Document "pastillé" au format PDF (1,4 Moctet)

N° 314

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2018-2019

Enregistré à la Présidence du Sénat le 13 février 2019

PROJET DE LOI

autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Belgique relatif à leur coopération dans le domaine de la mobilité terrestre ,

PRÉSENTÉ

au nom de M. Édouard PHILIPPE,

Premier ministre

Par M. Jean-Yves LE DRIAN,

ministre de l'Europe et des affaires étrangères

(Envoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La coopération en matière de défense entre la France et la Belgique est ancienne et structurée par leur appartenance commune à l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord et à l'Union européenne.

Pour renouveler sa composante terrestre motorisée à horizon 2025, le Gouvernement du Royaume de Belgique a souhaité s'engager dans une négociation exclusive avec les autorités françaises et acquérir cette capacité motorisée par un achat de Gouvernement à Gouvernement.

Les négociations de l'accord de coopération dans le domaine de la mobilité terrestre avec les autorités belges et du protocole additionnel à l'accord se sont déroulées entre janvier et juillet 2018.

L'accord définit le principe, le cadre et les modalités du partenariat stratégique et de la coopération mise en place entre la France et la Belgique dans le domaine de la mobilité terrestre. Il fixe les conditions d'acquisition par la Belgique de la première capacité du programme « capacité motorisée » (programme CaMo), qui porte sur l'acquisition par la Belgique de 442 véhicules, soit 382 véhicules blindés multi rôles (VBMR-GRIFFON) et 60 engins blindés de reconnaissance et de combat (EBRC-JAGUAR), pour un budget total investi par la Belgique de 1,5 milliard d'euros.

Cet accord est composé d'un préambule et de quatorze articles.

Outre les accords liant la France et la Belgique en matière de coopération dans le domaine des matériels de défense (accord du 13 octobre 1983), d'échange et de protection réciproque d'informations classifiées (accord du 11 juillet 2017) et la convention entre les États parties au traité de l'Atlantique Nord sur le statut de leurs forces conclue le 19 juin 1951 (SOFA OTAN), le préambule rappelle l'intention exprimée par les parties d'établir une coopération renforcée entre leurs forces terrestres et de renforcer leur coopération dans le domaine de la mobilité terrestre. Il rappelle également la volonté belge d'une interopérabilité maximale avec les forces terrestres françaises et d'acquérir une première capacité constituée de véhicules blindés multi rôles (VBMR) et d'engins blindés et de reconnaissance et de combat (EBRC) infovalorisés, interopérables avec les VBMR et EBRC du programme français SCORPION.

L' article 1 er définit les termes employés.

L' article 2 précise le double objet de l'accord, à savoir d'une part, la fixation du cadre du partenariat stratégique et de la coopération des parties dans le domaine de la mobilité terrestre, et d'autre part, au titre de ce partenariat, les conditions d'acquisition par la partie belge de la première capacité du programme CaMo.

L' article 3 précise les objectifs poursuivis par les volets de la coopération opérationnelle (cohérence doctrinale et capacitaire) et de la coopération en matière de conduite de programmes d'armement (cohérence programmatique, élaboration et management d'un programme, accompagnement de la partie française) en vue d'assurer le bon déroulement du programme CaMo. Il prévoit que les parties peuvent, en tant que de besoin, conclure un accord subséquent à cet accord-cadre pour l'acquisition de toute nouvelle capacité, ainsi que des accords ou des arrangements techniques pour déterminer les modalités de mise en oeuvre d'un soutien spécifique complémentaire de la partie française.

L' article 4 définit le mandat par lequel la France, agissant au nom et pour le compte de la Belgique, passe le contrat d'acquisition par la Belgique auprès du fournisseur industriel. Les droits et obligations du mandant (la Belgique) et du mandataire (la France) sont exclusivement régis par l'accord. Les règles de passation du contrat sont celles applicables en droit français dans le respect du droit de l'Union européenne. La France est chargée de négocier, rédiger, conclure et notifier le contrat et de procéder à toute modification non substantielle du contrat. Elle assure le suivi technique, financier et administratif du contrat dans lequel doit figurer une clause d'arbitrage qui prévoit qu'un éventuel litige entre la Belgique et le fournisseur industriel sera réglé conformément aux règles de conciliation et d'arbitrage de la Chambre de Commerce Internationale.

