NOTE

sur

Les collectivités territoriales
et les investissements sportifs

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Allemagne - Espagne - États-Unis d'Amérique
Italie - Royaume-Uni (Angleterre)

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Cette note a été réalisée
à la demande de

M. Michel SAVIN, sénateur de l'Isère, président de la Mission commune d'information sur le sport professionnel et les collectivités territoriales

Cette note a été publiée dans le rapport d'information
de MM. Michel SAVIN, président, et Stéphane MAZARS, rapporteur :
« Sport professionnel et collectivités territoriales : l'heure des transferts ? »
n° 484 (2013-2014), fait au nom de la Mission commune d'information
sur le sport professionnel et les collectivités territoriales

Ce rapport est disponible sur internet à l'adresse suivante :

www.senat.fr/notice-rapport/2013/r13-484-1-notice.html

AVERTISSEMENT

Les notes de Législation comparée se fondent sur une étude de la version en langue originale des documents de référence cités dans l'annexe.

Elles présentent de façon synthétique l'état du droit dans les pays européens dont la population est de taille comparable à celle de l'Hexagone ainsi que dans ceux où existe un dispositif législatif spécifique. Elles n'ont donc pas de portée statistique.

Ce document constitue un instrument de travail élaboré à la demande des sénateurs par la division de Législation comparée de la direction de l'Initiative parlementaire et des délégations. Il a un caractère informatif et ne contient aucune prise de position susceptible d'engager le Sénat.

NOTE DE SYNTHÈSE

Cette note est consacrée au rôle des collectivités territoriales en matière d'installations sportives, tant en ce qui concerne le financement que pour ce qui est de la mise en oeuvre des normes applicables à ces installations. On y entend sous l'appellation :

- d'« installation sportive », « un lieu caractérisé par une adresse, où sont implantés un ou plusieurs équipements sportifs, avec ou sans enceinte limitative. Dans le cas d'un équipement unique, les noms usuels de l'installation et de l'équipement peuvent être identiques et/ou correspondre à une nomenclature d'équipement sportif (ex. : salle multisports) » ;

- et d' « équipement sportif », « une surface permettant, à elle seule, la pratique d'une ou plusieurs activités physiques et/ou sportives [qui] comporte un minimum de matériels spécifiques permettant le respect des principes et des règles liés à la pratique de ces dernières (ex. : un tracé lisible sur le sol et des cages pour un terrain de handball,...) » 1 ( * ) .

Cette note étudie la situation qui prévaut en la matière en Allemagne, en Espagne, aux États-Unis, au Royaume-Uni (Angleterre) et en Italie.

Pour chacun de ces États, elle analyse successivement :

- le financement des installations sportives ;

- et les normes applicables à ces installations.

Évoquant tout d'abord les grands traits de la situation en France, elle présente ensuite les conclusions que permet de tirer l'analyse des exemples étudiés et les monographies relatives aux pays précités.

A. ÉTAT DU DROIT EN FRANCE

1. Les collectivités territoriales et le financement des infrastructures

L'article L. 100-2 du code du sport dispose que « l'État, les collectivités territoriales et leurs groupements, les associations, les fédérations sportives, les entreprises et leurs institutions sociales contribuent à la promotion et au développement des activités physiques et sportives. L'État et les associations et fédérations sportives assurent le développement du sport de haut niveau, avec le concours des collectivités territoriales, de leurs groupements et des entreprises intéressées » .

L'intervention des collectivités territoriales peut prendre la forme de subventions publiques pour les associations ou sociétés sportives exerçant des missions d'intérêt général (article L. 113-2 du même code) tout comme la mise à disposition d'installations sportives dont elles détiennent la propriété. Ces collectivités financeraient ainsi près de 70 % des dépenses publiques liées au sport.

Selon la Cour des comptes 2 ( * ) , les collectivités territoriales sont propriétaires d'environ 80 % des installations sportives et prennent en charge près de 70 % des dépenses publiques qui y sont liées, le montant des subventions directes accordées par ces collectivités aux clubs professionnels en 2006 étant évalué à 160 millions d'euros.

Appartiennent à une collectivité dix-neuf des vingt stades de Ligue 1 (football), douze des quatorze stades du Top 14 (rugby) et la totalité des dix-huit salles utilisées en Pro A (basket-ball) 3 ( * ) .

Enfin, l'intervention de l'Etat en matière de financement des infrastructures sportives représente environ 4,3 milliards d'euros par an, dont 3,5 milliards sont destinés au sport scolaire et universitaire, selon la Cour des comptes.

