TEXTE SOUMIS À LA DÉLIBÉRATION
DU CONSEIL DES MINISTRES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
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Ministère de l'Europe
et des affaires
étrangères
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Projet de loi
autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Finlande pour l'élimination de la double imposition en matière d'impôts sur le revenu et la prévention de l'évasion et de la fraude fiscales, et l'approbation de l'avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Suède en vue d'éviter les doubles
impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts
sur le revenu et sur la fortune
NOR : EAEJ2505026L/Bleue-1
ÉTUDE D'IMPACT
I. - Situation de référence
a) Relations bilatérales avec la Finlande
La France entretient traditionnellement avec la Finlande une relation de confiance. Elle a été, avec la Suède, le premier pays à reconnaître l'indépendance de la Finlande le 4 janvier 1918. Les contacts politiques se sont resserrés après l'entrée de la Finlande dans l'Union européenne, en 1995. Les visites de haut niveau sont fréquentes. Le Président de la République Emmanuel MACRON s'est rendu à Helsinki en visite officielle les 29 et 30 août 2018.
Notre coopération est particulièrement étroite et dynamique dans les domaines de la défense, de l'innovation et du développement de l'intelligence artificielle, ainsi que des transitions énergétiques et environnementale, dans le domaine du nucléaire civil notamment. Par ailleurs, la France et la Finlande ont de fortes convergences sur de nombreux sujets européens, liés à l'Europe de la défense, au changement climatique, à l'Etat de droit ou à la Politique agricole commune.
b) Relations bilatérales avec la Suède
La relation entre la France et la Suède est ancienne et s'est densifiée ces dernières années, notamment grâce à des interactions régulières et de très haut niveau. A l'invitation du Roi de Suède, le Président de la République s'est rendu les 30 et 31 janvier 2024 en Suède pour une visite d'Etat, qui a été l'occasion de renouveler et signer le Partenariat stratégique en matière d'innovation, pour des sociétés durables, numériques et résilientes.
Notre partenariat est particulièrement étroit dans les domaines de la lutte contre le changement climatique, l'innovation, les normes environnementales, l'égalité des genres et la défense du multilatéralisme. Depuis la visite d'Etat, plusieurs lettres d'intention et accords dans les domaines de la politique forestière, de la coopération nucléaire et de la sécurité intérieure ont ainsi été signées.
II. - Historique des négociations
a) Négociations avec la Finlande
La France et la Finlande sont liées par une convention fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune signée le 11 septembre 1970 à Helsinki1(*). Les deux Etats font par ailleurs partie des signataires initiaux de la convention multilatérale (CML) de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pour la mise en oeuvre des mesures relatives aux conventions fiscales pour prévenir l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices (BEPS2(*)), le 7 juin 2017, qui produit des effets à l'égard de la convention de 1970 à compter du 1er juin 2019 (date de son entrée en vigueur en Finlande - la CML est en vigueur en France depuis le 1er janvier 2019).
Dès 2019, et dans un contexte de liens économiques étroits, les deux Etats ont estimé nécessaire de moderniser la convention de 1970 afin d'en améliorer la lisibilité juridique.
Deux tours de négociation ont été organisés en juin 2019 et juin 2022 et ont donné lieu à la signature d'une nouvelle convention le 4 avril 2023.
b) Négociations avec la Suède
La France et la Suède sont liées par une convention fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune signée le 27 novembre 1990 à Stockholm3(*).
La France et la Suède font par ailleurs partie des signataires originaux de la CML BEPS, le 7 juin 2017, en vigueur depuis le 1er octobre 2018 en Suède et le 1er janvier 2019 en France. Les nouvelles normes qu'elle implique prennent la forme d'un nouveau préambule, d'une clause générale anti-abus et de stipulations sur la procédure amiable de règlement des différends. Celles-ci ne sont toutefois applicables que si les deux Etats ont opté pour que leur convention fiscale bilatérale soit couverte par l'instrument multilatéral. En raison de difficultés pour mettre en oeuvre la CML BEPS liées à son cadre juridique, la Suède a souhaité introduire les standards du projet BEPS par le biais de la négociation d'un avenant bilatéral, solution qui a été acceptée par la France pour ne pas retarder la prise d'effet de ces nouvelles stipulations.