L' article 5 définit les obligations des parties dans la mise en oeuvre du mandat, notamment en termes d'information, de gestion du contrat, de réception et de versement des fonds, et de relations avec les fournisseurs. La France s'engage principalement à :

- rendre compte à la Belgique de l'état d'avancement de la passation et de l'exécution du contrat, et de toute difficulté susceptible d'affecter la mise en oeuvre de l'accord et l'exécution du contrat ;

- viser les procès-verbaux de constatations, les actes de gestion de configuration associés et les décisions de réception au titre du contrat et les remettre à la partie belge pour signature ;

- introduire dans le contrat notamment les clauses de résiliation du contrat en cas de défaillance durable du fournisseur industriel et pour toute autre cause.

La Belgique s'engage principalement à :

- informer la partie française de toute difficulté susceptible d'affecter la mise en oeuvre de l'accord, notamment celles susceptibles d'avoir une incidence sur la mise en oeuvre du protocole additionnel à l'accord et sur l'exécution du contrat ;

- signer, dès remise par la partie française, les procès-verbaux de constatations, les actes de gestion de configuration associés et les décisions de réception préalablement visés par la partie française au titre du contrat, réceptionner le matériel dans le cadre du contrat, la réception valant transfert de propriété directement entre le fournisseur industriel et la Belgique ;

- mettre à disposition et/ou fournir au fournisseur les entrées étatiques nécessaires à l'exécution du contrat et être seule responsable des conséquences liées à une défaillance dans la mise en oeuvre de cette obligation ;

- prendre en charge les coûts afférents au contrat et aux éventuelles évolutions, les conséquences et coûts supplémentaires ;

- verser les fonds nécessaires sur le compte ouvert à son nom auprès de l'établissement financier.

L' article 6 précise les autres engagements des parties relatifs aux prestations de soutien et aux relations avec le fournisseur industriel à raison de l'exécution du contrat et après le transfert de propriété du matériel. La Belgique reconnait que la France n'est en aucun cas tenue responsable de l'exécution du contrat par et envers le fournisseur industriel. En cas de mauvaise exécution par le fournisseur industriel, seule la responsabilité du fournisseur peut être recherchée par la Belgique, et la France n'est tenue par aucune garantie de bonne fin ni aucun engagement de résultat ou de responsabilité vis-à-vis de tout défaut de conformité ou de vice caché. En cas de défaillance de la partie belge, la responsabilité de la partie française ne peut pas être recherchée. En cas de mauvaise exécution par la Belgique de ses obligations au titre du contrat, seule sa responsabilité peut être recherchée par le fournisseur industriel et la Belgique assume, dans ce cas, l'intégralité des conséquences induites, conformément aux stipulations de l'accord.

L' article 7 renvoie la définition des modalités financières à l'annexe 3 à l'accord, s'agissant des paiements de la Belgique à la France afférents au soutien et au protocole de fourniture et s'agissant des paiements de la Belgique au fournisseur industriel afférents au contrat. Il précise que les dispositions bancaires détaillées relatives aux paiements afférents au contrat sont définies dans un protocole bancaire conclu en application de l'accord.

L' article 8 établit la gouvernance du partenariat. Il crée un comité directeur bilatéral chargé de fixer les orientations, d'assurer le pilotage et la coordination du partenariat stratégique franco-belge, et de superviser le programme CaMo. Le comité est coprésidé par la France (représentants du chef d'état-major des armées et de la direction générale de l'armement) et par la Belgique (représentants du chef de la défense). Il s'appuie sur trois comités de pilotage binationaux : « Partenariat Armement », « Capacitaire » et comité de pilotage de programme. Un bureau de programme commun CaMo est mis en place pour le pilotage de l'activité contractuelle associée à la première capacité du programme CaMo.

L' article 9 précise les modalités d'échange et de protection des informations nécessaires à la mise en oeuvre de l'accord. Il renvoie, pour les informations et matériels classifiés, aux stipulations de l'accord relatif à l'échange et à la protection réciproque d'informations classifiées signé le 11 juillet 2017.

L' article 10 précise les conditions dans lesquelles la Belgique peut, dans le respect de sa législation, de la règlementation européenne et des obligations internationales des parties, exporter ou transférer à un tiers (État, personne physique ou morale) tout ou partie des matériels acquis dans le cadre du contrat, sous réserve de l'accord préalable écrit de la France. Il énumère les motifs pour lesquels la France peut s'opposer aux demandes de transfert ou d'exportation. L'instrument juridique encadrant ce transfert ou cette exportation doit contenir une clause subordonnant tout éventuel re-transfert ou réexportation par ce tiers à l'accord écrit préalable de la France.