2. L'édiction des normes

Aux termes de l'article 17 de la loi n°84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, chaque fédération ayant reçu délégation du ministre chargé des Sports détermine « dans le respect des règlements internationaux, les règles techniques propres à sa discipline ».

L'article R. 131-32 du code du sport définit, quant à lui, ces règles techniques comme les règles de jeu applicables à la discipline concernée, les règles d'établissement d'un classement des sportifs, celles relatives aux compétitions ainsi que celles permettant de concourir à ces dernières.

Quant aux fédérations, en vertu des articles R. 131-33 et R. 131-34 du même code, elles :

- élaborent les règles applicables aux équipements requis pour le bon déroulement des compétitions sportives qu'elles organisent ou autorisent ;

- contrôlent et valident la conformité de ces équipements ou installations à leur règlement ;

- mais ne peuvent toutefois pas émettre de règles répondant à un impératif commercial.

Ces règles doivent :

- être nécessaires à l'exécution de la délégation reçue ou à l'application des règles édictées par la fédération internationale ;

- être proportionnées aux exigences de l'autorité sportive ;

- prévoir des délais raisonnables de mise en conformité en cas de travaux.

L'article R. 142-7 du même code institue une commission spécialisée chargée d'étudier tout projet de modification d'un règlement fédéral relatif aux équipements sportifs. Composée de 18 membres représentant l'État, les collectivités territoriales et le monde du sport, elle émet un avis sur tout projet et peut, préalablement à la publication de ses conclusions, saisir la commission consultative d'examen des normes (article R. 142-10).

Enfin, « outre les règlements fédéraux, qui ont valeur juridique contraignante, des normes peuvent être édictées, d'application volontaire, sauf si elles sont intégrées dans un texte juridique. L'AFNOR, en lien avec les acteurs du monde sportif, est chargée d'opérer cette normalisation. L'intervention normative se fait dans trois grands domaines : les équipements sportifs, les matériels de sports et les services dans le domaine du sport. » 4 ( * )

B. OBSERVATIONS TIRÉES DES LÉGISLATIONS ÉTUDIÉES

La comparaison des exemples étudiés montre :

- une absence de normes législatives spécifiques ;

- une forte implication des collectivités territoriales en matière d'installations sportives ;

- et l'existence de normes techniques placées sous le signe de la complexité.

Une absence de dispositions législatives spécifiques

La recherche n'a pas mis en évidence de régime législatif spécifique concernant l'intervention des collectivités publiques, en général, et celle des collectivités territoriales, en particulier, en matière d'investissements dans des installations sportives, que celles-ci soient utilisées par des clubs amateurs ou par les clubs professionnels.

De même, le législateur n'intervient-il ni dans la fixation des règles sportives ni dans la détermination des normes applicables aux installations, les unes procédant largement d'un droit « transnational » déterminé au niveau supra-étatique par les fédérations, et les autres d'organismes techniques de normalisation aux travaux desquels les pouvoirs publics peuvent, au mieux, renvoyer.

Une forte implication du secteur privé et des collectivités territoriales

Différents modèles de financement des installations sportives coexistent, qui se caractérisent aussi bien par la fréquence et l'importance du recours aux opérateurs privés que par la forte implication des collectivités territoriales. On n'insistera pas sur la part - déterminante - des financements privés pour les clubs sportifs professionnels. En revanche, on constate l'importante implication des acteurs locaux dans tous les États considérés. On n'en prendra pour exemple que :

- l'Espagne, où certaines opérations (garanties publiques, échanges de terrains à prix avantageux, octroi de privilèges fiscaux) ont même suscité le déclenchement d'une enquête approfondie de la Commission européenne en décembre 2013, certains membres du Parlement espagnol souhaitant, au surplus, qu'une étude soit réalisée sur les subventions et les aides publiques directes et indirectes aux clubs de football professionnels ;

- la Grande Bretagne, où l'intervention locale (1,2 milliard d'euros par an consacrés aux infrastructures sportives) se double cependant d'importantes aides collectées au niveau national (notamment par des prélèvements sur les jeux) et réparties par des organismes ad hoc ;

- l'Italie, où la gestion des infrastructures dans le cadre de partenariats public-privé - y compris à l'initiative d'opérateurs privés - pourrait permettre de résoudre certaines des difficultés que connaît un parc public d'installations sportives obsolescentes ;

- et les États-Unis, où l'on observe une progression des financements publics, souvent dans le cadre de partenariats public-privé, nonobstant les critiques qu'ils suscitent.

