Défaillances d'entreprises
M. le président. - L'ordre du jour appelle le débat sur les défaillances d'entreprises, à la demande de la délégation aux entreprises.
M. Olivier Rietmann, au nom de la délégation aux entreprises . - (Applaudissements) La délégation sénatoriale aux entreprises a voulu associer tous les sénateurs à la réflexion sur ce sujet essentiel, au moment où la situation des entreprises est très délicate. La période est marquée par des menaces de guerre commerciale et une incertitude sur la croissance, mais le sujet des défaillances est en réalité multiforme.
Les chiffres sont sans appel. En un an, les défaillances s'élèvent à 66 000 selon la Banque de France ; ce chiffre est supérieur à celui de 2015, dépassant largement la période précédant la pandémie.
Selon l'observatoire du Conseil national des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires (CNAJMJ), le nombre d'entrées en procédure judiciaire a augmenté de 2,3 % au premier trimestre 2025 par rapport à 2024 et de 23,8 % par rapport à 2019.
Nous sommes donc loin de la décrue annoncée.
La Cour des comptes a déjà abordé la question de la détection et du traitement des difficultés des TPE et PME en juin 2024 ; le parcours des entreprises en difficulté demeure complexe et les guichets trop nombreux.
Pourtant, des solutions existent, pragmatiques, pour mieux accompagner les dirigeants des TPE et PME : tel est l'objet du rapport que vous ont remis le médiateur national du crédit et le médiateur des entreprises.
Quelles leçons tirer de ces chiffres ?
D'abord, la situation d'instabilité causée par l'administration Trump fait planer une menace importante. Les organisations patronales nous l'ont dit pas plus tard que cet après-midi.
Ensuite, si les TPE de moins de dix salariés représentent 85 % des procédures - 1 500 emplois supprimés par semaine -, la part des ETI et des PME dans les défaillances a augmenté de 28 % en un an. Pour la première fois, celles-ci ne sont plus aussi résistantes : le nombre d'ETI en redressement a doublé dans tous les secteurs. Or les ETI sont notre force de frappe en matière de commerce extérieur.
Enfin, la dette publique culmine à 3 300 milliards d'euros et la charge annuelle de la dette à 59 milliards d'euros : quand prendrons-nous conscience de la gravité de la situation ? Nous ne pouvons plus miser sur la seule augmentation des recettes fiscales issues des entreprises. Au contraire, nous devons les accompagner. La compétitivité doit être au coeur de notre stratégie.
Allianz Trade estime que les défaillances augmenteront encore au cours des deux prochaines années. Il nous faut des réformes structurelles. Il serait irresponsable de reconduire, voire d'aggraver, la contribution des entreprises en 2026, car ce sont elles qui créent de la valeur, financent les salaires et les politiques publiques.
La principale priorité du moment, c'est la transformation écologique. Cela supposera beaucoup d'investissements, ce qui risque de conduire à une baisse de la rentabilité des entreprises. Qui a appelé à une telle politique de décroissance ? Ni Yannick Jadot ni Marine Tondelier, mais le ministre Éric Lombard. C'est inacceptable !
M. Damien Michallet et Mme Frédérique Puissat. - Très bien !
M. Olivier Rietmann. - Ne nous trompons pas d'ennemis en fustigeant les entrepreneurs, comme l'a récemment fait Jacques Attali.
Le Sénat et sa délégation aux entreprises sont prêts à se mobiliser pour redresser les comptes publics sans provoquer de récession. Les entreprises doivent se sentir soutenues par les pouvoirs publics : je pense non aux aides, mais à la capacité de l'État à laisser les entreprises se consacrer à la création de valeur.
Nous devrons prendre des décisions courageuses, et rapidement : le temps de la décision politique doit impérativement s'aligner sur celui de la vie économique.
Madame la ministre, je vous remercie pour ce dialogue que j'ai l'honneur de lancer ce soir. Je forme le voeu que celui-ci se poursuive avec l'ensemble des ministères concernés. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP et du RDPI)
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC) Merci à la délégation aux entreprises pour l'organisation de ce débat.
Un échange constructif commence par des constats partagés. Le premier chiffre est celui des défaillances : 66 000 en 2024. Autrement dit, ces entreprises ont connu un jugement d'ouverture lors de l'une des trois procédures collectives - sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire.
Le deuxième : 48 % de ces entreprises employaient au moins un salarié. Ce chiffre doit être comparé au nombre de créations d'entreprises : un million depuis 2021 - surtout des micro-entreprises.
Le troisième chiffre est celui qui se cache derrière ces défaillances : 234 000 emplois, contre 151 000 en 2019. C'est impressionnant, mais 70 % des emplois menacés seraient finalement conservés grâce au rétablissement de l'entreprise ou à une reprise.
L'état des lieux est clair : notre pays connaît un niveau de défaillances important, bien supérieur à celui observé avant la pandémie.
