Question de M. ROUX Olivier (Français établis hors de France - UC) publiée le 07/07/1988

M. Olivier Roux attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre des affaires étrangères, chargé de la francophonie, sur la notion d'" espace économique francophone ", thème de la quatrième réunion du Haut Conseil de la francophonie qui s'est tenue à Paris du 26 au 28 janvier 1988. Si la francophonie, considérée tout d'abord comme un vaste domaine culturel, est entrée dans la politique avec les sommets de Paris et de Québec, aujourd'hui, les préoccupations économiques - dont, notamment, la dégradation des termes de l'échange - lui donnent sa troisième dimension. Il lui demande en conséquence de bien vouloir lui indiquer les propositions ou recommandations qui ont pu être émises à l'issue des débats du Haut Conseil, en vue de renforcer la solidarité entre les divers pays de la Communauté francophone.

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Réponse du ministère : Francophonie publiée le 27/10/1988

Réponse. - Le haut conseil de la francophonie s'est en effet réuni, du 26 au 28 janvier 1988, pour s'interroger sur les possibilités d'émergence d'un espace économique francophone. C'était là une idée neuve par rapport à la vision expressément linguistique et culturelle qu'avaient de la francophonie la plupart de ses promoteurs ou de ses observateurs depuis vingt-cinq ans. La francophonie ne constitue certes pas encore une réalité économique cohérente et continue de se heurter à de fortes inégalités de développement, ainsi qu'à la grande disparité des échanges commerciaux, industriels et financiers. Il lui faut néanmoins faire face à des enjeux et à des urgences d'ordre économique, y compris, et même surtout, dans le secteur culturel. Cette nouvelle donne de la francophonie est en particulier déterminée par la volonté politique affirmée lors des sommets de Paris, en février 1986, et de Québec, en septembre 1987, par l'exigence communautaire inhérente aux relations internationales contemporaines, par l'impératif de la modernité lié à notre époque de vive compétition scientifique, technique et économique et, enfin, bien entendu, par la loi du marché qui oblige à redéfinir les règles de la production et de l'échange, singulièrement dans le domaine des industries culturelles. Ainsi, la construction d'un ensemble économique francophone cohérent, qui soit à la fois un espace de solidarité, d'échange et de création, est une oeuvre indispensable mais de longue haleine. Elle requiert un plan d'action à long terme et de nouvelles règles du jeu qui concilient les logiques du marché, de la coopération et de la pluralité, l'esprit d'entreprise et celui de partage. Dans cette perspective, il apparaît utile au haut conseil de la francophonie de prendre dès à présent, ou à brève échéance, des initiatives destinées à l'équipement en instruments d'information, à favoriser la concertation multilatérale, à impliquer le secteur privé et à réconcilier culture et économie. Il importe, tout d'abord, de disposer d'instruments de mesure et d'information, qu'il s'agisse d'appareils statistiques, d'organes de presse, de programmes ou de filières de formation, de banques de données. En ce sens, il serait tout particulièrement souhaitable que la dimension francophone soit prise en compte par les instituts statistiques nationaux et qu'un observatoire économique permanent de la francophonie soit progressivement mis en place. Il apparaît également nécessaire de dynamiser les relations multilatérales francophones, à partir des acquis de la coopération bilatérale et d'une claire perception des intérêts mutuels. Ainsi conviendrait-il d'imaginer une procédure de concertation, telle que la réunion des ministres francophones de l'économie et des finances, pour traiter notamment des questions de développement en vue des grands rendez-vous économiques internationaux. Cet effort d'harmonisation pourrait également être conduit sur le plan régional. La volonté de décentralisation affirmée en France doit pouvoir se traduire par une implication accrue des régions, en particulier d'outre-mer, dans la coopération internationale, avec naturellement pour limite la cohésion de la politique étrangère du pays. Il est tout aussi indispensable de mobiliser la société civile et, notamment, d'impliquer davantage les différents acteurs socio-économiques. Il n'est pas question de minimiser le rôle incitatif de l'Etat mais il s'agit d'élaborer et de mettre en oeuvre une véritable stratégie coopérative de développement francophone. Nombreuses sont les voies à explorer en direction des nouvelles formes de partenariat et des divers mécanismes d'encouragement à la coopération industrielle entre plus de deux entreprises francophones du Nord et du Sud. Une telle stratégie pourrait utilement s'appuyer sur la constitution de parcs technologiques, de jumelages-coopération et d'une union internationale des chambres de commerce et d'industrie francophones. L'homme de création lui-même ne peut ignorer l'économie pas plus que l'homme d'entreprise ne peut faire l'impasse sur la culture, mais la voie est étroite entre la mercantilisation de la culture et l'art pour l'art. Pour faire face aux graves problèmes de production, de promotion et de diffusion que connaissent nombre d'industries culturelles francophones, l'idéal serait probablement de s'orienter vers un marché commun francophone des biens culturels. C'est là cependant un objectif encore lointain qui suppose en particulier de préciser les possibilités de compatibilité avec le Marché unique européen.A plus court terme, il serait essentiel de créer une fondation de la francophonie ainsi que le haut conseil le recommande depuis 1985, de lancer un " Eurêka francophone " pour les industries culturelles, notamment celles de l'information, de la communication et de la langue, et d'instituer une conférence périodique tripartite entre représentants de l'administration, créateurs, auteurs ou chercheurs et industriels ou entrepreneurs. Enfin, pour sensibiliser l'opinion publique et les milieux économiques à la francophonie, le haut conseil propose de créer l'événement par l'organisation d'un " Paris-Dakar de la francophonie ", à l'occasion de la troisième conférence des chefs d'Etat et de gouvernement des pays ayant en commun l'usage du français, prévue à Dakar en mai 1989. ; nouvelles formes de partenariat et des divers mécanismes d'encouragement à la coopération industrielle entre plus de deux entreprises francophones du Nord et du Sud. Une telle stratégie pourrait utilement s'appuyer sur la constitution de parcs technologiques, de jumelages-coopération et d'une union internationale des chambres de commerce et d'industrie francophones. L'homme de création lui-même ne peut ignorer l'économie pas plus que l'homme d'entreprise ne peut faire l'impasse sur la culture, mais la voie est étroite entre la mercantilisation de la culture et l'art pour l'art. Pour faire face aux graves problèmes de production, de promotion et de diffusion que connaissent nombre d'industries culturelles francophones, l'idéal serait probablement de s'orienter vers un marché commun francophone des biens culturels. C'est là cependant un objectif encore lointain qui suppose en particulier de préciser les possibilités de compatibilité avec le Marché unique européen.A plus court terme, il serait essentiel de créer une fondation de la francophonie ainsi que le haut conseil le recommande depuis 1985, de lancer un " Eurêka francophone " pour les industries culturelles, notamment celles de l'information, de la communication et de la langue, et d'instituer une conférence périodique tripartite entre représentants de l'administration, créateurs, auteurs ou chercheurs et industriels ou entrepreneurs. Enfin, pour sensibiliser l'opinion publique et les milieux économiques à la francophonie, le haut conseil propose de créer l'événement par l'organisation d'un " Paris-Dakar de la francophonie ", à l'occasion de la troisième conférence des chefs d'Etat et de gouvernement des pays ayant en commun l'usage du français, prévue à Dakar en mai 1989.

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