Question de M. DÉSIRÉ Rodolphe (Martinique - RDSE) publiée le 14/02/1991

M. Rodolphe Désiré expose à M. le ministre des départements et territoires d'outre-mer l'inquiétude qui règne chez les producteurs bananiers de Martinique et de Guadeloupe suite au dépassement des quotas d'exportation accordés aux producteurs camerounais en 1962, dépassement qui a conduit en décembre à un effondrement des cours préjudiciable aux planteurs des Antilles françaises. La prise de contrôle du secteur bananier du Cameroun par des multinationales américaines a contribué, en raison d'une politique de dumping facilitée par un coût de production largement inférieur à celui des producteurs des Antilles, à déstabiliser le marché français, concurrençant ainsi directement, et d'une manière déloyale, la banane de Martinique et de Guadeloupe. Selon un communiqué diffusé récemment dans plusieurs organes de presse, les pertes enregistrées s'élèveraient déjà en trois mois à plus de 6 milliards de francs. Il regrette que le Gouvernement français n'ait pas réagi plus tôt et plus vite aux importations anarchiques en provenance du Cameroun. En conséquence, il lui demande quelles mesures le Gouvernement français compte prendre afin de remédier à une telle situation. A cet égard, il serait sans doute souhaitable de surveiller étroitement le volume de bananes exporté par le Cameroun car il paraît probable, si jamais les réactions de la France ne sont pas fermes en la matière, que cet exemple risque d'être suivi par la Côte-d'Ivoire. Par ailleurs, il souhaiterait savoir si les informations selon lesquelles la Banque centrale de prêts française aurait aidé à la réorganisation du secteur bananier du Cameroun, aujourd'hui largement dominé par les multinationales américaines, sont exactes.

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Réponse du ministère : Départements et territoires d'Outre-mer (DOM-TOM) publiée le 20/06/1991

Réponse. - Le dépassement, par le Cameroun, des quantités de bananes importées sur le marché français métropolitain a fait l'objet de plusieurs interventions du Gouvernement. Il a été tout d'abord décidé qu'un télégramme diplomatique serait envoyé par le ministère des affaires étrangères à l'ambassade de France à Yaoundé, aux fins d'attirer tout particulièrement l'attention du gouvernement camerounais. Ce télégramme fut envoyé le 16 novembre 1990. Il reprend largement les principes ayant déterminé la répartition du marché français (deux tiers Antilles, un tiers Afrique) et insiste pour que l'Afrique respecte les engagements antérieurs, en faisant valoir en particulier que les aides consenties par la France en faveur du secteur bananier du Cameroun l'ont été dans le but d'encourager le développement de la production, en vue de la conquête de nouveaux marchés et non pour perturber les marchés actuels. Depuis lors, le ministère des D.O.M.-T.O.M. a été amené à rappelerla détermination du gouvernement français à faire respecter le régime actuel. Dès janvier, il a été pris acte de la volonté de l'association des producteurs camerounais, formulée dans un télex au comité interprofessionnel bananier, de se limiter désormais à la part de marché qui lui est allouée et de se conformer aux règles du C.I.B. ; indiqué que la France était disposée à négocier un nouvel accord interprofessionnel, mais excluait que la discussion se fasse sous la pression d'un quelconque ultimatum ; souligné qu'en cas de nouvelle violation, les mesures réglementaires de limitation des exportations seraient prises ; rappelé aux producteurs camerounais que leurs intérêts à long terme et ceux des producteurs des D.O.M. étaient identiques et proposé une concertation en vue de la préparation de la future organisation communautaire du marché de la banane. La réaffirmation des principes de la décision de 1962 a permis de rétablir l'équilibre immédiatement sur les marchés. Pour ce qui est de l'avenir de la production des D.O.M. dans le cadre du grand marché européen, M. Le Pensec a proposé, le 29 janvier 1991 à la commission des Communautés européennes, au nom de la France, un schéma d'organisation de nature à sauvegarder les productions bananières, essentielles pour les départements français des Antilles. Il faudra, bien sûr, que parallèlement les producteurs et les acteurs de la filière assurent une meilleure productivité, améliorent la qualité et acquièrent des parts fermes de marchés. La proposition d'organisation tient en quatre points : un contingentement des bananes originaires des pays tiers, sur l'ensemble desquelles serait appliqué un droit de douane de 20 p. 100 et une taxe complémentaire, qui serait restituée aux économies vivrières des pays d'origine ; les flux traditionnels des A.C.P. seraient maintenus en exemption de droit de douane et de toute autre taxe. Mais, aux quantités excédant ces flux, une taxe serait appliquée. Elle serait inférieure à la taxe appliquée aux pays tiers. Elle pourrait être également restituée aux économies vivrières des pays d'origine ; le privilège de la R.F.A. d'importer à droit nul des bananes en provenance des pays tiers serait supprimé ; le montant des droits de douane permettrait de financer le développement ou la reconversion des productions communautaires, ainsi que des aides aux revenus.

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