Celui-ci doit toutefois être remis en perspective avec la crise sanitaire, pendant laquelle le Gouvernement a pris de nombreuses mesures d'urgence. En 2019 et 2020, nous n'avions que 30 000 défaillances par an. D'où un effet de rattrapage.
Cela dit, notre économie n'est pas grippée : nous constatons le maintien d'une dynamique inédite de création d'entreprises et de création d'emplois dans le secteur privé.
La compétitivité de nos entreprises est cruciale : elle seule permet d'innover, d'investir, de se développer et d'embaucher, en résistant à la concurrence. Éric Lombard y est très attaché.
Nos entreprises font face à une vive concurrence. Le Gouvernement est engagé aux côtés des TPE, des PME, des ETI ou des micro-entreprises, dans les différentes phases de leur vie. Je salue tous les entrepreneurs, de l'économie sociale et solidaire (ESS) ou de l'économie conventionnelle : ils assurent la vitalité des territoires.
Je sais aussi que nos entreprises ont besoin de lisibilité et de stabilité. Nous devons nous engager dans une diminution des dépenses publiques, pour diminuer les prélèvements obligatoires qui pèsent sur elles.
Les normes aussi constituent aussi une perte de temps, donc d'argent : le projet de loi Simplification de la vie économique, que je défendrai ce soir à l'Assemblée nationale, y remédie. S'attaquer au stock de normes est une chose, mais il faut s'attaquer aussi au flux : je suis très attachée à la mise en place du test PME, comme vous, monsieur Rietmann. C'est essentiel pour éviter des normes illisibles, dont le coût est parfois disproportionné.
M. Guillaume Chevrollier. - Tout à fait !
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - Yves Jégo me remettra prochainement un rapport sur le made in France pour mieux comprendre ce qui fait la vitalité de nos territoires.
Nous devons proposer des solutions pour limiter le plus possible les défaillances.
Premier chantier : inciter les entrepreneurs à agir en amont des procédures collectives. Si 70 % d'entre elles mènent à une liquidation, 70 % des procédures préventives permettent la poursuite de l'activité. La start-up d'État Signaux faibles facilite le recours aux procédures amiables.
Deuxième chantier : simplifier la cartographie des outils publics d'accompagnement.
Le troisième chantier est celui du rebond. L'échec entrepreneurial est mal vécu. Il nous faut un changement culturel. Nous ne partons pas d'une page blanche : retravaillons les dispositifs existants.
J'espère que nous pourrons esquisser un plan d'action, pour prévenir, protéger et rebondir. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP, ainsi que sur quelques travées du groupe UC)
M. Franck Menonville . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains) La situation financière des entreprises doit nous alerter tout autant que celle de l'État : 66 000 défaillances en un an, soit 12,5 % de progression annuelle. Les entreprises de moins de dix salariés et les ETI, dans les secteurs de l'immobilier, de la construction, du transport et de l'automobile, sont particulièrement touchées : pas moins de 3 200 postes disparaissent par semaine.
Le mouvement de rattrapage post-covid, l'augmentation des coûts énergétiques, le poids du modèle social, la prolifération normative, la multiplication des contraintes administratives, autant de raisons expliquant cette situation.
Ces entreprises sont pourtant le coeur battant de notre économie.
Quelles mesures de soutien comptez-vous mettre en oeuvre ? Le mandat ad hoc ne représente que 13 % des procédures : comment le promouvoir ? Comptez-vous réorganiser les prêts garantis par l'État (PGE) hors procédures collectives ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - Il faut avant tout assurer la compétitivité des entreprises en diminuant leurs charges. (M. Fabien Gay proteste.)
Comment prévenir les défaillances et favoriser les procédures amiables ? Des dispositifs existent. Le plus connu est le comité départemental d'examen des problèmes de financement des entreprises (Codefi), qui dépiste les risques de défaillances. La start-up Signaux faibles analyse les informations et identifie chaque trimestre les risques de défaillance à dix-huit mois.
Le mandat ad hoc et la conciliation, procédures amiables, doivent être privilégiés, car les procédures préventives permettent dans 70 % des cas de poursuivre l'activité.
M. Fabien Gay . - Il y a deux façons d'aborder le débat.
Il est vrai que certaines défaillances sont dues à la guerre commerciale ou au prix de l'énergie, notamment.
Mais, parfois, le patronat organise lui-même des défaillances (M. Damien Michallet proteste) et la délocalisation des savoir-faire. Je ne parle même pas de Michelin ou Auchan - des collègues s'en chargeront.
Hier, j'étais dans le Gard, à la Verrerie du Languedoc, sous-traitant de Perrier. Cette entreprise, détenue depuis 2011 par Owens-Illinois, n'a aucun problème financier. Mais le groupe a décidé de fermer le site et de supprimer 500 emplois, alors qu'il a touché 15 millions d'euros d'argent public en cinq ans.
Le Gouvernement restera-t-il les bras ballants face à cette stratégie purement financière qui casse notre industrie et nos savoir-faire ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - Je salue l'engagement des entreprises pour continuer à investir et embaucher. Le Gouvernement regrette la décision de réorganisation de la verrerie de Vergèze.
