EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

En raison de la rapide succession de réformes législatives ayant transféré la compétence en matière de documents d'urbanisme, et en ayant modifié les outils, de nombreuses communes françaises ont dû faire évoluer leurs cartes communales et leurs plans locaux d'urbanisme.

Les cartes communales sont des documents d'urbanisme élaborés par les communes, caractérisées par une procédure d'élaboration simplifiée et un contenu allégé. Elles permettent aux communes d'assouplir certaines des contraintes prévues par le règlement national d'urbanisme (RNU), règlement qui s'applique par défaut à toutes les communes non couvertes par un document d'urbanisme.

Afin d'inciter à l'élaboration de documents plus récents, plus précis, et s'inscrivant dans le projet urbain des communes, le législateur a créé dans la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite « loi SRU », les plans locaux d'urbanisme (PLU).

Les PLU mettent notamment en place un zonage différencié des parcelles et contiennent un règlement qui encadre l'aspect et la taille des constructions. Rénovés par la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, dite « loi Grenelle II », les PLU sont élaborés selon une procédure plus lourde, souvent au prix de délais et d'efforts budgétaires non négligeables pour les petites communes françaises.

De surcroît, la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, dite « loi ALUR », a prévu le transfert aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de la compétence en matière de documents d'urbanisme. Un nombre croissant de PLU sont désormais élaborés à l'échelle de l'intercommunalité, prenant le relais des anciennes cartes communales et PLU des communes du périmètre de l'EPCI.

En conséquence de la création d'instruments de planification plus récents, ainsi que du transfert à l'EPCI de la compétence d'élaboration des documents d'urbanisme, de nombreuses cartes communales sont appelées à être remplacées par des PLU ou des plans locaux d'urbanisme intercommunaux (PLUi). Ce processus est déjà engagé : en 2017, près de 2 600 des 7 000 communes françaises couvertes par une carte communale étaient engagées dans l'élaboration d'un PLU ou d'un PLUi.

L'approbation de nouveaux PLU implique nécessairement l'abrogation des anciennes cartes communales, deux documents d'urbanisme ne pouvant être simultanément en vigueur dans la même commune. Pourtant, la loi ne précise aucunement la procédure d'abrogation applicable aux cartes communales. Actuellement, seule la jurisprudence du Conseil d'État 1 ( * ) et la doctrine administrative permettent d'esquisser les contours d'une procédure type.

Le silence de la loi en la matière est préjudiciable : il nuit à la clarté du droit qui s'impose aux collectivités territoriales et aux intercommunalités. Obligeant certains EPCI à organiser une seconde enquête publique, il retarde l'entrée en vigueur des documents plus récents, empêchant ainsi le développement des territoires et l'évolution des projets urbains. Il met un frein à l'élaboration de documents intercommunaux partagés, qui permettent pourtant de mutualiser les compétences et les coûts. Enfin, il expose les communes et EPCI à un fort risque d'insécurité juridique si celles-ci appliquent une procédure erronée alors même que les cartes communales concernent souvent de petites communes, aux budgets et aux moyens juridiques limités.

En particulier, la conduite d'une enquête publique, qui s'impose au titre du principe du parallélisme des formes, est une contrainte qui doit être clairement énoncée. Les communes et intercommunalités doivent en être explicitement informées, afin qu'elles puissent conduire cette enquête concomitamment à celle prescrite dans le cadre de l'élaboration du nouveau PLU. Cela garantira une meilleure prévisibilité en termes de coûts et de délais.

L'article 1 er de la présente proposition de loi a donc pour objet de clarifier et d'expliciter le droit applicable aÌ l'abrogation des cartes communales. Au sein du code de l'urbanisme, dans le titre dédié aux cartes communales, elle insère un nouveau chapitre relatif aÌ leur abrogation, constitueì de quatre nouveaux articles.

L'article L. 164-1 précise que l'initiative de l'abrogation relève de la commune, lorsque celle-ci a conservé la compétence en matière de documents d'urbanisme, ou de l'EPCI, lorsque la compétence lui a été transférée. Dans le cas où l'EPCI est compétent et s'est engagé dans l'élaboration d'un PLUi, c'est donc lui qui sera donc compétent pour initier la procédure d'abrogation de la carte communale, concomitamment à l'approbation du PLUi.

L'article L. 164-2 définit la procédure d'abrogation de la carte communale. Tout comme l'approbation d'une carte communale, son abrogation est soumise à enquête publique, suivie d'un vote du conseil municipal ou du conseil délibérant de l'EPCI. Enfin, l'approbation du préfet par arrêté est requise, qu'elle intervienne de manière explicite ou par approbation implicite dans un délai de deux mois.

L'article L. 164-3 apporte une souplesse accrue aux collectivités et intercommunalités, lorsque l'abrogation d'une carte communale intervient au profit de l'approbation d'un PLU. L'abrogation de la carte communale et l'approbation du PLU pourront, dans ce cas précis, faire l'objet d'une enquête publique et d'une délibération unique, qu'elles soient menées par la commune ou l'EPCI compétent. Il précise également que la délibération unique mentionne que l'abrogation de la carte communale prend effet lorsque le PLU devient exécutoire.

L'article L. 164-4 énonce de manière explicite le caractère exclusif des PLU et des cartes communales : un PLU nouvellement élaboré ne pourra entrer en vigueur qu'une fois la carte communale abrogée.

Enfin, l'article L. 165-5 précise que toute annulation ou déclaration d'illégalité d'un PLU ayant remplacé une carte communale a pour effet de remettre en vigueur la carte communale immédiatement antérieure, même abrogée.

L'article 2 de la proposition de loi vise quant à lui à reporter de deux ans, soit jusqu'au 31 décembre 2022, la date de caducité des plans d'occupation des sols (POS).

En effet, la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique a reporté la caducité des plans d'occupation des sols au 31 décembre 2020 pour les communes membres d'une intercommunalité n'ayant pas achevé l'élaboration du plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi). Ce délai supplémentaire avait été octroyé afin de ne pas pénaliser les communes concernées par une situation dont elles ne sont pas responsables et entraînant l'annulation de leur document d'urbanisme. Il visait également à laisser le temps aux intercommunalités concernées de faire aboutir leur PLUi.

La crise sanitaire et la période de confinement n'ont malheureusement pas permis aux collectivités impliquées dans ces procédures d'avancer de façon satisfaisante et un certain nombre d'entre elles n'auront pas achevé leur plan local d'urbanisme avant le 31 décembre 2020, entraînant l'application du règlement national d'urbanisme (RNU), ce que redoutent les communes concernées.

Tel est l'objet de la présente proposition de loi.


* 1 Avis n° 303421 du 28 novembre 2007.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page