'agroalimentaire et de l'agro-industrie, il est un atout pour les territoires et pour la transition vers une mobilité plus propre. Responsable de seulement 0,4 % des émissions de gaz à effet de serre, chaque train chargé évite cinquante camions. C'est un outil précieux pour atteindre les objectifs ambitieux fixés par la loi Énergie et climat du 8 novembre 2019.

Pourtant certaines lignes sont déjà fermées pour raisons de sécurité et près du quart de ce réseau de 4 200 kilomètres est aujourd'hui menacé : des travaux de remise en état s'imposent.

Or le maintien en l'état des lignes capillaires ne fait l'objet d'aucun plan national concerté et financé. Les opérations, sur demande de SNCF Réseau, se font au coup par coup et le plus souvent dans l'urgence, ce qui les rend plus coûteuses. Les chargeurs sont mis à contribution, de même que les collectivités locales.

Quelle est la stratégie du Gouvernement pour préserver la compétitivité du fret ferroviaire capillaire ?

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation .  - Le développement du fret est essentiel pour le secteur agricole - un tiers du tonnage des lignes capillaires fret. L'État et SNCF Réseau travaillent depuis 2015 avec les parties prenantes pour définir les conditions de la pérennité de ces lignes. Dans le cadre du plan national concerté, l'État finance la régénération aux côtés de la SNCF et des collectivités à hauteur de 30 % des travaux, sur 35 lignes capillaires fret, soit 885 kilomètres de lignes, la moitié du trafic étant du fret agricole.

L'État poursuivra ses efforts. Jean-Baptiste Djebbari en a fait une priorité et demandera des soutiens financiers européens dans le cadre du Green Deal. Il développe aussi un modèle économique durable, qui prend en compte les lignes déficitaires et le « wagon isolé ».

La stratégie gouvernementale intègre l'ensemble des acteurs, comme lui mobilisés.

M. Jean Bizet.  - Vous parlez de 885 kilomètres, sur un réseau de 4 200 kilomètres : peut mieux faire !

Le recours au fonds européen pour les investissements stratégiques dans le cadre du Green Deal est de bonne méthode. L'investissement de l'État ne représente que 30 % du plan national : le ministère pourrait-il nous fournir le plan de charge de ces investissements ?

Aides à l'assainissement individuel

Mme Nadia Sollogoub .  - Alors que leur onzième programme a démarré le 1er janvier 2019, le budget des agences de l'eau a diminué et leurs missions se sont élargies. Dès lors, l'Agence de l'eau Seine Normandie a changé les critères d'éligibilité à ses aides, ce qui a mis en difficulté certaines communes qui ne sont pas encore aux normes. Elles avaient enfin réussi à convaincre les habitants de procéder aux études préalables, et surtout avaient annoncé des subventions.

Quelles mesures prendrez-vous pour éviter une promesse non tenue et l'abandon des efforts engagés ?

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé .  - Les aides ont été largement débattues dans le cadre du onzième programme des agences de l'eau mais l'assainissement non collectif n'a pas été retenu comme une priorité. L'accent est mis en effet sur la préservation des milieux aquatiques, les zones du littoral, les territoires fragiles de tête de bassin, et les zones d'impact bactériologique sur les zones de baignade.

Quatre communes du territoire que vous mentionnez restent éligibles aux aides. L'Agence de l'eau Seine Normandie examinera en juin la demande portant sur 350 000 euros pour financer 58 installations d'assainissement non collectif à Chevannes-Changy. Les propriétaires qui réhabilitent leur installation d'assainissement pourront bénéficier d'un certain nombre d'aides, notamment de la part des CAF, de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) ou des conseils départementaux.

Mme Nadia Sollogoub.  - La commune de Neuffontaines dans la Nièvre compte 104 habitants ; 50 d'entre eux se sont lancés dans une démarche de réhabilitation de leur installation, grâce au travail pédagogique de la maire. Ils sont soudain privés d'aides. Il y avait assez de pollution pour déclencher les études, mais pas assez pour financer les travaux, remarquent-ils ! Des communes voisines sont restées éligibles, certaines pourtant qui ont un assainissement collectif.

Indemnisation des copropriétaires du Signal

M. Michel Vaspart .  - L'immeuble du Signal à Soulac-sur-Mer en Gironde, menacé par l'érosion littorale, est tristement célèbre. L'indemnisation des copropriétaires devient urgente.

Pour mémoire, ces propriétaires avaient dû quitter leurs logements sur injonction préfectorale en 2014. Depuis lors, ils s'acquittent donc du paiement d'un loyer pour un autre logement, de l'assurance, des frais de syndic de copropriété et pour certains des emprunts immobiliers.

Ils mènent un combat pour une juste indemnisation du préjudice subi. Les élus et spécialement les parlementaires les soutiennent depuis des mois, voire des années.

La situation semblait s'être débloquée fin 2018 avec l'adoption dans la loi de finances d'un amendement fléchant des crédits à hauteur de 7 millions d'euros pour l'indemnisation de ces victimes. Le Sénat s'est prononcé trois fois sur le sujet à la quasi-unanimité. Pourtant, plus d'un an et demi plus tard, on ne connaît toujours pas les modalités de mise en oeuvre.

Pourquoi ce délai scandaleux, qui donne aux intéressés l'impression d'une trahison ?

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé .  - Nulle trahison dans cette affaire. L'ouverture des crédits adoptés dans la loi de finances 2019, reportée à celle de 2020, donne à l'État les moyens d'agir.

Cependant la valeur vénale des lots est très faible et le cadre ad hoc de l'indemnisation n'a pas été créé. Il y a un risque juridique : un juge pourrait estimer qu'il y a versement d'une libéralité. Le législateur ne souhaite certes pas revenir sur le vote du Parlement, mais s'assurer que la mise en oeuvre se fera dans un cadre juridique favorable ; les orientations ont été présentées lors du Conseil de défense écologique du 12 février.

M. Michel Vaspart.  - Depuis dix-huit mois, les ministres de l'Écologie et des Finances se renvoient la balle. Aujourd'hui, c'est le ministre de l'Écologie qui bloque. On va finir par croire que les ministres n'ont plus aucun pouvoir face à une technocratie tentaculaire.

L'avenir de l'enquête publique

M. Antoine Lefèvre .  - La loi du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance et son décret d'application du 24 décembre 2018 tendent à remplacer les enquêtes publiques par une simple consultation électronique du public. Deux régions, la Bretagne et les Hauts-de-France, l'expérimentent pour une durée de trois ans, jusqu'à fin 2021.

Mais un rapport remis au Gouvernement le 23 septembre 2019 a proposé d'accélérer et de simplifier les procédures obligatoires préalables à une implantation industrielle. Le préfet pourrait choisir entre une enquête publique et une simple consultation électronique, ce qui marque une fois de plus la volonté de s'affranchir des acquis de la participation du public.

Une partie de nos concitoyens n'a pas la possibilité de répondre à une enquête sur internet, comme le révèlent les travaux de la mission Illectronisme du Sénat. Le Défenseur des droits parle de recul des droits dans certains territoires.

Les phases obligatoires de consultation des citoyens du pays sont de plus en plus considérées, à tort, comme une perte de temps, un frein à la croissance et à la compétitivité. Or l'enquête publique constitue un dispositif essentiel au service de la démocratie locale, et le meilleur moyen de faire remonter ce qui est ressenti sur le terrain - le commissaire enquêteur n'a aucun lien avec quelque partie que ce soit, il conduit l'enquête publique de manière totalement indépendante.

La dématérialisation de l'enquête publique se ferait au détriment du présentiel et ne ferait qu'augmenter les frustrations, les incompréhensions et accroîtrait les risques de contentieux.

Le Gouvernement maintiendra-t-il l'enquête publique dans sa forme actuelle ? Pouvez-vous confirmer qu'il n'envisage pas un détricotage des garanties exigées par la convention d'Aarhus et le droit européen, concernant l'évaluation environnementale ?

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé .  - L'enquête publique demeure bien la référence et l'accélération des procédures ne concerne que les projets non soumis à évaluation environnementale.

Une expérimentation est conduite en Bretagne et dans les Hauts-de-France en application de la loi Essoc. Un bilan sera adressé au Parlement qui tiendra compte de l'illectronisme et du problème de l'accès au droit. Les dispositifs mis en oeuvre jusqu'à ce jour, je vous rassure, respectent bien la convention d'Aarhus et la directive européenne.

Les délais des procédures ont été gelés dans le cadre de l'épidémie du Covid-19, précisément faute de pouvoir garantir la dimension présentielle, si importante.

Le Gouvernement reste attentif à l'importance de l'enquête publique, pilier majeur de la démocratie participative.

M. Antoine Lefèvre.  - Votre réponse me rassure mais nous resterons vigilants en attendant le bilan de l'expérimentation. Dans ma région, la population souhaite par exemple être associée au développement des projets éoliens.

Frais de transport en ambulance bariatrique

Mme Catherine Deroche .  - Les frais de transport en ambulance bariatrique sont pris en charge par l'assurance maladie, sur prescription médicale, dans un certain nombre de situations - hospitalisation, traitements ou examens pour les patients en affection de longue durée, en rapport avec un accident du travail ou une maladie professionnelle, etc.

L'ambulance bariatrique est spécialement équipée pour des personnes de forte corpulence ou en situation de handicap nécessitant un équipage à quatre personnes, voire plus, et un brancard deux fois plus large. Mais, pour ce type de transport, le remboursement s'effectue uniquement sur la base d'un transport habituel et le reste à charge est très élevé, plusieurs centaines d'euros parfois, ce qui rend la situation insupportable financièrement et entraîne des retards ou des renoncements contraires à l'égal accès aux soins.

Qu'envisagez-vous pour améliorer la prise en charge des frais de transport de ces personnes ?

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé .  - Le ministère est attentif à l'accès aux soins de l'ensemble des assurés. La prise en charge des patients obèses a bénéficié du plan Obésité développé dès 2013. La feuille de route Obésité pour 2019-2022 renforce la structure et la lisibilité de l'offre de transport.

Le Gouvernement a conscience des difficultés que rencontrent ces patients surtout lorsqu'ils doivent faire appel à des transports privés. Le ministre Véran souhaite améliorer la situation : les négociations en cours entre les transporteurs sanitaires et l'assurance maladie traiteront de cette question. Une réponse financière opérationnelle devrait être bientôt apportée.

Mme Catherine Deroche.  - Les négociations conventionnelles avec les transporteurs sont bien le cadre pour traiter le problème. Je vous remercie.

Hôpital support en Ardèche méridionale

M. Mathieu Darnaud .  - J'associe mon collègue Jacques Genest à cette question.

J'ai déposé cette question le 27 janvier dernier, mais l'épidémie est passée par là. L'hôpital d'Aubenas aurait pu jouer un rôle majeur dans le dépistage, s'il avait été déclaré hôpital support.

Avec 330 000 habitants, l'Ardèche est le seul département à ne pas disposer d'une telle structure. Les besoins sont spécifiques, liés aux nombreuses activités sportives et aux activités saisonnières. Le bassin de santé de l'Ardèche méridionale regroupe 100 000 habitants l'hiver mais 300 000 l'été...

Le 11 février, en réponse au député Fabrice Brun, la ministre Christelle Dubos avait annoncé un décret pour créer les commissions médicales de groupement qui permettront à l'Agence régionale de santé (ARS) d'agir. Que de longues procédures ! Le maire d'Aubenas réclame tout simplement le retour de l'hôpital support : le Gouvernement compte-t-il accélérer le processus ?

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé .  - La loi de modernisation du système de santé de 2016 vise à assurer une égalité des soins et à garantir une bonne coopération des établissements sur le territoire donné. La création des GHT exigeait un diagnostic, notamment la définition de périmètres cohérents, pour donner lieu à des projets partagés, structurants, et de nature à corriger les inégalités d'accès aux soins.

La période actuelle nécessite que les professionnels de santé se concentrent sur la crise du Covid. Avant de modifier éventuellement des périmètres géographiques, l'ARS doit procéder à un bilan du fonctionnement des groupements hospitaliers de territoires, dont celui de Sud Drôme Ardèche. Alors seulement elle pourra saisir les instances concernées.

M. Mathieu Darnaud.  - Le Gouvernement a insisté sur les enseignements à tirer de la crise. Renforcer le maillage sanitaire en Ardèche en est un.

Déremboursement de l'Elmiron

Mme Laurence Rossignol .  - En décembre 2019, le ministère de la Santé, à l'époque dirigé par Agnès Buzyn, a pris un arrêté entraînant le déremboursement de l'Elmiron, le seul médicament capable de soulager les douleurs invalidantes liées à la cystite interstitielle, une inflammation de la vessie qui concerne les femmes à 90 %.

Depuis février dernier, lorsque j'avais déposé ma question, le Gouvernement est revenu sur sa décision et un décret a rétabli le remboursement de l'Elmiron, le 11 mai. Ma question n'a plus guère lieu d'être !

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé .  - Le remboursement a effectivement été rétabli par l'arrêté du 14 mai. Les associations de patients ont été prévenues.

Extension de la prime exceptionnelle au personnel médico-social

Mme Agnès Canayer .  - La crise sanitaire a mis en lumière les professions du médico-social, pas toujours reconnues à leur juste valeur.

La députée Agnès Firmin-Le Bodo vous a interrogé à leur sujet. Le Gouvernement a assuré le 11 mai le versement d'une prime exceptionnelle pour les aides à domicile, mais les services d'aides et d'accompagnement à domicile (SAAD) dépendent des conseils départementaux : la prime variera donc en fonction des ressources de ces derniers.

Le département de Seine-Maritime, qui compte 112 structures d'aide à domicile et consacre 82 millions d'euros au soutien aux personnes âgées dépendantes, est particulièrement endetté. Il aura du mal à prendre en charge cette prime.

Mais plus encore, il convient de revaloriser les salaires : 20 % des professionnels du secteur sont sous le seuil de pauvreté ; ils ne gagnent souvent pas plus de 900 euros par mois. Les centres communaux d'action sociale (CCAS) ou intercommunaux (CIAS), comme celui de Fécamp, sont freinés dans l'embauche à temps plein par le plafond de l'exonération des cotisations : il faudrait le relever.

Les tarifs horaires varient également, de 17 à 25 euros.

Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour revaloriser les métiers de l'aide à domicile ?

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé .  - Beaucoup de professionnels s'interrogent sur le versement de l'aide aux professionnels de l'aide à domicile. Cela relève de la compétence des départements. Il en va de même, soit dit en passant, pour les travailleurs sociaux de l'aide sociale à l'enfance (ASE).

L'assurance maladie financera la totalité des primes du personnel des Ehpad. Les personnels des services de soins infirmiers à domicile (SSIAD) en seront aussi bénéficiaires.

Les personnels des SAAD, eux, dépendent des conseils départementaux. Nous en discutons avec Dominique Bussereau, président de l'Assemblée des départements de France (ADF), mais la décision appartient aux conseils départementaux.

Seule la revalorisation des salaires et des carrières permet aux professionnels de se projeter dans l'avenir. Le Ségur de la santé traitera des sujets médico-sociaux. La belle réforme de la dépendance est devant nous. La revalorisation des salaires et des carrières sera débattue dans ce cadre.

Mme Agnès Canayer.  - Trente mille personnes en Seine-Maritime ont besoin de soins à domicile. Au lieu de renvoyer la responsabilité de la prime aux collectivités, il faudrait soutenir politiquement les professions concernées.

Autorisation d'absence des enseignants au titre d'un mandat représentatif

M. Philippe Bonnecarrère .  - L'exercice de mandats électifs par les salariés, notamment en matière sociale, est compliqué. Les salariés doivent pouvoir participer aux conseils d'administration des caisses où ils représentent leurs collègues. Tout employeur a vocation à faciliter cette participation, mais la direction centrale du ministère de l'Éducation nationale tient un discours différent. Il faut trouver une harmonisation avec le ministère de la Santé.

Au titre du premier alinéa de l'article L231-9 du code de la sécurité sociale, « les employeurs sont tenus de laisser aux salariés de leur entreprise membres d'un conseil ou d'un conseil d'administration, d'un organisme de sécurité sociale, le temps nécessaire pour se rendre et participer aux séances ». Un arrêt du Conseil d'État de 1994 étend la disposition à tous les agents de droit public. Or les enseignants de l'enseignement privé se voient refuser par le ministère de l'Éducation nationale une autorisation d'absence pour participer à un conseil d'administration de CPAM ou de CAF, au motif assez curieux d'une absence de disposition réglementaire, alors qu'une disposition législative existe. Comment faire respecter le code de la sécurité sociale ?

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé .  - Malgré le rappel du dispositif législatif du code de la sécurité sociale, certains employeurs refusent de fournir des autorisations d'absence pour de tels mandats.

Les conseils des organismes de sécurité sociale sont régis par le code de la sécurité sociale. Vous avez rappelé le dispositif qui s'applique tant aux agents de droit public que privé. Cela s'applique donc aux agents de l'Éducation nationale. J'ajoute que les organismes de sécurité sociale remboursent les salaires maintenus.

L'article L231-9 est d'application directe. Jean-Michel Blanquer le rappellera aux académies et tous les établissements.

Manque de places en instituts médico-éducatifs

M. Patrick Chaize .  - Malgré des avancées en matière de droits des enfants en situation de handicap, familles et associations de parents sont confrontés à une insuffisante capacité d'accueil des instituts médico-éducatifs (IME).

Avec onze IME et un institut d'éducation motrice (IEM), l'Ain compte 590 places autorisées, soit un taux d'équipement départemental de 3,57 quand celui de la région est de 4,69 et le taux national de 5,11. Il manque cent places en IME dans l'Ain pour atteindre le taux régional.

Des actions ont été engagées dans le cadre du schéma régional de santé Auvergne-Rhône-Alpes. Elles restent néanmoins insuffisantes au regard des besoins.

Il n'est pas concevable qu'un enfant, pour qui l'accompagnement spécifique proposé par les IME est reconnu nécessaire, se retrouve sans autre alternative que d'intégrer un établissement scolaire classique qui lui est absolument inadapté malgré les dispositifs d'aide.

Le Gouvernement entend-il prendre des mesures pour augmenter la capacité d'accueil des IME, dans les départements qui souffrent d'un important déficit de places, comme dans l'Ain ?

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées .  - Nous continuons de créer des solutions variées, selon les besoins. Nous investissons dans les établissements de l'Éducation nationale pour la scolarisation des enfants handicapés dans des conditions favorisant leur réussite.

Dans l'Ain, l'offre médico-sociale représente 540 places en IME, 407 places dans les instituts thérapeutiques éducatifs et pédagogiques (ITEP), 36 places dans les IEM et 553 places dans les services d'éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad).

L'ARS de la région Auvergne-Rhône-Alpes a reçu 10 millions d'euros en 2019-2020 pour des financements complémentaires pour développer l'offre en accompagnant le choix des familles.

Le Président de la République, le 11 février dernier, a rappelé, durant la conférence du handicap, l'objectif d'inconditionnalité de l'accompagnement, impulsant les communautés « 360 » - communautés territoriales d'accompagnement - pour répondre aux difficultés complexes de certains.

L'Ain pourra bénéficier de ces solutions pour respecter chaque choix de vie.

M. Patrick Chaize.  - J'entends les engagements, mais les faits sont là. J'ai rencontré les responsables d'IME. Rétablissons les équilibres entre les départements, au profit notamment de l'Ain.

Accompagnement des enfants handicapés

Mme Christine Herzog .  - Ma question est similaire. Le problème est récurrent, à chaque rentrée scolaire : les demandes d'accompagnement pour les élèves en situation de handicap affluent, mais les moyens ne suivent pas. C'est le cas en Moselle.

Qu'il s'agisse d'obtenir une place dans un établissement spécialisé ou de bénéficier d'accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH), les parents se heurtent à des listes d'attente qui les laissent totalement démunis et isolés. Le déploiement des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) reste insuffisant. De même, la loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance prévoit le recrutement d'AESH, mais les moyens n'ont pas été à la hauteur de l'ambition.

Le 11 février 2020, lors de la cinquième Conférence nationale du handicap, le Président de la République a annoncé que « plus aucun enfant ne serait sans solution de scolarisation à la rentrée de septembre 2020 ». Il a également annoncé le recrutement de 11 500 AESH supplémentaires d'ici à 2022. Comment le Gouvernement compte-t-il atteindre ces objectifs et quels moyens seront déployés à la rentrée ?

Où en est le recrutement des 11 500 AESH ?

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées .  - Garantir une scolarisation de qualité pour les enfants en situation de handicap nécessite une transformation profonde de l'offre médico-sociale et du système éducatif. La coopération entre les deux secteurs est nécessaire. L'adaptation aux besoins des enfants était tout l'enjeu de la loi de 2005.

La loi de 2019 fait rentrer l'école inclusive dans le code de l'éducation. Un service dédié a été créé dans chaque département, incluant l'accélération du déploiement des unités spécialisées pour l'inclusion scolaire (ULIS).

Plus de la moitié des 360 000 enfants handicapés scolarisés bénéficient d'un accompagnement. Cela représente 125 millions d'euros par an. Les 84 % des AESH ont désormais un contrat de trois ans ou un CDI ; plus aucun d'entre eux n'est en contrat aidé. Ces actions seront amplifiées durant la rentrée 2020.

Mme Christine Herzog.  - La fermeture des écoles et le confinement ont accéléré les difficultés de ces enfants. Il est urgent de trouver des solutions.

Prise en charge des enfants handicapés français résidant à l'étranger

Mme Jacky Deromedi .  - Lors de la Conférence nationale du handicap, le Président de la République a pris des engagements importants. Où en est-on de la mise en oeuvre du forfait diagnostic autisme ?

Je veux vous interroger, plus spécifiquement, sur les enfants handicapés résidant à l'étranger ? Il a été annoncé également qu'il n'y aurait plus de départs contraints en Belgique en 2021. Où en est-on ?

L'accompagnement de tous les instants est épuisant pour les familles. Elles ont, parfois, été contraintes de rentrer en France, sans certitude d'avoir une solution.

L'autre solution est de déménager en Belgique, où les handicapés sont bien pris en charge, mais cela pose problème pour les autres enfants et pour l'activité professionnelle des parents. Ils peuvent aussi envoyer leur enfant dans un pensionnat spécialisé en Belgique, où il sera pris en charge... mais séparé de sa famille. Quelles mesures concrètes mettre en oeuvre pour que tout enfant handicapé soit accompagné et pris en charge, qu'il réside en France ou à l'étranger ?

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées .  - Vos préoccupations sont les nôtres. Le Président de la République a appelé à la responsabilité de tous, face à des difficultés immenses. Nous agissons pour trouver de nouvelles solutions. Des financements sont prévus pour éviter des départs non choisis en Belgique, garantir la qualité de la prise en charge là-bas, et développer les logements inclusifs, ainsi que les petites unités pour accueillir les autistes.

Le conventionnement avec les structures belges pour adultes sera généralisé - c'est déjà le cas pour les enfants.

Notre système n'est pas structuré pour bien accompagner. Nous allons créer un numéro unique pour éviter l'errance de porte en porte. Nous devons unir nos forces et construire la suite avec les acteurs locaux. Je les remercie de leur engagement. Pour la sortie de crise, les enfants en situation de handicap sont prioritaires.

Mme Jacky Deromedi.  - Merci de ces efforts. J'aimerais davantage pour les enfants à l'étranger. Certaines familles ne peuvent supporter financièrement ces coûts.

Moyen de paiement des demandeurs d'asile

Mme Patricia Schillinger .  - J'attire l'attention de M. le ministre de l'Intérieur sur la modification du moyen de paiement mis à disposition des demandeurs d'asile et ses conséquences sur la couverture de leurs besoins de base.

La carte d'allocation pour demandeur d'asile (ADA) est devenue une simple carte de paiement sans possibilité de retrait ou d'achat en ligne.

Différentes associations rapportent que ce type de carte est totalement inadapté à ce public. Pour les demandeurs d'asile accueillis en zone rurale, comme à Ferrette, petite ville située dans le département du Haut-Rhin, il est difficile de trouver des commerces où il est possible de régler par carte bancaire, ou alors seulement au-delà d'un certain montant, incompatible avec les faibles ressources dont disposent les demandeurs d'asile. Les boulangeries, La Poste, les transports, les cantines scolaires deviennent inaccessibles.

Le mécanisme de cash back mis en place semble mal fonctionner. La Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) estime que le fait de ne pas disposer librement de leurs ressources attente à la dignité des demandeurs d'asile.

Le Gouvernement va-t-il mettre en place des mesures afin de leur permettre de disposer d'un minimum de liquidités et de préserver ainsi la solidarité fragile durement construite au sein du territoire ?

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur .  - La mise à disposition d'une carte de paiement évite en effet, en limitant la circulation d'argent liquide, que l'allocation serve à d'autres fins que d'assurer des conditions de vie décentes aux demandeurs d'asile : elle a été expérimentée pendant plusieurs mois en Guyane, en lieu et place d'une carte de retrait, sans difficultés majeures et avec des retours positifs des acteurs économiques en particulier.

À Ferrette, le gestionnaire des deux structures d'hébergement s'est engagé à les équiper de terminaux de paiement ; en outre le nombre total de transactions autorisées sera déplafonné.

Une étude de l'OFII (Office français de l'immigration et de l'intégration) montre que les demandeurs d'asile peuvent procéder à de petits achats avec une telle carte de paiement. En novembre 2019, 44 % des transactions ont porté sur un montant inférieur à 10 % de l'allocation.

Alors que les associations craignaient que les demandeurs d'asile hébergés en zones rurales puissent en disposer moins librement, cette carte a été largement utilisée sur l'ensemble du territoire métropolitain.

La mise en oeuvre de cette mesure sera suivie attentivement, en lien avec les associations. Le cas échéant, le dispositif sera adapté pour résoudre des difficultés concrètes.

Mme Patricia Schillinger.  - La petite commune de Ferrette reçoit tout de même plus de cent demandeurs d'asile. Il est important qu'ils soient suivis. Avec le Covid, le commerce de proximité est remis en cause.

Connaissance par les communes du nombre de leurs habitants

M. Olivier Paccaud .  - À l'heure des technologies connectées toujours plus précises, n'est-il pas cocasse qu'aucune commune ne connaisse le nombre exact de ses habitants ?

En effet, il n'y a pas d'obligation de déclaration à l'arrivée dans une commune alors même que plus de 10 % de nos compatriotes changent de lieu de résidence chaque année.

Outre la pratique de la courtoisie et du savoir-vivre, la déclaration obligatoire, permettrait aux communes de disposer d'une vision juste de leur population, afin d'améliorer le fonctionnement de leur service public, en faveur des aînés, ainsi que pour les politiques scolaire, périscolaire et d'accueil de la petite enfance, en n'oubliant personne dans les dispositifs qu'elles mettent en place.

Le recensement ne serait ainsi plus nécessaire et le calcul des dotations de l'État serait plus juste. La déclaration, réclamée par de nombreux élus locaux, serait familiale et dématérialisée, et ferait l'objet d'un récépissé de la mairie, qui servirait aussi de justificatif de domicile.

Un amendement en ce sens que j'ai déposé dans le cadre du projet de loi portant accélération et simplification de l'action publique a été adopté par le Sénat. Sera-t-il maintenu par l'Assemblée nationale ?

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur .  - Le Gouvernement avait alors émis de fortes réserves. D'abord l'exécutif est engagé dans la simplification de normes et procédures ; or ce serait créer une charge en plus. De plus, cela pose un problème eu égard à la collecte de données personnelles : le fichier devait avoir des finalités précises. Enfin le recensement de l'Insee donne satisfaction. Le Gouvernement reste donc défavorable à un tel dispositif.

M. Olivier Paccaud.  - Monsieur le ministre, c'est une demande des élus des petites communes. Le dispositif, vous l'avez reconnu, existe dans d'autres pays européens.

Avenir du fonds européen d'aide aux plus démunis

M. Didier Marie .  - L'avenir du Fonds européen d'aide aux plus démunis (FEDD) inquiète. En fournissant une aide alimentaire et matérielle à seize millions de personnes en Europe, ce fonds constitue le principal outil européen de lutte contre la pauvreté. Il finance, en France, un tiers des repas distribués.

Or, dans le contexte des négociations du nouveau cadre budgétaire européen pour la période 2021-2027, les moyens dévolus à l'aide alimentaire européenne seront largement diminués à partir de 2021.

Doté d'un budget de 3,8 milliards d'euros pour la période 2014-2020, le FEAD devrait en effet fusionner avec le fonds social européen (FSE+), dans lequel le budget de l'aide alimentaire serait compris entre 2 et 3 milliards d'euros pour sept ans. Si un tel scénario est confirmé, l'aide alimentaire européenne subirait une baisse drastique de ses moyens.

L'aide alimentaire représente pourtant un socle incontournable pour lutter contre la pauvreté et ses conséquences, en permettant d'autres mesures d'accompagnement que l'aide alimentaire, comme l'aide à la recherche d'emploi ou à l'accès à la culture et aux loisirs.

Il s'agit de la réponse irremplaçable, car parfois unique, à l'urgence que vivent des millions de personnes en France et dans toute l'Europe. La crise économique et sociale qui se profile, conséquence de la crise sanitaire mondiale, ne manquera pas d'aggraver la pauvreté et la précarité, privant des millions de personnes en France comme en Europe des ressources nécessaires pour avoir accès à une alimentation suffisante.

Le Gouvernement compte-t-il faire de l'aide alimentaire un pilier du fonds social européen, avec un budget dédié et renforcé, et ainsi lui permettre de continuer à répondre aux besoins immédiats des populations ?

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur .  - La protection des plus vulnérables est un volet essentiel de notre action. La France a soutenu l'initiative d'investissement en réponse au coronavirus dite « CRII+ » porté par la Commission européenne qui simplifie l'accès au FEAD en cette période difficile.