Le groupe Owens-Illinois présente cette réorganisation comme indispensable pour maintenir son implantation en France - neuf sites et 2 000 emplois.
Le Gouvernement est mobilisé pour vérifier la qualité du dialogue social avec les employés (M. Fabien Gay s'exclame), celle des mesures d'accompagnement du plan de sauvegarde et les résultats des actions menées, notamment pour retrouver un repreneur.
Des solutions de reprise existent - je pense aux Fonderies de Bretagne.
M. Fabien Gay. - Parce que les camarades se sont battus !
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - Mobilisons-nous pour trouver un repreneur pour cette entreprise.
M. Guillaume Gontard . - Vencorex, Michelin, Fonderie de Bretagne, Photowatt : partout des sites ferment, dans des territoires meurtris. Acier, chimie, pneus, éoliennes, panneaux solaires, des secteurs entiers sont liquidés les uns après les autres.
La compétition asiatique et les prix de l'énergie expliquent en partie ces difficultés actuelles. Mais la plupart de ces entreprises sont rentables ; leur seul objectif est de rémunérer encore plus leurs actionnaires. Face à cette rapacité qui détruit notre souveraineté industrielle, que fait l'État ?
Quand il s'agit de verser des subventions pour l'implantation de nouvelles usines, l'État est au rendez-vous. Mais, pour sauver ces entreprises, il devient impuissant, comme si les licenciements et les délocalisations étaient une fatalité.
Pourtant, il peut agir, en nationalisant les activités stratégiques - il l'a déjà fait. Pourquoi les reprises en coopératives ne sont-elles jamais soutenues par l'État ?
Madame la ministre, la destruction créatrice que vous encouragez détruit notre industrie et l'intelligence artificielle ne remplacera jamais les savoir-faire des humains. Qu'attendez-vous pour agir ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - Nous regrettons chaque défaillance, chaque fermeture. Mais la dynamique de réindustrialisation engagée en 2022 se poursuit, avec 450 ouvertures nettes depuis 2022, dont 89 en 2024.
Ce solde positif doit être mis en avant : nous devons tenir bon, sans nier les difficultés. Ne cédons pas à la fatalité.
La situation de l'industrie est contrastée : agroalimentaire et industries vertes font des scores admirables, tandis que les électro-intensifs souffrent. Nous devons actionner tous les leviers nécessaires pour assurer la prospérité économique des entreprises. Le projet de loi Simplification et le plan d'urgence européen offriront des solutions. Nous devons aussi ouvrir le débat sur le coût du travail et reprendre la réflexion sur la baisse des impôts de production. (M. Olivier Rietmann renchérit.)
M. Guillaume Gontard. - Ma question portait sur la stratégie du Gouvernement. Vous refusez tous les outils à votre disposition : nationalisations temporaires, aides aux coopératives, notamment.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - Les sociétés coopératives participatives (Scop) et les sociétés coopératives d'intérêt collectif (SCIC) n'ont pas accès aux outils de financement dont bénéficie l'économie conventionnelle. Ainsi du prêt transmission de Bpifrance qui impose trois années d'ancienneté à l'entreprise susceptible de reprendre l'activité. Nous travaillons avec Bpifrance sur ce sujet.
Mme Marion Canalès . - Auchan, Valeo, Vencorex, les fermetures décidées par ces grands noms attirent l'attention, mais elles relèvent davantage de la stratégie que de défaillances économiques. Je dénonce la fermeture scandaleuse d'Auchan dans les quartiers nord de ma ville, Clermont-Ferrand, alors que 10 % des dépenses d'alimentation et d'équipement des Français vont à la famille Mulliez.
La loi a confié aux tribunaux de commerce un rôle de prévention face aux défaillances des entreprises. Pousser leurs portes, c'est faire confiance à des femmes et à des hommes issus eux aussi du monde de l'entreprise.
Alors que le nombre d'emplois menacés par des défaillances a triplé dans mon département, Clermont Auvergne Métropole a décidé de ne pas rester sans rien faire et a créé un dispositif permettant d'intervenir au stade de la procédure amiable, via une subvention versée à l'association des juges et anciens juges consulaires du Puy-de-Dôme pour que ceux-ci accompagnent les entreprises en difficulté jusqu'à leur rebond. Chaque année, une douzaine d'entreprises est ainsi accompagnée.
Sur le même modèle, la région Île-de-France a mis en place le chèque prévention.
L'État va-t-il se saisir de ce type de mesures en vue de leur généralisation ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - Les dispositifs que vous citez sont insuffisamment connus et il faut faciliter leur accessibilité. La semaine dernière je me suis rendue dans la Loire et j'ai échangé avec les services de la préfecture qui ont mis en place des dispositifs pour anticiper les difficultés. Ils ont maintenu le dispositif des rencontres économiques, initié pendant le covid.
