Évolution de la situation sanitaire

M. le président.  - L'ordre du jour appelle une déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat et d'un vote sur cette déclaration, en application de l'article 50-1 de la Constitution, relative à l'évolution de la situation sanitaire et aux mesures nécessaires pour y répondre.

M. Jean Castex, Premier ministre .  - (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI) Le Président de la République s'est exprimé hier pour présenter à la Nation les nouvelles mesures de lutte contre l'épidémie de Covid-19.

La France doit affronter cette crise sanitaire, qui dure et qui mute dans des conditions inquiétantes. Une fois de plus, nous devons faire face et prendre les décisions qui s'imposent.

Cette troisième vague, presque une nouvelle épidémie, exige que les représentants de la Nation débattent et s'expriment par un vote solennel, selon l'article 50-1 de la Constitution.

Des mesures nouvelles sont indispensables pour protéger la vie et la santé, notamment des plus fragiles, et franchir la dernière étape, celle de la vaccination massive, vers un retour à une vie normale.

L'épidémie s'emballe depuis la mi-mars avec une augmentation du nombre de cas de 55% pour atteindre 38 000 cas par jour. Elle progresse vite et partout, en raison du variant anglais, plus contagieux et plus dangereux : il frappe des patients plus jeunes et sans facteur de risques liés à des comorbidités. Cette situation n'est pas propre à la France : le nombre de cas journaliers a triplé en quinze jours en Allemagne, il a augmenté de 70% en Belgique et de 40% aux Pays-Bas.

Notre système de santé est mis à lourde contribution avec 5 000 malades de la covid en réanimation, moins que lors du pic de la première vague, mais plus qu'au plus fort de la deuxième.

Nous avons réagi rapidement avec des mesures fortes : maintien des fermetures d'établissements recevant du public, couvre-feu national depuis la mi-décembre, mesures renforcées dans près de vingt départements depuis la mi-mars.

Nous l'avons fait en tenant compte des différences de situations territoriales et je sais combien le Sénat est attaché à une adaptation de notre stratégie sanitaire aux réalités du terrain. Cette stratégie était la bonne car l'épidémie frappait notre territoire de manière hétérogène.

Mais le variant accélère sur l'ensemble du territoire métropolitain, nous obligeant à accélérer nous aussi. La hausse de la circulation dépasse 20% en une semaine dans la moitié des départements, 40% dans une vingtaine de départements... et 73% dans les Pyrénées-Orientales !

C'est pourquoi les mesures applicables dans les dix-neuf départements les plus touchées sont étendues à tous les départements métropolitains à partir de samedi 19 heures, avec une application pleine à partir de dimanche soir et jusqu'au 3 mai. Nous préservons l'offre hospitalière des territoires les moins touchés pour conserver des capacités de repli.

La situation outre-mer n'est pas comparable à celle de la métropole : les règles seront spécifiques à chaque territoire ou département.

Les règles, dans l'ensemble du territoire métropolitain, seront identiques à celles des 19 départements où elles s'appliquent déjà : couvre-feu à 19 heures ; télétravail à quatre jours par semaine minimum partout où cela est possible ; déplacements dans un rayon de dix kilomètres, interdiction des rassemblements de plus de six personnes, restriction des déplacements interrégionaux à des motifs impérieux, professionnels ou familiaux - notamment aller chercher un enfant chez un grand-parent ou un proche.

Nous sommes un Gouvernement pragmatique (murmures à droite), faisant preuve de souplesse. L'immense majorité de nos concitoyens démontrent leur sens des responsabilités et leur civisme. Mais une minorité s'y refuse ; je condamne leur inconscience et leur irresponsabilité : ils se croient immortels... (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

Les gestes inconséquents doivent être prévenus et sanctionnés. Le nombre de gendarmes et de policiers affectés à cette tâche sera augmenté. La consommation d'alcool sur la voie publique sera interdite...

M. Richard Yung.  - Très bien !

M. Jean Castex, Premier ministre.  - Certains espaces - quais, berges, places... - seront interdits d'accès ; les organisateurs récidivistes d'événements clandestins susceptibles de mettre en danger la vie d'autrui seront poursuivis.

Ces comportements ne doivent pas masquer la résilience et la haute conscience citoyenne de l'immense majorité des Français, qui s'agacent des mesures, s'interrogent mais sont respectueux des règles, donc d'autrui.

Les crèches, les établissements scolaires, les activités périscolaires et extrascolaires seront fermés. Je sais qu'il y avait un très large consensus en faveur du maintien de l'accueil à l'école. La France est le pays européen qui a le moins fermé ses établissements scolaires : seulement 10 semaines, contre 24 en Allemagne, 26 au Royaume-Uni et 32 en Italie. Nous pouvons en être fiers. (M. François Patriat renchérit.)

Nous les fermons en ultime recours. Les écoles, collèges et lycées ne sont pas épargnés par l'épidémie. Le taux d'incidence chez les jeunes augmente plus vite que dans la population générale. C'est pourquoi nous avons décidé une fermeture pour trois semaines, en optimisant la période des vacances scolaires, comme cela était suggéré par beaucoup. La semaine prochaine, les établissements assureront leur enseignement à distance. Les deux semaines suivantes, tous les élèves seront en vacances.

Cela nous permettra d'agir sur la contamination en milieu scolaire tout en limitant l'impact sur l'enseignement. Un système de garde pour les enfants de certaines professions prioritaires sera mis en place. Les parents forcés de garder leurs enfants bénéficieront du dispositif d'activité partielle.

Les étudiants pourront continuer à fréquenter l'université à raison d'un jour par semaine.

Je consulterai demain (on ironise sur les travées du groupe CRCE) les associations d'élus locaux sur les modalités concrètes d'application de ces mesures.

L'accompagnement et le soutien économique et social seront prolongés aussi longtemps que nécessaire. Certains dispositifs ont été complétés, en faveur par exemple des commerces fermés depuis février dans les grands centres commerciaux, de ceux qui ont accumulé d'importants stocks ou de certaines grandes entreprises ayant de lourds frais fixes.

Les mesures que je vous présente sont difficiles mais indispensables. Elles sont contrebalancées par la perspective de la campagne de vaccination qui s'amplifie chaque jour. (Marques d'ironie sur les travées des groupes SER et Les Républicains) Nous allons vers la sortie de crise. Plus de huit millions de nos concitoyens sont vaccinés et nous visons 20 millions en mai, 30 millions en juin, à condition que les calendriers de livraison des doses soient respectés. (Même mouvement) Nous comptons sur la Commission européenne pour y veiller.

M. Hussein Bourgi.  - L'espoir fait vivre !

M. Jean Castex, Premier ministre.  - Nos objectifs, que je vous avais présentés le 17 décembre, seront donc respectés.

La mobilisation est totale pour vacciner sans relâche. Depuis trois semaines, le rythme quotidien en France est plus élevé qu'en Italie, en Espagne ou en Allemagne et nous sommes mieux positionnés (on s'esclaffe à droite comme à gauche) pour la vaccination des plus vulnérables. Eh oui !

