Question de M. BOUSCH Jean-Eric (Moselle - RPR) publiée le 12/09/1991

M. Jean-Eric Bousch appelle l'attention de M. le ministre des affaires sociales et de l'intégration sur l'application de l'article 61 du code de la nationalité française aux personnes dont le conjoint n'a pas sa résidence en France alors qu'elles en sont séparés mais que, du fait de la législation du pays d'origine, elles ne peuvent obtenir un divorce et que de plus la procédure de séparation en vigueur dans ce pays d'origine est contraire à l'ordre public français. En effet, un ressortissant algérien vivant depuis très longtemps en France, séparé de son épouse restée en Algérie, ne peut obtenir la nationalité française dans la mesure où la résidence hors de France de l'épouse ne permet pas de le considérer comme fixé en France au sens de l'article 61 du code de la nationalité. Or, cet Algérien ne peut obtenir le divorce en Algérie et toute autre procédure de séparation de droit musulman est contraire à l'ordre public français. Il lui demande quelles mesures il entend prendre pour résoudre de telles situations dans lesquelles se trouvent les anciens harkis qui se sont battus pour la France et qui ne souhaitent pas retourner en Algérie.

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Réponse du ministère : Affaires sociales publiée le 19/03/1992

Réponse. - Il est confirmé à l'honorable parlementaire que, d'après une jurisprudence bien établie du Conseil d'Etat (C.E. 15 avril 1988 - ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale c/Mme Karim n° 71.485), le candidat à la naturalisation dont le conjoint réside à l'étranger ne justifie pas de la condition de résidence au sens de l'article 61 du code de la nationalité française. Il incombe donc au candidat à la naturalisation ou à la réintégration dans la nationalité française d'apporter la preuve de la dissolution de son mariage avec son conjoint résidant à l'étranger. Or la validité en France des dissolutions de mariage intervenues en pays de droit musulman peut effectivement s'avérer a priori d'appréciation délicate, notamment quand la répudiation est la seule procédure de séparation des époux prévue. Cependant, grâce à l'intervention des conventions internationales (ex. convention franco-marocaine du 10 août 1981) et à l'évolution de la jurisprudence de la Cour de cassation, le règlement des situations des ressortissants des pays de droit musulman souhaitant divorcer est facilité. C'est ainsi que la Cour de cassation admet désormais la validité des actes de répudiation de ces ressortissants dans l'ordre juridique français. Ces actes de répudiation ne sont pas réputés contraires à l'ordre public français dès lors qu'ils ont été réalisés à l'étranger, selon les formes prévues par la loi étrangère, qu'ils ne sont pas entachés de fraude et que l'épouse a pu faire valoir ses moyens de défense (Cass. Civ. 1re chambre, 18 décembre 1979, Revue DIP 1981, p. 88 - Arrêt DAHAR et Cass. Civ., 1re Chambre, 6 juin 1990, Revue DIP 1991, p. 894, Arrêt AKLA). Par ailleurs, certains pays de droit musulman ont institué une procédure judiciaire de divorce. Il en est ainsi de l'Algérie qui, aux termes des articles 48 et suivants de son code de la famille (loi n° 84-11 du 9 août 1984), prévoit que le divorce peut notamment intervenir par la volonté de l'époux. Les jugements intervenant soit dans ce cadre sont alors applicables en France dans les conditions prévues par l'article 509 du nouveau code de procédure civile, soit dans le cadre de conventions bilatérales (ex. convention franco-algérienne du 27 août 1964). En outre, il résulte de l'article 1070 du nouveau code de procédure civile qu'un étranger résidant en France peut engager une procédure de divorce devant le tribunal de son domicile en France si ses enfants habitent avec lui en France. Dès lors, il n'existe aucun obstacle juridique tant au regard du droit de son pays que du droit français, à ce qu'un ressortissant algérien puisse obtenir et voir reconnaître la dissolution de son union et satisfaire par là même aux exigences de l'article 61 du code de la nationalité française. Lorsque le postulant justifie d'une séparation de fait d'une durée relativement longue (10 ans au minimum) la recevabilité de sa demande de naturalisation ou de réintégration dans la nationalité française est également admise par l'administration au regard du texte précité. Cette mesure devrait permettre éventuellement le règlement de la situation d'un certain nombre de harkis.

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