Les négociations sur le budget européen 2021-2027 se poursuivent. La Commission européenne propose une fusion de ce fonds avec d'autres au sein du fonds social européen.

Le Président de la République portera avec force la voix de l'Europe sociale pour le financement de l'aide alimentaire. La France défendra résolument le maintien des enveloppes pour les plus démunis. Christelle Dubos a entamé en décembre 2019 une concertation avec les associations du secteur sur la base des recommandations formulées par l'inspection générale des affaires sociales.

Au niveau national, les moyens seront préservés. Le Gouvernement s'y est engagé en ouvrant la consultation des associations en décembre 2019, conformément aux recommandations de l'IGAS.

La France reste attachée au modèle français de l'aide alimentaire, qu'il convient de renforcer dans le contexte épidémique, comme le Gouvernement s'y est engagé et le Président de la République l'a rappelé à plusieurs reprises.

M. Didier Marie.  - Les bénévoles de l'aide alimentaire attendent le soutien du Gouvernement. Espérons que les actes succéderont aux paroles.

Proposition de création d'un délégué interministériel aux enjeux transfrontaliers

Mme Véronique Guillotin .  - La France métropolitaine possède huit frontières et 360 000 travailleurs frontaliers.

La région Grand Est borde la Belgique, la Suisse, l'Allemagne, le Luxembourg. État et élus locaux ont créé des structures pour faciliter la vie quotidienne des frontaliers, et créer des projets communs et durables, comme des plateformes numériques. Ces dispositifs sont très agiles et mériteraient d'être davantage encouragés par l'État.

Mais le dialogue reste très interétatique : il faudrait un interlocuteur au niveau national pour matérialiser l'engagement de l'État, négocier sur un pied d'égalité avec les États voisins et piloter l'action des différents ministères compétents, les élus et les territoires, car malgré nos efforts de ces dernières années, les relations peuvent rester très déséquilibrées de part et d'autre de la frontière : des territoires fragiles doivent négocier avec un État économiquement très puissant.

Pourquoi ne pas créer un poste de délégué interministériel aux questions transfrontalières ?

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur .  - Nous avons une stratégie par frontière, afin d'encourager la coopération transfrontalière, sous l'égide d'un ambassadeur dédié. Cette coopération est une dimension de plus en plus importante de la construction européenne. Avec l'Allemagne, elle est encadrée par le traité d'Aix-la-Chapelle. Nous envisageons un traité analogue avec l'Italie. Nous avons d'autres projets avec d'autres voisins.

Les efforts dans ce domaine doivent être en phase avec les directives de l'Union européenne et une bonne coordination nationale : c'est le rôle de l'Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT), par nature interministérielle, qui compte un préfet pour les questions transfrontalières.

La libre circulation du personnel français de santé employé par nos voisins suisses et luxembourgeois est, on l'a vu, un enjeu crucial. Cela mérite un suivi interministériel encore plus coordonné et structuré.

Mme Véronique Guillotin.  - Oui, la coordination est indispensable. Il faut un dialogue d'État à État, en particulier avec le Luxembourg.

Écoles d'architecture

Mme Sylvie Robert .  - L'enseignement de l'architecture a fait ces dernières années l'objet d'une attention particulière : plusieurs rapports ont marqué la nécessité de l'inscrire dans les dispositifs de l'enseignement supérieur et de la recherche et de lui affecter des ressources à la hauteur de ses missions de formation initiale et continue, mais aussi de recherche et d'expertise.

En 2018, deux décrets relatifs aux écoles nationales supérieures d'architecture (ENSA) ont procédé à une importante réforme du statut des établissements. Mais l'écart entre l'ambition théorique affichée et la réalité des budgets est très grand.

La dépense moyenne pour un étudiant d'une ENSA s'élève à 7 597 euros, soit un investissement inférieur de 35 % à celui pour un étudiant dans le supérieur. De surcroît, les dotations par étudiant selon les ENSA sont très inégales, créant ainsi une rupture d'égalité manifeste entre étudiants, sans explication ni justification aucune. Pas moins de soixante postes administratifs restent vacants, ce qui contraint les enseignants-chercheurs à assumer des tâches qui ne sont pas les leurs.

Répondez aux besoins humains et financiers des ENSA, pour leur permettre d'accomplir sereinement leurs missions, d'autant plus importantes en période post crise sanitaire.

M. Franck Riester, ministre de la culture .  - La réforme de 2018, aboutissement de plusieurs années de réflexion et de concertation, rapproche les ENSA du modèle universitaire. Cinq décrets l'ont mise en oeuvre, conservant l'autonomie des ENSA et renforçant leur ancrage territorial.

Elles se sont vu confier une mission d'expertise des politiques publiques d'architecture, du patrimoine, d'urbanisme et des paysages auprès des collectivités territoriales. Les questions financières et humaines n'ont pas été oubliées. Le recrutement des enseignants-chercheurs a été adapté. Quelque soixante-cinq postes ont été créés, des contractuels ont été titularisés. Le nombre de titulaires atteint 66 %.

Pour autant, je ne suis pas sourd aux inquiétudes que vous relayez et qui sont exprimées par les établissements. Je recevrai prochainement les directeurs et présidents de conseils d'administration. Les postes administratifs vacants seront publiés immédiatement, en complément de ceux publiés en 2019 et de ceux recrutés au concours en 2021 ; ainsi, 149 enseignants-chercheurs pourront être recrutés dès 2020. Une mission de l'inspection générale de l'administration des affaires culturelles a été lancée sur le bilan d'étape de la réforme.

L'enjeu du patrimoine immobilier des écoles est crucial : ces ENSA occupent 195 000 mètres carrés vieillissants. Le 4 mars, j'ai ouvert une réflexion sur l'avenir de la formation et de la recherche en architecture.

Mme Sylvie Robert.  - Plusieurs écoles étaient en grève avant le confinement. Ce chantier est essentiel, au vu des enjeux écologiques. Il convient d'assumer une rentrée sereine ; nous comptons sur vous pour le projet de loi de finances pour 2021.

Violences sexuelles dans les sports de montagne

M. Cyril Pellevat .  - Depuis quelques mois, le sport français est secoué par une accumulation inédite de révélations de cas de violences sexuelles et de viols. Fin février 2020, vous avez annoncé, madame la ministre, une série de mesures pour lutter contre ce fléau, créant une cellule ministérielle dédiée à ce sujet, chargée de suivre les affaires qui sont signalées à ses services.

Pourtant, dans le cadre du groupe d'études du Sénat sur la montagne que je préside, il a été fait état du dysfonctionnement de cette plateforme, lors d'une audition consacrée aux violences sexuelles dans les sports de montagne. La personne auditionnée, pourtant impliquée dans la défense des victimes, nous a informés des difficultés à trouver le courriel ou le numéro de téléphone permettant de contacter cette cellule. Quelles sont les modalités de saisine ? Le ministère des Sports a-t-il suffisamment communiqué sur son existence pour en faire un outil efficace de lutte contre les violences sexuelles ?

N'aurait-il pas fallu créer une cellule ad hoc, indépendante des fédérations et du ministère, pour garantir sa pleine impartialité ? Aucune enquête n'a été mise en oeuvre sur les allégations de violences sexistes révélées à l'École nationale de ski et d'alpinisme (ENSA), malgré les témoignages. Les victimes méritent plus de soutien. Qu'allez-vous faire ?

Mme Roxana Maracineanu, ministre des sports .  - Cette question vous honore : il s'agit de la capacité de nos pouvoirs publics de protéger nos enfants. Depuis mon arrivée au ministère, la question des violences dans le sport fait l'objet d'une libération de la parole. Nous avons écouté, agi, on m'a même accusée de me désolidariser du mouvement sportif dont je suis issue. Les éducateurs sont admirables, mais il ne faut pas fuir nos responsabilités.

Des dispositifs nouveaux ont été créés, comme le contrôle d'honorabilité des bénévoles. Tous les faits font l'objet d'un contrôle administratif et d'un signalement au procureur de la République. C'est le cas aussi pour l'École nationale des sports de montagne (ENSM), où la chaîne de responsabilité a fauté à tous les étages. L'enquête est en cours ; les premiers résultats seront connus en juin.

Pouvons-nous faire mieux ? Sans doute. Mais le ministère et ses agents sont plus mobilisés que jamais. Si la parole des victimes sportives se libère, c'est sans doute qu'elles se sentent soutenues. Sachez en tout cas que nous ne faiblirons pas.

M. Cyril Pellevat.  - Je vous remercie. Je fais moi aussi partie du monde du sport et je sais vos difficultés. Nous souhaitons que les enquêtes aboutissent pour sanctionner les fautifs.

Communication des archives de la défense nationale

M. Pierre Laurent .  - Une application du décret du 2 décembre 2019 restreint l'application de l'instruction générale interministérielle 1300 (IGI 1300) de 2011. Celle-ci consiste à soumettre d'innombrables documents tamponnés « secret » de la période 1940-1970, jusqu'ici accessibles librement, à une procédure de déclassement longue et fastidieuse. Elle entraîne aussi des délais de communication très longs, voire l'impossibilité d'accéder à des archives pourtant communicables de plein droit selon le code du patrimoine. Les chercheurs usagers des archives publiques françaises, en particulier du service historique de la défense, sont depuis peu dans l'impossibilité de consulter des documents postérieurs à 1940 qui devraient être accessibles selon la loi, au prétexte qu'ils ont été tamponnés « secret » lors de leur production.

Cela concerne notamment toutes les pratiques opérées dans les terres alors colonisées par la France. Cette restriction peut avoir des conséquences dommageables pour la recherche historique et la réputation de la France en ce domaine. En outre, elle criminaliserait toute personne qui divulguerait des informations contenues dans des archives estampillées « secret Défense » qui depuis des années voire des décennies ont été massivement communiquées. Pour toutes ces raisons, de nombreux acteurs, dont un collectif de douze historiens de divers pays, mais aussi les membres du comité pour la mémoire de Josette et Maurice Audin, expriment une vive inquiétude et demandent à ce que l'IGI 1300 et ses modalités d'application soient réexaminées. Que comptez-vous faire ? Quel a été le rôle du Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) dans l'élaboration du décret du 2 décembre ?

Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d'État auprès de la ministre des armées .  - Le ministère applique la loi et les règles, celles de communicabilité après 50 ans posées par le code du patrimoine et celles édictées par le code pénal sur la protection du secret, renforcées par l'instruction générale de 2011. L'obligation de protection qui s'impose a été rappelée mi-juillet 2019 par le SGDSN.

La mise en oeuvre de cette protection entraîne des délais globalement longs. En aucun cas, le service historique ne ferme des fonds dont la consultation est indispensable au travail de mémoire.

Conscientes de la gêne occasionnée pour les chercheurs, nous avons prévu des adaptations d'application immédiate avec Florence Parly. Seuls les documents classifiés par des autorités extérieures au ministère de la Défense restent concernés, car le chef du service historique des archives de la défense peut décider de déclassifier les documents de plus de 50 ans.

Nous avons autorisé une déclassification au carton des archives pour la période 1940-1946. Elle devait être étendue. Quelque 30 agents supplémentaires seront recrutés et affectés à la déclassification.

M. Pierre Laurent.  - Un exemple pour montrer les incohérences : le Président de la République a décidé d'ouvrir les archives dans l'affaire Maurice Audin. Sans les mesures de déclassification, le travail des historiens serait entravé pour aller jusqu'au bout de la vérité.

La séance est suspendue à 12 h 40.

présidence de M. Philippe Dallier, vice-président

La séance reprend à 14 h 30.

Rappels au Règlement

Mme Éliane Assassi .  - Demain, le Parlement sera saisi d'une déclaration du Gouvernement sur la mise en place de l'application StopCovid, suivie d'un vote, au titre de l'article 50-1 de la Constitution.

Comment ne pas s'étonner du retour de ce projet que nous pensions enterré car trop tardif et inefficace ? Comment ne pas s'émouvoir de la place réservée au Parlement alors que le Gouvernement a déjà annoncé que l'application était prête à être mise en oeuvre dès ce week-end ? Les propos de Cédric O, qui conditionne ce calendrier au vote du Parlement, mettent une pression inacceptable sur celui-ci. Le peu de cas fait du vote négatif du Sénat sur le plan de déconfinement montre que notre avis importe peu à l'exécutif.

Le 13 mai, le Premier ministre avait indiqué que la décision serait prise après le nécessaire débat au Sénat. Pourquoi dès lors annoncer la mise en oeuvre de StopCovid avant tout débat ? Pourquoi une telle précipitation ? M. Cédric O nous apprend que l'application sera disponible dans les magasins Apple et Android dès ce week-end. Le naturel de la Start-up nation revient au galop : le commerce avant tout, la promotion des géants du numérique même pour une mission régalienne de protection de la santé publique. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances .  - La commission des finances est fort agacée. Nous étions réunis les 21 et 22 avril pour examiner un projet de loi de finances rectificative d'urgence. Le Sénat avait joué le jeu, siégeant jusqu'à 3 heures du matin. Nous avions voté à la quasi-unanimité un amendement ramenant à 5,5 % la TVA sur les masques, gels et équipements de protection. Le 26 mai, l'arrêté n'est toujours pas paru. Les collectivités territoriales, les Ehpad paient toujours un taux de 20 %. Pourquoi les services de l'État ne sont-ils pas capables de sortir cet arrêté, vu l'urgence ? Nous avions retenu une rédaction compatible avec les textes européens pour lever tout obstacle de ce côté. La volonté du Parlement est-elle respectée ? Il est permis d'en douter. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Vincent Éblé et Franck Menonville applaudissent également.)

M. le président.  - Acte est donné de vos rappels au Règlement.

Dispositions urgentes liées à la crise sanitaire (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne.

Discussion générale

M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Voilà deux semaines que la France sort progressivement du confinement. Nos concitoyens sont désormais dans l'attente des futures étapes : levée des restrictions à la circulation, ouverture des bars et restaurants, vacances d'été. Ils aspirent à retrouver ce qui fait le sel de la vie sociale. Nous devons nous réjouir de cette impatience à vivre ensemble.

La période reste cependant source de contraintes, voire d'angoisse car le confinement a aussi été protecteur, sur le plan économique, social et sanitaire. Au désir de se retrouver répond l'inquiétude sur le jour d'après. Face à ce paradoxe, nous devons avancer sur une ligne de crête. Se précipiter, étymologiquement, c'est tomber la tête en avant... Prudence et pragmatisme, telle est la philosophie de ce projet de loi. Protéiforme, il garantit la continuité des services publics, avec des mesures concernant les militaires, les réservistes de la police nationale ou la réserve civique. Les administrations ont dû suspendre certaines activités ; résultat, des réformes doivent être reportées, sur le divorce, la justice pénale des mineurs ou encore l'outre-mer.

D'autres mesures visent à faciliter la reprise de la vie économique et sociale, sur le prêt de main-d'oeuvre, les travailleurs saisonniers, les dérogations aux contrats d'insertion et contrats courts ou l'intéressement dans les TPE. Les garanties de protection sociale complémentaire sont maintenues pour les salariés au chômage partiel, et votre commission des affaires sociales a autorisé la dérogation aux règles de cumul emploi-retraite pour les soignants pendant la durée de l'épidémie.

Des mesures diverses, comme l'indemnisation des victimes des essais nucléaires, le statut des volontaires internationaux en ambassade ou la gestion des fonds européens par les régions, ont été placées à l'article 2, compte tenu du calendrier parlementaire contraint du mois de juin et de l'automne.

L'article 3 habilite le Gouvernement à centraliser le dépôt sur le compte du Trésor des disponibilités des personnes morales soumises aux règles de la comptabilité publique et d'organismes privés chargés d'une mission de service public. Votre commission y est opposée sur la forme ; nous proposerons son rétablissement.

L'article 4 concerne le Brexit. Amélie de Montchalin vous le détaillera.

Enfin, l'article 5 prévoit un contrôle parlementaire des mesures réglementaires prises sur le fondement des habilitations prévues.

Ce texte concerne un grand nombre de périmètres ministériels ; c'est pourquoi je vous répondrai au nom du Gouvernement.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois.  - Nous y sommes sensibles.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Certains le qualifient de texte « fourre-tout », mais l'examen de seize textes particuliers aurait été une gageure.

Je comprends le peu d'enthousiasme sur le recours aux ordonnances mais il est ici justifié par l'incertitude à court terme. Dans son avis rendu public, le Conseil d'État a validé le procédé. Le projet de loi initial comportait quarante habilitations ; seize ont été mises « en clair » à l'Assemblée nationale ; après le passage en commission des lois, il n'en reste plus que dix. Nous poursuivons en séance le travail de clarification.

Conscient de la nécessité de préserver les droits du Parlement pendant la période d'habilitation, le Gouvernement ne s'est pas opposé au mécanisme de contrôle prévu à l'article 5.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Quel orateur...

M. Marc Fesneau, ministre.  - Le délai prévu pour prendre les ordonnances passe de trois à six mois compte tenu des incertitudes pesant sur la reprise économique et du calendrier des négociations du futur budget européen.

Des divergences opposent le Gouvernement à votre assemblée : c'est la vertu du débat parlementaire. (Mme Marie-Pierre de la Gontrie s'amuse.) Je salue les trois rapporteurs qui ont enrichi le texte et confirmé plusieurs dispositions votées à l'Assemblée nationale. Je souhaite que nous trouvions ensemble un compromis.

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes .  - Ce projet de loi habilite le Gouvernement à prendre par ordonnances plusieurs mesures nécessaires pour tirer les conséquences de la fin de la période de transition, dans le contexte du Brexit. Le feuilleton dure depuis déjà plus de trois ans.

L'accord entré en vigueur le 1er février marquait l'aboutissement de deux ans de négociations difficiles menées par Michel Barnier. Il préserve les droits acquis des citoyens européens vivant au Royaume-Uni, qui pourront continuer à y vivre, y travailler et y étudier dans les mêmes conditions qu'aujourd'hui, et réciproquement pour les Britanniques installés sur notre territoire.

Une deuxième négociation a démarré le 2 mars ; elle doit aboutir d'ici la fin de la période de transition, fixée au 31 décembre - celle-ci pouvant être prolongée d'un an ou deux, à la demande des Britanniques. Jusque-là, le droit de l'Union s'applique au Royaume-Uni. Ensuite, seul l'accord de retrait et, le cas échéant, celui sur la relation future, s'appliqueront.

Nous souhaitons un accord ambitieux, équilibré, qui couvre le champ du commerce, de la pêche, des transports, de la sécurité, tout en préservant les principes et les intérêts de l'Union. Cela prend du temps. (M. Jérôme Bascher ironise.)

Les 27 sont unis, la mobilisation totale, mais les incertitudes sont grandes. La contrainte de temps est inédite : il ne reste que six mois de discussion que les Britanniques refusent à ce stade de prolonger, alors que l'épidémie nous a fait perdre deux mois précieux de négociation. Les discussions ont repris en visioconférence depuis deux semaines.

Sur le fond, les négociations sont très difficiles et les derniers échanges ont été peu constructifs. Les propositions des Britanniques sont très éloignées du mandat confié à Michel Barnier. Des divergences demeurent sur la pêche, la gouvernance de l'accord, les conditions de concurrence équitable. Il est hors de question pour nous de céder à l'approche sélective des Britanniques : il faut avancer au même rythme sur tous les sujets. Nous ne sacrifierons pas les intérêts de nos pêcheurs, agriculteurs, entreprises et citoyens, au prétexte d'un accord dans les délais et aux conditions britanniques.

Il faut donc nous préparer à tous les scénarios, y compris l'absence d'accord à la fin de la période de transition. C'est l'objet de l'habilitation demandée à l'article 4, qui reprend le modèle prévu en janvier 2019 dans l'hypothèse d'une sortie sans accord, en l'actualisant. Il traite de sujets non couverts par l'accord de retrait, ou qui pourraient se présenter en cas d'absence d'accord sur les relations futures, dans un souci de précaution.

La France est respectueuse des compétences de l'Union européenne et n'entrave nullement la négociation en cours.

Certains s'interrogent sur la méthode des ordonnances mais le contexte incertain et le calendrier contraint l'imposent. (M. Jérôme Bascher s'exclame.) Gouverner, c'est prévoir ; prévoir, c'est anticiper. Nous devons pouvoir adopter rapidement des mesures pour protéger nos citoyens et nos entreprises en cas d'absence d'accord.

Le Parlement continuera à être informé et à exercer son contrôle : je suis toujours prête à être auditionnée devant vous.

La durée de l'habilitation a fait débat à l'Assemblée nationale. J'ai été parlementaire, je sais que le Parlement répugne à être dessaisi de ses prérogatives, mais il ne peut y avoir de bon accord dans la précipitation. Je préfère prendre 18 ou 30 mois pour protéger nos pêcheurs, nos agriculteurs, nos entreprises, plutôt que de conclure coûte que coûte à la fin de l'année.

Le choix d'allonger la période de transition revient aux Britanniques ; ils s'y refusent aujourd'hui mais personne ne peut exclure une évolution. Les députés ont réduit le délai de l'habilitation de 18 à 15 mois. C'est un compromis que je vous propose de rejoindre. L'important est aussi d'adresser un message politique aux Britanniques.

L'article 4 concerne la circulation des personnes et des marchandises, de certains matériels de défense soumis à licence, la protection des détenteurs de contrats d'assurance-vie et de PEA, la situation des ressortissants britanniques en France. Cette dernière disposition, qui s'inspire de la loi de janvier 2019, a été supprimée en commission.

Cette habilitation permet de traiter des situations qui n'ont, par définition, pas encore été identifiées - je pense par exemple aux professions soumises à des conditions d'exercice liées à l'appartenance à l'Union. Elle n'est pas un blanc-seing pour le Gouvernement, mais répond à un principe de prudence. Nous sommes engagés dans une négociation sans précédent. Une première étape a été franchie et j'espère que nous trouverons un accord ambitieux avec le Royaume-Uni. Peut-être n'aurons-nous pas à faire usage de cette habilitation, mais il faut parer à toute éventualité. Je suis prête à revenir devant vous aussi souvent que vous le souhaitez.

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Nous le souhaitons.

Mme Muriel Jourda, rapporteur de la commission des lois .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Ce projet de loi comportait initialement quarante demandes d'habilitation à légiférer par ordonnances. C'était désobligeant pour le Parlement... Si nous pouvons entendre l'argument de l'urgence, je rappelle que le Parlement s'est toujours montré à la hauteur des enjeux de cette crise, et a toujours été là. Nous avons été saisis de six textes, dont deux projets de loi de finances rectificative, toujours dans des conditions d'extrême rapidité. À chaque fois, nous avons trouvé un accord. Le dernier texte est passé sous les fourches caudines du Conseil constitutionnel grâce aux garanties apportées au texte à l'initiative de Philippe Bas.

Le Parlement n'a pas failli : l'enjamber était donc pour le moins vexatoire - d'autant que nombre de dispositions pouvaient sans difficulté être intégrées dans la loi, de l'avis même du Conseil d'État.

Le Parlement peut être chatouilleux pour la bonne raison que c'est au Parlement que se tient le débat démocratique. Le Gouvernement a entendu nos réserves et l'Assemblée nationale a ramené à vingt-quatre les demandes d'habilitation ; après le passage en commission des lois, il en reste dix, chiffre qui devrait encore baisser.

Notre commission des lois a appliqué strictement l'article 38 de la Constitution. Nous avons vérifié que les habilitations demandées étaient suffisamment précises, ni trop importantes ni trop indéfinies. Enfin, nous les avons limitées dans le temps : de six à trente mois initialement, puis de six à quinze mois après passage à l'Assemblée nationale, la durée est passée de trois à sept mois. Le délai pour un projet de loi de ratification est passé de trois à deux mois.

Ce projet de loi est un peu fourre-tout, voire « gloubi-boulga » selon certains. D'où la difficulté à synthétiser son contenu. Certaines mesures sont en lien avec l'épidémie, comme la fin anticipée des saisons sportives ou encore la réorientation des procédures pénales.

D'autres reportent certaines réformes, notamment en matière de justice. D'autres encore ont été prises pour pallier l'arrêt de la navette parlementaire - sur la loi ASAP, les victimes d'essais nucléaires ou encore le droit de la consommation.

Je veux m'arrêter sur les mesures relatives à la justice, marqueur de notre État de droit. Cette justice doit s'incarner dans un système judiciaire qui fonctionne correctement pour que ses principes restent crédibles. Or le système judiciaire dysfonctionne, car les juridictions n'ont pu traiter que les urgences pendant la crise sanitaire. Il va de la crédibilité de la justice d'apurer le stock de dossiers mis de côté - mais pas au mépris des principes de l'État de droit. Nous en reparlerons, qu'il s'agisse des cours criminelles ou du report de l'entrée en vigueur de l'ordonnance sur la justice pénale des mineurs, qui n'a jamais été débattue devant le Parlement. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales .  - Deux sujets ont mobilisé l'attention de la commission des affaires sociales : le droit du travail et les retraites.

Il faut légiférer dans l'urgence certes, mais pas au-delà de ce que la situation de crise commande, et si possible en connaissance de cause. Nous avons exclu les habilitations trop larges, les dispositifs permanents, les chiffres trop approximatifs - avec le regret de devoir légaliser des décisions déjà prises, parfois à fort impact financier.

Le dispositif d'activité partielle a été l'un des plus généreux d'Europe. Il a permis de maintenir le statu quo au niveau de l'emploi, mais incite peu à la reprise d'activité. Le projet de loi habilite le Gouvernement à prévoir des règles différentes d'un secteur à l'autre pour cibler le soutien public sur les entreprises les plus en difficulté.

Les nouveaux paramètres d'indemnisation des salariés au chômage partiel relèvent du décret. Le Gouvernement a déjà annoncé une réduction à compter du 1er juin pour certaines activités. Il faut une adaptation à plusieurs vitesses du dispositif pour inciter à la reprise de l'activité tout en limitant l'impact social de la crise économique.

Des interrogations demeurent sur les paramètres à modifier et l'impact attendu. Nous espérons des précisions du Gouvernement.

Indemnisation du chômage, mandats des conseillers de prud'hommes et d'autres mesures souvent ponctuelles pouvaient être inscrits en clair dans la loi. La commission des affaires sociales a limité dans le temps les possibilités de déroger aux règles de renouvellement des CDD et des contrats de développement territorial (CDT). Elle a validé les mesures sur l'usage des réserves des régimes complémentaires des indépendants, artisans et commerçants, à hauteur d'un milliard d'euros. Elle a limité à la période de crise sanitaire le champ du dispositif de couverture des droits à la retraite, car il y avait un problème de chiffrage et de pérennisation dans le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il manque aussi une base législative sur le cumul emploi retraite des aides-soignants.

Le Parlement n'est pas là que pour régulariser, n'en prenez pas l'habitude.

M. le président.  - Il faut conclure.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Des annonces sur le déconfinement seront faites d'ici la fin du débat. Ne traitons pas les départements différemment selon leur couleur ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur pour avis de la commission des finances .  - Ce texte peut être qualifié de fourre-tout. Les risques juridiques liés au Brexit pour les détenteurs d'assurance-vie ou l'adaptation des règles pour les plans d'épargne en actions (PEA) sont quelques-unes des mesures qui ont intéressé notre commission.

L'article 3, délégué au fond à la commission des finances, habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance dans un délai de douze mois, les mesures destinées à prescrire le dépôt sur les comptes du Trésor des disponibilités des personnes morales soumises aux obligations de la comptabilité publique, mais également des organismes publics ou privés chargés d'une mission de service public.

L'article 26 de la loi organique relative aux lois de finance prévoit une obligation similaire pour les collectivités territoriales. Les montants de dépôt représentaient 128,4 milliards d'euros au 31 décembre 2019.

La centralisation de ces dépôts ne revient pas pour l'État à se les approprier : il joue le rôle de teneur de compte. Des dérogations restent possibles. Ce système présente des avantages en matière de gestion des deniers publics en réduisant le coût des émissions pour l'État. Rappelons que cette année, l'État va devoir emprunter 324,6 milliards d'euros sur les marchés !

La commission des finances ne s'oppose pas sur le fond à cette centralisation, mais ne partage pas la méthode du Gouvernement. Le champ de l'habilitation est beaucoup trop large. Le Gouvernement a même dû préciser devant l'Assemblée nationale que les caisses de retraite, les fédérations sportives ou les ordres professionnels ne faisaient pas partie des organismes concernés. Pouvez-vous nous citer un seul organisme qui soit effectivement concerné ? On peut s'interroger sur la nature réglementaire ou législative de la mesure.

Enfin, le Gouvernement n'a toujours pas commencé à négocier avec les organismes concernés. Mieux vaudrait donc attendre. En conséquence, la commission des finances a supprimé l'article 3. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Sylvie Vermeillet et M. Jean-Marc Gabouty applaudissent également.)

M. Marc Fesneau, ministre.  - Un arrêté portant sur les taux de TVA concernant les masques et les gels hydroalcooliques est paru le 7 mai dernier. Je vous répondrai ultérieurement sur les tenues de protection.

Question préalable

M. le président.  - Motion n°1, présentée par M. Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain.

En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi relatif à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne (n° 454, 2019-2020).

M. Éric Kerrouche .  - « La vie démocratique doit reprendre tous ses droits » disait le Premier ministre, vendredi dernier. La démocratie parlementaire aussi.

Les crises ont un pouvoir révélateur. On légifère dans la précipitation, à l'aveugle, les débats sont écourtés, parce que, « quoi qu'il en coûte », il faut assurer la conformité des textes. Et pourtant le Parlement est bien l'endroit où l'on parle, où l'on fait la loi ; tous les citoyens ont le droit de concourir à cette loi par leurs représentants.