Je tiens à remercier tous ceux qui sont engagés dans cette campagne de vaccination, dans 1 700 centres. Je salue les 50 000 médecins de ville et les 20 000 pharmaciens qui sont mobilisés. Les infirmiers vont les rejoindre la semaine prochaine. Il y aura 1,4 million de doses supplémentaires, puis 3 millions en avril et 3,6 millions en mai. Le vaccin monodose de Johnson & Johnson arrive aussi.

M. Rachid Temal.  - Et Sanofi ?

M. Jean Castex, Premier ministre.  - Il sera possible d'ouvrir la vaccination le 15 avril aux plus de 60 ans, le 15 mai aux plus de 50 ans, le 15 juin à tous les autres.

Le moment venu, le Gouvernement présentera au Parlement la stratégie de réouverture des établissements accueillant du public. (On feint l'émerveillement sur les travées du groupe Les Républicains.)

Il nous faudra également nous prononcer sur les élections départementales et régionales. Elles ont déjà été reportées une fois.

M. Rachid Temal.  - Encore un pari perdu...

M. Jean Castex, Premier ministre.  - Seules des raisons sanitaires impérieuses pourraient justifier un nouveau report.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Vraiment ?

M. Jean Castex, Premier ministre.  - Le Conseil scientifique a rendu son avis, particulièrement balancé (rires), qui ne préconise pas un report : le maintien est donc privilégié à ce stade. Cependant, le Conseil...

M. Jean-Pierre Sueur.  - Tout est dans cet adverbe !

M. Jean Castex, Premier ministre.  - ... formule des recommandations précises sur les conditions d'organisation des élections.

M. Hussein Bourgi.  - Sur la plage !

M. Jean Castex, Premier ministre.  - Nous devons veiller à ce qu'elles puissent être satisfaites sans altérer l'expression libre et sécurisée du vote. Je vais consulter les partis représentés au Parlement (on s'en réjouit sur les travées du groupe Les Républicains) et les associations d'élus locaux, avant d'organiser un débat au Parlement. Tel est le sens du rapport que je vous remettrai tout à l'heure, monsieur le Président, conformément à la loi du 22 février dernier.

Des semaines difficiles sont devant nous. Les soignants méritent notre soutien et notre reconnaissance. Je sais ce qu'ils endurent. Malgré la fatigue et la lassitude, notre hôpital tiendra le choc, grâce à eux. Nous les aiderons en déplafonnant les heures supplémentaires, en mobilisant toutes les ressources disponibles y compris les réserves - sanitaire, civile, mais aussi militaire - et en organisant la coopération public-privé, qui n'a jamais été aussi fluide, ainsi que les transferts de patients entre régions. Ainsi, nous accueillerons tous les malades qui en ont besoin.

Mon Gouvernement agit avec cohérence et pragmatisme.

Gérer une crise sanitaire, c'est combiner divers critères dans l'intérêt du bien commun. Critères épidémiologiques et sanitaires, d'abord, avec des avis de scientifiques et de médecins : je le dis et le répète, il n'y a pas d'opposition entre le pouvoir politique et le pouvoir médical. Mais le Gouvernement a le devoir d'intégrer aussi les critères scolaires, sociaux, économiques, psychologiques.

C'est dans cette combinaison difficile que doivent être recherchés l'équilibre et la temporalité des décisions. Mais la mère des priorités est bien la protection sanitaire de nos concitoyens.

C'est dans l'unité, la solidarité et la responsabilité que nous trouverons les ressources pour faire face à ce choc grave, inédit et complexe. C'est cette responsabilité de tous et de chacun que je partage ici avec vous. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Hervé Marseille .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains) Le Parlement est de nouveau saisi d'un débat, sur les nouvelles mesures sanitaires annoncées par le Président de la République. Elles pourraient être largement commentées, mais elles étaient indispensables.

Nous partageons l'idée qu'il ne fallait pas revenir à un confinement dur, qui ne serait plus accepté. La peur et la sidération ont laissé place à la lassitude et à la colère.

Vos mesures sont une synthèse, le résultat de considérations sanitaires mais aussi économiques, sociales, psychologiques.

Le passage de sept à dix mille lits de réanimation nous a surpris. Comment est-ce réalisable ? Après l'argent magique, les lits magiques... Si cela est possible, que ne les avez-vous mis à disposition plus tôt ! Mobiliser l'intégralité de la réserve sera-t-il suffisant pour les faire fonctionner ?

Quant à la stratégie vaccinale, seuls les soignants et les seniors étaient prioritaires jusqu'à présent. Pourquoi les enseignants les rejoignent-ils, mais pas les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (Atsem) ? Pourquoi pas les chauffeurs de bus, les pompiers, les caissiers ?

Les annonces sont très optimistes sur l'accélération des achats, sur les doses manquantes. AstraZeneca a livré 30 millions des 120 millions de doses promises.

À entendre le Président de la République, l'Europe deviendrait le premier continent producteur de vaccins. Très bien, mais comment ? Où les usines seront-elles implantées ?

La fermeture des écoles inquiète les élus, en première ligne sur le périscolaire, et les familles doivent s'organiser.

Pourquoi faire l'impasse sur les autotests en France, contrairement au Royaume-Uni ou à l'Allemagne ? Qu'en est-il du pass sanitaire, grand oublié de votre déclaration ?

Ne fallait-il pas faire oeuvre de plus de différenciation pour donner plus de marges de manoeuvre aux collectivités territoriales ?

Vous avez cité les aides économiques. L'État a fait beaucoup. Mais nous ne voterons pas votre déclaration, texte cosmétique et platonique que nous ne pouvons pas modifier. (On renchérit à droite.) Le principal outil de travail des parlementaires est devenu la télévision ! (Rires et applaudissements sur les travées des groupeUC, Les Républicains et SER, ainsi que sur quelques travées des groupes CRCE et RDSE)

Nous avons un problème institutionnel. Les mesures sanitaires vont dans le bon sens, mais elles affectent les libertés publiques. Quand on touche à la liberté d'aller et venir, à la liberté de commerce, cela va loin. Il n'est donc pas anormal que le Parlement apprécie la proportionnalité. (Applaudissements nourris sur l'ensemble des travées, à l'exception de celles dRDPI et du groupe INDEP)

Qu'y aurait-il d'offensant à ce que les parlementaires puissent priori émettre des recommandations ? Il n'est pas normal qu'un homme décide seul, fût-il aidé d'un Conseil de défense.

Monsieur Véran, « la démocratie, c'est la transparence » avez-vous dit à l'Assemblée nationale. Le Conseil de défense est-il un exemple de transparence ? (Même mouvement)

Le Parlement a disparu de la prise de décisions. On crée même des « machins » - le général de Gaulle les avait appelés ainsi - avec des citoyens tirés au sort... dont on n'entend plus parler, du reste.

Le Président de la République veut parler directement à l'opinion. C'est très dangereux. On l'a vu avec les gilets jaunes. Quand on joue avec l'opinion, cela finit au Capitole ou sur les Champs-Élysées avec des CRS devant défendre les institutions.

M. Gérard Longuet.  - C'est la roche Tarpéienne !

M. Hervé Marseille.  - Il y a une Constitution. Il y a des institutions.

La Parlement ne peut être relégué à attendre des annonces sur les écrans.

