PRÉSENTATION DE DEUX ÉTUDES EXTÉRIEURES DEVANT LA COMMISSION DES FINANCES DU SÉNAT : POUR UNE APPROCHE RENOUVELÉE DES DÉLOCALISATIONS 

La commission des finances du Sénat, présidée par M. Jean Arthuis, (UC-UDF - Mayenne), a entendu les cabinets Ernst and Young et Katalyse sur les conclusions d'études relatives aux délocalisations qu'elle avait commandées. Celles-ci constituent la première étape d'un travail de la commission des finances du Sénat, qui se poursuivra par l'audition de chefs d'entreprises, de syndicalistes et d'universitaires, ainsi que des déplacements « sur le terrain », dont un, déjà programmé, en Inde à la fin du mois d'avril.

Les deux études proposent de renouveler l'approche en matière de délocalisations.

La première étude réalisée par le cabinet Katalyse permet ainsi d'identifier les processus en cours concernant les métiers de service. Elle montre que le phénomène se développe en France de manière insidieuse : un grand nombre d'entreprises externalisent leurs activités de services dès lors que le volume d'emplois concerné est conséquent (plus de 30 personnes), puis, par une pression accrue sur les prix, incitent leurs sous-traitants à délocaliser « à leur place ». Cette préférence pour une démarche en deux temps tient notamment au souhait d'éviter des conflits sociaux devenus difficiles à affronter. L'étude propose une vision exhaustive des délocalisations. Elle met en évidence les trois formes de délocalisations conduites par les entreprises : transfert d'un site vers un pays étranger (délocalisation pure), regroupement à l'étranger d'activités de services disséminées sur plusieurs sites en France (délocalisation diffuse) et localisation d'activités à l'étranger, alors qu'elles auraient pu l'être en France (non-localisation, qui ne prend évidemment pas en compte l'implantation dans un pays afin d'y conquérir des parts de marché). Au total, le cabinet Katalyse prévoit pour la période 2006-2010 la délocalisation de 202.000 emplois de services, soit 22 % de la création nette d'emploi salarié au cours des cinq dernières années. 80 % de ces pertes d'emplois seront concernés par des non-localisations et donc seulement une sur cinq par des délocalisations au sens strict du terme, qui sont pourtant les seules prises en compte habituellement par les économistes.

La seconde étude menée par le cabinet Ernst and Young met en évidence le lien entre l'évolution du mode de consommation des ménages et les décisions de délocaliser de certaines entreprises. Le monde de la grande consommation est marqué, d'une part, par un accroissement de l'offre, avec un nombre de magasins en augmentation, une percée du hard discount et un allongement des horaires d'ouverture et, d'autre part, par une stagnation de la demande liée au sentiment d'une baisse du pouvoir d'achat des ménages. Ce contexte produit une forte pression sur les prix et une relative indifférence quant à l'origine géographique des produits de la part des consommateurs, qui ne font plus de lien entre leurs achats et leur emploi. Il conduit à une « hyper-concurrence » entre distributeurs et à une « sur-réaction » des producteurs.

Ceux-ci, pour s'adapter au phénomène, peuvent prendre quatre décisions de gestion : gains de productivité, externalisation, délocalisation, innovation. Or, les ruptures de plus en plus fréquentes dans l'environnement de l'entreprise, liées à la fois à des évolutions rapides des conditions des marché et à une puissance publique modifiant en permanence les « règles du jeu », notamment en matière fiscale, contraignent les dirigeants à des solutions de court terme, qui prennent la forme de délocalisations. L'étude montre ainsi que le fait de ne pas délocaliser, dans cette situation de « tyrannie du court terme », pourrait être perçue comme une erreur de gestion, susceptible de menacer la pérennité de l'entreprise.

Le cycle d'auditions, deuxième étape du travail de la commission des finances sur les délocalisations, se déroulera comme suit[1] :

Mardi 22 mars à 17h30 :

M. Guillaume Sarkozy, président de l'Union des industries textiles

Mercredi 23 mars à 15h00 :

M. Jean-Claude Karpeles, délégué général de la fédération des industries électriques, électroniques et de communication

Mercredi 23 mars à 16h00 :

M. Michel Godet, professeur au conservatoire national des arts et métiers

Mercredi 23 mars à 17h00 :

M. François Branche, co-président et M. Jean-Paul Deneuville, délégué général de la fédération nationale des transports routiers

Mardi 29 mars à 16h00 :

MM. Lionel Fontagné et Jean-Hervé Lorenzi, auteurs d'un rapport pour le Conseil d'analyse économique

Mardi 29 mars à 17h00 :

M. Jean-Louis Levet, chargé de mission auprès du  commissaire général au plan

Mercredi 30 mars à 10h00 :

M. Jean-Louis Servent, président directeur général du groupe Lapeyre

Mercredi 6 avril à 9h30 :

M. Hervé Couturier, vice-président de Business Objects

Mercredi 12 avril à 16h00 :

M. Michel-Edouard Leclerc, président des centres distributeurs Leclerc

Jeudi 13 avril à 9h30 :

Bernard Thibault, secrétaire général de la CGT

Au terme de ces auditions, la commission entend proposer une série de mesures, relevant de la responsabilité des pouvoirs publics, pour accroître la compétitivité du territoire français et des entreprises qui y sont implantées, redonner de la consistance à la croissance et lutter efficacement contre le chômage. Dans cette perspective, le débat ouvert par la commission des finances du Sénat sur la réforme des prélèvements obligatoires, notamment la problématique de la « TVA sociale », doit être approfondi et enrichi.

Contact presse : Stéphanie Garnier 01 42 34 25 12 s.garnier@senat.fr


[1] Le mardi 15 mars à 16 heures, a déjà été auditionné M. Jean-Louis Beffa, Président directeur général de Saint Gobain