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Discours du Président de l'Assemblée nationale, M. Jean-Louis Debré

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Photo : Jean-Louis Debré
Madame,

Alors que nous célébrons le centenaire de la Déclaration sur l'Entente Cordiale que le Roi Edouard VII et le Président du Conseil Delcassé signèrent le 8 avril 1904, je tiens à vous dire à mon tour et au nom de l'ensemble des Députés français, l'honneur que nous ressentons à vous accueillir. En effectuant à cette occasion votre quatrième visite d'État dans notre pays, vous nous donnez un nouveau témoignage de l'attachement que vous portez à la France et de l'amitié qui unit depuis si longtemps la France et le Royaume-Uni. 

Cette puissante amitié, elle est le fruit d'une longue histoire traversée de rivalités, de guerres et d'alliances, qui, au fil des siècles, tissèrent entre nos peuples si proches et pourtant si distincts, des liens complexes et très étroits. Oserais-je aller jusqu'à dire que la compétition à laquelle se sont longtemps livrées nos deux Nations, incarnant deux cultures et deux tempéraments bien différents, a quelque peu nourri leur génie respectif et contribué à leur rayonnement ? En tout état de cause, cette ancienne et singulière histoire, où certaines victoires de l'un sonnèrent la défaite de l'autre, nous a appris à nous connaître et à nous estimer, comme peuvent se connaître et s'estimer deux Nations dotées d'une forte identité. 



Ainsi que le notait Sir Winston Churchill, que liait au Chef de la France libre une amitié parfois rugueuse mais faite d'admiration réciproque, "Le Tout Puissant, dans sa sagesse infinie, n'a pas cru bon de créer les Français à l'image des Anglais". Ils n'en partagent pas moins le même et profond attachement aux valeurs essentielles que sont la liberté et la dignité de la personne humaine. Lorsque les épreuves de l'Histoire mirent ces valeurs en péril, Britanniques et Français surent transcender leurs différences pour se retrouver ensemble dans un combat commun.



Forgée sur les champs de bataille de la Grande Guerre, qui vit tant de soldats du Royaume payer de leur sang, aux côtés de leurs frères français et alliés, le prix de notre liberté, cette fraternité d'armes s'illustra une nouvelle fois dans le second conflit mondial. Nous avons tous dans nos mémoires l'admirable ténacité dont sut alors faire preuve le peuple britannique sous la conduite glorieuse de Sir Winston Churchill et sous l'égide de son Souverain, votre père le Roi George VI. Nous savons tous combien la résistance, l'exemple et l'appui de l'Angleterre, les encouragements du Roi et de la famille royale aidèrent le Général de Gaulle à porter haut le drapeau de la France Libre et de la Résistance française. 

En ces circonstances terribles, la France et la Grande-Bretagne démontrèrent ce qu'elles peuvent accomplir lorsqu'elles rassemblent leurs énergies. Dans quelques semaines, le 60ème anniversaire du Débarquement nous donnera l'occasion de célébrer ensemble, avec nos alliés, cette fraternité renouvelée sur les plages de Normandie.


Soixante ans après ces hauts faits, cette Europe, que nous avons su défendre et libérer par les armes, connaît, après l'heure de la réconciliation, une autre aventure désormais pacifique, l'aventure de sa construction, une construction dont la Grande-Bretagne et la France souhaitent qu'elle s'opère dans le respect des Etats-Nations, dans le dépassement des égoïsmes, non dans le reniement des spécificités nationales.

Nul doute que l'amitié franco-britannique soit dès lors appelée à être l'un des pivots de cette Europe réconciliée, pacifiée et unifiée. Depuis l'entrée du Royaume-Uni dans le marché commun, il y a maintenant trois décennies, remarquable est le chemin parcouru dans le rapprochement de nos deux peuples et de nos deux pays et dans le développement de notre coopération, à l'image de nos actions communes en Afrique ou dans le domaine de la défense. Après bien d'autres projets réalisés ensemble, peut-on trouver meilleur symbole de notre capacité à coopérer que le Tunnel sous la Manche, par lequel Votre Majesté arrivait hier dans la capitale française ?



