EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Un jeune sur quatre vit actuellement sous le seuil de pauvreté1(*). Un chiffre qui grimpe à 40 % de taux de pauvreté monétaire pour les jeunes qui sont étudiants et qui habitent seuls.
Depuis la pandémie du covid-19, la situation des jeunes n'a d'ailleurs cessé de se dégrader. Plus concernés par les contrats précaires, près de 10 % des jeunes en emploi ont perdu leur travail, soit par non-reconduction de leur contrat (7 %), soit en étant licenciés (2,5 %).
Ces réalités font de la jeunesse la population qui se retrouve la plus exposée à la pauvreté. De ces difficultés financières découlent une précarité alimentaire, une précarité numérique, une difficulté d'accès aux soins et une isolation sociale qui fragilisent encore plus la jeunesse. Pour d'autres, s'ajoute à cela une dépendance financière aux cercles familiaux freinant leur autonomie.
Parmi les jeunes les plus en difficultés figurent les « NEETs2(*) ».
Ils regroupent des jeunes aux parcours très variés, souvent issus de milieux défavorisés mais qui, selon la définition de l'OCDE, ne sont engagés ni dans un emploi, ni dans une formation, ni dans un enseignement formel.
En France, ils représentent environ 12,5 % des jeunes de 15 à 29 ans soit 1,4 million de personnes3(*). 85 % d'entre eux n'ont pas accédé à l'enseignement supérieur et plus d'un tiers n'ont pas achevé le secondaire. Les jeunes femmes sont proportionnellement plus nombreuses à connaître cette situation, notamment à partir de 22 ans, souvent en raison d'une maternité précoce.
Les conséquences économiques et sociales de ce phénomène sont majeures : au niveau européen, le coût des NEET peut représenter jusqu'à 1,2 % du PIB. La France ne fait pas exception4(*).
Malgré ce constat, cette jeunesse est aujourd'hui l'un des grands oubliés de la République, maintenue dans un angle mort de la protection sociale. En deçà de 25 ans, elle ne peut prétendre au RSA, sauf exception très limitée. Les dispositifs existants - tels que le contrat d'engagement jeune - restent conditionnés à un accompagnement intensif ou à des critères administratifs qui excluent de fait une partie des jeunes les plus éloignés des institutions. Beaucoup demeurent ainsi sans revenu régulier, dépendants de leur entourage ou de solidarités locales, dans une période cruciale de construction de leur autonomie.
En outre, le contrat d'engagement jeune reste limité dans le temps pour une durée tout au plus d'un an et six mois avec une allocation trop faible. Le conseil d'orientation des politiques jeunesse (COJ) a d'ailleurs estimé que le contrat d'engagement jeune devait poursuivre ses efforts pour toucher les jeunes les plus vulnérables.
Dans un pays qui a su garantir la santé, la retraite et la scolarité pour toutes et tous, il subsiste une frange de la population à laquelle aucun filet de sécurité n'est pleinement offert.
Reconnaître le droit au revenu minimum pour ces jeunes de 16 à 25 ans, c'est affirmer que nul ne doit être laissé de côté et que l'émancipation de la jeunesse relève du même principe de solidarité qui fonde l'ensemble de notre République sociale.
Dans le système français, l'obligation de scolarisation s'étend jusqu'à 16 ans, des jeunes peuvent dès lors et dès cet âge se retrouver dans une situation de NEET.
Pour ces jeunes, souvent sans soutien familial, l'accès à un revenu minimal constitue une condition essentielle de dignité et d'émancipation.
La France ne peut plus laisser une partie de sa jeunesse sur le bas-côté.
L'article 1er prévoit l'élargissement du RSA aux personnes de 16 à 25 ans sans emploi ni formation.
L'article 2 quant à lui prévoit l'automatisation du RSA pour les jeunes sans emploi ni formation afin de répondre aux difficultés d'accès aux droits et afin de lutter contre le non recours.
Enfin, l'article 3 gage l'ensemble de ces mesures.
* 1 Étude de la DRESS, « Mesurer le niveau de vie et la pauvreté des jeunes adultes de 18 à 24 ans - Une population particulièrement confrontée à la vulnérabilité économique », 10 février 2023
* 2 NEET signifie « not in education employment or training ».
* 3 INSEE, 2022
* 4 En 2011, une étude de la Fondation Européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail (Eurofound) estimait ce coût à plus de 12 000 euros par NEET pour la France, au-delà de la moyenne européenne qui s'élevait à 10 651 euros. En comptabilisant l'ensemble des NEETs, le coût total était ainsi de 22,2 milliards d'euros pour l'État français, ce qui représentait 1,11 % du PIB français. À l'échelle européenne, le coût total s'élevait à 153 milliards d'euros, ce qui représentait plus de 1,2 % du PIB européen.