Entre les conseillers départementaux aux entreprises en difficulté, les commissaires à la restructuration et à la prévention des risques et le comité interministériel de restructuration industrielle (Ciri), il faudrait un guichet unique. Au-delà des soutiens financiers, il faut travailler sur la compétitivité des entreprises en amont, diminuer les prélèvements obligatoires et le coût du travail pour soutenir la comparaison avec les autres pays. C'est l'élément essentiel.
M. Jean-Luc Brault . - Quand le bâtiment tousse, toute l'économie s'enrhume. Or aujourd'hui, il est totalement grippé. Il me faudrait non pas deux minutes, mais deux semaines pour parler des défaillances d'entreprises. Empilement de normes, surtransposition européenne, concurrence déloyale au sein de l'Union, délais et charges administratives, accès aux crédits bancaires, agissements et temps de réaction des mandataires liquidateurs : où en est la simplification ?
Dans le Loir-et-Cher, un équipementier de la SNCF qui a 600 salariés m'a dit : en France, j'ai mis deux ans et demi pour avoir un permis de construire ; à Barcelone, cinq mois ! Et encore, si vous avez la chance de ne pas tomber sur un triton doré ou un papillon azuré - même si je n'ai rien contre la biodiversité.
Parmi d'autres chantiers interrompus, c'est celui d'un entrepreneur qui pèse 60 millions d'euros de chiffre d'affaires qui vient d'être arrêté ce matin. L'immobilier peine à redémarrer, nombre de restaurants déposent le bilan, des boulangeries mettent la clé sous la porte.
Notre texte sur la simplification de la vie économique a été voté à l'unanimité il y a plusieurs mois : il portait notamment sur les syndicats et les mandataires liquidateurs qui font beaucoup de mal en faisant traîner les affaires pour se servir dans la trésorerie de l'entreprise en difficulté. À la veille du 1er mai, ne faut-il pas lancer la révolution culturelle de l'entrepreneuriat ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - Les entreprises du BTP ont été effectivement touchées. Le marché de la construction neuve diminue, et la croissance de la rénovation énergétique ne suffit pas.
Le projet de loi sur la simplification de la vie économique examiné actuellement à l'Assemblée nationale comporte des mesures de simplification pour l'accès à la commande publique pour les TPE et PME, comme la hausse du seuil de 40 000 à 100 000 euros ou la possible suppression du caractère solidaire des groupements momentanés d'entreprises pour les PME dans le cadre de marchés de moins de 100 000 euros. La simplification de l'accès au label RGE est aussi portée par le ministre du logement.
Je lancerai le 13 mai prochain les assises de la restauration et des métiers de bouche.
Mme Brigitte Hybert . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Les chiffres des défaillances du premier trimestre montrent que les Pays de la Loire sont particulièrement touchés, avec une augmentation de 28 % des défaillances, soit 924 procédures en plus. Les ETI attendent une simplification des procédures.
Le programme ETIncelles a été bien accueilli, mais des freins demeurent, notamment pour l'éligibilité, réduite aux PME entre 60 et 220 salariés. Pourquoi de telles bornes ? Comptez-vous élargir ce programme, qui pourrait redonner un élan à l'industrialisation de notre pays ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Annick Billon applaudit également.)
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - Lundi matin, j'ai fait un point sur la simplification des procédures : sur les 535 Cerfa qui concernent le ministère de l'économie, 115 ont été supprimés. Cela représente 450 000 téléchargements que les entrepreneurs n'auront plus à effectuer. (M. Olivier Rietmann s'en réjouit.)
Le programme ETIncelles a accompagné 200 PME depuis 2023 avec un objectif de 500 d'ici à 2027. Il propose un accompagnement sur mesure pour faire grandir les PME en ETI. Ce dispositif est assez souple et permet à une grande diversité d'entreprises d'y postuler. Il s'agit de valoriser les pépites de notre territoire.
Dans votre département, des entreprises telles que ABCM, Arcade Cycles, Rabaud ou Clean Sells en ont profité.
Les appels à manifestation d'intérêt (AMI) de cette année sont terminés depuis le 28 mars 2025 ; le lancement de la cinquième promotion se fera le 16 mai prochain. Si vous connaissez des entreprises qui souhaitent en bénéficier, rapprochez-vous de la direction générale des entreprises.
M. François Patriat . - Personne ne nie les difficultés des entreprises, mais personne ne peut nier les efforts des gouvernements pour soutenir la politique de réindustrialisation. La vie a toujours été faite de créations et de suppressions d'entreprises.
Pendant la crise sanitaire, de nombreuses aides ont été mises en place, sauvant l'économie. Aujourd'hui, l'effet de rattrapage intervient.
Ce sont les plus petites entreprises qui sont touchées, comme l'entreprise Valti, à Montbard, en Côte-d'Or. Pour trouver un repreneur, c'est difficile. Pas moins de 130 personnes risquent de se retrouver sans emploi. Cet exemple s'inscrit parmi tant d'autres.
La guerre commerciale initiée par Trump crée de l'incertitude. Or nous exportons de nombreux produits issus du savoir-faire français. D'autres venus de l'étranger pourraient prendre leur place.
