EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Au moment du dépôt de cette proposition de loi sur le bureau du Sénat, nous apprenons le décès accidentel du sergent Maxence Roger du 3ème RPIMA dans le cadre de l'opération « Harpie » de lutte contre l'orpaillage illégal en Guyane. Nous adressons toutes nos condoléances à sa famille.

Cet évènement tragique nous rappelle l'urgence de légiférer pour que les soldats de France, décédés accidentellement durant des exercices opérationnels ou des entraînements militaires, aient le droit à la mention : « Mort pour le service de la Nation », instituée par l'article 12 de la loi n° 2012-1432 du 21 décembre 2012 relative à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme et permettant de rendre hommage à tout « militaire tué en service ou en raison de sa qualité. »

Au-delà de l'importance du symbole, l'attribution de cette mention ouvre l'accès à des compensations financières et matérielles, comme le versement d'une pension de réversion à taux plein ou l'octroi du statut de « pupille de la Nation » aux enfants du militaire décédé.

Comme l'a affirmé M. Sébastien Lecornu, ministre des Armées et des anciens combattants, le 13 juillet 2024 : « Lorsqu'un militaire perd la vie en opération, en service, ou en dehors, la Nation doit soutien et assistance à ses proches en reconnaissance de son engagement. »

La condition militaire est au fondement même de la résilience nationale et du lien Armée-Nation. Elle exige, de la part de celui qui s'engage dans les armées, discipline, disponibilité, loyalisme, esprit de sacrifice, pouvant aller jusqu'au sacrifice suprême. Cet état, qui implique un grand nombre de devoirs, n'est pas sans conséquence pour les familles et leurs proches qui doivent faire preuve d'une grande abnégation. En retour, l'engagement du militaire mérite la reconnaissance de toute la Nation, sans laquelle notre capacité de défense serait ébranlée.

Pendant la période 2012-2015, des militaires décédés en service sur le territoire national ont été reconnus « Morts pour le service de la Nation » et leurs familles ont pu compter sur une protection à la hauteur du sacrifice consenti. Cette parenthèse a été refermée par le décret n° 2016-331 du 18 mars 2016 qui a considérablement restreint l'octroi du statut en le réservant aux militaires décédés du fait « de l'acte volontaire d'un tiers ».

Depuis, les militaires décédés accidentellement lors d'un entraînement, d'un exercice de préparation opérationnelle ou lors d'une opération intérieure (OPINT) ne se voient plus attribuer cette mention mais celle, laconique, de « Mort en service ».

Les militaires qui évoluent dans des conditions très proches de la guerre réelle et exercent des missions de préparation qui les exposent à la mort ou à la blessure méritent la reconnaissance de la Nation et le soutien indéfectible de l'État à leurs familles.

Pourtant, leurs enfants ne sont pas reconnus comme « Pupilles de la nation » et leurs conjoints ne bénéficient que d'une pension de réversion à taux réduit. Aussi, cette mention ne faisant aucune distinction entre les militaires qui décèdent accidentellement dans le cadre de conditions d'exercices proches d'un engagement réel et ceux qui trouvent la mort dans des accidents de la vie courante, elle suscite la colère légitime des familles tant elle est source d'injustice.

Contrairement à ce qui est souvent avancé par les précédents Gouvernements, cette injustice n'a jamais été corrigée par la création, en 2021, de la mention « Mort pour le service de la République » qui s'adresse à l'ensemble des personnels de sécurité mais aussi aux bénévoles qui ont trouvé la mort dans des circonstances exceptionnelles, en ayant accompli un acte de bravoure ou au cours d'un exercice présentant un risque particulier. Plus récemment, le décret n° 2022-425 du 25 mars 2022 a reconnu comme éligible à ce statut le personnel sanitaire dont le décès est imputable au covid-19.

Outre sa valeur honorifique, la mention « Mort pour le service de la République » assimile le statut particulier des militaires à celui des civils et n'accorde aucun droit supplémentaire à ceux prévus par le statut « Mort en service ».

Le métier des armes n'étant pas un métier comme les autres, l'engagement militaire participe d'un rang qui le distingue de tout autre engagement civil.

C'est la raison pour laquelle de nombreuses familles réclament que leur soient entendus l'attribution de la mention « Mort pour le service de la Nation » ainsi que les droits qui y sont attachés : ils étaient des soldats de France. Ils sont morts au service de la France. Ils ne doivent plus être les oubliés de la Nation.

Tel est le sens de la présente proposition de loi.

Partager cette page