Les violences répétées durant six mois en marge des gilets jaunes ont considérablement accentué les fragilités d’un grand nombre d’artisans et de commerçants des centres-villes. Ces derniers sont les grands oubliés des mesures annoncées par l’État pour sortir de la crise, qui ne sont pas à la hauteur des nombreux préjudices graves dont le tissu économique local est victime. Pourtant, ces entreprises et leurs salariés ont été pendant six mois harcelés par les casseurs, du fait des défaillances de l’État dans le maintien de l’ordre public.

Les conséquences économiques de ces violences sont bien plus larges et nombreuses que les dégâts matériels, indemnisés à hauteur de 220 millions d’euros : elles sont avant tout à l’origine d’un "traumatisme psychologique" pour les salariés et d’une baisse d’environ 30% du chiffre d’affaires sur les six premiers mois du mouvement. Cette chute atteint même 70 % le samedi, plus grosse journée de la semaine.

Au-delà, elles entraînent indirectement de nombreux préjudices, recensés ici (PDF - 388 Ko) , dont les conséquences vont se faire sentir au second semestre : assèchement de la trésorerie, promotions désespérées, ventes de stocks à prix cassés, ruptures d’approvisionnement, retards de paiement aux fournisseurs, dégradation des relations bancaires. Pourtant, face à l’ampleur de ce phénomène, le Gouvernement a largement opté pour des demi-mesures, simples rappels de dispositifs existants. "Cette réponse traduit une grande incompréhension de la gravité des conséquences de ces violences sur des centres-villes déjà en difficultés", selon Mme Primas, Présidente de la commission des affaires économiques.

Au terme d’un cycle d’auditions ayant permis d’entendre environ 45 personnes et de recevoir 30 contributions écrites, le groupe de travail de la commission des affaires économiques constitué pour étudier ces conséquences émet dix recommandations pour mieux protéger les entreprises et mieux les indemniser .

D’abord, toutes les mesures du monde resteront inefficaces tant que l’État n’assure pas le respect de l’ordre public. Le groupe recommande ainsi de se saisir des propositions équilibrées formulées par la Commission des lois du Sénat le 10 avril 2019 visant à renforcer le maintien de l’ordre. En cas de manifestation violente, il importe que la protection des entreprises soit assurée efficacement sur tout le territoire : un mécanisme de prévention rapide par la préfecture et les collectivités, intervenant le plus tôt possible est nécessaire. Afin de ne pas les pénaliser inutilement, il convient également de mieux cibler les périmètres d’interdiction de circuler.

Ensuite, l’indemnisation des artisans et commerçants doit être rapide et efficace. Afin qu’elle soit adaptée aux réalités du terrain et à la gravité des préjudices, le groupe de travail propose un fonds national de compensation des pertes d’exploitation en cas d’atteintes répétées et violentes à l’ordre public.

Plusieurs mesures nationales de soutien ne font que repousser le problème. Pour le groupe de travail, afin de soutenir véritablement les artisans et commerçants déjà impactés, une exonération fiscale sous conditions de certains impôts devrait être envisagée. Une subvention publique pour la souscription de la garantie d’assurance "perte d’exploitation sans dommage matériel" permettrait en outre de renforcer la couverture de ces risques.

Selon Mme Évelyne Renaud-Garabedian, présidente du groupe de travail, "une impression de "deux poids deux mesures" se dégage quand on compare les dispositifs de soutien annoncés par le Gouvernement aux 17 milliards d’euros qu’il s’apprête à dépenser pour répondre à la crise. Les artisans et commerçants, victimes de tous ces préjudices, ne doivent pas être oubliés alors qu’ils sont la force du tissu économique local".

Le rapport est consultable ici , et sa synthèse à cette adresse .

Le billet de l'Espace presse

La commission des affaires économiques est présidée par Mme Sophie Primas (Les Républicains - Yvelines).

La présidente du groupe de travail "Conséquences économiques des violences commises en marge du mouvement des gilets jaunes et prise en compte par les pouvoirs publics" est Mme Évelyne Renaud-Garabedian (Les Républicains - Français établis hors de France).

Mathilde DUBOURG
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