Si demain d'autres arrivaient au plus haut niveau de l'État, ou en cas de cohabitation, comment fonctionnerait notre pays ? Aujourd'hui, ce n'est pas encore inquiétant, mais cette concentration des pouvoirs nous alerte.

Les élections donneront lieu à un débat dans les prochains jours. Vous vous appuyez sur les conclusions très « balancées » (sourires) du Conseil scientifique, qui semble suivre la devise des humoristes Chevallier et Laspalès : « C'est vous qui voyez ». (Rires) Sauf événement important, il n'y a pas lieu de modifier les dates.

De nombreux sujets relèvent de l'action européenne. Le plan de relance nous inquiète, car il faut préparer l'après. Or, avec le recours devant la Cour constitutionnelle de Karlsruhe, 750 milliards d'euros sont en jeu. Le problème des frontières et celui des vaccins nous préoccupent également.

En Italie, un gouvernement d'union, de Salvini au centre gauche, est à la manoeuvre. En Allemagne, Mme Merkel négocie avec les Länder. Nous vous faisons confiance mais de grâce, monsieur le ministre, ayez une autre pratique institutionnelle ! (Vifs applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains, ainsi que sur plusieurs travées du groupe SER et du RDSE)

M. Patrick Kanner .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Le 29 octobre dernier, vous veniez nous annoncer des mesures nécessaires pour faire face à la situation sanitaire. J'avais souligné la lourdeur de votre tâche et de vos responsabilités.

Malgré les errements et la trop grande verticalité de vos décisions, le groupe SER avait voté en faveur de votre déclaration, mais cela ne valait pas soutien ni quitus de votre gestion.

Cinq mois plus tard, la situation n'a pas changé mais vous n'avez pas tiré les enseignements des précédentes séquences. La gestion de l'épidémie s'est dégradée, la concentration des pouvoirs s'est renforcée. Vous êtes devant nous mais nous ne savons pas pourquoi, sinon pour décliner les annonces de l'oracle présidentiel. Si le Parlement unanime votait contre, cela ne changerait rien ! Vous ne vous associez pas, balayez nos propositions. Depuis des mois, nous demandons plus de clarté, de démocratie sanitaire, mais vous prenez le Parlement pour un paillasson, seule existe la doxa élyséenne. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et Les Républicains)

Le Parlement, normalement, débat et vote. Mais désormais, la parole du Président suffit, issue du bunker qu'est le Conseil de défense. Le Président parle, le Premier ministre répète et le Parlement enregistre.

Mme Valérie Létard.  - Bravo !

M. Patrick Kanner.  - Hier, le Président de la République a justifié son action, malgré quelques erreurs avouées du bout des lèvres. Aucun mot pour les personnes décédées, pour lesquelles j'ai une pensée. Bientôt, nous aurons perdu cent mille des nôtres.

Le Président de la République décide seul, il doit assumer seul. Il dit avoir gagné du temps de liberté pour les Français. Mais de quelle liberté parle-t-on ? Depuis des semaines, nos concitoyens tremblent à l'écoute de la moindre rumeur d'intervention présidentielle. Chaque jour voit son lot de nouvelles restrictions.

L'exécutif n'a pas tenu compte des avertissements des scientifiques. Pourtant, la déferlante a eu lieu. Le Conseil scientifique avait alerté dès janvier, craignant des pics épidémiques très élevés. Vous-même, lors d'un comité de liaison parlementaire, vous montriez des projections plaidant pour de nouvelles mesures. J'ai mes notes ! Nous vous soutenions. L'épidémiologiste en chef, fort de son intelligence hors du commun, en a décidé autrement.

Or son pari du « trou de souris » est perdu. Qu'il reconnaisse ses erreurs, qu'il s'excuse, car c'est la débâcle. Tri des patients, confinement : l'exécutif ne nomme pas les choses, mais elles existent. Quand on ferme les écoles et les commerces, on confine ; quand on reprogramme massivement des interventions à l'hôpital, on trie.

M. Julien Bargeton.  - Non !

M. Patrick Kanner.  - Un homme concentre tous les pouvoirs entre ses mains, alors que la politique sanitaire ne fait pas partie de son domaine réservé. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

Si le Gouvernement peut restreindre les libertés, c'est parce que nous lui en avons délégué la possibilité via les ordonnances.

À l'automne, nous vous interrogions sur la stratégie vaccinale. Nous demandions un plan clair et précis - sans polémique, mais parce qu'il y avait urgence absolue. Nous attendions de la transparence. Vous n'avez été que dans la réaction et c'est seulement le dos au mur que vous réagissez.

Ce manque d'anticipation et cette lenteur doivent se transformer en mobilisation générale. Seuls 13 % des Français ont reçu une première dose : la France est à la vingtième place des pays qui vaccinent le plus. Certes, ce n'est pas pire qu'ailleurs. Comme disent les Québécois, « Quand on se regarde, on se désole ; quand on se compare, on se console ».

L'Europe ne doit pas être le bouc émissaire de la vaccination. Fin mars, huit millions de personnes ont reçu une dose, quand vous en annonciez quinze millions. Quid de la volte-face sur les vaccinodromes ? Le Président de la République annonce l'arrivée de nouvelles doses et la production de vaccins en France. Très bien, mais où sont les chiffres ? Expliquez-vous !

Comment vous croire alors que le Président de la République ou le porte-parole du Gouvernement, savant mélange de Pinocchio et de Mme Irma, annonçaient un retour à la normale mi-avril, et que l'on reconfine ?

Vous annoncez dix mille lits. Comment vous faire confiance, quand vous n'avez pas tenu vos promesses ? Nous regrettons que ces mesures arrivent trop tard. Votre procrastination a compliqué la donne des élus locaux.

La fermeture des écoles, que je regrette, était nécessaire. Mais pourquoi pas plus de tests ? Vaccinez les 1,2 million d'enseignants et le personnel encadrant dans les écoles. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

Vous rejetez nos propositions sur l'aide alimentaire, l'aide aux établissements les plus fragiles, le RSA pour les moins de 25 ans. Nous avons proposé des mesures ciblées sur les ménages les plus défavorisés, comme la réforme des aides au logement. Au lieu de cela, vous relancez la réforme de l'assurance chômage. Vous n'avez rien entendu. Nous avons proposé de multiples mesures pour mieux organiser les élections, retenues par le Conseil scientifique.

Vous avez voulu freiner, cela n'a fait qu'accélérer. Vous ne vouliez pas enfermer, vous êtes obligés de le faire alors que le train épidémique est lancé à pleine vitesse. Les Français attendent autre chose. C'est un jour sans fin...

Vous voulez vivre avec le virus alors que nous aurions dû le réduire à néant. Nous ne voulons pas être les faire-valoir de cette politique. Le groupe SER ne participera pas au vote. (Applaudissements sur toutes les travées, à l'exception de celles du RDPI et du groupe INDEP)

M. Stéphane Ravier .  - Hier soir, le Président de la République a confessé ce que les Français savent déjà : il a commis des erreurs. Le problème, c'est que le Premier ministre en commet d'autres : voyez les promesses non tenues sur les lits en réanimation.

Quand le Président de la République parle de l'irresponsabilité de quelques-uns, visait-il les Français ou parlait-il du Gouvernement ?

