EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Introduit par la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, le droit de visite des lieux de privation de liberté est aujourd'hui codifié à l'article 719 du code de procédure pénale, en son alinéa 1er, qui dispose que : « Les députés, les sénateurs, les représentants au Parlement européen élus en France (...) sont autorisés à visiter à tout moment les locaux de garde à vue, les locaux des retenues douanières, les lieux de rétention administrative, les zones d'attente, les établissements pénitentiaires et les centres éducatifs fermés » pour mineurs. Depuis le 24 décembre 2021, ce droit a également été étendu aux bâtonniers, dans leur ressort, ou à leur délégué spécialement désigné.

En revanche, les lieux de privation de liberté situés au sein des juridictions judiciaires - les geôles et dépôts des tribunaux et des cours d'appel - ne figurent pas au nombre de ceux pouvant faire l'objet de ce droit de visite.

C'est sur ce point que le Conseil constitutionnel, saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), a par sa décision n° 2025-1134 QPC du 29 avril 2025 censuré le premier alinéa de l'article 719 du code de procédure pénale pour méconnaissance du principe d'égalité devant la loi. Le Conseil a estimé qu'en n'étendant pas aux geôles et dépôts des juridictions judiciaires le droit de visite accordé aux élus et bâtonniers, le législateur méconnaissait le principe d'égalité devant la loi, instituant une rupture d'égalité entre les personnes privées de liberté selon le lieu où elles se trouvent.

Afin de permettre au législateur de remédier à cette inconstitutionnalité, les effets de cette décision ont toutefois été reportés au 30 avril 2026.

C'est l'objet de la présente proposition de loi. Par son article unique, elle vise à mettre en conformité le droit avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel, en étendant le droit de visite des parlementaires et des bâtonniers aux geôles et dépôts des juridictions judiciaires.

Le droit de visite des lieux de privation de liberté ne constitue pas un privilège : il est une garantie démocratique essentielle. Il a pour objectif de s'assurer du respect des droits fondamentaux des personnes retenues. Il fait des parlementaires et des bâtonniers des témoins directs de l'état des lieux de privation de liberté en France, et des relais précieux des alertes qui peuvent en émaner.

Ce droit s'inscrit pleinement dans le cadre du contrôle parlementaire sur l'action de l'État, et doit être préservé, notamment à l'heure où la France fait régulièrement l'objet de condamnations quant aux conditions d'enfermement des personnes détenues.

Par cette proposition de loi, il s'agit de réaffirmer avec force notre attachement à cette exigence démocratique fondamentale que constitue le droit de visite des lieux de privation de liberté par les parlementaires et bâtonniers.

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