SÉANCE

du mercredi 20 janvier 2021

52e séance de la session ordinaire 2020-2021

présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : M. Daniel Gremillet, M. Joël Guerriau.

La séance est ouverte à 15 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

J'appelle chacun de vous à observer au cours de nos échanges l'une des valeurs essentielles du Sénat : le respect, qu'il s'agisse du respect des uns et des autres ou de celui du temps de parole.

Rapprochement entre Carrefour et Couche-Tard

M. Didier Rambaud .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Alors que des discussions ont été ouvertes entre le groupe québécois Couche-Tard et Carrefour, vous avez mis fin à cette tentative de rapprochement au nom de la sécurité alimentaire de la France. Il faut se féliciter du retour du politique dans le domaine commercial.

L'État a son mot à dire en temps de crise, surtout vis-à-vis du premier employeur privé de France. C'est le sens de la loi Pacte qui prévoit un contrôle des investissements directs étrangers dans les secteurs stratégiques.

Carrefour compte 364 000 salariés. Premier employeur privé français, il était sur le point d'être racheté par un géant québécois qui réalise plus de 70 % de son chiffre d'affaires dans les carburants.

Carrefour rayonne dans le monde. Ce rachat ne va pas de soi : les indices boursiers ont doublé outre-Atlantique depuis la crise de 2008 alors qu'ils ont baissé en Europe : c'est bien une bulle financière qui permettrait à Couche-Tard d'envisager ce rachat.

Nous soutenons votre décision courageuse mais quid du e-commerce, que Carrefour devra financer seul ? Que dire de la France qui doit rester une terre attractive pour les investissements ?

Quelles sont les raisons vous ayant conduit à prendre cette décision courageuse (On ironise sur les travées à droite.) et rassurer les investisseurs étrangers ? (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la relance .  - Vous avez parfaitement résumé les choses. (Nouvelles marques d'ironie à droite)

Une grande entreprise étrangère veut racheter le premier employeur privé français. Si certains veulent laisser faire, sur un groupe représentant 20 % de la distribution alimentaire du pays, grand bien leur fasse !

L'État se doit de garantir la sécurité alimentaire de la France. (Applaudissements sur les travées du RDPI) Après la loi Pacte, nous avons prévu par décret de contrôler les investissements étrangers sur l'ensemble de la chaîne alimentaire ; le règlement européen fait de même.

Au lendemain de la pandémie, nous savons désormais que des produits agricoles peuvent ne plus circuler dans notre pays. Nous voulons garantir la sécurité alimentaire de toute la chaîne, de la production à la distribution, en passant par la transformation. Cela remet-il en cause l'attractivité de la France ? Grâce à la politique voulue par le Président de la République, elle est le pays le plus attractif en Europe et le restera (On ironise à droite.) car nous maintiendrons une politique attractive pour les investisseurs étrangers en France. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Stratégie vaccinale (I)

Mme Martine Filleul .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Mercredi dernier, excédé, vous disiez, monsieur le Premier ministre, qu'il ne fallait pas revenir chaque semaine sur la vaccination. Il y a pourtant matière !

Ma mère, 97 ans, en Ehpad privé faute de place dans le public, ne sera pas vaccinée avant février. Or la vaccination a déjà lieu dans l'Ehpad public voisin depuis début janvier.

Comment expliquer une telle différence de calendrier ? Comment expliquer qu'une personne de 82 ans patiente cinq heures au téléphone pour avoir un rendez-vous pour se faire vacciner le 8 mars seulement ?

Pourquoi la France est-elle classée 25e sur 27 au niveau européen pour sa stratégie vaccinale alors que nous avons tous eu le même nombre de vaccins ?

À quoi nous sert Mac Kinsey ?

Je suis en colère, mais j'ai surtout peur pour ma mère, peur pour les résidents des Ehpad, peur pour les personnes dites prioritaires. Quand mettrez-vous fin à cette situation, quand mettrez-vous fin à ces aberrations ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées des groupes CRCE et Les Républicains)

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles .  - Le Gouvernement évoque régulièrement, et en toute transparence, la stratégie vaccinale.

À ce jour, plus de 585 000 Français ont été vaccinés, dont près de 100 000 hier. (On en doute à droite.) L'objectif d'un million de vaccinés d'ici fin janvier sera atteint, et même sans doute dépassé. L'objectif est de 2,4 millions de vaccinés d'ici fin février et peut-être 4 millions si le vaccin d'Astra-Zeneca est approuvé. Nous allons donc rejoindre le concert des pays européens.

Cette stratégie dépend toutefois de la livraison et de l'acheminement des doses. Au 17 janvier, nous avions reçu 1,6 million de doses et 315 000 vont nous être livrées très prochainement. Il n'y a pas de stock caché ! (On feint de s'en féliciter à droite.) Les stocks sont dans les centres. En pleine collaboration avec les élus locaux, les préfets et les ARS, les acteurs de terrain sont au courant du nombre de doses disponibles.

Le ministre de la Santé informera régulièrement du nombre de doses par centre, par département et par région. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Martine Filleul.  - Seuls 10 % des résidents d'Ehpad sont vaccinés. Sortons du mensonge : nous ne sommes pas prêts ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées des groupes CRCE et Les Républicains)

Territoires éducatifs ruraux

M. Éric Gold .  - Monsieur le ministre de l'Éducation nationale, vous avez lancé lundi une expérimentation appelée « Territoires éducatifs ruraux », adaptation aux zones rurales des « Cités éducatives » mises en place depuis plus d'un an dans 80 quartiers prioritaires de la politique de la ville.