L' article 11 précise que le statut des membres du personnel militaire et civil et des personnes à charge relevant de l'une des parties séjournant ou en transit sur le territoire de l'autre partie au titre de la mise en oeuvre de l'accord est régi par le SOFA OTAN, à l'exception de son article VIII (règlement des dommages).

L' article 12 précise les modalités du règlement des dommages causés par les parties ou les membres de leur personnel dans le cadre de la mise en oeuvre de l'accord. Il pose le principe de la renonciation de chaque partie à toute demande d'indemnité pour les dommages causés par le personnel de l'autre partie à son personnel ou à ses biens propres, sauf en cas de faute lourde ou de faute intentionnelle. Il prévoit que chaque partie indemnise les tiers en réparation des dommages causés par son personnel, et que les parties se consultent pour déterminer les conditions d'indemnisation des tiers lorsque les dommages sont imputables aux deux parties ou en cas d'incertitude sur l'auteur du dommage.

L' article 13 fixe les modalités de règlement des différends. Les différends entre les parties relatifs à l'interprétation ou à l'application de l'accord sont réglés exclusivement par voie de consultation ou de négociation. La partie belge reconnaît la clause d'arbitrage introduite dans le contrat pour le règlement des différends relatifs à l'exécution du contrat entre la partie belge et le fournisseur industriel, prévue au point 4.3 de l'article 4 de l'accord. La France assure le traitement des éventuels contentieux relatifs à la procédure de passation du contrat.

L' article 14 fixe les modalités d'entrée en vigueur, d'amendement et de dénonciation de l'accord, qui est conclu pour une durée de quinze ans (15), et renouvelable tacitement pour de nouvelles périodes successives de cinq (5) ans. Il précise les effets de la dénonciation de l'accord ou du protocole de fourniture, de la défaillance d'une partie dans l'exécution de ses obligations au titre de l'article 5, de la survenance d'un événement extérieur s'opposant durablement et irrémédiablement à l'exécution du contrat sur les obligations des parties au titre de l'accord et encadre le processus de résiliation du contrat.

L' annexe 1.1 précise les missions du comité directeur, sa composition et ses modalités de fonctionnement.

L' annexe 1.2 précise les missions du comité de pilotage « Partenariat Armement », sa composition et ses modalités de fonctionnement.

L' annexe 1.3 précise les missions du comité de pilotage « Capacitaire », sa composition et ses modalités de fonctionnement.

L' annexe 1.4 précise les missions du comité de pilotage de programme, sa composition et ses modalités de fonctionnement.

L' annexe 1.5 précise les missions du bureau de programme commun CaMo, sa composition et ses modalités de fonctionnement.

L' annexe 2 définit le plan de développement capacitaire, qui décrit les modalités de montée en puissance de la capacité motorisée belge à travers le partenariat stratégique franco-belge, par l'acquisition par la Belgique de la première capacité du programme CaMo entre 2025 et 2030, et par la mise à niveau des équipements d'ancienne génération et le développement des nouvelles générations de matériels. L'annexe précise les principes généraux de la coopération capacitaire (réciprocité globale, inscription dans la durée), présente un planning prévisionnel, et décrit le processus de développement et la préparation opérationnelle.

L' annexe 3 précise les modalités financières du soutien de la France associé au contrat et détaille le montant de la contribution financière belge, pour partie ferme selon un échéancier de 2019 à 2031 et pour partie proportionnelle selon un échéancier établi par la France pour chaque commande émise au titre de la provision pour évolutions et aléas et la part de commande additionnelle de matériel supplémentaire.

Telles sont les principales observations qu'appelle l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Belgique relatif à leur coopération dans le domaine de la mobilité terrestre qui, comportant des dispositions de nature législative, est soumis au Parlement en vertu de l'article 53 de la Constitution.

PROJET DE LOI

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre de l'Europe et des affaires étrangères,

Vu l'article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Belgique relatif à leur coopération dans le domaine de la mobilité terrestre, délibéré en conseil des ministres après avis du Conseil d'État, sera présenté au Sénat par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, qui sera chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.

Article unique

Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Belgique relatif à leur coopération dans le domaine de la mobilité terrestre (ensemble trois annexes), signé à Paris le 7 novembre 2018, et dont le texte est annexé à la présente loi .

Fait à Paris, le 13 février 2019

Signé : ÉDOUARD PHILIPPE

Par le Premier ministre :

Le ministre de l'Europe et des affaires étrangères

Signé : M. JEAN-YVES LE DRIAN

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page