Le recours massif aux ordonnances ne relève pas seulement de l'urgence mais traduit le refus de débattre du Gouvernement. Parmi les quarante demandes d'habilitation, certaines servent à pallier des retards, ou à recycler des dispositions arrêtées dans le cours de la navette.

Tout cela se passe au mépris des droits du Parlement. Nous sommes autorisés par le Gouvernement... à nous taire. Or une habilitation n'est pas une délégation du pouvoir législatif, le Parlement conserve le monopole de faire les lois et les ordonnances ne sont qu'une extension momentanée du pouvoir réglementaire.

Guy Carcassonne rappelait que pour faire de bonnes lois, on n'a pas inventé mieux que le Parlement. Et les ordonnances, ces textes défectueux dont les malfaçons se révèlent a posteriori le prouvent. Les ordonnances sont une législation de chef de bureau qu'il faut utiliser avec modération.

Fort heureusement, les quarante demandes ont été ramenées à dix. Et les articles de loi - initialement quatre - ont été multipliés par huit.

Ce texte est un texte Frankenstein et le Gouvernement en déposant des amendements de séance en quantité industrielle l'aggrave encore.

Mal légiférer à cause d'un texte initial médiocre et d'un débat limité, cela n'est pas satisfaisant ; pire, cela nuit aux intérêts des Français.

Les pratiques déjà à l'oeuvre sont exacerbées, concentration des pouvoirs, Parlement accusé d'immaturité ou d'absence de réactivité, multiplication des procédures accélérées, textes troués par des ordonnances, refus des consultations exigées par la démocratie sociale...

La crise n'autorise pas le dessaisissement du Parlement. D'autant qu'il s'est adapté pour assurer ses responsabilités. L'économie ne doit pas s'effondrer, certes ; la démocratie parlementaire non plus. Or, petit à petit, l'accoutumance à un Parlement atrophié s'installe. C'était bien, du reste, la perspective de votre réforme constitutionnelle... Or quand le Parlement est malmené, la démocratie en sort affaiblie.

Dans l'histoire, il y a des contrastes. D'aucuns ont filé la métaphore martiale. Pourtant, même en temps de guerre, le Parlement n'a pas toujours été muselé. Churchill, peut-être parce qu'il vivait dans le berceau de la démocratie parlementaire, soumettait chaque décision à débat. On peut faire la guerre et vaincre sans passer au-dessus du Parlement. Le bon fonctionnement des institutions participe de la confiance collective, du pacte républicain.

C'est pourquoi nous lançons une alerte et avons déposé cette motion. La crise ne trouvera pas de solution dans la verticalité mais dans la dialectique des échanges et la consultation des corps intermédiaires. Jamais Créon ne pourra gouverner sans Antigone. Il est temps que notre démocratie retrouve tous ses droits. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR ; Mme Éliane Assassi applaudit également.)

M. Philippe Bas, président de la commission des lois.  - Cette motion ne manque pas de fondement. Elle résonne comme un coup de semonce.

Si l'on ne peut affirmer que ce projet de loi est contraire à la lettre de la Constitution, dans sa conception extensive de l'article 38, il y a tout de même une distorsion énorme entre la volonté des constituants et l'application actuelle. De fait, l'article 38 précise que c'est pour appliquer « son programme » que le Gouvernement peut demander au Parlement de l'habiliter à prendre des ordonnances.

Or le programme, selon l'article 49 de la Constitution, ce sont les engagements par lesquels le Gouvernement engage la responsabilité du Gouvernement.

Rien de tel ici ! Ce sont des dispositions périphériques, techniques, qui sont concernées, nous sommes loin du programme. C'est pourquoi j'ai longuement hésité avant de prendre la parole pour m'opposer à cette motion.

Mais si nous nous opposions à la discussion de ce texte, le Gouvernement mènerait un dialogue singulier avec l'Assemblée nationale, ou plus exactement un monologue à plusieurs voix devant l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Didier Marie s'amuse.)

Il ferait adopter un nombre bien plus élevé d'habilitations. Grâce au bicamérisme, le nombre de celles-ci a été d'abord ramené de trente-sept à vingt-quatre, puis notre rapporteur propose de les faire baisser à dix. Adoptons donc ces dix ordonnances ; le Gouvernement reviendra si besoin devant le Parlement.

C'est pourquoi Mme Muriel Jourda m'a autorisé à prendre la parole à sa place pour m'opposer, au nom de la commission des lois, à cette motion. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Marc Fesneau, ministre.  - Il est difficile de parler après le président Bas...

Je ne partage pas la qualification de « texte médiocre », monsieur Kerrouche, s'agissant de ce projet de loi. Il n'est pas médiocre de se préoccuper des travailleurs saisonniers, des étudiants, du chômage partiel, sujets qui intéressent les Français.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Facile !

M. Marc Fesneau, ministre.  - Ce texte, tout comme la crise, est protéiforme. Nous devons régler de nombreux problèmes qui sont à la fois complexes et imbriqués.

Le Sénat et l'Assemblée nationale nous ont demandé d'écouter le Conseil d'État. Celui-ci a demandé d'inscrire en dur certaines recommandations ; nous l'avons fait. Ce travail a été effectué à l'Assemblée nationale et se poursuit au Sénat.

Je ne partage pas toute l'analyse du président Bas. De fait, la vie politique est empreinte de rapports de force, il peut aussi arriver que nous soyons d'accord.

Monsieur le président, je partage votre conviction sur le bicamérisme. Le dialogue permanent entre les deux assemblées est utile pour la qualité de la loi et il offre au Gouvernement des regards différents, ce qui est également précieux.

Oui, le Parlement a su s'adapter et prendre ses responsabilités. Nous pouvons nous retrouver sur cette idée. Dans les contingences sanitaires récentes, dans l'urgence parfois, nous avons tous pris nos responsabilités. C'est ce que nous devons aux Français.

Avis défavorable à cette motion.

M. le président.  - L'adoption de la motion entraînerait le rejet du projet de loi.

La motion n°1 n'est pas adoptée.

Discussion générale (Suite)

M. Didier Marie .  - Ce projet de loi ne nous convient pas.

D'abord, la méthode : depuis plusieurs mois, le Gouvernement veut un Parlement aux ordres : systématisation de la procédure accélérée, recours massif aux ordonnances, conditions déplorables d'examen des textes. Ces problèmes ont été amplifiés par la crise. Celle-ci exige de nous d'agir vite, mais pas au mépris du Parlement. Nous n'acceptons pas d'être dessaisis de notre capacité à faire la loi. Ne nous habituons pas à ce que vous confiniez le Parlement !

Le texte est la quintessence de votre conception du Parlement : quarante ordonnances, un vrai fourre-tout, un salmigondis, une chevauchée de cavaliers législatifs : quel rapport entre la justice des mineurs, les chèques-restaurant et la vente à perte avec le Brexit ?

Je salue le travail de la commission des lois pour réduire le nombre des habilitations et diminuer leurs délais de validité. Je salue également la suppression de l'article 3 par la commission des finances unanime, car il aurait permis au Gouvernement de faire main basse sur la trésorerie de plusieurs organismes dont nous n'avions même pas la liste !

Nous regrettons que la commission des lois ne nous ait pas suivis sur le fond, la majorité sénatoriale ayant souscrit à quelques mauvais coups : l'article premier decies porte ainsi atteinte aux droits des travailleurs en assouplissant l'encadrement des contrats à durée déterminée (CDD) comme aux contrats de mission. De même les besoins de main-d'oeuvre agricole ont conduit le Gouvernement à porter à neuf mois la durée annuelle de travail autorisée pour les étudiants étrangers, ce qui nuit à leurs études. Vous appelez cela pragmatisme, c'est de l'utilitarisme...

L'extension des cours criminelles, sans recul, nous inquiète, de même que le report de la réforme de la justice des mineurs.

L'article 4 sur le Brexit mérite un débat à part entière, après le 1er juillet, quand le Royaume-Uni aura dit s'il souhaite ou non prolonger la période transitoire. Nous proposerons la suppression de cet article.

Il faut répondre à l'urgence sociale. Nous avons déposé des amendements sur la prolongation du chômage partiel, la gratuité des masques, la confirmation du droit à l'IVG, le droit de séjour sécurisé, le soutien aux collectivités, le maintien du versement des pensions alimentaires par les caisses d'allocations familiales,... Nous regrettons l'usage extensif de l'article 45 de la Constitution par la commission des lois, qui nous prive d'un débat sur de nombreux sujets, alors que le texte est vide de mesures sociales.

Mme Josiane Costes .  - Ce texte est une compilation de dispositions disparates. Les conséquences du Brexit côtoient les contrats de travail, les titres-restaurants... Il y manque de la cohérence et de la clarté.

S'y ajoutent les délais d'examen que le contexte sanitaire ne saurait justifier. Ce texte condense tous les défauts d'une évolution néfaste du travail législatif : procédure accélérée, habilitation à légiférer par ordonnances, loi fourre-tout qui rappelle le triste souvenir des lois Warsmann. Bien sûr, des accommodements étaient rendus nécessaires par la crise : le Sénat a réorganisé ses travaux. Mais le présent texte traduit une déconsidération du Parlement.

Puisqu'il est impossible de traiter tous les sujets, je me concentrerai sur quelques points.

Je me félicite des aides pour ceux qui en ont le plus besoin, prolongation des titres de séjour, maintien de la protection sociale complémentaire pour ceux qui ont une activité partielle, contrats d'insertion, ou mobilisation des réserves des caisses complémentaires des indépendants...

Les conséquences de cette crise sont multiples et inconnues. L'État doit s'adapter : c'est le cas avec le fonds de soutien aux restaurateurs. Les problèmes actuels nécessitent une adaptation par des accords d'entreprises. Mais il ne faudrait pas qu'ils deviennent la norme.

On ne peut que se satisfaire de la diminution de la durée d'application des ordonnances sur le Brexit. Nombre de questions techniques, urgentes, doivent certes être traitées par ordonnance, je pense au maintien des licences pour le transfert vers le Royaume-Uni des matériels de défense, ou aux dispositions relatives aux plans d'épargne et à l'assurance-vie. Mais le régime des ressortissants britanniques sur le territoire national ou les questions relatives au tunnel sous la Manche exigent la délibération parlementaire.

Le groupe RDSE soutient les amendements de la rapporteure concernant la durée d'habilitation, le potentiel effet rétroactif de certaines ordonnances et l'information des parlementaires. Il y va de la mission de contrôle du Parlement.

La qualité de la loi est un impératif démocratique. Le groupe RDSE sera attentif aux débats pour déterminer son vote final. Transparence, dialogue parlementaire sont nécessaires à la réussite de toute politique. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE)

M. Thani Mohamed Soilihi .  - Notre pays traverse une crise sanitaire sans précédent, avec d'importantes conséquences sanitaires, économiques et sociales, d'où plusieurs projets de loi déposés par le Gouvernement afin d'aménager le cadre juridique existant.

Certes, les délais d'examen sont courts. Comme les Français, nous privilégions le télétravail, qui complique notre tâche, mais l'urgence commande et le législateur a dû adapter ses conditions de travail.

Je ne suis pas friand du recours aux ordonnances, même si certaines sont utiles, en raison de l'urgence ou du caractère technique du sujet.

De nombreuses dispositions ont été inscrites en dur dans le texte. Le Conseil d'État était favorable à une telle démarche, le Gouvernement et le Parlement l'ont appliquée. Le travail devrait se poursuivre en séance, dans le cadre d'une démarche commune de clarification.

Le contrôle du Parlement sur la mise en oeuvre des ordonnances, introduit à l'Assemblée nationale et précisé par le Sénat, rassurera ceux qui craignent un hold-up démocratique. Les droits du Parlement sont préservés.

Ce texte répond à de nombreux problèmes, compte tenu de la multitude des secteurs touchés par la crise. Fourre-tout ? C'est un texte dense. Il vise à accompagner la reprise de l'activité.

Le groupe LaREM a déposé un amendement pour revenir à la rédaction de l'Assemblée nationale, plus protectrice, sur la durée annuelle de travail pour les étudiants étrangers. Nous souhaitons la transformation des CDD en CDI dans la fonction publique. Il était nécessaire également d'ajuster le dispositif d'activité partielle, pour les entreprises qui ont dû rester fermées.

Membre de la commission des lois, j'ai vu que l'extension de l'expérimentation des cours criminelles était un sujet sensible. J'espère néanmoins que nous trouverons des points d'accord en séance.

Je salue le report opportun de certaines réformes civiles ou pénales. Cela permettra à l'autorité judiciaire d'être prête - et à nous, de mener les auditions, qui ont déjà commencé, sur la justice des mineurs.

Les dispositions relatives à l'outre-mer n'auraient pas trouvé d'autre vecteur législatif que ce texte, notamment la prolongation de l'activité des agences des 50 pas géométriques en Guadeloupe et Martinique, comme de la commission de l'urgence foncière à Mayotte.

Je présenterai un amendement visant à garantir le calendrier de création du conseil des prud'hommes de Mayotte.

Je souhaite que se poursuive ici un travail commun de clarification. Certes, des points de divergence demeurent, sur la durée d'habilitation des ordonnances, notamment sur le Brexit. Mais nous ne savons pas quand reprendra l'activité économique normale, ni combien de temps durera la période de transition. Gardons de la souplesse.

Nous débattrons aussi de la centralisation des trésoreries publiques : le but est de limiter l'endettement public et l'appel aux marchés.

Mme Christine Herzog .  - L'article 3 habilite la France, pour douze mois, à transférer les trésoreries publiques sur le compte du Trésor public. Cela privera les collectivités territoriales des ressources des intérêts et elles perdront leur faculté de gestion autonome.

Le moment est mal choisi : cette perte de recettes serait un frein supplémentaire à l'autonomie fiscale des collectivités territoriales, tandis que les dotations reculent, que la taxe d'habitation est supprimée, et que la gestion de l'épidémie impose des dépenses supplémentaires.

Il ne faut pas fragiliser davantage les collectivités territoriales à l'heure de la reprise. Je soutiens donc la suppression de l'article 3. Ce sera une condition indispensable pour voter l'ensemble du texte.

Mme Éliane Assassi .  - Ce projet de loi est une énième illustration d'une désinvolture assumée du Gouvernement à l'égard du Parlement et de la démocratie parlementaire, lequel a pourtant montré toute sa réactivité face à la crise.

Vous lui demandez une délégation de son pouvoir législatif dans de multiples domaines, en droit social, droit de la consommation, droit pénal, finances publiques, droit d'asile, droit européen, sur le code de la défense et celui de l'environnement, sans rapport avec la gestion de la pandémie, aux seules fins de faire l'économie d'un débat de fond et d'éviter d'avoir à vous justifier devant les députés et sénateurs, en faisant fi du principe constitutionnel de clarté de l'élaboration de la loi. La seule ligne directrice de ce texte sans cohérence interne est de pallier les retards pris par le Gouvernement en amont de la crise sanitaire.

En cette période de méfiance de la population à l'égard de l'exécutif, comment accepter ce blanc-seing que vous nous demandez ? Il reste encore à ratifier cinquante ordonnances plus anciennes. Comment accepter l'instrumentalisation de l'urgence sanitaire pour nous départir de notre pouvoir législatif pour un temps anormalement long ?

Nous saluons le travail de la commission des lois qui en a réduit le nombre. Comment accepter des mesures qui nuiront aux Français ? Certaines mesures sont liées à la crise sanitaire, mais d'autres représentent des attaques en règle contre le droit du travail, le pouvoir judiciaire ou en faveur d'intérêts particuliers, y compris électoraux.

Quelle urgence y a-t-il à favoriser l'ouverture de la saison de la chasse alors que les déplacements sont réduits ? Que dire des conséquences de l'assouplissement des règles de renouvellement des CDD ou de l'intérim, encore aggravé par la commission des affaires sociales ? Quelle urgence à légiférer sur les dispositifs d'intéressement prévus par la loi ASAP ?

Rien n'est prévu s'agissant des conditions de travail des saisonniers. Au lieu de proposer un plan de relance avec des filets de sécurité pour tous, le texte étend la précarité et casse des acquis sociaux.

Le recours aux ordonnances, malgré sa limitation à dix, infantilise le Parlement. Nous revendiquons le respect de notre légitimité démocratique.

Malgré la crise, la démocratie, percutée de plein fouet, doit rester debout. Sinon, il y aurait atteinte aux valeurs de liberté, d'égalité, de fraternité, auxquelles nous sommes tous très majoritairement attachés. L'urgence ne justifie ni la précipitation ni l'entrave du Parlement. Nous ne voterons pas ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SOCR)

M. Franck Menonville .  - Le PIB s'est contracté de 5,8 % au premier trimestre, un record depuis 1949, et la crise à venir sera d'une ampleur considérable. Nous devons nous y préparer ; c'est l'objectif de ce texte. L'économie redémarre doucement et nous devons apporter aux entreprises la flexibilité dont elles ont besoin. C'est le sens de l'assouplissement du renouvellement des contrats courts. Un régime d'intéressement pourra être mis en place dans les TPE pour trois ans. Nous croyons en l'intérêt de cette mesure pour la reprise, à condition qu'il y ait création de richesses.

Nous souhaitions que les EPCI puissent gérer directement certaines aides aux entreprises. Hélas, notre amendement, dû à l'initiative d'Emmanuel Capus, a été touché par l'article 41. L'exécutif recourt beaucoup aux ordonnances, mais nous nous bridons parfois nous-mêmes...

M. Loïc Hervé.  - Très juste !

M. Franck Menonville.  - La fonction publique a besoin de souplesse : des contrats, ceux des chercheurs notamment, pourront être prolongés ; les pensions civiles et militaires pourront être cumulées avec les revenus d'activité dans les hôpitaux publics ou privés au plus fort de la crise, ce dont nous nous félicitons.

La situation des travailleurs étrangers a besoin d'être clarifiée ; ils sont nécessaires aux secteurs agricole et viticole, très fragilisés par la crise. À cet égard, je soutiens les correctifs apportés à la loi EGalim par la commission.

Les étudiants étrangers présents en France au 16 mars pourront également travailler de manière dérogatoire à 80 % jusqu'à la reprise des cours. La société doit reprendre au même titre que l'économie.

La justice a accumulé un retard considérable. Il faudra mettre en oeuvre des moyens exceptionnels sans entraver pour autant les règles de procédure, notamment le choix public des jurés d'assises.

Le texte très divers aborde près de quarante sujets. L'Assemblée nationale a réduit à vingt-quatre le nombre d'ordonnances, la commission des lois du Sénat à dix.

Durant la crise, le Parlement a fait preuve de réactivité en votant pas moins de cinq lois depuis la fin mars. L'heure est à la reprise, mais cela ne doit pas conduire à contourner le débat parlementaire par un recours excessif aux ordonnances.

M. Loïc Hervé .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Pour la première fois depuis douze semaines, les délais d'examen d'un texte permettent de l'améliorer.

Notre groupe a apporté un appui constructif au Gouvernement pendant la crise. Il fallait agir vite, mais la situation est désormais différente. L'état d'exception doit faire place à l'état ordinaire.

Aussi, le recours massif aux ordonnances ne se justifie plus, comme le reconnaissait le Conseil d'État. L'Assemblée nationale puis le Sénat en ont donc réduit le nombre. Hélas, toutes ne seront pas ratifiées. Or seule la ratification donne son sens à l'habilitation. C'est aussi dommageable à la qualité de la norme. Au-delà de l'urgence, les parlementaires ont du mal à se dessaisir. Il faut donc utiliser la notion d'urgence avec gravité et parcimonie. Je salue à cet égard le travail des rapporteurs : clarté de la rédaction, rétablissement des consultations obligatoires, réduction du nombre d'ordonnances et de leur délai.

Le texte comprend des mesures trop diverses et pas toujours urgentes. Il faut les examiner à l'aune de trois critères : urgence, rattrapage ou opportunité. Un double impératif s'impose : répondre à la crise et anticiper, accompagner la reprise du pays et le préparer aux échéances futures comme le Brexit.

Nous partageons l'objectif du Gouvernement. Face à un risque de récession inédit, il est nécessaire de préparer notre pays en soutenant les entreprises et en relançant l'économie. Nombre de mesures nous semblent ainsi nécessaires pour réamorcer la pompe et éviter le chômage de masse. D'autres, à l'instar de la neutralisation des trésoreries de certains acteurs publics à l'article 3, manquent de préparation et de précision.

Il faut prévoir une meilleure définition de son périmètre. Du reste, la commission des finances a proposé sa suppression.

Je me réjouis qu'avec Catherine di Folco, co-rapporteure du projet de loi de transformation de la fonction publique, nous ayons pu faire adopter trois amendements permettant notamment : l'élargissement, hors état d'urgence sanitaire, de la mise à disposition à titre gratuit des agents territoriaux ou hospitaliers auprès des hôpitaux ou des Ehpad, selon la volonté des employeurs publics ; ou encore la « neutralisation » des effets de l'état d'urgence sur la transformation de CDD en CDI dans les trois versants de la fonction publique.

Le groupe UC votera ce texte et sera attentif à sa mise en oeuvre. (« Très bien ! » et applaudissements sur les travées du groupe UC)

M. Michel Canevet.  - Excellente intervention !

Mme Catherine Di Folco .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le Conseil d'État a constaté dans son avis la grande diversité des sujets traités par ce texte. Le travail parlementaire s'en trouve plus difficile. En outre, l'étude d'impact semble parcellaire. Aussi, nous condamnons la méthode retenue. Le texte initial prévoyait quarante habilitations, pas toujours urgentes. Après l'Assemblée nationale, nos commissions ont réalisé un travail remarquable. Nous remercions les rapporteurs, fidèles au souci du Sénat d'améliorer la loi.

Pour autant, le texte manque encore de clarté. Parfois, le recours aux ordonnances se justifiait, comme le 23 mars. Il ne doit pas cependant être systématique. Il est heureux que leur nombre soit désormais réduit à dix après l'inscription de certaines mesures en clair comme celle relative aux adjoints de gendarmerie ou la représentation des salariés dans les TPE.

Nous sommes circonspects sur l'expérimentation dans trente départements des cours criminelles : laissons-la de côté, afin de procéder, le moment venu, à une évaluation rigoureuse de cette expérimentation en fonction de ses seuls mérites.

L'article 3 a été supprimé par la commission des finances, faute d'information suffisante. Nous attendons des précisions avant un éventuel rétablissement.

Ce projet de loi assez baroque interroge par sa forme plus que par le fond. Après le travail de bonification et de toilettage mené par les commissions, nous le voterons. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Monique Lubin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR) Ce projet de loi nous interpelle par ce qu'il contient et ce qu'il ne contient pas.

La crise a été d'une exceptionnelle gravité. Vous avez su prendre certaines mesures exceptionnelles pour y faire face comme le chômage partiel qui a évité des faillites en nombre.

Les dispositifs liés à la crise doivent certes être adaptés, mais le Parlement et la démocratie sociale ne peuvent être mis de côté au nom de l'urgence. Le texte assouplit les conditions de renouvellement des contrats courts mais, dans les entreprises, les syndicats peinent parfois à se faire entendre. Vous libéralisez le régime des CDD alors que vous annoncez protéger les plus précaires.

Depuis le 11 mai, la France revient doucement à la vie, mais de manière contrastée. Le Président de la République a changé de discours : après avoir fustigé sur un quai de gare ceux qui ne sont rien, il rend hommage à ces femmes, fort nombreuses, et à ces hommes qui ont tenu le pays depuis le 15 mars.

Nos secteurs économiques les plus florissants, tels l'automobile ou le tourisme, sont désormais dans l'incertitude. Il faut tracer des perspectives immédiates. Or le projet de loi qui arrive au début du déconfinement ne déconfine pas grand-chose. (Sourires) Il faudrait détricoter votre politique fiscale, votre vision élitiste de la société, où seule la Start-up nation avait droit de cité, votre réforme du chômage, votre discours lénifiant sur l'égalité femmes-hommes qui ne débouche sur rien de concret.

Il faut des mesures concrètes, courageuses, qui remettent au coeur de la société ceux qui la maintiennent au quotidien et ceux qui en sont exclus, après un véritable débat parlementaire. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR)

M. Ladislas Poniatowski .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Ce projet de loi est un texte fourre-tout qui pose des problèmes de principe quant aux droits du Parlement. La crise sanitaire ne justifie pas tout.

J'ai été rapporteur de la loi du 19 janvier 2019. L'article 4 en est le petit frère. La commission des affaires étrangères en a débattu la semaine dernière par visioconférence.

Les négociations se passent très mal. Des blocages de fond demeurent sur des sujets cruciaux comme la pêche ou la concurrence équitable. Des tensions subsistent notamment sur l'Irlande. Nous ne sommes pas loin de l'impasse.

Toutes les majorités ont utilisé des ordonnances. Cependant, nous ne pouvons pas accepter des habilitations balais pour combler les oublis du Gouvernement. L'Assemblée nationale a ramené le délai de trente à quinze mois. C'est mieux qu'initialement.

J'apporte mon entier soutien à la nouvelle rédaction de l'article 4 par la commission des lois avec un délai d'habilitation réduit à sept mois.

La crise ne doit pas nous faire perdre de vue le Brexit. Les citoyens britanniques restent bienvenus sur notre territoire contrairement aux commentaires désobligeants qu'on a entendus la semaine dernière. La réciprocité doit s'appliquer : s'il y a quarantaine pour les Français arrivant au Royaume-Uni, elle doit s'appliquer aussi en France pour ceux en provenance du Royaume-Uni. Enfin, n'oublions pas que les entreprises aussi doivent se préparer car les conséquences du Brexit viendront malheureusement s'ajouter au cataclysme économique qui s'annonce. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Marc Fesneau, ministre .  - Ce texte prolonge des mesures de protection des salariés. Comment dire, monsieur Marie, qu'il est antisocial ?

Quant à l'article 3, voilà une vingtaine d'années que les collectivités territoriales émargent déjà à une disposition de ce type à hauteur de 130 milliards d'euros. Comment dire que nous ferions main basse sur je ne sais quel argent des uns ou des autres ? Cela répond aussi à Mme Herzog.

Nous profiterions de l'état d'urgence sanitaire ? Il n'y a aucun profit à faire. Nous ne faisons qu'adapter des mesures, dont certaines sont intéressantes, avez-vous reconnu.

Il n'y a aucun risque que la démocratie soit bâillonnée et je m'en réjouis. Je me réjouis, monsieur Mohamed Soilihi, du soutien constant de votre groupe et de votre vigilance sur certains sujets, notamment l'outre-mer.

Monsieur Menonville, nous nous mobiliserons sur la relance et sur les questions d'intéressement.

Madame Costes, vous vous déterminerez à l'issue du débat. J'espère que votre vote sera un bon juge de paix de la qualité des débats... Je comprends la vigilance que vous souhaitez exercer.

Madame Di Folco, je n'ai pas éludé la question : ce texte aborde beaucoup de sujets. C'est une nécessité car la crise n'est pas sectorielle, mais totale. La lisibilité du texte en souffre, mais les citoyens ont besoin que l'on réponde à leurs difficultés dans toute leur diversité. C'est à l'étape du plan de relance que nous pourrons développer une vision globale.

Madame Lubin, ce texte tente d'éviter et de limiter la précarité. Rien n'est jamais parfait et le texte du 23 mars avait besoin d'être prolongé. Tout l'objet du débat à suivre sera de limiter les conséquences économiques et sociales de cette crise.

Monsieur Poniatowski, la crise sanitaire ne justifie pas tout, c'est vrai. Mais elle nécessite beaucoup de choses et notamment d'avancer pour un certain nombre de sujets. Je ne préjuge pas de l'article 4 dont nous débattons. Mme de Montchalin va vous répondre sur le Brexit.

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État .  - Monsieur Marie, vous aviez souhaité un débat après le 1er juillet.

La crise sanitaire bouleverse le calendrier parlementaire qui sera chargé à l'automne, comme à l'accoutumée. Il ne nous a pas semblé judicieux de pousser les épargnants à liquider leur épargne par manque de visibilité. D'où notre volonté d'agir dès à présent.

Madame Costes, pourquoi avons-nous besoin d'une ordonnance sur le tunnel sous la Manche ? Parce que nous voulons maintenir le caractère dual, mais unifié, de la commission intergouvernementale sur la sécurité ferroviaire au sein du tunnel. Peut-être n'avons-nous pas besoin de recourir à l'ordonnance, mais nous préférons pouvoir l'utiliser si les négociations avec les Britanniques venaient à échouer. Mais nous devons anticiper et nous ne voulons pas d'un accord coûte que coûte. Si le gouvernement britannique souhaite négocier douze mois de plus, comme nous le voudrions, il nous faut être prêts à le faire.

Madame Assassi, nous ne sommes pas désinvoltes (Mme Éliane Assassi affirme le contraire.) et le Brexit est une urgence. Nos entreprises, nos agriculteurs et nos pêcheurs ne doivent pas pâtir de la double peine : crise économique et sociale et choc du Brexit. (Mme Éliane Assassi s'exclame.) Anticiper, prévoir et protéger, telle est notre ligne.

Monsieur Hervé, il n'y a pas d'opportunisme dans l'article qui a trait au Brexit. Nous voulons encourager tous les Français à se préparer. Le Gouvernement prévoit les divers scénarios mais ne peut pas tout. Un accord de libre-échange n'exempte pas de tous les contrôles. Les Français nous le demandent, d'ailleurs, et il en va de la crédibilité de l'Union européenne.

Monsieur Poniatowski, vous estimez qu'un délai de quinze mois est trop important et vous nous recommandez la vigilance sur les mesures balais. Certaines résultent d'angles morts, avec par exemple les conditions d'exercice de certaines professions libérales non couvertes par l'accord de retrait ni par l'accord commercial. Nous devons préserver la capacité des ressortissants britanniques à poursuivre leur activité en France.