Les territoires ruraux représentent 34 % des écoles et 20 % des élèves ; ils sont trop souvent oubliés. L'objectif de cette expérimentation est de lutter contre les inégalités territoriales et sociales en matière d'éducation, notamment pour que chaque jeune ait la possibilité de poursuivre des études, quel que soit son lieu d'habitation. Or les jeunes ruraux sont 23 % à ne pas continuer dans le supérieur, contre 15 % en moyenne nationale. Pourtant, leurs résultats sont bons, notamment au bac.

Chacun doit pouvoir suivre sa voie. Il faut lutter contre l'autocensure, l'isolement, le déclin démographique et industriel en créant un vrai écosystème autour des jeunes à l'échelle de chaque bassin de vie. Les réponses doivent être construites avec les élus qui connaissent les besoins et les réalités locales. Le secteur de la santé, surtout, pourrait y gagner en matière de recrutement de jeunes talents dans ces territoires.

Comment les territoires éducatifs ruraux s'appuieront-ils sur les collectivités territoriales ? (Applaudissements sur les travées du RDSE)

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports .  - La revitalisation rurale, notamment par l'école, est essentielle pour recréer de l'attractivité. Le primaire rural fait réussir - mieux que la moyenne nationale.

Nous avons déjà pris l'engagement de ne fermer aucune école, ni aucune classe rurale, sans l'accord du maire. Nous poursuivrons dans ce sens.

Il faut aussi suivre une logique qualitative. Grâce au rapport de Salomé Berlioux, la nouvelle secrétaire d'État à l'Éducation prioritaire, Nathalie Elimas, a travaillé avec les académies de Normandie, d'Amiens et de Nancy-Metz pour encourager la réussite des élèves des zones rurales : dédoublement de classes, cordées de la réussite, internats d'excellence...

Chaque territoire éducatif rural sera un cas particulier fondé sur un accord entre les collectivités territoriales et l'État. L'éducation prioritaire concerne autant la campagne que la ville : cette nouvelle étape en consacre le principe. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Suppressions de postes chez Sanofi (I)

M. Ronan Dantec .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Sanofi vient de confirmer la suppression de 400 postes dans ses services de Recherche et Développement (R&D) en France, en total décalage avec le contexte économique et social actuel et la volonté affichée d'une société plus autonome et résiliente.

Je vous soumets donc, madame la ministre, trois questions.

Est-il rationnel de réduire notre capacité de recherche scientifique et médicale alors que nous sommes convaincus qu'il faut renforcer l'autonomie européenne en matière de production de médicaments ?

Est-il raisonnable qu'une entreprise européenne bénéficiant d'aides publiques et de commandes publiques massives remette sur le marché du travail des centaines de salariés, selon les mots de Mme Borne ?

Enfin, est-il acceptable, alors que les Français sont inquiets, qu'une entreprise de cette importance fasse passer un message aussi brutal, tout en assumant d'augmenter les dividendes ?

Si vos trois réponses à ce questionnaire à choix multiple (QCM) sont négatives, comment prévoyez-vous d'intervenir pour que Sanofi revienne sur sa décision indécente ? (Applaudissements sur les travées du GEST)

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'industrie .  - Il s'agit d'une information que nous avons déjà partagée sur ces bancs en juin et je vous avais répondu. Sanofi a décidé de recentrer ses sites de R&D sur trois verticales d'excellence, dont les vaccins.

Nous serons extrêmement vigilants sur la réindustrialisation de la France et le renforcement de notre excellence en matière de santé.

Nous avons demandé à Sanofi qu'aucun départ contraint n'ait lieu, et son patron s'y est engagé ; que les dépenses de R&D augmentent et elles seront portées à 2 milliards d'euros par an ; et enfin que Sanofi réimplante des sites de production : un site de vaccins évolutifs sera ainsi construit.

Entre 2005 et 2015, la production de produits pharmaceutiques en France a été divisée par deux, car nous n'avions pas de politique suffisamment attractive pour attirer les industriels français et étrangers. Nous mettrons toutes nos forces afin de relocaliser les industries de santé : c'est notre priorité. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Ronan Dantec.  - Des médicaments usuels ne sont plus produits en France et en Europe, disait Emmanuel Macron en juin. Nous pensions innocemment qu'il allait y remédier, notamment dans le domaine du diabète où se situent les suppressions d'emplois. En fait, il s'y résignait ! (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Avenir de l'Office national des forêts (ONF)

M. Franck Menonville .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) L'ONF rassemble 9 000 agents, gère 6 millions d'hectares, dont 3 millions de forêts communales, pour un chiffre d'affaires de 700 millions d'euros, ce qui représente 40 % du bois produit en France.

Mais cet établissement rencontre des difficultés croissantes et il est structurellement déficitaire : 79 millions d'euros cette année... Son chiffre d'affaires a reculé de 45 millions en 2020, obligeant son conseil d'administration à relever son plafond d'endettement à 550 millions d'euros. C'est une fuite en avant qui ne fera qu'accentuer les difficultés à venir.

L'ONF vit une crise sociale avec la chute des effectifs, et existentielle avec des défis contradictoires et une dispersion de ses missions. Quelque 300 rapports ont été commis en trente ans, et qui sont restés sans suite.

Des choix stratégiques doivent être faits au plus vite pour assurer la pérennité de l'ONF et renforcer la place des collectivités territoriales. Que compte faire le Gouvernement alors que la forêt française est au coeur du défi climatique et sanitaire ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)

M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation .  - Comme beaucoup de Français, le Gouvernement est attaché à l'ONF et à ses agents.