Le Waterloo de la vaccination marque votre déroute. Comme Grouchy, on attend une intervention salvatrice, en vain. Chaque jour, la bataille de la vie est perdue pour des centaines de compatriotes. Vous n'avez à annoncer que des lendemains qui enferment et vous enfoncez les indépendants, les étudiants, les commerçants dans la détresse.

Le parent va télétravailler et faire la classe en même temps : bon courage ! Cela coûte 365 millions d'euros par jour.

Nous sommes dépendants de vaccins étrangers, mais votre poutinophobie vous empêche d'acheter le vaccin russe, pourtant accepté partout. Les Allemands et les Italiens le commandent par millions de doses ! Vous interdisez le traitement du professeur Raoult à Marseille, gratuit et performant, car il menace trop les laboratoires pharmaceutiques.

Confinement et état d'urgence sanitaire sont des facilités pour éviter de parler des sujets qui fâchent. La vérité nous rend libres et la vérité, c'est que la résurrection de nos libertés n'aura lieu ni samedi, ni dimanche, ni lundi. Vous voulez emprisonner le pays dans un enfer économique, social et autoritaire un mois de plus. Merci bien ! (M. Alain Duffourg applaudit.)

M. Bruno Retailleau .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Une fois de plus, la vague est montée ; une fois de plus, l'hôpital a été submergé ; une fois de plus, le Président a parlé ; une fois de plus, le Parlement est pris en otage ; une fois de plus la France est reconfinée.

Vous allez nous demander de voter, mais c'est un vote pour rien, sur rien, puisque sur des annonces déjà faites, des mesures déjà prises. Comme l'a rappelé Hervé Marseille, nous avons la télévision et l'électricité : nous avons pu écouter l'annonce du Président de la République ! À quoi bon voter ?

Lorsque nous le demandions, en cas de prorogation du confinement par exemple, vous nous l'aviez refusé, monsieur le Premier ministre  - pour éviter l'embolie des chambres, ajoutait le ministre de la Santé. Merci pour votre sollicitude ! (Sourires)

Le Sénat n'est pas le faire-valoir de l'exécutif, ni du Président de la République. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées des groupes UC, GEST et SER)

Nous ne sommes pas les greffiers appliqués des verdicts de Jupiter ! Un jour le Président de la République parle, le lendemain le Parlement exécute : ce n'est pas cela, la Ve République ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées des groupes UC et SER)

Nous vous avons confié des pouvoirs immenses. Leur contrepartie, ce devrait être de veiller à un contrôle parlementaire fort. Or vous abusez des ordonnances : 298 depuis 2017, au prétexte que c'est plus rapide. Non, c'est plus long !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Absolument !

M. Bruno Retailleau.  - Il faut 436 jours pour une ordonnance, 235 pour une loi. La seule différence, c'est le contrôle du Parlement.

À cela s'ajoutent l'opacité du Conseil de défense, la procédure législative expéditive - la procédure accélérée systématique - parce que le temps parlementaire est considéré comme du temps perdu. Et que dire de la floraison des comités Théodule !

Il est dangereux que le Président de la République cultive l'illusion d'un homme seul qui décide de tout. Car lorsqu'il y a défaillance, que les mécanismes parlementaires font défaut, la nature ayant horreur du vide, d'autres mécanismes les remplacent.

Le premier, ce sont les réseaux sociaux où chacun peut devenir un Fouquier-Tinville ; le second, ce sont les ministres appelés à la barre, cette judiciarisation que j'ai toujours dénoncée : un ministre de la Santé, qui a autre chose à faire, réveillé à six heures du matin pour une perquisition. Vous le voyez, la sollicitude est réciproque... (Sourires) Cela encourage la bureaucratisation, puisqu'à tous les niveaux de décision, on ouvre le parapluie.

Qu'avez-vous donc fait des pouvoirs très étendus que nous vous avons confiés ? Le Président de la République promettait déjà dix mille lits de réanimation en octobre ; il a réitéré la promesse hier. C'est que la première était une tromperie, ou un engagement non tenu.

Je discutais récemment avec des chefs de service de grands hôpitaux ; ils me disaient qu'il faut l'équivalent de deux blocs opératoires pour un lit de réanimation. Pour un malade Covid soigné pendant quinze jours, ce sont 150 opérations reportées, et donc des pertes de chances.

Vous promettiez quatorze millions de vaccins à la mi-mars, qui sont devenus dix millions à la mi-avril. C'est la valse des chiffres et des calendriers ! Pas un Français ne s'y retrouve.

Il y a deux semaines, un responsable allemand disait : mieux vaut vacciner lentement, si l'on vaccine dans un cadre européen. C'est de l'idéologie. Aucun commissaire européen ne fera pour nous ce que ferait un élu du peuple. Vous avez la santé des Français en responsabilité, monsieur le Premier ministre.

J'entends citer la phrase : « Quand je me regarde je me désole ; quand je me compare je me console ». Non ! Quand on se compare, on se désole ! Nous sommes au 51e rang mondial pour la vaccination, nous faisons moins bien que le Chili et le Maroc. L'Allemagne, avec ses 82 millions d'habitants, compte 75 000 morts, nous en déplorons 100 000 ; et j'ai une pensée pour chacune des familles endeuillées.

M. Trump, en mai, promettait les vaccins pour la fin 2020. Le Président de la République a rétorqué que personne de sérieux ne prédisait de vaccin pour la fin de l'année. Or dans cette organisation hyper-centralisée, quand la tête n'y croit pas, elle ne met pas la chaîne de commandement en tension. C'est un manque de volonté politique et stratégique. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

Il y a deux stratégies gagnantes. D'abord le zéro Covid pratiqué par les démocraties asiatiques, qui ont déploré moins de 20 000 morts. Cela nous était impossible, puisque nous avons manqué d'efficacité sur le traçage et l'isolement.

Restait la vaccination de masse, réussie par ceux qui avaient manqué la première marche : le Royaume-Uni, les États-Unis.

Nous n'avons eu ni l'un ni l'autre. Le trou de souris d'Emmanuel Macron s'est changé, pour les Français, en souricière !

Vous retrouverez la confiance, le meilleur antidote, à trois conditions. L'efficacité d'abord. Les Allemands, nous a indiqué leur ambassadeur, ont commandé 30 millions de vaccins Pfizer sans passer par la procédure européenne. C'est légal ; faisons-le !

Humanité ensuite : ne laissons pas mourir nos aînés derrière les portes closes des Ehpad et des hôpitaux.

Lucidité enfin : chacun a ses limites, le pire est de ne pas reconnaître les siennes. (M. le Premier ministre laisse échapper une exclamation ironique.)

Un Président de la République, même Jupiter, même expert universel, grand épidémiologiste, philosophe, même avec sa pensée complexe (sourires), ne peut rien tout seul.

Comme d'autres groupes, nous ne participerons pas au vote. Ce n'est pas un caprice mais un message. La démocratie représentative, c'est l'assurance que le sort de tous ne repose pas entre les mains d'un seul.