Il y a quelques années je crois, Votre Majesté observait avec humour que "S'il est vrai que nous ne conduisons pas du même côté de la route, il est tout aussi vrai que nous avançons dans la même direction".

Convaincus que ce qui les unit est plus important que ce qui les sépare, c'est vers l'avenir que la France et le Royaume-Uni veulent regarder ensemble.

Tel est bien le vœu que les Députés français souhaitent exprimer en ce jour anniversaire, de concert avec leurs confrères de la Chambre des Communes qui ont bien voulu faire le déplacement de Paris en cette heureuse occasion et dont je salue la présence à cette réception.


Vive le Royaume-Uni !
Vive la France !
Vive l'amitié franco-britannique !



Ma'am,

In this centenary year of the declaration of the Entente Cordiale signed by King Edward VII and the then Président du Conseil, Théophile Delcassé, on the 8th of April 1904, may I too say, on behalf of the French members of parliament, what an honour it is for us to welcome you. This, your fourth State visit to our country, bears witness once again to your attachment to France and to the friendship that has united France and the United Kingdom for so long. 




This great friendship is the fruit of a long history of rivalries, wars and alliances which, over the centuries, has woven complex and very close ties between our peoples who are so close and yet so different. May I venture to say that the rivalry between our two nations, these two embodiments of two very distinctive cultures and temperaments, has helped nourish their respective geniuses and contributed to their influence? In all events, this long and singular history, during which victory for one of our nations sometimes meant defeat for the other, has taught us to get to know and appreciate one another, as two nations with strong identities can know and appreciate one another. 

Sir Winston Churchill, which whom General de Gaulle shared a friendship that may not always have plain sailing but that was founded on mutual admiration, contended that "The Almighty, in his infinite wisdom, did not see fit to create the French in the image of the English." They nonetheless shared the same deep-rooted attachment to two essential values: freedom and human dignity. When the ordeals of history jeopardised these values, the British and French always set the differences aside to stand united against these threats.

This same fraternity of arms, forged on the battlefields of the Great War which saw so many British, French and allied forces pay the price of our freedom with their blood, was again in evidence in World War II. We all remember the admirable tenacity of the British people under the glorious leadership of Sir Winston Churchill and under the aegis of his sovereign, your father King George VI. We all know how much the resistance, the example and the support of England, as well as the encouragement of the King and Royal Family helped Général de Gaulle keep proudly flying the flag of la France libre and the French resistance movement. 

In these terrible circumstances, France and Great Britain demonstrated what they can achieve when they stand united. In a few weeks' time, the 60th anniversary of the Normandy landings will be an opportunity for us to celebrate, along with our allies, this fraternity that was renewed on the beaches of Normandy.

Sixty years after those great feats, the Europe that we succeeded in defending and liberating with weapons, has, after its reconciliation, embarked on a peaceful adventure, that of its construction. Great Britain and France both hope that this construction will take place with all due respect to Nation-States, while transcending self-interest but without renouncing national specificities.

There can be no doubt that the Franco-British friendship will be called upon to serve as one of the pivots of this reconciled, pacified and united Europe. Since the United Kingdom joined the Common Market some three decades ago, remarkable progress has been made in bringing our peoples and countries closer together in areas of development and cooperation, as borne out by our joint intervention in Africa or in the field of defence. After so many other projects carried out together, can there be any better symbol of our ability to cooperate with one another than the Channel Tunnel, via which Your Majesty arrived in France yesterday?

A few years ago, I believe, Your Majesty humorously remarked that "Though it is true that we do not drive on the same side of the road, it is equally true that we are advancing in the same direction."

Based on the conviction that what unites them is more important than what separates them, France and the United Kingdom wish to look to the future together.

That is the wish that the French members of parliament would like to express on this anniversary date, together with their counterparts from the House of Commons who have kindly travelled to Paris on this joyous occasion and whom I have the great pleasure of greeting at this reception.

Vive le Royaume-Uni !
Vive la France !
And long live the friendship between France and Britain!