Il faut soutenir cet organisme, dont l'expertise est reconnue à l'étranger. L'ONF se trouve face à divers défis : climatique, sanitaire avec les scolytes et financier.

La forêt doit être préservée et cultivée. Nous avons augmenté les crédits budgétaires de l'ONF de 10 millions d'euros. De plus, le plan de relance consacre 200 millions d'euros à la forêt. Il va également falloir finaliser un contrat entre l'État et l'ONF, mais aussi entre l'ONF et les communes forestières que gère l'ONF. Telle est notre feuille de route et la Haute assemblée y sera associée (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Stratégie vaccinale (II)

Mme Sophie Primas .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Sénatrice des Yvelines, je m'adresse à vous, monsieur le Premier ministre, au nom des maires de France, désemparés.

Ils ne vous comprennent plus et ne savent plus comment vous aider. Ils ont pris en charge, avec les préfets et les ARS, la campagne vaccinale. Ils ont le doigt sur la couture du pantalon, mais aussi le porte-monnaie ouvert : ils financent tout, jusqu'aux aiguilles et seringues qui ne sont pas livrées conformes. Ils sont prêts à s'engager, sans arrière-pensée politique. Ils paient votre désorganisation et supportent le mécontentement, l'incompréhension, la détresse et bientôt la colère de nos concitoyens.

Le cabinet de la maire de Rambouillet reçoit un appel par minute depuis lundi matin !

Vous n'avez rien anticipé, ni tiré aucun enseignement des dysfonctionnements de la première vague. Comment expliquer que des centres qui devaient ouvrir la semaine prochaine resteront fermés, malgré vos promesses d'accélération ? Comment expliquer que les maires n'aient pas de visibilité à plus de deux jours sur les rendez-vous ?

Cela rend le pays épidermique. Comment et quand reprendrez-vous les choses en main ? (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles .  - (Certains sénateurs du groupe Les Républicains s'étonnent que le Premier ministre ne réponde pas en personne.) Sans arrière-pensée politique, je vais vous faire plaisir : la campagne de vaccination se fera main dans la main avec les maires. (On en doute à droite.) Depuis la fin décembre, par l'intermédiaire des cellules départementales de vaccination, nous avons demandé aux maires de proposer des lieux propices à la vaccination et de prendre l'attache des personnes pouvant être vaccinées.

La nouvelle étape a débuté lundi, avec les plus de 75 ans. Plus de 800 centres ont ouvert et les maires assumeront le transport des personnes vulnérables. Je les en remercie.

Depuis le début de la campagne, le nombre de doses disponibles est précisément connu ; c'est aux autorités locales de ne pas ouvrir plus de centres que nécessaires. (Vives protestations à droite) Elles ne doivent pas non plus ouvrir davantage de créneaux de rendez-vous que de doses disponibles.

Pour reprendre la métaphore de Gabriel Attal, si Mme Pécresse avait été chargée des stocks lors du Débarquement, les soldats auraient débarqué la fleur au fusil mais sans munitions dans leurs barillets. (Très vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains, tandis qu'on applaudit sur celles du RDPI)

Mme Sophie Primas.  - Je suis outrée par vos propos ! Il est indigne de renvoyer la responsabilité sur les maires. Nous ne connaissons pas les doses disponibles et il est mensonger d'affirmer le contraire ! Vous aurez beau le répéter, ce mantra est un mensonge ! (Très vifs applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)

Crise de la filière aéronautique

M. Stéphane Demilly .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Les conséquences de la crise sanitaire sont catastrophiques pour le secteur aéronautique. La chute du trafic aérien, inédite depuis la seconde guerre mondiale, a mis en péril les compagnies aériennes et, par effet domino, toute la filière de construction d'avions. Boeing a annoncé 30 000 suppressions d'emplois ; Airbus, 15 000 dont 5 000 en France, pour faire face à la baisse de 40 % de ses commandes.

Dans la Somme, dans le bassin d'Albret et ses 3 000 salariés, c'est un séisme économique et social d'une amplitude inimaginable. Le plan de sauvegarde a limité les effets de cette crise, aussi violente qu'imprévisible, mais nous sommes rentrés dans le dur, avec l'adaptation des capacités industrielles à la réalité de ce marché cassé.

Nous ne pouvons pas laisser un bassin industriel sombrer. Le savoir-faire doit perdurer pour que nous soyons opérationnels lors de la reprise attendue en 2023. Personne n'est responsable de la déflagration actuelle, mais si nous ne maintenons pas en vie la supply chain en France, lors de la reprise, la sous-traitance se déplacera dans les pays low cost et alors, nous serons responsables.

La résilience ne sera possible qu'avec un soutien sans faille de l'État. Cet effondrement doit être conjoncturel et non définitif : les sous-traitants vous le demandent ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la relance .  - Nous serons aux côtés des bassins picard, normand, occitan, pour soutenir la filière aéronautique et les sous-traitants. Je me rends dès vendredi à Toulouse pour soutenir Airbus.

La crise touche de manière très inégalitaire l'économie française : le BTP, l'agroalimentaire s'en sortent bien. D'autres moins, et le secteur aérien est particulièrement touché : 400 000 emplois et 58 milliards d'euros de chiffre d'affaires sont en jeu.

Avec la garantie emprunt, nous soutenons Airbus ; nous soutenons aussi les compagnies aériennes, Air France, mais aussi les compagnies étrangères qui ont continué à acheter des Airbus : 566 commandes en 2020, grâce au soutien de l'État.