J'espère que cette nuit sans fin aura une aube. J'espère un joli mois de mai ; le Président l'a évoqué, mais pas vous, monsieur le Premier ministre. Y croyez-vous ? Et dans ce cas, pourquoi reporter les élections ? Nous voulons une nouvelle espérance. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur plusieurs travées des groupes SER et GEST)

M. Claude Malhuret .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur plusieurs travées des groupes UC et RDPI) Après la découverte d'un vaccin que peu espéraient si tôt, la course est lancée entre immunité collective et dissémination des nouveaux variants.

Cette équation à deux inconnues est une ordalie pour le Gouvernement comme pour tous les Français. Elle se complique de deux paramètres : le retentissement immédiat sur l'économie d'un confinement, et le désastre psychologique de cette crise interminable qui a amené nos concitoyens au bord de l'épuisement. Même si nous entrevoyons la lumière au bout du tunnel, nous sentons tous que les semaines qui viennent seront cruciales.

C'est pourquoi la décision du Président de la République de ne pas reconfiner en janvier, s'exemptant des injonctions des scientifiques, a été soutenue par une majorité de Français. J'en étais, c'est pourquoi je ne saurais la critiquer aujourd'hui.

N'oublions pas que, depuis deux mois, les enfants sont allés à l'école, les entreprises ont tourné, les Français ont vécu une vie presque normale. (M. François Patriat approuve.) De plus, nous n'avons plus la certitude qu'un confinement serait efficace face aux nouveaux variants. L'Allemagne en est au demeurant au même nombre de décès quotidiens que nous, après un confinement radical.

Aujourd'hui les critiques fusent, une partie du corps médical, sans doute déçu qu'on ne l'écoute plus, fait pression pour des mesures plus sévères. Je ne nie pas les difficultés extrêmes, ni le dévouement inlassable des soignants, mais il faut rendre à César ce qui est à César et à la politique sa prérogative : juger des moyens de tenir face à l'adversité, en prenant en compte les possibilités et les capacités de résistance.

Ce choix est rarement entre une bonne et une mauvaise position ; il est plutôt entre une mauvaise et une plus mauvaise.

Dans une tribune au Monde, 41 médecins de l'AP-HP parlaient d'une situation jamais connue, même après les pires attentats ; le lendemain, le président de l'association des médecins-urgentistes de France répondait que ce n'est pas la Bérézina, qu'il est totalement faux de prétendre que l'on doit trier les malades. Le patron de la Pitié-Salpêtrière demandait la fermeture immédiate des écoles ; le lendemain, la société française de pédiatrie demandait de tout faire pour l'éviter.

Camper sur des mesures qui ne freinent pas assez, c'est être sûr de perdre la course ; mais confiner strictement, c'est prendre le risque d'une révolte de nos concitoyens.

La clé de notre avenir, ce sont les vaccins. La lenteur de la campagne et les décisions de l'Union européenne ont donné lieu à de nombreuses critiques, parfois justifiées. L'an dernier, je demandais d'aller plus vite, sans nous laisser contraindre par le principe de précaution. Alors que l'on faisait passer les Français pour des vaccino-sceptiques, j'avais peur que nous ne manquions de vaccins.

Le Président de la République a désormais pris la mesure de l'enjeu. Le succès de la vaccination est dans les mains de l'exécutif, qui peut compter sur les élus locaux.

Je comprends l'agacement, l'irritation des groupes qui refusent de prendre part au vote. La Ve République n'est pas tendre avec le Parlement ; mais la situation est trop grave pour que nous refusions de prendre nos responsabilités.

C'est toujours quand on est sur le point de réussir que la tentation de renoncer est la plus forte. Cette crise est une épreuve, mais elle n'est que cela ; nous en avons surmonté de plus graves. L'année 2021 sera celle où nous aurons surmonté l'épreuve. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et RDPI, ainsi que sur plusieurs travées du groupe UC)

M. Guillaume Gontard .  - Un an de pandémie, et bientôt cent mille morts ; un an de pandémie, et 4,6 millions de malades ; un an de pandémie, et des soignants à bout de souffle ; un an de pandémie, et des inégalités sociales qui explosent ; un an de pandémie, et plus de dix millions de pauvres ; un an de pandémie, et une entreprise sur trois menacée de faillite ; un an de pandémie et la détresse psychologique, une jeunesse aux abois, une vie sociale et culturelle sous cloche et des perspectives toujours aussi incertaines.

Le bilan est dramatique et ses conséquences se feront sentir pendant des années.

Ce bilan n'est pas celui du Gouvernement, mais il ne vous exonère pas de vos responsabilités, ni le Président de la République des siennes, car Jupiter l'épidémiologiste, le roi thaumaturge, le maître des horloges, décide de tout.

Je le disais déjà le 29 octobre, lors d'un débat similaire : vous n'avez pas su construire l'unité nationale indispensable. Il aurait été intelligent d'associer la représentation nationale aux décisions. Il faut s'appuyer sur l'intelligence collective plutôt que sur celle d'un seul homme, responsable devant personne à cause de notre Constitution bancale.

Vous auriez dû mieux prendre en compte les élus locaux. Quand ils sont de bonne composition, comme à Lyon, vous les récompensez avec des accusations fallacieuses et des polémiques médiocres. Votre gouvernance a été solitaire et erratique ; elle a réduit l'acceptabilité des mesures et leur efficacité.

En un an, d'autres pays ont fait beaucoup mieux. L'Afrique du Sud a élaboré, dans une concertation entre le Gouvernement et le Parlement, un barème à cinq niveaux, activés sur la base de critères objectifs : circulation du virus, nombre de décès quotidiens, occupation des hôpitaux.

Pourquoi ne pas adopter un tel barème ? Pourquoi ne pas demander, comme l'ont fait l'Afrique du Sud et l'Inde, la levée des brevets sur les vaccins ?

Sans espoir d'être entendu, je formulerai néanmoins quelques demandes. D'abord, renforcer les moyens des hôpitaux, en allant plus loin que le Ségur de la santé. Il faut revaloriser les carrières des infirmiers, augmenter le nombre de lits de réanimation : on nous en promettait douze mille en octobre, ils ne sont que sept mille. Comment cette crise n'a-t-elle pas encore débouché sur un plan Marshall de l'hôpital public ?

Il faut enfin une vraie politique sociale : abroger la réforme de l'assurance chômage, augmenter les minima sociaux, étendre le RSA aux moins de 25 ans, rétablir les contrats aidés, soutenir les associations et mettre en place un revenu universel.

Nous vous demandons une vigilance accrue sur les plus fragiles : personnes seules, victimes de violences conjugales.

Vous fermez enfin les écoles, comme nous vous le demandions la semaine dernière lors des questions d'actualité au Gouvernement. Nous sommes soulagés.

Le retard de la vaccination explique en partie cette situation. Le personnel enseignant doit être inclus dans les publics prioritaires.

Hier, le Président de la République qualifiait la lutte contre le décrochage scolaire de combat du siècle. Espérons qu'il dépassera le stade de l'incantation : il faut des moyens pour dédoubler les classes, revaloriser les salaires des enseignants.

Pour financer ces réformes, il faut une contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et les entreprises qui tiré bénéfice de la crise. Les écologistes n'ont pas cessé d'être constructifs, mais ils ne prendront pas part, eux non plus, à cette mascarade politique. (Applaudissements sur les travées du GEST et sur plusieurs travées des groupes CRCE et SER ; M. Yves Bouloux applaudit également.)