Après plusieurs échanges écrits, les deux Etats se sont entendus sur un projet d'avenant, signé le 22 mai 2023.
III. - Objectifs de la convention et de l'avenant
a) Convention avec la Finlande
La négociation d'une nouvelle convention fiscale avec la Finlande visait à mettre le cadre fiscal bilatéral en conformité avec les derniers standards internationaux et la politique conventionnelle la plus récente des deux Etats.
La renégociation a ainsi été l'occasion de moderniser certains articles afin d'y intégrer les dernières avancées du projet BEPS en matière de lutte contre la fraude et l'évasion fiscale. La future convention contient ainsi divers dispositifs anti-abus relatifs aux établissements stables (article 5), en particulier la nouvelle définition de l'agent dépendant (article 5, §5). Elle contient en outre une clause anti-abus générale - Principal Purpose Test (article 27) ainsi qu'un préambule précisant expressément que l'objet de la convention fiscale est d'éliminer la double imposition, sans créer de possibilités de non-imposition ou d'imposition réduite par l'évasion ou la fraude fiscale. Pour prévenir les schémas d'évasion fiscale dans le secteur immobilier, le traitement des revenus provenant de sociétés dont l'actif est principalement composé de biens immobiliers est aligné sur celui des revenus provenant de biens immobiliers (article 6, §4 et article 13, §4).
La nouvelle convention introduit par ailleurs une imposition partagée sur les dividendes (article 10), de façon à mettre fin à toute opportunité d'optimisation dans le contexte franco-finlandais (CumCumEx). Le nouveau texte réserve ainsi l'application de l'exonération de retenue à la source aux dividendes versés à une société qui détient au moins 5 % des parts de la société qui les paie, pendant une période de 365 jours minimum. Concernant les autres distributions de bénéfices, elles feront désormais l'objet d'une retenue à la source au taux de 15 %.
A la demande de la Finlande, la règle de l'imposition partagée a été retenue pour les pensions de retraite privées (article 17), en lieu et place d'une imposition exclusive dans l'Etat de résidence. À l'instar de la convention conclue avec le Danemark, le mécanisme du « crédit d'impôt inversé », qui consiste en un effacement de la double imposition par l'Etat de source (contrairement à ce qui est habituellement pratiqué), permet toutefois de préserver les recettes fiscales de l'Etat de résidence (article 21, §3).
Les derniers standards internationaux en matière d'échange de renseignements (article 24), de procédure amiable (article 23) et d'assistance au recouvrement (article 25) ont par ailleurs été intégrés dans la nouvelle convention, ce qui aura pour effet de renforcer l'action de la France en matière de lutte contre la fraude.
Ainsi, sur le fondement de l'article 24, les autorités françaises pourront par exemple requérir des autorités finlandaises tout renseignement vraisemblablement pertinent pour appliquer les dispositions de droit interne portant sur les impôts de toute nature, y compris ceux qui ne sont pas visés par la convention, comme la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).
De la même manière, les autorités françaises pourront, sur le fondement de l'article 25, requérir des autorités finlandaises qu'elles procèdent au recouvrement des créances fiscales de l'Etat français, y compris des impôts qui ne sont pas visés par la convention, tels que la TVA.
Enfin, conformément à l'article 23, les contribuables subissant une imposition non conforme aux stipulations conventionnelles pourront soumettre leur cas aux autorités compétentes de France ou de Finlande, dans un délai de trois ans suivant la première notification de la mesure à l'origine de cette imposition.
b) Avenant à la convention avec la Suède
L'objectif de l'avenant est de mettre en conformité la convention fiscale de 1990 avec les nouveaux standards internationaux développés par l'OCDE dans le cadre du projet BEPS.