Quant aux sous-traitants, nous avons mis en place un fonds d'investissement de 15 milliards d'euros pour que les ingénieurs travaillent sur de nouveaux projets et l'innovation. Le département de la Somme pourra bénéficier de ces crédits.

C'est une préoccupation prioritaire du Gouvernement de maintenir notre filière aéronautique parmi les plus performantes. Nous aiderons le secteur à passer ce cap difficile. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Stéphane Demilly.  - Venez nous voir dans la Somme pour en parler, monsieur le ministre.

Suppressions de postes chez Sanofi (II)

M. Pascal Savoldelli .  - Sanofi a annoncé la suppression de 1 000 emplois en France dont 400 en R&D.

L'entreprise est passée de onze à bientôt trois sites en France depuis 2008. Allez dire aux 300 personnes qui ont perdu leur emploi à Alfortville, sur le site dédié à la sécurité du médicament que ces licenciements n'étaient pas contraints ! Regardez l'état des chercheurs : ils sont écoeurés !

Ma collègue Laurence Cohen vous a interpellé la semaine dernière pour savoir quelles mesures ce Gouvernement comptait prendre pour préserver l'emploi dans ce secteur, alors même que nous traversons une épidémie mondiale.

Certes, la France produit trois des six vaccins validés en Europe. Mais que faites-vous des centaines de suppressions d'emplois prévus par Sanofi ? L'entreprise a reçu près d'un milliard d'aides publiques en dix ans, et qu'elle a versé 4 milliards à ses actionnaires. Vous prévoyez de verser 2 milliards d'euros supplémentaires à Sanofi. Cet argent sera-t-il investi en France ?

Sanofi est en train de manquer un rendez-vous sanitaire, social et démocratique. Qu'allez-vous faire ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur quelques travées du groupe SER)

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'industrie .  - Il n'y a aucune ambiguïté : le secteur de la santé est une priorité de notre politique économique et industrielle. Le Gouvernement a mis en place un comité stratégique des industries de santé, alors que pendant des années elles n'ont pas été soutenues dans notre pays et qu'elles se sont déplacées en Allemagne et ailleurs.

La production de produits pharmaceutiques a été divisée par deux entre 2005 et 2015. C'est contre cela que nous agissons. (Mme Laurence Rossignol s'exclame.) N'oubliez pas non plus que Sanofi a investi dans un site de production de vaccins évolutifs en France à Marcy-L'étoile, grâce au soutien du Gouvernement alors que nous étions en concurrence avec Singapour.

Grâce à notre soutien, trois sites français produisent des vaccins. Cela ne s'est pas réalisé par l'opération du Saint-Esprit !

Le plan de relance consacre 35 milliards d'euros à l'industrie, à l'innovation et à la reconquête industrielle. Nous allons faire en sorte de pouvoir rebondir le plus rapidement possible. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Pascal Savoldelli.  - Sanofi peut fabriquer en France les autres vaccins. Demandez-leur de le faire ! Les salariés sont prêts !

Une vision stratégique est nécessaire : pourquoi avoir refusé la création d'un pôle public pour les médicaments ? Nous vous demandons une grande ambition de santé pour la France ! C'est cela que l'on vous demande, et pas le Saint-Esprit ! (Applaudissements et rires sur les travées du groupe CRCE et sur quelques travées des groupes SER et Les Républicains)

Islam de France

Mme Jacqueline Eustache-Brinio .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Lundi à l'Élysée, à l'initiative du Président de la République, une partie des membres du Conseil français du culte musulman (CFCM) a signé la « charte des principes pour l'islam de France », qui semble satisfaire le Gouvernement mais soulève de nombreuses interrogations. Est-il normal que l'État s'invite dans l'organisation des cultes pour demander par écrit le respect de principes qui devraient s'imposer à tous, comme l'égalité homme-femme, la laïcité, la liberté de renoncer à une religion sans être menacé, le respect des orientations sexuelles,« l'adhésion à la cohésion nationale ».

La charte a été rédigée par le CFCM, ce qui en fait un règlement intérieur de l'organisation. De plus, cinq seulement de ses neuf fédérations membres l'ont signée ; d'autres, qui ne l'ont pas fait, telle la branche Musulmans de France, proches des Frères musulmans, refusent donc les lois de la République.

Êtes-vous prête à dissoudre les associations qui s'opposent clairement à nos principes républicains ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté .  - La majorité des fédérations du CFCM a formellement approuvé la charte signée à l'Élysée ; les autres ont encore quelques jours pour s'y associer. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains) C'est une démarche forte, un engagement clair envers la République et qui engage les fédérations signataires et leurs imams. Cette charte est un acte fondateur pour l'islam de France. Il est dit dans ses dix articles que les préceptes religieux ne l'emportent pas sur le droit. Certaines pratiques coutumières y sont dénoncées.

Le Président de la République et le ministre de l'Intérieur ont gagné leur pari d'accompagner l'islam de France sans s'immiscer dans son organisation. (Mme Marie-Pierre de la Gontrie ironise.) C'est une ligne de crête, mais un premier pas vers l'islam des lumières. (M. Jérôme Bascher s'exclame.)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Comme d'habitude, vous ne répondez pas à la question. Irez-vous au-delà de la communication des tweets ? Notre pays n'est pas un amalgame de communautés ; notre République est une, indivisible et laïque, ce que vous semblez oublier ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; protestations sur les travées du RDPI)

Secteur viticole et sanctions commerciales américaines (I)

M. Franck Montaugé .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Le conflit Airbus-Boeing pèse encore très lourd sur les filières françaises des vins et spiritueux qui en sont les victimes collatérales.