M. François Patriat .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) J'entends la dureté des propos, les sarcasmes faciles, les procès sans appel. (On se récrie sur plusieurs travées.) Vous me dites : « C'est le jeu ». Mais est-ce un jeu ? Nous avons eu un an pour mieux connaître et combattre ce virus. Il faut prendre des décisions cruciales et tenir ensemble.

Une seule question se pose : adhérons-nous aux décisions du Président de la République ? J'entends parler de fausse concertation. Avons-nous été consultés ? Oui. J'ai participé à tous les comités de liaison et jamais je n'ai entendu vos propositions. (On s'indigne sur plusieurs travées.) Ces consultations ont eu lieu.

M. Jomier parlait hier d'un homme seul au pouvoir. Ce sont des propos irresponsables, qui vous déshonorent. (Protestations sur les travées du groupe SER)

Que d'anathèmes, de mises en demeure, de « y a qu'à, faut qu'on » ! On exige de fermer les écoles, pour s'insurger ensuite contre l'inhumanité du confinement. Mais la réalité ce sont des enfants isolés, des parents débordés. En laissant les écoles ouvertes, nous avons évité ce « drame éducatif » souligné par l'Unesco. Il faut aussi reconnaître les bienfaits.

M. Hussein Bourgi.  - Ridicule !

M. François Patriat.  - L'humilité est essentielle. (Rires et applaudissements ironiques sur plusieurs travées)

Sortons du jeu politique et des postures binaires. Nos mots doivent être choisis avec responsabilité.

J'entends d'un côté ceux qui critiquent, prédisent, mais ne décident jamais ; de l'autre, ceux qui ignorent, sont arrogants, ne consultent pas. Cela ne fait pas avancer notre pays. (Protestations sur plusieurs travées)

Cette épidémie a été une suite d'aléas et de mauvaises surprises. À chaque fois, des choix difficiles mais nécessaires ont été faits. Ainsi de la décision, en avril 2020, de rouvrir les écoles au mois de mai, très contestée, mais qui s'est révélée efficace, juste et adaptée. En octobre, le reconfinement a été reproché au Président, alors qu'il y avait cinquante mille contaminations par jour. Un jour de novembre, sept questions d'actualité ont été adressées au Gouvernement pour demander la réouverture des commerces ! (Protestations à droite) Nous sommes descendus à vingt mille grâce à ces mesures.

J'ai aussi entendu demander un confinement préventif, mais cela ne marche pas : voyez l'Allemagne.

Certains s'adonnent à de hasardeuses comparaisons internationales, oubliant qu'aux États-Unis, la covid a été la troisième cause de mortalité en 2020, oubliant qu'au Royaume-Uni, le déconfinement, c'est pouvoir se rassembler à six personnes maximum dans un parc.

Le Gouvernement prend des mesures appropriées et graduées pour nous faire passer le pic des prochaines semaines et revenir à une vie normale.

Certains responsables politiques ne voulaient pas se faire vacciner ; je songe à Mme Le Pen et à M. Mélenchon... (Protestations sur plusieurs travées) Un sénateur ici présent a vanté la chloroquine, et déclarait en janvier qu'il ne voulait pas servir de cobaye !

Pourtant, le Gouvernement a anticipé et participé au cadre européen d'achat de vaccins. Un cadre qui a été respecté, et heureusement : nous avons évité une guerre des vaccins.

Vous avez douté du calendrier, mais il a été tenu. (Protestations ; quelques huées)

Vous doutiez du million de vaccinés en janvier, des quatre millions de vaccinés en février (on s'agace sur plusieurs travées, en signalant que le temps de parole est écoulé) ; vous doutez toujours des dix millions en avril, qui seront atteints. Allez-vous douter des trente millions à la fin juin ?

Ces mesures gouvernementales sont des mesures de sagesse. C'est pourquoi le RDPI leur apportera son soutien. Beaucoup d'orateurs ont évoqué Jupiter ; je pense surtout à Ponce Pilate, et je ne suivrai pas son exemple. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; quelques huées)

M. Jean-Claude Requier .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur plusieurs travées du RDPI) Monsieur le Premier ministre, j'ai la sensation d'un déjà-vu, car vos propos sont dans la droite ligne de ceux du Président de la République hier.

Nous sommes toujours dans le même schéma : le Président de la République décide, l'exécutif nous parle de choix collectifs, mais lesquels ? Confinement, déconfinement, reconfinement, confinement limité, rayon de dix kilomètres, de trente, Conseil de défense... Nous n'avons pas la même définition du choix collectif dans une démocratie parlementaire ! (M. Max Brisson approuve.)

Le débat parlementaire aurait dû avoir lieu avant la décision du Président de la République. Celui-ci s'est voulu rassurant mais le constat est tout autre, et nous payons tous le pari d'avoir privilégié l'économie, au prix d'un rebond de l'épidémie. Sans intention polémique, il aurait fallu prendre des mesures plus en amont.

Maintenir l'école ouverte était nécessaire, notamment pour les élèves les plus défavorisés. Mais si le virus ne circule pas davantage à l'école, il ne circule pas moins ; la fermeture était devenue inévitable. Néanmoins, est-il vraiment possible de télétravailler avec des enfants à la maison - surtout pour les huit millions de familles monoparentales ?

Profitons de cette parenthèse de trois semaines pour vacciner nos professeurs et encadrants.

Nous souscrivons à l'impératif de vacciner, vacciner, vacciner, avec le regret que les commandes européennes aient été si timides, et que le vaccin AstraZeneca ait été temporairement suspendu malgré l'avis de l'OMS. L'organisation a jugé le rythme de vaccination en Europe « inacceptable ».

Il faut agir plutôt que réagir pour sortir de la crise. Je crains que l'application des nouvelles mesures, notamment le rayon de dix ou trente kilomètres, ne soit délicate, notamment dans nos territoires ruraux. Les gendarmes et policiers ne sont pas dotés de décamètres ! En ville, le besoin de s'aérer est grand.

Le virus est imprévisible, parler de réouvertures nous semble-t-il prématuré. Nous sommes toujours dans l'incertitude sur la reprise d'une vie normale.

Il aurait fallu faire davantage confiance aux élus locaux : les décisions arrivent d'en haut sans qu'ils soient consultés. Mettez-vous à la place du maire de Cahors, de Tarbes ou de Mende...

L'unité ne se décrète pas ; elle se construit. C'est pourquoi le RDSE, dans sa très grande majorité, ne prendra pas part au vote. (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur plusieurs travées des groupes Les Républicains, UC, SER et CRCE)

Mme Éliane Assassi .  - Si la vie de milliers de nos compatriotes ne tenait pas à un fil, on aurait cru à une mauvaise blague.

Le Président de la République a présenté, seul, des décisions prises seul, avec l'avis du seul Conseil de défense. Et le Parlement est mis sur la touche, devenant une chambre d'enregistrement. Nous sommes convoqués pour écouter le Premier ministre nous expliquer les décisions présidentielles, au cas où nous n'aurions pas compris... et voter des décisions dont nous ignorons les motivations. Pourquoi Emmanuel Macron a-t-il pris des décisions qu'il rejetait auparavant ?

