Réunie le mercredi 10 juin 2015 sous la présidence de M. Alain MILON (Les Républicains – Vaucluse), la commission des affaires sociales a examiné, sur le rapport de Mme Catherine PROCACCIA (Les Républicains – Val-de-Marne), le projet de loi n° 476 (2014-2015) relatif au dialogue social et à l’emploi.

Regrettant le délai d’examen insuffisant dont elle a disposé, la commission des affaires sociales du Sénat a estimé que le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale le 2 juin 2015, ne constitue pas la réforme structurelle du dialogue social dont le marché du travail français a besoin et qu’il ne corrige pas les insuffisances du modèle français en la matière. Néanmoins, considérant qu’il s’agit d’un texte de simplification comportant plusieurs mesures qui, à défaut d’accord entre les partenaires sociaux, constituent le plus petit dénominateur commun entre leurs positions, elle l’a modifié en adoptant 66 amendements, dont 63 de son rapporteur.

À l’article 1er, qui prévoit la création en 2017 de commissions paritaires régionales interprofessionnelles (CPRI) pour représenter les salariés et les employeurs des TPE, la commission, sur proposition de son rapporteur, a rejeté la logique d’une structure imposée par la loi et confié aux partenaires sociaux, par accord national ou, à défaut, régional, le soin de les mettre en place. Face aux craintes exprimées par les TPE de voir les CPRI s’immiscer dans leur fonctionnement quotidien, la commission a rétabli le texte initial du Gouvernement en leur ôtant toute mission de médiation et en réaffirmant le principe selon lequel leurs membres ne peuvent accéder à l’entreprise, sauf autorisation expresse de l’employeur et moyennant un délai de prévenance de huit jours. Pour la mise en œuvre de cet article, les partenaires sociaux nationaux devront ouvrir une négociation dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi. À défaut d’accord, les organisations  syndicales et patronales devront négocier dans chaque région avant le 1er juillet 2017.

Concernant la présence de représentants des salariés dans les conseils d’administration ou de surveillance des grandes entreprises (articles 7 et 7 bis), la commission a souhaité en revenir à l’esprit et à la lettre de l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013. Elle a estimé que moins de deux ans après la création de ce dispositif et sans évaluation de son action ni étude d’impact préalable des modifications envisagées, il était prématuré de modifier en profondeur leur régime juridique.

Tout en regrettant qu’elle ne soit pas plus ambitieuse, la commission a apporté plusieurs modifications à la réforme des institutions représentatives du personnel (IRP) proposée par le texte afin d’apporter une réelle simplification pour les chefs d’entreprise. Elle a notamment limité la possibilité pour les élus suppléants de participer aux réunions des IRP (articles 8 et 12) et a renforcé l’encadrement des mécanismes de cumul des heures de délégation et de mutualisation de celles-ci entre plusieurs élus (article 8).

Concernant les seuils, omniprésents dans le débat public mais quasiment absents du texte, la commission, sur proposition de son rapporteur, a adopté des dispositions proches de celles que le Sénat avait introduites dans le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques afin de mettre en place, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans, un mécanisme de lissage dans le temps des obligations liées au franchissement des seuils de 11 et 50 salariés (article 8 A). En outre, les règles de calcul pour créer ou supprimer un comité d'entreprise ont été simplifiées.

La commission a souhaité que les membres élus titulaires du comité d’entreprise puissent définir eux-mêmes, grâce à un accord spécifique conclu avec l’employeur, les modalités concrètes de mise en œuvre des trois nouvelles procédures d’information et de consultation de leur institution (article 13). La commission a également supprimé le contrôle des commissions paritaires de branche pour les accords signés par des élus du personnel non mandatés (article 15).

Sur proposition de M. Jean-Marc GABOUTY (UDI-UC – Haute-Vienne), la commission des affaires sociales a par ailleurs supprimé l’article 19 bis, qui visait à faire fixer par décret les conditions dans lesquelles les pathologies psychiques pourraient être reconnues comme maladies professionnelles par les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP).

S’agissant du compte personnel de prévention de pénibilité, la commission a donné la possibilité aux organisations professionnelles de branche d'élaborer unilatéralement les référentiels qui aideront les employeurs à mesurer les facteurs d’exposition les plus difficiles à évaluer. Alertée par de nombreuses entreprises, elle a également souhaité que l’homologation de ces référentiels par les ministères concernés n’entraîne pas de dérive dans les dépenses du fonds chargé de financer ce dispositif (article 19 quater).

À l’article 20, relatif aux intermittents du spectacle, la commission des affaires sociales a remplacé le dispositif prévu pour l’élaboration des règles des annexes 8 et 10, source de nombreuses incertitudes juridiques, par une concertation renforcée. Elle a ainsi obligé les partenaires sociaux en charge de négocier la convention d’assurance chômage à recueillir, en amont et au cours de la négociation, les propositions des partenaires sociaux représentatifs de l’ensemble de la production cinématographique, de l’audiovisuel et du spectacle sur l’évolution de ces annexes. Par ailleurs, sur une proposition conjointe du rapporteur et de M. Alain DUFAUT (Les Républicains – Vaucluse), rapporteur pour avis de la commission de la culture, le comité d’expertise se voit attribuer une nouvelle mission, celle d’assurer le suivi de ces deux annexes, à la demande exclusive des partenaires sociaux concernés.

Concernant le titre IV consacré à la création de la prime d’activité (articles 24 à 29), la commission a, sur proposition de son rapporteur, réécrit les dispositions relatives aux modalités de calcul de la prestation afin d’en clarifier et préciser la rédaction. À l’initiative de M. Albéric de MONTGOLFIER (Les Républicains – Eure-et-Loir), rapporteur général de la commission des finances, elle a adopté un amendement visant à ce que l’impact budgétaire de la réforme soit évalué de façon précise.

Le projet de loi sera examiné par le Sénat en séance publique
à partir du lundi 22 juin 2015.

Juliette ÉLIE
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