En octobre 2019, l'Organisation mondiale du commerce (OMC) a autorisé les États-Unis à imposer des taxes de 7 milliards de dollars aux produits européens ; dans la foulée, Trump imposait une taxe de 25 % sur les vins tranquilles. En octobre 2020, c'est l'Union européenne qui était autorisée à appliquer 4 milliards d'euros de taxes ; en représailles, la taxe américaine de 25 % était étendue à tous les vins et spiritueux. Elle s'applique depuis le 12 janvier. Conséquence : les importations américaines de vins français et européens ont été divisées par deux, soit 600 millions d'euros de perte de chiffre d'affaires entre 2019 et 2020.

Dans mon département du Gers, les vins de Plaimont, des côtes de Gascogne, les eaux-de-vie d'Armagnac sont très pénalisés.

Au-delà du fonds de soutien renforcé aux filières viticoles, quels sont vos objectifs et calendrier pour lever les sanctions exorbitantes dont sont victimes les viticulteurs français ?

L'investiture du président Biden ouvre une fenêtre de négociation qu'il ne faut pas manquer. Cela doit être à l'ordre du jour des premiers échanges entre le Président de la République et son homologue américain : qu'en est-il ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; M. Henri Cabanel applaudit aussi.)

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la relance .  - Je partage totalement votre appréciation. Les viticulteurs français n'ont pas à être les victimes collatérales du conflit Airbus-Boeing, avec des taxes de 25 %. Nous avons pris, à la demande du Premier ministre, avec le ministre de l'Agriculture, des mesures immédiates pour les soutenir financièrement : aide au stockage, aide à la distillation, exonération de charges sociales et ouverture du fonds de solidarité dès lors qu'ils ont perdu 50 % de leur chiffre d'affaires à hauteur de 200 000 euros, alors qu'auparavant ils n'avaient droit qu'à 10 000 euros par mois.

Les viticulteurs sont aussi éligibles à la prise en charge des coûts fixes à hauteur de 3 millions d'euros. C'est un soutien franc et massif.

J'ai rappelé hier à Margrethe Vestager que vous attendez un fonds de compensation européen. Il est légitime et nécessaire que la Commission européenne aide les viticulteurs français.

Je m'engage à aller le plus rapidement possible à Washington avec Franck Riester et bien entendu avec l'accord du Premier ministre et du Président de la République, pour négocier la levée de ces sanctions. Nous devons sortir d'une guerre commerciale entre les États-Unis et l'Europe qui ne fait qu'un seul vainqueur : la Chine. Nous sommes alliés, nous devons retrouver les voies d'un commerce équitable entre nos deux continents. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. François Patriat.  - Très bien !

M. Franck Montaugé.  - Ne perdons pas les marchés conquis avec patience et talent au fil des ans par nos viticulteurs. Il faut aller très vite.

Le Président de la République doit normaliser les relations commerciales avec les États-Unis. (Applaudissements sur les travées du GEST)

Accords de pêche après le Brexit

M. Jean-François Rapin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) J'adresse toutes mes condoléances aux proches des pêcheurs décédés en Manche il y a quelques jours.

Les pêcheurs se morfondent et leurs bateaux sont à quai car ils n'ont toujours pas la licence pour la zone des 6 à 12 milles. Que se passe-t-il, alors que le Premier ministre avait promis aux marins-pêcheurs de France et des Hauts-de-France la poursuite de leur activité dans les meilleures conditions possible ; que Clément Beaune, ici présent, m'appelait le 24 décembre pour me dire qu'un accord était trouvé et que l'accès aux eaux anglaises était préservé pour nos marins-pêcheurs ; puis qu'en déplacement avec Olivier Dussopt dans les Hauts-de-France maritimes, le 1er janvier, les deux ministres annonçaient l'arrivée imminente de licences pour les navires habilités à pêcher dans cette zone essentielle ?

Vous ne souhaitez pas, madame la ministre, que la pression monte mais il faut la faire redescendre ! Que se passe-t-il donc ? Éclairez-nous ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Annick Girardin, ministre de la mer .  - L'accord sur la pêche est un compromis raisonnable. Le Royaume-Uni voulait récupérer 100 % de nos quotas, nous n'en avons rendu que 25 % et préservé nos accès à la zone économique exclusive (ZEE), aux 6 à 12 milles du Royaume-Uni, de Jersey et de Guernesey.

Les autorisations de pêche ont été données pour tous les bateaux de la ZEE. Nous avons communiqué à la Commission européenne une liste de navires prouvant leur antériorité dans les 6-12 miles : ainsi, 172 ont été validés, il reste 23 navires de remplacement direct à valider.

Les choses avancent insuffisamment vite. J'ai vu hier le commissaire européen et Michel Barnier sur le sujet. Je verrai les professionnels demain au Comité national des pêches et, lundi, j'assisterai au Conseil de l'Agriculture et de la pêche. Nous sommes sur les quais aux côtés des marins-pêcheurs. Comme l'a rappelé le Premier ministre, nous avons aussi prévu un plan d'accompagnement. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. François Patriat.  - Bravo !

M. Jérôme Bascher.  - Vous noyez le poisson !

M. Jean-François Rapin.  - Je n'ai pas de doute sur votre volonté, mais à quelle échéance ? Un marin qui ne pêche pas ne gagne pas d'argent. Les pêcheurs ne sont pas sereins depuis plusieurs années. J'insiste pour qu'ils retrouvent leur tranquillité au plus vite.

