N°467

SENAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès-verbal de la séance du 30 juin 1999.

PROPOSITION DE LOI

tendant à la création de fonds d'investissement en art contemporain,

PRÉSENTÉE

Par MM. Yann GAILLARD, Louis ALTHAPÉ, Pierre ANDRÉ, Jean BERNARD, Roger BESSE, Mme Paulette BRISEPIERRE, MM. Jacques CHAUMONT, Jean CHÉRIOUX, Charles de CUTTOLI, Xavier DARCOS, Désiré DEBAVELAERE, Luc DEJOIE, Jacques DELONG, Christian DEMUYNCK, Charles DESCOURS, Michel DOUBLET, Daniel ECKENSPIELLER, Bernard FOURNIER, Alain GÉRARD, Francis GIRAUD, Daniel GOULET, Georges GRUILLOT, Jean-Paul HUGOT, Roger HUSSON, André JOURDAIN, Lucien LANJER, Gérard LARCHER, René-Georges LAURIN, Jacques LEGENDRE, Jean-François LE GRAND, Lucien NEUWIRTH, Mme Nelly OLIN, MM. Jacques OUDIN, Victor REUX et Jacques VALADE,

Sénateurs.

(Renvoyée à la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

Arts et spectacles.

EXPOSÉ DES MOTIFS

MESDAMES, MESSIEURS,

La présente proposition de loi reprend une idée que son premier signataire a été amené à préconiser dans le rapport d'information qu'il a rédigé pour la commission des Finances du Sénat sur les aspects fiscaux et budgétaires d'une relance du marché de l'art en France.

Se fondant sur l'enquête que celui-ci a menée au nom de la commission des Finances, les auteurs de la présente initiative partent du constat que le commerce de l'art contemporain ne se relevait que difficilement de la crise du début des années 1990.

Leur conviction est qu'il y a « trop d'Etat » dans l'art contemporain, ce que reconnaissent la plupart des galeries, même parmi celles qui sont les plus soutenues par la commande publique.

Si la commande reste un outil indispensable, il faut bien admettre qu'elle ne trouve que peu de relais sur le marché, même si des expositions comme « Passions privées » organisée fin 1995 au Musée d'art moderne de la ville de Paris, montre que le « virus » de la collection sévit toujours.

Ce qui importe, c'est donc moins d'injecter encore plus d'argent public sur le marché au risque d'entretenir un état de dépendance malsain que d'aider l'art contemporain à trouver son marché.

Mais pour des raisons pratiques et de principes, les auteurs de la présente proposition croient plus dans des encouragements aux galeries à financer des artistes et à trouver des clients que dans une incitation directe aux particuliers collectionneurs.

I. - LE PRINCIPE : AIDER L'INITIATIVE PRIVÉE À PRENDRE DES RISQUES

La démarche que tend à concrétiser la présente proposition de loi est fondée sur une position de principe : la découverte de l'art contemporain ne peut se faire sans la médiation des galeries dont le rôle est de soutenir, en fonction de leurs convictions personnelles mais aussi de la demande du marché, les artistes.

Aider directement les ménages, à supposer même que cela soit techniquement possible - car les mécanismes envisageables ne pourraient a priori porter sur des montants suffisamment importants et poseraient des problèmes de vérification délicats -, pourrait aboutir à conforter des choix qui ne seraient en fait que peu novateurs.

La création en matière d'arts plastiques est une activité à risques qui devrait être aidée sur le plan fiscal comme le sont d'autres activités tournées vers l'innovation : il en est un peu des artistes comme des « start up » technologiques, elles sont nombreuses au départ mais beaucoup moins à l'arrivée. Le galériste devrait à la manière de l'investisseur, être incité à prendre des risques, pour peu qu'il y mette aussi de ses propres fonds.

II. - UNE SUGGESTION : CRÉER DES FONDS D'ART CONTEMPORAIN SUR LE MODÈLE DES SOCIÉTÉS DE CAPITAL RISQUE

Aujourd'hui, l'expression de fonds d'art contemporain évoque un système de marché, sinon administré, du moins dans lequel on vit, souvent, plus en courtisant l'acheteur public qu'en prospectant le client privé.

Or un fonds, ce pourrait être autre chose qu'un cadre comptable public ; ce pourrait être une nouvelle forme de société d'investissements rassemblant des investisseurs privés qui croient en l'art contemporain, en la possibilité d'y gagner de l'argent, dès lors notamment que le régime fiscal est adapté à ces prises de risque.

L'idée directrice est de permettre aux galeries de se trouver des fonds propres en créant des fonds d'investissements auxquels pourraient notamment participer leurs clients.

Le principe de ces fonds, calqué sur le mode de fonctionnement des sociétés de capital risque serait de les exonérer d'impôts sur les sociétés, c'est à dire d'impôts sur les bénéfices en cas de revente, dès lors que leurs investissements respectent certains coefficients d'emplois.

En l'occurrence, il faudrait inciter les fonds à prendre des risques en achetant des oeuvres de jeunes artistes travaillant en France. Comme il est difficile de définir les jeunes artistes par l'âge, on a préféré retenir un critère de prix, fixé à 100 000 F.

Pour le rédiger, si jamais pareille initiative aboutissait, il faudrait avoir des réponses à des questions de principe, notamment sur le rôle des galeries, sur leur mode de rémunération, sur les garanties apportées aux investisseurs.

En ce qui concerne le fonctionnement du fonds - qui serait précisé par décret en Conseil d'Etat -, deux principes paraissent assez raisonnables :


• les bénéfices du fonds - même de trésorerie, dans une certaine limite -, seraient exonérés d'impôt sur les sociétés ;


• à la dissolution du fonds - qui devrait être à durée déterminée, cinq à dix ans -, le bénéfice final serait imposé aux plus-values à long terme (16%).

Aucune déduction fiscale de type SOFICA ne serait prévue, au moins dans un premier temps, avant que ce type de structure n'ait fait la preuve de sa viabilité et de son utilité.

Les fonds d'art contemporain sont actuellement synonymes d'interventions publiques ; ils pourraient devenir, dans cette optique, des outils de l'initiative privée.

Tel est le message de cette proposition de loi dont l'objectif est de faire plus de place aux mécanismes du marché dans le soutien à l'art contemporain en France.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

I. - Les sociétés françaises, dites fonds d'investissement en art contemporain, sont exonérées d'impôt sur les sociétés sur les produits et plus-values nets provenant de leurs stocks si leur situation nette comptable est représentée de façon constante à concurrence de 50 % au moins d'oeuvres d'une valeur inférieure à 100 000 F d'artistes vivants français ou travaillant en France. Les modalités de constitution, de fonctionnement et de dissolution de ces sociétés, constituées pour une durée maximale de dix ans, sont déterminées par décret en Conseil d'Etat.

Les cessions de parts ou actions des fonds d'investissement en art contemporain sont soumises, lorsque l'actionnaire est une entreprise, au régime fiscal des plus-values à long terme et, lorsque l'actionnaire est une personne physique, au taux d'imposition prévu au 2 de l'article200 A.

II - Il est ajouté à l'article 208 du code général des impôts un paragraphe 3° nonies ainsi rédigé :

« 3° nonies - Les fonds d'investissement en art contemporain qui fonctionnent dans les conditions prévues au paragraphe I de la loi n°........ du ........»

III. - La perte de recettes résultant des dispositions des paragraphes I et II est compensée, à due concurrence, par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

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