Quelles mesures de simplification pourraient aider les entreprises à poursuivre leur activité ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - La réindustrialisation est réelle : 89 ouvertures nettes en 2024, 450 depuis 2022.
En dépit de la suspension de 90 jours décrétée par Donald Trump, la menace d'une augmentation des droits de douane crée de l'incertitude ; malgré tout, le taux additionnel sera de 10 % sur de nombreux produits et de 25 % sur l'acier, l'aluminium ou l'automobile. Ce moment est l'occasion de créer un rapport de force pour engager des discussions. Nous devons porter ce dossier au niveau européen et parler d'une seule voix.
Des mesures de simplification sont engagées à travers le projet de loi de simplification de la vie économique, notamment pour les baux commerciaux - 2 milliards d'euros de trésorerie pourraient être rendus aux commerçants, par la mensualisation des loyers et la limitation du dépôt de garantie à un mois.
M. Philippe Grosvalet . - En 2024, 67 830 procédures de défaillances d'entreprise ont été enregistrées, touchant toutes les régions et tous les secteurs. Pas moins de 250 000 emplois sont menacés. En Loire-Atlantique, c'est la stupeur : en licenciant 600 salariés après avoir touché 298 millions d'euros de subventions en 2023 et s'être vu promettre 850 millions d'euros pour décarboner ses sites, ArcelorMittal prend une décision incompréhensible. Cela s'ajoute à Michelin, Vencorex, Systovi ou, chez moi, General Electric.
Les discours de Donald Trump ne sont pas seuls en cause ; la fragilité du tissu industriel et le manque de vision stratégique y contribuent aussi.
L'objectif de souveraineté industrielle ne peut pas se réduire à la distribution de subventions ; il est plus que temps que l'État définisse une réelle politique de développement économique et industriel en partenariat avec nos territoires et nos représentants européens.
Ayons une pensée pour tous les salariés qui se voient dans l'incertitude et pour des territoires qui ne s'en sortent jamais indemnes.
À quand une planification industrielle ? Qu'envisagez-vous de faire s'agissant d'ArcelorMittal ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - Les annonces d'ArcelorMittal sont regrettables. Mais les difficultés de la sidérurgie européenne sont anciennes : la production a baissé de 20 % entre 2018 et 2023. Le plan d'ArcelorMittal concerne tous les sites européens. Aucun des sites français n'est menacé de fermeture à court terme ; c'est important. Nous serons vigilants, Marc Ferracci l'a rappelé. Avec huit autres États membres, la France a fait des propositions à la Commission européenne au travers d'un plan présenté le 19 mars dernier. La France souhaite le maintien de la sidérurgie européenne. L'État veillera au reclassement des salariés auxquels j'adresse mes pensées.
M. Pierre-Antoine Levi . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Les retards de paiement ont un impact dévastateur. D'après le rapport remis le 23 avril par les médiateurs Frédéric Visnovsky et Pierre Pelouzet, les retards de paiement inter-entreprises ont atteint près de quatorze jours fin 2024, privant nos TPE et PME de 15 milliards d'euros de trésorerie.
Nous traversons une période de croissance ralentie : 20 % des TPE et 9 % des PME présentent des capitaux négatifs. Les retards de paiement sont souvent la goutte d'eau menant à la défaillance. À cela s'ajoute le manque de trésorerie prévisionnelle.
Quelle est votre position sur trois recommandations du rapport : calcul des amendes en pourcentage de chiffre d'affaires plutôt qu'avec un plafond de 2 millions d'euros, manifestement insuffisant ; création d'équipes territoriales animées au niveau régional pour fédérer les acteurs publics et privés autour de la prévention des difficultés ; formation systématique des entreprises sur les dispositifs d'aide disponibles, notamment par les experts-comptables ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - Les retards de paiement sont évalués à 15 milliards d'euros de trésorerie pour les TPE et PME, souvent placées en bout de chaîne. Deux facteurs devraient les limiter : la mise en place de la facturation électronique et l'inclusion des comportements de paiement dans les critères de la cotation par la Banque de France.
Le dispositif de sanctions actuel n'est pas satisfaisant. Malgré tout, je salue les travaux de la DGCCRF, qui a infligé onze amendes de plus d'un million d'euros en 2024.
J'ai abordé cette question avec le président de la délégation aux entreprises et un texte est en préparation.
Nous devons améliorer la lisibilité des dispositifs et mettre en place un guichet unique.
Ensuite, pour mieux accompagner les entreprises, nous devons avoir une charte commune à tous les acteurs, publics comme privés.
M. Denis Bouad . - L'annonce de la fermeture de la verrerie de Vergèze est une onde de choc pour les 164 familles concernées. Sans repreneur dans les prochains mois, elle devra fermer. Alors que 70 % de ses ventes se font à l'usine Perrier, son voisin direct, sa fermeture serait un non-sens écologique.
La commune de Vergèze est pleinement mobilisée. Mais un engagement fort de l'État est indispensable au maintien de cet outil de production. Avec 7 % de résultat net, ne la sacrifions pas sur l'autel de la finance et du profit.