Cantines scolaires

M. Claude Kern .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Monsieur le ministre de l'Éducation nationale, le nouveau protocole sanitaire renforcé prévu pour la restauration scolaire à partir du 25 janvier interdit les brassages entre plusieurs classes du premier degré dans un même espace de restauration.

Pour les collectivités territoriales, de façon pragmatique, c'est inconcevable. Ainsi, la communauté de communes du canton d'Erstein - dont les 28 communes représentent 48 000 habitants - accueille 1 500 enfants dans 23 points de restauration. À vingt minutes pour le déjeuner, il faudrait huit heures pour faire manger tous les élèves ou quatre heures si 50 % de la restauration est composée de repas à emporter. Il y a 24 classes dans six bâtiments. Comment faire ? Ce n'est pas sérieux !

Quid des accueils de loisirs sans hébergement (ALSH), du périscolaire, du mercredi ? Nous attendons eu urgence des réponses claires ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. David Assouline s'exclame.)

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports .  - Nous prenons la question des cantines scolaires très au sérieux depuis le premier confinement ; le premier protocole, déjà très strict, a eu pour intérêt de créer des réflexes dans l'ensemble de notre système scolaire, en partenariat avec les collectivités locales.

Nous avons donné dix jours à chacun pour s'adapter, jusqu'au 25 janvier. Une foire aux questions sur le site internet du ministère apporte des réponses concrètes. La facilité serait de supprimer la cantine scolaire, qui est un point de fragilité, du point de vue de la gestion de la crise sanitaire ; mais l'alimentation équilibrée des enfants est un enjeu social essentiel : il fallait la maintenir.

Les mesures strictes ne font plaisir à personne mais sont un mal nécessaire. Le non-brassage des élèves du primaire peut être assuré sans que les repas durent quatre heures, chaque cas étant particulier. Il s'agit ici d'étaler l'arrivée des enfants, là d'utiliser un autre local. Chaque inspecteur de l'Éducation nationale travaille avec chaque collectivité territoriale pour adapter les mesures, dans un esprit constructif. Peu de pays réussissent à maintenir leurs écoles ouvertes. Soyons fiers de l'Éducation nationale et des collectivités territoriales qui y parviennent, en maintenant le service de la cantine au bénéfice de nos enfants, qui est pour certains d'entre eux le seul moment de la journée où ils mangent équilibré.

M. Claude Kern.  - Merci, mais les collectivités territoriales arrivent à leurs limites ; sans révision de ce protocole, la restauration scolaire risque de fermer, malheureusement, et à l'encontre de la volonté des acteurs de la maintenir.

Secteur viticole et sanctions commerciales américaines (II)

M. Daniel Laurent .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Quelles seront les conséquences des sanctions américaines sur la filière viticole ?

En octobre 2019, une taxe de 25 % est imposée aux produits viticoles européens dans le cadre du contentieux Airbus, qui lui est totalement étranger. En octobre 2020, 4 milliards d'euros de sanctions sont pratiquées par l'Union européenne aux produits américains dans le cadre du contentieux Boeing. En décembre 2020, de nouvelles sanctions américaines sont étendues aux vins et spiritueux.

Quand mettrez-vous fin à cette mauvaise série consternante ? Nous vous avions alerté sur le risque d'accélération des crispations américaines que provoqueraient les taxes européennes.

Engagez des discussions avec vos homologues de la nouvelle administration Biden pour mettre fin à cette taxe dévastatrice pour la viticulture française !

Comment accompagnerez-vous la filière ? La coupe est pleine, monsieur le ministre ! Ne répétez pas que l'Europe nous aidera, vous l'avez déjà beaucoup dit...

La France compte trois fleurons : l'aéronautique, le luxe et les vins et spiritueux. Faites en sorte que les vins et spiritueux restent dans ce trio, indispensable à notre balance commerciale et à l'emploi dans nos territoires ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Nathalie Delattre applaudit également.)

M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation .  - Toute la filière viti-vinicole est victime des décisions unilatérales américaines prises par l'administration Trump, avec ce qu'elles avaient d'incertain et parfois d'incohérent.

Nous devons avancer avec l'administration Biden, toujours sans naïveté, pour engager une véritable désescalade.

Le Gouvernement doit aider la filière viti-vinicole et notamment la belle filière du cognac, que vous connaissez si bien ; il le fait avec les nouvelles aides au stockage, les exonérations de charges, le fonds de solidarité, les aides à la compétitivité.... Nous nous y employons. Nous sommes sur tous les fronts. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Daniel Laurent.  - Les aides sont indispensables pour les producteurs et les négociants doivent conserver leurs marchés ; il faut obtenir la suppression de ces taxes.

Plus que des promesses non tenues, nous attendons des actes et du courage politique ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Stratégie vaccinale (III)

Mme Isabelle Briquet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Alors que certains doutaient de la volonté de nos concitoyens de se faire vacciner, ils sont chaque jour plus nombreux à le souhaiter.

Toutefois, après trois semaines de campagne, à peine 600 000 personnes sont vaccinées et seulement 800 centres de vaccination sont ouverts. Après les masques et les tests, est-ce un raté de plus dans cette crise sanitaire qui n'en finit pas ?

Les élus locaux sont, une fois de plus, en première ligne, en particulier dans les territoires ruraux. Quelque 2 000 collectivités territoriales attendent encore une validation administrative pour ouvrir un centre de vaccination.

