De gauche à droite : M. Rémy POINTEREAU (LR – Cher), M. Olivier CADIC (UC – Français établis hors de France), S.E M. Jorge Luis JURE, Ambassadeur de la République orientale d’Uruguay en France, M. Bruno BELIN (LR – Vienne)

et Mme Isabelle BRIQUET (SER – Haute-Vienne)

Mardi 8 février 2022, le groupe interparlementaire d’amitié France-Pays du Cône Sud, s’est entretenu, sous la présidence de M. Bruno BELIN (Les Républicains – Vienne), président délégué pour l’Uruguay, avec son Exc. M. Jorge Luis JURE, ambassadeur de la République orientale d’Uruguay en France. Étaient également présents les membres du groupe d’amitié Isabelle BRIQUET (Socialiste et Républicain – Haute‑Vienne), Olivier CADIC (Union centriste – Français établis hors de France), Rémy POINTEREAU (Les Républicains – Cher) et Nadège HAVET (Rassemblement démocratique, progressiste et indépendant – Finistère) en visioconférence.

Après un propos liminaire du président délégué sur l’historique des relations franco-uruguayennes, l’Ambassadeur a rappelé que la France a été l’un des premiers pays à reconnaître l’indépendance de l’Uruguay en 1830. Les relations économiques sont également très anciennes, puisque la Chambre de commerce française à Montevideo est la plus ancienne chambre de commerce française à l’étranger. De nombreux liens culturels unissent les pays depuis longtemps : au XIXe siècle, le français était la langue la plus usitée à Montevideo. La première université du pays, fondée en 1840, s’est inspirée des programmes d’enseignement en droit et en médecine de l’Université de Paris. Le lycée français de Montevideo est également très ancien, il compte aujourd’hui 1700 élèves. Ainsi, en 2011, l’Uruguay a été le premier État sud-américain à intégrer l’Organisation internationale de la Francophonie en tant que membre observateur.

Son Exc. M. Jorge Luis JURE est également revenu sur les liens politiques bilatéraux en mentionnant la visite du Président de la République de GAULLE en Uruguay en 1964, sous les acclamations d’une grande partie de la population montevidéenne. Cette visite a posé les bases de la coopération scientifique, technique et éducative entre la France et l’Uruguay. Ainsi, en 2004, un accord a été signé entre les Présidents CHIRAC et BATTLE pour la création d’une antenne de l’Institut Pasteur en Amérique du Sud, qui a été fer de lance dans la lutte contre la COVID-19 en Uruguay. Concernant la gestion de la pandémie, l’Uruguay a alterné entre des périodes de faible contagion et des poussées de contamination à l’été 2021. Il a récemment été placé en liste orange par les services diplomatiques français. Un schéma vaccinal complet est obligatoire pour voyager dans le pays.

Au sujet de la place de l’Uruguay dans l’économie régionale, l’ambassadeur a rappelé que l’intégration au MERCOSUR en 1991 représentait une opportunité importante pour l’Uruguay : le pays de 3,5 millions d’habitants a ainsi intégré un marché de 200 millions de personnes. L’Uruguay entretient des relations commerciales avec l’Europe, exportant principalement de la viande, des céréales, des produits chimiques et semi-industriels. On retrouve également le secteur tertiaire à l’export, avec notamment des services de logiciels, des produits d’exportation bancaire et de conseil. Néanmoins, l’Union européenne se place derrière la Chine, le Brésil et les États-Unis en tant que partenaire commercial de l’Uruguay.

M. Olivier CADIC a interrogé l’ambassadeur sur le regard porté par l’Uruguay sur la réticence française face à l’accord commercial entre l’Union européenne et le MERCOSUR. Le texte de l’accord signé en 2020 après une vingtaine d’années de négociations, pourrait renforcer les liens économiques entre les deux zones. L’ambassadeur a estimé qu’un échec de cet accord serait regrettable. Il a affirmé que les pays du MERCOSUR pourraient accepter de rehausser leurs niveaux de normes environnementales, si la réciproque s’applique aussi du côté de l’Union européenne. L’Uruguay étant partisan de l’ouverture économique. L’ambassadeur a dénoncé l’utilisation de la cause environnementale à des fins de protectionnisme. Pour lui, il n’existe pas de contradiction entre l’instauration de hauts standards environnementaux et le développement du commerce. Il a souligné l’importance de l’environnement pour la population uruguayenne, notant d’ailleurs que le pays a parfaitement atteint les seuils de réduction d’émissions qui lui ont été imposés par l’accord de Paris.

S’agissant des questions sociétales, Mme Isabelle BRIQUET a mentionné les manifestations le 28 janvier dernier contre la « culture du viol » après qu’une femme a été victime d’un viol en réunion à Montevideo. L’ambassadeur a indiqué que, face au problème universel des violences sexistes et sexuelles, l’Uruguay a pris des initiatives en instaurant la loi n° 19580 sur les violences envers les femmes en 2017. Cette loi cherche à lutter contre tous types de violence discriminatoire ciblant les femmes, en invoquant la notion de féminicide. Cette loi met également l’accent sur les politiques d’éducation contre la violence motivée par le genre. Il a rappelé l’engagement de l’actuelle Vice-Présidente de la République et Présidente de l’Assemblée générale Mme Beatriz ARGIMON en faveur de cette cause. En outre, il a expliqué la position pionnière qu’occupe l’Uruguay dans la conquête pour les droits des femmes depuis le début du XXe siècle. Le pays a ainsi reconnu le droit au divorce par la seule volonté de la femme en 1913, puis adopté le droit de vote aux femmes en 1919. Enfin, en 1946, une loi des droits civiques des femmes a également été adoptée.

M. Olivier CADIC qui s’est enquis de l’expérience uruguayenne de légalisation du cannabis, S.E. M. l’Ambassadeur a confirmé que la vente encadrée du cannabis en pharmacie et la culture personnelle avait entraîné un net recul du trafic. Mais les effets sur les addictions aux autres drogues demeuraient incertains. Certes, la répression la plus efficace contre le cannabis a permis d’intensifier la lutte contre les autres drogues, mais il n’est pas prouvé que la hausse de la consommation de ces dernières s’explique par une plus grande efficacité dans la lutte contre le trafic.

À la suite d’une question de M. Olivier CADIC sur la position uruguayenne vis-à-vis de la situation politique au Venezuela, l’Ambassadeur a indiqué que l’Uruguay considère que le régime vénézuélien ne remplit pas toutes les conditions nécessaires à la démocratie, comme l’a indiqué le Président LACALLE POU au dernier sommet de la CELAC. Néanmoins, le pays justifie son refus de faire partie du groupe de Lima sur le fondement de la définition d’un État en droit international. En effet, le gouvernement MADURO disposant actuellement du contrôle sur les forces de l’État, sur l’appareil administratif et les frontières du pays, correspond à cette définition. De plus, selon l’ambassadeur, il n’y a pas de violence généralisée émanant du régime, et la légitimité du gouvernement promu par le groupe de Lima est questionnable, notamment du fait de son échec à se maintenir au pouvoir.

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