Dès le 19 mars 2020, je dénonçais le risque de dérive autoritaire, avec cet état d'urgence qui met un couvercle sur la démocratie. Il faut rendre au Parlement sa capacité permanente de décision : il est le représentant du peuple et non un aréopage inutile comme du temps du Conseil des Cinq-Cents.

Nous sommes en colère. Le Président de la République écarte le Parlement de sa route, parce qu'il n'a pu lui imposer sa révision constitutionnelle. Il écarte le Conseil des ministres avec ce Conseil de défense détourné de son objet que fixe l'article 15 de la Constitution ; il écarte le Conseil scientifique puisque M. Macron a la science infuse.

L'exercice solitaire du pouvoir n'est jamais une bonne chose pour la démocratie et peut conduire à des drames.

M. Macron nous a présenté ses choix hier. Il abandonne la stratégie territoriale, et autorise la circulation dans tout le pays pendant le week-end de Pâques, sans doute pour laisser le temps aux propriétaires de résidences secondaires de se mettre au vert !

MM. Véran et Blanquer nous expliquaient pourtant, il y a peu, que la situation était maîtrisée. Le variant anglais change la donne. Or le 29 janvier, vous connaissiez déjà ses effets potentiellement dévastateurs : une étude de l'Inserm du 19 janvier indiquait qu'il deviendrait dominant entre la fin février et la mi-mars.

Vous avez accueilli avec scepticisme l'annonce de Boris Johnson, le 22 janvier, sur la dangerosité de ce variant. Or le 10 mars, une étude révélait qu'il était de 64 % plus mortel. Mais M. Macron a attendu la saturation des services de réanimation pour agir...

Hier, M. Macron a caché la vérité : la saturation entraînera des déprogrammations, qui sont déjà un tri. La question va se poser très vite. Renouant avec la pensée magique, il a annoncé l'ouverture de dix mille lits de réanimation « rapidement ». Monsieur le Premier ministre, je vous interrogeais il y a deux semaines sur cette promesse non tenue ; vous me répondiez qu'on ne pouvait les acheter chez Ikea... M. Macron l'a fait. Qu'en pensez-vous ?

Votre Gouvernement est resté les deux pieds dans le même sabot, car il reste attaché au dogme de la liberté économique et de la limitation de la dépense publique. Le « quoi qu'il en coûte » n'a pas été appliqué à l'hôpital.

Dès le 12 mars 2020, le Président dénonçait la loi du marché. Le vaccin aurait dû être un bien commun, sans autre profit que le bien de l'humanité. Pourquoi la France n'agit-elle pas pour la levée des brevets ? (Mme Raymonde Poncet Monge applaudit.)

Maintenir les écoles ouvertes : oui, mais à quel prix ? Pour combien de morts ?

Les mesures sont déjà prises. Vous auriez dû nous demander la confiance, et vous ne l'auriez pas obtenue. Le groupe CRCE a décidé de ne pas prendre part à ce vote, qui est une hypocrisie. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER eGEST, et sur plusieurs travées des groupes UC et Les Républicains)

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé .  - Je vous remercie pour la qualité de ces échanges. Peu de groupes se prononceront, c'est votre choix et je le respecte, de même que doit être respecté le nôtre de demander un débat avec vote.

La priorisation de la vaccination a été prévue par tranches d'âge. Déjà, 92 % des résidents d'Ehpad ont été vaccinés ; après les plus de 75 ans et les plus de 70 ans, la vaccination sera bientôt ouverte aux plus de 60 ans. Ainsi, nous faisons baisser la mortalité dans les hôpitaux.

Nous passons maintenant aux publics prioritaires. Les enseignants d'abord, qui ont tenu leurs classes ouvertes. Le Président de la République a aussi évoqué les forces de l'ordre qui, dans leurs interventions, peuvent entrer en contact avec des personnes contaminées.

Jean-Michel Blanquer, mobilisé, a proposé de commencer par vacciner les enseignants au contact des enfants en situation de handicap. Cela paraît juste et pragmatique.

Quand on compare la France à l'Allemagne sur les tests, il faut tout prendre en compte. La France réalise trois millions de tests par semaine, dont un tiers d'antigéniques - tous gratuits et sans ordonnance. Outre-Rhin, les tests antigéniques ont été introduits il y a un mois, quarante mille seulement sont remboursés : l'Allemagne dispose seulement d'autotests et de PCR.

Nous allons déployer des autotests. Certains ne sont pas encore validés, tous ne sont pas de bonne qualité - vous nous reprocheriez de jouer avec la santé des Français si nous les mettions en circulation !

Nous voulons aller vite, aller fort, faire reculer les obstacles, pas faire n'importe quoi.

Parfois, le Sénat a fait de bonnes propositions, mais j'ai aussi souvenir, monsieur le président Retailleau, de débats sur certains médicaments que d'aucuns auraient voulu me voir distribuer comme des bonbons, et dont nous savons qu'ils ne marchent pas ! Au moins cela n'a-t-il tué personne, dit aujourd'hui M. Bolsonaro... Je n'ai pas à rougir d'avoir tenu tête à des discours parfois virulents, voire démagogiques.

Pour augmenter le nombre de lits en réanimation, on mobilise les équipes, on transfère des unités de soins vers des unités de réanimation, éphémères ou durables : cent-cinquante lits ont été créés à l'hôpital Henri-Mondor, nous en créerons soixante de plus. Il y a des transformations de blocs opératoires, une mobilisation des étudiants, des réservistes.

Cela suppose de déprogrammer. Nous pouvons monter à dix mille lits, mais au prix de déprogrammations. L'an dernier, j'avais déployé le plan blanc dans tous les hôpitaux, car nous ne savions pas à quelle vitesse monterait la vague. Aujourd'hui, nous savons qu'il y a cinquante à cent patients supplémentaires par jour. Si je demandais une déprogrammation immédiate de tous les soins pour monter d'un coup à dix mille lits - dont trois mille resteraient vides - vous me le reprocheriez ! Faites confiance à nos soignants, qui sont au contact des malades.

Un mot sur le pass sanitaire. Notre pays a la passion de l'égalité. J'imagine mal que quand certains lieux rouvriront au public, ils ne rouvrent pas pour tous. C'est en tout cas mon opinion, mais le débat démocratique aura lieu. Nous y travaillons, sur le plan juridique, sanitaire, scientifique et logistique.

M. Bruno Retailleau.  - Il faut d'abord vacciner.

M. Olivier Véran, ministre.  - Est-ce trop tard pour confiner, comme je l'ai entendu ? Où en serions-nous si le pays avait été confiné le 29 janvier ? Cela n'a pas empêché le variant de se diffuser en Allemagne et en Italie. Nous avons gagné du temps de liberté, où les commerces et les écoles sont restés ouverts.

Le risque juridique pourrait-il nous freiner, monsieur Retailleau ? Permettez-moi de citer un film que j'aime beaucoup, Bienvenue à Gattaca.