Si vous estimez que nous pourrons obtenir un bon accord en sept mois, je vous suis. Mais nous n'avons pas réuni aujourd'hui les conditions d'une bonne négociation. M. Barnier ne dit d'ailleurs pas autre chose.

Une bonne négociation doit préserver nos intérêts pour les dix à vingt ans à venir. Le Gouvernement vous demande donc de lui faire confiance pour les quinze prochains mois car il souhaiterait négocier douze mois de plus avec les Britanniques. Mais le veulent-ils ? Ce que nous demandons, c'est un signal politique du Parlement. Aucune manigance là-dedans. Nous devons nous unir face aux Britanniques pour soutenir Michel Barnier...

M. Ladislas Poniatowski.  - Rien sur la quarantaine !

La discussion générale est close.

Exception d'irrecevabilité

M. le président.  - Motion n°269, présentée par Mme M. Jourda, au nom de la commission des lois.

Constatant que les amendements nos154, 223, 40, 161, 213 et 148 visent à étendre le champ d'une habilitation à légiférer par ordonnances et qu'ils sont contraires au premier alinéa de l'article 38 de la Constitution, le Sénat les déclare irrecevables en application de l'article 44 bis, alinéa 10, de son Règlement.

Mme Muriel Jourda, rapporteur .  - Le Parlement ne peut pas transférer ses pouvoirs par habilitation de manière trop large, ni pour trop longtemps. Il ne peut pas non plus étendre une habilitation à légiférer par ordonnance, comme le font ces amendements, d'où cette exception d'irrecevabilité.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Le Gouvernement partage l'analyse de la commission des lois. L'article 38 de la Constitution s'applique. Avis favorable.

La motion n°269 est adoptée et les amendements nos154, 223, 40, 161, 213 et 148 sont déclarés irrecevables.

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

M. Max Brisson .  - J'appelle votre attention sur la situation exceptionnelle que connaissent les acteurs des champs artistiques et culturels, notamment les établissements publics de coopération culturelle. L'ordonnance du 22 avril 2020 les a exclus du dispositif d'activité partielle, malgré les assurances données par le ministère quelques jours auparavant. Le ministre de la Culture déclarait quelques jours après qu'il allait faire en sorte que toutes ces mesures soient applicables aux établissements publics à vocation industrielle et commerciale relevant des collectivités territoriales. Or certains établissements publics se sont vus ensuite signifier qu'ils n'étaient pas éligibles à ce dispositif. Si cette décision se confirmait, elle marquerait une rupture majeure pour ces établissements dont les budgets auront à supporter pendant plusieurs années les effets du confinement et la charge en reviendrait aux collectivités en lieu et place de l'État.

Une telle disposition n'est pas acceptable en France, pays de la culture. La commission de la culture s'inquiète du risque d'écroulement du secteur de la culture dans notre pays.

Mme Esther Benbassa .  - L'article premier devait habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance sur une trentaine de sujets importants très divers : une vraie liste à la Prévert... L'Assemblée nationale et la commission des lois du Sénat ont heureusement vidé pour moitié cet article de sa substance ramenant plusieurs sujets dans le champ législatif sans recourir à l'article 38 de la Constitution.

Notre système démocratique est bâti sur la capacité du Parlement à contrôler et corriger si nécessaire l'action gouvernementale. Souffrez donc que nous existions et que nous nous exprimions.

M. Jean-Pierre Sueur .  - Mes collègues l'ont excellemment dit lors de la discussion générale : le jury populaire est plus qu'une tradition dans notre pays ; c'est une forme d'exercice de la justice rendue au nom du peuple français.

Une expérimentation a été développée dans quelques départements pour mettre en oeuvre des cours criminelles départementales. Une expérimentation nécessite une évaluation. Or voilà qu'à la faveur de la crise sanitaire, on voudrait étendre l'expérimentation à trente départements. C'est intolérable, ce n'est pas respectueux du droit et nous soutiendrons l'amendement de Muriel Jourda. Nous irons plus loin encore sur la justice des mineurs. La garde des Sceaux nous avait promis une immense concertation avec le Parlement. Pourquoi alors une ordonnance ? Sur un sujet si important, nous demandons un projet de loi et un débat parlementaire.

M. le président.  - Amendement n°200, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Supprimer cet article.

Mme Laurence Cohen.  - Comme l'a dit notre rapporteure, ce projet de loi est une voiture-balai pour légiférer par ordonnances.

Je salue le travail de l'Assemblée nationale et du Sénat qui ont réduit le nombre et le périmètre des habilitations. Mais l'article premier continue à demander l'habilitation de légiférer par ordonnances sur de nombreux dispositifs, comme l'atténuation de la baisse d'activité, l'adoption des règles d'activité partielle...

Cette liste à la Prévert donne le tournis. Ces ordonnances s'exonèrent du contrôle du Parlement, ce que nous désapprouvons. L'état d'urgence ne doit pas s'exonérer du contrôle démocratique.

D'où notre demande de supprimer cet article qui, outre la méthode retenue, ne répond en rien aux conséquences réelles et profondes de la crise sociale, économique et sanitaire.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Le texte initial était très éloigné des bons usages de l'article 38 de la Constitution ; je l'ai dit clairement. Nous avons porté le nombre d'habilitations de quinze à cinq. Cela me semble raisonnable. Avis défavorable.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Pour les mêmes motifs, avis défavorable. Nous avons essayé de réduire le nombre d'ordonnances, et celles-ci sont justifiées.

L'amendement n°200 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°244, présenté par M. Ravier.

Alinéa 1

Remplacer les mots :

dans un délai de trois mois à compter de la publication de la présente loi

par les mots :

jusqu'à la fin de l'état d'urgence sanitaire

M. Stéphane Ravier.  - Mettre en vacances le Parlement après la fin de l'état d'urgence pose problème. Le prolongement de l'état d'urgence jusqu'au 10 juillet n'était pas mon choix mais ayez la cohérence de n'accorder cette habilitation exceptionnelle à légiférer que jusqu'à son terme.

Comment le Parlement ainsi bafoué et les démocrates que vous dites être ne bondissent pas davantage ? La macronie a perdu sa majesté absolue à l'Assemblée nationale ; elle demande un sursis supplémentaire.

On ne fait pas la loi sans le peuple, ses représentants et les territoires. Le Sénat représente les collectivités territoriales, le bien commun, nos terroirs et nos racines. Comprenez-vous encore ces deux mots : collectivité territoriale ? C'est l'inverse de l'individualisme de la Start-up nation déracinée.

J'aurais aimé que le Gouvernement soit aussi remarquable que les maires, bafoués par ce programme fourre-tout. Comme les édiles, je n'ai pas confiance en ce Gouvernement en sursis. Le monde d'après sera ce que nous en ferons. N'acceptez pas le glissement d'un droit d'exception vers un droit commun, ne dévoyez pas notre démocratie. Ne cédez pas vos droits et vos devoirs de parlementaires, ne laissez pas le pouvoir jacobin décider seul, écartant le peuple et ses représentants !

M. le président.  - Amendement n°268, présenté par Mme M. Jourda, au nom de la commission des lois.

I.- Alinéa 1

Supprimer les mots :

, dans un délai de trois mois à compter de la publication de la présente loi,

II.- Après l'alinéa 15

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

.... -  Les ordonnances prévues au présent article sont prises dans un délai de trois mois à compter de la publication de la présente loi. À titre dérogatoire, les ordonnances prévues au d du 2° du I sont prises dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - C'est un amendement de compromis. Le Gouvernement avait voulu un délai d'habilitation de six mois. Nous préférons celui de trois mois pour toutes les habilitations, sauf pour les règles d'activité partielle, afin de donner le temps de s'adapter à la situation économique, comme le demande le Gouvernement.

M. le président.  - Amendement n°186, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 1

Remplacer le mot :

trois

par le mot :

six

M. Marc Fesneau, ministre.  - Cette solution de compromis me convient, mais attention à la cohérence avec le dispositif d'activité partielle qui vous sera proposé.

Avis favorable à l'amendement n°268 ; avis défavorable à l'amendement n°244.

L'amendement n°186 est retiré.

L'amendement n°244 n'est pas adopté.

L'amendement n°268 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°122, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Cet amendement supprime cette demande d'habilitation, les mesures envisagées ayant vocation à être inscrites dans un article additionnel.

M. le président.  - Amendement identique n°191, présenté par Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Laurence Cohen.  - Saluons l'engagement sans faille des professionnels et des bénévoles durant la crise.

Les associations ont pu maintenir leurs activités et poursuivre leurs efforts, malgré les difficultés. Emmaüs, pour la première fois depuis sa création, a dû faire appel aux dons.

Quelque 260 000 personnes se sont inscrites sur la plateforme jeveuxaider. Mais le dispositif est en train d'être dénaturé. En effet, des entreprises ayant une mission de service public ne pourront pas reprendre leur pleine activité dans les prochaines semaines. Ainsi, l'absence de certains salariés de La Poste, qui fonctionne à flux tendu depuis plusieurs années, pose problème. Le Gouvernement propose alors de remplacer des salariés par des bénévoles de la réserve civique. Cela nie le savoir-faire des salariés et ce dumping social inquiète l'Agence nationale du service civique car il s'agit d'emplois déguisés. Les bénévoles veulent aider les personnes dans le besoin, pas remplacer des salariés ! Les réservistes pourraient distribuer le courrier ou être derrière les guichets ! N'allons pas vers cette extension.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Ces deux amendements proposent le même dispositif mais leur objet est bien différent ! Nous discuterons tout à l'heure du fond de l'article. Inscrire en clair ce dispositif en supprimant l'habilitation me semble louable. Avis favorable.

Les amendements identiques nos122 et 191 sont adoptés.

M. le président.  - Amendement n°245, présenté par M. Ravier.

Alinéa 6

Supprimer les mots :

et une durée n'excédant pas six mois à compter de son terme

M. Stéphane Ravier.  - Je continue à m'opposer fermement à ce que le Gouvernement légifère seul au-delà de l'échéance de l'état d'urgence. Ce serait nier le pouvoir du Parlement.

M. le président.  - Amendement n°187, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 6

Après les mots :

article 4 et

insérer les mots :

pouvant entrer en vigueur si nécessaire à compter du 1er juin 2020 pour

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail.  - Nous avons mis en place un dispositif massif, inédit d'activité partielle pour sauvegarder l'emploi et les compétences. Plus d'un million d'entreprises sur 1,6 million ont utilisé ce dispositif, intégralement ou partiellement. Quelque 11 millions de salariés ont été au chômage partiel, plus ou moins longtemps. Grâce à l'habilitation, nous avons pu élargir le dispositif, par ordonnance, à des professions comme les VRP, les marins-pêcheurs ou les assistantes-maternelles.

Des réponses ont été apportées en 48 heures pour soutenir les entreprises. Nous avons supprimé le reste à charge jusqu'à 4,5 Smic, et garanti des droits à la retraite. Salariés et entreprises ont bénéficié d'un filet de protection.

Nous avons annoncé une évolution au 1er juin, pour accompagner la reprise de l'activité : la rémunération du salarié sera de 84 %, mais la prise en charge publique sera réduite.

Certains secteurs reprennent, même si les conditions sont souvent difficiles. D'autres, les bars et restaurants, les secteurs de la culture et du tourisme ne peuvent reprendre leur activité. Nous devons adapter le dispositif pour qu'il colle au plus près du terrain dans le cadre d'une différenciation sectorielle.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Il est préférable d'accorder une certaine souplesse au Gouvernement. Avis défavorable à l'amendement n°245.

L'amendement n°187 adapte le reste à charge selon les entreprises et les secteurs d'activité. Nous sommes très vigilants. Certains proposent le 1er septembre, le 1er octobre, voire le 1er décembre. Il faut envisager la reprise d'activité. Notre pays ne doit pas se retrouver déstabilisé par rapport à ses voisins, d'autant qu'il semblerait que, malgré des foyers sporadiques, l'épidémie soit en voie d'extinction.

Nous pouvons accepter la date du 1er juin pour certaines activités. Pour d'autres, ce sera plus tard... Avis favorable.

Tout ce qui peut reprendre doit le faire, sans effet d'aubaine. La perfusion est utile pour sauver le malade, mais il faut éviter l'acharnement thérapeutique.

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Très bien.

L'amendement n°245 n'est pas adopté.

M. le président.  - L'adoption de l'amendement n°187 ferait tomber les autres. C'est donc le moment de s'exprimer.

M. Didier Marie.  - Tout le monde souhaite la reprise d'activité et le redémarrage du pays, mais certains pans de l'économie resteront en souffrance. Quels secteurs, quelles catégories de salariés seraient concernées ? Dans certaines entreprises où l'activité demeure entravée, certains salariés pourraient ne plus bénéficier du chômage partiel. Un report à septembre ou octobre nous semble plus sûr.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - La mesure se décline en fonction des secteurs, des salariés et des dispositifs. À partir du 1er juin, sauf secteurs spécifiques, le taux de remboursement par l'État ne sera plus intégral : un reste à charge de 15 % pour l'employeur semble normal lorsque l'entreprise a repris son activité.

Mais dans d'autres secteurs qui ne sont pas encore dans une dynamique de reprise - cafés, hôtels, restaurants, événementiel, secteur culturel ou sportif - ce serait dramatique : il faut continuer à les protéger. Jusqu'ici l'État n'avait jamais pris en charge le chômage partiel au-dessus du Smic. Aujourd'hui, c'est 4,5 fois le Smic ! Le reste à charge sera modeste.

Le Premier ministre a confirmé qu'à partir du 2 juin, si l'école est ouverte, le chômage partiel pour garde d'enfant n'est plus justifié. Toutes les écoles devront attester que l'enfant peut être accueilli tel ou tel jour. Le salarié pourra être au chômage partiel les autres jours.

Dans le secteur automobile, déjà en pleine mutation numérique et écologique avant le Covid-19, nous voulons un dispositif de plus longue durée, pour éviter les licenciements : par exemple, une baisse du temps de travail, selon un accord d'entreprise, et un complément de rémunération apporté par l'État. Voilà le genre d'adaptation que permet la différenciation par secteurs.

Mme Monique Lubin.  - Est-il prévu de donner une certaine latitude aux Direccte - même si elles manquent d'agents ? Il peut y avoir des différences importantes au sein d'un même secteur, d'un même corps de métier. Ainsi, un restaurant de 60 mètres carrés aura plus de mal à rouvrir qu'un restaurant de 200 mètres carrés. Un peu de souplesse serait bienvenue.

M. Jean-Marc Gabouty.  - Le Gouvernement a permis aux entreprises de tenir pendant la crise et aux salariés de percevoir une rémunération décente. Une moindre indemnisation ne facilite pas le redémarrage de l'activité. Hormis le secteur marchand qui a bénéficié d'une consommation différée, nombre d'autres secteurs connaissent une progression très lente. L'économie a beaucoup trop ralenti : si des entreprises avaient continué à tourner à 10 %, la reprise aurait été plus facile... Ce n'est pas le moment de relâcher les aides. Les entreprises, qui tourneront à 25 % en juin, ont besoin d'être accompagnées. Maintenons une prise en charge complète du chômage partiel.

Peut-être pas jusqu'à 4,5 fois le Smic, mais dans les proportions actuelles. Le budget qui y sera consacré aidera à la reprise économique.

M. Claude Kern.  - Je partage cette analyse. Certains secteurs et métiers continueront à avoir besoin du chômage partiel. Je pense aux commerciaux, auxquels les clients n'ouvrent plus la porte. Avez-vous dressé une liste des métiers concernés ?

M. Jérôme Bascher.  - Madame la ministre, vous évoquez « un dispositif de chômage partiel comme on n'en a pas vu en Europe ». C'est vrai. C'est vrai aussi de notre déficit de croissance... (On renchérit sur les travées du groupe Les Républicains.)

Attention aux effets pervers des mesures économiques, surtout quand il s'agit de mettre en salariat public l'ensemble des travailleurs du privé ! Albéric de Montgolfier nous avait signalé dès le PLFR 1 que les chiffres du chômage partiel étaient très sous-estimés. Certes, le dispositif a soutenu la confiance. L'avenir nous dira s'il a été si bénéfique pour l'économie.

Je voterai l'amendement du Gouvernement, mais je rappelle que le chômage partiel ne concerne que les salariés. Pour les autres, les dispositifs prévus ne suffiront pas. La casse épargnera les salariés, parce que notre pays est piqué à la dépense publique...

M. Bruno Sido.  - Très bien.

M. Philippe Mouiller.  - Dominique Estrosi Sassone s'inquiète de la situation du tourisme dans les Alpes-Maritimes. Son amendement avait l'avantage de proposer des dates précises. Les entreprises du tourisme ont besoin d'une vision claire pour imaginer leur future organisation dans un contexte difficile. Il faut entendre leur demande.

M. Michel Vaspart.  - Je soutiens mes collègues. Certains amendements proposaient le maintien du chômage partiel pour les entreprises en difficulté : c'était plus clair. La date du 1er juin me semble trop rapprochée au regard de la situation économique.

Mme Sylvie Robert.  - Mon amendement n°55 concerne les intermittents.

M. le président.  - Vous pourrez le défendre ; il ne tombera pas.

Mme Sylvie Robert.  - Merci.

Mme Laure Darcos.  - Au-delà des restaurants et des entreprises du tourisme, de nombreux secteurs sont encore aux abois - commerce d'objets publicitaires, commerce de gros, fournitures dentaires... Il faut poursuivre le chômage partiel jusqu'au 1er septembre au moins.

M. Pascal Martin.  - Avec Claude Kern, nous proposions la date du 1er octobre pour les entreprises les plus en difficulté. Le secteur de la communication, par exemple, a perdu 100 % de chiffre d'affaires depuis le 15 mars.

M. Claude Bérit-Débat.  - Mon amendement allait dans le même sens : il proposait la date du 1er septembre pour les grossistes qui fournissent les bars, restaurants et activités de plein air.

M. Éric Kerrouche.  - Nous ne voterons pas l'amendement du Gouvernement car la date du 1er juin est trop précoce. Sans ces aides, beaucoup pourraient basculer dans la pauvreté.

M. Jean Bizet.  - Le concept de filière mériterait d'être précisé. Derrière les restaurants et l'hôtellerie, il y a les coopératives agroalimentaires et l'agriculture.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Il nous faut effectivement des précisions. La prise en charge de l'activité partielle relève du règlement pour ce qui est du niveau ; c'est le principe de différenciation qui exige de passer par la loi.

L'État ne prendra plus en charge que 70 % des 85 %. Mieux vaut anticiper pour éviter les effets d'aubaine et inciter les entreprises à reprendre, quand c'est économiquement faisable.

M. Jean-Marc Gabouty.  - Non !

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Certains secteurs, en revanche, devront rester sous perfusion de l'État pour éviter les licenciements. Il faut du cousu main.

Qui sera responsable de la différenciation ? Le préfet de région, de département ? Il faut aller au plus près des territoires pour prendre en compte la spécificité de chaque entreprise et cesser de différencier les départements en fonction d'une couleur verte ou rouge, sans quoi nous aurons des problèmes de concurrence différenciée.

La commission vous donne un gage de confiance, madame la ministre ; nous attendons des précisions sur les secteurs concernés.

M. Philippe Mouiller.  - Exactement.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - La situation est inédite. L'arrêt brutal de l'économie, nécessaire pour endiguer l'épidémie, a sonné comme un coup de tonnerre dans un ciel serein. Il y a trois mois, nous nous réjouissions de la hausse de 16 % du nombre d'apprentis et de la baisse du taux de chômage à 8,9 %. C'est bien loin désormais.

Nous avons voulu agir massivement et immédiatement pour soutenir les entreprises. Le chômage partiel concerne à 60 % des salariés d'entreprises de moins de 50 salariés, il a sauvé l'emploi dans les TPE-PME qui irriguent nos territoires. Aujourd'hui, l'activité économique est environ à 65 % mais certains secteurs sont encore à l'arrêt, d'où la différenciation.

Il faut mobiliser utilement l'argent public. La reprise sera durablement difficile pour les restaurants par exemple, qui sont par essence un lieu de convivialité. Il faudra continuer à les aider massivement. Pour les autres, il n'y aura pas de couperet, nous continuons à les accompagner.

Les taux de prise en charge relèvent du pouvoir réglementaire, de même que les secteurs. En revanche, la différenciation exige un texte législatif. Le sport, le tourisme, la restauration, la culture seront notamment concernés ; les choses se feront progressivement, en fonction de l'évolution de la situation sanitaire et de la levée des contraintes.

On a heureusement entamé la décrue du chômage partiel. En avril, 8,5 millions de Français ont été effectivement au chômage partiel, pour 12,8 millions de demandes, mais près de 50 % travaillent à temps partiel. Ce type de situation va perdurer.

On ne peut mettre éternellement l'économie française sous perfusion, nationaliser l'emploi. Il n'y aura pas de changement pour les salariés, mais au 1er juin, l'employeur aura un reste à charge de 15 % - soit 300 euros par mois pour un salarié qui gagne deux fois le Smic. Au Smic, le remboursement demeure intégral.

La visibilité est clé. Le comité interministériel du tourisme a pris la semaine dernière plusieurs mesures pour soutenir l'activité touristique, dont le maintien du chômage partiel plus longtemps, à un niveau plus élevé. Le secteur automobile devra aussi être soutenu si l'on veut éviter des plans de licenciements massifs. Un accord d'entreprise pourrait valider une diminution du temps de travail et une compensation par l'État au profit d'une formation pour accompagner la mutation.

Pour les non-salariés, il existe le fonds de solidarité avec un deuxième étage piloté par les régions et financé par l'État, les régions et les assureurs. Les Français ont été bien protégés pendant la première phase, il faut désormais réussir la deuxième en accompagnant la reprise.

L'amendement n°187 est adopté.

Les amendements nos7 rectifié quater, 73 rectifié, 77, 113 rectifié, 139 rectifié, 264, 30, 94, 20 rectifié ter, 76 rectifié, 91 rectifié, 133 rectifié, 138 rectifié bis, 141, 224 et 176 rectifié n'ont plus d'objet.

M. le président.  - Amendement n°55, présenté par Mme S. Robert et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 6

Après la première occurrence du mot :

notamment

insérer les mots :

en permettant aux salariés de démontrer leurs relations contractuelles par tous moyens écrits et

Mme Sylvie Robert.  - Il faut prendre en compte la spécificité des relations contractuelles dans le domaine artistique et culturel, où les promesses d'embauche se font souvent par mail ou SMS. Cet amendement a reçu un avis favorable à l'Assemblée nationale. Facilitons l'accès des techniciens et artistes au chômage partiel !

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - La commission des affaires sociales partage vos préoccupations, mais avait supprimé cette précision qui est pleinement satisfaite par la jurisprudence. Inutile de l'inscrire dans la loi.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Il est vrai que dans le secteur culturel, le manque de formalisme est fréquent. En pur droit, la précision n'est certes pas indispensable, mais la pratique conduit le Gouvernement à donner un avis favorable pour clarifier le droit applicable.

M. Jérôme Bascher.  - J'ai de la sympathie pour cet amendement. Le secteur culturel mériterait d'être mieux administré. Des établissements publics, qui sont des démembrements de l'État, embauchent avec un manque de formalisme coupable. Les contrats sont souvent signés le jour même !

La Réunion des musées nationaux-Grand Palais est bien en peine pour ce qui est des nombreux vacataires du patrimoine. Une inscription dans la loi est bienvenue, pour s'assurer du respect de la jurisprudence !

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Nous sommes au coeur de notre responsabilité de législateur. Comme avocate, je pourrais entendre les arguments du rapporteur, mais, dans la pratique, vu le caractère informel des embauches dans le secteur culturel, nombre de ces personnes peinent à faire valoir leurs droits.

Soyons pédagogiques. Ce texte n'a pas vocation à s'ancrer dans le droit pour l'éternité. L'avis du rapporteur, très rigoureux, mériterait davantage de plasticité.

L'amendement n°55 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°100 rectifié bis, présenté par M. Mohamed Soilihi et les membres du groupe La République En Marche.

Alinéa 6

Après les mots : 

secteur d'activité 

insérer les mots : 

, notamment lorsqu'il dépend de l'activité économique d'entreprises fermées administrativement,

M. Thani Mohamed Soilihi.  - L'habilitation dont il est question ici prévoit l'adaptation du dispositif d'activité partielle en fonction des secteurs et de la situation des entreprises. Nombre d'entre elles qui ne font pas l'objet d'une fermeture administrative subissent les conséquences de la fermeture des autres, dans l'hôtellerie ou la restauration notamment.

J'en profite pour revenir sur l'amendement déclaré irrecevable sur les CDD d'insertion.

M. le président.  - C'est osé !

M. Thani Mohamed Soilihi.  - J'espère qu'il sera repris par le Gouvernement...

M. le président.  - Amendement identique n°137 rectifié, présenté par M. Raison, Mme Renaud-Garabedian, MM. Perrin, Milon, Cambon et Bonne, Mme Micouleau, M. Grand, Mme L. Darcos, M. Sol, Mme A.M. Bertrand, MM. Bascher et Brisson, Mme Gruny, MM. Bouchet, Mouiller, Bonhomme, Houpert et Hugonet, Mme Richer, M. Piednoir, Mmes Estrosi Sassone et Malet, MM. B. Fournier et Gremillet, Mme Lamure, M. Daubresse, Mme Bruguière, M. Chaize, Mme Duranton, M. de Nicolaÿ, Mmes Deroche et Lassarade, MM. Vogel et Schmitz, Mme Dumas, MM. Babary, Pierre, Saury et Charon, Mmes Morhet-Richaud, Di Folco et Chauvin, M. Chatillon, Mmes Deromedi, F. Gerbaud et Berthet, MM. Longuet, Priou, Kennel, Pointereau et Grosperrin, Mme Troendlé, MM. Bazin et Cuypers, Mme Thomas, M. Rapin, Mme Raimond-Pavero, M. Dallier, Mme Eustache-Brinio, M. Courtial et Mme Giudicelli.

M. Jérôme Bascher.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°21 rectifié, présenté par MM. Savin, Darnaud, Kennel et Brisson, Mmes Noël et Thomas, M. Rapin, Mme Raimond-Pavero, M. Dallier, Mmes Deromedi et Di Folco, MM. Mandelli et Vogel, Mmes Dumas et Micouleau, MM. Regnard, Mouiller, Meurant, Chatillon, Courtial, Schmitz et Bouchet, Mme Gruny, MM. Leleux, Bonhomme, Calvet et Gremillet, Mme A.M. Bertrand, M. Chaize, Mme Lassarade, MM. Pierre et Pointereau, Mmes Imbert, Deroche et Berthet, MM. Forissier, Lefèvre, de Nicolaÿ et Babary, Mmes Ramond et Duranton, MM. Piednoir, Cambon et Genest, Mmes Lopez et L. Darcos, M. Reichardt, Mme M. Mercier, MM. Vaspart et D. Laurent, Mme Richer, MM. de Legge, Panunzi et Cuypers, Mme Chauvin, MM. Bonne, Bascher, Pellevat et Segouin, Mme Eustache-Brinio et MM. Sido, Longuet, Gilles et Priou.

Alinéa 6

Compléter cet alinéa par les mots :

, de celle des activités fermées administrativement ainsi que de celle des entreprises qui les approvisionnent les plus dépendantes de ces activités

M. Philippe Mouiller.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°90 rectifié bis, présenté par MM. Bizet, Bas et Bazin, Mmes Bonfanti-Dossat et Bruguière, MM. Danesi, Huré et Laménie, Mme Lamure, MM. Magras, Milon et Paul et Mme Troendlé.

M. Jean Bizet.  - Défendu ! Mme la ministre n'a pas répondu sur la notion de logique de filière, pourtant essentielle. Il faut faire très attention à la partie amont...

L'amendement identique n°93 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°177 rectifié bis, présenté par MM. Duplomb, J.M. Boyer, Karoutchi, Moga, Détraigne et B. Fournier, Mme Vullien, MM. Paccaud, Houpert, Canevet et Frassa, Mmes F. Gerbaud, Billon, Troendlé et Goy-Chavent, M. Hugonet, Mmes Chain-Larché et Bonfanti-Dossat et MM. H. Leroy, Chevrollier et Charon.

M. Michel Vaspart.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°185 rectifié ter, présenté par Mmes Létard, Vullien, Joissains, Vermeillet et Vérien, MM. Janssens, Henno, Capo-Canellas et Longeot, Mme Morin-Desailly, MM. Kern et Médevielle, Mme Guidez, MM. Prince, Cigolotti, Le Nay et Cadic, Mme Saint-Pé, M. Vanlerenberghe, Mme Gatel et MM. Cazabonne, Maurey, Lafon et L. Hervé.

Mme Valérie Létard.  - Défendu.

L'amendement n°261 rectifié bis n'est pas défendu.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Avis défavorable aux amendements nos100 rectifié bis et 137 rectifié car ils sont moins précis que les suivants, auxquels nous donnons un avis favorable. Il faut considérer l'ensemble de la filière et prendre en compte le risque d'un effet domino.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Je comprends cette logique de filière. Mais le dispositif tel que rédigé convient. Retrait ou avis défavorable. Il n'est pas besoin d'ajouter ces précisions.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Nous inversons nos positions. Nous avons tous nos contradictions ! Tout à l'heure, j'opposais à Mme Robert qu'il n'était pas nécessaire de tout inscrire dans la loi. C'est votre tour... Le Gouvernement aurait pu avoir ici la même vision large qu'il a eue sur l'amendement précédent.

