EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Un avenant à la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérative du Brésil du 28 mai 1996 a été signé par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, Monsieur Stéphane Séjourné et le ministre des affaires étrangères du Brésil, Monsieur Mauro Vieira, le 28 mars 2024 à Brasilia.
En matière de coopération judiciaire pénale, la France et le Brésil sont d'ores et déjà toutes deux Parties à plusieurs conventions multilatérales spécialisées adoptées sous l'égide de l'Organisation des Nations unies, dont la convention unique des Nations unies sur les stupéfiants du 30 mars 19611(*), la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, du 10 décembre 19842(*), la convention contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes du 19 décembre 19883(*), la convention contre la criminalité transnationale organisée du 15 décembre 20004(*), et la convention contre la corruption du 31 octobre 20035(*).
Sur le plan bilatéral, la France et le Brésil sont liés par les stipulations de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale signée à Paris le 28 mai 1996, en vigueur depuis le 1er avril 2000 ainsi que par celles de la convention d'extradition signée à Paris le 28 mai 1996, entrée en vigueur le 1er septembre 2004.
En revanche, les deux États ne sont liés par aucun accord en matière de transfèrement de personnes condamnées détenues. En cette matière, la coopération se fait sur la base de la courtoisie internationale et du principe de réciprocité.
Désireux de promouvoir une coopération judiciaire bilatérale plus efficace en matière pénale, notamment afin de lutter contre la criminalité organisée transfrontalière et les trafics de stupéfiants dans toutes leurs dimensions criminelles, la France et le Brésil ont souhaité moderniser le cadre de leurs relations dans le champ de l'entraide judiciaire pénale, eu égard à l'ancienneté de la Convention.
Cet avenant a notamment pour objet d'introduire les nouvelles techniques spéciales d'enquête dans le champ d'application du cadre conventionnel, à savoir les livraisons surveillées, les observations et poursuites transfrontalières, les équipes communes d'enquête, les infiltrations mais aussi les auditions par vidéoconférence, les demandes d'informations en matière bancaire, les perquisitions, saisies et confiscations.
Il comprend 18 articles et introduit 12 nouveaux articles dans la convention de 1996.
L'article 1er de l'avenant modifie l'article 1er de la convention définissant le champ d'application de celle-ci, le complétant aux fins de déterminer quelles autorités compétentes peuvent solliciter l'entraide judiciaire pénale. L'alinéa 4 renvoi à la législation interne de l'État requérant, les systèmes judiciaires français et brésilien étant différents. Le Ministério Público, corps autonome dans les institutions brésiliennes, ses fonctions et l'indépendance de ses membres sont garanties par la Constitution.
L'article 2 modifie l'article 2 de la convention, relatif aux restrictions à l'entraide. Il est désormais précisé explicitement que l'entraide ne peut être rejetée au seul motif que la demande se rapporte à une infraction que l'État requis qualifie d'infraction fiscale, ou que les législations en matière de taxes, d'impôts, de douane et de change seraient différentes. De même, le secret bancaire ne peut plus être invoqué.
L'article 3 modifie l'article 3 de la convention, relatif à l'exécution des demandes. L'exigence d'une infraction punissable permettant la perquisition ou la saisie dans l'État requis pour donner suite à une demande de perquisition ou de saisie de l'État requérant est supprimée.
L'article 4 apporte une modification légistique à l'article 9 de la convention (1er paragraphe) relatif à la citation des témoins et experts.
L'article 5 modifie les dispositions de l'article 11 de la convention, relatif aux immunités, « les autorités judiciaires » deviennent les « autorités compétentes » ; le Ministério Público n'étant pas considéré comme une « autorité judiciaire » au Brésil.
L'article 6 remplace le chapitre IV « casier judiciaire » par le chapitre IV « informations relatives aux condamnations définitives ». Le nouvel l'article 12 de la convention mentionne les « autorités compétentes » en lieu et place des « autorités judiciaires ». Un troisième paragraphe est ajouté aux fins de préciser le nom du service compétent pour chaque État.