M. Julien Bargeton.  - Excellent film !

M. Olivier Véran, ministre.  - Deux frères, l'un handicapé, l'autre en forme, se mesurent à la nage. C'est le premier qui gagne. « Comment as-tu fait ? », lui demande son frère. « Je n'ai jamais économisé mes forces pour le retour », réplique-t-il. Nous ne le faisons pas non plus, car l'enjeu est de protéger les Français. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Jean Castex, Premier ministre .  - Si, avec de nombreux ministres, je suis ici devant vous, c'est parce que je respecte beaucoup le Parlement et le Sénat. (« Ah ! » sur les travées du groupe Les Républicains) Nous en donnons la preuve. Ne pas respecter le Parlement, ce serait le priver des droits et prérogatives qu'il tient de la Constitution. Libres à certains de critiquer la Constitution et les institutions, mais ne reprochez pas au Gouvernement de la République d'appliquer la Constitution de la République. En application de son article 34, tout ce qui relève du Parlement dans la gestion de la crise sanitaire est soumis au Parlement.

Je suis venu vous présenter notre action et vous demander de vous prononcer. La démocratie, c'est la clarté et le respect. Je ne suis pas certain que le général de Gaulle, pour qui j'ai le plus grand respect, n'aurait pas trouvé iconoclaste que le Gouvernement demande au Parlement d'approuver des dispositions relevant de son autorité. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

La gestion de cette crise est transparente. (On le conteste sur les travées du groupe Les Républicains.) Jamais les données sanitaires, économiques, épidémiologiques n'ont été autant à la disposition non seulement de la représentation nationale, mais de tous nos concitoyens. Ils ne se privent pas de s'en saisir pour commenter, critiquer - et c'est leur droit, en démocratie.

À chaque fois que le Parlement nous interroge, dans le cadre de son pouvoir de contrôle, nous répondons. C'est la procédure, et nous l'appliquons.

Une gestion de crise suppose toujours des prérogatives spécifiques pour l'exécutif, en France comme ailleurs.

Le moment est grave. Comme je l'ai fait lors du deuxième confinement, puis pour vous présenter la stratégie vaccinale, je viens vous expliquer les tenants, la motivation et le contenu des mesures difficiles que le Gouvernement s'apprête à prendre, en vertu des pouvoirs que la Constitution lui attribue. Rien de plus, mais rien de moins !

Prendre part à ce vote, en votre âme et conscience, aurait été un exercice de clarification et de responsabilité, qui ne vous aurait pas rendu coresponsables de l'action des pouvoirs publics.

Sur le fond, je note beaucoup d'interventions mesurées, qui reconnaissent que la situation n'est pas si simple et que les exemples étrangers tempèrent les commentaires expéditifs.

M. Bruno Retailleau.  - Nous sommes au Sénat.

M. Jean Castex, Premier ministre.  - L'épidémie s'accélère, elle est plus dangereuse, elle va plus vite que la vaccination, ici comme ailleurs, ce qui nous oblige à prendre des mesures complémentaires.

Le président Kanner, d'un ton désolé, dénonce « un nouveau confinement »...

M. Patrick Kanner.  - Eh oui!

M. Jean Castex, Premier ministre.  - ... tout en nous reprochant de ne pas l'avoir fait plus tôt ! Comprenne qui pourra !

M. Bernard Jomier.  - Mais si.

M. Jean Castex, Premier ministre.  - Vous vouliez que nous prenions des mesures plus difficiles, mais tout est dans l'art de l'exécution, comme dit M. Retailleau. Vous ne vouliez surtout pas fermer les commerces, ou les écoles - vous demandiez même la réouverture des établissements culturels, des pistes de ski...

M. Loïc Hervé.  - Très bien !

M. Jean Castex, Premier ministre.  - ... Même des discothèques ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

Le Gouvernement prend des mesures proportionnées, d'abord sur des critères sanitaires, mais pas seulement. C'est le rôle du politique.

L'exemple de M. Malhuret est très illustratif : certains médecins appellent à fermer les écoles, mais les pédiatres disent l'inverse ! Bref, tout invite à être mesuré, progressif et proportionné.

Face à la gravité de la situation, nous prenons des mesures plus graves, dont nous mesurons l'impact considérable pour nos concitoyens. Fermer les écoles, c'était pour nous la dernière extrémité. Si nous le faisons, c'est que la situation l'exige. Mais convenez que le faire maintenant, à la veille des vacances scolaires, ce n'est pas la même chose qu'il y a quinze jours !

Il va falloir nous serrer les coudes - non pas politiquement, je ne suis pas naïf - pour faire face à cette nouvelle épreuve.

Je vous trouve particulièrement sévères sur la vaccination.

M. Antoine Lefèvre.  - Eh oui !

M. Jean Castex, Premier ministre.  - Ne faisons pas croire à nos compatriotes que l'on peut trouver des doses n'importe où.

L'ambassadeur d'Allemagne a dit qu'on pourrait commander des doses unilatéralement... L'Allemagne l'a-t-elle fait ? Non, car l'Union européenne en a commandé beaucoup plus. (M. Vincent Segouin proteste.)

M. Bruno Retailleau.  - Et les États-Unis ?

M. Jean Castex, Premier ministre.  - C'est la vérité ! Si l'État faisait des commandes de son côté, comme quelques-uns l'ont fait, la production n'augmenterait pas, mais les prix monteraient. (Protestations à droite)

M. Bruno Retailleau.  - Les faits sont là !

M. Jean Castex, Premier ministre.  - Laisser accroire qu'il y aurait plus de doses qu'il n'y en a, ce n'est pas raisonnable.

Notre devoir, c'est de vacciner autant que possible quand les doses sont là. Le devoir de l'Europe, c'est de faire respecter les contrats conclus avec les laboratoires et nous nous y employons avec la dernière énergie.

Notre système de santé est très éprouvé. Ne faisons pas croire qu'on peut créer des lits de réanimation en un an. (Vives protestations à droite comme à gauche)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie.  - Ce sont pourtant les annonces du président de la République !

M. Jean Castex, Premier ministre.  - On reconvertit des forces mais on ne forme pas un anesthésiste-réanimateur en un an, ni même une infirmière-anesthésiste, et vous le savez très bien, madame Assassi !

Tout cela vient de loin, monsieur Kanner. Les moyens de l'hôpital public, c'est l'Ondam hospitalier exécuté : en 2012, 2,6 % ; en 2013, 2,1 % ; en 2014, 1,7 % ; en 2016, 1,5 %. (Protestations sur les travées du groupe SER) Fin 2019, 8,9 % ; dans le PLFSS 2021, 10,2 % !

Les difficultés de l'hôpital ne datent pas d'aujourd'hui. Soyons raisonnables et humbles.

M. Alain Milon.  - Et sous Sarkozy ?

M. Jean Castex, Premier ministre.  - L'Ondam était encore supérieur.

Sur des postes aussi techniques, on ne peut pas recruter et former en un an. Mais nous faisons tout pour redéployer, reconvertir, nous faisons appel à la réserve, pour faire face, comme ils le font admirablement depuis quatorze mois. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

La déclaration du Gouvernement, en application de l'article 50-1 de la Constitution, est mise aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°100 :

Nombre de votants 45
Nombre de suffrages exprimés 41
Pour l'adoption 39
Contre   2

Le Sénat a adopté.

(Rires moqueurs ; applaudissements sur les travées du RDPI)

La séance est suspendue à 17 h 25.

présidence de M. Roger Karoutchi, vice-président

La séance reprend à 17 40.