M. Michel Canevet.  - Inscrire ces éléments dans le texte conduira à les prendre en compte. Il s'agit de certains secteurs bien identifiés comme l'hôtellerie ou le tourisme dont les difficultés se répercutent de plein fouet, par exemple, sur les entreprises de blanchisserie industrielle. Prenons en compte la réalité des filières.

M. Philippe Mouiller.  - Dans mon département, certaines entreprises sont en procédure de sauvegarde devant le tribunal de commerce. Les mesures doivent être claires et connues de tous...

M. Didier Marie.  - Nous n'avons pas déposé d'amendements. Je remercie le rapporteur pour sa dernière intervention.

Les ordonnances méritent d'être précisées. Nous l'avons fait avec l'amendement n°55 de Mme Robert. Il doit en être de même ici, notamment afin que les entreprises en liquidation judiciaire faute de débouchés puissent faire valoir leur situation devant les tribunaux de commerce.

Prenez une entreprise de café : l'essentiel de ses débouchés est dans la restauration.

M. Jérôme Bascher.  - Je vais retirer le 137 rectifié comme me le demande le rapporteur pour avis. Au-delà des filières, il faut s'intéresser aux acteurs des filières. Le Président de la République a choisi d'aller annoncer un très bon plan de relance automobile dans le Pas-de-Calais. Il a seulement oublié le rôle essentiel de la région et de son président, puisqu'il ne l'a même pas convié. Mme Létard, qui fut là-bas vice-présidente en charge de l'industrie et qui à ce titre a beaucoup travaillé sur ces questions, sait combien la région joue un rôle important. (Mme Valérie Létard sourit.)

L'amendement n°137 rectifié est retiré.

L'amendement 100 rectifié bis n'est pas adopté.

Les amendements identiques nos21 rectifié, 90 rectifié bis, 177 rectifié bis et 185 rectifié ter sont adoptés.

L'amendement n°240 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°263, présenté par Mme S. Robert.

Alinéa 6

Compléter cet alinéa par les mots :

et en adaptant les règles aux caractéristiques des employeurs mentionnés aux 3° à 7° de l'article L. 5424-1 du code du travail, des établissements publics à caractère industriel et commercial de l'État, des groupements d'intérêt public, des sociétés publiques locales et des établissements publics de coopération culturelle

Mme Sylvie Robert.  - Les établissements du secteur culturel et touristique, les établissements labellisés par le ministère de la Culture, les scènes nationales, sont incités - cela me paraît normal - à honorer les contrats d'artistes et à payer les services non faits. Mais ils se retrouvent dans des difficultés majeures. Cet amendement vise à adapter le dispositif à la réalité de chaque établissement public.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Il n'est pas opportun de prévoir une extension de l'activité partielle dans une ordonnance qui a pour but d'en prévoir la sortie. Avis défavorable.

M. Marc Fesneau, ministre.  - L'ordonnance du 22 novembre 2020 est restreinte aux établissements qui tirent de leur activité industrielle ou commerciale l'essentiel de leurs ressources. Les établissements culturels bénéficient d'une subvention d'équilibre de l'État et sont donc moins menacés que d'autres.

Le Gouvernement s'est engagé à ce que les établissements culturels à vocation industrielle ou commerciale relevant des collectivités locales puissent bénéficier d'un dispositif d'aides ad hoc. Avis défavorable.

Mme Sylvie Robert.  - Les établissements publics de coopération culturelle (EPCC) relevant des collectivités locales pourront bénéficier de l'activité partielle grâce à ce nouveau dispositif. Je m'en félicite. Cependant, des établissements qui ont le label de l'État sont déjà en grande difficulté et en situation dégradée.

L'amendement n°263 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°188, présenté par le Gouvernement.

Après l'alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...) Permettant la création d'un dispositif alternatif à l'activité partielle permettant d'accompagner les entreprises connaissant une baisse durable d'activité, en contrepartie d'engagements notamment en matière de maintien dans l'emploi ;

M. Marc Fesneau, ministre.  - Cet amendement autorise le Gouvernement à prévoir par ordonnance un nouveau dispositif alternatif à l'activité partielle, afin d'accompagner les entreprises subissant une baisse durable d'activité, y compris au-delà de la fin 2020. Dans certains secteurs d'activité, les entreprises seront durablement affectées par la crise. Le mécanisme de l'activité partielle, prévu pour répondre à une situation d'urgence, n'a pas été conçu pour un tel accompagnement.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Monsieur le ministre, vous êtes peu loquace sur cet amendement déposé hier seulement...

M. Jérôme Bascher.  - C'est du teasing !

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Vous créez un dispositif alternatif à l'activité partielle, pour une période plus longue que la crise sanitaire, en contrepartie d'engagements. C'est intéressant. Mais admettez que la rédaction de l'habilitation est bien vague - trop vague...

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - C'est fait pour !

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Avis défavorable en attendant des précisions : qu'avez-vous derrière la tête, monsieur le ministre ?

Mme Monique Lubin.  - Vous avez attrapé votre dossier au vol et vous vous êtes contenté de lire l'argumentaire. Voilà pourquoi vous êtes peu loquace ! C'est exactement le type d'amendement qui alimente notre méfiance à l'égard des habilitations : quelle est la raison d'être de celle-ci, pour un mécanisme qui s'appliquerait dans six mois, alors que personne ne sait quelles entreprises auront alors besoin d'un soutien ?

Qu'est-ce qui se cache derrière ce dispositif ? Tout cela n'est pas très sérieux.

M. Philippe Mouiller.  - Cet amendement casse tout votre argumentaire sur la confiance et sur la sincérité du Gouvernement. Vous prétendez apporter en urgence des réponses concrètes, or il n'y a ici ni délai ni détails. Vous faites erreur.

M. Éric Kerrouche.  - Cet amendement du Gouvernement est une parfaite illustration d'un texte d'habilitation défectueux et mal écrit. « Aie confiance... » nous chante le Gouvernement. Comment le pourrions-nous, avec de telles mesures ?

Mme Laurence Rossignol.  - Rien ne va dans cet amendement, ni la méthode, ni les arguments, ni l'exposé des motifs. Un « dispositif alternatif » : comment pouvez-vous être aussi vague ? Le Gouvernement est peut-être plein de bonnes intentions...

M. Philippe Mouiller.  - Peut-être...

Mme Laurence Rossignol.  - Sans doute ne savez-vous pas grand-chose de ces dispositions. Mme la ministre du Travail aurait pu nous répondre, mais elle est partie et vous assurez la permanence. Comprenez que nous votions contre.

M. Jérôme Bascher.  - N'oublions pas que le Gouvernement mène une politique du « en même temps » : avec ces ordonnances, il fait... tout et son contraire !

M. le président.  - Le ministre souhaite répondre.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - Bonne chance !

M. Marc Fesneau, ministre.  - Je ne suis pas là pour tenir une permanence. Mais le texte comporte des dispositifs très divers. Certains ministres sont plus spécialisés que d'autres.

M. Philippe Mouiller.  - Mais Mme Pénicaud était là !

M. Marc Fesneau, ministre.  - Elle a dû se rendre à l'Assemblée nationale.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie.  - C'est un choix...

M. Marc Fesneau, ministre.  - Je ne suis pas spécialiste de ces questions, je vais néanmoins vous donner quelques éléments supplémentaires.

Il n'y a pas de mauvaise intention. Nous avons besoin de réfléchir dès à présent à d'autres dispositifs que celui d'activité partielle classique. Si l'impact est durable, il faudra un autre soutien.

Dans le secteur aéronautique par exemple, nous développons des dispositions immédiates, mais il en faut aussi dans la durée longue. Le dialogue s'est engagé avec les partenaires sociaux. Je ne sais pas si c'est du « en même temps », monsieur Bascher. Mais il faut réfléchir à des soutiens immédiats et, également, voir plus loin. Cette habilitation permet d'anticiper un autre cycle pour les entreprises qui en auront besoin. Monsieur Mouiller, je reconnais volontiers les affaires de forme. Il n'empêche, nous devons réfléchir à plus long terme avec les organisations syndicales et les autres acteurs.

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Moi non plus, je ne suis pas un spécialiste de ces questions ; cela ne me dissuade pas de prendre la parole... (Sourires)

Je ne demande qu'à vous croire, monsieur le ministre. Mais s'il n'y a pas d'arrière-pensée, il y a tout de même bien une pensée ? Si oui, laquelle ?

Vous n'avez donc pas besoin de notre autorisation pour réfléchir avec les partenaires sociaux à des solutions de moyen terme. Retirez l'amendement et revenez nous voir ! Vous connaissez l'adresse du Sénat... Pour aider les entreprises, vous pourrez compter sur nous. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Loïc Hervé applaudit également.)

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Je pensais que vous nous parleriez plutôt d'automobile que d'aéronautique.

Le manque de précision guide notre avis défavorable, de même que l'horizon de moyen terme. Notre avis n'est pas négatif (Sourires) mais le Parlement doit être mieux associé. Il est très cavalier de présenter des amendements si imprécis.

L'amendement n°188 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°147, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 8

Rédiger ainsi cet alinéa :

i) Permettant l'adaptation, pour les saisons 2019/2020 et 2020/2021, du régime applicable aux contrats des sportifs et entraîneurs professionnels salariés ;

Mme Roxana Maracineanu, ministre des sports.  - L'amendement précise l'habilitation prévue à l'alinéa 8.

Le régime applicable aux contrats des sportifs et entraîneurs professionnels relève des articles L. 222-2 et suivants du code du sport. La rédaction renvoie aux fédérations sportives et ligues professionnelles, or une modification du cadre général de ce régime ne relève pas de leurs compétences, mais de la loi et du dialogue social. Ainsi corrigée de cette coquille, la disposition tiendra compte de l'arrêt des championnats nationaux et de la poursuite de certains championnats européens, pour adapter la durée des contrats.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis favorable. C'est bien une coquille.

L'amendement n°147 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°126 rectifié, présenté par le Gouvernement.

Alinéas 12 et 14

Supprimer ces alinéas.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Nous proposerons d'inscrire en dur dans la loi, après l'article premier quater A, les dispositions ici envisagées dans une ordonnance. D'où cet amendement de suppression.

M. le président.  - Amendement identique n°201 rectifié, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Laurence Cohen.  - L'amendement est identique, mais les motivations sont différentes. Nous voulons supprimer définitivement cette disposition : les accords d'entreprises pourront déterminer le nombre de renouvellement des CDD.

Les ordonnances Macron de 2017 avaient déjà assoupli le droit mais la branche professionnelle restait un verrou. Ce nouveau détricotage du code du travail va encourager la précarisation des salariés. En outre, des mesures présentées comme provisoires deviennent souvent permanentes. Nous avions en outre combattu la loi El Khomri.

Au fil des réformes, l'assouplissement des règles relatives aux CDD et à l'intérim s'est toujours accompagné d'une précarisation des conditions d'emploi pour les travailleurs concernés sans effet significatif en termes de relance économique.

Nous voterons contre la réintroduction de ce dispositif dans un autre article.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Avis favorable à l'amendement n°126 rectifié du Gouvernement. Je ne peux pas donner un avis défavorable à l'amendement n°201 rectifié, puisqu'il est identique. Mais j'en demande le retrait car je crois que l'alinéa visé n'est pas le bon.

Les amendements identiques nos126 rectifié et 201 rectifié sont adoptés.

L'article premier, modifié, est adopté.

L'article premier bis AA est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°31 rectifié, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 1er bis AA

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - A. - 1° Les dispositions du présent I sont applicables aux mandats suivants, lorsqu'ils sont arrivés à échéance entre le 12 mars 2020 et la date d'entrée en vigueur du présent I et qu'il n'a pas été pourvu à leur renouvellement ou à leur remplacement à cette date, ou lorsqu'ils arrivent à échéance entre la date d'entrée en vigueur du présent I et le 31 juillet 2020, sauf prorogation de ce délai jusqu'à une date fixée par décret et au plus tard le 30 novembre 2020 :

a) Mandats des représentants des salariés au sein des organes collégiaux d'administration, de surveillance ou de direction des personnes morales de droit privé, lorsque ces représentants sont élus par les salariés ;

b) Mandats des représentants des salariés actionnaires au sein desdits organes ;

2° Le présent article n'est pas applicable aux mandats faisant l'objet d'adaptations particulières par la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 ou la présente loi ou en application de celles-ci.

B.  -  Les mandats mentionnés au A du présent I sont prorogés jusqu'à la date de leur renouvellement ou de l'entrée en fonction des nouveaux membres nommés en remplacement et au plus tard le 30 septembre 2020, sauf prorogation de ce délai jusqu'à une date fixée par décret et au plus tard le 31 décembre 2020.

C.  -  Lorsque le mandat est arrivé à échéance entre le 12 mars 2020 et la date d'entrée en vigueur du présent I, aucune nullité des délibérations n'est encourue du seul fait que le titulaire de ce mandat n'a pas été convoqué ou n'a pas pris part aux délibérations entre la date d'échéance du mandat et la date d'entrée en vigueur du présent I.

II.  -  Le B du I de l'article 184 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises est ainsi rédigé :

« B.-Pour l'application du A, les modifications statutaires nécessaires à l'élection ou à la désignation des administrateurs et des membres du conseil de surveillance représentant les salariés ou les salariés actionnaires sont proposées lors de l'assemblée générale ordinaire organisée en 2020.

« L'entrée en fonction de ces administrateurs et membres du conseil de surveillance intervient au plus tard :

« 1° Pour les administrateurs et membres du conseil de surveillance représentant les salariés qui sont élus par ces derniers, ainsi que pour les administrateurs et membres du conseil de surveillance représentant les salariés actionnaires, à la plus tardive des dates entre l'expiration d'un délai de six mois après l'assemblée générale portant les modifications statutaires nécessaires à leur désignation et le 30 septembre 2020, sauf report de cette dernière date jusqu'à une date fixée par décret et au plus tard le 31 décembre 2020 ;

« 2° Pour les administrateurs et membres du conseil de surveillance représentant les salariés autres que ceux mentionnés au 1°, six mois après l'assemblée générale portant les modifications statutaires nécessaires à leur désignation.

« Les 1° et 2° du A du présent I entrent en vigueur à l'issue du mandat du représentant des salariés actionnaires en cours à la date de la publication de la présente loi. »

M. Marc Fesneau, ministre.  - Les conditions actuelles rendent difficiles la nomination des représentants de salariés et d'actionnaires au sein des organes de gouvernance.

Pour la même raison, tenant à la difficulté d'organiser des élections ou des consultations dans des conditions satisfaisantes dans le contexte actuel, il est également proposé de reporter la date limite d'entrée en fonction des représentants des salariés et des représentants des salariés actionnaires devant être désignés par suite de l'extension et du renforcement des obligations de représentation des salariés et des salariés actionnaires par l'article 184 de la loi Pacte.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Cet amendement est précis. Avis favorable.

L'amendement n°31 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°106 rectifié, présenté par MM. Mandelli et Bazin, Mme Lavarde, MM. D. Laurent, Calvet, Sol, Vaspart et Bonhomme, Mmes L. Darcos, Gruny et M. Mercier, MM. B. Fournier et Savin, Mme Estrosi Sassone, MM. Mouiller, Piednoir, Vogel, Milon, Cardoux et Danesi, Mmes Lassarade, de Cidrac, Puissat, Imbert et Deromedi, M. Dallier, Mmes Raimond-Pavero et Di Folco, M. Rapin et Mmes Lamure et Berthet.

Après l'article 1er bis AA

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 20 de l'ordonnance n° 2019-552 du 3 juin 2019 portant diverses dispositions relatives au groupe SNCF est ainsi modifié :

1° Aux premier et dernier alinéas des I et II et aux premier et second alinéas des III et IV, les mots : « jusqu'au 30 juin 2020 » sont remplacés par les mots : « jusqu'au 31 décembre 2020 ou jusqu'à trois mois à compter de la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire déclaré dans les conditions de l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 si cette date est postérieure au 30 septembre 2020 » ;

2° Au V, les mots : « le 30 juin 2020 » sont remplacés par les mots : « le 31 décembre 2020 ou trois mois à compter de la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire déclaré dans les conditions de l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 si cette date est postérieure au 30 septembre 2020 ».

M. Arnaud Bazin.  - Il s'agit de prolonger de quelques mois les dispositions transitoires touchant la composition des conseils d'administration des sociétés SNCF, SNCF Réseau, SNCF Voyageurs et SNCF Gares et Connexions. Des conseils d'administrations transitoires ont été mis en place pour assurer la gouvernance du groupe à la suite de sa transformation au 1er janvier 2020, jusqu'au 30 juin 2020, après les élections professionnelles et la désignation des représentants des salariés.

Pour éviter toute vacance des différents conseils d'administration, il est proposé de reporter l'échéance au 31 décembre 2020 ou à trois mois suivant la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire, si cette date est postérieure au 30 septembre 2020.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis favorable. Cela me semble justifié par la crise sanitaire.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Avis favorable. Cet amendement est très utile.

L'amendement n°106 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE PREMIER BIS A

M. le président.  - Amendement n°203 rectifié, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen, Gréaume, Assassi et Benbassa, M. Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, MM. Gay, Gontard et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Prunaud et M. Savoldelli.

Supprimer cet article.

Mme Laurence Cohen.  - L'article premier bis A, introduit par l'Assemblée nationale, permet, à titre dérogatoire pendant la période d'état d'urgence sanitaire et jusqu'à six mois au-delà, de conclure ou de renouveler pendant une durée de 36 mois, au lieu de 24 mois, les contrats courts conclus au titre de la politique de l'emploi et les contrats aidés. La commission des affaires sociales du Sénat a étendu cette disposition au contrat unique d'insertion (CUI).

Nous ne pensons pas que le recours facilité aux contrats précaires améliorera la situation économique du pays ; ces mesures existent déjà depuis des années, elles n'ont pas été couronnées d'un grand succès.

Pour relancer l'économie, il faut au contraire s'appuyer sur le secteur de l'économie sociale et solidaire et sur les services publics ainsi que sur des contrats protecteurs.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Avis défavorable, l'amendement est contraire à la position de la commission.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°203 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°48, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe socialiste et républicain.

I.  -  Alinéa 1

Rédiger ainsi cet alinéa :

À compter du 12 mars 2020 et pour une durée n'excédant pas six mois à compter de la fin de l'état d'urgence sanitaire, peuvent être conclus ou renouvelés pour une durée totale de trente-six mois :

II.  -  Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  Pour la détermination de l'indemnité d'activité partielle mentionnée au II de l'article L. 5122-1 du code du travail au bénéfice des salariés des structures mentionnées au 3° de l'article L. 5132-4 du même code, les contrats de travail conclus en application du 3° de l'article L. 1242-2 dudit code, sont réputés avoir été conclus en application de contrats de mise à disposition sur la base d'un volume horaire calculé de la façon suivante :

a) Pour les salariés nouvellement inscrits dans l'association intermédiaire en mars 2020, selon une estimation du nombre d'heures qui auraient du? être réalisées ;

b) Selon les prévisions contractuelles quand un volume horaire était prévu dans le contrat de travail ;

c) Selon le nombre d'heures déclarées comme réalisées du plus favorable des trois derniers mois clos avant le début de l'état d'urgence sanitaire.

Mme Monique Lubin.  - Cet amendement sécurise les parcours d'insertion des publics fragiles en leur ouvrant droit à l'activité partielle et en autorisant le renouvellement ou la conclusion d'un nouveau contrat de travail en cas de mise à disposition, même sans mission associée.

M. le président.  - Amendement n°246, présenté par M. Ravier.

Alinéa 1

Remplacer les mots :

pour une durée n'excédant pas six mois à compter de

par les mots :

jusqu'à

M. Stéphane Ravier.  - Cet amendement n'a plus de raison d'être si le Gouvernement légifère seul : il a déjà pris 57 ordonnances... il serait dangereux pour notre démocratie d'aller au-delà de l'échéance de l'état d'urgence.

M. le président.  - Amendement n°5 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, MM. Arnell, Artano et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Dantec, Gabouty, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Jeansannetas, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde, M. Léonhardt, Mme Pantel et MM. Requier, Roux, Vall et Cazabonne.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  À compter du 12 mars 2020 et pour une durée n'excédant pas six mois à compter de la fin de l'état d'urgence sanitaire déclaré en application de l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19, pour la détermination de l'indemnité d'activité partielle mentionnée au II de l'article L. 5122-1 du code du travail au bénéfice des salariés des structures mentionnées au 3° de l'article L. 5132-4 du même code, les contrats de travail conclus en application du 3° de l'article L. 1242-2 dudit code, sont réputés avoir été conclus en application de contrats de mise à disposition sur la base d'un volume horaire calculé de la façon suivante :

a) Pour les salariés nouvellement inscrits dans l'association intermédiaire en mars 2020, selon une estimation du nombre d'heures qui auraient du? être réalisées ;

b) Selon les prévisions contractuelles quand un volume horaire était prévu dans le contrat de travail ;

c) Selon le nombre d'heures déclarées comme réalisées du plus favorable des trois derniers mois clos avant le début de l'état d'urgence sanitaire.

M. Jean-Claude Requier.  - Dans la période de crise actuelle, le maintien des salariés en parcours d'insertion revêt un intérêt particulier pour éviter une exclusion durable du monde du travail et maintenir le lien avec l'employeur ; celui-ci peut poursuivre son action d'accompagnement et de formation. Il s'agit, l'ensemble des salariés bénéficiant de la mesure renforcée d'activité partielle, de préserver l'emploi menacé par la crise.

Pourtant, les associations intermédiaires et les entreprises de travail temporaire d'insertion voient leur accès à cette mesure de soutien remis en cause en raison de particularités juridiques - la nature des contrats d'insertion.

Cet amendement adapte l'accès à l'activité partielle à la particularité des CDD d'usage d'insertion.

M. le président.  - Amendement identique n°13 rectifié ter, présenté par MM. Bonhomme et Mandelli, Mmes Lamure et Micouleau, M. Vogel, Mme Di Folco, MM. Pierre, Bonne et Gremillet, Mmes Billon et Vullien, M. Grosdidier, Mme de Cidrac, MM. Guené et Pellevat, Mme Sollogoub, MM. Brisson et Piednoir, Mme Duranton, M. Vial, Mmes Berthet, Lassarade et Malet, M. Kennel, Mme Bories, MM. de Nicolaÿ, Luche, Gilles et Dallier, Mmes Imbert et Lanfranchi Dorgal, MM. Mouiller, B. Fournier, Bouchet et Sido et Mmes Thomas et Canayer.

M. François Bonhomme.  - Ce dispositif sécurise l'accès à l'activité partielle pour les personnes en contrat d'insertion, en espérant des jours meilleurs...

M. le président.  - Amendement n°111, présenté par Mme Taillé-Polian.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  À compter du 12 mars 2020 et pour une durée n'excédant pas six mois à compter de la fin de l'état d'urgence sanitaire, pour la détermination de l'indemnité d'activité partielle mentionnée au II de l'article L. 5122-1 du code du travail au bénéfice des salariés des structures mentionnées au 3° de l'article L. 5132-4 du même code, les contrats de travail conclus en application du 3° de l'article L. 1242-2 dudit code, sont réputés avoir été conclus en application de contrats de mise à disposition sur la base d'un volume horaire calculé de la façon suivante :

a) pour les salariés nouvellement inscrits dans l'association intermédiaire en mars 2020, selon une estimation du nombre d'heures qui auraient du? être réalisée ;

b) selon les prévisions contractuelles quand un volume horaire était prévu dans le contrat de travail ;

c) selon le nombre d'heures déclarées comme réalisées du plus favorable des trois derniers mois clos avant le début de l'état d'urgence sanitaire.

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Le Gouvernement n'a qu'à piocher le meilleur amendement pour faire bénéficier les personnes en insertion de l'activité partielle. Avec M. Capus, co-rapporteur spécial des crédits de la mission « Travail », nous voulons que l'insertion par l'activité économique (IAE) bénéficie du chômage partiel.

M. le président.  - Amendement identique n°117 rectifié, présenté par MM. Capus, Malhuret, Menonville et Guerriau, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Wattebled, Bignon, Chasseing, Amiel, Fouché, Decool, Laufoaulu et A. Marc.

M. Franck Menonville.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°183 rectifié bis, présenté par Mmes Létard et Vullien, MM. Delcros, Longeot, Henno, Janssens, Détraigne, Moga, Le Nay, Prince, Kern, Médevielle, Canevet, Cigolotti, Cadic et Capo-Canellas, Mmes Joissains, Vérien, Guidez, Vermeillet, Morin-Desailly, Perrot, Billon, Saint-Pé et Gatel et MM. Vanlerenberghe, Cazabonne, Lafon et L. Hervé.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

.... - Pour la détermination de l'indemnité d'activité partielle mentionnée au II de l'article L. 5122-1 du code du travail au bénéfice des salariés des structures mentionnées au 3° de l'article L. 5132-4 du même code, les contrats de travail conclus en application du 3° de l'article L. 1242-2 dudit code, sont réputés avoir été conclus en application de contrats de mise à disposition sur la base d'un volume horaire calculé de la façon suivante :

a) Pour les salariés nouvellement inscrits dans l'association intermédiaire en mars 2020, selon une estimation du nombre d'heures qui auraient du? être réalisées ;

b) Selon les prévisions contractuelles quand un volume horaire était prévu dans le contrat de travail ;

c) Selon le nombre d'heures déclarées comme réalisées du plus favorable des trois derniers mois clos avant le début de l'état d'urgence sanitaire.

M. Michel Canevet.  - Défendu.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Ces amendements sont satisfaits par la pratique en vigueur, comme on le constate en consultant une simple foire aux questions du ministère du Travail. En revanche, il serait bon que cette pratique soit sécurisée juridiquement.

Les amendements nos5 rectifié bis, 13 rectifié bis, 111, 117 rectifié sont plus précis. Avis favorable sur ces amendements.

Avis défavorable, en revanche, sur les amendements nos48 et 183 rectifié bis.

Avis défavorable à l'amendement n°246 : il faut accorder une certaine souplesse au Gouvernement compte tenu de la crise.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Conscient des spécificités du secteur de l'insertion, le Gouvernement a très tôt autorisé les structures à renouveler les CDD d'insertion arrivés à échéance. Cette dérogation exceptionnelle est donc déjà possible. Retrait ou avis défavorable sur l'ensemble des amendements.

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Mme Muriel Pénicaud a tout à l'heure donné un avis favorable à l'amendement de Mme Robert, de même esprit !

M. Philippe Mouiller.  - Lorsque des situations particulières se présentent, on discute avec les Dirrecte. La réponse dépend des budgets disponibles... Si nous n'inscrivons pas cette mesure dans la loi, il n'y aura aucune lisibilité. Il y a urgence de voter ces amendements pour consolider ce dispositif.

L'amendement n°48 n'est pas adopté.

L'amendement n°246 n'est pas adopté.

Les amendements identiques nos5 rectifié bis et 13 rectifié ter sont adoptés.

Les amendements identiques nos111 et 117 rectifié et l'amendement n°183 rectifié bis n'ont plus d'objet.

L'article premier bis A, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°239 rectifié bis, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 1er bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'ordonnance n° 2020-323 du 25 mars 2020 portant mesures d'urgence en matière de congés payés, de durée du travail et de jours de repos est abrogée.

Mme Laurence Cohen.  - L'ordonnance du 25 mars 2020 portant mesures d'urgence en matière de congés payés, de durée du travail et de jours de repos a ouvert des dérogations dangereuses au droit du travail en matière de congés et de jours de repos, ainsi que des dérogations s'agissant de la durée maximale du travail et du repos dominical.

Les entreprises, même aidées, n'ont pas tardé à mettre en oeuvre cette possibilité, y compris dans les grands groupes. Alstom a imposé à ses salariés 11 jours de repos dont 5 de congés payés avant fin avril, en plein confinement, qui n'avait rien d'un temps de vacances ! Des mesures similaires ont été prises à la Société générale - 10 jours de congés payés et de RTT entre la mi-mars et la fin mai - et à la BNP avec 10 jours à prendre avant fin mai. Ces décisions brutales ont été très mal vécues par les salariés.

Chez PSA, la durée minimale des congés estivaux est passée de trois à deux semaines consécutives. La brèche ouverte par l'ordonnance du 25 mars pourrait perdurer au-delà du 31 décembre 2020. Le plus simple est d'abroger l'ordonnance.

M. le président.  - Amendement n°204 rectifié, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 1er bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les quatrième et cinquième alinéas du b du 1° du I de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 sont supprimés.

Mme Laurence Cohen.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°205 rectifié, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 1er bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le sixième alinéa du b du 1° du I de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 est supprimé.

Mme Laurence Cohen.  - Défendu.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - L'amendement n°239 rectifié bis vise à abroger l'ordonnance du 25 mars 2020. De nombreux accords collectifs sont déjà intervenus, ils n'ont pas suscité de contestation majeure. Les entreprises s'organisent en vue de la reprise. Supprimer ces mesures créerait de l'incertitude juridique.

Les dérogations aux règles de durée du travail n'ont donné lieu à ce jour à aucun décret sectoriel. Aucune entreprise ne peut porter à 12 heures la durée du travail sans que l'administration ait son mot à dire. Conserver cette facilité pourrait néanmoins se révéler utile dans certains secteurs stratégiques.

Les amendements nos204 rectifié et 205 rectifié permettent de déroger aux règles de prise de congés et de temps de travail. Avis défavorable à ces trois amendements.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Même avis.

Les mesures d'adaptation du temps de travail aident au maintien de l'emploi et du tissu économique. L'ordonnance encadre le dispositif de prise de jours de congés ou de temps de travail.

De nombreux accords de branches et d'entreprises ont déjà été signés sur le terrain et font preuve de leur utilité.