L'article 7 insère à l'article 13 de la convention un nouveau paragraphe sur la forme que doit revêtir la demande d'entraide à savoir « par écrit ou par tout moyen permettant d'en obtenir une trace écrite dans des conditions permettant à l'État requis d'en vérifier l'authenticité. »
L'article 8, relatif au contenu et à la forme des demandes d'entraide, supprime l'obligation de l'agrément du traducteur pour effectuer la traduction des demandes et des pièces les accompagnants prévu à l'article 15 de la convention.
L'article 9 modifie l'article 16 de la convention, relatif à l'authentification des demandes. La disposition sur la signature et l'authentification est supprimée en raison de l'ajout dans le nouvel article 13 de la convention d'un paragraphe 3 (cf. l'article 7 de l'avenant). En revanche, est maintenue la disposition sur la dispense de légalisation.
L'article 10 insère dans la convention un nouvel article 16-1 relatif aux questions de confidentialité et de spécialité. L'État requis doit en effet respecter le caractère confidentiel de la demande et de son contenu, dans les conditions prévues par sa législation. En cas d'impossibilité de le faire, l'État requis doit en informer l'État requérant qui décide s'il faut néanmoins donner suite à l'exécution. En sens inverse, l'État requis peut demander que l'information ou l'élément de preuve fourni reste confidentiel, ne soit divulgué ou utilisé que selon les termes et conditions qu'il aura spécifiés. En tout état de cause, l'État requérant ne peut divulguer ou utiliser une information ou un élément de preuve fourni et obtenu à des fins autres que celles qui auront été stipulées dans la demande, sans l'accord préalable de l'État requis.
L'article 11 modifie les dispositions de l'article 18 de la convention, relatives aux frais.
L'article 12 substitue le titre du chapitre VI de la convention « Dénonciation aux fins de poursuites » par le « Transfert des procédures pénales et échanges spontané d'informations ».
L'article 13 modifie l'article 19 de la convention, relatif aux transferts de procédures.
L'article 14 introduit un nouvel article 19-1 dans la convention, permettant l'échange spontané d'informations.
L'article 15 procède à des modifications légistiques.
L'article 16 crée un nouveau chapitre VII dans la convention intitulé « Mesures particulières d'entraide », ajoutant 9 nouveaux articles au sein de la convention : un article 20 relatif aux demandes d'informations en matière bancaire, un article 21 relatif à l'audition par vidéoconférence, un article 22 relatif aux demandes de perquisition, saisie, confiscation, un article 23 définissant les biens susceptibles d'être saisis et confisqués et les modalités des saisies et confiscations, un article 24 relatif aux livraisons surveillées, un article 25 relatif aux observations et poursuites transfrontalières par les agents des deux États, un article 26 relatif aux équipes commune d'enquête, un article 27 relatif aux infiltrations, ainsi qu'un article 28 relatif à la responsabilité civile et pénale des fonctionnaires au cours des opérations de livraisons surveillées, d'observations et poursuites transfrontalières, d'équipes communes d'enquête, et d'infiltrations.
L'article 17 crée un nouveau chapitre VIII dans la convention intitulé « Protection des données à caractère personnel » (article 29 de la convention).
L'article 18 précise les modalités de mise en oeuvre et d'application dans le temps des articles de l'avenant.
Telles sont les principales observations qu'appelle l'avenant à la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre la France et le Brésil du 28 mai 1996, signé le 28 mars 2024.
* 1 Publiée par décret n°69-446 du 2 mai 1969.
* 2 Convention contre la torture publiée par décret n°87-916 du 9 novembre 1987.
* 3 Convention contre le trafic de stupéfiants publiée par décret n°91-271 du 8 mars 1991.
* 4 Convention contre la criminalité transnationale publiée par décret n°2003-875 du 8 septembre 2003.
* 5 Convention contre la corruption publiée par décret n° 2006-1113 du 4 septembre 2006.