De même que dans la nouvelle convention franco-finlandaise, le préambule précise expressément que l'objet de la convention fiscale est d'éliminer la double imposition, sans créer de possibilités de non-imposition ou d'imposition réduite par l'évasion ou la fraude fiscale.
Pareillement, la clause anti-abus générale (article 28A) permettra de refuser l'application de la convention face à un montage ou une transaction lorsque, compte tenu de l'ensemble des éléments de faits propres à la situation, l'un de ses objets principaux est de bénéficier des avantages offerts par la convention.
Enfin, l'article 25 de la convention fiscale franco-suédoise est aménagé pour garantir que la demande d'ouverture de procédure amiable de règlement des différends puisse être formulée auprès de l'autorité compétente de l'un ou l'autre des Etats contractants.
IV. - Conséquences estimées de la mise en oeuvre de la convention et de l'avenant à la convention
Cette convention et cet avenant emportent des conséquences dans les domaines économique et financier, administratif et juridique.
A. Conséquences économiques et financières
a) Convention avec la Finlande
Tout en s'inscrivant dans le cadre de la priorité donnée par le Gouvernement français à la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales, la nouvelle convention permettra de développer les liens économiques entre la France et la Finlande en assurant un cadre favorable à la sécurité juridique des opérateurs économiques.
Elle offrira ainsi un cadre conventionnel bilatéral modernisé à l'élimination des doubles impositions, vis-à-vis des opérations transfrontalières des entreprises comme des différents revenus propres aux particuliers. Cette convention fiscale constitue par conséquent une avancée importante dans la relation de confiance qu'entretiennent nos deux pays et contribuera à renforcer les liens sur le plan économique et financier.
Les échanges de biens entre la France et la Finlande atteignaient environ 5 Mds € en 2023. En 2023, la France était le 12e fournisseur de la Finlande et son 9e client, tandis que la Finlande était le 40e fournisseur et le 40e client de la France. Le déficit commercial de la France vis-à-vis de la Finlande était de l'ordre de 1,0 Md€, les importations françaises représentant 2,9 Mds € et les exportations 1,9 Mds €. Les importations françaises sont concentrées dans trois secteurs : le secteur du bois, papier et carton ; les équipements mécaniques et matériel électrique, électronique et informatique ; les produits métallurgiques et métalliques. En 2022, la France était excédentaire dans les échanges de services, représentant 500 M€, ainsi que dans les secteurs de l'agroalimentaire, des transports, ainsi que des produits chimiques et cosmétiques. Les stocks d'investissements directs bilatéraux tendent à la baisse, et celui de la France est deux fois supérieur à celui de la Finlande. Ils sont concentrés dans l'industrie, et portés par la présence de près de 200 filiales françaises en Finlande, employant environ 11 000 personnes, et autant de filiales finlandaises en France, employant environ 8 500 personnes.
La nouvelle convention permettra aux investisseurs de bénéficier de taux nuls ou réduits de retenue à la source sur les revenus passifs. Elle se traduira par une imposition exclusive dans l'Etat de résidence pour les intérêts, les redevances et les dividendes issus de participations supérieures à 5 % (régime « mère-fille »), et par une retenue à la source plafonnée à 15 % pour les dividendes issus de participations inférieures à 5 %. Ces taux réduits de retenue à la source étant globalement (hors dividendes issus d'investissement de portefeuille) alignés sur ceux actuellement applicables en vertu de la convention de 1970 et des directives européennes4(*), leur incidence budgétaire pour la France sera nulle ou très limitée.
La France a par ailleurs obtenu l'insertion d'une clause permettant aux organismes de placement collectifs (OPC) de bénéficier des taux réduits conventionnels en matière de dividendes et d'intérêts, ainsi que d'une clause assurant l'imposition à la source des revenus distribués par les sociétés d'investissement immobilier cotées à leurs actionnaires non-résidents.
Le bénéfice de l'exonération des indemnités de volontariat international en entreprise (VIE) dans l'Etat où ils séjournent a pareillement été accepté par la Finlande5(*).