Mme Laurence Cohen.  - Les réponses du rapporteur et du Gouvernement sont incroyables ! En pleine crise, les salariés ont peur de perdre leur emploi, et on nous dit que puisqu'ils ne protestent pas, on va continuer à réduire leurs acquis sociaux !

Les jours de repos et les congés payés ont été conquis ! Vous souriez, mais on devrait travailler 32 heures, voire moins, ce serait plus juste et c'est possible ! Le jour d'après doit-il être pire qu'aujourd'hui ?

Pour détériorer les conditions de travail des salariés, il y a consensus ! Détricoter le code du travail n'a pas amélioré l'économie ! Vous remettez copieusement en cause ces acquis et ce sont toujours les mêmes qui trinquent. Si on vous imposait de telles conditions, vous protesteriez. C'est vraiment deux poids, deux mesures !

Les amendements nos239 rectifié bis, 204 rectifié et 205 rectifié ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°135 rectifié quater, présenté par M. Segouin, Mme Eustache-Brinio, MM. Vaspart, Brisson et B. Fournier, Mme Lavarde, M. Cuypers, Mme Chauvin, M. Danesi, Mme Deroche, M. Lefèvre, Mme de Cidrac, MM. Saury, Regnard et de Nicolaÿ, Mme Deromedi, MM. Bonne et Cambon, Mmes Di Folco et Dumas, MM. Milon, Frassa, Rapin et Piednoir, Mmes Thomas et Chain-Larché, MM. Vogel et Gilles, Mme Morhet-Richaud, MM. Gremillet et J.M. Boyer et Mmes Imbert et Berthet.

Après l'article 1er bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Par dérogation aux titres II et IV du livre Ier de la troisième partie du code du travail et aux stipulations conventionnelles applicables dans l'entreprise, l'établissement ou la branche, un accord d'entreprise ou de branche peut autoriser l'employeur à imposer aux salariés placés en activité partielle bénéficiant du maintien intégral de leur rémunération sur le fondement de stipulations conventionnelles, d'affecter des jours de repos conventionnels ou une partie de leur congé annuel excédant vingt-quatre jours ouvrables, à un fonds de solidarité pour être monétisés en vue de compenser tout ou partie de la diminution de rémunération subie, le cas échéant, par les autres salariés placés en activité partielle.

II.  -  Par dérogation aux titres II et IV du livre Ier de la troisième partie du code du travail et aux stipulations conventionnelles applicables dans l'entreprise, l'établissement ou la branche, un accord d'entreprise ou de branche peut autoriser la monétisation, des jours de repos conventionnels ou d'une partie de leur congé annuel excédant vingt-quatre jours ouvrables, sur demande d'un salarié placé en activité partielle en vue de compenser tout ou partie de la diminution de rémunération qu'il a subie, le cas échéant.

III.  -  Les jours de repos conventionnels et de congé annuel mentionnés au I et II du présent article susceptibles d'être monétisés sont les jours acquis et non pris, qu'ils aient ou non été affectés à un compte épargne temps.

IV.  -  Les jours de repos conventionnels mentionnés aux I et II du présent article sont ceux prévus par un dispositif de réduction du temps de travail maintenu en vigueur en application de la loi n°2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, par un dispositif de jours de repos conventionnels mis en place dans le cadre des dispositions prévues aux articles L. 3121-41 à L. 3121-47 du code du travail, et ceux prévus par une convention de forfait conclue sur le fondement la section 5 du chapitre Ier du titre II du livre Ier de la troisième partie du même code.

V.  -  Le nombre total de jours de repos conventionnels et de congé annuel pouvant être monétisés en application du I et du II ne peut excéder cinq jours par salarié.

VI.  -  Les I, II, III et IV s'appliquent à compter du 12 mars 2020 et jusqu'au 31 décembre 2020.

M. Michel Vaspart.  - Cet amendement prévoit, par accord collectif, deux mécanismes visant à compléter les revenus des salariés dans le cadre d'un placement en activité partielle.

Le premier permet à l'employeur d'organiser une solidarité entre les salariés de l'entreprise, de façon à monétiser les jours de repos ou de congés payés de ceux qui n'ont pas subi de perte de rémunération vers ceux qui ont vu leur rémunération diminuer du fait de leur placement en activité partielle.

Le second, qui repose sur le volontariat des salariés, permet aux salariés qui ont subi une baisse de leur rémunération du fait de leur placement en activité partielle, de compléter leurs revenus par la monétisation de jours de repos ou de congés payés.

Dans les deux cas, seuls les jours de repos conventionnels et les jours de congés payés correspondant à la cinquième semaine peuvent faire l'objet d'une telle monétisation.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Cette idée semble très positive. Le mécanisme fonctionnerait à l'initiative de l'employeur, après accord d'entreprise, ou sur demande du salarié concerné. Il trouverait à s'appliquer dans de nombreuses entreprises. Le droit actuel a déjà permis des accords innovants pour faire face aux conséquences de l'épidémie. Avis favorable. (Exclamations à droite)

M. Marc Fesneau, ministre.  - Cet amendement facilite les solidarités au sein de l'entreprise. Le Gouvernement est favorable aux deux mesures proposées qui permettent le maintien de la rémunération des salariés en activité partielle et qui sont conformes au droit européen. (On s'en félicite à droite.)

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Dans cet élan de générosité, je regrette de ne pas avoir proposé que les dirigeants très bien payés fassent un don aux salariés. Où en sommes-nous ? Ce sont toujours les mêmes qui doivent payer ! C'est ubuesque ! Pensons à un autre partage des richesses.

Mmes Esther Benbassa et Monique Lubin.  - Tout à fait !

L'amendement n°135 rectifié quater est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE PREMIER BIS B

M. Claude Kern .  - L'arrêt de la saison des sports professionnel 2019-2020 a été annoncé le 28 avril. Pourquoi une décision si rapide sans consultation préalable ? Pourquoi n'est-ce pas le cas dans d'autre pays, comme l'Allemagne, l'Italie ou l'Espagne ? Pourquoi ne pas avoir attendu fin mai pour voir où en était l'évolution de l'épidémie ? Certes, il fallait être prudent, mais cette décision risque d'affaiblir encore la place du sport, notamment du foot en France dont les pertes sont estimées à plus de 750 millions d'euros.

Un sportif de haut niveau a besoin de cinq à six semaines d'entrainement intensif avant de reprendre les matchs. Des protocoles de reprise par discipline seraient bienvenus. En permettant aux jeunes de reprendre leurs activités sportives favorites, on évitera les matchs sauvages, comme on l'a vu ce week-end.

Il faut soutenir la filière du sport, comme pour le tourisme. Les 36 000 clubs et 112 000 entreprises du sport ont besoin de réponses claires.

M. le président.  - Amendement n°62 rectifié bis, présenté par M. Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain.

Rédiger ainsi cet article :

Pendant la période de l'état d'urgence sanitaire déclaré par l'article 4 de la loi n°2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 et pour faire face aux conséquences de la propagation de l'épidémie de covid-19 et répondre aux demandes de mesures prises pour limiter cette propagation, les fédérations sportives mentionnées au chapitre Ier du titre III du livre Ier du code du sport et des ligues professionnelles mentionnées au chapitre II du titre III du livre Ier du même code sont autorisées à procéder à la modification de la réglementation, de la durée et de l'organisation des compétitions et des saisons sportives 2019/2020 et 2020/2021, à compter du 12 mars 2020.

M. Patrick Kanner.  - Cet amendement comble un vide juridique, suite à la suppression, par l'Assemblée nationale, d'une partie de l'ordonnance prévue au i du 2° du I de l'article 1er et donne une base légale aux décisions d'annulation de compétitions et des saisons sportives prises par les fédérations et les ligues.

Il convient en effet de protéger les ligues et les fédérations des conséquences juridiques et financières de cette décision alors que la crise les a beaucoup fragilisés. La décision du Gouvernement prise le 28 avril a été brutale.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Il me semble que le texte satisfait votre demande. Retrait ou avis défavorable.

Mme Roxana Maracineanu, ministre.  - Effectivement, cet amendement est satisfait même si j'en partage les objectifs. Ce texte a été concerté avec les acteurs du sport. Retrait ou avis défavorable.

M. Patrick Kanner.  - Je suis heureux de votre réponse.

L'amendement n°62 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°84 rectifié quater, présenté par MM. Kern, Lozach, Savin et Rambaud, Mme Jouve, MM. Karam et Laugier, Mme Duranton, MM. Gabouty, Janssens, Vaspart, Prince et Danesi, Mme Lavarde, MM. Regnard, Détraigne, Todeschini et Delcros, Mme Sollogoub, M. Chasseing, Mme Joissains, MM. Moga, Frassa, Reichardt, Mizzon, Lefèvre et de Nicolaÿ, Mmes Saint-Pé et Mélot, MM. Lagourgue et Louault, Mmes N. Delattre et Billon, MM. Grosperrin, Henno, Dufaut et Gremillet, Mme Férat, MM. Bouchet et Kennel, Mmes Goy-Chavent et Gatel, MM. Pointereau, Vogel, Chatillon, Wattebled et P. Martin, Mme C. Fournier et M. L. Hervé.

Alinéa 2

Supprimer les mots :

 et à l'issue desquelles sont délivrés les titres nationaux, régionaux ou départementaux 

M. Claude Kern.  - Il ne faut pas limiter cet article aux seules compétitions délivrant des titres afin d'intégrer des épreuves qualificatives ou de classement.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Sagesse. Je ne comprends pas les enjeux de votre amendement beaucoup trop large. J'attends les explications du Gouvernement.

Mme Roxana Maracineanu, ministre.  - C'est un amendement d'ajustement. La concertation avait évoqué ce sujet. La précision est bienvenue. Avis favorable.

Au niveau amateur et professionnel, les fédérations et les ligues ont dû mettre un terme définitif à leurs compétitions sportives, soit un tiers des matchs et rencontres qui restaient à disputer. Elles ont dû prendre des décisions financières difficiles pour certains clubs. Cette disposition les sécurise. Jusqu'à la fin de 2020, les conséquences de l'éventuel forfait des clubs dans le cadre des championnats pour 2021 pourront être adaptées en ajustant les règles. Plusieurs clubs intermédiaires ne savent en effet pas encore comment ils pourront débuter la saison prochaine. Avec cette souplesse, la reprise s'en trouvera facilitée.

L'amendement n°84 rectifié quater est adopté.

M. le président.  - Amendement n°242 rectifié bis, présenté par MM. Savin et Buffet, Mmes Di Folco et Lamure, M. Forissier, Mme Procaccia, MM. Charon et Brisson, Mme Lopez, M. Dufaut, Mme Duranton, MM. Vanlerenberghe, Henno et Grosperrin, Mmes Billon et Mélot, MM. Lagourgue et Genest, Mmes Dumas et Deromedi, MM. Wattebled, Longeot, Milon, Rapin et Laugier, Mme Vermeillet, M. Bonne, Mme Chauvin, MM. Houpert, Chatillon et Canevet, Mmes M. Mercier et Gruny, MM. de Nicolaÿ et Mouiller, Mme Morhet-Richaud, MM. B. Fournier et Fouché, Mmes Imbert, de Cidrac et Puissat, MM. Roux, Gremillet, Segouin, Pierre, Chasseing et Moga, Mmes Thomas, Chain-Larché, Noël et Guidez, MM. Danesi et Lefèvre, Mme Goy-Chavent, MM. Mandelli, Bouchet, D. Laurent, Détraigne et Panunzi, Mme Vérien, MM. Théophile, Frassa, Sol, Vaspart, Longuet, Kennel, Dallier, Pointereau, Calvet, Vogel et Decool et Mmes Micouleau et Deseyne.

Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

Les fédérations sportives délégataires et les ligues professionnelles peuvent décider de reprendre les compétitions professionnelles afin d'achever la saison 2019-2020, si la situation sanitaire le permet et après avis du comité de scientifiques prévu à l'article L. 3131-19 du code de la santé publique.

Elles définissent pour ce faire, sous leur responsabilité, et en accord avec l'État, un protocole sanitaire adapté à la reprise des compétitions qui détermine les conditions dans lesquelles les sportifs, les personnels nécessaires et le public peuvent participer à ces compétitions.

M. Michel Savin.  - Depuis l'annonce du 28 avril sur l'arrêt des championnats, nous sommes nombreux à nous interroger sur la décision prise. Pourquoi ne pas avoir attendu fin mai, comme l'ont fait d'autres pays ?

Mon amendement permet la reprise de la saison sous réserve de l'avis du Comité scientifique et du respect d'un protocole sanitaire adapté.

Si on nous demande des aides pour sauver le football français, en pleine crise économique et sociale, je veux être certain que nous aurons pris les bonnes décisions.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - J'attends les explications du Gouvernement. Sagesse.

Mme Roxana Maracineanu, ministre.  - Je partage votre volonté d'une reprise rapide des championnats dans le respect des règles qui protègent la santé des joueurs, tout d'abord, et bien sûr, les intérêts économiques de nos clubs. Je suis tout à fait d'accord pour la reprise des championnats au niveau européen, pour nos deux clubs qui représenteront la France en Champions League au mois d'août. Petit à petit, les choses reviendront à la normale, sans doute vers le mois d'août : il faut d'abord que les joueurs rejouent en groupe, puis les compétitions.

La décision du 28 avril d'arrêter la saison 2019-2020 correspond à une demande des instances, avec lesquelles on ne peut dire qu'il n'y a pas eu de concertation, puisqu'en tant que ministre j'ai vocation à parler avec la présidente de la ligue de football professionnel, le président de la fédération de football professionnel, et non pas avec les présidents des clubs, même si je les rencontre à d'autres occasions.

Cette décision a été prise dans l'intérêt général du football. Beaucoup de concertations ont eu lieu, avec tous les acteurs, y compris les ligues professionnelles et les syndicats de joueurs. L'assurance a pu être donnée à l'ensemble des acteurs du football professionnel comme amateur d'un diffuseur qui propose un contrat pour le championnat 2020-2021 qui leur permettra de disposer d'une somme importante dont ils ont besoin. C'est au mouvement sportif de décider d'une éventuelle reprise. La loi doit simplement sécuriser les décisions prises de manière démocratique par les instances du sport. Retrait ou avis défavorable.

M. Michel Savin.  - J'entends votre volonté, mais pourquoi une reprise au niveau européen et non pas au niveau national ? Il n'est pas question de s'immiscer dans les décisions des ligues et des fédérations mais de leur donner la possibilité de débattre.

Je ne souhaite pas que l'argent des ligues vienne renflouer le football professionnel, surtout s'il y a d'autres solutions. Des millions d'euros sont en jeu.

M. Jérôme Bascher.  - Eh oui !

M. Michel Savin.  - La situation est particulière pour ce sport compte tenu de l'importance des droits télévisuels.

M. Patrick Kanner.  - Le sport professionnel est au point mort depuis le 17 mars. Le Premier ministre aurait pu simplement suspendre les championnats le 28 avril mais il a tout arrêté brutalement, autoritairement. C'est regrettable ! Les Français n'ont d'autre choix que de regarder des championnats étrangers. Nous le paierons cher et vous en porterez la responsabilité ! Il est trop tard pour que les fédérations se mobilisent. Elles nous le disent tout comme le Comité national olympique. Nous sommes pour ainsi dire « dans la seringue » et le sport français est dans un état déplorable.

Nous voterons contre votre amendement. Le résultat de la décision du Gouvernement est déplorable. Vous devez l'assumer.

M. François-Noël Buffet.  - Par une décision hâtive et définitive, le Gouvernement n'a laissé aucune chance à la reprise alors que les championnats étrangers reprennent. La France, deux fois médaillée, est à l'arrêt. Pourquoi ne pas demander l'avis du Conseil scientifique ?

Des emplois sont en jeu. Il ne faut pas manquer la chance offerte par cet amendement.

Les cafés vont rouvrir le 3 juin, nous voterons le 28 juin, mais les compétitions sportives restent bloquées.

M. Claude Kern.  - J'étais tenté de suivre M. Savin mais je suis d'accord avec Patrick Kanner : il est trop tard. Beaucoup de clubs ont pris acte de la décision.

Mme Roxana Maracineanu, ministre.  - J'assume la décision d'avoir protégé la santé de nos athlètes. Ils doivent revenir progressivement à la compétition. Le 3 juin, tout ne peut pas rouvrir. Il y a des sportifs derrière les évènements : ils doivent être testés pour pouvoir s'entraîner. Espérons que les compétitions pourront reprendre en août.

Nous avons considéré les clubs professionnels comme des entreprises s'agissant du chômage partiel et des prêts garantis par l'État.

La décision prise l'a été avec les instances. Les guides sont également travaillés avec les fédérations et avec le Haut Conseil de la santé publique. Il faut reprendre mais pas à n'importe quel prix.

M. Max Brisson.  - Personne dans cet hémicycle n'a reproché au Gouvernement les mesures liées au déconfinement. Vous semblez ne pas faire confiance au mouvement sportif.

Dans le sud-ouest, la survie du TOP14 est en jeu. Le président d'un club de rugby me disait qu'il ne pourrait pas faire davantage que trois matchs. Sans adaptation à chaque fédération, le mouvement sportif sera en grand péril. Je voterai l'amendement de M. Savin.

L'amendement n°242 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°243 rectifié, présenté par MM. Savin et Kern, Mme Procaccia, MM. Charon et Brisson, Mme Lopez, M. Dufaut, Mme Duranton, MM. Vanlerenberghe, Henno et Grosperrin, Mmes Billon et Mélot, MM. Lagourgue et Genest, Mmes Dumas et Deromedi, MM. Wattebled, Longeot, Milon, Rapin et Laugier, Mme Vermeillet, M. Bonne, Mme Chauvin, MM. Houpert, Chatillon et Canevet, Mmes M. Mercier et Gruny, MM. de Nicolaÿ et Mouiller, Mmes Di Folco et Morhet-Richaud, M. B. Fournier, Mme Lamure, M. Fouché, Mmes Imbert, de Cidrac et Puissat, MM. Roux, Gremillet, Pierre et Moga, Mmes Thomas, Chain-Larché, Jouve, Noël et Guidez, MM. Danesi et Lefèvre, Mme Goy-Chavent, MM. Mandelli, Bascher, Bouchet, D. Laurent, Détraigne et Panunzi, Mme Vérien, M. Théophile, Mme Berthet, MM. Forissier, Frassa, Sol, Vaspart, Longuet, Kennel, Dallier, Pointereau, Calvet, Vogel et Decool et Mmes Micouleau et Deseyne.

Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

Au plus tard le 30 juin 2020, le comité de scientifiques prévu à l'article L. 3131-19 du code de la santé publique remet un avis sur les risques sanitaires attachés à la reprise des compétitions sportives professionnelles et amateurs pour la saison sportive 2020/2021.

Le comité de scientifiques examine également les risques sanitaires et les précautions à prendre pour l'organisation matérielle des compétitions et l'accueil du public.

M. Michel Savin.  - Cet amendement prévoit que le Comité scientifique rende un avis au 30 juin sur la reprise des compétitions sportives. Certaines disciplines ont déjà annoncé la reprise des compétitions sans aucune base scientifique. On ne pourra que regretter que la saison 2020-2021 ait lieu à huis clos si les conditions sanitaires nous y obligent, il faudra nous y plier.

Il est important que les décisions soient prises sur consultation scientifique.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Sagesse.

Mme Roxana Maracineanu, ministre.  - Je ne cesse de consulter, quasi quotidiennement, non seulement les fédérations, mais aussi le Haut Conseil de la santé publique (HCSP). Chaque décision que je prends est validée par cet organe ! Les décisions qui seront annoncées le 2 juin seront prises, évidemment, en concertation avec toutes les fédérations, les ligues professionnelles, les clubs professionnels de tous les sports. Nous avons envie que le secteur qui a subi un gros krach reprenne dès que possible, mais pas à n'importer quel prix !

Un avis du Haut Conseil sera rendu avant le 30 juin. La reprise sera progressive avec un premier objectif de 4 999 personnes réunies dans une même enceinte sportive. Nombre d'entreprises d'événementiel sportif sont mises en difficulté et nous devons y remédier, mais dans le respect des recommandations du HCSP. La reprise des championnats 2020-2021 est un objectif que nous nous sommes fixé. Derrière cet objectif il y aussi bien sûr le sport amateur et je sais combien vous y êtes attentifs. Mais nous ne mettrons pas en danger la santé des sportifs ni celle du public, qui a envie, à l'évidence, de revenir dans les stades. Retrait ou avis défavorable, puisque votre amendement est satisfait.

M. Michel Savin.  - Inscrire ces mesures dans la loi rassurera les présidents de clubs et de ligues. Les ligues et les clubs fonctionnent de manière très différente, selon qu'il s'agit du football, du rugby ou du handball. Les ligues craignent que le huis clos tombe comme une obligation faite à tous. Un avis du HCSP discipline par discipline rassurerait sur les conditions de la reprise.

M. Claude Kern.  - Je suivrai M. Savin. Il faut rassurer ligues, fédérations et clubs.

M. Max Brisson.  - M. Savin vient de me passer le ballon avec maestria ! (Sourires) Le huis clos, c'est la mort des clubs les plus fragiles dans certains sports comme le rugby où un tiers des recettes sont de convivialité. On rouvrirait les restaurants et les plages mais pas les stades ? Laissons la liberté aux ligues d'organiser la reprise.

Mme Roxana Maracineanu, ministre.  - C'est précisément la méthode que nous employons. Nous donnons un avis circonstancié issu du HCSP à chaque fédération, en passant par la médiation de la cellule interministérielle de Jean Castex, qui est aussi président de l'Agence nationale du sport et qui connaît ces sujets. Nous souhaitons que les installations sportives puissent accueillir un certain nombre de personnes, en respectant les recommandations du HCSP mais sans lui donner tout pouvoir.

L'amendement n°243 rectifié est adopté.

L'article premier bis B, modifié, est adopté.

ARTICLE PREMIER BIS

M. le président.  - Amendement n°247, présenté par M. Ravier.

Supprimer cet article.

M. Stéphane Ravier.  - Revenons à la raison d'être de ce texte. Il habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnances seulement pour répondre au caractère urgent de la situation de crise sanitaire exceptionnelle. Tout le reste est hors sujet.

Les étrangers ayant une carte de séjour avec la mention « étudiant » continuent à être aidés par leur pays d'accueil, la France.

La précarité s'aggrave de jour en jour pour les étudiants et pas seulement étrangers. En permettant aux étudiants étrangers d'exercer une activité salariée dans la limite de 80 % de la durée du travail annuelle, vous créez une filière d'immigration déguisée. Un étudiant est fait pour étudier afin de retourner ensuite, nanti de son diplôme ou de sa formation, travailler dans son pays d'origine.

Ce dispositif est donc une dérégulation supplémentaire du droit du travail, qui vise à faire avancer l'agenda politique de la majorité, soutenu par la droite libérale, sans rapport avec la crise sanitaire : il n'a donc rien à faire dans ce texte d'urgence. C'est pourquoi je demande sa suppression.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Des étrangers en situation régulière sur notre territoire souhaiteraient repartir chez eux : ils ne le peuvent pas. Ceux qui souhaitent prolonger leur titre de séjour ne le peuvent pas non plus car les administrations sont fermées. Idem pour ceux qui sont en situation irrégulière.

Les universités ont fermé. Le Gouvernement propose que les étudiants étrangers puissent travailler jusqu'à 80 % de la durée annuelle en limitant la mesure dans le temps. C'est une position assez équilibrée. Avis défavorable.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Oui, le dispositif a été introduit à l'Assemblée nationale pour résoudre une situation concrète, celle d'étudiants étrangers retenus en France faute de pouvoir se déplacer pour rentrer dans leur pays. Avis défavorable.

M. Jean-Yves Leconte.  - Cet amendement, issu de l'Assemblée nationale, une fois n'est pas coutume, me semble équilibré. Compte tenu de la détresse de nombreux étudiants, il est important de leur donner des moyens de subsistance supplémentaires. D'autant que c'est la première année qu'ils ont dû faire face à des frais de scolarité supplémentaires. Un étudiant doit étudier, certes. Mais s'il fallait que nous n'accueillions que des étudiants qui n'auraient pas besoin de travailler pour financer leurs études, ce serait une discrimination par l'argent - encore plus importante que celle pouvant exister actuellement.

L'amendement n°247 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°219, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Rédiger ainsi cet article :

À la première phrase du troisième alinéa du I de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le taux : « 60 % » est remplacé par le taux : « 80 % ».

Mme Esther Benbassa.  - L'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (Ceseda) prévoit actuellement qu'un étranger titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention « étudiant » est autorisé à travailler à 60 % de la durée de travail annuelle.

L'article premier bis augmente cette durée du travail à 80 %, de manière dérogatoire, jusqu'à la date de reprise effective des cours dans les universités et les établissements d'enseignement supérieur.

Nous ne pouvons nier le quotidien précaire et les difficultés de nombreux étudiants étrangers. Ce dispositif montre que, pour l'exécutif, l'étranger ne peut bénéficier de droits autres que dérogatoires. Pourtant, l'État devrait être responsable de tous ceux qui sont touchés par la précarité. Ce dispositif devrait être inscrit de manière pérenne dans le Ceseda.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis défavorable. Ce dispositif est lié à une situation de crise particulière. Le texte existant suffit pour le reste.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Il n'est pas question ici de changer le droit, mais d'éviter des situations de précarité en temps de crise. Avis défavorable.

L'amendement n°219 n'est pas adopté.

L'article premier bis est adopté.

ARTICLE PREMIER TER

M. le président.  - Amendement n°248, présenté par M. Ravier.

Supprimer cet article.

M. Stéphane Ravier.  - Tout est fait pour l'immigration en toutes circonstances. Le chômage explose mais il faut aider les étrangers. C'est du masochisme.

Les Français sont courageux. Ce ne sont pas des fainéants, quoi qu'en dise Emmanuel Macron. Où sont les bonnes résolutions du Gouvernement ? Au coeur de la crise, nous étions en guerre et on parlait d'union nationale. L'Union européenne a prouvé qu'elle était une chimère inutile et inefficace. L'été arrivant, vous voilà à chercher à nouveau de la main-d'oeuvre étrangère à bas coût, plutôt que de remettre en activité les travailleurs français trop chers et trop protégés par le droit du travail.

Les Français veulent être rémunérés à la hauteur de leur travail. Le système fiscal est le plus socialiste et le plus confiscatoire du monde ! Nous cumulons le pire de la droite et le pire de la gauche ! (Murmures à gauche)

Le principe de priorité nationale doit être de mise. La crise nous impose ces devoirs.

M. le président.  - Il faut conclure.

M. Stéphane Ravier.  - Vous êtes si pointilleux avec moi... (Murmures de protestation)

M. le président. - Vous avez largement dépassé votre temps de parole... (Marques d'approbation)

M. Stéphane Ravier.  - Censure ! (Exclamations et marques d'impatience sur diverses travées)

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Des travailleurs saisonniers viennent de l'étranger oeuvrer en France pour six mois. Ils ne peuvent pas repartir. Le texte, équilibré, je le répète, leur permet de travailler trois mois de plus pour répondre à une situation de crise ponctuelle. Avis défavorable.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Avec vous, je ne suis ni surpris ni déçu, monsieur Ravier...

M. Stéphane Ravier.  - C'est déjà cela !

M. Marc Fesneau, ministre.  - Oui, revenons-en à la réalité, monsieur Ravier. Certains étrangers ont le statut de saisonnier et ne peuvent pas repartir dans leur pays. Certains exploitants ont besoin de main-d'oeuvre. Nous répondons à cette exigence en prévoyant les postes grâce aux saisonniers étrangers présents sur notre territoire. Le dispositif est limité à neuf mois.

L'amendement n°248 n'est pas adopté.

La séance est suspendue à 20 heures.

présidence de Mme Valérie Létard, vice-présidente

La séance reprend à 21 h 30.

Mme la présidente.  - Amendement n°197, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Rédiger ainsi cet article :

Au second alinéa de l'article L. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le mot : « six » est remplacé par le mot : « neuf ».

Mme Esther Benbassa.  - La pandémie affectera durablement notre économie. Le monde agricole souffre de la pénurie de main-d'oeuvre.

Le Gouvernement a décidé d'allonger de six à neuf mois la durée pendant laquelle les travailleurs saisonniers peuvent exercer une activité sur le territoire, à titre dérogatoire. Mince avancée, qui montre que pour l'exécutif, le droit des personnes étrangères est une variable d'ajustement, la population migrante une main-d'oeuvre pour amortir les répercussions de la pandémie. Les droits accordés doivent être durables et non conditionnés à l'urgence sanitaire. Cet amendement les pérennise en les inscrivant dans le Ceseda.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Les saisonniers étrangers actuellement en France ne peuvent quitter le territoire, les autres ne peuvent y entrer. Cette double conjoncture explique l'extension proposée.

Votre amendement transformerait les travailleurs saisonniers en travailleurs permanents. Il n'est pas question de modifier en profondeur le Ceseda. Avis défavorable.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Votre amendement est sans lien avec la crise sanitaire. La durée maximale de travail pour les saisonniers est fixée, en France comme ailleurs en Europe, à six mois ; leur résidence habituelle reste dans leur pays d'origine. Avis défavorable.

L'amendement n°197 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°22, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et républicain.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  Au premier alinéa de l'article L. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « quatre ».

M. Jean-Yves Leconte.  - On espère que l'état d'urgence sanitaire durera moins de quatre mois. Passer de six à neuf mois pour l'autorisation de travail des saisonniers s'impose : la crise a montré combien ces travailleurs étaient indispensables à notre économie, même quand elle tourne au ralenti.

L'amendement n°22 porte la durée de la carte pluriannuelle « salarié saisonnier » de trois à quatre ans, comme pour les autres cartes pluriannuelles.