On ne peut pas parler de réindustrialisation face à des salariés qui voient fermer leur usine où ils ont travaillé toute leur vie, parfois de père en fils. Comment le Gouvernement compte-t-il s'engager pour maintenir ce site de production et les emplois menacés ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - Nous notons un déclin structurel du marché du vin ; en outre, le secteur de la bière a tendance à utiliser de l'aluminium. Nous regrettons cette décision de l'entreprise liée à la baisse structurelle de la consommation. Le Gouvernement est mobilisé. Un suivi territorial a été lancé par le préfet du Gard.
Plusieurs acteurs sont mobilisés : préfecture, sous-préfecture, commissaire aux restructurations et à la prévention des difficultés (CRP), direction départementale de l'emploi, du travail et des solidarités (DDETS) du Gard, agences de développement économique local et chambres consulaires. Nous devons tout faire pour trouver un repreneur.
M. Denis Bouad. - Votre réponse ne répond en rien à ma question. Son principal client, Perrier, avait vendu la verrerie pour un euro symbolique il y a dix ans et 70 % de sa production est consacrée à l'eau. Rien à voir avec une baisse de consommation !
Mme Anne-Marie Nédélec . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le régime de garantie des salaires confié à l'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS) est un filet de sécurité indispensable qui assure les revenus des salariés pendant les procédures collectives. Mais le régime est à la peine : des montants records d'avance versés ces deux dernières années l'ont conduit à augmenter par deux fois le taux de cotisation en 2024. S'ajoutent à cela des jurisprudences de la Cour de cassation, élargissant le périmètre du régime aux indemnités, remettant en cause sa capacité à recouvrer les fonds accordés aux salariés, pourtant indispensables pour assurer l'équilibre financier du régime.
Ce sujet primordial a-t-il été identifié par vos services et les autres ministères compétents ? (Quelques applaudissements à droite)
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - L'AGS est très utile. Elle n'a jamais fait faillite et a toujours su assurer sa mission, malgré les crises. En 2024, elle a versé 2,13 milliards d'euros d'avances : c'est un record. Elle a donc relevé ses taux.
Elle a aussi conclu un accord avec les mandataires et administrateurs judiciaires lui permettant de récupérer, au premier trimestre 2025, 157,6 millions d'euros, soit 53,2 % de plus qu'au premier trimestre 2024. De même, 607 millions ont été récupérés en 2024 par les administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires, soit plus de 72 % par rapport à 2023.
L'AGS peut recourir à des lignes de prêt. Ce n'est jamais arrivé, mais c'est une piste.
Le Gouvernement reste vigilant. Nous suivrons ces évolutions de près.
Mme Anne-Marie Nédélec. - L'AGS doit se concentrer sur sa mission première : on ne peut pas tout lui demander !
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - Je partage vos remarques. Le Gouvernement y est très attentif.
M. Simon Uzenat . - Au-delà des défaillances, c'est bien l'emploi qui est menacé au sein des PME et des ETI, où elles augmentent de 60 % par rapport à 2017-2019. Les trésoreries sont en baisse, les stocks en hausse. Le bâtiment connaît une crise structurelle ; le climat est anxiogène. L'attentisme prédomine. Ce sont aussi des conséquences très directes des coupes budgétaires imposées aux collectivités.
Le Sénat a créé une commission d'enquête sur la commande publique, sur l'initiative du groupe Les Indépendants. Au bas mot, 170 milliards d'euros par an seraient mobilisés par les pouvoirs publics ; mais, selon la Cour des comptes de l'Union européenne, la part de la commande publique dans le PIB de notre continent s'élèverait à 14 %, ce qui nous amènerait à 300, voire 400 milliards d'euros.
Pour la Fonderie de Bretagne comme ailleurs, les collectivités sont au rendez-vous pour soutenir les entreprises. Elles ont besoin de soutien, de visibilité et de moyens. Quelles réponses leur apportez-vous ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - Oui, la commande publique - 170 milliards d'euros - joue un rôle important de soutien au monde économique, en particulier à nos TPE et PME. Il faut simplifier l'accès de celles-ci aux marchés publics : le projet de loi Simplification de la vie économique le prévoit.
Les collectivités ont besoin de visibilité pour s'engager. Tous les préfets indiquent que les montants demandés au titre de la DETR et de la DSIL sont importants, ce qui est encourageant. Il faut toutefois accorder une attention particulière aux départements, confrontés à de sérieuses difficultés du fait de la hausse des dépenses sociales et de la baisse du produit des DMTO ; ma collègue Catherine Vautrin a reçu leurs représentants il y a quelques jours.
M. Simon Uzenat. - Nous pouvons être d'accord sur la simplification. Mais les collectivités ont besoin de moyens financiers pour investir ! De nombreuses demandes sont déposées, en effet, mais toutes ne pourront être satisfaites. Et, faute de soutien, les collectivités renonceront à leurs projets.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - Les montants de dotation pour 2025 sont équivalents à ceux de 2024.