L'intégration des derniers standards du projet BEPS et l'introduction d'une retenue à la source sur les paiements de dividendes (hors régime « mère-fille ») auront pour conséquence de renforcer la lutte contre la fraude et l'évasion fiscale, et, in fine, de réduire le risque de pertes de recettes fiscales de la France.
Sur proposition finlandaise, la nouvelle convention instaure une retenue à la source sur les pensions de retraite privées, ouvrant droit à un crédit d'impôt dit « inversé » accordé par l'Etat de source. Ainsi, la France conservera son droit illimité d'imposition des pensions de source finlandaise perçues par les retraités résidant sur son territoire, l'élimination de la double imposition étant à la charge de la Finlande qui ne pourra prélever que le reliquat après déduction du crédit d'impôt, le cas échéant. La solution retenue, similaire à celle figurant dans la convention fiscale avec le Danemark signée le 4 février 2022, satisfait pleinement les intérêts français, étant précisé que le nombre de résidents de France percevant des pensions de source finlandaise est estimé par le fisc finlandais à environ 700, pour un montant de 10 M€ et que le Registre des français établis hors de France ne compte que 46 personnes recensées comme retraitées établies en Finlande, bien que leur nombre soit probablement cinq fois plus important6(*).
Des clauses « grand-père », prévues aux paragraphes 4 et 5 de l'article 29, permettent de maintenir le bénéfice des stipulations de la convention franco-finlandaise de 1970 pour les titulaires de pensions privées et de rémunérations et pensions publiques à la date de signature de la nouvelle convention. En vertu de ces clauses, le régime d'imposition des revenus précités reste celui de la convention de 1970 pour les personnes concernées, indépendamment des règles prévues par la nouvelle convention.
S'agissant de l'élimination de la double imposition, la convention de 1970 actuellement en vigueur prévoit, côté français, une méthode d'exemption consistant, sauf exceptions, à exonérer les revenus imposables en Finlande de l'impôt français tout en conservant néanmoins le droit de les prendre en considération pour le calcul du taux effectif, c'est-à-dire de l'impôt à percevoir sur le reste du revenu imposable en France. Cette méthode n'est plus retenue par la France depuis les années 1990. La nouvelle convention retient, quant à elle, la méthode de l'imputation, consistant à calculer l'impôt français sur l'intégralité des revenus du contribuable, y compris ceux imposables en Finlande, sous réserve toutefois d'accorder, selon le cas, une déduction égale au montant de l'impôt français ou finlandais correspondant à ces revenus7(*). Le passage d'une méthode à l'autre n'est pas neutre et implique plusieurs changements pour les contribuables, s'agissant des revenus qui sont soumis à l'impôt sur le revenu (traitements et salaires, revenus immobiliers...). Ainsi, en fonction des situations individuelles des contribuables concernés, ce changement de méthode emporte des incidences sur le taux d'imposition applicable aux autres revenus imposables, sur le mécanisme de la décote et sur le calcul du revenu fiscal de référence.
b) Avenant à la convention avec la Suède
Le nouvel avenant à la Convention intègre les nouveaux standards minimums de l'instrument multilatéral BEPS (préambule, clause générale anti-abus et procédures amiables), ce qui aura pour conséquence de renforcer la lutte contre la fraude et l'évasion fiscale, et, in fine, de réduire le risque de pertes de recettes fiscales françaises.
Le contexte apparaît particulièrement favorable car les échanges commerciaux entre la France et la Suède ont connu une forte hausse en 2023. Les exportations de la Suède vers la France sont passées de 79,9 à 94,1 Mds SEK (+18%), tandis que les importations suédoises en provenance de la France ont augmenté de 66,3 à 76,2 Mds SEK (+15%). La France est le 9e fournisseur et 8e pays client de la Suède. Le déficit commercial de la France se creuse néanmoins pour atteindre les 1,6 Mds €.