La contribution des collectivités territoriales au financement n'exclut, du reste, pas d'autres formes d'aides publiques telle que celle, indirecte, de l'Etat, observée en Espagne, où les clubs de football professionnels ont accumulé une dette importante vis-à-vis du fisc, laquelle est en voie d'apurement depuis la signature d'un protocole en 2012.

Des normes techniques sous l'égide de la complexité

Soit qu'elles résultent de décisions internationales, soit qu'elles varient entre les différents niveaux de compétition (internationaux, nationaux, locaux...), soit encore qu'elles soient motivées par des raisons diverses (sécurité des installations, prévention des risques...) ou par les caractéristiques des divers sports en question, les normes applicables en matière sportive sont placées sous l'égide de la complexité. On en prendra pour exemple les règles applicables en matière de jeu et les règles techniques, d'une part, et celles concernant les caractéristiques des installations sportives et la normalisation, d'autre part.

Règles du jeu et règles techniques

La complexité est particulièrement sensible en ce qui concerne les normes relatives aux règles du jeu et aux règles techniques qui :

- résultent des règlements supranationaux dont le respect conditionne l'accueil de compétitions internationales, lesquels règlements sont repris par les fédérations nationales (ils peuvent, du reste, faire l'objet, comme aux États-Unis, d'amendements en fonction du niveau où se déroule la compétition) ;

- peuvent nécessiter des mesures transitoires d'adaptation dans le temps des installations, à l'instar de celles adoptées par la fédération anglaise de basketball dans le cadre d'un plan en plusieurs étapes visant à modifier le marquage au sol des terrains de jeu ;

- sont fixées, en Italie, de façon générale par un règlement ad hoc en ce qui concerne les installations sportives, établi par le comité national olympique italien, personne morale de droit public placée sous la tutelle de l'Etat, auxquelles s'ajoutent les règles techniques déterminées par les fédérations pour chaque discipline, exprimées en prenant pour base les normes de référence fixées par les organismes de normalisation.

Caractéristiques des installations et normalisation

Les normes techniques applicables sont, de l'aveu même de l'autorité espagnole chargée des sports au plan national, particulièrement complexes. Des efforts sont cependant mis en oeuvre afin de promouvoir le respect de standards techniques relevant des organismes de normalisation qui :

- existent en Allemagne et en Grande-Bretagne, où les normes n'ont de force contraignante qu'en vertu d'un texte ou de l'usage ;

- se diffusent en Espagne, où les pouvoirs publics ont relancé le processus de normalisation pour combler des vides normatifs dans des secteurs importants (installations, terrains, surfaces, équipements pour les spectateurs...) afin d'édicter des normes dotées d'une force contraignante en vertu d'un texte.

La publication de « guides pratiques » par les pouvoirs publics pour la réalisation des installations sportives est emblématique de l'intrication des normes applicables - surtout si les installations sont destinées à plusieurs sports et divers niveaux de compétition. L'existence de tels guides, qui tendent à remédier à cette complexité a été relevée :

- en Espagne, à l'initiative de la Fédération espagnole des communes et des provinces et du Conseil supérieur des Sports ;

- aux États-Unis (Illinois), où les informations nécessaires à la réalisation des terrains de sport sont détaillées ;

- et en Grande-Bretagne, où l'agence gouvernementale dédiée au Sport publie des guides pratiques relatifs aux installations sportives régulièrement mis à jour.


* 1 Définitions tirées de la brochure du ministère des Sports, de la Jeunesse, de l'Éducation populaire et de la Vie associative, Recensement des équipements sportifs, espaces et sites de pratiques , version du 20 janvier 2014.

* 2 Les collectivités territoriales et les clubs sportifs professionnels , rapport public thématique de la Cour des comptes, décembre 2009, p. 5, et Sport pour tous et sport de haut niveau : pour une réorientation de l'action de l'État , rapport public thématique de la Cour des comptes, janvier 2013, p. 5.

* 3 Rapport d'information de M M. Jean-Marc Todeschini et Dominique Bailly, sénateurs, Grands stades et arénas : pour un financement public les yeux ouverts , déposé le 17 octobre 2013, p. 16.

* 4 Normes et normalisation, site internet du ministère des Sports, de la Jeunesse, de l'Éducation populaire et de la Vie associative ( http://sports.gouv.fr/pratiques-sportives/Les-equipements-sportifs/La-reglementation-en-matiere-d-equipements-sportifs/article/Normes-afnor ).

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