Mme la présidente.  - Amendement n°23, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et républicain.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  Au 1° de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la référence : « L. 313-23, » est supprimée.

M. Jean-Yves Leconte.  - La carte pluriannuelle « salarié saisonnier » ne doit pas être exclue des titres de séjour pouvant donner lieu à une carte de résident. Les saisonniers sont indispensables à l'économie française, nous devons leur reconnaitre un véritable statut.

Mme la présidente.  - Amendement n°24, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et républicain.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Par dérogation au 1° de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les étrangers mentionnés au premier alinéa du présent article sont considérés comme ayant leur résidence régulière en France.

M. Jean-Yves Leconte.  - Cet amendement de repli prévoit que la carte pluriannuelle « travailleur saisonnier » sera prise en compte pour la délivrance de la carte de résident aux étrangers concernés ayant travaillé en France pendant neuf mois.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Les règles du Cesada n'ont pas vocation à être modifiées au-delà de ce qu'impose l'état d'urgence sanitaire. Avis défavorable à l'amendement n°22.

Les amendements n°23 et 24 transforment le travailleur saisonnier en permanent. Or le statut de saisonnier n'a de sens que si la résidence de la personne concernée reste à l'étranger. Ne glissons pas d'un statut à un autre. Avis défavorable à l'amendement n°23, comme à l'amendement n°24. Le séjour durable est possible mais avec un titre de séjour différent et des garanties différentes.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Permettre aux saisonniers présents en France au 16 mars de revenir travailler une année de plus en France n'a pas de lien avec ce texte et complexifie la gestion du droit au séjour.

Avis défavorable à l'amendement n°22. Nous avons déjà simplifié les démarches à effectuer pour les autorisations provisoires de travail. Ce texte n'a pas non plus vocation à modifier les règles du séjour. L'amendement n°23 est contraire à la directive 2003-109 du Conseil européen du 25 novembre 2003, notamment son article 3.

Avis défavorable aux amendements nos23 et 24.

M. Jean-Yves Leconte.  - Je retire les amendements nos22 et 23 ; mais l'amendement n°24 ne fait que tirer les conséquences de la dérogation prévue pour les saisonniers, autorisés cette année à rester neuf mois en France, sur leur droit au séjour.

Les amendements nos22 et 23 sont retirés.

L'amendement n°24 n'est pas adopté.

L'article premier ter est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°198, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 1er ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La perte d'un emploi liée aux conséquences de l'épidémie de covid-19 ne peut être opposée au renouvellement du titre de séjour mention « travailleur temporaire », pendant l'état d'urgence sanitaire et dans un délai de six mois à compter de la fin de celui-ci.

Mme Esther Benbassa.  - Les personnes étrangères, en CDD, bénéficient d'un titre de séjour portant la mention « travailleur temporaire ». Comme les autres, ils ont été touchés par la crise, or leur présence sur le sol français est conditionnée à leur maintien dans l'emploi. À défaut, leur titre de séjour risque d'être considéré comme caduc. C'est injuste, les travailleurs étrangers ne devraient pas voir la peur de l'expulsion et du chômage s'ajouter à celle de la pandémie.

L'amendement propose donc que la perte d'un emploi liée à l'épidémie de Covid-19 ne puisse être opposée au renouvellement du titre de séjour mention « travailleur temporaire » pendant l'état d'urgence sanitaire et les six mois suivants.

L'amendement n°172 rectifié bis n'est pas défendu.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - La rédaction de l'amendement est trop large : qu'est-ce qu'une perte d'emploi liée à l'épidémie ? Surtout, les titres de séjour ont été prorogés de six mois de droit à compter du 16 mars. Avis défavorable.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Votre rédaction est en effet trop générale et potentiellement source de contentieux. Restons-en au droit en vigueur. Avis défavorable.

M. Jean-Yves Leconte.  - Qu'un amendement émanant du groupe LaREM ait porté sur le même sujet montre que la situation mérite clarification.

Le groupe socialiste et républicain votera cet amendement. Il faut que les personnes concernées puissent chercher un nouvel emploi dans la sérénité, sans craindre que leur séjour en France soit remis en cause. Précisons le texte, quitte à affiner la rédaction dans la navette.

L'amendement n°198 n'est pas adopté.

ARTICLE PREMIER QUATER AA

Mme la présidente.  - Amendement n°50, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe socialiste et républicain.

Supprimer cet article.

Mme Monique Lubin.  - Cet article porte un coup de canif dans notre système de retraite en donnant un droit de tirage dans les caisses de retraite des indépendants pour financer certaines aides sociales.

Le rapporteur nous dit veiller au bornage temporel, mais on sait ce qu'il en est de telles mesures provisoires, qui pourraient bien être pérennisées. De plus, on nous demande une validation a posteriori car l'autorisation a déjà été donnée - c'est un peu agaçant.

Enfin, ne commençons pas à toucher aux réserves des caisses de retraite. Des amendements du Gouvernement semblent nous donner raison.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°202 rectifié, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen, Gréaume, Assassi et Benbassa, M. Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, MM. Gay, Gontard et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Prunaud et M. Savoldelli.

Mme Laurence Cohen.  - Défendu.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Les réserves ont en effet vocation à combler des aléas économiques ou démographiques. Le Parlement est mis devant le fait accompli puisque le Conseil de la protection sociale des travailleurs indépendants (CPSTI) a déjà distribué un milliard d'euros qui est arrivé chez les artisans et les commerçants. D'autres régimes souhaitent pouvoir faire de même. Nous avons cherché un compromis en bornant le dispositif pour éviter les dérives. Le Gouvernement propose d'ailleurs un amendement identique au mien. Avis défavorable.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Ce sont les instances concernées qui ont choisi d'allouer des aides exceptionnelles, en complément de celles de l'État. Cet amendement reviendrait sur une décision autonome de ces régimes que le Gouvernement acte et encadre. Avis défavorable.

Les amendements identiques nos50 et 202 rectifié ne sont pas adoptés.

Mme la présidente.  - Amendement n°136, présenté par le Gouvernement.

Rédiger ainsi cet article :

I.  -  Le Conseil de la protection sociale des travailleurs indépendants mentionné à l'article L. 612-1 du code de la sécurité sociale et les instances de gouvernance des organismes mentionnés aux articles L. 641-5 et L. 651-1 du même code sont autorisés à affecter en 2020 une partie des réserves financières des régimes d'assurance vieillesse complémentaire et des régimes d'invalidité décès mentionnés aux articles L. 635-1, L. 640-1, L. 652-9 et L. 654-1 dudit code, dont ils assurent la gestion, au financement d'une aide financière exceptionnelle destinée aux cotisants de chacun de ces régimes et, le cas échéant, à leurs conjoints collaborateurs afin de faire face aux difficultés économiques et sociales liées à l'épidémie de covid-19.

II.  -  Les décisions d'affectation des réserves des régimes mentionnés au I du présent article sont soumises à l'approbation du ministre chargé de la sécurité sociale, qui s'y oppose dans un délai de quarante jours si :

1° La décision d'affectation des réserves d'un régime d'invalidité décès aboutit à ce que celles-ci soient inférieures à un montant égal à 150 % du montant des prestations versées par le régime en 2019 ;

2° La décision d'affectation des réserves d'un régime complémentaire d'assurance vieillesse aboutit à calculer un horizon d'extinction des réserves de ce régime inférieur à trente ans ;

3° La décision d'affectation des réserves conduit à céder des actifs financiers ou immobiliers dans des conditions de marché défavorables ;

4° La décision d'affectation des réserves aboutit à calculer pour chaque régime un fonds de roulement inférieur à trois échéances mensuelles de prestations ;

5° Le montant des réserves affectées par chaque organisme dépasse 1 milliard d'euros.

III.  -  Le présent article entre en vigueur le 23 mars 2020.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Cet amendement va dans le même sens que celui du rapporteur ; je le retire donc à son profit compte tenu du travail réalisé par le Sénat.

M. Ladislas Poniatowski.  - Très élégant !

L'amendement n°136 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°167, présenté par M. Savary.

Rédiger ainsi cet article :

I.  -  À titre exceptionnel, le Conseil de la protection sociale des travailleurs indépendants mentionné à l'article L. 612-1 du code de la sécurité sociale et les instances de gouvernance des organismes mentionnés aux articles L. 641-5 et L. 651-1 du même code sont autorisés à affecter en 2020 une partie des réserves financières des régimes d'assurance vieillesse complémentaire et des régimes d'invalidité décès mentionnés aux articles L. 635-1, L. 640-1, L. 652-9 et L. 654-1 dudit code, dont ils assurent la gestion, au financement d'une aide financière exceptionnelle destinée aux cotisants de chacun de ces régimes et, le cas échéant, à leurs conjoints collaborateurs afin de faire face aux difficultés économiques et sociales liées à l'épidémie de covid-19.

II.  -  Les décisions d'affectation des réserves des régimes mentionnés au I du présent article sont soumises à l'approbation du ministre chargé de la sécurité sociale, qui s'y oppose dans un délai de quarante jours si :

1° La décision d'affectation des réserves d'un régime d'invalidité décès aboutit à ce que celles-ci soient inférieures à un montant égal à 150 % du montant des prestations versées par le régime en 2019 ;

2° La décision d'affectation des réserves d'un régime complémentaire d'assurance vieillesse aboutit à calculer un horizon d'extinction des réserves de ce régime inférieur à trente ans ;

3° La décision d'affectation des réserves conduit à céder des actifs financiers ou immobiliers dans des conditions de marché défavorables ;

4° La décision d'affectation des réserves aboutit à calculer pour chaque régime un fonds de roulement inférieur à trois échéances mensuelles de prestations ;

5° Le montant des réserves affectées par chaque organisme dépasse 1 milliard d'euros. 

III.  -  Le présent article entre en vigueur le 23 mars 2020.

M. René-Paul Savary.  - En effet, les deux amendements sont identiques à un mot près. Ils inscrivent dans la loi des critères de soutenabilité à préserver pour les organismes et fixent des plafonds aux aides distribuées.

D'autres régimes que le régime des indépendants veulent prendre des initiatives analogues ; c'est bienvenu, mais il faut encadrer ces pratiques en évitant les ventes d'actif dans une période compliquée et en maintenant un niveau de réserves suffisant. D'où cet ensemble de garde-fous.

Il n'y a ainsi plus besoin d'ordonnance, car la mesure est inscrite en dur dans le texte.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Avis favorable.

Mme Monique Lubin.  - L'État est grand seigneur. Sachant que cet article était une erreur, il a laissé notre rapporteur l'amender. Je le répète, c'est un coup de canif dans les caisses de retraite. Mieux valait s'en tenir à la suppression.

M. François Bonhomme.  - Monsieur le ministre, faites pénitence ! (Sourires)

M. Marc Fesneau, ministre.  - J'assume la disposition proposée dans l'article et le fait de me rallier à la rédaction du rapporteur. Ne cherchons pas de querelles inutiles. Sur le fond, les mesures d'encadrement sont de nature à apaiser vos craintes. Personne n'a poussé le régime des indépendants à prendre cette décision en faveur des plus fragiles ; nous le saluons, accompagnons le mouvement, sans l'imposer, et apportons des garanties pour éviter que le système ne soit mis en péril.

Mme Laurence Rossignol.  - Quand les ministres de ce Gouvernement disent « j'assume », c'est qu'ils nous entourloupent !

M. Didier Marie.  - Les explications du rapporteur et du ministre sont inquiétantes : ils justifient le maintien du dispositif par le fait que des caisses de retraite se sont déjà engagées. Les réserves ont pour vocation de garantir le paiement des retraites de ceux qui ont cotisé. En y dérogeant, vous créez un dangereux précédent.

Si vous estimez que c'est une erreur, assumez-le et revenez sur cet article. Ce ne serait pas la première fois que vous contesteriez une décision prise par les partenaires sociaux !

L'amendement n°167 est adopté et l'article premier quater AA est ainsi rédigé.

ARTICLE PREMIER QUATER A

Mme la présidente.  - Amendement n°32, présenté par le Gouvernement.

Rédiger ainsi cet article :

I. - Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le b du 2° de l'article L. 135-2 est complété par les mots : « ainsi que de l'indemnité horaire mentionnée au II de l'article L. 5122-1 du même code » ;

2° Le 2° de l'article L. 351-3 est ainsi modifié :

a) Les références : « aux articles L. 5122-4 et L. 5123-6 » sont remplacées par la référence : « à l'article L. 5123-6 » ;

b) Sont ajoutés les mots : « ou de l'indemnité horaire mentionnée au II de l'article L. 5122-1 du même code ».

II. - Le I du présent article est applicable aux périodes de perception de l'indemnité horaire mentionnée au II de l'article L. 5122-1 du code du travail à compter du 1er janvier 2020 pour les pensions de retraite prenant effet à compter de la publication de la présente loi.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Cet amendement rétablit la rédaction de l'Assemblée nationale qui permet de créer de manière permanente des droits à retraite au titre de l'activité partielle.

Cela se justifie d'abord par l'équité, les périodes de chômage étant réputées assimilées dans la prise en compte de trimestres de retraite.

De plus, le recours à l'activité partielle n'est pas seulement un dispositif de crise : des ruptures de droit peuvent survenir. Un dispositif pérenne sera plus protecteur pour les salariés.

Enfin, le coût de cette mesure, financé par le Fonds de solidarité vieillesse (FSV), devrait être limité.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°101 rectifié, présenté par M. Mohamed Soilihi et les membres du groupe La République En Marche.

M. Thani Mohamed Soilihi.  - La commission a restreint l'application de cet article aux périodes d'activité partielle comprises entre le 1er mars 2020 et le 31 décembre 2020, éludant les difficultés de certains secteurs qui se prolongeront au-delà de 2020. Cet amendement rétablit l'article premier quater A dans sa rédaction issue de l'Assemblée nationale.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Avis défavorable car nous préférons nous limiter à la période de crise. La proposition peut être légitime, mais il faut en mesurer l'impact avant de la rendre pérenne. L'activité partielle se justifie en période de crise mais son coût est très élevé. En matière de retraite, le nombre de trimestres est important pour le calcul du taux plein. Il y aura donc des répercussions à évaluer.

Les mesures sociales sont légitimes jusqu'au 31 décembre. Au-delà, nous pourrons en discuter dans un cadre différent ; le temps viendra, avec le PLFSS ou d'autres véhicules.

Mme Laurence Rossignol.  - Cette mesure va permettre aux salariés à temps partiel de cotiser pour leur retraite, mais leurs pensions seront dégradées. Il aurait fallu que le Gouvernement aille plus loin. Pour autant, opposés à la rédaction de la commission, nous voterons cette demi-mesure.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Je note le demi-accord de Mme Rossignol. La crise a révélé une faille dans le dispositif, qui va au-delà du sujet de la crise. Les mesures de temps partiel vont se prolonger au-delà du 31 décembre ; nous stabilisons dès à présent la mesure au-delà du 31 décembre pour combler ce « trou dans la raquette ».

Les amendements identiques nos32 et 101 rectifié ne sont pas adoptés.

L'article premier quater A est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°125, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 1er quater A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Les salariés et, le cas échéant, leurs ayants droit, garantis collectivement dans les conditions prévues à l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale contre le risque décès, les risques portant atteinte à l'intégrité physique de la personne ou liés à la maternité, les risques d'incapacité de travail ou d'invalidité, les risques d'inaptitude et le risque chômage, ou qui bénéficient d'avantages sous forme d'indemnités ou de primes de départ en retraite ou de fin de carrière, continuent de bénéficier de ces garanties lorsqu'ils sont placés en position d'activité partielle, indépendamment des stipulations contraires de l'acte instaurant les garanties dans les conditions prévues au même article L. 911-1 et des clauses du contrat collectif d'assurance souscrit par l'employeur ou du règlement auquel il a adhéré.

Le non-respect de ces dispositions prive les garanties mentionnées au premier alinéa du présent I de leur caractère collectif et obligatoire au sens de l'article L. 242-1 du même code.

II.  -  Sans préjudice de stipulations plus favorables, lorsque les garanties mentionnées au I sont financées, au moins pour partie, par des primes ou des cotisations assises sur les revenus d'activité des salariés soumis à cotisations sociales au sens du même article L. 242-1 ou à la contribution mentionnée à l'article L. 136-1 du même code et déterminées par référence à cette rémunération, l'assiette de calcul des primes et des cotisations au titre du financement des garanties des salariés placés en position d'activité partielle et celle servant à déterminer les prestations sont reconstituées selon le mode de calcul défini par l'acte instaurant les garanties dans les conditions prévues à l'article L. 911-1 dudit code et le contrat collectif d'assurance ou le règlement, en substituant aux revenus d'activité précités l'indemnité brute mensuelle due en application de l'article L. 5122-1 du code du travail pour les périodes pendant lesquelles cette dernière a été effectivement perçue.

La détermination d'assiettes de calcul des cotisations et des prestations supérieures à celles résultant du premier alinéa fait l'objet d'une convention collective, d'un accord collectif ou d'une décision unilatérale du chef d'entreprise et d'un avenant au contrat collectif d'assurance souscrit par l'employeur ou au règlement auquel il a adhéré.

La reconstitution d'assiette pour le calcul des cotisations et la détermination des prestations au titre des garanties mentionnées au premier alinéa du I, ainsi que, le cas échéant, l'application d'une répartition du financement des garanties plus favorable aux salariés, ne remettent pas en cause le caractère collectif et obligatoire de ces garanties au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale.

III.  -  À titre exceptionnel compte tenu de l'état d'urgence sanitaire et de ses impacts économiques sur les entreprises, sont accordés sans frais ni pénalités par les organismes mentionnés à l'article 1er de la loi n°89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques, sur demande des employeurs, des reports ou délais de paiement des primes et cotisations dues au titre du financement des garanties mentionnées au I au bénéfice des salariés placés en activité partielle.

Par dérogation aux articles L. 113-3 et L. 145-6 du code des assurances, L. 221-8 du code de la mutualité et L. 932-9 du code de la sécurité sociale et indépendamment des clauses du contrat collectif d'assurance souscrit par l'employeur ou du règlement auquel il a adhéré, si le débiteur de l'obligation de payer les primes ou cotisations pendant la période définie au IV n'a pas exécuté son obligation, les organismes assureurs ne peuvent pas suspendre les garanties ou résilier le contrat à ce titre. À compter de la fin de cette période, ces reports ou délais de paiement des primes ou cotisations ne peuvent avoir pour effet, pour les employeurs et le cas échéant les salariés, de payer ou précompter plus de deux échéances, au cours d'une période au titre de laquelle le contrat prévoit le versement d'une échéance, sous réserve que les primes ou cotisations dues au titre de la période définie au IV soient versées au plus tard le 31 décembre 2020.

IV.  -  Le présent article est applicable à compter du 12 mars 2020 et jusqu'au 31 décembre 2020 s'agissant des I et II, et jusqu'au 15 juillet 2020 s'agissant du III.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Comme nous nous y étions engagés, cet amendement sécurise dans le dur les garanties de protection des salariés, afin qu'ils restent bénéficiaires de leur couverture santé et prévoyance. À défaut, l'entreprise sera privée des aides en matière de cotisation sociale. Les employeurs sont cependant libres de proposer des dispositifs plus intéressants pour les salariés. L'amendement prévoit aussi des reports de délai de paiement des primes et cotisations aux assureurs.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Quand vous le voulez, il n'y a pas besoin d'ordonnance ! Avis favorable.

L'amendement n°125 est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°273, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 1er quater A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Par dérogation, les Français expatriés rentrés en France entre le 1er mars 2020 et le 30 septembre 2020 n'exerçant pas d'activité professionnelle sont affiliés à l'assurance maladie et maternité sans que puisse leur être opposé un délai de carence. Les modalités d'application du présent article peuvent être précisées par décret.

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères.  - Les Français luttent contre l'épidémie partout dans le monde, y compris les trois millions de Français établis hors de France. La loi sur l'état d'urgence sanitaire de mars a abrogé le délai de carence applicable aux Français de l'étranger de retour en France pour être éligibles à la sécurité sociale. Ce dispositif venait à échéance le 1er juin. Il est proposé d'en prolonger le bénéfice au 30 septembre 2020. Cela fait écho à la proposition de loi de Bruno Retailleau, votée la semaine dernière. (MJérôme Bascher le confirme.) Le voeu du Sénat est ainsi satisfait.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - À titre personnel, avis favorable à cet amendement tombé du ciel, qui répond aux préoccupations des Français de l'étranger. (M. Jean Bizet approuve.) Combien de personnes seraient concernées ?

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État.  - Je n'ai pas de statistiques. Il y a eu une dizaine de rapatriements sanitaires, mais même si une seule personne était concernée, cette mesure serait nécessaire car nous devons assistance à nos compatriotes de l'étranger.

Dans un autre domaine, nous vous proposerons prochainement de proroger le mandat des conseillers consulaires, vu l'impossibilité d'organiser les élections dans le contexte pandémique.

M. Jérôme Bascher.  - Vous parlez d'or, monsieur le ministre : en une semaine, vous avez entendu le Sénat et Bruno Retailleau. Les Français de l'étranger ne sont pas des compatriotes de seconde zone, disait Christophe-André Frassa. Lorsque vous siégiez sur ces bancs, vous portiez vous-même ce type de mesures. Je salue votre persévérance ! (Sourires) Je voterai bien sûr cet excellent amendement.

M. Jean-Yves Leconte.  - Merci, monsieur le ministre, d'être venu défendre cet amendement que nous attendions. Dans certains pays, comme au Brésil, la perte de l'emploi entraîne celle de l'assurance maladie. Les Français ont besoin de bénéficier de la protection universelle maladie (PUMa) dès leur retour en France.

Je saisis l'occasion pour vous interpeller à nouveau sur les délais de carence pour l'affiliation à la Caisse des Français de l'étranger et les tarifs applicables en cas de difficultés financières.

L'amendement n°273 est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE PREMIER QUATER BA

Mme la présidente.  - Amendement n°33, présenté par le Gouvernement.

Rédiger ainsi cet article :

À titre exceptionnel et par dérogation aux dispositions en vigueur, une pension de vieillesse peut être entièrement cumulée avec une activité professionnelle exercée dans un établissement de santé ou un établissement médico-social pendant les mois compris dans la période d'état d'urgence sanitaire déclarée par l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19.

M. Marc Fesneau, ministre.  - La Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) a mis en place depuis mars une règle de gestion dérogatoire aux règles de cumul emploi-retraite prévues par le code de la sécurité sociale, qui permet pour les personnels soignants le cumul intégral et lève le critère de carence applicable. Une instruction similaire a été donnée à la CNRACL par le Gouvernement.

Si le Gouvernement partage votre souci de régulariser juridiquement le dispositif mis en place, il conviendrait qu'il soit rédigé en termes plus généraux pour éviter de mettre en difficulté les caisses d'assurance vieillesse, en reprenant directement dans la loi la règle de gestion qui n'a soulevé aucun problème d'application.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Cela fait partie des prérogatives du directeur de la CNAV, dont acte. Mais il faudra revoir plus tard les règles du cumul emploi-retraite. En attendant, avis favorable à cette dérogation : les soignants qui ont repris une activité temporaire doivent pouvoir être rémunérés correctement.

Mme Monique Lubin.  - J'aimerais que nous soyons certains que la mesure reste exceptionnelle, sur une période limitée et pour les personnels cités. L'instauration du cumul emploi-retraite serait un changement de philosophie.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Oui, le dispositif est cadré dans le temps et ne concerne que quelques dizaines de cas.

M. Jean-Marc Gabouty.  - Je suis favorable à cette mesure dès lors qu'elle est encadrée. Aujourd'hui, le cumul emploi-retraite est autorisé mais si le travail s'effectue dans le même établissement, un délai de carence de six mois s'applique. C'est un dispositif bancal.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Il s'agit effectivement, madame Lubin, d'un dispositif dérogatoire destiné à éviter le délai de carence et le plafonnement des revenus. Il serait malheureux que ces soignants ne soient pas rémunérés correctement.

L'amendement n°33 est adopté et l'article premier quater BA est ainsi rédigé.

ARTICLE PREMIER QUATER B

Mme la présidente.  - Amendement n°249, présenté par M. Ravier.

Supprimer cet article.

M. Stéphane Ravier.  - Cet article permet aux étrangers séjournant en France et dont les documents de séjour arrivent à échéance entre le 16 mai et le 15 juin de les prolonger de six mois, soit jusqu'au 15 décembre ! De plus, l'article 311-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers prévoit déjà dans certains cas une dérogation de trois mois.

On galvaude toujours plus le droit d'asile. Toujours plus de laxisme, jamais plus de fermeté... c'est consternant ! On aurait pu au moins expulser les déboutés testés positifs au Covid-19 ! (On se récrie sur diverses travées ; Mme Laurence Cohen s'esclaffe.)

Les frontières ne sont pas une aberration sanitaire, contrairement à ce que prétendaient nos dirigeants. Cela s'appelle être pragmatique. Mais au nom du mondialisme, on nous confine entre quatre murs, fixant de nouvelles frontières à nos libertés, sans que nous le contestions.

On aurait pu, peut-être, éviter la crise en fermant les frontières. Le contrôle de l'immigration doit être effectué dans le cadre de la loi. La situation d'urgence sanitaire ne justifie pas de succomber à la facilité administrative en prolongeant les documents de séjour de six mois.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Nous parlons de personnes étrangères en situation régulière, qui ne peuvent prolonger leur titre de séjour du fait de la fermeture des préfectures. Souhaitons que la délivrance de ces titres puisse reprendre au 15 juin grâce à l'embauche de 200 ETP. Avis défavorable.

M. Marc Fesneau, ministre.  - C'est effectivement l'objectif. Il s'agit d'une mesure temporaire. Je sais, monsieur Ravier, que vous avez une réponse pour tout problème et que le monde irait mieux en vous écoutant. Déposez donc un brevet si vous avez tant de lumières sur le Covid-19 !

Je vous invite à un peu de modestie. Vous assénez des contre-vérités. Regardez les autres pays ! Vous seriez bien le seul à savoir comment lutter contre la pandémie. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe UC ; M. Thani Mohamed Soilihi applaudit également.)

M. Éric Kerrouche.  - Cet amendement est pathétique.

Si le vaccin contre le Covid n'est pas encore disponible, il y en a un contre la rage... (Rires et applaudissements sur de nombreuses travées)

L'amendement n°249 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°221, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Alinéa 1

Remplacer la date :

15 juin

par la date :

4 septembre

II.  -  Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

...° Attestations de demandes d'asile.

Mme Esther Benbassa.  - Cet article prévoit la prolongation des différents titres de séjour dont bénéficient les personnes étrangères dont les titres ont expiré entre le 16 mai et le 15 juin.

Il s'agit ici d'un amendement d'appel. Depuis le 11 mai, les Français ont retrouvé une relative liberté mais que se passerait-il si une deuxième vague survenait ? De nouveaux clusters ont surgi. Un reconfinement en juin interdirait aux préfectures de traiter les demandes des personnes étrangères. Afin de permettre la décongestion progressive des services, cet amendement décale la date de délivrance des titres de séjour du 15 juin au 4 septembre. Il faut sécuriser les droits des étrangers.

Mme la présidente.  - Amendement n°220, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Alinéa 1

Remplacer la date :

15 juin

par la date :

10 juillet

II.  -  Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

....° Attestations de demande d'asile.

Mme Esther Benbassa. - L'article prolonge de 180 jours la validité des visas de longs séjours, les titres de séjour, les autorisations provisoires de séjour. Les attestations de demande d'asile bénéficieront, quant à elles, d'une prolongation de 90 jours.

Si cette mesure va dans le bon sens, pourquoi deux délais différents ? Nous proposons d'harmoniser la mesure en fixant la prolongation à 180 jours. En outre, le 15 juin est trop proche, les préfectures étant surchargées de demandes multiples, elles n'auront sans doute pas repris une activité normale. Il convient donc de repousser cette échéance au 10 juillet.

Mme la présidente.  - Amendement n°25, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéas 1 et 6

Remplacer la date :

15 juin

par la date :

10 juillet

M. Jean-Yves Leconte.  - L'Assemblée nationale a fait le pari que les préfectures pourront reprendre une activité normale le 15 juin. C'est juste impossible. Nous proposons donc de décaler la date à l'issue de l'état d'urgence sanitaire, à savoir le 10 juillet. Cela nous semble plus raisonnable.

Les préfectures devront en outre s'adapter au nouveau système que vous introduisez et dont nous discuterons tout à l'heure. Raison de plus pour leur donner du temps.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Monsieur Leconte, vous avez peut-être raison, nous n'avons nulle certitude que le redémarrage au 15 juin donnera les résultats attendus ; mais les dispositions dérogatoires doivent être aussi strictement limitées que possible, quitte à envisager ensuite une prolongation. Alors, monsieur Leconte, vous aurez la satisfaction d'avoir vu juste !

Avis défavorable aux trois amendements.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Dès le 15 juin, les nouvelles demandes pourront être traitées. Le cas de ceux dont les titres de séjour expirent à partir du 15 juin sera examiné en priorité. Le cas de ceux dont les titres ont déjà expiré a été traité en mars par vos deux assemblées.

En outre, M. Leconte craint que d'autres mesures, touchant l'organisation du travail dans les préfectures, s'ajoutent pour contrarier le traitement des dossiers. Tel ne sera pas le cas.

Le virus réapparaîtra-t-il début juin ? Nous aviserons. Pour l'heure, nous amorçons le déconfinement, nous nous plaçons donc dans une perspective de réouverture des préfectures.

Avis défavorable aux trois amendements.