Les échanges commerciaux sont denses et stables dans le secteur des biens, autour de quelques secteurs clés comme les matériels de transport, le bois et ses produits dérivés. Concernant les services (35 % du total des échanges), ils sont dynamiques et se diversifient, notamment dans le secteur des technologies de l'information et de la communication. Les échanges de biens sont structurellement déficitaires en défaveur de la France.
Les investissements effectués par les entreprises témoignent en outre de la densité de la relation : en 2021, les investissements directs suédois en France s'élevaient à 10 Mds€, tandis que les investissements directs français en Suède dépassaient les 6 Mds €. Les entreprises suédoises implantées en France - dont Securitas, Volvo, Ikea ou encore H&M - emploient environ 95 000 personnes, ce qui fait de la Suède le premier employeur nordique en France. Les entreprises françaises installées en Suède emploient environ 70 000 personnes, dont 84% dans le secteur des services, domaine dans lequel la France est le premier employeur étranger.
Bien que le nombre de résidents de France percevant des pensions de source suédoise ne soit pas déterminé, le Registre des Français établis hors de France compte 154 personnes recensées comme retraitées établies en Suède.
En 2024, 189 VIE effectuaient une mission en Suède. Une cinquantaine d'entreprises accueillaient des VIE en 2020.
B. Conséquences administratives
La direction générale des finances publiques (DGFiP), responsable de l'application des conventions fiscales conclues par la France, sera chargée de l'application de la présente convention et du présent avenant.
Les modalités administratives d'application des présentes conventions seront identiques à celles de la centaine de conventions fiscales conclues par la France8(*).
La direction des impôts des non-résidents (DINR), direction à compétence nationale de la DGFiP, sera ainsi compétente pour recevoir et contrôler les déclarations des personnes résidentes en Finlande et en Suède.
La mise en oeuvre des dispositifs d'échanges de renseignements prévus par ces conventions sera intégrée au sein d'un rapport annuel annexé au projet de loi de finances, le Rapport annuel du Gouvernement portant sur le réseau conventionnel de la France en matière d'échange de renseignements9(*).
Les personnes résidentes de France pourront utiliser les formulaires n° 2047 (impôt sur le revenu) et 2066 (impôt sur les sociétés)10(*) pour déterminer le montant des crédits d'impôt auxquels elles auront droit en application de ces conventions.
C. Conséquences juridiques
Les deux accords renforcent la sécurité juridique des personnes morales et physiques en clarifiant les règles fiscales applicables aux opérations impliquant des résidents des deux Etats et qui entrent dans le champ d'application de ces accords.
· Articulation avec les accords ou conventions internationales existantes
La convention fiscale avec la Finlande se substituera à la convention franco-finlandaise actuellement en vigueur, signée à Helsinki le 11 septembre 1970.
L'avenant avec la Suède modifiera la convention franco-suédoise actuellement en vigueur, signée le 27 novembre 1990 à Stockholm.
· Articulation avec le droit européen
En vertu du principe d'attribution prévu à l'article 5 du Traité sur l'Union européenne11(*), la fiscalité directe est une compétence des Etats membres. Elle est exercée dans le respect du droit de l'Union européenne.
Dans ses arrêts Gilly du 12 mai 1998 (aff. C-336/9612(*)) et Saint-Gobain du 21 septembre 1999 (aff. C-307/9713(*)), la Cour de justice de l'Union européenne a précisé que les Etats membres sont libres de répartir entre eux leur pouvoir d'imposition en contractant des conventions fiscales, dès lors que ce dernier s'exerce dans le respect des règles communautaires.
Au cas particulier, les stipulations des conventions entre la France et la Finlande et entre la France et la Suède ont pour objet de répartir les pouvoirs d'imposition entre ces Etats, conformément aux jurisprudences précitées.
La compatibilité est également assurée au regard du droit dérivé, tels que la directive relative au règlement des différends fiscaux dans l'Union européenne14(*) du 10 octobre 2017, celle relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal du 15 février 201115(*), celle relative au régime des sociétés mères du 30 novembre 201116(*) et celle qui institue un régime fiscal commun aux intérêts et redevances du 3 juin 200317(*).