M. Simon Uzenat. - L'inflation a baissé, mais elle est toujours là : la stabilité est donc en trompe-l'oeil. Au reste, dans le Morbihan, les crédits sont en baisse de 2 millions d'euros. Au total, pour cette année, c'est un effort de 7 milliards d'euros que vous demandez aux collectivités - et des coupes supplémentaires s'annoncent. L'abandon des projets d'investissement locaux aura des effets récessifs dans tous les territoires. Le Gouvernement doit revenir à la sagesse. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)
Mme Lauriane Josende . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Dans les Pyrénées-Orientales, département frontalier, les cessations d'activité sont en hausse de 13 % cette année, 4 points au-dessus de la moyenne nationale. Le secteur du BTP est particulièrement touché.
Parallèlement, les créations d'entreprises augmentent de 9,6 %, preuve du volontarisme et de la résilience de mon territoire. Mais n'oublions pas que chaque défaillance est un drame humain et une perte de savoir-faire. Je vois trop d'entreprises qui se battent chaque jour pour survivre ; hélas, certaines finissent par baisser les bras. Il faut dire que, de l'autre côté de la frontière, les normes, les charges et la considération envers les créateurs de richesses ne sont pas équivalentes.
Quels leviers le Gouvernement compte-t-il actionner pour aider les secteurs les plus en difficulté, comme le BTP ? Dans les tests PME, prendrez-vous en compte la situation des zones frontalières ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - L'artisanat, notamment dans le secteur du BTP, est confronté à de nombreuses difficultés, dont les causes sont multiples : inflation des matières premières, difficultés de recrutement et, dans les zones frontalières, concurrence avec des entreprises soumises à moins de normes ou à des taxes plus faibles.
Nous devons améliorer la compétitivité de nos entreprises en poursuivant la baisse des prélèvements engagée. De ce point de vue, nous devrons réfléchir à ne plus faire peser sur le travail le financement de certains pans de la protection sociale.
Mme Lauriane Josende. - La piste que vous évoquez doit être approfondie. Peut-être pourrons-nous y travailler au sein de notre délégation ? (M. Olivier Rietmann renchérit.)
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - En ce qui concerne les tests PME, notre intention est de constituer un panel d'entreprises, volontaires, de toutes les tailles, tous les secteurs et tous les territoires, y compris frontaliers.
Mme Lauriane Josende. - Les Pyrénées-Orientales sont un territoire volontariste : je suis sûre que nos entreprises seront volontaires pour participer à ces réflexions, au bénéfice de tous.
M. Damien Michallet . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Je me félicite de l'organisation de ce débat, qui rappelle que les entreprises ont toute leur place dans nos travaux.
Avec Frédérique Puissat, je ne puis pas ne pas penser aux entreprises iséroises disparues, dont Photowatt et Valeo.
Nous sommes tous d'accord sur l'objectif : nous devons nous mobiliser pour conserver nos entreprises. Les représentants de l'État minimisent le sujet au nom d'une approche dynamique, mais c'est oublier que les défaillances d'entreprises entraînent la disparition de compétences et de savoir-faire précieux ; elles peuvent aussi remettre en cause des chaînes de valeur et aggraver nos dépendances.
En particulier, il faut mieux préparer les transmissions. Le pacte Dutreil est un dispositif trop ignoré. Alors que la transmission est en enjeu essentiel, comptez-vous lancer une campagne d'information ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - Vous avez raison : il faut être très vigilant quand on considère le bilan des disparitions et créations. Sur les 1,1 million d'entreprises créées l'année dernière, 700 000 sont des micro-entreprises. Il y a aussi beaucoup d'entreprises qui ferment en sus des défaillances - 165 000 en 2024.
Le pacte Dutreil est un excellent dispositif. Une proposition de loi a été déposée à l'Assemblée nationale le 4 février pour un pacte Dutreil de long terme, avec des seuils d'exonération relevés. L'enjeu est essentiel, alors que 700 000 entreprises devront être transmises dans les dix prochaines années. Pour l'heure, une entreprise sur deux n'est pas reprise. Je lancerai prochainement les assises de la transmission-reprise : elles réuniront tous les acteurs et les parlementaires pour faire émerger des propositions.
Mme Else Joseph . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le suivi des défaillances est complexe, compte tenu de la multiplicité des critères à prendre en compte : secteurs - six seulement concentrent 80 % des bénéficiaires de la garantie du salaire -, zones géographiques - l'Île-de-France concentre 28 % des montants versés par l'AGS - et enjeu stratégique.
Comment votre ministère pilote-t-il le suivi des défaillances ? Sur quels critères vous fondez-vous pour lancer des alertes et repérer les situations les plus inquiétantes, par exemple du point de vue de la souveraineté ?
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - Nous avons des indicateurs clés par secteur, région ou nature d'entreprise. Nous pouvons ainsi conduire des politiques adaptées et prévenir au mieux les défaillances.