Dans la Haute-Vienne, malgré la mobilisation du conseil départemental et des communes, il n'y a que sept centres de vaccination. La démarche pour obtenir un rendez-vous, véritable parcours du combattant, aboutit rarement. N'y a-t-il pas assez de vaccins, compte tenu de la nécessité d'une deuxième injection ? Nous sommes loin du compte ! Allez-vous accélérer ? Nous attendons non pas des paroles, mais des mesures concrètes. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles .  - Le Gouvernement l'a dit dès le départ en présentant sa stratégie vaccinale : le rythme de vaccination a été recommandé par la Haute Autorité de santé en fonction de la vulnérabilité des populations ; soit d'abord les résidents d'Ehpad, puis les plus de 75 ans et les plus fragiles.

La campagne dépend évidemment du nombre de doses disponibles par territoire, commune ou centre de vaccination. C'est sur cette base, et sans aucune polémique, que l'état du nombre de doses disponibles par territoire a été communiqué aux autorités locales.

Actuellement, 56 % de nos concitoyens veulent se faire vacciner, soit 14 % de plus qu'en décembre. La vaccination est effectivement victime de son succès : aujourd'hui, 585 000 personnes ont été vaccinées, dont 100 000 pour la seule journée d'hier.

Oui, il est compliqué de prendre un rendez-vous, ma propre mère octogénaire a dû se faire aider par son fils. (Murmures ironiques sur les travées des groupes SER et Les Républicains) Mais depuis quelques jours, les choses se mettent en ordre.

L'intensité de la vaccination augmente et les six millions de nos concitoyens de plus de 75 ans ou vulnérables seront vaccinés d'ici juin, comme nous l'avions annoncé.

Mme Isabelle Briquet.  - Il y a donc bien un gros souci, vous le reconnaissez. Quand travaillerez-vous vraiment avec les élus locaux ? Ils sont prêts à prendre toute leur part mais ne peuvent pallier toutes les carences de l'État central. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Insécurité à Nîmes

M. Laurent Burgoa .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Monsieur le ministre de l'Intérieur, j'associe à ma question Vivette Lopez et je réaffirme mon soutien au maire de Lasalle, Henri de Latour, agressé sur le marché de sa commune par un individu qui refusait le port du masque.

Tous les piliers de la République sont attaqués. Vendredi dernier, un directeur et une institutrice d'une école nîmoise étaient agressées par un parent d'élève. L'agresseur leur a promis un sort pire que celui de Samuel Paty ! Le 4 décembre, deux hommes, fuyant la police, se sont introduits dans la cour d'une école élémentaire. Le 15 juin, après la mort d'un homme à proximité de cette même école, on a dû délocaliser l'école pour la fin de l'année... Nous reculons ! C'est ce que neuf responsables d'établissements écrivent dans une lettre ouverte au Président de la République.

Règlements de comptes en plein jour, occupations de bâtiments scolaires, menaces sont devenus le quotidien dans ce quartier du chemin bas d'Avignon. Vous devez protéger ce sanctuaire de la République qu'est l'école.

Monsieur le ministre, nous attendons toujours l'affectation de treize policiers supplémentaires annoncée le 23 septembre.

Comment protéger les écoles ? Quelle est donc la stratégie, au-delà des coups de communication épisodiques ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté .  - (Exclamations à droite) Le Gouvernement s'associe à votre message de soutien à ce maire comme à tous les élus qui subissent quotidiennement des agressions et ces mises en cause.

Pour les protéger, le Gouvernement prend des dispositions. En témoignent les débats actuels de la commission spéciale sur le projet de loi confortant les principes de la République, qui travaille avec le ministre sur ces questions.

Depuis 2018, sur le terrain, la police de sécurité du quotidien se déploie dans 55 quartiers de reconquête républicaine, qui seront 60 à la fin du quinquennat. Et 10 000 postes de policiers et gendarmes seront créés d'ici 2022. Nous nous engageons aussi avec des recrutements supplémentaires et les moyens de France Relance : un quart du parc automobile des forces de sécurité sera renouvelé.

La mission « Sécurités » a vu ses crédits augmenter dans la loi de finances 2021, avec l'accord du Sénat.

Dans le Gard, une unité de dix fonctionnaires dédiée à la lutte contre le narcotrafic et l'économie souterraine a été mise en place en octobre. Plus de 350 opérations ont été menées en 2020.

Le quartier du Chemin bas d'Avignon a reçu le renfort de 60 membres des compagnies républicains de sécurité, avec une relève demain jusqu'au 24 janvier au moins.

Tout le Gouvernement est mobilisé pour la sécurité des Français, en y mettant des moyens concrets. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

M. François Patriat.  - Très bien !

Situation des étudiants

Mme Kristina Pluchet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Madame la ministre de l'Enseignement supérieur, depuis plus de dix mois, les étudiants sont isolés par l'enseignement à distance et plongés dans une immense détresse psychologique qui peut conduire aux drames de ces derniers jours.

Décrochage, paupérisation, abandons de cursus... Certains n'ont même pas d'accès numérique suffisant pour suivre leurs cours. Faisons-leur confiance ! Les jeunes sont prêts aux efforts nécessaires pour aller en cours, les élèves de BTS, du secondaire, des prépas ont pu reprendre les cours, pas les étudiants. C'est une injustice mal vécue.

Le présentiel en demi-groupe, prévu à partir du 25 janvier pour les étudiants de première année, doit être généralisé à tous.