· Articulation avec le droit interne
L'ordonnancement juridique français n'est pas affecté par cette convention franco-finlandaise et cet avenant franco-suédois. En effet, ces textes pourront être appliqués dès leur entrée en vigueur et ne nécessiteront pas de mesure d'application particulière.
La convention avec la Finlande s'appliquera aux départements métropolitains de la République française et aux collectivités territoriales d'outre-mer listées au Protocole, soit la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, la Réunion et Mayotte.
L'avenant avec la Suède s'appliquera aux départements européens et d'outre-mer de la République française (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Réunion et Mayotte).
· S'agissant du transfert de données à caractère personnel
S'agissant des transferts de données à caractère personnel, en application de l'article 24 de la convention franco-finlandaise, ceux-ci sont appelés à s'inscrire dans le cadre des dispositions suivantes :
- du règlement 2016/679, du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (RGPD)18(*) ;
- de la loi modifiée n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés19(*) ;
- la convention n° 108 du Conseil de l'Europe, du 28 janvier 1981, pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel20(*) ;
- la convention n°108 modifiée dite convention n°108+, du Conseil de l'Europe, du 10 octobre 2018, ratifiée par la Finlande et signée par la Suède21(*), qui modernise la convention n°108 eu égard au développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication et renforce son application effective.
La Finlande et la Suède étant membres de l'Union européenne, la protection des données est également encadrée par le règlement (UE) 2016/679 précité.
Enfin, s'agissant de la coopération administrative (l'échange de renseignements et l'assistance en matière de recouvrement des impôts), les articles 24 et 25 de la convention avec la Finlande sont conformes aux standards internationaux en la matière et permettent une coopération administrative d'une portée équivalente à celle prévue dans d'autres textes juridiques contraignants.
D. Conséquences sociales
La convention avec la Finlande prévoit de nouvelles règles d'imposition pour les titulaires de pensions privées et de rémunérations et pensions publiques aux articles 17 et 18. L'article 18 prévoit en effet un régime d'imposition exclusive des rémunérations et pensions publiques dans l'Etat de source. Ces revenus sont toutefois imposables exclusivement dans l'Etat de résidence si les services y sont rendus et si le bénéficiaire en est un résident et en possède la nationalité, sans posséder en même temps la nationalité de l'Etat de source.
Il convient de préciser qu'en vertu des clauses « grand-père », prévues aux paragraphes 4 et 5 de l'article 29, ces nouvelles règles ne sont pas applicables aux résidents qui percevaient ces pensions ou rémunérations à la date de la signature de la convention. Il est prévu que ces personnes concernées bénéficient du régime d'imposition prévu aux articles 18, 19 et 21 de la Convention de 1970 indépendamment des règles prévues par la nouvelle convention.
Les parties sont convenues de ces clauses afin de ne pas affecter la situation actuelle des binationaux recrutés localement par les missions diplomatiques, telle qu'elle résulte des échanges de lettres de 1974 et 1975. La France et la Finlande se sont accordées pour maintenir le droit dont dispose l'Etat d'exercice d'imposer les salaires et pensions versés à ces personnes.
E. Conséquences concernant l'égalité femmes/hommes
La mise en oeuvre en oeuvre de ces accords n'emporte pas de conséquences concernant la parité.
F. Conséquences sur la jeunesse
La mise en oeuvre en oeuvre de ces accords n'emporte pas de conséquences sur la jeunesse.
G. Conséquences environnementales
La mise en oeuvre en oeuvre de ces accords n'emporte pas de conséquences environnementales.
V. - Etat des signatures et approbations
La convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Finlande pour l'élimination de la double imposition en matière d'impôts sur le revenu et la prévention de l'évasion et de la fraude fiscales a été signée le 4 avril 2023 à Helsinki par Agnès CUKIERMAN, ambassadrice de France en Finlande, et Annika SAARIKKO, ministre des finances.