Le projet Signaux faibles, géré par une start-up de l'État sous la tutelle de la direction interministérielle du numérique (Dinum), a été pérennisé. Les comités départementaux peuvent ainsi détecter les futures défaillances, ce qui permet un accompagnement amélioré, notamment en direction des procédures amiables.
Mme Else Joseph. - Dans les Ardennes, le nombre de bénéficiaires de l'AGS augmente, du fait notamment des difficultés dans la fonderie et la métallurgie. Ce qui remonte du terrain, c'est la multiplicité des intervenants, trop dispersés. Il faut agir le plus en amont possible : le tribunal de commerce peut conseiller, mais le mot tribunal fait peur. Il faudrait un guichet unique pour plus de simplicité et une meilleure information.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - En effet, nous avons un problème de lisibilité. Le médiateur du crédit m'a remis un rapport qui va dans le même sens. Trop souvent, les chefs d'entreprise ne savent pas à quelle porte frapper. Il faut un point d'entrée unique, qui pourrait être le conseiller départemental, lequel orienterait ensuite les entreprises.
Mme Else Joseph. - Merci pour cette réponse, qui rassurera sur mon territoire.
Mme Sylvie Valente Le Hir . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Panhard, Citroën, Peugeot, Renault : autant de noms qui évoquent l'histoire de notre industrie automobile. Ce secteur a façonné de nombreux territoires, comme à Sochaux avec Peugeot ou Clermont-Ferrand avec Michelin.
Or l'impensable se produit : notre filière et ses sous-traitants sont tout bonnement menacés de disparition. Quelque 149 000 entreprises et 990 000 emplois directs et indirects sont en jeu. Dans l'Oise, à Méru, le PSE de Forvia a entraîné la suppression de 102 postes en R&D, un cataclysme pour le territoire où, en 2020, le ministre Bruno Le Maire était pourtant venu parler verdissement et relance de l'économie.
Alors que les annonces douanières de Trump obscurcissent encore le tableau, comment peut-on laisser faire ? Alors que le libre-échange devient de plus en plus théorique, l'Europe reste les bras croisés, imposant même au secteur, contre toute réalité, une fin des ventes de véhicules thermiques en 2035.
M. le président. - Veuillez conclure.
Mme Sylvie Valente Le Hir. - Sans modification des règles, nous nous condamnons à revivre le scénario de Méru ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. - Les ventes de voitures baissent depuis le début des années 2000, et la tendance s'est accélérée ces dernières années. Le nombre d'immatriculations a ainsi chuté de 25 % depuis 2019.
Nous avons choisi de sortir du véhicule thermique en 2035 et sommes au milieu du gué. Les industriels ont consenti des investissements importants, les bornes de recharge sont en cours de déploiement et les utilisateurs de plus en plus nombreux. Nul doute que cette technologie s'imposera dans les années qui viennent.
Mais l'industrie automobile est fortement percutée. Voyez Forvia, qui a annoncé la suppression de 10 000 emplois en Europe. Nous devons être attentifs à l'accompagnement des salariés dont l'emploi est supprimé et continuer à soutenir la transformation de la filière. Dans le cadre de France 2030, par exemple, 54 milliards d'euros sont mobilisés à cette fin.
M. Christian Klinger, au nom de la délégation aux entreprises . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La richesse de ce débat démontre l'utilité de notre délégation, qui traite des questions relatives aux entreprises de manière transversale. De fait, les défaillances ont des causes multiples - normes excessives, concurrence européenne et mondiale, retards de paiement, notamment -, et seule une approche globale peut permettre d'y répondre.
La question du foncier économique se pose aussi : nous avons des progrès importants à réaliser en la matière, comme je l'ai montré dans le rapport que j'ai coécrit avec Michel Masset.
Plus largement, les décisions politiques sont prises dans des délais trop longs, comme les représentants du patronat nous l'ont rappelé cet après-midi. L'action publique doit gagner en agilité.
Dans un contexte de guerre commerciale, les défaillances risquent de continuer à augmenter. Tout ce que nous avons dit n'aura de sens que si nous prenons conscience des effets de nos décisions, notamment de nos arbitrages budgétaires. Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2026, nous devrons impérativement prendre des mesures structurelles pour réduire la dépense publique, plutôt que de toujours faire contribuer davantage les entreprises.
Dans une tribune récente, Nicolas Dufourcq, directeur général de BPI France, estime qu'il est dur d'être européen en ce moment : nous subissons les attaques des États-Unis et de l'Asie et, trop faibles, nous sommes piétinés des deux côtés.
Ayons le courage d'approfondir ces réflexions et abordons le prochain débat budgétaire avec pragmatisme et clairvoyance.
Les défaillances d'entreprises sont autant de drames que nous ne voulons plus vivre dans nos territoires. Ce débat constitue une première étape, dont nous nous réjouissons. Nous continuerons de rappeler les réalités économiques et la nécessité d'une mobilisation urgente sur tous les fronts pour inverser enfin la tendance. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
La séance est suspendue à 20 h 10.
Présidence de M. Alain Marc, vice-président
La séance reprend à 21 h 40.