Conclusions de la commission spéciale
chargée d'examiner le projet de loi relatif à la corse

  Réunie le mercredi 5 décembre 2001, sous la présidence de M. Jacques Larché, président, la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la Corse a procédé à l'examen, en nouvelle lecture, du rapport de M. Paul Girod.

Rappelant les conditions dans lesquelles la commission mixte paritaire s'était réunie, le rapporteur a tout d'abord regretté le refus manifeste de la délégation de l'Assemblée nationale d'essayer de parvenir à un accord.

Il a indiqué que les travaux de l'Assemblée nationale en nouvelle lecture avaient malheureusement confirmé ce refus de tenir compte, pour l'essentiel, des propositions du Sénat.

Dénonçant cet enfermement dans la logique d'un « processus » et d'un « relevé de conclusions » dont la maîtrise semble pourtant échapper au Gouvernement, M. Paul Girod, rapporteur, a exprimé la crainte que les déceptions soient à la mesure des grandes illusions suscitées par ce projet de loi.

Convaincue du bien fondé de la démarche du Sénat, seule à même d'apporter des solutions conformes à la Constitution aux difficultés que rencontre la Corse, la commission spéciale a décidé de rétablir, pour l'essentiel, son texte de première lecture.

1. Rendre les dispositions institutionnelles conformes à la Constitution

Sur le volet institutionnel du projet de loi, la commission spéciale a adopté des amendements tendant à :

- consacrer dans la loi les spécificités de la collectivité territoriale de Corse susceptibles de justifier des adaptations au droit commun des régions (article premier A) ;

- supprimer le pouvoir d'adaptation législative, le pouvoir réglementaire propre et le pouvoir d'adaptation des règlements nationaux conférés à la collectivité territoriale de Corse (article premier) ;

- supprimer les dispositions créant une nouvelle commission parlementaire, dont la conformité à l'article 43 de la Constitution - lequel ne vise que les seules commissions spéciales désignées pour l'examen des projets et propositions, et commissions permanentes dont il limite le nombre à six dans chaque assemblée - n'est pas évidente, et dont les missions pourraient très bien être remplies tant par les commissions permanentes existantes que par l'Office parlementaire d'évaluation de la législation (article premier) ;

- améliorer la procédure de consultation de l'Assemblée de Corse sur les projets et propositions de loi comportant des dispositions spécifiques à l'île (article premier) ;

- supprimer les offices existants et permettre à la collectivité territoriale de Corse de les recréer sur des fondements sains et renouvelés, tout en préservant les droits des personnels (articles 40 à 42).

2. Préciser les attributions de la collectivité territoriale de Corse dans le domaine culturel

Sur ce volet, la commission spéciale a adopté des amendements tendant à :

- dissiper toute ambiguïté sur le caractère facultatif de l'enseignement de la langue corse, en complétant la formule adoptée par l'Assemblée nationale par un alinéa rappelant les conditions posées par le Conseil constitutionnel à un enseignement de langues régionales (article 7) ;

- modifier l'organisation du CAPES de Corse, de façon à l'aligner sur les autres CAPES de langues régionales qui comportent des épreuves dans une discipline à options et permettent aux titulaires de ce certificat d'enseigner dans une autre matière (article 7) ;

- permettre à l'Etat de conduire, en matière culturelle, des actions qui relèvent de la politique nationale, tout en l'autorisant à en confier la mise en œuvre à la collectivité territoriale de Corse (article 9).

3. Apporter une vraie réponse aux difficultés suscitées par la loi « littoral »

Sur ce volet du projet de loi relatif à la Corse, la commission spéciale a adopté des amendements tendant à :

- autoriser une urbanisation limitée des espaces proches du rivage (qui se distinguent de ceux situés dans la bande des cent mètres), en contrepartie d'un don de terrains au Conservatoire du littoral (article 12) ;

- fixer le principe d'une délimitation du domaine public maritime en Corse, à l'instar de ce qui a été réalisé, dans certaines îles, au cours de ces dernières années (article 12 B) ;

- déclarer inconstructibles, tant qu'ils n'auront pas retrouvé leur aspect antérieur, les espaces qui auront été victimes d'un incendie criminel ou dont l'origine reste inconnue (article 12 E) ;

- attribuer une aide financière exceptionnelle aux communes de Corse pour qu'elles se dotent d'un plan local d'urbanisme ou d'une carte communale (articles 12 C et 12 D) ;

- autoriser la réalisation de véritables aménagements légers (sanitaires fixes, chemins piétonniers et observatoires de la faune), sous réserve de l'adoption d'un plan d'aménagement du site, dans des espaces « remarquables » (article 12 F).

4. Rendre plus attractif le dispositif fiscal et financier

Sur ce volet la commission réaffirme ses positions de première lecture en insistant sur :

- l'éligibilité du secteur du BTP au crédit d'impôt au taux de 20 % (article 43) ;

-  une sortie en trois ans pour l'ensemble des dispositifs fiscaux et sociaux issus de la loi relative à la zone franche de Corse (article 43) ;

- l'élargissement de l'assiette de l'exonération de taxe professionnelle et de sa durée d'application (articles 43 et 44) ;

- le rétablissement de l'article 38 bis, affectant à la collectivité territoriale de Corse le produit de la taxe générale sur les activités polluantes ;

- l'incitation à la reconstitution des titres de propriété en créant une exonération de droits de mutation à titre gratuit entre vifs pour les donations intervenant entre 2002 et 2012 et concernant des biens et droits immobiliers pour lesquels les titres de propriété n'existaient pas à la mort du défunt (article 45) ;

-  la suppression de l'article 45 bis, au motif que sa constitutionnalité peut valablement être mise en doute, et que les libertés prises par cet article avec la loi fondamentale sont, en tout état de cause, disproportionnées au regard de l'impact de la mesure proposée sur l'endettement des agriculteurs exerçant leur activité en Corse.

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  La commission spéciale a adopté le projet de loi relatif à la Corse, qui sera discuté en séance publique le 12 décembre 2001, ainsi modifié.