La Finlande a notifié la France de l'accomplissement des procédures internes de ratification de cette convention le 9 juillet 2024.
L'avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Suède en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune a été signé le 22 mai 2023 à Stockholm par Etienne LE HARIVEL DE GONNEVILLE, ambassadeur de France en Suède, et Carolina LINDHOLM, secrétaire d'Etat auprès de la ministre des finances.
Le Parlement suédois a ratifié l'avenant le 15 novembre 2023. Le 6 décembre 2023, les autorités suédoises ont notifié la France de l'accomplissement de leurs procédures internes de ratification de cet accord.
VI. - Déclarations ou réserves
Les Parties ne souhaitent apposer ni déclaration ni réserve à la présente convention avec la Finlande et au présent avenant à la convention avec la Suède.
* 1 Convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Finlande tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune.
* 2 Base Erosion and Profit Shifting.
* 3 Convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Suède en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune.
* 4 Directive 2011/96/UE du Conseil du 30 novembre 2011 concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d'États membres différents et Directive 2003/49/CE du Conseil du 3 juin 2003 concernant un régime fiscal commun applicable aux paiements d'intérêts et de redevances effectués entre des sociétés associées d'États membres différents.
* 5 En 2024, 11 VIE effectuaient une mission en Finlande, pour le compte de 9 entreprises.
* 6 Le champ n'est pas systématiquement renseigné par les usagers, notamment par ceux qui étaient inscrits avant leur départ à la retraite ; à titre de comparaison, on recense 165 Français de plus de 64 ans inscrits au registre. Le registre ne donne pas non plus l'origine de l'éventuelle pension. En revanche, le fisc Finlandais recense environ 340 personnes percevant une pension de source française, pour un montant proche de 5 M€ (toutes nationalités confondues).
* 7 En soumettant ab initio l'intégralité des revenus du contribuable à l'impôt français, tout en empêchant la double imposition par l'octroi d'un crédit d'impôt, la méthode de l'imputation garantit que les revenus de source française des foyers percevant par ailleurs des revenus de source finlandaise sont imposés au même taux que ceux des foyers qui, à revenus équivalents, ne disposent que de revenus de source française. Cette méthode permet ainsi de rétablir l'équité avec les contribuables qui ne perçoivent que des revenus de source française et d'assurer que les revenus de source finlandaise sont pris en compte de la même manière que les autres sources de revenu pour la détermination du taux marginal d'imposition. En outre, la méthode de l'imputation permet également d'éviter des situations de double exonération lorsque l'impôt dans l'État de source est nul. Prévue par le modèle de convention OCDE, la méthode de l'imputation est ainsi retenue dans toutes les conventions récentes conclues par la France.
* 8 Liste des conventions fiscales liant la France.
* 9 Rapport annuel du Gouvernement portant sur le réseau conventionnel de la France en matière d'échange de renseignements.
* 10 Formulaires disponibles sur le site des Impôts.
* 11 Traité sur l'Union européenne.
* 12 CJCE, 12 mai 1998, Gilly, C-336/96
* 13 CJCE, 21 septembre 1999, Saint Gobain, C-307/97
* 14 Directive (UE) 2017/1852 du Conseil du 10 octobre 2017 concernant les mécanismes de règlement des différends fiscaux dans l'Union européenne.
* 15 Directive 2011/16/UE du Conseil du 15 février 2011 relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/799/CEE.
* 16 Directive 2011/96/UE du Conseil du 30 novembre 2011 concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d'États membres différents.
* 17 Directive 2003/49/CE du Conseil du 3 juin 2003 concernant un régime fiscal commun applicable aux paiements d'intérêts et de redevances effectués entre des sociétés associées d'États membres différents.
* 18 Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données).
* 19 Loi modifiée n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.
* 20 Convention 108 du Conseil de l'Europe pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel, 28 janvier 1981.
* 21 Convention 108+ du Conseil de l'Europe pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel, 10 octobre 2018.