M. Didier Marie.  - On peut avoir des divergences de fond, mais l'amendement n°25 est simplement pragmatique. Dans la vraie vie, les files d'attente sont la norme pour ceux qui demandent le renouvellement d'un titre de séjour. Imaginez la situation après trois mois de fermeture des préfectures ! Quand il y a trop de monde, on demande aux personnes de revenir le lendemain ; et cela peut se reproduire de jour en jour. Pensez au stress que cela représente, pour les demandeurs et pour les services de la préfecture qui seront sous pression. Donnons un peu de souplesse et un peu d'air à tous.

M. Jean-Yves Leconte.  - Il y a déjà des files d'attente aux bureaux des étrangers en temps normal... Or les amendements qui seront sans doute adoptés dans l'article suivant modifieront l'organisation du travail des préfectures. Quelques jours supplémentaires donneraient un peu d'air...

L'amendement n°221 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos220 et 25.

Mme la présidente.  - Amendement n°89 rectifié, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'alinéa 5

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Pendant la durée de l'état d'urgence sanitaire déclaré en application de l'article 4 de la loi n°2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face l'épidémie de covid-19 et prorogé par l'article 1er de la loi n°2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions, les étrangers titulaires d'un visa de court séjour et les étrangers exemptés de l'obligation de visa qui, en raison de restrictions de déplacement, sont contraints de demeurer sur le territoire national au-delà de la durée maximale de séjour autorisée se voient délivrer par l'autorité compétente une autorisation provisoire de séjour. Les modalités d'application du présent article et la durée maximale de l'autorisation provisoire de séjour sont précisées par décret.

M. Jean-Yves Leconte.  - Il faut trouver une solution pour les étrangers titulaires d'un visa de court séjour ou dispensés d'une obligation de visa, qui ont été bloqués sur le territoire français en raison de la crise sanitaire sans possibilité de rejoindre leur pays.

Nous avons essayé de le faire dans la loi sur l'état d'urgence sanitaire mais cela impliquait d'élargir le périmètre d'une habilitation. C'est une solution provisoire pour régler la situation de ces personnes.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°170 rectifié ter, présenté par M. Yung et les membres du groupe La République En Marche.

M. Thani Mohamed Soilihi.  - J'ajoute un argument : la Commission européenne invite les États membres à « délivrer un visa de long séjour ou un permis de séjour temporaire aux titulaires d'un visa de court séjour et aux personnes exemptées de visa qui sont obligés de rester au-delà de la durée maximale de 90 jours sur toute période de 180 jours ».

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Le problème est réel. La solution proposée, une autorisation provisoire de séjour strictement liée à la crise sanitaire et à l'arrêt des transports internationaux, est bienvenue. Avis favorable.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Depuis la mise en place de l'état d'urgence sanitaire, l'autorisation de séjour est prolongée de fait, de manière dématérialisée, par les préfectures, sans qu'un véhicule législatif n'ait été nécessaire.

Dès le 17 mars, ces demandes ont été traitées. Avis défavorable à cet amendement qui est inutile.

M. Jean-Yves Leconte.  - J'ai interrogé les ministres de l'Intérieur et des Affaires européennes, qui ont répondu qu'il suffisait de contacter les préfectures ; or celles-ci - lorsqu'elles traitent ces demandes - n'apportent pas toutes les mêmes réponses. L'inscription de la mesure dans la loi est donc nécessaire.

De plus, ces étrangers pourraient être blacklistés à leur prochaine demande, car réputés irréguliers en raison de leur présence dans l'espace Schengen sans autorisation pendant plus de 180 jours. Il faudra prendre des dispositions au niveau européen pour l'éviter.

M. Éric Kerrouche.  - Monsieur le ministre, je ne comprends pas. Le dispositif est circonscrit et nous prémunit contre les différences de traitement. Pourquoi ne pas l'accepter ? Le cas par cas n'est pas souhaitable.

Les amendements identiques nos89 rectifié et 170 rectifié ter sont adoptés.

Mme la présidente.  - Amendement n°47 rectifié, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'alinéa 5

Insérer deux paragraphes ainsi rédigés :

...  -  Une autorisation provisoire de séjour est délivrée à tout étranger dont la demande de titre de séjour n'a pu être engagée ou n'a pu aboutir en raison de l'état d'urgence sanitaire.

....  -  Durant la période de l'état d'urgence sanitaire déclaré en application de l'article 4 de la loi n 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 et prolongé par l'article 1er de la loi n°2020-546 du 11 mai prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions, une autorisation provisoire de séjour est accordée aux jeunes étrangers accédant à la majorité ou un récépissé de première demande de titre de séjour aux jeunes fêtant leur dix-neuvième anniversaire pendant toute la durée de suspension de l'activité des services préfectoraux liés à la lutte contre le virus covid-19.

M. Jean-Yves Leconte.  - La loi d'urgence du 23 mars 2020 a permis la prolongation, pour 90 puis 180 jours, de divers documents de séjour expirant entre le 16 mars et le 15 mai 2020, mais ni les ordonnances du 25 mars et du 22 avril 2020 ni le présent projet de loi n'ont pris en compte la situation de nombreuses personnes qui ont besoin d'un traitement d'urgence par la préfecture : personnes attendant un rendez-vous annulé par le confinement, jeunes accédant à la majorité, etc. Pour les préfectures déjà saturées habituellement, organiser une reprise d'activité au 15 juin pour répondre à ces besoins supplémentaires sera un véritable défi.

L'amendement résout une partie de ces situations. 

Mme la présidente.  - Amendement n°222 rectifié, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'alinéa 5

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

....  - Durant la période de l'état d'urgence sanitaire déclaré en application de l'article 4 de la loi n°2020-290 du 23 mars 2020 pour faire face à l'épidémie de Covid-19 et prolongé par l'article 1er de la loi n°2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions, une autorisation provisoire de séjour est accordée aux jeunes étrangers accédant à la majorité.

Un récépissé de première demande de titre de séjour est dispensé aux jeunes à leur dix-neuvième anniversaire pendant toute la durée de suspension de l'activité des services préfectoraux, liée à la lutte contre le virus Covid-19.

Mme Esther Benbassa.  - La pandémie a rendu encore plus vulnérables les étrangers en France.

Des associations, comme la Cimade, ont ainsi alerté les parlementaires sur la précarité des personnes migrantes, notamment les jeunes étrangers accédant à la majorité.

Cet amendement leur donne une relative sérénité grâce à une autorisation provisoire de séjour automatique à la majorité, et un récépissé.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Avis défavorable à ces deux amendements qui font fi du droit de l'immigration : il suffirait d'être présent sur le territoire pour obtenir un titre de séjour et d'avoir 19 ans pour obtenir un récépissé pour un dossier qu'il n'est même pas demandé de déposer !

M. Marc Fesneau, ministre.  - Il faut, dans ce texte, raisonner à droit constant tout en tenant compte des fragilités de certaines personnes pendant la pandémie.

Avis défavorable aux deux amendements.

L'amendement n°47 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°222 rectifié.

L'article premier quater B, modifié, est adopté.

L'amendement n°171 rectifié n'est pas défendu.

ARTICLE PREMIER QUATER CA

Mme Esther Benbassa .  - Cet article, introduit en commission par François-Noël Buffet, reprend l'article 38 du projet de loi ASAP, voté en février 2020, supprimant toute référence législative au récépissé au profit d'un document provisoire, dans le cadre de la mise en place d'un nouveau service de dépôt en ligne des demandes de titres de séjour. Mais la dématérialisation pénalise les étrangers en situation de précarité. Elle doit rester une faculté.

Ensuite, l'article renvoie au domaine réglementaire les règles de délivrance des récépissés, alors que le Sénat se bat contre les ordonnances ! Le Parlement ne doit pas renoncer à ses compétences.

Enfin, remplacer le récépissé par un document aux contours flous pourrait nuire aux droits des étrangers.

Mme la présidente.  - Amendement n°26, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et républicain.

Supprimer cet article.

M. Jean-Yves Leconte.  - Vous faites ici entorse à votre propre règle, car cet amendement change les procédures au-delà de la seule période de crise.

En outre, la mesure a déjà été adoptée par la loi ASAP. Doit-on refaire le débat ?

Le Sénat a lancé une mission sur l'illectronisme. C'est un sujet réel. Or il est ici proposé de dématérialiser une procédure concernant des étrangers, qui plus est aux conditions de vie précaires.

Par ailleurs, l'article renvoie au pouvoir réglementaire une compétence législative, concernant les droits attachés aux récépissés.

Si vous faites autant confiance à la dématérialisation, faites-le aussi pour les papiers d'identité des Français ! La disposition est déséquilibrée. Notre amendement supprime donc l'article.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°250, présenté par M. Ravier.

M. Stéphane Ravier.  - Cet article autorise les étrangers à séjourner en France sans attestation de demande de délivrance ou de renouvellement d'un titre de séjour ou de récépissé, mais simplement avec un « document provisoire » qui leur permettrait par ailleurs d'exercer une activité professionnelle. Tant qu'on y est, abolissons les papiers d'identité pour aller vers le beau vivre-ensemble. Ce vivre-ensemble que vous célébrez sans le vouloir en bas de chez vous, c'est la violence généralisée.

Cette violence, n'en déplaise à une artiste sans talent ni public, n'est pas le fait de la police mais de la racaille qui déteste ce qui fait la France.

La facilité administrative vis-à-vis des étrangers risque d'aggraver la crise sanitaire. Toujours plus de laxisme pour les filières d'immigration, voilà la conséquence de la crise. Les restaurants souffrent pendant que M. Castaner veut accueillir toute la misère du monde et que Mme Belloubet ouvre les prisons.

Comme la France qui se retrousse les manches, je ne m'y résigne pas et demande la suppression de cet article, ajouté par une commission de lois à majorité Les Républicains.

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Je ne suis pas sûre que François-Noël Buffet reconnaisse son amendement... Il s'agit, par la dématérialisation, de faciliter les procédures de demande de titres alors que sont fermées les préfectures.

Cet amendement est donc loin de porter toute la misère du monde. Au contraire, il facilitera les demandes.

Oui, monsieur Leconte, nous modifions le Ceseda, mais pas le fond du droit des étrangers.

Avis défavorable sur les deux amendements.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Ces amendements n'ont pas les mêmes motivations, ou alors quelque chose m'a échappé ! (Sourires)

M. Jérôme Bascher.  - Vous suivez parfaitement la discussion, monsieur le ministre ! (Nouveaux sourires)

M. Marc Fesneau, ministre.  - Vous aussi, manifestement. (Même mouvement)

M. Ladislas Poniatowski.  - Cela fait donc deux ! (On s'amuse sur diverses travées.)

M. Marc Fesneau, ministre.  - M. Leconte a évoqué les risques de la dématérialisation mais précédemment, vous nous avez alertés sur les difficultés des préfectures. L'attestation avec un code d'identification sera plus sécurisée et la procédure d'obtention facilitée. Le déplacement est en général plus compliqué que la dématérialisation.

Monsieur Ravier, au-delà du programme électoral de votre formation politique, que vous ne cessez de répéter, vous avez dit des choses inexactes.

Intéressez-vous au fond des dossiers au lieu de tout caricaturer ! Le sujet posé est celui de la dématérialisation des procédures, et pas un autre.

Avis défavorable aux deux amendements.

M. Jean-Yves Leconte.  - Si ces sujets relèvent désormais du pouvoir réglementaire, nous souhaitons des garanties sur le maintien des droits attachés à ces documents. Nous ne les avons pas obtenues ce soir. Après tout, si l'on veut mettre en place la dématérialisation, il faut le faire partout. On pourrait l'étendre aux cartes d'identité et les passeports. S'il suffit d'envoyer une photo, si les empreintes sont dans les fichiers, pourquoi demander aux personnes de se déplacer en préfecture ? Le ministre de l'Intérieur doit avancer sur cette question !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Les droits qui découlent des documents remplaçant le récépissé sont précisés par la loi et le règlement.

M. Didier Marie.  - Il s'agit d'une modification au fond du Ceseda. Nous en prenons acte. La dématérialisation des procédures administrative pose de nombreux problèmes, notamment pour les détenteurs de titres de séjour. Le Défenseur des droits vous a alerté sur le sujet. Les récépissés sont également cités dans le code de l'action sociale et des familles, il faudrait en tenir compte. Enfin, les récépissés sont mentionnés dans la liste des titres autorisant le franchissement des frontières dans Schengen. La dématérialisation ne risque-t-elle pas d'entraîner des difficultés en cascade ? Mieux vaut supprimer l'article.

Les amendements identiques nos26 et 250 ne sont pas adoptés.

L'article premier quater CA est adopté.

ARTICLE PREMIER QUATER C

Mme Esther Benbassa .  - Cet article prévoit la prolongation du bénéfice de l'ADA, allocation pour demandeur d'asile, pour les étrangers ayant cessé d'être éligibles après le 16 mars 2020. Nous saluons cette décision, car ils n'ont d'autre revenu pour survivre.

Cet article est l'occasion d'attirer l'attention du Gouvernement sur l'obsolescence prochaine des cartes de paiement de l'ADA. Il faudra remplacer 60 000 cartes d'ici fin août. Dans certaines régions vastes, comme la Bretagne ou la Nouvelle-Aquitaine, les directions compétentes sont peu nombreuses et les migrants devront déroger à la règle des 100 kilomètres pour aller récupérer leur carte. Il faudrait une dérogation.

Mme la présidente.  - Amendement n°251, présenté par M. Ravier.

Supprimer cet article.

M. Stéphane Ravier.  - Le 26 mai est une date historique pour Marseille. Le 26 mai 1993 a marqué la victoire de Marseille en coupe d'Europe...

M. Jérôme Bascher.  - Sur un très beau but de Basile Boli !

M. Stéphane Ravier.  - But marqué à la suite d'un corner d'Abedi Pelé. À Jamais les premiers, et toujours les seuls, n'en déplaise aux supporters parisiens !

On ne trouve plus d'argent pour les hôpitaux, ni pour les armées, ni pour les services publics territoriaux...

Mme Laurence Rossignol.  - On en trouve toujours pour le football.

M. Stéphane Ravier.  - ... mais personne ici ne remet en cause la prolongation des allocations pour les étrangers. Personne, sauf moi.

La Cour des comptes a chiffré à 6,5 millions d'euros le coût des dispositions inscrites dans le code de l'entrée et du séjour des étrangers en France. Les services de recherche économique du Premier ministre évaluent à 1,65 point de PIB annuel le coût de l'immigration, soit 40 milliards d'euros par an.

M. Éric Kerrouche.  - Dites aussi ce qu'elle rapporte !

M. Stéphane Ravier.  - Alors que le PIB devrait chuter de plus de 8 %, voilà une belle solution d'économies. Cela nécessite une fermeture des frontières. Mais pour y consentir, il faudrait une crise sanitaire grave et un confinement de deux mois. Ces conditions ont été réunies, hélas vous n'avez pas réussi à retirer vos oeillères idéologiques.

Toujours l'autre avant les nôtres !

Mme Muriel Jourda, rapporteur.  - Nous parlons de l'ADA, qui ne concerne pas les bénéficiaires du droit d'asile mais les demandeurs. La prolongation de l'ADA pour les déboutés jusqu'à fin juin s'explique par le quasi-arrêt des expulsions. Les personnes ne peuvent ni quitter la France ni être expulsées, et sont privées de ressources. Cela concerne 8 000 personnes pour une moyenne de 395 euros par mois par ménage. Les personnes ont besoin de vivre et ne peuvent légalement travailler.

Avis défavorable. Le simple pragmatisme commanderait de rejeter cet amendement. Je ne vous demande pas de faire preuve de pragmatisme, mais d'humanité. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

M. Jean-François Husson.  - Cela fait du bien d'entendre un tel propos.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Avis défavorable pour les mêmes motifs. Les bénéficiaires de l'ADA sont en grande précarité. Durant la crise, nous les avons accompagnés et nous avons autorisé les demandeurs d'asile qui auraient dû quitter leur hébergement à y rester. Par cohérence, évitons la rupture de versement de l'allocation. La mesure est proportionnée.

Mme Corinne Féret.  - Vos amendements, monsieur Ravier, prennent l'étranger comme fond de commerce. Soyez déçu, vous ne nous avez pas convaincus. Vous êtes libre de vos propos et de vos amendements, mais avez-vous imaginé que vous pourriez être à votre tour étranger dans un pays lointain ? Quelle serait alors votre réaction ?

L'amendement n°251 n'est pas adopté.

L'article premier quater C est adopté.

ARTICLE PREMIER QUATER

Mme la présidente.  - Amendement n°206 rectifié, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen, Gréaume, Assassi et Benbassa, M. Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, MM. Gay, Gontard et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Prunaud et M. Savoldelli.

Supprimer cet article.

Mme Laurence Cohen.  - L'article premier quater, inséré par l'Assemblée nationale reprend les dispositions de l'article 43 du projet de loi ASAP, adopté par le Sénat le 5 mars 2020.

Il ouvre la possibilité aux entreprises de moins de onze salariés qui n'ont pas de délégués syndicaux et d'élus au Conseil social et économique de négocier un accord d'entreprise pour mettre en place un dispositif d'intéressement par une décision unilatérale de l'employeur.

Nous nous y étions déjà opposés et demandons à nouveau la suppression d'un dispositif qui justifie l'absence de revalorisation des salaires par l'association aux résultats de travailleurs et travailleuses qui ne sont pas décisionnels dans les orientations de l'entreprise.

C'est extrêmement couteux pour la Sécurité sociale puisqu'en 2019, la suppression du forfait social a entrainé une perte de recettes de 700 millions d'euros. (M. Jérôme Bascher s'exclame.)

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - Avis défavorable car contraire à la position de la commission, favorable au développement de l'intéressement.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°206 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°234 rectifié bis, présenté par MM. Gabouty, Requier, Arnell, Artano, Bonnecarrère, Cabanel, Cadic, Chasseing, Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Canevet, Capus, Danesi, Decool, Delcros, Gold et Guerriau, Mme Guillotin, M. Jeansannetas, Mme Jouve, M. Labbé, Mmes Laborde et Lamure, MM. L  Nay et Longeot, Mme Loisier, MM. Kern, Moga et Maurey, Mmes Gatel et Pantel, M. Roux, Mme Joissains et M. Vall.

Alinéa 5, première phrase

Remplacer le mot :

onze

par le mot :

cinquante

et le mot :

cinq

par le mot :

deux

M. Jean-Marc Gabouty.  - Le Gouvernement et une large majorité de cette assemblée sont favorables au développement de l'intéressement.

Cet amendement l'étend aux entreprises de moins de cinquante salariés. S'agissant du délai d'absence d'accord d'intéressement dans la durée, il abaisse sa durée de cinq à deux ans.

Les dispositions de la loi Pacte relatives à l'intéressement avaient pour objectif de favoriser la conclusion de contrats d'intéressement dans les entreprises de moins de cinquante salariés en supprimant le forfait social, mais elles restaient incitatives.

Cette loi représente une excellente occasion d'inciter les PME de dix à cinquante salariés de s'orienter vers une adhésion durable à un régime d'intéressement en leur permettant de bénéficier pendant trois ans de ce dispositif dérogatoire par décision unilatérale.

L'amendement ne change rien pour les entreprises de moins de dix salariés.

Mme la présidente.  - Amendement n°235 rectifié bis, présenté par MM. Gabouty, Requier, Arnell, Artano, Bonnecarrère, Cabanel, Cadic, Canevet, Capus, Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Danesi, Decool et Gold, Mme Loisier, MM. Chasseing et Kern, Mme Gatel, MM. Guérini et Guerriau, Mme Lamure, M. Le Nay, Mme Joissains, MM. Delcros, Longeot, Maurey et Moga, Mmes Guillotin et Laborde, M. Labbé, Mme Jouve, M. Jeansannetas, Mme Pantel et MM. Roux et Vall.

Alinéa 5, première phrase

Remplacer le mot :

cinq

par le mot :

deux

M. Jean-Marc Gabouty.  - Le délai de cinq ans séparant la date d'effet de mise en place par décision unilatérale de la dernière conclusion, et même l'application d'un contrat d'intéressement, ne semble pas justifié. En effet, la durée d'un contrat d'intéressement étant de trois ans, les entreprises ayant conclu un contrat d'intéressement au cours des huit dernières années seraient privées d'un tel dispositif, ce qui paraît tout à fait excessif.

C'est un amendement de repli.

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - La commission a donné un avis favorable. La mise en oeuvre de l'intéressement par accord n'est justifiée que pour les TPE.

Avis défavorable à l'amendement n°234 rectifié bis.

Sagesse sur l'amendement n°235 rectifié bis.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Seulement 3,2 % des salariés des entreprises de moins de dix salariés sont couverts par un accord d'intéressement en 2019 contre 10 % dans les entreprises de dix à cinquante salariés et 70 % pour les entreprises de plus de mille salariés.

Nous avons donc ciblé la mesure sur les entreprises de moins de onze salariés. Pour inciter les PME de onze à cinquante salariés à mettre en place l'intéressement, il y a des mesures dans la loi Pacte, notamment l'accord type par branche professionnelle auquel il est possible d'adhérer unilatéralement.

Le délai de deux ans nous semble trop court. Les entreprises qui ne remplissent pas les délais de cinq ans peuvent toujours conclure un accord de droit commun. Avis défavorable à l'amendement n 234 rectifié bis.

Le régime d'intéressement par mesure unilatérale est une faculté d'amorçage qui devrait être réservée à sa première mise en place. Avis défavorable à l'amendement n°235 rectifié bis.

M. Michel Canevet.  - Dans les entreprises de petite taille, il faut avancer vers l'intéressement et les propositions de M. Gabouty vont dans ce sens.

Je regrette les réponses par trop administratives du ministre : pourquoi ne pas se passer de l'accord de la Direccte et de l'inspection du travail sur les accords d'intéressement en inscrivant les choses dans la loi ? On libérera du temps administratif des agents de la Direccte pour qu'ils se concentrent sur leur coeur de métier : le contrôle du travail.

M. Philippe Mouiller.  - Je voterai ces amendements qui tiennent compte du vécu des entreprises. Nous sommes dans une situation de crise et d'urgence, où il faut relancer l'implication des salariés en l'absence de certitudes économiques.

L'intéressement peut être cet outil lorsqu'il est difficile d'assurer le versement d'une prime. Élu de la ruralité, je puis témoigner de l'implication des salariés dans les PME ; l'intéressement, pour leur assurer un retour, est un meilleur outil que la prime. C'est particulièrement vrai dans cette période difficile, où il fallait l'aménager. La droite a toujours promu l'intéressement et j'appelle chacun ici à soutenir cet amendement dans le contexte de la crise.

M. Jérôme Bascher.  - Je songe évidemment à Serge Dassault qui a parlé ici de l'intéressement (On s'en souvient sur quelques travées.), qui est surtout une idée profondément gaulliste. Le Général, justement, disait qu'il fallait aller vers l'orient compliqué avec des idées simples... (Murmures)

L'intéressement, c'est l'inverse : c'est simple et l'administration française en a fait quelque chose de compliqué et de technocratique, défigurant des principes fondamentaux auxquels sont attachés les Français. (« Très bien ! » et applaudissements au centre et à droite)

M. Franck Menonville.  - Notre groupe soutient ces amendements de justice et de bon sens. (« Très bien ! » à droite)

M. Jean-François Husson.  - Justice, voilà le mot. Il faut trouver un équilibre entre les efforts des salariés en cette période et leur récompense.

Le 13 mai, le Président de la République annonçait vouloir modifier le dispositif « quoi qu'il en coûte ». Monsieur le ministre, écoutez ceux qui vous soutiennent au Sénat. Faites honneur à l'esprit de concorde et d'unité nationale que vous appelez de vos voeux.

Mme Laurence Cohen.  - En voici une idée simple et partagée par tous les Français : quand on donne de son temps, surtout en cette période, comme le font les soignants, on veut d'abord des augmentations de salaires !

M. Michel Canevet.  - Ce n'est pas du tout la même chose ! (On surenchérit sur plusieurs travées au centre et à droite.)

M. Éric Kerrouche.  - Puisque nous en sommes aux débats gauche-droite, ce n'est pas une mesure juste, c'est juste une mesure (Quelques sourires) et qui ne répond pas aux attentes des Français.

Le plus important, avec un salaire médian à 1 800 euros, c'est une augmentation des salaires dans le temps alors que l'intéressement est variable...

M. Michel Canevet.  - Justement !

M. Éric Kerrouche.  - Le groupe socialiste et républicain ne votera pas ces amendements.

M. Jean-Marc Gabouty.  - N'opposons pas l'intéressement au salaire, car il est pris après le résultat de l'entreprise et avant l'impôt et la distribution des dividendes...

M. Jérôme Bascher.  - Très juste !

M. Jean-Marc Gabouty.  - Il est donc pris, non sur les salaires, mais sur les dividendes versés aux actionnaires et sur l'État, via l'impôt sur les sociétés.

M. Michel Canevet.  - Très bien !

M. Jean-Marc Gabouty.  - Ainsi, 17 milliards d'euros sont versés aux salariés chaque année. Ce n'est pas négligeable mais cela n'empêche pas ensuite des négociations de salaires.

Dans les entreprises de dix à cinquante salariés, l'intéressement est trois fois plus important que dans la tranche inférieure. À 10 %, monsieur le ministre, il serait malvenu de s'en féliciter ! Le ministre des Comptes publics a récemment fait l'éloge, à titre personnel, de l'intéressement : c'est l'occasion de joindre les paroles aux actes !

Quand vous dîtes que c'est trop tôt, c'est dû à une ambiguïté rédactionnelle : il faut modifier le texte sur la durée de carence.

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Avec ces amendements, nous entrons dans le vif du sujet des attentes de nos concitoyens au sortir de la crise sanitaire.

Les concepteurs de l'intéressement ont, voici soixante ans, recherché un équilibre. Il ne doit pas dissuader l'employeur d'augmenter les salaires. C'est pourquoi il ne fait pas l'objet de cotisations sociales. Traditionnellement, il est soumis à un accord de branche ou d'entreprise.

Ce texte prend acte du fait qu'il y a « peu d'accords dans les TPE, ou peu de représentants du personnel. »

Compte tenu des difficultés des entreprises, ne convient-il pas de faire bouger les lignes de démarcation entre l'intéressement et le salaire, en en donnant l'accès aux salariés qui n'ont pas la chance d'avoir un accord d'entreprise ?

Ces amendements ont le mérite de poser le débat. Les Français expriment une attente en ce sens : voyez la demande d'heures supplémentaires exonérées de cotisations qui se fait jour.

Comme la commission des affaires sociales, j'appuie fermement l'amendement n°235 rectifié bis, qui permet d'augmenter, de manière souple, la rémunération des salariés dans les entreprises qui n'ont pas d'accord depuis deux ans et non pas cinq.

En revanche, notre commission des affaires sociales s'est montrée plus restrictive sur l'amendement n°234 rectifié bis, qui couvre toutes les entreprises de moins de cinquante salariés.

À titre personnel, je suis prêt à aller jusque-là, à tendre la main à M. Gabouty... s'il veut bien la saisir (Sourires)...

M. Jérôme Bascher.  - Il a le bras long ! (Rires)

M. Philippe Bas, président de la commission.  - ...pour trouver un consensus en ce moment si critique pour de nombreux salariés. (Applaudissements au centre et à droite)

M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis.  - J'ai proposé un avis défavorable à l'amendement n°234 rectifié bis pour limiter le dispositif aux petites entreprises où il convient que la décision puisse être unilatérale, faute d'interlocuteur dans l'entreprise.

Sur le principe, je suis favorable à son élargissement mais pas dans ce texte qui est lié à la crise sanitaire. C'est le sens de cet avis défavorable, alors que notre position serait plus favorable dans un cadre plus général.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Votre rapporteur parle presque comme un centriste... (On s'en amuse et l'on feint de se récrier à droite.) C'est plutôt un compliment, venant de moi ! (Sourires et marques d'approbation au centre)

Le président Bas a eu raison de séparer l'intéressement de la participation. Nous partageons l'objectif de l'intéressement. Pour nous, il doit favoriser le dialogue social, ce qui justifie notre attention aux seuils et explique nos avis défavorables : la dérogation au dialogue doit être exceptionnelle.

Le seuil et la durée du dispositif sont en effet essentiels, sauf à dévoyer cet objectif de renforcement du dialogue social au sein des entreprises. La vertu de ce dispositif n'est pas que d'apporter du pouvoir d'achat aux salariés. C'est pourquoi je maintiens, hélas, l'avis défavorable du Gouvernement sur ces deux amendements.

L'amendement n°234 rectifié bis est adopté.

L'amendement n°235 rectifié bis n'a plus d'objet.

Mme la présidente.  - Nous avons examiné 90 amendements ; il nous en reste 99 à examiner.

Prochaine séance, aujourd'hui, mercredi 27 mai 2020, à 15 heures.

La séance est levée à minuit cinq.

Pour la Directrice des Comptes rendus du Sénat,

Jean-Luc Blouet

Chef de publication

Annexes

Ordre du jour du mercredi 27 mai 2020

Séance publique

À 15 heures

Présidence : M. Gérard Larcher, président

Secrétaires : M. Yves Daudigny - Mme Patricia Schillinger

1. Questions d'actualité au Gouvernement

De 16 h 15 à 20 h 15

Présidence : M. Thani Mohamed Soilihi, vice-président

(Ordre du jour réservé au groupe UC)

2. Débat sur le thème : « La crise du Covid-19 : révélateur de la dimension cruciale du numérique dans notre société : quels enseignements et quelles actions ? »

3. Débat sur le thème : « La crise du Covid-19 : relocalisation des productions stratégiques pour assurer notre souveraineté. Lesquelles, où, comment ? »

À 21 h 30

Présidence : M. Jean-Marc Gabouty, vice-président

4. Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat et d'un vote sur cette déclaration, en application de l'article 50-1 de la Constitution, relative aux innovations numériques dans la lutte contre l'épidémie de Covid-19