EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
L'accès à l'énergie, droit fondamental, est toujours plus menacé alors même que le législateur a qualifié l'électricité de bien de première nécessité.
En effet, en 2024, 75 % des ménages ont restreint leur chauffage pour maîtriser leurs factures, une hausse de 22 points par rapport à 2020 selon le Médiateur national de l'Énergie. De plus, 30 % des foyers ont déclaré avoir souffert du froid dans leur logement, contre 14 % en 2020, et parmi eux, 41 % ont invoqué des raisons financières.
Cette spirale de la précarité énergétique a des conséquences humaines et économiques désastreuses. L'explosion des prix de l'électricité et du gaz a plongé des millions de foyers dans une vulnérabilité inacceptable. En 2023, la France a franchi un seuil symbolique et dramatique, avec plus d'un million d'interventions pour impayés d'énergie. Face à cette urgence sociale, le Chèque Énergie, dont le montant oscille entre 48 et 277 euros, apparaît comme une mesure dérisoire et inefficace, incapable de contenir l'onde de choc de la libéralisation du secteur.
Les choix politiques des 20 dernières années ont directement contribué à cette dégradation inacceptable de la situation. La fin des tarifs réglementés de vente du gaz en juillet 2023 et l'approfondissement sans discernement du marché européen de l'électricité ont jeté nos concitoyens dans une volatilité des prix accrue et une incertitude économique grandissante et expose nos ménages et nos entreprises aux aléas d'un marché spéculatif.
Par ailleurs, la fiscalité pèse de manière insoutenable sur les factures énergétiques, représentant près de 22 % de la facture d'électricité et 30 % de la facture de gaz. La TVA, constituant à elle seule environ 15 % du montant total, s'applique non seulement aux coûts de fourniture et de réseau, mais également aux contributions et taxes spécifiques, créant une aberration fiscale où les taxes s'ajoutent aux taxes. Cette logique est en totale contradiction avec les principes fondamentaux de solidarité et d'accès aux biens essentiels pour tous.
Pire encore, à compter du 1er août 2025, la loi de finances pour 2025 aggrave cette situation en appliquant un taux de TVA de 20 % à l'ensemble des composantes de la facture, y compris l'abonnement et les produits commerciaux. Cette décision est une provocation au regard du caractère de bien de première nécessité de l'électricité et du gaz, et représente un prélèvement annuel supplémentaire d'1,5 milliard d'euros sur le pouvoir d'achat des ménages.
La France dispose pourtant d'atouts majeurs : un parc de production diversifié et décarboné, un réseau d'une qualité reconnue, et des travailleuses et travailleurs hautement qualifiés qui sont les garants de notre service public. Il est temps d'utiliser ces forces au service de nos citoyens.
Afin de redonner du pouvoir d'achat aux ménages, de soutenir la compétitivité de nos TPE-PME et de favoriser l'électrification des usages - indispensable à notre transition énergétique et à la décarbonation de notre économie - nous proposons une rupture décisive. La présente proposition de loi vise à ramener le taux de TVA à 5,5 % sur l'intégralité de la facture d'électricité et de gaz, incluant l'abonnement, la consommation et l'ensemble des taxes. Cette mesure s'appliquera aux deux énergies, reconnaissant leur complémentarité essentielle.
Conformément à l'article 102 de la directive 2006/112/CE modifiée, les États membres de l'Union européenne peuvent appliquer un taux réduit à la livraison d'énergie, sans descendre en dessous de 5 %. En 2014, la France avait porté ce taux à 20 %, générant un prélèvement supplémentaire annuel d'environ 8 milliards d'euros sur les ménages. Depuis, cette fiscalité n'a cessé d'augmenter.
La baisse de la TVA à 5,5 % engendrera un gain moyen immédiat d'environ 200 euros par foyer et apportera un soutien direct aux petites entreprises. Bien que le coût brut de cette disposition soit estimé à 7,9 milliards d'euros, cette mesure s'inscrit dans une logique de relance économique. La reprise du pouvoir d'achat des ménages et le dynamisme induit par l'électrification des usages stimuleront la consommation générale, générant ainsi des recettes fiscales indirectes qui compenseront, en partie ou en totalité, ce manque à gagner. Cette approche reflète notre engagement envers une solidarité nationale où l'investissement social se traduit par des bénéfices économiques à long terme.
Poursuivant les objectifs de renforcement du pouvoir d'achat des ménages, de lutte contre la précarité énergétique, de soutien aux TPE-PME consommatrices d'énergie, d'accélération de l'électrification des usages, l'article 1er de cette proposition de loi applique à l'ensemble de la composante des factures d'électricité et de gaz un taux de TVA réduit à 5,5 %.
Afin d'éviter tout « effet d'aubaine » et de garantir que cette baisse de TVA bénéficie directement aux ménages et aux entreprises, et non pas aux profits des fournisseurs, l'article 2 prévoit que les fournisseurs devront communiquer trimestriellement à la CRE le détail de leurs prix, la structure de leurs coûts et leurs marges brutes. La baisse de TVA devra apparaître distinctement sur chaque facture et être intégralement répercutée. Tout manquement sera sanctionné par des amendes allant jusqu'à 2 % du chiffre d'affaires annuel et pourra entraîner des ordres de remboursement aux consommateurs. La CRE publiera annuellement la liste des opérateurs sanctionnés, assurant une transparence indispensable.
L'article 3 prévoit la remise d'un rapport au Parlement évaluant les effets de cette nouvelle fiscalité dans un délai de douze mois à compter de l'entrée en vigueur de la loi, prévue le 1er août 2025 (article 4).