EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Par une décision en date du 13 février 2025, le Conseil constitutionnel a prononcé l'annulation des opérations électorales qui se sont déroulées dans la 2e circonscription du Jura les 30 juin et 7 juillet 2024.
Cette annulation est intervenue en raison de la présence, au premier tour, d'un candidat inéligible ayant recueilli un nombre important de suffrages. Ce candidat, placé sous curatelle renforcée, n'aurait pas dû voir sa candidature validée. L'erreur a été commise au stade de l'enregistrement, les services préfectoraux n'ayant pas été informés de la situation d'inéligibilité de l'intéressé.
Dans un rapport rendu le 20 novembre 2024 sur l'organisation des élections, la Cour des comptes a souligné les difficultés rencontrées par les préfectures dans la vérification des inéligibilités. Elle a estimé qu'une solution appropriée consisterait à « donner accès aux agents des bureaux des élections des préfectures, ainsi qu'aux autres autorités chargées d'examiner la recevabilité des candidatures aux élections, à un répertoire spécifique construit à partir du casier judiciaire national, qui ne comporterait que les informations nécessaires à cet examen ».
La présente proposition de loi vise à répondre à cette recommandation, en créant et en sécurisant juridiquement un tel dispositif.
Le I de l'article unique de cette proposition de loi insère un nouveau chapitre dans le titre Ier du livre Ier du code électoral, comportant huit articles, afin d'instituer un fichier national des personnes inéligibles.
Ce fichier recensera les personnes ayant perdu le droit à être éligible aux élections prévues par le code électoral, ainsi qu'à l'élection des conseillers des Français de l'étranger, des membres du Parlement européen élus en France et du Président de la République.
Il ne s'agit pas de recenser toutes les situations d'inéligibilité : les mineurs, par exemple, sont inéligibles du seul fait de leur âge. De plus, les inéligibilités fonctionnelles, quant à elles, concernent des fonctionnaires aux élections locales et peuvent être traitées au niveau territorial, sans qu'il soit nécessaire ou opportun de les recenser.
Sont retenus les motifs suivants :
- les personnes condamnées par une juridiction pénale à une peine entraînant la perte du droit à éligibilité ;
- les personnes frappées d'une décision d'inéligibilité prononcée par une juridiction administrative ;
- les personnes dont l'inéligibilité a été décidée par le Conseil constitutionnel ;
- les majeurs placés sous le régime de protection juridique qui, de par la loi, ont perdu leur droit à éligibilité.
Ainsi, seront inscrites dans le fichier toutes les personnes déchues de leur droit à éligibilité par le juge judiciaire, administratif ou constitutionnel, ainsi que les majeurs protégés concernés.
Le fichier contiendra un nombre limité d'informations nécessaires : identité (nom, date de naissance, nationalité, domicile), motif de l'inéligibilité, date de début et de fin de celle-ci (le cas échéant), ainsi que les mandats électifs concernés. Ces données devront être transmises sans délai par les autorités compétentes.
La consultation de ce fichier sera réservée, en premier lieu, aux autorités chargées de recevoir les déclarations de candidature à une élection. Elle sera également possible, lorsqu'elle sera utile à l'accomplissement de leur mission, pour les juridictions judiciaires et administratives ainsi que pour le Conseil constitutionnel. Les personnes inscrites dans ce fichier auront le droit d'accéder aux informations les concernant.
Enfin, la gestion technique et administrative du fichier sera confiée au ministère de l'intérieur, responsable de l'organisation des élections. Celui-ci veillera à son bon fonctionnement et à la sécurisation de son accès.
Le II prévoit le gage financier de la proposition de loi.
Tel est l'objet de la présente proposition de loi.