Vos annonces de jeudi dernier sont inappropriées, madame la ministre. Les étudiants n'ont pas besoin seulement de psychologues ; ils ont surtout besoin de retourner en cours !

De nombreux présidents d'université sont prêts à les accueillir en petits groupes. Écoutez-les et ouvrez les yeux sur la vie difficile de ces jeunes ; mettez un terme à leur isolement ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Jean Castex, Premier ministre .  - (Exclamations et marques d'appréciation sur les travées du groupe Les Républicains) Ce sujet grave mobilise le Gouvernement dans son ensemble.

Si nous en sommes là, si vous me réclamez la réouverture des universités, comme vous le faites pour les commerces et les lieux culturels, c'est, rappelons-le, qu'il y a un virus qui circule et une crise sanitaire. (Vives exclamations à droite, ainsi que sur les travées du groupe SER, où l'on feint la surprise.) Hé oui ! Le virus est la cause de toutes les difficultés actuelles. (Mêmes mouvements)

Hier, on comptait 70 686 morts, plus de 2 800 personnes en réanimation. L'incidence moyenne sur 7 jours est de 19 000 cas.

Dans tous les pays voisins, l'enseignement se fait aussi en distanciel à l'université ; je vous invite à avoir une vision raisonnable et raisonnée.

Oui, il y a des conséquences dramatiques à la circulation de ce virus. Mais on ne peut pas satisfaire à toutes les demandes.

M. Pierre Ouzoulias.  - Et les transports ? Et les commerces ?

M. Jean Castex, Premier ministre.  - La France a fait le choix, avec l'accord du Sénat, de tenir le plus possible sur l'ouverture des écoles, collèges et lycées. Malheureusement, la situation sanitaire ne permet pas de le faire pour l'enseignement supérieur. (On le déplore sur diverses travées.)

Après concertation avec l'Université, nous avons relâché autant que la situation sanitaire le permet l'accès en présentiel des étudiants. (Mme Kristina Pluchet proteste.) Mais je ne saurais dire de manière péremptoire qu'il faut aller au-delà ! Les autres pays ne le font pas ; cela doit nous inciter à la modestie ! (Quelques murmures à droite)

Nous devons naturellement accompagner ces situations difficiles. Nous le faisons au niveau pécuniaire, sur le terrain de l'emploi et au niveau psychologique. Si nécessaire, cet accompagnement sera renforcé.

De nouvelles évolutions virales nous conduisent à la plus grande prudence, dans l'intérêt des étudiants et de la population.

Fin octobre, à la veille du reconfinement, nous en étions à 50 000 contaminations par jour. Que n'ai-je entendu lorsque j'ai décidé la fermeture des commerces ! Mais un mois après, il n'y en avait plus que 15 000. Depuis, la circulation du virus augmente légèrement.

Nous devons calmement expliquer aux étudiants pourquoi il nous faut prendre des mesures difficiles. (M. Laurent Duplomb proteste.) Nous invectiver ici ne changera rien à leur situation. Nous agissons et allons continuer à agir, mais nous devons le faire de manière responsable et raisonnable. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI)

Stratégie vaccinale (IV)

M. Jean Louis Masson .  - Les grands hôpitaux publics ont le statut de centres hospitaliers universitaires (CHU). Mais il y a deux centres hospitaliers régionaux (CHR) - statut plus restrictif - à Orléans et Metz-Thionville. Or, l'ARS du Grand Est privilégie systématiquement les CHU, notamment pour la dotation en vaccins.

Pourtant l'épidémie était beaucoup plus aiguë en Moselle que dans les départements voisins. Or, on a orienté des personnes âgées vers le CHU du département voisin, bien que la Moselle soit de très loin le département le plus peuplé de l'ancienne région Lorraine. Les Mosellans doivent être soignés dans de bonnes conditions, sans supporter les conséquences des discriminations dont le CHR de Metz-Thionville est l'objet.

Le maintien dans le statut hybride de CHR n'a pas de sens. Il faut fusionner les statuts des CHR et CHU et fournir aux CHR - en stricte égalité avec les CHU - les moyens dont ils ont besoin : équipements de pointe, personnel et investissements.

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles .  - Je ne maîtrise pas suffisamment le sujet des CHU et CHR pour vous répondre sur le champ sur ce point précis. Je vous propose de nous en entretenir ensuite, après la séance. J'imagine que la réflexion sur ces statuts entre dans le cadre de celle que nous avons lancée sur les groupements hospitaliers de territoire (GHT).

Je tiens à vous rassurer : notre stratégie de vaccination se déploie sans discrimination mais se fonde sur des critères démographiques, notamment celle des personnes prioritaires : résidents d'Ehpad, soignants, plus de 75 ans, personnes touchées par des pathologies lourdes.

Quand les doses arrivent, ARS, préfet, département et communes sont tenus au courant de leur nombre et de leur répartition.

Il y a aujourd'hui 800 centres de vaccination et 350 devraient ouvrir dans les prochaines semaines.

Mme Dominique Estrosi Sassone.  - Pourquoi donc en avez-vous fermés ?

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État.  - Je veux donc vous rassurer sur l'absence évidente de discrimination dans l'élaboration et le déploiement de la stratégie vaccinale. (Mme Agnès Canayer s'exclame.) Sur le CHR, je vous propose de nous revoir hors de cet hémicycle.

M. le président.  - Prochaine séance de questions d'actualité au Gouvernement, mercredi 27 janvier 2021 à 15 heures.

La séance est suspendue à 16 h 25.

présidence de Mme Pascale Gruny, vice-président

La séance reprend à 16 45.